Standard n 20

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Faut-il alors réhabiliter le mot « noir » ? « Il s’agit plus d’une requalification. On l’évite car il semble trop brutal, infâmant. Cependant, pour fixer une réalité, il faut d’abord fixer le mot qui décrit le mieux cette réalité. » Mais où placer les métis, par exemple, dans ce bazar sémantique ? « Je ne cherche pas à savoir qui est noir et qui ne l’est pas, où commence et où s’arrête le fait d’être noir. Pour paraphraser Sartre, est noir celui que les autres prennent pour noir ! Je sais en revanche qu’en France, où la langue est le français, les Noirs sont discriminés parce qu’ils sont noirs et non pas parce qu’ils sont Blacks, immigrés, Africains, etc. Celui qui refuse de louer un appartement à un Noir se moque de savoir s’il vient du Togo, du Mali ou de France. »

de classification reposant sur un critère éminemment flottant, la couleur de la peau. De quoi rendre dingue celui qui s’essayera à entrer dans les détails : les Antillais sont-ils moins noirs que les Ethiopiens ? D’ailleurs, ça tombe bien puisque comme tout mot-valise, il ne fonctionne que dans deux cas : soit on ne l’interroge pas vraiment et on l’instrumentalise sans vergogne ; soit on s’accorde sur une définition, même fragile, même imparfaite, et on s’évertue ensuite à la rendre caduque, en la dépassant. Parce que les mots ont un sens, précisément. — Texte François Perrin Photographie Pauline Beaudemont

On en revient donc à la négritude. Ce mot, planqué ou non sous l’un de ses avatars, constitue une tentative

Patrick Lozès Nous, les Noirs de France Danger Public, 2007

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