actualités SPEDIDAM N°71- septembre 2020
Numéro spécial Rémunération équitable : arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne
Edito
François Nowak
Président de la SPEDIDAM
Le 8 septembre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt sur la rémunération équitable qui fait peser un grand danger sur la situation des artistes-interprètes et l’activité culturelle en France en mettant fin à une pratique vertueuse de réciprocité. Cette décision reprend les conclusions de l’avocat général de la CJUE délivrées en juillet dernier en regard d’un litige irlandais et contraint les organismes de gestion collective (OGC) européens à reverser les sommes perçues au titre de la rémunération équitable sur les enregistrements fixés hors de l’Union européenne à tous les artistes y compris ceux dont les phonogrammes proviennent de pays qui n’ont pas signé les traités internationaux prévoyant la rémunération équitable ou qui, à l’instar des États-Unis, ont signé ces traités en écartant le principe de réciprocité et en formulant des réserves prévoyant qu’ils ne verseront pas cette rémunération aux artistes et producteurs de phonogrammes européens. En conformité avec les traités internationaux, la France avait toutefois formulé des réserves en indiquant qu’elle appliquerait le principe de réciprocité : la rémunération équitable était donc uniquement accordée aux artistes et producteurs ressortissants d’Etats membres de l’Union européenne l’accordant réciproquement aux artistes et producteurs français. La diffusion de phonogrammes (radio, télévision, discothèques, lieux sonorisés) dont les artistes et producteurs étaient issus de pays non-signataires des traités internationaux donnait lieu à des « irrépartissables juridiques ». Ces sommes issues de la rémunération équitable venaient abonder l’action culturelle des OGC : aides à la création, à la diffusion du spectacle vivant, à l’éducation artistique et culturelle, à la formation et plus particulièrement à l’emploi d’artistes. En statuant sur la disparition des irrépartissables juridiques, la CJUE affaiblit considérablement le dispositif français d’aides à l’action artistique des OGC. La SPEDIDAM estime que cet arrêt entraînera une baisse de plus de 30 % des ressources allouées à son action culturelle, les irrépartissables juridiques ayant représenté près de 10 millions d’euros par an durant ces cinq dernières années. Ces aides sont essentielles pour les artistes-interprètes et pour le dynamisme culturel de notre pays comme l’a rappelé la SPEDIDAM dans son communiqué du 16 septembre, et la CJUE court-circuite par sa décision le principe de réciprocité vertueux des droits prévu par les traités auxquels la France est partie. Contrainte de statuer sur le gel momentané de ses aides et commissions d’agrément par prudence, la SPEDIDAM attend des pouvoirs publics français de plus amples informations sur les mesures attendues. Ce signal d’alarme s’accompagne d’une proposition pour la mise en place d’une stratégie publique d’aide au développement de la création artistique afin que notre secteur puisse retrouver les moyens financiers d’une politique culturelle dynamique qui soutient l’emploi des artistes-interprètes. Cette proposition sera formulée dans les pages suivantes de ce numéro du magazine d’Actualités SPEDIDAM, après l’étude détaillée de la décision alarmante de la CJUE et de ses répercussions.
La culture et les artistes sont en danger. Unissons nos voix ! La SPEDIDAM est signataire de L’appel des artistes en péril : sociétés civiles fragilisées, artistes menacés, la lettre ouverte adressée au Président de la République : http://chng.it/y7MgKm5rmG