JTO N°1/2016

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JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE

1ÈRE PARTIE : MISE AU POINT MACULOPATHIE AUX ANTIPALUDEENS DE SYNTHESE : MODALITÉS ET PROTOCOLE DE DÉPISTAGE EN 2105 ............... 4 Mahmoud A, Ksiaa-Khairallah I, Ammari W, Hani Med-Salah, Bouzayane M, Messaoud R

2ÉME PARTIE : ARTICLES ORIGINAUX COMPARAISON DU PÉRIMÈTRE D'HEIDELBERG ET DU PÉRIMÈTRE D'HUMPHREY ET DU FDT CHEZ DES PATIENTS GLAUCOMATEUX. ............................................................................................................................................................................. 12 Wathek Cheima, Khallouli Asma, Maalej Afef, Nordmann JP*, Rannen Riadh. LES OCCLUSIONS ARTÉRIELLES RÉTINIENNES AU COURS DES VALVULOPATHIES: À PROPOS DE 7 CAS .................... 18 Saadouli D, Marzouki M, Yahyaoui S, Mekni M, Lahmar A, Belaaj M, El Afrit MA LES ABCÈS DE CORNÉE LIÉS AU PORT DE LENTILLES DE CONTACT .................................................................................... 22 Sana Khochtali, Raouadha Attia, Asma Bouabana, Ahmed Mahjoub, Salim Ben Yahia, Sonia Zaouali, Moncef Khairallah LA PLACE DE LA RADIOTHÉRAPIE DANS LA GESTION DES TUMEURS MALIGNES DES PAUPIÈRES ................................. 28 AMEL CHEBBI, AICHA ROUATBI, MERIEM BEN SALEM, LOTFI JALLALI, GHASSEN BEN FREDJ, HATEM FRIKHA*, HEDI BOUGUILA PATIENT GLAUCOMATEUX ET OBSERVANCE THÉRAPEUTIQUE : À PROPOS DE 80 CAS. ................................................... 35 Ben Amor S, Chaabène M, Ennouri A, Sakka M, Ben Mrad A, Sellami D, Feki J. LES UVÉITES DE L’ENFANT: PROFIL CLINIQUE ET ÉTIOLOGIQUE AU CHU FARHAT HACHED DE SOUSSE ...................... 39 Knani Leila, Zina Sourour, Yassine Trifi, Ben Hadj Salah Wassim, Mahjoub Hechmi, Ben Hadj Hamida Fafani

3ÉME PARTIE : CAS CLINIQUES FUNGAL KERATITIS CAUSED BY ACREMONIUM: A CASE REPORT AND REVIEW OF THE LITERATURE ............................ 46 Malek I*, Sayadi J*, Romdhane O*, Mekni M*, Fekih O*, Zgholli H* , Zghal I*, Ben Ayed N**, Nacef L* NEVRITE OPTIQUE DANS LE CADRE D’UNE ENCEPHALOMYELITE AIGUË DISSEMINEE : A PROPOS DE 2 CAS ............... 51 Rim Kahloun, Sourour Zina, Imen Ksiaa, Nesrine Abroug, Bechir Jelliti, Sonia Zaouali, Salim Ben Yahia, Moncef Khairallah SYNDROME DE BLÉPHAROPHIMOSIS PTÔSIS ÉPICANTHUS INVERSUS : À PROPOS D’UNE FAMILLE .............................. 56 W.Zbiba, A.Baba, E.Kallel, E.Bouayed, N.BenAbdessalem, I.Elleuch, M.Lahdhiri CALCIFICATION CHOROIDO-SCLÉRALE IDIOPATHIQUE : À PROPOS D’UN CAS ................................................................... 59 Ammous I, Letaif I, Zhioua I, Bouayed E, Ben yakhlef A, Mili Boussen I, Errais K, Zhioua R. ACUTE ESOTROPIA AND OPTIC NEUROPATHY REVEALING AN ORBITAL RHABDOMYOSARCOMA .................................. 64 J Brour, N Zerai, M Ouedreni, B Ben Romdhane, Chéour M UNILATERAL PROPTOSIS REVEALING A FRONTO-ETHMOIDAL MUCOCELE .......................................................................... 68 Lajmi Houda1, Ben Jalel Wadii1, Hssairi Asma1, Ben Yakhlef Mohamed Achraf1, Ben Issa Soumaya1, Bekir Kais1, Hchicha Amani2, Turki Senda2, Hmaied Wassim1, El Fekih Lamia1

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Mise Au Point

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MACULOPATHIE AUX ANTIPALUDEENS DE SYNTHESE : MODALITÉS ET PROTOCOLE DE DÉPISTAGE EN 2105 Mahmoud A, Ksiaa-Khairallah I, Ammari W, Hani Med-Salah, Bouzayane M, Messaoud R

INTRODUCTION La maculopathie toxique secondaire à l’utilisation chronique des antipaludéens de synthèse fut décrite pour la première fois par Shearer en 1967 [1]. Sa gravité vient de l’irréversibilité des lésions, voire de leur aggravation ou même de leur apparition après arrêt du traitement chez certains patients. Compte tenu de l’absence de facteurs prédictifs de l’atteinte maculaire et de l’absence jusqu’à nos jours de moyens thérapeutiques efficaces font du dépistage l’outil le plus important de la prise en charge.

ANTIPALUDEENS DE SYNTHESE Malgré la diminution du taux du paludisme dans le monde, les antipaludéens de synthèse demeurent une classe thérapeutique assez prescrite par différents spécialistes. Ils sont prescrits dans le lupus érythémateux disséminé, le syndrome de Gougerot Sjôgren, la dermatomyosite, la licite printanière et dans d’autres pathologies rhumatismales. L’atteinte rétinienne peut être secondaire à l’hydroxychloroquine (HCQ) (Plaquenil®) ou à la chloroquine (CQ) (Nivaquine®) mais à des seuils différents.

MECANISMES DE TOXICITE MACULAIRE La chloroquine et l’hydroxychloroquine, substances présentant une affinité pour la mélanine, s’accumulent facilement au niveau des structures pigmentées de l’oeil : iris,

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choroïde et surtout dans l’épithélium pigmentaire rétinien. Cependant, plusieurs mécanismes de la maculopathie sont évoqués : la chloroquine semblerait d’abord se fixer au niveau des corps des cellules ganglionnaires laissant intactes les autres couches de la rétine, puis se fixerait ensuite relativement rapidement sur les photorécepteurs, finalement sur l’épithélium pigmentaire et sur la choroïde plus tardivement [2]. L’atteinte débute généralement dans la région périfovéolaire (entre 2 et 10 degrés autour de la fovéa) où la densité de pigments est la plus grande. Il est à remarquer que les corps des cellules ganglionnaires ont une densité maximale sur les 12 degrés centraux autour de la fovéa. Cette disposition anatomique pourrait expliquer que leur altération, dans un premier temps, se manifeste dans la zone périfovéale, avec conservation du fonctionnement de la zone fovéolaire.

FACTEURS DE RISQUE Le premier facteur de risque sur lequel la plupart des auteurs s’accordent est la dose cumulée d’APS. Celle-ci est de 1000g pour l’HCQ et de 460 g pour la CQ [3]. La dose quotidienne seuil a été étudiée par certains auteurs mais elle semble de faible intérêt. Les autres facteurs de risque sont l’âge du patient, l’insuffisance rénale ou hépatique. Une pathologie maculaire préexistante est considérée aussi comme facteur de risque.


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ETUDE CLINIQUE Les patients, atteints de maculopathie aux APS, peuvent être longtemps asymptomatiques. Certains peuvent se plaindre de difficultés à la lecture, de photophobie ou de scotomes. Des anomalies cliniques détectables signent un stade déjà avancé. Classiquement on définit 3 stades de la maladie :  Stade d’imprégnation ou de prémaculopathie.  Stade d’intoxication ou de maculopathie patente.  Stade avancé ou de maculopathie avérée.

1- Stade de prémaculopathie Il est caractérisé par un examen clinique normal. Le patient reste longtemps asymptomatique, l’acuité visuelle est normale ainsi que l’examen du fond d’œil. Les anomalies résident dans le champ visuel (CV) et les explorations paracliniques. Cette phase correspond à la période dite « d’imprégnation », dont la durée est très variable selon la sensibilité propre de chaque individu. L’atteinte est réversible à l’arrêt du traitement voire à la diminution de la posologie [4]. D’où l’intérêt de mettre en évidence ces modifications débutantes du fonctionnement périfovéolaires pour éviter le passage à la phase «d’intoxication » avec la survenue d’une maculopathie cécitante. L’étude du champ visuel semble être un bon examen pour apprécier l’atteinte périfovéolaire au stade préclinique. C’est d’ailleurs l’un des moyens de surveillance sur lesquels s’accordent plusieurs auteurs. La réalisation d’une périmétrie statique permet d’explorer les dix à quinze degrés centraux (10). On peut ainsi quantifier la sensibilité rétinienne des différentes zones maculaires (fovéa et périfovéa). Ce test permet de révéler des

scotomes paracentraux relatifs (figure 1), pouvant être les premiers signes de toxicité maculaire [5].

Figure 1 : Champs visuel 10-2 montrant des scotomes paracentraux avec préservation du seuil fovéolaire.

L’éléctrorétinographie multifocale (ERG-mf) est un examen qui étudie le fonctionnement du pôle postérieur. En cas de maculopathie toxique aux APS il montre une diminution de l’amplitude de l’onde P 50 dans les zones parafovéolaires (Figure 2). Ces anomalies sont spécifiques et précédent les modifications du champ visuel [6].

Figure 2: ERG m-f Montrant une diminution de l’amplitude de l’onde P 50 dans les zones parafovéolaires.

L’image donnée par la tomographie par cohérance optique (OCT) mode Spectral Domain a été étudiée par certains auteurs et montre une altération précoce de la ligne de jonction des segments internes et externes des photorécepteurs périfovéolaires (ligne IS/OS

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ou zone ellipsoïde) (Figure 3) qui constitue un signe précoce, avant les anomalies au CV. Toutefois sa spécificité reste non encore étudiée [5].

Figure 3: Altération périfovéolaire de la ligne ellipsoïde en OCT S-D.

L’autofluorescence rétinienne est un examen ayant pour avantage d’être rapide et non invasif. Les altérations de l’épithélium pigmentaire rétinien se traduisent par une diminution de l’autofluorescence. Les anomalies des photo-récepteurs par contre, se traduisent par une augmentation de celle-ci [6]. A ce stade elle montre un aspect marbré ou tacheté de la macula péricentral (Figure 4).

Figure 4: Aspect marbré ou tacheté de la macula péricentral au clichée d’autofluorescence.

2- Stade de maculopathie patente C’est malheureusement souvent à ce stade que le diagnostic est posé. Il est caractérisé par l’apparition d’un granité périfovéolaire au niveau de l’épithélium pigmentaire et par la perte du reflet fovéolaire. On a une perte de la précision des limites de la macula, avec un aspect dit « en bave d’escargot » (Figure 5).

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Figure 5 : Aspect de maculopathie en en bave d’escargot au FO.

L’examen du champ visuel 10-2 met en évidence un scotome annulaire péricentral, responsable d’une baisse progressive de l’acuité visuelle, mais n’atteignant pas le point de fixation central (Figure 6). Seuls les seuils périfovéolaires sont abaissés : il s’agit d’une atteinte périfovéolaire pure.

Figure 6: Champs visuel 10-2 montrant des Scotomes annulaires péricentrals, n’atteignant pas le point de fixation.

L’autofluorescence montre un aspect marbré ou tacheté sur toute la macula. l’OCT-SD met en évidence un amincissement de la couche nucléaire externe périfovéolaire avec image en soucoupe volante (« the flying saucer sign ») (Figure 7).


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Figure 7 : Image en sou- coupe volante en OCT S-D

L’ERG-mf montre une diminution plus marquée de l’amplitude de l’onde P 50 dans les zones périfovéolaires avec conservation de pic fovéolaire (Figure 8). Ces lésions sont irréversibles et peuvent même continuer à progresser malgré l’arrêt du traitement.

Figure 8 : ERG m-f Montrant une diminution plus marquée de l’amplitude de l’onde P 50 dans les zones périfovéolaires avec conservation de pic fovéolaire.

Figure 9 : Aspect en maculopathie en « oeil de boeuf » au FO.

L’OCT-SD met en évidence une atrophie foveolaire (Figure 10) et l’ERG-mf montre une disparition du pic foveolaire (Figure 11). En dehors de la maculopathie certains auteurs ont identifié un autre niveau de toxicité des APS, il s’agit de l’atteinte cornéenne sous forme de dépôts. Cette manifestation ne constitue pas un marqueur de l’atteinte maculaire et elle est de faible apport en pratique.

3- Stade de maculopathie avérée La maculopathie avérée correspond à une atteinte de la région fovéale avec baisse de l’acuité visuelle bilatérale, sévère et irréversible associée à un aspect en maculopathie en « oeil de boeuf » (figure 9). Cet aspect correspond à une plage fovéolaire pigmentée, entourée d’une zone claire, ellemême encerclée par une bande de migration pigmentaire. En autofluorescence les altérations de l’épithélium pigmentaire apparaissent en hypo-autofluorescence et les migrations pigmentaires apparaissent en hyperautofluorescence. Le CV 10-2 montre la confluence des scotomes paracentraux en un scotome annulaire avec baisse des seuils foveolaires .

Figure 10 : Atrophie foveolaire en OCT SD

Figure11 : Disparition du pic foveolaire à L’ERG mf

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DEPISTAGE 1-

Moyens de dépistage

Devant la panoplie des moyens d’exploration disponibles de nos jours, le praticien devrait être apte à choisir entre ceux qui sont réellement utiles au dépistage de ceux qui ne le sont pas. Marmor et al [7] ont divisé ces différents moyens en «examens recommandés», «examens non recommandés». Nous optons pour la même classification avec certaines nuances.  Moyens recommandés 

Examen clinique et acuité visuelle Cette étape toujours aussi importante a pour but de connaître l’état de base du patient et de corréler l’acuité visuelle aux données de l’examen ophtalmologique. L’acuité visuelle reste longtemps conservée. 

Examens paracliniques 1. Champ visuel explorant les 10 degré centraux, fiable Seul cet examen permet la mise en évidence de scotomes para-centraux, atteinte caractéristique dans ce cadre. Le seuil fovéolaire reste longtemps normal. 2. Eléctrorétinogramme multi-focal Ce moyen d’exploration constitue une aide précieuse au dépistage. Les anomalies retrouvées précèdent les anomalies au champ visuel. D’où l’intérêt de le pratiquer de façon systématique. 3. Tomographie par cohérence optique maculaire spectral domain L’OCT-SD, examen objectif, accessible, de réalisation rapide et d’interprétation usuelle pour le praticien avec une très bonne sensibilité et spécificité, apparaît comme un examen majeur dans la stratégie de dépistage des maculopathies aux APS.

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4. Autofluorescence maculaire Examen non invasif mais souvent méconnu, il peut parfois permettre d’emblée d’évoquer le diagnostique là ou des examens plus invasifs comme l’angiographie peuvent échouer. 

Moyens non recommandés

La pratique d’une angiographie à la fluorscéine est un examen de faible apport dans cette entité du moins dans le stade précoce. La vision des couleurs, la grille d’Amsler ne sont plus recommendés à ce jour en raison de leur faible apport ainsi que l’OCT Time Domain et l’ERG global. 2-

Schéma de dépistage

Un schéma de dépistage est bien nécessaire pour faciliter le suivi des patients sous APS. Une première consultation chez l’ophtalmologiste est recommandée avant le début du traitement ou au moins au cours de la première année. Cette consultation a pour but d’établir un bilan de référence et de déceler les patients à risque élevé de toxicité maculaire aux APS. Afin d’harmoniser les pratiques, l’American Academy of Ophthalmology (AAO) a récemment publié, en 2011, de nouvelles recommandations concernant les examens complémentaires dans le cadre du dépistage des maculopathies toxiques [7]. Ils soulignent, en complément du champ visuel 10-2, l’intérêt de réaliser au moins un des 3 nouveaux examens complémentaires objectifs : clichés d’autofluorescence (AF), tomographie de cohérence optique- Spectral Doman (OCTSD), ou électrorétinogramme multifocal (ERGmf). Le 2ème examen de contrôle est effectué dans un délai qui dépend de la présence ou non des facteurs de risque. Dans le premier cas de figure, un examen annuel est recommandé.


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Dans le deuxième cas, le délai est à 5 ans du début du traitement ; puis chaque année.

CONCLUSION Largement sous-évaluées en pratique, les maculopathies iatrogènes aux APS ne devraient plus être diagnostiquées au stade d’intoxication clinique en 2015, compte tenu des moyens mis à disposition des ophtalmologistes. Le principe de précaution reste la règle, et des altérations mêmes mineures constatées aux examens doivent faire craindre une maculopathie et arrêter le traitement, souvent prescrit dans le cadre de pathologies d’intensité modérée.

REFERENCES 1) Shearer RV, Dubois EL. Ocular changes induced by long-term hydroxychloroquine (plaquenil) therapy. Am J Ophthalmo l967;64:245—52. 2) Ivanina TA, Sakina NL, Lebedeva MN, Borovjagin VL. A study of the mechanisms of chloroquine retinopathy. II. Chloro- quine effect on protein synthesis of retina. Ophthalmic Res 1989;21:272—7. 3) Costedoat-Chalumeau N, Ingster-Moati I, Leroux G, Fardeau C, Benveniste O, Simon C, et al. Lecture critique des nouvelles recommandations américaines

sur le suivi ophtalmologique des patients traités par hydroxychloroquine (Plaquénil®). Rev Med Interne 2012;33:265—7. 4) Marmor MF, Carr RE, Easterbrook M, Farjo AA, Mieler WF, American Academy of Ophthalmology. Recommendations on screening for chloroquine and hydroxychloroquine retinopathy: a report by the American Academy of Ophthalmology. Ophthalmology 2002;109:1377—82. 5) Marmor MF, Melles RB. Disparity between visual fields and opti- cal coherence tomography in hydroxychloroquine retinopathy. Ophthalmology 2014;121:1257—62. 6) Kellner U, Renner AB, Tillack H. Fundus autofluorescence and mfERG for early detection of retinal alterations in patients using chloroquine/hydroxychloroquine. Invest Ophthalmol Vis Sci 2006;47:3531— 8. 7) Marmor MF, Kellner U, Lai TYY, Lyons JS, Mieler WF, Ameri- can Academy of Ophthalmology. Revised recommendations on screening for chloroquine and hydroxychloroquine retinopathy. Ophthalmology 2011;118:415—22.

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Articles Originaux

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COMPARAISON DU PÉRIMÈTRE D'HEIDELBERG ET DU PÉRIMÈTRE D'HUMPHREY ET DU FDT CHEZ DES PATIENTS GLAUCOMATEUX. COMPARISON OF HEIDELBERG, HUMPHREY AND FDT PERIMETERS IN GLAUCOMATOUS PATIENTS. Wathek Cheima, Khallouli Asma, Maalej Afef, Nordmann JP*, Rannen Riadh. Service Ophtalmologie. HMPIT. *Service Ophtalmologie. Hôpital des Quinze Vingts. 1008 Mont Fleury. Tunis. Les auteurs n’ont aucun intérêt financier à présenter ces appareils

INTRODUCTION Le glaucome étant par définition une neuropathie optique associée à une excavation papillaire pathologique, ce qui explique le développement considérable des périmètres avec l’apparition successive du périmètre automatique blanc blanc, la périmétrie bleu jaune et enfin la périmétrie à fréquence doublée FDT. L’Heidelberg Edge Perimeter (HEP) a essayé de réunir en un même appareil deux périmètres qui permet de réaliser à la fois des tests périmétriques classiques SAP (standard automatic perimetry) et des tests dits pré périmétriques en utilisant des mires spécifiques en anneaux dans le cadre d’un test FDF (flicker defined form). MATERIEL ET METHODES Il s’agit d’une étude comparative prospective réalisée au service du Pr Nordmann de l’hôpital des quinze vingt sur une période de deux mois : Septembre et Octobre 2011.

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Deux groupes de patients ont été sélectionnés après consentement sur le but de l’étude. 1er groupe : 24 yeux de 13 patients ayant une hypertonie isolée ou un glaucome prépérimétrique ont eu successivement un examen du champ visuel par FDT et FDF. Les patients de ce groupe ont un tonus oculaire supérieur à 22 mm Hg après plusieurs mesures au tonomètre de Goldmann, un aspect normal ou en faveur d’une atteinte glaucomateuse du disque optique ainsi qu’un champ visuel blanc blanc normal. 2ème groupe : 14 yeux de 9 patients ayant un glaucome avéré ont eu successivement un Humphrey 24-2 et un SAP 24-2. Ces patients présentent des anomalies du disque optique à type d’amincissement de l’anneau neurorétinien et élargissement verticalisé de l’excavation ainsi que des déficits périmétriques au champ visuel blanc blanc. Un questionnaire de préférence succinct (concernant le stimulus et l’arrière fond) de l’un ou de l’autre appareil a été rempli par les patients. Ce questionnaire a intéressé :  La fatigabilité après l’examen  L’éblouissement par l’éclairage du fond


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La rapidité de compréhension de l’examen Les examens ont été supervisés par un même opérateur, l’HEP dispose d’un eye tracker et a été réalisé dans une pièce éclairée. L’étude statistique a été faite par le calcul du test de Chi deux. 

RESULTATS Dans le groupe des hypertonies isolées, l’âge moyen était de 63.62 ans et la durée moyenne de suivi était de 10 ans et 11 mois. La durée moyenne de l’examen était de 5min 24s pour le FDT versus 7min 27s avec le FDF cette différence était non statistiquement significative (NS avec chi2=0.243).

Les résultats ont été plus altérés avec le FDF qu’avec le FDT en ce qui concerne le déficit moyen MD. Cette différence n’a pas été retrouvée pour l’indice de déficit localisé PSD (Figure 1). En effet la comparaison des moyennes de MD et PSD était respectivement de -1,975, 3,37 pour le FDT et de -4,375, 3,385 pour le FDF. Ces différences entre moyenne du MD et PSD étaient non statistiquement significatives. Tandis que la comparaison de la profondeur du déficit entre FDT et FDF au niveau de chaque point testé trouve une différence significative. En effet, les déficits mesurés par le FDF paraissaient plus profonds que ceux avec le FDT avec un chi2 à 13.612 statistiquement significatif (S) (tableau n°1).

Figure 1 : présentation des résultats d’un même patient par les deux appareils respectivement le FDT et le FDF.

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La comparaison de la répartition des scotomes par quadrant entre les deux examens trouve une parfaite concordance (tableaux 2, 3, 4, 5) Dans ce premier groupe huit patients ont préféré l’examen par le FDT, trois par le FDF et deux n’avaient pas de préférence. Tableau n°1 : nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen.

Prof du déficit MD

FDT

FDF

nl

20

11

p<0.5

0

8

P<1

1

3

P<2

0

1

P<5

3

1

Moy nbre scot FDT

Moy nbre scot FDF

p<0.5

0.44

1.53

NS

P<1

0.25

0.78

NS

P<2

0.4

1.07

NS

P<5

1.02

0

-

Tableau n°3 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant nasal inférieur.

Prof déficit nasal inf

Moy nbre scot FDT

Moy nbre scot FDF

p<0.5

0.69

1.82

NS

P<1

0.07

0.76

NS

P<2

0.25

1.29

NS

P<5

0.46

0

-

14

Prof déficit temp sup

Moy nbre scot FDT

Moy nbre scot FDF

p<0.5

0.72

1.48

NS

P<1

0.48

0.49

NS

P<2

0.45

0.32

NS

P<5

0.82

0

-

Tableau n°5 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant temporal inférieur.

Tableau n°2 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant nasal supérieur.

Prof déficit nasal sup

Tableau n°4 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant temporal supérieur.

Prof

Moy nbre

déficit

scot

temp inf

FDT

p<0.5

0.66

1.77

NS

P<1

0.32

0.64

NS

P<2

0.43

0.7

NS

P<5

0.9

0

-

Moy nbre scot FDF

Dans le groupe du glaucome avéré, l’âge moyen était de 56 ans. La durée moyenne de l’examen était de 6 min 11 s pour le Humphrey versus 7 min 55s (NS). La fréquence et l’importance de l’atteinte du MD et du PSD étaient identiques entre les deux appareils (Figure 2). La comparaison de la profondeur du déficit entre les deux appareils pour la périmétrie blanc blanc ne trouve pas de différence significative. La répartition des scotomes entre les champs relevés par les deux appareils était quasi identique (tableaux n°6, 7, 8, 9). Quatre patients avaient préféré le humphrey, trois le HEP et deux n’avaient aucune préférence ni pour l’un ni pour l’autre.


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Figure 2 : Présentation des résultats d’un même patient par les deux appareils respectivement SITA (humphrey) et ASTA (HEP).

Tableau n°6 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant nasal supérieur.

Moy

Moy

Prof déficit

nbre

nbre

nasal inf

scot

scot

SITA

ASTA

p<0.5

4.13

5.58

NS

NS

P<1

079

0.65

NS

0.84

NS

P<2

0.89

1.19

NS

0.05

S

P<5

0.4

0

-

Moy

Moy

nbre

nbre

scot

scot

SITA

ASTA

p<0.5

4.64

6.01

NS

P<1

0.51

0.78

P<2

0.46

P<5

1.15

Prof déficit nasal sup

Tableau n°7 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant nasal inférieur.

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JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE Tableau n°8 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant temporal supérieur.

Moy

Moy

Prof déficit

nbre

nbre

temp sup

scot

scot

SITA

ASTA

p<0.5

3.82

4.04

NS

P<1

0.11

0.15

NS

P<2

0.44

0.4

NS

P<5

0.42

0.05

-

Tableau n°9 : comparaison du nombre des différents scotomes selon leurs profondeurs et selon l’examen dans le quadrant temporal inférieur.

Moy

Moy

Prof déficit

nbre

nbre

temp inf

scot

scot

SITA

ASTA

p<0.5

2.5

2.71

NS

P<1

0.58

0.21

NS

P<2

0.59

1.5

NS

P<5

1.08

0.16

-

Le FDF s’est basé sur le même principe d’exploration de cette voie magnocellulaire (le mouvement) mais avec un stimulus utilisant la superposition de cercles (schéma n°1) [3, 6, 7, 8, 9]. Ces deux périmètres FDT et FDF ont pour but de révéler les déficits glaucomateux périmétriques plus précocement qu’avec la PA blanc blanc. D’après notre étude on ne trouve pas de différence significative entre FDT et FDF. La différence entre profondeur du déficit entre les deux peut être expliquée par une meilleure sensibilité du FDF pour détecter les déficits, hypothèse soutenue par Hasler sur une série de 90 yeux [10]. Lamparter a noté un effet d’apprentissage et de fatigue lors de la réalisation du FDF, cet effet n’a pu être évalué dans notre série [11]. Phase 1Phase

DISCUSSION Depuis son avènement la périmétrie FDT a trouvé sa place dans la stratégie d’exploration de la neuropathie glaucomateuse vu qu’elle explore les cellules ganglionnaires les plus précocement touchées (Spécificité 85%, Sensibilité 90% pour Glaucome précoce) [1, 2]. Elle utilise un phénomène d’illusion optique crée par la superposition de la projection optique d’une grille de barres

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verticales blanches et noires sinusoïdales de basse fréquence spatiale (0.25cycles/degré) et de haute fréquence temporelle, papillotantes (flicker) à 25 Hz [3, 4, 5].

Phase Phase 2

alternance ee

Illusion illusory de Contour Resulting contour

=

Shéma n°1:Principe du stimulus du FDF : alternance de stimuli différents simulant un mouvement et donnant une illusion de contour perçue par le patient.

De même la comparaison des champs visuels blanc blanc par les deux appareils a été presque identique (aucune différence significative) aussi bien pour les moyennes que la répartition des déficits, ces résultats ont été retrouvés par plusieurs auteurs [12]. Néanmoins, le nombre de patients dans le 2ème groupe était restreint vu l’importante fatigabilité qui apparaissait après la réalisation du champ visuel blanc blanc chez ces patients qui présentent des altérations significatives de leurs champs visuels.


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CONCLUSION L’HEP, en plus d’avoir intégré deux appareils, a pour avantages d’avoir un eye tracker, de corriger les données de l’examen selon les données des faux positifs, faux négatifs et des pertes de fixation ainsi que d’être réalisable dans une pièce éclairée. La corrélation entre structure et fonction peut être également réalisée sur une même représentation grâce au logiciel HEYEX.

REFERENCES 1. Anderson AJ, Johnson CA. Frequency-doubling technology perimetry. Ophthalmol Clin North Am;2003, 16:213-25. 2. Italo Giuffrè. Frequency Doubling Technology vs Standard Automated Perimetry in Ocular Hypertensive Patients. The Open Ophthalmology Journal; 2009, 3:6-9. 3. Quaid P., Flanagan J.G. Defining the limits of flicker defined form : effect of stimulus size, eccentricity and number of random dots. Vision Research 2005. 4. Mauro C, Pier Giorgio T, Ernesto S et coll. Frequency doubling technology, optical coherence tomography and pattern electroretinogram in ocular hypertension. BMC Ophthalmology; 2012, 12:3. 5. Horn FK, Mardin CY, Bendschneider et coll. Frequency doubling technique perimetry and

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LES OCCLUSIONS ARTÉRIELLES RÉTINIENNES AU COURS DES VALVULOPATHIES: À PROPOS DE 7 CAS Saadouli D, Marzouki M, Yahyaoui S, Mekni M, Lahmar A, Belaaj M, El Afrit MA Service d`ophtalmologie Hôpital La Rabta

Résumé : L’occlusion artérielle rétinienne est une affection rare mais grave. Elle peut mettre en jeu le pronostic aussi bien visuel que vital. Le bilan étiologique constitue une étape fondamentale pour déceler une pathologie causale. Nous rapportons sept observations de patients présentant des occlusions artérielles rétiniennes chez qui l`enquête étiologique a permis de révéler une cardiopathie emboligène. L’importance du bilan étiologique minutieux réside dans le fait de trouver et de traiter les causes sous jacentes, afin de prévenir la survenue d’un accident vasculaire plus grave.

Mots clés : Occlusion artérielle rétinienne, étiologie, cardiopathie

INTRODUCTION L’occlusion artérielle rétinienne (OAR) est une affection relativement rare (1 consultation sur 10000) [1,2]. Cependant, elle est grave et peut être responsable d`une cécité totale ou même mettre en jeu le pronostic vital. Actuellement, la thérapeutique est relativement pauvre, vise surtout à trouver et corriger les causes sous jacentes, afin de prévenir la survenue d’un accident vasculaire plus grave. Le but de notre travail est dʹétudier les caractéristiques cliniques, étiologiques et thérapeutiques des patients présentant des occlusions artérielles rétiniennes. PATIENTS ET METHODES Nous avons mené une étude rétrospective sur une période de 13 ans (allant de Janvier 2000 à

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décembre 2012), portant sur les dossiers de sept patients (sept yeux): trois ayant une occlusion de l`artère centrale de la rétine (OACR) et quatre présentant une occlusion de branche artérielle rétinienne (OBAR). Tous les malades ont bénéficié d’un interrogatoire et d`un examen ophtalmologique complet. L’angiographie rétinienne à la fluorescéine a été pratiquée chez tous patients et l’étude du champ visuel de Goldmann (CV) a été faite chez les quatre malades présentant une OBAR. Un bilan étiologique systématique a été demandé chez tous les malades : biologique (numération de la formule sanguine, VS, bilan d’hémostase, glycémie à jeun, bilan lipidique), un examen cardiologique complet, une échographie cardiaque et une échographie doppler des troncs supraaortiques.


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RESULTATS Sept patients (7 yeux) atteints d’OAR ont été inclus, séparés en 2 groupes : groupe 1 «OACR» : trois malades, et groupe 2 « OBAR » : quatre malades. La moyenne d’âge au moment du diagnostic était de 49,44 ans [24-53 ans]. Le sex ratio était de 2.5. Chez les malades ayant une OACR, le motif de consultation était une baisse brutale, massive et unilatérale de l’acuité visuelle. L’acuité visuelle initiale était effondrée, limitée à la perception lumineuse. Le reflexe photomoteur était constamment aboli. L’examen du fond d’œil avait montré une ischémie rétinienne aigue diffuse avec œdème rétinien blanc, diffus, un rétrécissement artériel et une macula rouge cerise (fig1).

était supérieure ou égale à 5/10 chez deux malades. Le reflexe photomoteur était normal. L’œdème ischémique était localisé au territoire de l’artère temporale supérieure englobant la macula qui était rouge cerise dans trois cas et au niveau du territoire d’une branche de l’artère temporale inferieure épargnant la macula dans le quatrième.

Fig2: Angiographie faite chez un patient présentant une OACR : retard d`injection artérielle et absence de perfusion artérielle et du lit capillaire

Fig1: œdème rétinien ischémique, macula rouge cerise et rétrécissement artériel chez un patient présentant une OACR

L’angiographie rétinienne avait révélé une absence totale de remplissage au niveau de la lumière artérielle et du lit capillaire (fig2). Concernant le deuxième groupe(OBAR), tous les patients avaient consulté pour une amputation du champ visuel. Il s’agissait du champ visuel supérieur dans trois cas et inférieur chez un seul patient. L’acuité visuelle

L’image d’un embole n’a été mise en évidence que chez un patient et elle était de type calcique (fig3). Un retard de perfusion artérielle dans la branche occluse a été retrouvé au temps tardif de l’angiographie rétinienne. L’enquête étiologique avait décelé une cardiopathie emboligène méconnue chez les sept patients. Il s’agissait d’une maladie mitrale dans quatre cas, une insuffisance mitrale dans deux cas et un rétrécissement aortique chez un patient. La prise en charge thérapeutique avait associé un traitement anticoagulant et l’éviction des autres facteurs de risque cardio-vasculaire. L’évolution était défavorable dans le premier groupe avec une acuité visuelle limitée à la perception lumineuse et un rétrécissement de l’ensemble du réseau artériel au FO en plus de l`atrophie

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optique. Trois patients du groupe 2 avaient une acuité visuelle supérieure à 5/10 dont un qui avait récupéré une AV de 10/10. Dans ce groupe le CV avait montré un scotome absolu et persistant dans le territoire de l`artère occluse.

Fig3 : embole calcique

DISCUSSION Dans notre travail nous avons mis en évidence une population constituée en majorité d’hommes, âgés en moyenne de 50 ans et portant des facteurs de risque cardiovasculaires : résultat concordant avec les autres études publiées [3]. Le bilan étiologique réalisé chez nos patients a permis de déceler des cardiopathies méconnues ; d’où la nécessité de réaliser un bilan général systématique devant toute OAR, sachant que chez les sujets jeunes les valvulopathies sont les plus incriminées [4,5], alors que chez le sujet âgé la cause la plus fréquente est l`embolie d`origine carotidienne (donc terrain d`athérosclérose). [6, 7,8] Le bilan doit être complet surtout chez les sujets jeunes et tout ceci afin de trouver une étiologie et dʹinstaurer un traitement urgent pour prévenir des nouveaux accidents

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vasculaires, donc il faut faire : une évaluation précise de la pression artérielle, un électrocardiogramme et une écho-doppler des vaisseaux du cou, ainsi qu’un bilan sanguin (numération de la formule sanguine, glycémie, bilan lipidique, taux de prothrombine, temps de céphaline activée...). Pour certains auteurs, l’échographie cardiaque doit être systématique, pour d’autres, uniquement réalisée chez le sujet jeune, en présence d’anomalies de l’examen clinique ou en présence de facteurs de risque cardiaque [9,10] Le pronostic général dépend de lʹétiologie, alors que le pronostic visuel dépend du siège de lʹocclusion, de lʹétendu du territoire de lʹischémie et surtout de lʹexistence ou pas dʹune atteinte maculaire. Mais dʹune façon générale le pronostic est bon dans plus de 80% des cas dʹOBAR surtout en absence dʹatteinte maculaire, cʹest lʹexemple de notre malade qui a présenté une occlusion dʹune branche de division temporale inferieure sans atteinte maculaire et qui a récupéré 10/10eme ; alors quʹen cas dʹOACR, la cécité est irréversible dans 96% des cas ; cʹest le cas de nos 3 malades qui ont présenté une OACR, dont lʹacuité visuelle finale a été limitée à la perception lumineuse. La place de l`angiographie est primordiale en cas dʹOAR et ceci pour préciser le degré de lʹocclusion, lʹétendu de lʹischémie et pour détecter une éventuelle néo vascularisation [5], dans notre série elle a été pratiquée chez tout les malades. De nombreux traitements ont été décrits en cas d’OAR mais aucun n’a prouvé son efficacité du fait que le délai de tolérance rétinienne à l’ischémie soit très court (97 minutes sur les modèles animaux expérimentaux d’Hayreh et al) [11].Un délai de 4 heures entrainait des lésions ischémiques majeures et irréversibles, et toute tentative thérapeutique au-delà parait utile.


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CONCLUSION Les occlusions artérielles rétiniennes chez le sujet jeune restent rares, mais graves. Le bilan étiologique exhaustif est essentiel pour déceler une pathologie causale sous-jacente surtout chez l`adulte jeune, afin de prévenir un accident vasculaire plus grave.

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LES ABCÈS DE CORNÉE LIÉS AU PORT DE LENTILLES DE CONTACT Sana Khochtali, Raouadha Attia, Asma Bouabana, Ahmed Mahjoub, Salim Ben Yahia, Sonia Zaouali, Moncef Khairallah Service d’Ophtalmologie, Hôpital Universitaire Fattouma Bourguiba Faculté de Médecine, Université de Monastir, Monastir, Tunisie

INTRODUCTION Les abcès de cornée liés au port de lentilles de contact (LC) constituent une complication grave potentiellement cécitante. Le diagnostic positif des abcès de cornée chez les porteurs de LC est clinique. Le diagnostic du germe en cause peut être orienté par la présentation clinique. Il n'est certain qu'en cas de preuve microbiologique à partir d'un prélèvement cornéen. L’origine bactérienne est la plus fréquente (avec en première position Pseudomonas aerugenosa), suivie de l’origine amibienne puis fongique. Une atteinte polymicrobienne est possible. Le non respect des règles d’hygiène et d’entretien des LC, est fortement impliqué dans la survenue de ces infections. Le traitement est basé sur des collyres anti-infectieux adaptés. Le diagnostic précoce et la prévention sont essentiels pour améliorer le pronostic visuel [1,2]. Le but de ce travail est d’exposer les différentes caractéristiques cliniques et microbiologiques des abcès de cornée chez les porteurs de lentilles de contact et de décrire les principes du traitement et de la prévention. EPIDÉMIOLOGIE Le nombre de porteurs de LC dans le monde était estimé à 140 millions en 2005 [3]. L'incidence des abcès de cornée chez les porteurs de LC varie dans la littérature de 1,8 à

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6,9 par 10000 porteurs de LC [1,2]. Parmi les abcès de cornée, le port de LC est considéré comme la cause de la kératite dans 26% à 30% des cas selon les séries [4-6]. L’âge moyen des patients est compris entre 22 et 35 ans. Une nette prédominance féminine est retrouvée (ce qui peut être expliqué par la prédominance des femmes parmi les porteurs de LC) [7,8]. Le type souple de la LC et le port nocturne sont considérés comme les principaux facteurs de risque de complications infectieuses. Un défaut d’hygiène ou du mode d’entretien des lentilles et du boitier tel que l’absence de lavage des mains, l’exposition à l’eau de robinet, expose à la colonisation des LC et du boîtier par des microorganismes pathogènes [9-12]. SIGNES CLINIQUES DES ABCÈS CORNÉENS SOUS LC

Les signes cliniques dépendent de la virulence du germe pathogène et de la durée de l’infection. Le début est souvent aigu et brutal. Le patient rapporte des douleurs oculaires, un larmoiement et une photophobie. Le degré de la baisse de vision dépend du siège de l’abcès. Le signe cardinal de l’infection est l’infiltration localisée ou diffuse de l’épithélium et /ou du stroma cornéen, de localisation centrale ou paracentrale [4,5,8]. Le diamètre de l’abcès est souvent supérieur à 3 mm. Un ulcère cornéen est souvent associé. L’infiltration stromale est profonde dans plus que la ½ des cas. La


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réaction de chambre antérieure avec ou sans hypopion, est un signe de gravité de l’abcès. L'abcès cornéen doit être différencié des infiltrats stériles induits par les LC, qui correspondent à une réaction inflammatoire de la cornée, à l'origine d'une infiltration du stroma antérieur. Ces infiltrats sont typiquement périphériques, siégeant à moins de 2 mm du limbe, sans ulcération épithéliale ni réaction de la chambre antérieure. La douleur oculaire est absente ou modérée. Cependant, une progression de la symptomatologie devrait faire suspecter une origine infectieuse [1,2,7]. DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE DES ABCÈS DE CORNÉE CHEZ LES PORTEURS DE LC

Le diagnostic clinique de l'agent causal de la kératite infectieuse ne peut être que présomptif. Les prélèvements cornéens (grattage cornéen des berges et du fond de l’ulcère cornéen) sont essentiels afin d'identifier l'agent pathogène [4,13]. Le taux de positivité des prélèvements cornéens varie entre 43 et 91% des cas [4,5,14]. Les cultures des LC, du boitier ou de la solution d'entretien sont également utiles. Cependant, leurs résultats doivent être interprétés avec prudence, car l'incidence d'une contamination bactérienne des boitiers est supérieure à 50% et celle des LC est d’environ 10%, chez des sujets asymptomatiques [15]. La première étiologie des kératites infectieuses chez les porteurs de LC dans le monde, est bactérienne (taux variant entre 80 et 94,2%) avec en chef de ligne Pseudomonas aeruginosa, suivie par l'infection amibienne (1,5 à 17,7%) puis l'infection fongique (2,2 à 4,3%) [1,4,5]. Les kératites polymicrobiennes sont possibles lors du port de LC [4].

Les kératites bactériennes Les bactéries gram négatif avec en tête de liste les Pseudomonas sont les germes les plus fréquemment retrouvés dans les abcès cornéens sous LC suivis par les Staphylocoques. Le pseudomonas a été incriminé dans 44,5 à 79,7% des abcès de cornée chez les porteurs de LC [4-6]. L'abcès à pseudomonas (Figure 1) se manifeste typiquement par un abcès de couleur jauneverdâtre avec une ulcération sus-jacente et des sécrétions qui lui sont adhérentes. L'hypopion est fréquent. L'abcès s'étend surtout en profondeur mais également en étendue, et peut toucher toute la cornée en l'espace de plusieurs heures si la souche est particulièrement virulente. En l'absence de traitement efficace, l'abcès nécrotique détruit le stroma cornéen, évoluant vers l'apparition d'un descemetocèle puis d'une perforation cornéenne [14].

Figure 1. Patiente âgée de 28 ans. Photographies du segment antérieur montrant un abcès cornéen central de 5 mm de diamètre, avec des sécrétions sus-jacentes collantes, une infiltration stromale profonde (A) et une ulcération sus-jacente (B). Le prélèvement a objectivé pseudomonas aeruginosa. Photographie du segment antérieur, 2 mois après la présentation, objectivant une cicatrice centrale (C) (AV finale corrigée à 2/10).

Les kératites amibiennes Les kératites amibiennes viennent en 2ème position après les kératites bactériennes chez les porteurs de LC. Environ 75% à 85% des cas surviennent chez des porteurs de LC. La kératite amibienne est occasionnée par les Acanthamoeba qui sont des protozoaires

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saprophytes très répandus dans l’environnement. L'atteinte cornéenne est marquée par deux phases évolutives : épithéliale pendant plusieurs semaines puis stromale plus grave. Lors de la phase superficielle, la symptomatologie fonctionnelle est peu typique, sauf une importante douleur rapportée par le patient et qui semble en inadéquation avec les signes cliniques retrouvés. La douleur importante peut être expliquée par le tropisme neurologique de l'Acanthamoeba. L'atteinte épithéliale est lentement progressive. Elle est à type de microérosions, d'opacités localisées, de zones d'œdème épithélial microkystique mais, surtout, des lignes épithéliales isolées ou organisées telles des pseudodendrites (Figure 2). La kératonévrite radiaire est un aspect presque pathognomonique de la kératite amibienne, correspondant à une infiltration autour des nerfs cornéens sous épithéliaux (Figure 3). Il s'agit d'un signe précoce dont la fréquence diminue dans les stades avancés. Les kératites amibiennes profondes sont observées après plusieurs semaines d'évolution. Un anneau immunitaire stromal est plus fréquent à ce stade par rapport au stade épithélial avec constitution d'un abcès central surmonté d'une ulcération avec ou sans réaction de la chambre antérieure [16]. Lors du prélèvement, le grattage cornéen doit se faire profondément et le laboratoire doit être avisé pour améliorer les chances d'isoler le germe. La réaction de polymérisation en chaîne (PCR) sur prélèvement cornéens est possible mais n'est pas encore normalisée ni largement disponible. La microscopie confocale a été proposée par certaines équipes comme outil diagnostique des kératites amibiennes. Elle est caractérisée par une grande sensibilité (de 90,6 à 100%) et spécificité (de 84 à 100%) pour montrer les kystes amibiens. Cependant cette technique reste coûteuse et est opérateur-dépendante [16, 17].

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Figure 2. Patiente âgée de 36 ans. Photographies du segment antérieur montrant des infiltrats épithéliaux et sous-épithéliaux multiples, avec une ulcération d'aspect pseudo-dendritique. Le prélèvement cornéen a objectivé des kystes d'amibes.

Figure 3. Patiente âgée de 26 ans. Photographie du segment antérieur montrant une infiltration cornéenne translucide de 2,5 mm de diamètre avec une kératonévrite radiaire (flèche). Le diagnostic de kératite amibienne était présumé.

Les kératites fongiques Le taux de kératites fongiques dans les séries d'abcès liés au port de LC varie de 2,2 à 4,3%. Dans la kératite à champignon filamenteux, l'infection est rapidement évolutive, surtout en cas d'infections à Fusarium [18]. L'abcès est à bords irréguliers avec parfois des prolongements centrifuges et des lésions satellites. Un anneau immunitaire de Wessely peut être retrouvé. La présence d'une pigmentation noire au fond de l'ulcère signe une infection à champignons filamenteux


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pigmentés. Une réaction de la chambre antérieure avec hypopion est rapportée dans 19% des cas des infections à Fusarium liées au port de LC (Figure 4), ainsi que des plaques de fibrine au niveau endothélial. L'évolution relativement rapide vers la perforation cornéenne et l'endophtalmie, peut être précipitée par la prise de corticoïdes. Les infections à candida ont été exceptionnellement décrites en association au port de LC. Le prélèvement par grattage cornéen en périphérie de la lésion, sous lampe à fente, permettra un examen direct par étalement fin sur lame. La culture se fait sur des milieux de Sabouraud avec antibiotiques et sans inhibiteur. La PCR sur prélèvements cornéens a une sensibilité de 90,9%, contre 59,1% pour la culture [18]. Cette technique n'est pas toujours disponible en pratique courante. Le diagnostic des kératomycoses par microscopie confocale a démontré une sensibilité de 88,3% et une spécificité de 91,3%. La microscopie confocale permettrait en effet d'identifier essentiellement les filaments mycéliens sous forme de structures hyper-réflectives, linéaires et branchées [18,19].

Figure 4. Patiente âgée de 48 ans. Photographies du segment antérieur montrant un abcès de cornée de 4 x 5 mm, mal limité avec une infiltration stromale profonde et un hypopion pyramidal (A), ainsi qu'une ulcération fluorescéine-positive sus-jacente (B). Le prélèvement cornéen a objectivé Fusarium. Photographie du segment antérieur après un mois de traitement par le voriconazole montrant la disparition de l'hypopion avec constitution d'une plaque épithéliale (C).

Les kératites polymicrobiennes Dans la littérature, la kératite polymicrobienne en cas de port de LC est retrouvée à des taux différents. L'aspect clinique est peu spécifique. Cette étiologie doit être suspectée en cas de réponse insuffisante à un traitement particulier [4]. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE Le traitement anti-infectieux est au début présomptif, puis adapté en fonction des résultats des prélèvements cornéens et de l’évolution. Le traitement des kératites infectieuses se base sur les collyres antimicrobiens qui sont capables d'atteindre des concentrations efficaces au niveau de la cornée. Il peut s'agir de collyres fortifiés, préparés à partir de préparations parentérales, en intra-hospitalier, ou de collyres d'officine. Les pommades oculaires sont utiles à cause de leur rémanence dans les culs de sac, pour éviter les instillations la nuit. Les injections sous-conjonctivales d'anti-microbiens (antibiotiques ou anti-fongiques) peuvent être utiles en cas d'extension de l'abcès ou de perforation cornéenne. Le traitement par voie générale peut être utile en cas d'extension sclérale (sclérite) ou intra-oculaire (endophtalmie). En cas de kératite bactérienne, le traitement initial se base sur une monothérapie par fluoroquinolones de 2ème génération (Ofloxacine ou Ciprofloxacine) ou sur une bithérapie fortifiée (avec en général une céphalosporinede 2ème ou de 3ème génération contre les agents Gram positif et un aminoglycoside fortifié pour une couverture Gram-négative) [14, 20]. En cas de kératite amibienne, le traitement consiste en une association de biguanide topique et de diamidine topique, qui sont les agents amoebicides et kysticides les plus

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efficaces. Les biguanides comprennent essentiellement le polyhexaméthylène biguanide (PHMB) 0,02% à 0,06% et la chlorhexidine 0,02% à 0,2% qui ne sont pas disponibles en Tunisie, et la picloxydine (vitabact*), ayant une activité kysticide moins importante que celle du PHMB et de la chlorhexidine. Les diamidines topiques comprennent la propamidine 0,1% et l’hexamidine 0,1% (désomédine*). Les collyres antiamibiens sont donnés à raison d'une goutte horaire pendant 72 h, jour et nuit les premières 48h, avec par la suite une diminution progressive. La durée préconisée du traitement est de 4 à 6 mois [16, 21]. En cas de kératite fongique, le traitement de 1ère intention est souvent l'amphotéricine B à (1,5 à 2,5 mg/ml), la natamycine étant non disponible en Tunisie. Le voriconazole topique est souvent indiqué en cas de mauvaise réponse à l'amphotéricine B, ou en cas d'isolement d'un champignon filamenteux. La durée du traitement est prolongée variant de 1,5 à 4 mois [18,21]. PRONOSTIC VISUEL ET COMPLICATIONS

Une perforation cornéenne (le germe incriminé étant essentiellement Pseudomonas aeruginosa), une endophtalmie ou une sclérite infectieuse peuvent émailler l’évolution des abcès chez les porteurs de LC [4,5,14]. Après résolution du processus infectieux, la cicatrice résiduelle peut entraîner une baisse de vision significative. Une néovascularisation cornéenne peut être associée et son importance est un facteur de risque d'échec d'une éventuelle kératoplastie. L’acuité visuelle finale, en cas d’abcès cornéen lié au port de LC, peut être inférieure à 1/10 dans près de la moitié des cas [5]. Les facteurs de mauvais pronostic visuel sont essentiellement une mauvaise acuité visuelle initiale et la présence d’un hypopion [4,5,14].

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PRÉVENTION La prescription de toute LC doit être médicalisée. Le patient doit être prévenu des signes d'alarme qui doivent l'emmener à consulter en urgence. Une meilleure éducation des porteurs de LC sur les règles d'hygiène et les modalités de port des LC est nécessaire, y compris essentiellement :  Le lavage des mains avant la pose et la dépose des LC  Le changement de la solution d’entretien au niveau des étuis tous les jours  L’essuyage des étuis, qui doivent être gardés vides et secs (lorsque les LC sont portées)  L’interdiction de l’utilisation de l’eau de robinet pour laver les LC, l’interdiction de baignade avec LC  L’interdiction de dormir avec les LC (sauf des cas particuliers et mention de l’ophtalmologiste) CONCLUSION Les abcès de cornée constituent une complication rare mais grave du port des LC. Ils touchent des patients jeunes, essentiellement de sexe féminin. Ces kératites infectieuses sont le plus souvent bactériennes. La cause amibienne vient en 2ème position, suivie de l’origine fongique. Le diagnostic étiologique est suspecté en se basant sur les données de l’examen clinique, et est prouvé par les prélèvements cornéens. Le traitement est au début présomptif, puis adapté en fonction des résultats microbiologiques et de l’évolution. Malgré une prise en charge adéquate, le pronostic visuel peut être réservé. Des efforts restent à faire pour un diagnostic plus précoce et surtout pour prévenir cette complication potentiellement cécitante du port de LC.


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LA PLACE DE LA RADIOTHÉRAPIE DANS LA GESTION DES TUMEURS MALIGNES DES PAUPIÈRES

AMEL CHEBBI, AICHA ROUATBI, MERIEM BEN SALEM, LOTFI JALLALI, GHASSEN BEN FREDJ, HATEM FRIKHA*, HEDI BOUGUILA Institut Hedi Raeis d’Ophtalmolgie. Service C. Tunis. *Institut salah azeiz. Service de radiothérapie. Tunis

RÉSUMÉ :

But: Le but de notre travail est d’étudier la place de la radiothérapie (RT) dans la prise en charge des tumeurs malignes des paupières et déterminer les facteurs prédictifs de récidive tumorale. Matériel et Méthodes : Nous avons analysé les dossiers de 25 patients traités par radiothérapie pour des tumeurs malignes primitives des paupières confirmées histologiquement entre janvier 2003 et décembre 2011. Résultats : L'âge moyen de nos patients était de 69 ans avec des extrêmes de 37 à 93 ans. La taille tumorale moyenne était de 12,4 mm. Le siège était palpébral inférieur dans 57,5% des cas et palpébral supérieur dans 21,7% des cas. Il s'agissait d’un carcinome basocellulaire dans 16 cas, d’un carcinome épidermoide dans 8 cas et un carcinome sébacé dans 1 cas. La RT a été indiquée de première intention dans 28% des cas, adjuvante à la chirurgie dans 52% des cas et après récidive tumorale dans 20% des cas. Nous avons indiqué une radiothérapie de contact seule dans 11 cas, associée à une curiethérapie dans 2 cas, à une radiothérapie externe type électron dans 5 cas et une radiothérapie conventionnelle (Cobalt) dans 4 cas. Nous avons noté une récidive tumorale dans 16% des cas, après un délai moyen de 9 mois. Le suivi moyen de nos patients était de 46 mois. Conclusion : Malgré le développement des moyens chirurgicaux et les techniques de reconstruction, la radiothérapie garde une place important dans l'arsenal thérapeutique des tumeurs malignes des paupières. Mots-Clés : tumeur, maligne, paupière, radiothérapie, traitement.

INTRODUCTION La pathologie tumorale des paupières est au carrefour de plusieurs spécialités. Elles touchent une structure de petite taille et d'une grande complexité fonctionnelle. La prise en charge doit avoir un objectif triple: carcinologique, fonctionnel et esthétique. La radiothérapie représente une modalité thérapeutique. Néanmoins, ses indications

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peuvent être limitées de part la nature histologique de la tumeur ou de son extension locorégionale. Dans cette étude, nous Discutons la place de la radiothérapie dans la prise en charge des tumeurs malignes des paupières en tenant compte de notre attitude thérapeutique, des résultats de notre série ainsi que des données de la littérature.


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MATERIELS ET METHODES Nous avons analysé les dossiers de 25 patients ayant été traité par radiothérapie pour tumeur maligne primitive des paupières entre janvier 2003 et décembre 2011 avec un suivi moyen de 36 mois. Chez tous nos patients, le diagnostic de malignité a été confirmé par l’examen anatomo-pathologique des pièces d’exérèse tumorales ou des biopsies tumorales. Chez nos patients, nous avons indiqué la radiothérapie de première intention, pour réduire le volume tumorale, en complément à la chirurgie en cas d’exérèse incomplète et en cas de récidive tumorale. Les modalités de radiothérapie varient selon le type histologique. La radiothérapie externe par rayons X, le nombre de séances et la dose délivrée étaient déterminés en fonction de la taille et de la nature histologique de la tumeur (3 séances par semaine pendant 6 semaines environ). La curiethérapie interstitielle faisait appel à des fils d'Iridium 192, qui étaient placés en position sous-cutanée sur toute la zone d'extension de la tumeur. La dose délivrée variait entre 6000 et 7000 rads selon le type histologique de la lésion traitée. La radiothérapie externe (RTE) par électron, indiquée en cas de lésions évoluées de plus de 3 cm à la dose de 2 à 15Mev.Le Cobalt 60 utilisé à la dose de 40 à 60 Gy fractionnée en 10 fractions administrées en 3 à 4 semaines en fonction de la taille et du type histologique de la tumeur. On l’indiquait essentiellement pour compléter un geste chirurgical avec des aires ganglionnaires envahies. Les patients étaient revus afin de rechercher et traiter d’éventuelles complications, dépister et traiter d’éventuelles récidives tumorales et apprécier le résultat esthétique selon une échelle de 1 à 5 (1= Très Bon, 2= Bon, 3=Assez Bon, 4=Moyen, 5= Mauvais). Nous avons qualifié de satisfaisant les résultats 1, 2 et 3.

RESULTATS Parmi nos 25 tumeurs malignes des paupières traitées par radiothérapie RT. Nos patients étaient répartis en 14 hommes et 11 femmes soit un sex-ratio de 1,27. L’âge moyen était de 69 ans avec des extrêmes de 37 à 93 ans et dont 94,8% des patients étaient âgés de plus que 50 ans. La RT a été envisagée (figure 1), de première intention dans 7 cas soit 28% dont 5 cas curatif, un cas palliatif et un cas pour réduire le volume tumoral et le rendre accessible à une chirurgie moins mutilante. En complément à la chirurgie dans 13 cas soit 52% de résection incomplète et après récidive tumorale dans 5 cas soit 20%.

7(28%) 5(20%)

RT de 1ère intention RT adjuvante

13(52%) RT après récidive

Figure 1: Répartition des tumeurs selon l’indication de radiothérapie

Il s’agissait d’un carcinome basocellulaire (CBC) dans 16 cas, un carcinome épidermoide (CE) dans 8 cas et un carcinome sébacé (KS) dans 1 cas. La taille de la tumeur était supérieure à 20 mm dans 17 cas, entre 10 et 20 mm dans 7 cas et inférieure à 10 mm dans 1 cas. La tumeur siégeait au niveau du canthus medial dans 11 cas, le canthus latéral dans 2 cas, la paupière inférieure dans 5 cas et la paupière supérieure dans 7 cas. Dans notre série, nous avons indiqué une radiothérapie (RT) de contact seule dans 11 cas, associée à une curiethérapie dans 2 cas, à une RT externe (RTE) type électron dans 5 cas et à une RT conventionnelle (Cobalt) dans 4 cas. L’association RT conventionnelle (Cobalt) et RT externe type électron a été indiquée dans 3 cas (tableau 1).

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Les doses délivrées au niveau de la tumeur ont variées de 8 à 70 Gy avec une moyenne de 60 Gy. Ces doses ont été administrées selon un fractionnement-étalement classique à raison de 2 Gy /séance soit 5 séances/semaine dans 17 cas, à la dose de 3,4 Gy/séance soit 3 séances/semaine dans 6 cas et en un flash de 8 Gy en 1 séance dans 1 cas pour réduire la taille tumorale et la rendre plus accessible à la chirurgie et à titre palliatif dans un cas. Pour les 6 patients traités par RT seule de première intention (figure 2), nous avons noté une disparition de la lésion tumorale dans 4 cas et une persistance de la tumeur dans 2 cas (figure 3) (un patient a bénéficié d’une exérèse du résidu tumoral et un cas a été perdu de vue). Nous avons noté une récidive tumorale dans 4 cas, soit 16% des tumeurs ayant bénéficié d’une RT, après un délai moyen de 9 mois (Tableau 3).

a

b

Figure 2: Carcinome basocellulaire pigmenté traité para a radiothérapie de premièreintention. (a) Aspect initial, (b) aspect après radiothérapie.

a a

b a

Figure 3: Volumineux carcinome épidermoïde de la paupière supérieure traité parradiothérapie de première intention. (a) Aspect initial, (b) résidu tumoral persistantaprès radiothérapie.

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Pour les 13 patients ayant bénéficié d’une RT en complément à une exérèse incomplète, on a noté 2 cas de récidives tumorales avec un recul moyen de 6 mois ayant nécessité un complément de RT à raison de 20Gy. Pour les 5 cas où l’indication de RT a été portée pour récidive tumorale après chirurgie (figure 4), on a noté une disparition totale de la tumeur dans 3 cas, avec reprise évolutive dans 2 cas après un délai moyen de 12 mois.

a a

b a

Figure 4: Carcinome épidermoïde récidivé après chirurgie de première intention: (a) aspect avant radiothérapie de deuxième intention, (b) aspect après radiothérapie de deuxième intention.

Parmi nos 25 cas traités par radiothérapie nous avons noté 8 cas soit 32% des complications à type de : chute de cils dans 3 cas soit 12%, sécheresse oculaire dans 3 cas soit 12%, Kératite dans 3 cas soit 12%, achromie dans 2 cas soit 8% et radiodermite dans 4 cas soit 16%. Le résultat esthétique a été jugé satisfaisant dans 12 cas soit 48%, moyen dans 8 cas soit 32% et mauvais dans 5 cas soit 20%.


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Tableau 1 : Répartition des différentes techniques de radiothérapie en fonction des patients.

Nombre de lésions

RT de Contact

RT de Contact + Curiethérapie

RT de Contact + RT externe type électron

RT de Contact + RT conventionnelle (Cobalt)

RT conventionnelle (Cobalt) + RT externe type électron

11(44%)

2(8%)

5(20%)

4(16%)

3(12%)

Tableau 2 : Dose, fractionnement et étalement des séances de radiothérapie. 2 Gy/séance 5 séances/semaine

3,4 Gy/séance 3 séances/semaine

Flash 1 séance

Dose moyenne

62,49 Gy

57,54 Gy

8 Gy

Nombre de lésions (%)

17(68%)

6(24%)

2(8%)

Tableau 3: Caractéristiques cliniques des récidives tumorales après radiothérapie.

Cas

Type histologique de la tumeur

Siège de la tumeur

Taille initiale de la tumeur (mm)

Traitement Avant récidive

Après récidive

(7)

RT adjuvante (7) RT (résection incomplète) (7) RT après récidive (2) (4) Cas 2 CBC CM 20 Reprise chirurgicale (chirurgie initiale) (7) RT après récidive (2) (5) Cas 3 CBC PI 40 Perdu de vue (chirurgie initiale) (7) RT adjuvante (3) (6) (7) Cas 4 KS PS 30 RT ((résection incomplète) (1) Carcinome épidermoïde, (2) carcinome basocellulaire, (3) adénocarcinome sébacé, (4) canthus médial, (5)paupière inférieure, (6) paupière supérieure, (7) radiothérapie. Cas1

(1)

CE

(4)

CM

30

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DISCUSSION Les modalités d’irradiation sont diverses mais ont toutes en commun une approche essentiellement clinique avec une évaluation préthérapeutique précise et un examen histologique de la tumeur. La radiothérapie externe de contact utilise un rayonnement X qui s'amortit rapidement dans les couches sous jacentes. Elle est indiqué pour des lésions d'épaisseur inférieure à 5 ou 6 mm et ne dépassant pas 1,5 cm de diamètre. La dose d'irradiation est de 46 à 52 Gy pour les carcinomes répartis en 3 à 4 semaines à raison de 3 séances de 6 Gy par semaine. Dans notre étude, la radiothérapie externe de contact est le mode d’irradiation le plus utilisé. Nous l’avons utilisé seul dans 44% des cas et en association avec d’autres types d’irradiation dans 44% des cas. La radiothérapie conventionnelle type photon à 220 kV ou cobaltothérapie (1). Cette technique est utilisée pour les carcinomes dépassant 1,5 cm avec une dose de 45 à 55 Gy délivrée en 5 à 7 semaines. Dans notre série, nous avons utilisé la radiothérapie conventionnelle dans 16% des cas en association avec la radiothérapie externe de contact. La radiothérapie externe type électrons ou électronothérapie est délivrée par un accélérateur de particules. Elle n’est utilisée que pour les tumeurs malignes radiorésistantes ou très étendues. La dose est comprise entre 65 et 70 Gy avec des doses hebdomadaires de 11 à 13,5 Gy(2). Dans notre série, elle a été utilisée dans 20% des cas en association avec la radiothérapie externe de contact. La curiethérapie peut être réalisée à l'aide de sources d'iode 125 qui émet un rayonnement gamma de faible énergie. L'inconvénient de l'iode 125 est sa demi-vie courte qui oblige à renouveler fréquemment les sources. Dans notre série, nous l’avons utilisé dans 8% des

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cas en association avec la radiothérapie externe de contact. La radiothérapie trouve son indication en première intention pour des tumeurs nécessitant des chirurgies lourdes chez des patients en mauvais état général ou en cas de refus du traitement chirurgical par le patient. C’est le cas de 6 de nos patients. L’irradiation est indiquée en complément à la chirurgie après exérèse incomplète d’un carcinome épidermoïde. Certains auteurs proposent la RT en complément d'une chirurgie : en cas de CBC sclérodermiformes de l'angle interne (3); en cas d’invasion péri-neurale ; pour les tumeurs récidivantes; pour les carcinomes étendus qui sont de mauvais pronostic (3). La majorité des auteurs s’accorde sur la supériorité de la conjugaison chirurgieradiothérapie par rapport à la chirurgie seule, avec un contrôle de la lésion de 50% versus 3%, des récurrences locales de 12% versus 44% et des récurrences régionales de 27% versus 85% (4). Le carcinome basocellulaire et à moindre degrés le carcinome épidermoide sont radiosensibles. Les mélanomes sont relativement radiorésistants et vont nécessiter des doses plus importantes ; la curiethérapie à l'iode 125 est particulièrement adaptée pour ces tumeurs (5). Cependant, la radiothérapie est contre-indiquée, en cas de syndromes génétiques prédisposant aux cancers cutanés du type naevomatosebasocellulaire et XerodermaPigmentosum. Selon plusieurs auteurs, le taux de contrôle local après irradiation est satisfaisant et se compare favorablement avec les résultats obtenus par les techniques chirurgicales (6,7,8) (Tableau 4). Dans notre étude, nous avons noté 4 cas soit 16% de récidive tumorale après un délai moyen de 9 mois. Cependant, plusieurs études laissent entendre que le taux de «re-récidive» après radiothérapie première est plus important que celui après chirurgie première. Payne et al (9)


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ont observé un taux de re-récidive de 16% après chirurgie première alors que Cobbett et al (10) ont rapporté un taux de re-récidive de 20,5% après radiothérapie première. Plusieurs auteurs (11,10) ont insisté sur le caractère plus agressif des récidives secondaires à une radiothérapie comparé à celui des récidives faisant suite à une exérèse chirurgicale. D’ailleurs, les récidives après RT sont grevées d’un taux de mortalité supérieur à celui des récidives secondaires à une exérèse chirurgicale (11,12). Plusieurs auteurs pensent qu’entre des mains entraînées la radiothérapie entraîne peu de complications oculaires sérieuses (13,14). Les incidents les plus fréquents après irradiation sont l'achromie des téguments, les télangiectasies cutanées ou conjonctivales, le xérosis du bord libre et la chute des cils. Un larmoiement est souvent observé après irradiation de l'angle interne : il est plus souvent dû à un dysfonctionnement de la pompe lacrymale qu'à une obstruction des points lacrymaux ou des canalicules. De ce fait, la mise en place d'une sonde bicanaliculaire dans les voies lacrymales avant l'irradiation ne permet pas toujours de l'éviter.

Une sécheresse oculaire peut être provoquée par une irradiation de la région supéro-externe de la paupière (glande lacrymale). D’autres complications sont moins fréquentes à type de déformation palpébrale dans 9% des cas et de kératopathie dans 10% des cas (14). Les cataractes et les rétinopathies radiques se voient surtout après irradiation par les électrons (15). Dans notre étude, nous avons noté 32% des complications de la RT à type de : chute de cils dans 3 cas (12%), sécheresse oculaire dans 3 cas (12%), kératite dans 3 cas (12%), achromie dans 2 cas (8%) et radiodermite dans 4 cas soit (16%). Avril et al (2), ont trouvé que les bons résultats esthétiques étaient plus fréquents après chirurgie qu’après radiothérapie (p < 0,01). Abbatucci et al (16) ont noté que les résultats esthétiques sont mauvais lorsque la surface traitée dépassait 4 cm2 (diamètre de 2,3 cm) et que les nécroses étaient absentes pour une surface traitée inférieure à 5 cm2 (diamètre de 2 cm). Dans notre série, le résultat a été jugé satisfaisant dans 12 cas soit 48%, moyen dans 8 cas soit 32% et mauvais dans 5 cas soit 20%.selon certain auteurs (17,18), la radiothérapie permet un bon control tumoral, améliore le pronostic et le taux de survie.

Tableau4: Résultats de la radiothérapie dans le traitement des tumeurs palpébrales épithéliale primitives en fonction de la technique utilisée (revue de la littérature)

Auteurs Birtelsenet al [19] Daly et al [20] Fitzet al [21] Halnanet al[22]

Nombre de cas 256 165 1062 89

Energie utilisée 26-30Kv Implant d’ Iode 192 100 Kv 140 Kv

Nordmanet al [23]

153

45-100 Kv

Petrovichet al [24]

464

Variable en fonction de la taille de la tumeur

Sinesial[25]

46

Electrons (6-7 Mev)

Rodriguezet al [26]

631

90 Kv

Lafontain et al (13)

192

Notre série

25

Implant d'I192 Variable en fonction de la taille de la tumeur

Contrôle local 242/256 (95%) 159/165 (96%) 1009/1062 (95%) 81/89 (91%) < 1cm : 92% à 5 ans 1-2cm: 71% à 5 ans < 2cm : 98% à 20 ans 2-2.5cm : 80% à10 ans > 5cm : 60% à 5ans 39/46 (95%) Tumeur primaire: 98,1% Tumeur récidivante : 93,6% 97% 84%

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CONCLUSION La radiothérapie (RT) joue un rôle important dans la prise en charge thérapeutique des tumeurs malignes des paupières. Les indications de la radiothérapie tiennent compte des possibilités des autres méthodes thérapeutiques tant en ce qui concerne le contrôle tumoral que la qualité de vie et le coût économique.

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PATIENT GLAUCOMATEUX ET OBSERVANCE THÉRAPEUTIQUE : À PROPOS DE 80 CAS. Ben Amor S, Chaabène M, Ennouri A, Sakka M, Ben Mrad A, Sellami D, Feki J. Service d’ophtalmologie, CHU Habib Bourguiba Sfax.

RESUME : INTRODUCTION : L’Objectif du traitement du glaucome est prévenir la progression des lésions du nerf optique (NO) et des déficits visuels. Et, comme tout traitement au long cours, il pose le problème de son observance. Le But de ce travail était d’évaluer le niveau de connaissance des patients sur la maladie et l’observance thérapeutique et de proposer des recommandations pour une meilleure observance du traitement Matériel et méthodes : Etude descriptive réalisée au service d’ophtalmologie du CHU Habib Bourguiba de Sfax, durant la période Mars-Octobre 2013. Elle concernait 80 cas de glaucome à angle ouvert (GAO) de l’adulte, sous traitement médical, suivis depuis au moins 6 mois. Pour tout patient, un questionnaire a été rempli à la suite d’un entretien avec le patient et après l’examen du dossier médical. Résultats : L’âge moyen des patients était de 65,1 ± 11,2 ans. 78,8 % des patients connaissaient leur maladie. Seulement 45 % des cas connaissaient son profil évolutif et 78,8 % connaissaient les règles du traitement. Seulement 43,5% des ordonnances médicales étaient bien archivées. L’observance au traitement était bonne dans 65 % des cas. Elle était corrélée avec le niveau d’instruction, le niveau socio-économique, l’archivage de l’ordonnance et des explorations et la connaissance du profil évolutif de la maladie et des règles du traitement. La progression de la maladie était statistiquement corrélée avec l’observance du traitement Discussion : L’observance est une variable dynamique que les ophtalmologistes doivent évaluer tout au long du suivi des malades porteurs de glaucome à angle ouvert, afin de contribuer à la réduction de la prévalence de la cécité par glaucome. Selon les études, la bonne observance du traitement variait de 50 à 75% des cas. Elle dépend de plusieurs déterminants sociaux, liés à l’individu et liés au traitement. Conclusion : Une stratégie axée sur le patient, avec une attention particulière à ses besoins, combinée avec une communication fréquente et claire aura comme conséquence des résultats optimaux pour les patients et la maladie. INTRODUCTION Le glaucome primitif à angle ouvert (GPAO) est une neuropathie optique antérieure d’évolution chronique et progressive. Comme toute maladie chronique, le glaucome pose le problème de l’observance de son traitement.

L’étude de ce comportement complexe a eu un regain d’intérêt ces dernières années. Le comportement du patient glaucomateux et son adhésion au traitement sont peu étudiés dans notre pays.

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Nous proposons dans ce travail d’évaluer le niveau de connaissance des patients glaucomateux sur la maladie, d’étudier l’observance thérapeutique et d’analyser les facteurs pouvant l’influencer et de proposer des recommandations pour une meilleure observance au traitement. MATERIEL ET METHODES Il s’agit d’une étude prospective réalisée au service d’ophtalmologie du CHU Habib Bourguiba de Sfax du premier Mars 2013 au 30 Octobre 2013, portant sur 80 patients adultes suivis pour glaucome primitif à angle ouvert et qui sont traités par des antiglaucomateux depuis plus de 6 mois au moins. Ont été exclus de cette étude les patients ayant un GAO opéré, les patients avec antécédents psychiatriques ou neurologiques sévères et les patients présentant une autre affection cécitante. Pour chaque patient, nous avons réalisé un questionnaire rempli à la suite d’un entretien avec le patient et après l’examen du dossier médical. L’évaluation de l’observance a été faite à partir des critères suivants : le respect de la prescription médicale, la régularité du traitement et l’assiduité aux consultations. Nous avons étudié les facteurs influençant l’observance au traitement et leur impact sur la maladie glaucomateuse. RESULTATS Quatre vingt patients ont été inclus dans notre étude. L’âge moyen des patients était de 65,1 ± 11,2 ans. Le sexe ratio était égal à 1. Le niveau socio-économique était bon chez 15 patients (18,75%), moyen chez 25 patients (31,25%) et mauvais chez 40 patients (50%). Trente sept patients étaient analphabètes (46,25%), 14 patients uniquement (17,5%) avaient un niveau supérieur. L’ancienneté du glaucome variait de 1 à 40 ans avec une moyenne de 8 ans.

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Soixante trois patients connaissaient leur maladie (78,8%) et 17 ne connaissaient pas la maladie pour laquelle ils sont traités (21,2%). Quarante quatre patients ne connaissaient pas le profil évolutif de leur maladie (55%) et 36 patients le connaissaient (45%). Concernant les règles du traitement, 63 patients connaissaient ces règles (78,8 %) et 17 ne les connaissaient pas (21,2%). Seulement 43,5% des ordonnances médicales étaient bien archivées. L’observance du traitement était bonne chez 52 patients (65%) et mauvaise chez 28 patients (35%). Le manque de moyens était la principale cause de mauvaise observance du traitement (14% des causes de mauvaise observance). La maladie glaucomateuse était stable (PIO et lésions du champ visuel) chez 44 patients (55% des cas) et évolutive avec une PIO cible non atteinte et dégradation des lésions périmétriques chez 36 patients (45%). Nous n’avons pas trouvé de corrélation statistiquement significative entre l’observance du traitement et l’âge des patients, le sexe, l’ancienneté du glaucome. Une corrélation était statistiquement significative entre l’observance et le niveau socio-économique, le niveau intellectuel, l’archivage de l’ordonnance et des explorations et la connaissance du profil évolutif de la maladie et des règles du traitement. La progression de la maladie glaucomateuse était statistiquement corrélée à l’observance du traitement (fig. 1). 39

bonne

40

20

mauvaise

23

30 13

5

10 0 Progression

stabilité

Figure 1 : Evolutivité du glaucome à angle ouvert selon l’observance du traitement.


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DISCUSSION Le retentissement de la sénescence sur l'organisme (troubles de l'audition, de la mémoire, les arthralgies) pourrait être un facteur de mauvaise observance au traitement. Rocheblave [1] avance que l’observance paraît en moyenne meilleure chez les sujets moins de 65 ans. Mais, Comme Mac Kean et Elkington [2] et Davidson et Akingbehin [3] , nous avons trouvé que l'âge n'avait aucune influence sur l'observance des patients glaucomateux. Selon Davidson et Akingbehin [3] et Patel et Spalth [4], l'observance était meilleure chez les femmes que chez les hommes. Dans notre étude, elle paraît meilleure chez les hommes. Mais comme Bloch et al. [5] et Mac Kean et Elkington [2] , nous avons trouvé que le sexe n'avait pas d'influence sur l'observance. Les défauts de moyens ont constitué la principale cause de mauvaise observance au traitement anti-glaucomateux et il semblerait être un facteur influençant statistiquement significatif comme l’avaient signalé plusieurs auteurs [3, 5, 6]. En raison du manque d'assurance maladie et de la non disponibilité de certains traitements à l’hôpital, 60 % de nos patients subvenaient personnellement à leurs frais médicaux. Ceci est responsable aux États-Unis de 10 à 15 % de non observance [3]. Le niveau intellectuel constitue un facteur influent l’observance et les malades qui ont reçu une instruction avaient une meilleure observance. Pour Rocheblave [1] , l'observance est plus liée au refus de la maladie, à la méfiance ou à la mauvaise intégration des explications du médecin qu'au niveau d'instruction. Plusieurs auteurs [5, 6] s'accordent à dire que l'observance est meilleure au début du traitement. Contrairement à notre étude qui a

trouvé que l’ancienneté du glaucome ne constitue pas un facteur influençant sur l’observance du traitement. Aucun de ces deux facteurs n’a influé l’observance thérapeutique dans notre étude. L'absence d'informations ou la mauvaise information constituent une cause de mauvaise observance [3, 4, 6, 7]. Il est admis qu'éduquer un malade revient à lui faire comprendre les caractéristiques essentielles de sa maladie, car seul un patient bien informé prendra ses médicaments en permanence et respectera ses rendez-vous de contrôle. Les recommandations exigent une bonne relation médecin/patient. Selon Davidson et Akingbehin [3] , le patient devrait avoir une attitude fraternelle vis-à-vis de son patient pour faire passer son message. CONCLUSION La prise en charge du glaucome chronique à angle ouvert est un processus de longue haleine. Le traitement médical n’est pas toujours bien suivi par les patients. Certaines recommandations destinées au prescripteur pourraient améliorer l’observance du patient et ainsi la qualité de la prise en charge de sa maladie :  Assurer un bon entretien avec le patient en expliquant la nature de la maladie et les buts du traitement (Lutter contre illettrisme médical).  Expliquer les bienfaits, les risques et les effets indésirables possibles les plus courants.  Fournir des conseils sur les questions de qualité de vie  Faire participer le patient dans la décision thérapeutique  Recommander un suivi régulier  Rechercher, à chaque consultation, les difficultés qui pourraient entraver

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l’observance au traitement anti glaucomateux. Afin d’atteindre ces objectifs, on peut s’aider d’un « livret de glaucomateux » contenant des informations sur la maladie et son profil évolutif, le suivi du patient, les ordonnances médicales et les résultats des explorations. REFERENCES 1. Rocheblave A. La coopération des malades porteurs d'un glaucome primitif chronique à angle ouvert. J Fr Ophtalmol, 1983; 6:83741. 2. Mac Kean JM, Elkington AR. Compliance with treatment of patients with chronic open angle glaucoma. Br J Ophthalmol, 1983;67:46-9.

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3. Davidson SI, Akingbehin T. Compliance in ophthalmology. Trans Ophthalmol Soc UK, 1980;100:286-90. 4. Patel SC, Spaeth GL. Compliance in patients prescribed eyedrops for glaucoma. Ophthalmic Surg, 1995; 26:233-6. 5. Bloch S, Rosenthal AR, Friedman A, Calcarolla P. Patient compliance in glaucoma. Br J Ophthalmol, 1977;61:531-4. 6. Bour T. Répercussion du GPAO sur la vie des patients et compliance au traitement. Étude épidémiologique sur 341 cas dans la Marne. Thèse Med, Reims, 1991. 7. Amon M, Menapace R, Wedrich A, Radax U. Aspects of glaucoma patient care and its impacts on compliance. Spektrum Augenheilkd, 1990;4:5-8.


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LES UVÉITES DE L’ENFANT: PROFIL CLINIQUE ET ÉTIOLOGIQUE AU CHU FARHAT HACHED DE SOUSSE Knani Leila, Zina Sourour, Yassine Trifi, Ben Hadj Salah Wassim, Mahjoub Hechmi, Ben Hadj Hamida Fafani Service d’ophtalmologie, CHU Farhat Hached de Sousse, Tunisie

RÉSUMÉ :

But :Analyser les particularités cliniques et le profil étiologique de l’uvéite de l’enfant à propos de 16 cas. Patients et méthode : Étude rétrospective à propos de 16 enfants atteints d’uvéite et colligés au service d’ophtalmologie au CHU FarhatHached de Sousse, entre janvier 2002 et décembre 2012. Tous les enfants ont bénéficié d’un examen ophtalmologique complet et d’un bilan étiologique exhaustif. Résultats : L’âge moyen des patients était de 10,8 ans, avec un sex-ratio de 0,45. L’uvéite était bilatérale dans 56,2 % des cas. La forme anatomoclinique de l’uvéite était antérieure dans 12,5 % des cas, intermédiaire dans 25 % des cas, postérieure dans 6,25 % des cas et une panuvéite dans 56,25 % des cas. L’uvéite était granulomateuse dans 25% des cas. Les uvéites les plus fréquentes étaient les uvéites idiopathiques (43,75%), suivies des uvéites associées à une sarcoïdose (18.75 %). Au moment du diagnostic de l’uvéite, 50%des patients présentaient une complication. Conclusion : L’uvéite de l’enfant est une affection rare dont l’évolution est émaillée de complications graves mettant en jeu le pronostic visuel. La cause la plus fréquente dans notre série est l’uvéite idiopathique. Mots-clé : uvéite, enfants, épidémiologie, sarcoidosec ABSTRACT

Aim: The aim of our study was to assess clinical features and aetiological profile of uveitis in children in a university hospital, Tunisia. Patient and methods: The clinical records of 16 children diagnosed with uveitis, at the Department of Ophthalmology in Farhat Hached University hospital in Sousse, between January 2002 and December 2012 were retrospectively reviewed. Results: The mean age of patients was 10.8 years with a sex ratio of 0.45. Uveitis was bilateral in 56.2% of cases. Panuveitis was the most common anatomic type of uveitis, seen in 56.25% of cases, followed by intermediate uveitis seen in 25% of cases. Anterior uveitis was seen in 12.5% of cases and posterior uveitis in 6.5% of cases. Uveitis was granulomatous in 25% of cases. The most common causes of uveitis were idiopathic uveitis (43.75%), followed by sarcoidosis (18.75%). Ocular complications were noted in 50% of cases at diagnosis. Conclusion: Uveitis in children is a rare condition that may be associated with poor visual prognosis. The most common cause is idiopathic uveitis. Key-words: uveitis, children, epidemiology, sarcoidosis

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INTRODUCTION L’uvéite de l’enfant est une affection rare mais souvent grave. Cette gravité est liée à un diagnostic plus tardif, à la chronicité de l’inflammation et ses complications oculaires et aux effets secondaires de la corticothérapie. Ainsi, la mise en jeu du pronostic visuel impose une enquête étiologique exhaustive et une prise en charge thérapeutique urgente. Le but de notre travail est d’analyser les particularités cliniques et le profil étiologique de l’uvéite de l’enfant à propos de 16 cas. PATIENTS ET METHODES Nous avons analysé rétrospectivement les dossiers de 16 enfants présentant une uvéite et colligés sur une période de douze ans (de janvier 2002 à décembre 2013) au service d’ophtalmologie CHU Farhat Hached sousse, Tunisie. Nous avons exclu de cette étude les uvéites post-traumatiques et post chirurgicales. Chaque enfant a bénéficié d’un interrogatoire précis des parents et de l’enfant quand l’âge le permettait, à la recherche des antécédents ORL (infection virale récente), dermatologiques (érythème, alopécie, vitiligo. . .), rhumatologique (arthralgies), gastroentérologiques, pulmonaires, neurologiques (céphalées, méningite. . .) ; et d’un examen ophtalmologique complet avec mesure de la meilleure acuité visuelle corrigée de loin et de près avec un examen complet et méthodique à la lampe à fente ; une angiographie à la fluorescéine et une tomographie en cohérence optique. Un bilan étiologique de première intention comprenant un examen pédiatrique, des examens biologiques (NFS, vitesse de sédimentation, électrophorèse des protides, bilan phosphocalcique et dosage de l’enzyme de conversion de l’angiotensine), sérologies

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parasitaires (toxoplasmose, toxocarose), sérologie de la syphilis, intradermoréaction à la tuberculine et radiographie de thorax. Le reste du bilan étiologique était orienté par l’interrogatoire et l’examen clinique. Les patients ont été regroupés selon la classification de l’International Uveitis Study Group fondée sur le type anatomique de l’uvéite (antérieure, intermédiaire, postérieure ou totale appelée encore panuvéite) [1]. Le diagnostic de la maladie de Behçet s’est basé sur les critères de l’international Study Group for Behçet’s Disease [2] et les critères de l’American Uveitis Group pour le syndrome de Vogt Koyanagi Harada (VKH) [3]. Pour toutes les autres causes, nous avons adopté des critères diagnostiques standards. RESULTATS L’âge moyen de la population étudiée était de 10,8 ans avec des extrêmes de cinq à 16 ans. Il existait une prédominance féminine avec un sex-ratio de 0,45. Les principaux motifs de consultation étaient la baisse de l’acuité visuelle (08 patients, soit 50 % des cas) et la rougeur oculaire (06 patients, soit 37.5% des cas). Le début de la symptomatologie était le plus souvent insidieux (68,75%). L’uvéite était unilatérale chez 07 patients(43,7%) et bilatérale chez 09 patients (56,2 %). L’examen ophtalmologique a permis de classer l’uvéite selon son type anatomoclinique (Tableau 1). Une exotropie a été noté dans deux cas(12.5%) L’uvéite était granulomateuse dans 25% des cas. La répartition des uvéites en fonction des étiologies figure dans le Tableau 2. Les uvéites les plus fréquentes étaient les uvéites idiopathiques (43,75 % ), suivies des uvéites associées à une sarcoïdose (18.75 % )


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Un hypopion a été relevé dans un cas de sarcoïdose. Une hypertonie oculaire au moment du diagnostic a été observée dans un cas ayant une uvéite herpétique bien contrôlée par le traitement médical et qui a disparu après traitement antiviral. Une vascularite rétinienne

a été observée dans 5 cas (31,25% des cas), une papillite dans 31,25 % des cas (5 cas) et un décollement séreux rétinien dans deux cas (12,5%). Au moment du diagnostic de l’uvéite, 50% des patients présentaient une complication.

Tableau 1 : Répartition des uvéites selon la forme anatomo-clinique

Type anatomoclinique des uvéites

nombre(%)

Antérieure

2(12,5%)

Intermédiaire

4(25%)

Postérieure

1(6,2%)

Panuvéite

9(56,25%)

Tableau 2 : Répartition des uvéites selon la cause

nombre de patients

Fréquence(%)

Sarcoidose

3

18,75

Maladie de Behçet

1

6,25

Toxoplasmose

1

6,25

Toxocarose

1

6,25

Herpès

1

6,25

Vogt-KoyanagiHarada

1

6,25

Maladie coeliaque

1

6,25

Idiopathique

7

43,75

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DISCUSSION Les uvéites chez l’enfant est une affection nettement moins fréquente que chez l’adulte [1], mais souvent grave, pouvant conduire à la cécité. Elles représentent 2 à 13% des uvéites prises en charge dans les centres tertiaires [2,3]. Leur incidence serait de 4,3 à 6,9 cas pour 100 000 enfants par an en Amérique du Nord et en Europe, leur prévalence est estimée à 30 cas pour 100 000 enfants [4]. L’âge moyen au moment du diagnostic varie entre huit et dix ans selon les études [1] avec prédominance féminine [2, 5, 6] comme c’est le cas pour nos patients: âge moyen de 10,8 ans et un sex-ratio de 0,45. Les uvéites de l’enfant sont plus souvent bilatérales que chez l’adulte. Cette prédominance s’applique aux uvéites antérieures, intermédiaires et aux panuvéites. En revanche, deux tiers des uvéites postérieures sont unilatérales [1]. Dans notre série, l’uvéite est essentiellement bilatérale (56,2%). Comme chez l’adulte, les uvéites antérieures sont les plus fréquentes (30 à 58 % des cas) suivies par les uvéites postérieures (14 à 30 %), les uvéites intermédiaires (10 à 27 %) puis les panuvéites (5 à 14 %) [1]. Contrairement, dans notre étude la panuvéite constitue la forme anatomoclinique la plus fréquente présente dans 56,25% des cas, proche de celle rapportée par Mattoussi (44 %) [6] Dans la plus grande série nord-américaine publiée à ce jour, portant sur 577 uvéites pédiatriques, les uvéites les plus fréquentes étaient les uvéites idiopathiques (28,8 %), suivies des uvéites associées à l’arthrite juvénile idiopathique (20,9 %) [7]. Dans notre série, les principales étiologies retrouvées sont la forme idiopathique (43,75%) et la sarcoïdose (18,75%). La sarcoïdose représente une étiologie fréquente d’uvéite non

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infectieuse chez l’enfant [8].Les uvéites de l’enfant sont souvent torpides et insidieuses comme le cas de notre série le début était insidieux dans 68,75 %, ce qui explique la fréquence élevée de complications (18 à 80 % des cas). En effet, dans notre étude 68,7 % des patients présentaient une complication dont 50 % au moment du diagnostic de l’uvéite. Concernant les séries tunisiennes, cette fréquence est de 65,3 % pour Chebil [9], de 74,4 % pour Khairallah [09] et de 16,7 % pour Mattoussi [6]. Ces complications sont généralement dominées par les synéchies iridocristaliniennes et les cataractes. Les complications plus graves sont cependant rares (6 à 10 % des cas).

CONCLUSION L’uvéite de l’enfant est une affection rare dont l’évolution est émaillée de complications graves mettant en jeu le pronostic visuel. Malgré le développement de techniques d’investigations de plus en plus sophistiquées, la cause de l’uvéite reste le plus souvent indéterminée. La prise en charge doit être précoce basée sur une démarche diagnostique rigoureuse et un bilan étiologique orienté.

CONFLITS D’INTÉRETS : AUCUN.

REFERENCES [1] Brézin A. Les uvéites. Rapport de la société française d’ophtalmologie. Paris: Masson; 2010. [2] Cunningham Jr ET. Uveitis in children.OculImmunolInflamm 2000;8:251-61. [3] Kump LI, Cervantes-Casta˜neda RA, Androudi SN, Foster CS. Analysis of pediatric


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uveitis cases at a tertiary referral center. Ophthalmology 2005;112:1287-92 [4] Holland GN, Stiehm ER. Special considerations in the evalution and management of uveitis in children. Am J Ophtalmol2003;135:867-78 [5] Khairallah M, Attia S, Zaouali S, Yahia SB, Kahloun R, MessaoudR, et al. Pattern of childhood-onset uveitis in a referral center in Tunisia, NorthAfrica. OculImmunolInflamm 2006;14(4):225-31 [6] Matoussi N, Ben Slima S, Fitouri Z, Marrakchi S, Ben BecherS. Uveitis of children: a report of 18 cases. Arch Pediatr2007;14(7):856-60.

[7] Smith JA, Mackensen F, Sen HN, Leigh JF, Watkins AS, PyatetskyD, et al. Epidemiology and course of disease in childhood uveitis. Ophthalmology 2009;116:1544-51. [8] Shetty AK, Gedalia A. Childhoodsarcoidosis: a rare but fascinatingdisorder. PediatrRheumatol J 2008;6:16. [9] Chebil A, Chaabani L, Kort F, Ben Youssef N, Turki F, El Matri L. Epidemiologic study of pediatric uveitis: a series of 49 cases. J Fr Ophtalmol 2012;35(1):30-4.

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Cas Cliniques

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FUNGAL KERATITIS CAUSED BY ACREMONIUM: A CASE REPORT AND REVIEW OF THE LITERATURE Malek I*, Sayadi J*, Romdhane O*, Mekni M*, Fekih O*, Zgholli H* , Zghal I*, Ben Ayed N**, Nacef L* *Department A of Ophthalmology, Hedi Rais Institute of Ophthalmology **Clinical Biologic laboratory. Hedi Rais Institute of Ophthalmology Faculty of Medicine of Tunis, University of El Manar, Tunis, Tunisia

Abstract: A 26-year-old white woman presented with a chief complaint of severe ocular pain, redness and blurred vision in her left eye which occurred following a windstorm exposure. Biomicroscopy revealed an important conjunctival injection, a perikeratic circle and a 4 mm paracentral corneal epithelial defect surrounded by ring-shaped stromal infiltration with a feathery border. The patient was started on topical fortified Vancomycine, Ceftazidime, Amphotericin B, Fluconazole and oral Fluconazole. Corneal cultures were positive for Acremonium. Topical Voriconazole with oral Voriconazole were prescribed. Medical treatment resolved the infection but did not preclude the stromal necrosis and the perforation. A penetrating keratoplasty was performed, 18 months after surgery the graft remains clear. To our knowledge, this is the first reported case of Keratitis due to Acremonium in North Africa. We would like to remark the involved predisposing factor and the success of the medical-surgical treatment despite the advanced stage of the infection.

Key words: Fungal keratitis, Acremonium, Voriconazol, prognosis, keratoplasty.

Acremonium are filamentous saprophytic fungi wildly spread in the environment and isolated mostly from soil, dead plants, debris, air conditioning systems and building materials. Keratitis due to fungi belonging to the genus Acremonium is a very rare condition; Fusarium, Aspergillus and Candida are the most common etiology of keratomycosis. We report a case of fungal keratitis caused by Acremoniumsp developed following a windstorm exposure. Medical treatment with Amphotericin B, Fluconazol and Voriconazol as well as crosslinking were partially successful and a penetrating keratoplasty was performed. To our knowledge, this is the first

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reported case of Acremonium Keratitis in North Africa. CASE REPORT A 26-year-old white woman living in the countryside presented with a chief complaint of severe ocular pain, redness and blurred vision in her left eye. The patient reported that she has been exposed to a windstorm two days before. Her medical history was unremarkable. The best-corrected visual acuity was in the right eye 10/10and in the left eye 6/10. On examination, biomicroscopy revealed in the left eye an important conjunctival injection, a


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perikeratic circle and a 4 mm paracentral corneal epithelial defect which was surrounded by ring-shaped stromal infiltration with a feathery border. A 0.5 mm satellite epithelial defect was detected. Intraocular pressure was normal. The anterior chamber was quiet. There were no lens changes and the posterior pole was unremarkable. The right eye evaluation was within normal limits. On admission, corneal ulcers were scraped with a scalpel blade and the culture specimens were obtained by scraping the base and margins of the ulcers. These specimens were placed onto slides for Gram staining and potassium hydroxide (KOH) staining according to standard protocols. Furthermore, specimen samples were inoculated into blood, chocolate, Mac Conkey, and Sabouraud agar plate surfaces for culture. All bacterial and fungal isolates were identified using standard laboratory techniques. Immediately after admission and prior to the culture results the patient was started on an hourly instillation of topical fortified Vancomycine, Ceftazidime,0.15%,Amphotericin B, 0.2% Fluconazole with oral Fluconazole, cycloplegics and artificial tear drops. Corneal smears were negative. After 5 days on this therapy, the condition of the left eye worsened, the size and the depth of the infiltrate was markedly increased with the appearance of an endothelial plaque and a central descmatocele (Figure 1A). The 7th day, hypopion, posterior synechiae and a dense fibrinous membrane in the pupillary area developed (Figure 1B). Corneal cultures were subsequently positive for Acremonium (Figure 2). Topical 1%Voriconazole with oral Voriconazole were prescribed immediately. After 10 days on this therapy, the patient became painless, the size of the infiltrate was

unchanged and the hypopion had disappeared. Nevertheless a stromal necrosis occurred with threatening perforation. A decision was taken to perform Riboflavin/ ultraviolet light A (UVA) light-mediated cross linking on the 29th day (Figure 1D). A written consent was signed by the patient. However, 10 days later the perforation occurred (Figure 1D), therefore a penetrating keratoplasty was performed (Figure 1E). Following keratoplasty the patient was treated with oral Voriconazol for a month and topical Cyclosporine and corticosteroids. Five months after keratoplasty, a synechiolysis and a removal of the pupillary membrane were undergone. Eighteen months after surgery the graft remains clear with a best correcte dvisual acuity of 3/10 (Figure 1F). During this period, no sign of recurrence of infection or graft rejection were observed.

Figure 2. A.Colony formation on Sabouraud’s dextrose agar exhibited a white, creamy and fluffy appearance. B. Histopathologic section with Grocott staining shows numerous septate hyphae and rounded spores between the corneal lamellae (Original magnification×10).

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Figure 1. Slit lamp photographies : A.Five days post-therapy :important conjunctival injection, paracentral stromal infiltrate with an endothelial plaque and central descmatocele. B. Fifteen days post-therapy : stromal infiltration had increased, a hypopion developed. C. Six days after crosslinking. D. Fourteen days after crosslinking : the cornea was melting around the glue and perforation occurred. E.Postoperative view five days after corneal graft. F.Final appearance of the eyeball during the last followup: The graft remains clear.

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DISCUSSION The genus Acremonium isolated from dead plant material and soil includes approximately 150 species. The earliest documented reports of Acremonium dates back to 1839. However, there was a little evidence of the pathogenicity of Acremonium until the twentieth century. Das et al [1] reported a total of 17 cases between 1971 and 2010 of worldwide clinical ocular infections caused by different species of Acremonium. Alfonso et al [2] reported four cases of Acremonium fungal keratitis associated with laser-assisted in situ keratomileusis (LASIK) that were performed by different surgeons during the same time period in the same operating room. Kim et al [3] reported five cases of fungal keratitis from Acremonium species which occurred following a corneal traumatism with vegetable contaminated matter. Aside from these instances, until recently, all clinical publications on Acremonium keratitis consisted of single case reports. The most common cause of fungal keratitis is a trauma with contaminated matter(often vegetable) [3]. Surgical procedures and immunosuppression are also reported to be associated with fungal keratitis [2]. Nevertheless, in our case there is no previous trauma, we believe that the cornea was inoculated with plant debris during the windstorm exposure. There are no standard therapies for infections caused by Acremonium with regard to choice of agent or duration of therapy. This is due to its low incidence and the poor correlation between in-vitro susceptibility testing and clinical response. The fungus is susceptible to Nystatin, Ketoconazole, Itraconazole and Amphotericin B.

Topical and oral Voriconazole have been reported to be effective for the treatment of fungal keratitis. Voriconazol acts by interfering with the biosynthesis of ergosterol, its antifungal activity has been proved in experimental and clinical studies [4]. New antifungal agents, like Caspofungin, represent alternatives to the cases that do not respond to Voriconazole [5]. Haddad et al treated successfully a case of keratitis due to Acremonium by a combination of intrastromal and intracameral Voriconazol [6]. Li et al suggested that UVA/riboflavin crosslinking is a viable option for management of fungal keratitis. Crosslinking enhances the corneal resistance against microbial degradation and corneal melting, and contribute to the reduction of the inflammatory response during corneal infection [7]. Nevertheless, large and deep ulcers often require combined medical-surgical treatment, as did our patient who underwent penetrating keratoplasty due to corneal perforation. In this case, medical treatment resolved the infection but did not preclude the stromal necrosis and the perforation. In conclusion, to our knowledge, this is the first reported case o fKeratitis due to Acremonium in North Africa. We would like to remark the involved predisposing factor and to point out the success of the medical-surgical treatment despite the advanced stage of the infection.

ACKNOWLEDGEMENTS

The authors have no proprietary interest in any of the treatments or techniques used in this study.

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REFERENCES 1. Das S, Saha R, Dar SA, Ramachandran VG. Acremonium species: a review of the etiological agents of emerging hyalohyphomycosis. Mycopathologia. 2010;170(6):361–375. 2. Alfonso JF, Baamonde B, Santos J, et al. Acremonium fungal infection in 4 patients after laser in situ keratomileusis. J Cataract Refract Surg. 2004 Jan;30(1):262-7. 3. Kim SJ1, Cho YW2, Seo SW1, Kim SJ3, Yoo JM1. Clinical experiences in fungal keratitis caused by Acremonium. ClinOphthalmol. 2014 Jan 23;8:283-7. 4. Read RW, Chuck RSH, Rao NA, Smith RE. Traumatic Acremoniumatrogriseum keratitis

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following laser assisted in situ keratomileusis. Arch Ophthalmol2000 Mar;118(3):418-21. 5. Neoh CF1, Daniell M2, Chen SC3, Stewart K4, Kong DC5. Clinical utility of caspofungin eye drops in fungal keratitis. Int J Antimicrob Agents. 2014 Aug;44(2):96-104. 6. Haddad RS1, El-Mollayess GM. Combination of intracameral and intrastromalvoriconazole in the treatment of recalcitrant Acremoniumfungalkeratitis.Middle East Afr J Ophthalmol. 2012 AprJun;19(2):265-8. 7. Li Z, Jhanji V, Tao X, Yu H, Chen W, Mu G. Riboflavin/50ltraviolet light-mediated crosslinking for fungal keratitis. Br J Ophthalmol. 2013 May;97(5):669-71.


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NEVRITE OPTIQUE DANS LE CADRE D’UNE ENCEPHALOMYELITE AIGUË DISSEMINEE : A PROPOS DE 2 CAS Rim Kahloun, Sourour Zina, Imen Ksiaa, Nesrine Abroug, Bechir Jelliti, Sonia Zaouali, Salim Ben Yahia, Moncef Khairallah Service d’Ophtalmologie, Hôpital Universitaire Fattouma Bourguiba, Faculté de Médecine, Université de Monastir, Monastir, Tunisie

Pas de conflit d’intérêts pour tous les auteurs Ce travail a été soutenu par le Ministère de l'enseignement supérieur et la recherche de la Tunisie. Résumé :

But : Rapporter deux cas de neuropathie optique révélant une encéphalomyélite aiguë disséminée (EMAD). Observation : Deux patientes âgées respectivement de 9 et 7 ans, ayant présenté chacune une baisse unilatérale de l’acuité visuelle en rapport avec une neuropathie optique associée à une paralysie oculomotrice chez la deuxième patiente. L’IRM cérébrale a objectivé des lésions multifocales en hypersignal T2 en faveur d’une EMAD. Les deux patientes étaient traitées par des boli de méthylprednisolone avec relais par prednisone orale. L’évolution était favorable avec récupération de la fonction visuelle chez les deux patientes. Une récidive bien jugulée par corticothérapie systémique a été notée chez une patiente. Conclusion : L’EMAD est une affection inflammatoire démyélinisante du système nerveux central. Une névrite optique uni ou bilatérale peut être inaugurale chez l’enfant. Elle doit être évoquée devant toute névrite optique de l’enfant.

L’encéphalomyélite aiguë disséminée est une affection inflammatoire et démyélinisante du système nerveux central touchant essentiellement l’enfant et faisant suite à un épisode infectieux le plus souvent viral ou à une vaccination [1-3]. Le tableau clinique est marqué par l’installation de signes neurologiques diffus aigus ou subaigus associés ou non à une névrite optique [3]. La névrite optique isolée est rarement reportée [35]. Nous rapportons deux observations de neuropathie optique révélant une encéphalomyélite aiguë disséminée

OBSERVATIONS

OBSERVATION 1 Enfant âgée de 9 ans se présente pour baisse de la vision de l’œil gauche (OG). L’examen ophtalmologique a montré une acuité visuelle (AV) à 10/10 au niveau de l’œil droit (OD) et limitée à la perception lumineuse au niveau de l’OG. L’examen ophtalmologique a objectivé une altération du réflexe photomoteur afférent au niveau de l’OG, le reste de l’examen du

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segment antérieur (SA) et du fond d’œil (FO) était normal au niveau des 2 yeux (Figure 1).

Figure 1. Patiente 1. Photographies du FO montrant une papille d’aspect normal ODG.

Les potentiels évoqués visuels étaient en faveur d’une neuropathie optique de l’OG. L’examen général a objectivé un syndrome extrapyramidal et pyramidal. L’IRM a montré de multiples lésions en hypersignal T2 de la substance blanche en faveur d’une encéphalomyélite aiguë disséminée (Figure 2). La patiente a bénéficié de 3 boli de solumédrol relayés ensuite par la prednisone par voie orale à la dose de 1mg/kg/j avec dégression progressive sur 1 mois. L’évolution était favorable avec récupération d’une AV à 10/10.

Figure 2. Patiente 1. Des coupes IRM montrant des multiples lésions bilatérales et asymétriques de même âge en hypersignal T2 de la substance blanche.

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OBSERVATION 2 Enfant âgée de 7 ans sans antécédents pathologiques notables qui consulte pour baisse brutale de la vision de l’OD. L’examen ophtalmologique a objectivé une AV < 1/10 avec une paralysie du III extrinsèque et du VI (Figure 3), un réflexe photomoteur afférent altéré et un œdème papillaire au FO au niveau de l’OD (Figure 4). L’examen de l’OG était sans particularités. L’examen général était normal. L’angiographie à la fluorescéine a confirmé la présence de l’œdème papillaire au niveau de l’OD (Figure 5). La tomographie en cohérence optique de l’OD n’a pas montré d’œdème maculaire ou de décollement séreux rétinien. L’IRM a objectivé de multiples lésions bilatérales et asymétriques de même âge en hypersignal T2 et FLAIR de la substance blanche (Figure 6) en faveur de l’encéphalomyélite aigue disséminée. La patiente a reçu 3 boli de solumédrol relayés ensuite par voie orale à la dose de 1mg/kg/j avec dégression progressive. Une amélioration de la symptomatologie était notée au 3ème jour du traitement avec une restitution de l’AV à 10/10, régression de la paralysie oculomotrice et résolution complète de l’œdème papillaire (Figure 8). Deux semaines après le début du traitement, la patiente a présenté une récidive bilatérale jugulée par un deuxième bolus de solumédrol puis dégression de la corticothérapie sur un mois avec évolution favorable.


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Figure 3. Patiente 2. Photographie du FO et angiographie à la fluorescéine de l’OD montrant un œdème papillaire.

Figure 4. Patiente 2. Des coupes IRM montrant des lésions multifocales bilatérales et asymétriques, de même âge, en hypersignal T2 (A,B) et FLAIR (C) de la substance blanche.

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DISCUSSION

L’encéphalite aiguë disséminée, décrite pour la première fois par Lucas [1] en 1790, est une affection inflammatoire et démyélinisante du système nerveux central touchant essentiellement l’enfant et faisant suite à un épisode infectieux le plus souvent viral ou à une vaccination [2]. Le tableau clinique est caractérisé par l’installation brutale de signes neurologiques diffus avec des lésions caractéristiques à l’IRM [3, 4,10]. La névrite optique associée à d’autres manifestations neurologiques est fréquemment observée [6, 7, 9, 13, 15], mais elle est rarement révélatrice de la maladie [8, 12, 14]. Une étude menée par Kotlus et al [13] à propos de dix enfants atteints d’une encéphalomyélite aiguë disséminée avait montré la présence d’une névrite optique dans six cas, bilatérale dans cinq cas. Les autres manifestations oculaires étaient à type de baisse de l’AV, une douleur à la mobilisation du globe ainsi qu’un nystagmus. Tous les patients avaient des signes neurologiques associés à type d’ataxie, hémiparésie, hypoesthésie et dysarthrie. Une névrite optique avec hémorragie péripapillaire a été rapportée dans un cas d’encéphalomyélite aiguë disséminée [15]. Chez nos deux patientes la névrite optique était le premier signe révélateur du tableau. Elle était unilatérale et associée à une hémiplégie avec syndrome extrapyramidal chez la première patiente et bilatérale et associée à une paralysie oculomotrice sans autres signes généraux chez la deuxième patiente. Le diagnostic positif de l’encéphalomyélite aigue disséminée est basée sur la confrontation des données de l’examen clinique à ceux de l’RM qui va mettre en évidence des lésions multifocales en hypersignal T2 mal limitées, de même âge, rehaussées par le gadolinium

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localisées essentiellement au niveau de la substance blanche, pouvant aussi toucher le thalamus et les noyaux gris centraux [3, 10, 11]. Le traitement de l’encéphalomyélite aiguë disséminée fréquemment utilisé est une corticothérapie générale (3 boli de solumédrol ensuite relais par voie orale) associé en cas de besoin à des immunoglobulines en intraveineux malgré qu’il n’y a pas assez d’études comparant l’efficacité des différents agents immunomodulateurs [3-5,7]. Le pronostic visuel est généralement favorable et l’évolution est souvent monophasique [16]. Des cas d’encéphalomyélite aiguë disséminée biphasiques, comme notre deuxième cas, et multiphasique ont été rapportés dans 25% à 33% des cas, survenant surtout au cours de la dégression de la corticothérapie [3]. Les cas avec récidive après arrêt de la corticothérapie doivent poser un diagnostic différentiel avec la sclérose en plaques qui touche en général des enfants plus âgés, avec présence de lésions d’âge différent et de siège surtout périventriculaire à l’IRM [10,16]. De ce fait il faut souligner l’importance d’un suivi régulier et pour une longue période avec surveillance clinique et des IRM répétées afin de différencier une encéphalomyélite aiguë disséminée d’une sclérose en plaque car le traitement, le pronostic et les séquelles neurologiques sont différents [10, 16].

CONCLUSION

L’encéphalomyélite aiguë disséminée est une affection inflammatoire et démyélinisante du SNC d’évolution généralement monophasique et de pronostic favorable mais peut être récurrente posant un diagnostic différentiel avec la sclérose en plaques.


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SYNDROME DE BLÉPHAROPHIMOSIS PTÔSIS ÉPICANTHUS INVERSUS : À PROPOS D’UNE FAMILLE W.Zbiba, A.Baba, E.Kallel, E.Bouayed, N.BenAbdessalem, I.Elleuch, M.Lahdhiri

L

e syndrome de blépharophémosis ptôsis épicanthus inversus (BPES) est un syndrome malformatif complexe, caractérisé sur le plan ophtalmologique par un rétrécissement des fentes palpébrales, une ptose palpébrale s’accompagnant d’un raccourcissement de la paupière consécutive à une hypoplasie et une fibrose du muscle releveur de la paupière supérieur et un épicanthus inversus.

photo, pareil pour le fils ainé âgé de 21 ans et le cadet âgé de 7 ans (figure 2a, 2b et 2c, respectivement). La sœur de notre patient était elle aussi atteinte du syndrome BPES, et présentait par ailleurs une infertilité. L’arbre généalogique est représenté dans la figure 3.

Figure 1 : BPES bilatéral

OBSERVATION Il s’agit d’un patient âgé de 54 ans, aux antécédents de glaucome chronique à angle ouvert sous trithérapie, qui consulte pour une baisse bilatérale et progressive de la vision, plus marquée à droite. L’examen ophtalmologique a noté une acuité visuelle limitée à voit bouger la main à droite, et à compte les doigts à 30cm à gauche avec, aux niveaux des yeux, une hypertrichose, un blépharophimosis, un épicanthus inversus, un telecanthus et un ptosis sévère avec un signe de Charles Bell négatif (figure1). Le patient avait, également, une cataracte bilatérale et un fond d’œil inaccessible aux niveaux des 2 yeux. L’anamnèse retrouve des cas similaires dans la famille. Le père de notre patient présentait, lui aussi, un BPES documenté par une ancienne

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Figure 2 : BPES chez les cas similaires

Figure 3 : arbre généalogique


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DISCUSSION Sur le plan génétique, le BPES est une affection autosomique dominante. Il existe, néanmoins, quelques cas sporadiques. Une délétion dans le bras long du chromosome 3 a été décrite dans de nombreux cas [1]. Le ou les gènes responsables de ce syndrome ont été localisés par analyse de liaison en 3q22-q23 [2]. Ce gène s’exprime dans le mésenchyme des paupières pendant la phase de développement et dans les follicules ovariens chez l’adulte. L’expressivité est variable permettant de définir deux types de blépharophimosis [3] :  le type 1A où la pénétrance est complète. Le blépharophimosis est, dans ce cas, transmis par l’homme car la fertilité des femmes est considérablement réduite par un syndrome de résistance ovarienne aux gonadotrophines ou une ménopause précoce [4,2]  le type 1B où la pénétrance est incomplète. Il est transmis aussi bien par les hommes que par les femmes. Dans notre observation, le caractère autosomique dominant a été confirmé par l’arbre généalogique. Le séquençage génique n’a pas pu être réalisé par manque de moyens. Concernant l’étiologie du syndrome, on évoque la perte de matériel génétique d’une région contenant au moins 2 gènes indépendants mais proches l’un de l’autre, codant l’un pour l’ouverture des paupières in utero, et le ou les autres pour des facteurs influençant la fonction des follicules et leur atrésie, voire une portion protectrice du développement des follicules. La sévérité de l’atteinte serait le reflet du nombre de gènes atteints. Cette théorie fait appel à la notion de« contiguousgene syndrome » [5]. Sur le plan clinique, Le BPES associe des paupières courtes, ptôsées et épaisses, des

fentes palpébrales courtes, un épicanthus inversus, et un télécanthus, constituant, ainsi, une tétrade décrite par Xavervon Galezowski en 1875 et par Vignes [6] en 1899. Le ptosis peut être à l’origine d’une amblyopie fonctionnelle. Il s’agit d’un ptôsis myogène, avec histologiquement une raréfaction des fibres musculaires associée à une fibrose. La chirurgie du ptosis du blépharophimosis reste de mauvais pronostic du fait de l’atrophie et de la fibrose du muscle releveur, la brièveté palpébrale supérieure et l’absence de pli [7]. Une myopie forte, un strabisme, une hypertrichose, un rebord orbitaire plat, une pseudoénophtalmie ont été, également, décrits dans ce syndrome [8]. Les femmes atteintes de BPES ont, en général, un caryotype normal. Fraser et al [5], ont émis l’hypothèse qu’un ou plusieurs mécanismes pourraient initier l’inhibition du développement des follicules et, dans le même temps, augmenter le taux d’atrésie folliculaire. La plupart des patientes touchées par ce syndrome ont une ménarche normale. Le même cas est pour la patiente décrite dans la famille que nous rapportons et qui présente une stérilité.

CONCLUSION

Le BPES est une affection génétique rare transmise de manière autosomique dominante. Son risque majeur est l’amblyopie fonctionnelle. Le BPES de type I est associé à une infertilité. Un conseil génétique est indiqué après le diagnostic de BPES dans une famille.

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[5] Fraser IS, Shearman RP, Smith A, Russell P. An association between blepharophimosis, resistant ovary syndrome and true premature menopause. FertilSteril 1988; 50: 747-51. [6] Vignes NI. Epicanthus héréditaire. Rev Gen Ophtal 1889 ; 8 : 438. [7] E.H. Touiza, A. Benatiya, I. Almasbahi, M. Bouayed, H. Tahri. Blepharophimosis ptosis epicanthus inversussyndrom: a case report doi:10.1016/S0181-5512(07)80421-9 [8] M. Morales, D. Chardonnens, A. Bottani, M. Gersbach-Forrer, A. Campana Le syndrome du blépharophimosis-ptosis-epicanthusinversus associé à une stérilité Doi : JGYN-12-1999-288-0368-2315-101019-ART8


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CALCIFICATION CHOROIDO-SCLÉRALE IDIOPATHIQUE : À PROPOS D’UN CAS Ammous I, Letaif I, Zhioua I, Bouayed E, Ben yakhlef A, Mili Boussen I, Errais K, Zhioua R. Hopital Charles Nicolle, Tunis (Tunisie)

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es calcifications choroido-sclerales idiopathiques(CCSI) sont une pathologie dégénérative en rapport avec un dépôt calcique dans la sclère siégeant en postérieur longeant les muscles oculomoteurs ou en antérieur visibles au FO siégeant le long des vaisseaux temporaux(1). C’est une pathologie du sujet âgé de race blanche. Le diagnostic est aisée basé sur l’examen du FO dans la forme antérieur aidée par le scanner orbitaire et l’échographie en mode B. Les CCSI sont un diagnostic d’élimination. En effet, ils posent un problème de diagnostic différentiel avec les tumeurs du FO et les CCS secondaires à des pathologies métaboliques ou syndromiques(2),(3),(4) qu’il faut toujours rechercher. Le pronostic est bon en dehors des complications tel qu’un décollement séreux de la rétine ou une neovascularisation rétinienne. Ce qui impose une surveillance régulière du FO. OBSERVATION Patiente âgée de 50 ans adressée pour un examen ophtalmologique systématique. Elle présentait dans ses antécédents un rhumatisme psoriasique traitée médicalement. L’examen ophtalmologique a objectivé une acuité

visuelle à 10/10 P2, un segment antérieur calme et un TO à 14mmHg aux deux yeux. L’examen du FO au niveau de l’œil droit a retrouvé une masse unique blanchâtre sous rétinienne faisant plus qu’un diamètre papillaire siégeant sous les vaisseaux temporaux supérieurs les soulevant légèrement sans oedème ni exsudats (figure 1). L’examen du FO de l’œil gauche est strictement normal (figure 2). L’échographie en mode B a montré une masse hyperéchogène au niveau du plan sclérochoroidien avec cône d’ombre postérieur (figure 3).L’angiographie à la fluorescéine a montré un masquage de la fluorescence choroïdienne au temps précoce avec une imprégnation et une diffusion tardive de la fluorescéine (figure 4). L’angiographie au vert d’indocyanine a montré un aspect hypo fluorescent de la masse tout au long de la séquence agiographique (figure 5). L’OCT time Domain a confirmé le siège profond de la masse en montrant un soulèvement en dôme du complexe EP-chorio-capillaire sans signes d’exsudation. Un bilan étiologique a été réalisé comportant une IRM cérébro-orbitaire, un bilan phosphocalcique, un dosage de la magnésemie et un bilan rénal qui n’a pas révélé par ailleurs d’anomalies (figure 6).

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Figure 1 : photographie couleur du FO OD : masse blanche-jaunâtre sous les vaisseaux temporaux

Figure 2: photographie couleur du FO OG : FO normal

Figure 3 : Echographie en mode B de l’OD : masse hyperéchogène avec cône d’ombre postérieur

fig 4 : angiographie à la fluorescéine de l’OD : hypo fluorescence précoce de la masse avec imprégnation et diffusion tardive

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fig 5 : Angiographie au vert d’indocyanine : hypoflurescence de la masse le long de la séquence angiographique

Surélévation en dôme du complexe EP-Mb de bruch et de la rétine neurosensoriellle

fig 6 : OCT : surélévation en dôme du complexe EPmembrane de Bruch.

IRM : pas d’anomalies relevées

fig 7 : IRM cérébro-orbitaire sans anomalies

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DISCUSSION Les CCS sont une pathologie rare, il s’agit de lésions multifocales surélevées, blancjaunâtres, de découverte fortuite. Le siège antérieur le long des arcades vasculaires (90%) supérieures (58%) est le plus commun(1,2). Parfois ils siègent en regard de l’insertion des muscles obliques. L’atteinte est généralement bilatérale (40-80%) et asymétrique. Elle se voit aussi bien chez la femme que l’homme de la cinquantaine (2). Sur le plan histopathologique, c’est un dépôt acellulaire amorphe, basophile d’origine calcique dans les couches sclérales pouvant causer une altération de l’EP. Dans les formes idiopathiques, l’origine de ce dépôt est non élucidée ; certains lui imputent une origine dystrophique, alors que l’autres incriminent une inflammation chronique de la sclère (2). La plus grande série rapportée de CCS était celle de Shields 2014 (51 cas)(1). Honavar en 2001 a rapporté une série de 27 patients diagnostiqués comme CCS et étaient en rapport avec des pathologies bénignes tel qu’une hypomagnésémie, hypovitaminose D ou un syndrome de Gitelman(34). L’étiologie idiopathique bien que la plus fréquente des causes de CCS est un diagnostic d’élimination(5). Dans la série de Shields(1), elles étaient observées dans 5% des patients ayant une tumeur intraoculaire. Un bilan phosphocalcique doit être fait afin d’éliminer une origine systémique(2,4,6,7,8). L’aspect ophtalmoscopique est comparable à toutes les CCS, surélevée ou planes (CCS plaque like), homogène comme c’est le cas de notre cas ou hétérogène entourant parfois des zones d’atrophie de l’épithélium pigmentaire. Un décollement séreux de la rétine (DSR) ou même une neovascularisation choroïdienne est rarement observé(2,4,6). Le diagnostic sera confirmé surtout par les données de l’échographie en mode B et le scanner orbitaire

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et secondairement par l’angiographie (2,3,4,9) rétinienne . L’échographie en mode B montre un aspect hyper-échogène de la masse appendue au plan scléro-choroidien avec cône d’ombre postérieur. Le scanner orbitaire montre une plaque de densité calcique au niveau du plan scléro-choroidien. A l’angiographie à la fluorésceine, la CCS est hypo fluorescente au stade précoce, l’imprégnation commence au temps veineux et devient massive au temps tardif. . L’angiographie au vert d’indocyanine, révèle une masse hypo fluorescente tout au long de la séquence angiographique(2,4). L’aspect de la CSS est typique en OCT spectral domain (EDI) : masse profonde sclérale à hyper-réflectivité modérée avec un ombrage postérieur associé à un amincissement important de la choroïde et une compression des vaisseaux choroïdiens de gros calibre. Une surélévation de la rétine neurosensorielle est généralement observée et même une atrophie de la rétine neurosensorielle secondaire à la diminution du flux sanguin chroidien(10, 11). L’aspect des CCS peut être confondu avec de nombreuses pathologies du FO, un noevus achrome, des métastases choroïdiennes, un mélanome malin de la choroïde (MMC)et un lymphome oculaire(4,7). L’échographie en mode B et au besoin une IRM orbitaire est nécessaire pour éliminer une pathologie maligne. La plupart des patients sont asymptomatiques, le siège étant loin du centre, cependant vu le risque de complications tel qu’une neovascularisation choroïdienne ou un DSR une surveillance régulière s’impose. Les formes centrales, plus rares n’ont pas de prise en charge particulière. Le pronostic est généralement favorable en dehors des formes centrales, compliquées ou liées à une pathologie systémique.


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CONCLUSION Les CCS sont une pathologie rare, touchant préférentiellement le sujet d’âge mur et plus rarement le sujet jeune. Leur siège électif étant le long des arcades temporales supérieures. Bien que les CCSI sont un diagnostic d’élimination il demeurent l’étiologie la plus fréquente des CCS. Les complications oculaires tel qu’une neovascularisation choroïdienne ou un DSR sont à détecter par un suivi régulier. Néanmoins un bilan phosphocalcique, un examen général et parfois même une imagerie complète doivent être demandé afin d’éliminer une cause systémique ou néoplasique.

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ACUTE ESOTROPIA AND OPTIC NEUROPATHY REVEALING AN ORBITAL RHABDOMYOSARCOMA

J Brour, N Zerai, M Ouedreni, B Ben Romdhane, Chéour M Service d’Ophtalmologie CHU Habib Bourguiba 3029 Sfax TUNISIE

Abstract : Purpose : to focus on the need to think of rhabdomyosarcoma next to any ocular sign with rapid progression in childhood especially acute ocular deviation. Case report : a ten-year-old girl who presented with an acute strabismus sassociated to retrobulbar optic neuropathy was subsequently diagnosed as alveolar rhabdomyosarcoma Conclusions : Rhabdomyosarcoma is the most common mesenchymal tumor of childhood. It is often diagnosed at advanced stages with orbital signs such as proptosis and globe displacement. Rhabdomyosarcoma presenting as esotropia with limited abduction as the initial sign is rare. Clinically, this condition is more likely to be misdiagnosed. It’s recognintion can lead to prompt diagnosis and treatment.

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habdomyosarcoma (RMS) originates from pluripotent mesenchyme. It is the most common soft-tissue sarcoma of the head and neck in childhood and comprises 4% of all pediatric malignancies, with 10% of all cases occurring in the orbit. Most of these tumors interest chidren at the first decade of life (1, 2). Ocular RMS can be primary when it interests initially the soft tissue of the orbit the eyelid, the conjunctiva or the anterior uvea, secondary, when it gains access to the orbit by direct extension from paranasal sinuses, pterygopalatine fossa, infratemporal fossa, or nasopharynx, or metastatic from a primary neoplasm in other parts of the body, without direct communication to the orbit(3). It can be revealed by many unspecific features that can lead to a delay of the diagnosis since it is usually associated with inflammatory signs.(4)

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We attempt to focus on the need to think of rhabdomyosarcoma next to any ocular sign with rapid progression in childhood especially acute ocular deviation. CASE REPORT Our patient was aged ten when she was referred to our department for acute onset strabismus of the left eye. There was no history of trauma preceding the symptoms but the patient noticed blurred vision concomitant to ocular deviation. At first consultation, the patient had visual acuity limited to count ing fingers in left eye. In the primary gaze, the patient presented an incomitant esotropia of the left eye with limitation of abduction. (figure 1)Pupillary examination with cover test revealed a


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positive marcus gun sign on her left eye. Eye fundus examination was normal. In the other hand, there was no ophthalmologic abnormal signs in the right eye.

Figure 2

Figure 1

a

DISCUSSION b

C

Acute VI nerve palsy associated to retrobulbar neuropathy was suspected, so that wedecided to undergo further investigations. Cerebral and orbital CT-scan showed an infiltrating mass, isodense to the muscle, that extends to the cavernous sinus and erodes the ethmoidal sinus. (figure 2) The diagnosis of alveolar rhabdomyosarcoma was established histologically after surgical biopsy. She was referred to the national oncology center to persue her treatment.

In thispaper, we report a rare presentation of orbital rahbdomyosarcoma with visual impairment and esotropia preceeding orbital signs. Rhabdomyosarcoma (RMS) is a highly malignant tumor in which the tissue of originis pluripotent mesenchyme. It is composed of cells with histologic features of striated muscle in various stages of embryogenesis. It was believed to arise from extraocular muscles, but now it is thought that it originates from pluripotent mesenchymal cells that have the ability to differentiate into skeletal muscle. (1, 3). RMS can bedivided into 4 major histologic categories: embryonal, alveolar, botryoid and pleomorphic. Embryonal RMS is by far the most common variant found in the head and neck region, including the orbit. The alveolar and botryoid types are less common, and the pleomorphic type is extremely rare in the orbit (2, 3, 4).Our patient had alveolar RMS which is particularly severe and is considerabely less common in the Orbit.

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Untreated RMS metastasize to the lung, bone and bone marrow mainly and early diagnosis before local and hemategeous spread could improve the pronosis(3). Patients with orbital RMS generally present with proptosis (80–100%) developing rapidly over weeks, globe displacement (80%): usually downward and outward because twothirds of these tumors are supero-nasal (70%), blepharoptosis (30–50%), conjunctival and eyelid swelling (60%), palpable mass (25%), and pain (10%). Visual impairment is usually minimal until the tumor becomes advanced(1, 2,3, 4, 5). RMS presenting with ocular deviation as an initial signs more likely to be misdiagnosed. Few cases presenting initially with eye deviation were reported in the literature. Most of their authors failed to make a prompt diagnosis of RMS. The first case, published in 1999, desribed a metastatic rhabdomyosarcoma presenting as an isolated lateral rectus restriction.In this report, the patient’s history of non orbital rhabdomyosarcoma alerted the doctor to the correct diagnosis. (6) Another case of metastatic orbital RMS, which presented as an isolated restrictive strabismus had been initially diagnosed with paralytic esotropia, and the patient had a record of 50 prism dioptres (5).The forced abduction test under general anesthesia confirmed the diagnosis of restrictive esotropia and CT examination revealed an enlargement of left medial rectus muscle suspectfull of medial rectus tumor. An acute mass in medial rectus canal so be the first sign of disseminated alveolar rhabdomyosarcoma if the initial ocular deviation is misdiagnosed(7). Embryonal Rhabdomyosarcoma had been also diagnosed in an eleven-year-old boy complaining difficulty moving his right eye. Similarily to our case, doctors were alerted by associated blurry vision and headaches.

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Examination found abduction deficit and large central scotoma and constriction of the I2e isopter in Goldman visual field. Compressive neuropathy was suspected and MRI was underwent showing a heterogeneous mass originating in the patient’s ethmoid and/or sphenoid sinus with intracranial extension and encasement of the right optic nerve causing mass effect on the right medial rectus and the rightsuperior oblique muscles. (8) In our patient, strabismus complicating RMS can be the result of two mecanisms : restrictive one by infiltrating directly the medial rectus which results in a restrictive esotropia, and a paralytic one by injuring the abducens since the tumor invaded the cavernous sinus. A forcedduction test under anesthesia, if performed, will confirm the restriction. We also notice that RMS which initially erodes ethmoidal sinus can quickly extend to optic nerve and induce compressive optic neuropathy associated to ocular deviation. Decreased visual acuity is known be a late clinical finding, and consequently, indicative of advanced disease.(3) It can be the result of ocular deviation but must alert ophthalmologist especially when associated to Marcus Gun sign. CONCLUSION In an acquired progressive restrictive deviation especially when it is associated to an acute visual impairement, an orbital tumor should be considered. First of all, a careful ocular movements examamination could help distinguishing comitant and incomitant strabismus. Orbital imagery should be indicated as soon as possible to diagnose early stages of RMS as an isolated enlargement or mass effect of oculomotor muscles before orbital or intracranial extension(9).


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UNILATERAL PROPTOSIS REVEALING A FRONTOETHMOIDAL MUCOCELE Lajmi Houda1, Ben Jalel Wadii1, Hssairi Asma1, Ben Yakhlef Mohamed Achraf1, Ben Issa Soumaya1, Bekir Kais1, Hchicha Amani2, Turki Senda2, Hmaied Wassim1, El Fekih Lamia1 1-

service d’ophtalmologie de l’hôpital des forces de sécurité intérieure, La Marsa,Tunis

2-

service d’ophtalmologie de l’hôpital des forces de sécurité intérieure, La Marsa,Tunis

Pas de conflits d’intérêts

ABSTRACT Purpose :To discuss, through a case report, different ophthalmologic manifestations of the Frontoethmoidal mucocele. Observation: A 46-year-old man with no general history consulted for a bilateral ocular redness and itching evolving for 2 months. He reported, however, a mild protrusion of his left globe evolving for 1 year. The clinical examination revealed a unilateral proptosis in the left eye with a discrete limitation of the adduction. The rest of our examination was normal for both eyes. A brain and orbital computer tomography (CT) revealed a grade I exophthalmos caused by an oval formation of fluid density in the left anterior and posterior ethmoidal cells driving the eyeball and internal oculomotor muscles back and out. The magnetic resonance imaging (MRI) showed the filling of the frontal sinus and left ethmoidal cells by the formation. The patient was referred to oto-rhino-laryngology department for a precocious surgical management to prevent optic nerve compression and visual acuity deterioration. Discussion and conclusion: Sinuses mucocele are slow-growing cystic lesions with mucus retention, caused by the obstruction of the natural orifice which extends progressively to the orbit. The ophtalmologic manifestations depend on the location, the size of the formation and involvement of adjacent structures. Proptosis seems to be the commonest ocular complication, but loss of vision and apex syndrome due to the compression of the ocular globe are the most serious ones.

M

ucoceles are epithelium-lined and mucus-containing sacs that fill a paranasal sinus. They are caused by obstruction of the sinus ostium or a mucous secreting gland. This continuous obstruction leads to its progressive expansion [1, 2]. Patients often complain about proptosis, limited eye movement or ocular pain. Despite its benignity, sinus mucocele could induce

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visual acuity impairment by compressing the optic nerve. That is why the ophthalmologist, helped by cerebro-orbital imaging, must seriously consider this entity. We report a case of a fronto- ethmoidal mucocele revealed by an unilateral proptosis, and we discuss the different ophthalmologic manifestations of this disease.


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CASE REPORT A 46-year-old man with no general history, consulted for a bilateral ocular redness and itching evolving for 2 months .Detailed medical and past histories of the subject were taken. He had no systemic or ocular diseases, no previous trauma, no sinus diseases or surgeries. He did not complain from pain, diplopia, or visual changes but described a mild protrusion of his left globe evolving for 1 year. The clinical examination revealed a unilateral left proptosis. The left eye was painless, irreducible in retro displacing, non pulsating, eccentric pushed down and out, and with no inflammatory signs (figure1).

A brain and orbital computer tomography (CT) revealed an oval process of fluid density in the left anterior and posterior ethmoidal cells measuring 37×22×17 mm. It produces bony structures blowing up and presses back the eyeball and internal oculomotor muscles. A grade I exophthalmos was also noted (figure 2).

Figure 2: cerebro-orbital CT scan: expansile unilocular homogeneous process of fluid density in the left anterior and posterior ethmoidal cells measuring 37×22×17 mm. It compresses the eyeball and the internal oculomotor muscle inducing a grade I exophthalmos

The magnetic resonance imaging (MRI) showed the filling of the frontal sinus and left ethmoidal cells by a large oval process. The medial rectus muscle and the optic nerve were pressed back (figure 3).

Figure 1: unilateral proptosis of the left eye. The globe is pushed down and out

The best-corrected visual acuity was 20 / 20 in both eyes. The pupillary light reflex showed no afferent pupillary defect in both eyes. The ocular alignment examination showed a mild exotropia with a discrete limitation of adduction of the left eye. The anterior segment was normal with an intraocular pressure of 14 mmHg and a normal fundus in both eyes. The oto-rhino-laryngological examination and the rhinoscopy did not show any abnormalities.

Figure 3: cerebro-orbital MRI: a fronto-ethmoidal mucocel pressing back the globe, the Medial rectus muscle and the optic nerve

The patient was immediately referred to otorhinolaryngology department for surgical management to prevent optic nerve damage and visual acuity deterioration. Post operatively, our examination and the CT scan noted the improvement of the exophthalmos (figure 4, 5) .

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Figure 4: improvement of the proptosis post operatively

Figure 5: post-operative CT scan showing the disappearance of mucocele with a residual cavity

DISCUSSION Sinuses mucoceles are a rare condition in which there is a slow-growing cystic lesion with mucus retention. It is caused by the obstruction of the natural orifice in case of chronic inflammation, allergy, surgery, trauma, and fibrous dysplasia within the sinus [1, 3]. This lesion extends progressively to adjacent areas helped by its size and the release of some mediators (prostaglandin E2 and collagenase) at the capsule of the mucocele which degrades the bone.[3] The most frequently involved sinuses are the ethmoidal and frontal sinuses, and occasionally the spheroidal or the maxillary sinus [2, 4]. During its evolution, the mucocele may cause ophthalmologica lmanifestations depending on its location, size, and the involvement of adjacent tissues.

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Proptosis seems to be the commonest ocular manifestation of the fronto-ethmoidal location[5]. In our case, the lesion was slow- growing and was not noticed by the patient until our examination. Swelling, chemosis and pain resulting from inflammatory infiltration and ethmoidal vein compression were absent in our case [6, 3]. Oculomotor nerve palsy is a very rare symptom in mucocele patients. In frontal location, the mechanism might be a direct compression with the mucoceles that break the wall of the sinus and extend into the orbit. In sphenoid mucoceles, theprocess compresses the microvascular supply to the nerve imitating the vasculopathic mechanism observed in diabetic ophthalmoplegia [7, 3] Enophthalmia is exceptional and was reported in case of a fronto-ethmoidal location. The mechanism is an enlargement of the orbital space and the deviation of the medial wall bony component that made the eyeball deviate inward, similarly to an orbital medial wall fracture [8] The most serious complications of periorbitary mucocele are loss of vision and apex syndrome. They are due to the compression of the ocular globe which damages the optic nerve and the posterior pole [2]. Because of the anatomical considerations, these complications are commonly associated with sphenoid or posterior ethmoid cells mucoceles [9,10]. The CT scan remains the gold standard for the diagnosis and the surgical management. It could be completed by an MRI which is of a great contribution to analyse the meningeal and orbital rapports and to differentiate mucocele from sunonasal tumors.


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CONCLUSION Fronto-ethmoidal mucoceles are pseudo-cystic formations of sinuses. Despite their benignity, they have an aggressive regarding to the adjacent structures. Since the disease induces more often an ophthalmological symptomatology, the role of the ophthalmologist is essential by making a precocious diagnosis to prevent complications

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