2012 - Mémoire - Sophie Lhoest

L’ALBAYCIN DE GRENADE,

PROCESSUS DE RECUPERATION DE L’ESPACE PUBLIC

LHOEST SOPHIE Sous la direction de Xavier de Coster Année académique 2011-2012 Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme de Master en architecture UCL - Faculté d’Architecture, d’Ingénierie architecturale et d’Urbanisme Architecture Saint Luc Bruxelles

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L’ALBAYCIN DE GRENADE,

PROCESSUS DE RECUPERATION DE L’ESPACE PUBLIC Analyse du compromis urbanistique et architectural entre les civilisations musulmanes et castillanes

« Donne lui l’aumône, femme, car il n’y a pas de plus grande peine que d’être aveugle à Grenade. » « Dale limosna mujer, que no hay en la vida nada, como la pena de ser, ciego en Granada. » Francisco Asis de Icaza, poète mexicain (1863-1925)

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INTRODUCTION SITUATION GEOGAPHIQUE TABLEAU SYNOPTIQUE DE L’HISTORIQUE DE LA VILLE DE GRENADE

LES ORIGINES : le tracé des limites La ville fermée – les Ibères Premier essai de planification urbaine – les Romains

LE HAUT MOYEN AGE : l’abandon de la ville Premier élan de christianisation – les Barbares & les Wisigoths Dualité de la Vega – les Umayyades

LA VILLE MEDIEVALE : la non-planification urbaine de la Médina L’impulsion urbanistique et les grands travaux – les Zirides Emergence d’une ville nouvelle Renforcement et agrandissement L’entretien des limites – les Almoravides & les Almohades Consolidation Améliorations L’extension, l’apogée et le déclin – les Nasrides Morphologie urbaine de la Médina Non-qualification des espaces publics Imprévisibilité du réseau viaire Vers le démantèlement du parcellaire et sa reconstruction

LA RECONQUISTA : la récupération de l’espace public La connivence pacifique Instauration de piliers politico-juridiques occidentaux Rationalisation du système de voieries Nouvelle vision de l’espace : vers la structuration de la ville moderne L’Albaycin du XVIe siècle Elargissement des voies et espaces publics Implantation des paroisses et création des couvents Etablissement des résidences seigneuriales L’expulsion définitive des morisques

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LA REFORME BOURGEOISE : les éléments essentiels au changement

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VERS UN NOUVEL ALBAYCIN, en guise de conclusion

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GLOSSAIRE INDEX DES DOCUMENTS GRAPHIQUES BIBLIOGRAPHIE

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INTRODUCTION L’évolution historique d’une ville à travers le temps en dit long sur sa planification urbaine. La ville se transforme en fonction des conditions culturelles, économiques ou politiques auxquelles elle est soumise. La connaissance de l’histoire urbaine permet la compréhension des éléments urbains structurants et articulateurs de la trame urbaine.

Ce mémoire est subdivisé entre les grandes périodes constructrices et planificatrices qui se sont succédées dans la ville de Grenade et en alAndalus, afin de comprendre la structure urbaine de la colline de l’Albaycin aujourd’hui, un compromis urbanistique et architectural entre les civilisations musulmanes et castillanes.

Il ne s’agit pas ici de répertorier tous les édifices de Grenade, ni de décrire de manière exhaustive son architecture, mais bien de comprendre à travers son évolution et sa transformation dans le temps, l’influence musulmane et le processus de récupération de l’espace public qui s’ensuivit. C’est pourquoi, l’analyse porte principalement sur l’époque médiévale et la Reconquista, périodes qui ont le plus modifié la morphologie urbaine de l’Albaycin.

L’Albaycin d’aujourd’hui, Patrimoine Mondial de l’Unesco, ne correspond pas au noyau urbain primitif connu sous cette dénomination. Le retour à l’Albaycin de l’époque maure n’est plus possible après des siècles d’élargissements urbains et de transformations architectoniques, mais on peut encore aujourd’hui sentir la trame sur laquelle le quartier fut fondé.

L’établissement musulman sur la colline de l’Albaycin a créé de nombreux espaces imprévisibles, non planifiés, La richesse spatiale de la trame urbaine est subordonnée au propre territoire, offrant la particularité d’un ensemble d’espaces complètement différents. Les espaces consolidés de la ville évoluent, mais en même temps, de nouveaux lieux se créent, dû aux expansions successives auxquelles la ville est soumise.

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Cordoue SĂŠville

Province de Grenade

Granada

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SITUATION GEOGRAPHIQUE Grenade est située en Andalousie, province au Sud de l’Espagne, divisée en 3 grandes régions : au centre, la vallée du Guadalquivir, bordée de collines ; au Nord, la Sierra Morena, paysage montagneux peu peuplé ; au Sud, les montagnes Bétiques, où se situe la Province de Grenade.

Située à une altitude d’environ 700 mètres, la ville est entourée de collines et de montagnes qui en assurent la protection et elle occupe un poste stratégique au niveau de la circulation régionale.

Les rivières Darro et Genil, engendrées par la fonte des neiges de la Sierra Nevada, garantissent la fertilité du sol des plaines de la Vega, vallée fertile, de même que l’air et l’humidité produits par les courants d’airs venus des collines qui entourent la vallée.

Mais ce sont des facteurs historiques plus que géographiques qui ont déterminé l’évolution de la prospérité de la ville. Bermudez de Pedraza, en 1608, dit de la ville qu’elle est « entourée de monts et de chaines de montagnes qui lui servent de murailles pour garder ses fruits, et d’une abondance d’ennemis. »1 Grenade chevauche quatre collines : l’Albaycin, la Sabika, le Mauror et San Cristobal. Initialement, Grenade occupe ces collines pour leurs potentialités défensives. La colline de l’Albaycin, plus douce et plus facile d’accès, est plus propice au peuplement car elle est moins abrupte que sa voisine, la colline de la Sabika, qui donnera naissance à la forteresse de l’Alhambra. À partir du XIe siècle, la ville s’étend jusqu’aux terres fluviales, plus adéquates aux activités commerciales.

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Traduction de Bermudez de Pedraza Francisco, Antigüedad y excelencias de Granada Vol III, 1608

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632 : Election des premiers califes au Maghreb 698-710 : Wittiza, roi wisigoth d’Espagne 711 : Passage du détroit de Gibraltar par Tariq ibn Maluk 732 : Victoire de Charles Martel sur les musulmans à Poitiers 756 : Fondation de l’Emirat de Cordoue par ‘Abd al-rahman Ier

589 : Conversion des Wisigoths au catholicisme

409 : Invasion des Vandales 456 : Invasion des Wisigoths

200 : Le sud de l’Espagne est Catholique 218-20 : Seconde Guerre Punique

45 ACN : Municipium Florentinum Iliberritanum 58 : Début de la Christianisation en Espagne

IIIe s. ACN : Soumission de la Bastétanie par les Carthaginois

VIIIe s. ACN : Protoibères Naissance de la ville de Grenade

VIIIe s. : Transfert à Elvira Construction de la forteresse primitive Hisn Garnata sur a colline de l’Albaycin. Les portes de Qastar et de al-Bunud donnent accès à la forteresse.

Définition des dominantes de l’architecture hispano-musulmane

29 ACN : Iliberri compte 7000 habitants intramuros et 8000habitants extramuros

VIIe s. ACN : Premières traces de fortification Ve s. ACN : Nécropoles du Mauror et du Mirador de Rolando qui confirment l’importance d’Iliberri

TABLEAU SYNOPTIQUE DE L’HISTOIRE DE LA VILLE DE GRENADE Politique, économique et société Urbanisme et architecture

11 786 : Début de la construction de la Grande Mosquée de Cordoue

703 : Concile de Tolède présidé par l’Archevêque Gundéric de Tolède

622 : Hégire, exil du Prophète Mohammed de La Mecque vers Yathrib (Médine) Naissance de la religion musulmane

Autres faits marquants

1130-1269 : Almohades en al-Andalus 1155-1239 : Almohades à Grenade 1236 : Reconquista de St Ferdinand III avec la Prise de Cordoue 1238 : Prise de Valence 1248 : Prise de Séville 1232-1492 : Royaume nasride de Grenade

1031-1090 : Période des mulîk al-tawâ’if, royaumes de Taïfas ou « rois de partis » 1038-1076 : Badis, fils de Habus.

Consolidation du royaume de Grenade en gagnant la taïfa de Séville.

1073-1090 Abd Allah, neveu de badis : Affaiblissement de la Taïfa 1056-1148 : Almoravides en al-Andalus 1058 : Prise de Tolède par Alphonse VI 1090 : Prise de grenade par les Almoravides 1090-1155 : Almoravides à Grenade

1019-1038 : Habus ibn Maksan, premier monarque ziride

852-912 : Révoltes mozarabes et muladis 912 : ‘Abd al-Rahmân III se proclame calife 912-1031 : Califat de Cordoue Djihâd et conquête territoriale révolue 1008-1010 : Guerres civiles causées pas les berbères

1266 : Prise de Murcie

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XIII : Une solide muraille flanquée de nombreuses tours partant de la Puerta Elvira entoure la Médina. En ligne ondulée, elle s’adapte à la configuration du sol

1125-1128 : Agrandissement des fortifications : entre la Puerta Elvira et celle de Bibarrambla et le long du Darro

XIe s. : Croissance démographique de Grenade : Médina Garnatha compte entre 26.000 et 38.000 habitants compris dans 75ha intramuros, après rétablissement des murailles primitives Construction du Bañuelo ziride

1009-10 : Emigration de médina Elvira à médina Garnatha, capitale de la cora, province de Grenade 1016 : Construction de la Grande Mosquée de Grenade par Zâwi ibn Zirí Alcazaba Qadima

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Source : Angel Isac, Historia urbana de Granada

1570 : Révolte des Alpujarras Expulsion de plus de 80.000 morisques de Grenade 1570-1608 : Persécution des morisques par Philip II 1608 : Expulsion des derniers morisques par Philip III

1516 : Charles-Quint sur le trône

1492 : Remise de Grenade aux mains des Rois Catholiques Fin de la Reconquista et début de la christianisation de la ville Découverte de l’Amérique par Christophe Colomb Expulsion des Juifs d’Espagne

Moitié du XIV – Yusuf I

Début XIV – Muhammad II

13 1590 : Selon le plan d’Ambrosio de Vico, la ville compte 60 nouveaux édifices religieux, 11hopitaux, 6 collèges et 14 portes, presque toutes datant de l’époque musulmane.1

1526 : Début de la construction du palais de Charles Quint par ???

1528 : Cathédrale de Grenade par Diego de Siloé 1531 : Fondation de l’université par Charles Quint

XVe s. : Granada, avec 65.000 habitants, est l’une des villes les plus peuplées d’Europe

XIII-XIV : Nouveaux quartiers autour de la Médina : Rabad al-Bayyazin, derrière les murailles de la Alcazaba vieja, Rabad al-Fajjarin et Rabad al-Ramla, au Sud de la Médina. En dernier, Rabad Nayd, expansion au Sud d’alFajjarin

1327 : Construction de la muraille de Don Gonzalo

1590 : Premier plan de la ville dessiné par Ambrosio de Vico 1594-1646 : Francisco Henriquez de Jorquera écrit ses « Anales de Granada »

1576-1655 : Francisco Bermudez de Pedraza, ecclésiastique et avocat à la Chancellerie de Grenade, écrit « Antiguedades y excelencias de Granada »

1494 : « Viaje por España y Portugal » par Jeronimo Munzer

1420 : Début de la construction de la Cathédrale de Séville

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Source : Angel Isac, Historia urbana de Granada

1975 : Décès de Francisco Franco Fin de la dictature

1936-1939 : Guerre d’Espagne Début de la dictature de Francisco Franco

1810-1812 : Invasion des troupes françaises

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1985 : L’Alhambra, le Généralife et le quartier de l’Albaycin sont déclarés Patrimoine Mondial de l’Unesco 1991 : Circunvalacion, ceinture périphérique de Grenade

1935 : La ville compte 100.000 habitants La commune instaure une politique d’agrandissement de la ville 1939 : Camino de Ronda

1866 : Inauguration de la gare, au nord de la ville 1872 : Agrandissement de la Plaza Nueva après la destruction de l’Eglise de San Gil 1895-1903 : Gran Via de Colon

1854-1880 : Voutement du Darro 1857 : Grenade compte environ 63.000 habitants2

1810-1812 : Impulsion sur les opérations d’équipement et de transformation de l’espace public

1857-1941 : Luis Seco de Lucena Paredes trace les « planos de Granada Arabe »

1796 : Plan de la ville de Francisco Dalmau

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LES ORIGINES Le tracĂŠ des limites

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La ville fermée : Iliberri Proto-Ibères (VIIe siècle av. J.-C.) Ibères (700 av. J.-C. – 180 av. J.-C.) Les origines de Grenade remontent au VIIIe siècle av. J.-C., à l’âge de Bronze final. Ville proto-ibérique importante, Grenade, fondée par la tribu ibérique des Turdules, s’appelle alors Ilturir. La ville devient rapidement un des centres majeurs de la haute Andalousie grâce à l’arrivée de peuples colonisateurs comme les grecs et les phéniciens, jusqu’à former une cité d’environ 500 habitants.

Les vestiges connus les plus importants qui nous assurent de l’établissement d’une population dans ce lieu sont les ruines d’époque ibère. La découverte d’une fortification datée de la seconde moitié du VIIe siècle av. J.-C. correspond à l’installation de Ilturir. L’oppidum occupe environ 6 hectares2, au sommet de la colline de l’Albaycin. L’oppidum de Ilturir héberge la population qui cultive la Vega, probablement quelques groupes d’artisans et une aristocratie qui contrôle la ville. Il doit exister d’autres petits villages associés. Ce type de noyau urbain se caractérise surtout par le fait qu’il est entouré d’une muraille au sein de laquelle se développe la trame urbaine, dans laquelle s’organisent les habitations en fonctions de nombreuses voies. Carlos Jerez Mir, dans un guide d’architecture de Grenade, décrit la muraille comme étant « de caractère cyclopéen en certaines parties, construite avec des blocs de pierre ciselée d’une épaisseur de plus ou moins un mètre et demi », construit à l’aide d’une « technique phénicienne à base de torchis.»3

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Zone comprise entre l’actuel Mirador de San Nicolas et la plazeta de San Miguel Bajo Jeres Mir Carlos, Guía de arquitectura de Granada, Comares, Granada, 2003

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Les restes archéologiques permettent de reconstituer le schéma type d’une habitation ibère comme étant une hutte de forme circulaire ou ovale. Avec le temps, cette hutte est substituée par une maison au plan rectangulaire ou trapézoïdal, parfois agrémentée d’un patio et compartimentée à l’intérieur, reflet d’une société toujours plus structurée et influencée par les colons. Le sol est en terre, exceptionnellement dallé ; les murs en torchis ou de pisé, avec un soubassement en maçonnerie, sont enduits de plâtre à l’intérieur; une toiture plate recouvre la maison. (ILLUSTRATION 1.1) Outre l’architecture domestique, deux nécropoles ibériques du Ve siècle av. J.-C., situées sur les collines au nord et au sud de l’Albaycin, témoignent de l’importance de la ville dans cette région : les nécropoles du Mauror et du Mirador de Rolando.

Le développement de l’oppidum s’est surtout produit aux Ve et IVe siècles av. J.-C., suite à une série d’invasions carthaginoises, débordant des anciennes murailles et occupant des nouvelles zones, plus proches du Darro. Au IIIe siècle av. J.-C., Carthagène soumet la Bastétanie, actuelle province de Grenade, et engendre des transformations politiques, sociales et économiques. En 180 av. J-C., Sempronius Gracus s’empare de la Bastétanie dans une campagne militaire, avec laquelle commence le processus de romanisation. Iliberri est incorporée à l’Empire romain, et c’est sur l’emplacement ibère que se développera la ville romaine.

L’oppidum de la colline de l’Albaycin restera le ciment de la ville dans les époques ultérieures, tant par ses murailles, que par sa structure.

ILLUSTRATION 1.1

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Premier essai de planification urbaine : Municipium Florentinum Iliberritanum Epoque romaine (180 av. J.-C. – IVe siècle) L’oppidum ibérique trouve donc sa continuité dans l’époque romaine : dans sa première phase, à la fin du IIIe siècle, la ville connait une implantation pacifique des Romains. La communauté ibère est alors soumise comme une des « civitates stipendiariae » et elle remet ses armes à Rome, lui paie un tribut annuel et est dotée d’une garnison romaine.

En 45 av. J.-C., la ville obtient le statut municipal de colonie romaine « Munucupium Florentinum Iliberritanum » ou plus communément Florentia. En 29-27 av. J.-C., elle est englobée dans la province de la Bétique et compte, au Ier siècle av. J.-C., environ 7000 habitants intramuros et 8000 aux alentours. Elle est reliée aux importants nœuds de communication des villes Anticaria, Castulo, Acci et Sexi par quatre grandes chaussées.

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La ville romaine a probablement respecté le périmètre des anciennes murailles ibères, et n’en déborde pas. Par contre, la structure urbanistique de l’oppidum ibère ne s’adapte pas au schéma de tracé orthogonal paradigmatique de la ville classique, avec son « cardo maximus4 » et son « decumano maximus ». Ces deux voies principales convergent en leur centre et coïncident avec la partie la plus élevée de la ville, où est situé le forum. Dans la culture ibère, ce lieu n’existe pas.

De plus, l’organisation de la vie civile, politique et religieuse, très similaire aux autres cités du monde romain antique, se développe autour du forum. L’occupation de la ville est en terrasses le long de l’axe longitudinal est-ouest. Le forum se trouve sur la terrasse supérieure, et c’est un puissant centre d’attraction territorial. Manuel Gomez-Moreno, archéologue et historien espagnol, décrit le forum d’après ses excavations de 1889, comme d’une « Place de 485m2 orientée est-ouest, pavée avec des dalles de pierre calcaire de la Sierra Elvira et un mur orienté nord-sud dans lequel s’ouvre un portail du même matériel, avec les restes d’une colonne et d’une base attique et deux marches par lesquelles on monte à un espèce d’atrium, dont les murs et le sol sont en pierre de Sierra Elvira également. Au fond de l’atrium, il y a un autre portail, similaire à l’antérieur, dans lequel il y a deux petits escaliers de deux marches avec les murs latéraux construits en pierre de taille, qui conduisent probablement au temple ou à la basilique de la ville».5 (ILLUSTRATION 1.2) Les Romains implantent également de nouvelles infrastructures publiques comme des thermes, des amphithéâtres et des temples, et un système d’aqueducs et de citernes alimente la ville en eau.

En ce qui concerne l’architecture domestique, les habitations restent à caractère très ibère, à l’exception de quelques domus romaines, caractérisées par leur impluvium central et leurs murs en stuc ornés de peintures murales. On voit aussi l’apparition de petits établissements ruraux, les villae, destinés à la culture, à la transformation des productions agricoles, au logement des travailleurs et à la récréation des

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Actuelle rue de Maria la Miel Traduction de la description de Gomez-Moreno, 1889 dans Rodriguez Aguilera Angel, Granada y sus barrios : Granada Arqueológica, Comares, Granada, 2001, page 58.

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familles. Ces établissements font la richesse de la région, grâce à la terre fertile de la Vega.

Les nombreuses nécropoles situées extramuros, marquent les limites possibles de l’étendue de la ville.

La ville d’Iliberri ou Florentia, par son importance, reste le siège administratif, religieux et économique de la région. En 58, commence la christianisation de l’Espagne et en 200, le Sud devient catholique. Les religions cohabitent, mais le christianisme devient bientôt la seule religion de l’Empire : les temples romains sont détruits ou convertis en églises.

On constate que la pénétration du christianisme en Hispanie est plus rapide dans les villes avec un nœud urbain fortement urbanisé et habités par des groupes de juifs, comme à Grenade. Au IIIe siècle a lieu une rétraction urbaine au sein des villes de la Bétique. Cette décadence urbaine, due à l’augmentation du nombre de villae qui engendre un processus de ruralisation fragilisant l’économie monétaire et à l’insécurité provoquée par les invasions germaniques, induit le début de la chute de l’Empire romain.

Les éléments architectoniques romains ont été souvent réutilisés postérieurement comme matériel de construction de nouveaux édifices.

Par exemple, la citerne de San Miguel Bajo, XIIIe siècle, réutilise deux colonnes romaines dans sa construction. (ILLUSTRATION 1.3) Après sa chute, la ville passe sous le contrôle des Byzantins, puis des Wisigoths. Malgré cela, elle gardera son importance comme noyau urbain et deviendra un siège épiscopal durant l’époque wisigothique.

ILLUSTRATION 1.2

ILLUSTRATION 1.3

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LE HAUT MOYEN AGE L’abandon de la ville

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Premier élan de christianisation Barbares et Wisigoths (IVe siècle – VIIIe siècle) A partir du Ve siècle, des invasions germaniques successives font disparaître peu à peu l’Empire romain. La zone est instable et, après des invasions vandales, les Byzantins s’installent à Iliberri, où ils établissent une place forte militaire stratégique pour leurs troupes. En 625, les Byzantins sont expulsés par les Wisigoths. Grenade reste pendant tout ce temps la capitale de la province, et son pouvoir militaire augmente avec les invasions barbares.

L’époque wisigothique est celle de la christianisation, mais aussi de la première unification administrative de l’Espagne et de la romanisation linguistique et juridique de la Péninsule.

Au VIe siècle, nait le Royaume wisigothique de Tolède, qui perdure jusqu’en 711 et en 589, les Wisigoths se convertissent au catholicisme, tout en gardant une certaine fidélité à la culture antique. La conséquence de la création de ce royaume est la perte d’importance des villes alentour. Elles se réduisent peu à peu et perdent de la vitalité, qui se traduit dans la transformation de l’espace urbain. Les villes restent uniquement des centres de pouvoir ecclésiastique et civil, pouvoirs qui ne cessent d’augmenter. Mais il reste peu de traces de l’architecture ou de l’urbanisme wisigothique : seules quelques églises ont été retrouvées.

Le manque de connaissances de la structure urbaine rend difficile la compréhension des processus de transformation qui conduisent la ville jusqu’aux formes hispano-musulmanes. En comparant avec les autres noyaux urbains de l’époque, on peut en déduire les éléments suivants : la réduction de la taille du forum et la transformation des temples en lieux de cultes chrétiens.

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Les églises, ou basiliques, sont à l’époque de simples salles rectangulaires en pierres de taille. Déjà, les techniques de construction et les formes architectoniques sont le fruit de la juxtaposition des architectures précédentes, ibère, romaine, byzantine et germanique.

La différence de richesses entre les commanditaires au pouvoir, l’aristocratie germanique et ibéro-romaine, et la population campagnarde provoque des tensions économiques et sociales. Chaque parti au pouvoir recherche un appui extérieur afin de réaliser ses propres ambitions : Byzantins, Basques, Francs et musulmans sont appelés à leur venir en aide.

En 710, Wittiza, roi wisigoth d’Espagne, voit son pouvoir usurpé par le duc de Bétique, Rodéric. Akhila, fils de Wittiza, fait appel aux musulmans pour lutter contre Rodéric et en 711, Tariq ibn Ziyad, gouverneur de Tanger, Umayyade d’origine berbère, traverse le Gibraltar et débarque à Carthagène. Rodéric est tué et Tariq s’empare de Cordoue, la Capitale wisigothique

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Dualité de la Vega D’Iliberri à Elvira (VIIIe siècle – 1031) Iliberri est conquise par un assaut des Umayyades lors des premières campagnes musulmanes. L’importante communauté juive, alors discriminée, collabore à sa prise et occupe le site de Grenade. Elle est située dans un quartier à l’extérieur de l’enceinte ibéro-romaine, appelé Garnatha al-Yahud6.

En 745, une partie de l’armée musulmane venant de Damas, qui est intervenu dans la conquête de la Péninsule Ibérique, se dirige vers Cordoue, capitale de l’Emirat Umayyade, avec l’intention de réclamer le butin promis pour sa participation. Les autorités de Cordoue leur offrent la Cora d’Elvira, de superficie similaire à l’actuelle Province de Grenade7.

Durant les trois premiers siècles de l’occupation musulmane se produit une dualité dans la Vega de Grenade : la colline de l’Albaycin est délaissée pour Elvira (Ilbira ou Castilia), une ville d’origine romaine située au pied de la chaîne de Montagne d’Elvira, à environ 12km au Nord-Est de Grenade. Située en plaine, elle est plus propice au commerce. Cette prospère Médina, capitale et centre politique et social de la région, provoque le rapide déclin de Grenade. Elle est devenue un petit noyau périphérique, qui ne constitue pas un milieu urbain et ne mérite plus le statut de ville. Même si des fortifications et des groupes de maisons subsistent, il n’y a pas de grands monuments publics.

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Situé au pied du Mauror, sur la rive gauche du Darro Environ 12.500 km2

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En effet, jusqu’au Xe siècle, Grenade est occupé de manière ponctuelle, plutôt sous la forme de châteaux fortifiés ou d’alquerias, d’al-qâria en arabe, petits hameaux agricoles disséminés dans le territoire. Hisn Garnatha, la forteresse de Grenade, est située sur la partie la plus haute de l’Albaycin 8 , réutilisant les restes encore émergents de l’oppidum ibéro-romain. Les portes de Qastar et de al-Bunud, qui seront incorporées plus tard au tracé de l’enceinte ziride, y donnent accès. Au IXe siècle, un petit noyau fortifié apparaît également sur la colline de la Sabika, la forteresse de Sawwar ben Hamdun, premier pas dans l’édification de l’Alcazaba de l’Alhambra.

Il faut attendre la dynastie ziride qui, au XIe siècle, fonde la Médina Garnatha.

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Toujours dans la zone de San Nicolas

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LA VILLE MEDIEVALE La non-planification urbaine de la MĂŠdina

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L’IMPULSION URBANISTIQUE ET LES GRANDS TRAVAUX

Grenade, Capitale de la Taïfa Zirí (1010-1091) De 1009 à 1031, trois partis ethniques, les berbères, les Saqâlibas et les populations autochtones, se disputent le territoire et le pouvoir en Andalousie, ce qui provoque la désintégration du Califat de Cordoue et divise la région en diverses cité-états, les royaumes de Taïfas dont la Taïfa ziride.

Entre le VIIIe et le Xe siècle, les quelques foyers présents sur la colline de l’Albaycin ne forment pas une encore une réelle structure urbaine.

Grenade est à cette époque toujours divisée en deux noyaux différenciés qui coexistent sur les rives du Darro : l’antique Iliberri, sur la rive droite du Darro, et Garnatha al-Yahud, communauté juive, sur la rive gauche. Dans la médina islamique, berbères, arabes, juifs et mozarabes se côtoient. Si les différences entre les religions sont importantes, elles le sont tout autant entre les musulmans d’après leurs provenances ethniques. Le processus de construction intense qui a lieu au XIe siècle passe d’abord par le colmatage des petits noyaux de populations épars, qui vont former de nouveaux quartiers, jusqu’à leur unification à la muraille de l’Alcazaba Qadima.

La période ziride peut être divisée en deux périodes constructives intenses, accompagnées d’un programme de rénovation urbaine dû à la croissance rapide de la population et à l’expansion résidentielle qui en résulte : les règnes de Zâwi ibn Zirí et de son successeur Habus ibn Maksan, et les règnes de Bãdis et de ‘Abd Allãh.

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1. EMERGENCE D’UNE VILLE NOUVELLE Le règne de Zâwi ibn Zirí et de son successeur Habus ibn Maksan (1016–1038)

En 1009-1010, les guerres civiles et le pillage de la ville d’Elvira par des mercenaires berbères pousse la population à se réfugier à Garnatha. En effet, de par son emplacement en plaine, Médina Elvira est trop vulnérable en ces temps d’instabilité. Sous l’impulsion du roi Zâwi ibn Zirí al-Sinhâdjí, la quasi-totalité des habitants, principalement des maures, évacue la ville d’Elvira et se réinstalle sur la colline de l’Albaycin. Ce lieu de défense est parfaitement située pour contrôler la Vega.

La dynastie ziride occupe au départ le haut de l’Albaycin, dans la nouvelle forteresse de l’Alcazaba Qadima, à l’emplacement du noyau primitif ibéro-romain. On parle d’al-Qasaba al-Qadima, ou Alcazaba vieja, en comparaison avec l’Alcazaba de l’Alhambra, construite postérieurement. Il s’agit d’une forteresse qui domine et protège toute la partie haute de la colline de l’Albaycin, convertissant Grenade en l’un des endroits les plus sûrs d’al-Andalus. Dans l’Alcazaba, on retrouve l’élite gouvernante ziride, mais aussi quelques mozarabes, même si ceux-ci sont pour la plupart groupés en dehors des murs de la médina. Les souverains zirides, établis dans l’Alcazaba, mais également sur l’Alhambra et sur le Mauror, ont à leurs pieds la Médina, qui abrite la Grande Mosquée, le caravansérail, les bains, le souk et les édifices publics, avec la Calle Elvira comme axe principal de la ville.

L’ancienne Iliberri n’est plus que ruines et Zâwi ibn Zirí instaure alors une politique constructrice intensive dans la ville, orientée principalement vers sa défense et vers des constructions auliques. Les premiers travaux d’infrastructures pour son déploiement en tant que ville passent d’abord par l’adéquation du terrain : destruction de l’existant, terrassement de la pente naturelle de la colline et nettoyage des parcelles.

Grenade est alors dotée d’une enceinte plus vaste et plus haute qui englobe le périmètre de l’oppidum ibéro-romain, descend jusqu’au Darro et remonte de l’autre côté, sur la colline de la Sabika. Juan Manuel Barrios Rozua dit de la muraille qu’elle « reste comme une barbacane 38

avancée, séparée par un fossé des liens zirides. Les nouvelles tours se cimentèrent avec de la pierre et s’élevèrent en fort pisé. Elles étaient carrées et certaines semi-circulaires, cas inhabituel inspiré des Chrétiens peut-être. »9 La technique de construction des murailles en pisé avec ses chainages d’angles en pierre est typique de l’époque ziride.

TECHNIQUE CONSTRUCTIVE 1. Tracé de la muraille selon la topographie et les besoins défensifs.

2. Réalisation soit d’une tranchée de cimentation, dans le cas où la construction se réalise sur des strates de terre, soit construction directement sur la roche ou sur les restes de l’époque ibéro-romaine.

3. Soit on pose une couche de galets mélangés à du mortier de chaux pour créer une superficie sur laquelle construire. Soit on procède à un simple nettoyage.

4. Construction en pisé réalisée avec la technique de la tabiya, c’est-à-dire au moyen d’un coffrage en bois formé de deux planches unies pas des tirants. A l’intérieur, on dépose une nouvelle rangée de galets mélangés au mortier de chaux, et ainsi de suite jusqu'à les remplir.

5. Au final, on arrive à ce que les joints des coffrages de forme verticale ne coïncident pas, de la même manière que s’alterne la disposition des planches.

6. Avec la même technique, on procède à la construction de la couche suivante.

7. Pose de pierres de tailles aux angles des tours, généralement appareillées en panneresse et deux ou trois boutisses - Traduction de la description d’Angel Rodriguez Aguilera dans Granada y sus barrios : Granada Arqueológica, pages 105-107

L’époque ziride est aussi celle de la construction des premières mosquées de Grenade, dont celle de la Grande Mosquée, la Mezquita Aljama10, (ILLUSTRATION 3.1 ET 3.2) entreprise en 1016 par Zâwi ibn Zirí.

Elle est située dans la plaine, au pied de la colline de l’Albaycin.

Construite en matériaux d’une grande austérité formelle, une caractéristique de toute l’architecture ziride, il s’agit d’une mosquée hypostyle avec six nefs parallèles au mur qibla et une cour entourée de portiques profonds. D’autres mosquées sont édifiées, comme la Mezquita de los Morabitos11 ou Mosquée des Ermites, dont on conserve la citerne et le minaret. Ce dernier est construit en pierre de taille et un arc en fer à cheval éclaire l’escalier. (ILLUSTRATION 3.3) 9

Traduction de la description de Barrios Rozua Juan Manuel, Granada dans Historia Urbana, Comares, Granada, 2002, pages 20-21 10 Sous l’actuelle Iglesia del Sagrario, adossée à la Cathédrale de Grenade 11 Actuelle église de San Jose, Albaycin

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ILLUSTRATION 3.1

ILLUSTRATION

ILLUSTRATION 3.2

3.3

ILLUSTRA TION 2.2 ILLUSTRATION

3.4

ILLUSTRA TION 2.2

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Dès les premières années de la dynastie ziride, la ville est dotée de deux systèmes d’alimentation en eau qui permettent son acheminement à l’intérieur de la ville fortifiée et sa distribution dans les différentes citernes de la Medina. Le premier système consiste en canaux d’irrigation, comme le canal d’Aynadamar ou celui des Axares, construit afin d’alimenter la citerne de la nouvelle Grande Mosquée. Celle-ci existe encore aujourd’hui et, avec sa capacité de 300m3 d’eau, elle est la plus grande de la Grenade musulmane. (ILLUSTRATION 3.4) Le second système est la coracha le long du Darro, située au pont du Qadi.

LA CORACHA et LA TOUR ALBARRANE Une coracha est élément défensif, un pan de muraille destiné à protéger la communication entre une forteresse et un lieu d’approvisionnement en eau, quand celui-ci se trouve à l’extérieur du noyau fortifié. A l’endroit où l’on trouve l’eau, il y a généralement une tour, la tour albarrane, de l’arabe al-barrani qui signifie extérieur, qui contient en son intérieur la source de l’eau (ici, le Darro). Cet élément défensif spécifique de l’architecture hispano-musulmane est très peu présent dans le reste de l’Europe.

Sous le roi Habus ibn Maksan, les habitants de la campagne sont encouragés à venir s’installer à l’intérieur des murs de Grenade, provoquant une nouvelle croissance de la population intramuros, qui demande la construction de fortifications dans le but d’assurer la protection des nouveaux quartiers. Ces murailles, agrémentées de nombreuses portes et tours, agrandissent sensiblement la ville.

ILLUSTRATION 3.5 :

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2. RENFORCEMENT ET AGRANDISSEMENT Le règne de Bãdis et d’ ‘Abd Allãh, dernier souverain ziride (1038–1090)

De 1038 à 1076, Badis Ben Abus, fils du Roi Habus, continue le processus de consolidation de la Médina. En 1039, il renforce son royaume en gagnant la Taïfa de Séville et il implante sa résidence du pouvoir en haut de l’Albaycin en se construisant un palais, l’Alcazar de Badis12, à l’extrême nord-est de la ville, forteresse qui protège toute la partie haute de la colline de l’Albaycin13.

L’augmentation permanente de la population provoque une progression évidente de l’occupation de la zone basse de la ville et celle-ci gagne en cohérence, occupant les espaces libres qu’il y a entre les différents quartiers. A l’extrême sud de l’Albaycin est créé l’arrabale des Axares14, Rabad Ajsaris, en parallèle à la construction de son canal d’irrigation, un quartier pas encore fortifié. Proche de la Grande Mosquée nait le quartier de Bibarrambla, près de la place du même nom. Sur la rive gauche du Darro se développe le quartier des Alfareros, Rabad alFajjarin, quartier d’artisans qui comprend de nombreuses manufactures d’argile, de cuirs, de poteries et de tanneries.

Badis entreprends d’améliorer les défenses de ses prédécesseurs par l’édification de la Puerta Monaita (ILLUSTRATION 3.6) et l’Arco de las Pesas. La Puerta Monaita est munie d’un double arc de blocs finement ciselés, avec un linteau surplombé d’un alfiz, d’hayyiz en arabe, et d’un passage coudé avec une rampe d’accès prononcée. A l’extérieur, la porte est protégée par une grande tour en pierre de taille et un rempart. Elle est reliée à la Puerta des las Pesas par un pan de muraille de plus de 400 mètres.

A l’intérieur des murs, l’architecture vernaculaire évolue. Le plan général de la maison ziride est basé sur un schéma carré ou trapézoïdal avec patio central, modèle caractéristique de la zone méditerranéenne dès l’époque antique. Autour de ce patio se développent différentes pièces.

12 13 14

Actuel couvent de Santa Isabel la Real, Carril de la Lona Il n’en subsiste qu’une citerne voûtée à quatre travées et quelques vestiges de murailles Aux alentours de l’actuelle cuesta del Chapiz et de la victoria

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Le sol est recouvert de chaux ou dallé de briques, plus tard enduits tout comme le sont les murs, de plus en plus souvent agrémentés de stucages. En général, il y a un étage avec une toiture à deux versants en tuiles et peu d’ouvertures dans ses murs.

On retrouve à l’extérieur des murs, les maqbarat, comme la Nécropole Sahl Ben-Malik15, qui se développe jusqu’à la fin de l’époque nasride et la Nécropole de Socaster16. Cependant, certains quartiers disposent de petits espaces à l’intérieur de leurs limites fortifiées, proches des voies de communication, comme lieu de culte funéraire.

En 1058, Alphonse VI s’empare de Tolède et les rois de Taifas demande de l’aide au Maghreb pour résister à l’envahisseur chrétien. A partir de 1073, Abd Allah, petit fils de Badis, est confronté à des conflits frontaliers qui affaiblissent la Taïfa. En 1090, le sultan almoravide Yusuf ibn Tachfin décide finalement d’intégrer al-Andalus à son empire. Les rois de Taifas se trouvent alors pris en étau entre le Nord et le Sud. Les hostilités permanentes avec leurs voisins musulmans et chrétiens qui les ont forcés à renforcer leurs murailles finissent par les rattraper. Abd Allah ne résiste pas à l’assaut du souverain Yusuf, et lui remet la ville.

Nous voyons qu’en moins de cent ans, nous assistons à l’abandon d’une ville (médina Elvira) et à la renaissance et consolidation d’une autre (médina Garnatha), qui s’est construite sous une impulsion urbanistique quasi frénétique. Entre 1010 et 1090, l’ancienne muraille est renforcée et des nouvelles fortifications sont édifiées, le système d’irrigation s’étend rapidement et les infrastructures publiques se développent parallèlement à la croissance urbaine. La volonté politique des souverains zirides et l’augmentation de l’économie de la région grâce au contrôle de la Vega leur permettent de réaliser ces travaux avec une rapidité étonnante.

Par l’accroissement direct de sa population et se prise en main par l’autorité ziride, médina Garnatha devient, dans la seconde partie du XIe siècle, l’une des cinq plus grandes villes d’Al-Andalus et compte entre 26.000 à 38.000 habitants, soit plus de 4.400 maisons sur 75 hectares fermés par une enceinte.

15 16

Près de la Puerta Elvira, sur l’actuelle Plaza del Triumfo Actuelle Calle Horno de San Agustin

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ILLUSTRATION 3.6

ILLUSTRATION 3.7

LE HAMMAM Elément essentiel de la culture urbaine islamique, on parle du hammam comme d’un exemple de réutilisation d’une topologie architectonique de la domination romaine tardive pour répondre aux coutumes islamiques. Les bains arabes sont néanmoins de superficie beaucoup plus réduite que les thermes romains et on y préfère l’eau chaude et la vapeur au frigidarium romain.

Ils sont tous bâtis selon le même schéma, articulés autour de trois salles. La salle principale contient un bassin central et occupe la fonction de salle de repos et de déshabillage, ainsi que celle de frigidarium. Elle est voutée et entourée de galeries. Autour, on trouve la salle tiède, le tepidarium, et la salle chaude, le caldarium, chauffés par un système à hypocauste et construites avec des murs épais. Généralement situé près d’une mosquée pour répondre aux coutumes et aux pratiques religieuses, le hammam joue un rôle important dans la planification urbaine. Le "Bañuelo", bain arabe de l’époque ziride représente bien cette typologie romaine adaptée par les arabes. Pour sa construction, les Zirides ont réemployé divers éléments romains, wisigoths et omeyyades. (ILLUSTRATION 3.7) Baños calle del Agua

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L’entretien des limites La domination berbère (1090 – 1238) Au XIIe siècle, Grenade perd de son importance politique, bien que la ville poursuive son expansion et que l’Alcazaba Qadima garde sa fonction de centre administratif. Des travaux divers ont lieu sur l’enceinte fortifiée et on voit apparaitre la création de nouveaux quartiers et de nouveaux palais, comme celui du Nayd, dans un secteur proche du Genil.

1. CONSOLIDATION Les Almoravides, Berbères du Ribat (1090 - 1155) Les Almoravides sont issus d’une tribu berbère du Sahara. On les décrit comme des berbères peu civilisés et leur arrivée en Espagne est à l’origine d’une courte période de régression culturelle. La dynastie s’appuie sur une stricte orthodoxie religieuse, ce qui provoque des intolérances envers les Juifs et les Chrétiens. Comme à l’époque des rois de Taifas, la période des Almoravides se caractérise par la débilité de leur règne, les révoltes continues et les luttes internes dans le royaume d’al-Andalus.

De l’époque Zirí à l’Almohade, on assiste à une progression évidente de l’occupation de la zone basse de la ville, accompagnée d’une augmentation de la population. L’occupation de la ville se fait d’une manière lente et progressive. La croissance urbaine provoque d’abord le colmatage des espaces restés inoccupés de l’Alcazaba Qadima. D’autre part, la croissance des quartiers périphériques, surtout celui des Axares au Nord de l’Acazaba, et des nouveaux quartiers comme celui de l’Arrabal de la Rambla exigeant la construction de nouvelles murailles.

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Les murailles évoluent grâce à de nouvelles techniques de constructions.

Les structures défensives comportent des tours à plan semi-circulaire, comme entre la Puerta Monaita et Nueva, munies d’esplanades auxquelles on accède au moyen de quelques marches, ce qui permet un meilleur contrôle visuel. La Puerta Elvira et la Puerta Monaita sont transformées et leur structure est complexifiée et deviennent des portes à passage coudé. La preuve de la consolidation du noyau urbain de l’entité de la Medina est la construction du pan de murailles entre la Puerta Elvira et Bibarrambla au XIIe siècle. Sur ce pan de muraille est construit un ensemble défensif fermé et attaché aux murailles, la forteresse de Bibataubin.

L’Acequia Gorda, canal d’irrigation qui puise son eau dans le Genil, est créé dans le but d’irriguer des terres plus proches du noyau urbain, ce qui génère une forte croissance de cette partie de la ville et le début du développement des quartiers du Mauror, rabad Mawrür, de l’Almanzora, rabad al-Mansura, et des Alfareros, rabad al-Fajjarin, entourés de nombreux potagers. Ces zones de forte activité primaire et secondaire sont agrémentées de fondouks, sortes de marchés couverts, zones stratégiques entre le monde urbain et périurbain, situés extramuros ou près des portes de la ville.

En conclusion, les principales transformations engendrées par les Almoravides sont les améliorations des défenses de la ville. Il n’y a pas vraiment de grands changements sociaux car la population almoravide est restée la même que la population ziride. La dynastie des Almoravides s’achève en 1147.

2. AMELIORATIONS Les Almohades, Nomades Sahariens (1155- 1239) Dès la première moitié du XIIe siècle, les Almohades succèdent aux Almoravides. Installés d’abord au Maghreb puis en Espagne, ils arrivent en 1146 en al-Andalus et installent leur capitale à Séville. D’une grande austérité religieuse, ils détruisent de nombreuses constructions Almoravides.

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Les Almohades conquièrent le royaume de Grenade en 1155 et y restent jusqu’en 1239. L’époque almohade est considérée comme la dernière tentative de stabilisation de l’islam en Espagne. On voit proliférer les constructions et rénovations d’édifices défensifs pour essayer de résister aux conquêtes espagnoles. Ils renforcent et améliorent les défenses en continuant ce que les Zirides et Almoravides ont entrepris. Cette période est aussi caractérisée par la rapide croissance démographique, du à l’arrivée d’un grand nombre de réfugiés musulmans provenant des divers territoires conquis par les catholiques.

Ces deux faits réunis donnent naissance à de nouveaux quartiers : rabad al-fajjarin, rabad al-tawwabin, rabad axibin, rabad al-goryi et rabad Nayd. La muraille construite autour de l’Arrabal des Axares correspond à l’époque Almohade17. Certains axes urbanistiques sont déjà tracés tels que nous les connaissons aujourd’hui, comme la rue San Matias, Zanaqa Axibin et la rue Naval, Zanaqa al-Gorgi.

Au Nord de l’Alcazaba est installée la Xarea, un « ample espace irrégulier destiné à la prière à l’air libre, capable de rassembler tous les croyants lors de grandes célébrations annuelles, ou quand la Grande Mosquée ne peut les recevoir tous dans son patio »18.

Le processus de colmatage de l’espace urbain continue avec le développement de nombreuses constructions domestiques et publiques.

Des nouveaux fondouks et hammams, comme les baños de San Agustin, sont édifiés, et on assiste à la construction de mosquées, dont la Grande Mosquée de l’Albaycin.

Défaite au Maroc, la dynastie almohade s’effondre en Espagne au milieu du XIIIe, face à l’avancée chrétienne. En 1236, Ferdinand III s’empare de la ville de Cordoue. Dans les années qui suivent, Séville et d’autres villes musulmanes comme Murcie et Valence tombent elles aussi. Les Maures sont expulsés et se réfugient alors à Grenade et dans quelques forts près de Cadix.

17 Aujourd’hui démolie, il subsiste quelques pans et tours dans le Carmen San Agustin et de Rodriguez Acosta.

18 Seco de Lucena Paredes Luís, La Granada Nazarí del siglo XV, 1975

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L’extension, l’apogée et le déclin Les Nasrides et le Royaume de Grenade (1232-1492) Dès 1212, la déroute de la flotte Almohade, au cours de la bataille de Las Navas de Tolosa, signe le début de leur déclin. Une période de grande instabilité s’ensuit dans la région. En 1232, Muhammad ibn Yusuf ibn Nasir, surnommé Alhamar, prend progressivement le pouvoir. Il mène la guerre contre l'Espagne chrétienne. En 1246, après la prise de Cordoue et de Séville par le roi catholique Fernando III, un pacte est signé : la dynastie nasride assure sa survie en acceptant le statut de vassal du roi castillan, tout en conservant une très grande indépendance.

Alhamar proclame Grenade, capitale de l'autorité musulmane en Espagne. L’afflux des habitants fuyant les villes conquises vers Grenade donne à celle-ci un nouvel essor, qui dure près de 300 ans.

Le Royaume nasride ne s’est pas formé de manière linéaire. A leur arrivée à Grenade au XIIIe siècle, les Nasrides vont se trouver devant une ville déjà consolidée et subdivisée. Les réformes et les améliorations de la ville arabe du XIIIe au XVe siècle prennent place sur les solides bases urbanistiques zirides et sur les transformations almoravides et almohades qui s’en suivirent. Il n’y a pas de rupture claire avec les Almohades.

Les principaux changements dans l’organisation spatiale et la structure urbaine ont lieu sous les mandats de Yusuf Ier (1333-1354) et Muhammad V (1354-1359/1362-1391), avec la prolifération d’édifices publics, distribués autour de la Mosquée : la Madrasa, l’Alcaiceria, le

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caravansérail ou Corral de Carbon, le Mâristân, hôpital des fous19. Après une grande période d’instabilité, l’état est plus structuré, les frontières sont renforcées et le calme politique permet une nouvelle impulsion urbanistique et constructive.

En premier lieu, Muhammad I décide de déménager à la colline de la Sabika, et commence la construction de la ville palatine de l’Alhambra, en parallèle avec son Acequia Real, canal royal. Le centre du pouvoir est déplacé de l’Albaycin à l’Alhambra (ILLUSTRATION 3.8), changement démonstratif du passage du pouvoir aux mains des Nasrides. L’Albaycin est relégué à la catégorie de faubourg. « Après la construction de l’Alhambra, l’Albaycin reste pour toujours l’écran d‘un objectif optique, le nouvel appareil architectonique modifiant l’antique équilibre entre empirisme urbain et asymétrie du quartier, ignorant l’échelle urbaine de l’intervention et n’arrivant à aucun accord entre intervention architectonique et restructuration du tissu de la ville. » (Archives de la Commune de Grenade) 20

ILLUSTRATION 3.8

19 Reconverti en maison de la monnaie par les Rois Catholiques, jusqu’à sa destruction au XIXe siècle.

20 Traduction de l’espagnol de : – , Albayzin, Ayuntamiento de Granada, Granada

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L’ALHAMBRA De l’arabe, al-Qal ‘at al-Hamra, « la citadelle rouge », couleur de ses murs au coucher du soleil. Résidence fortifiée des monarques nasrides de Grenade, il s’agit d’un complexe architectural, résultat de la cumulation de l’Alcazaba, de palais nasrides, et de l’ancienne citadelle du IXe siècle. Ces parties sont séparées topographiquement par deux niveaux : L’Alhambra baja (775m) et l’Alhambra alta. (785m) Point périphérique comme élément de référence politico-juridique, sa position sur la colline escarpée de la Sabika la rend difficile à attaquer. « Elle entretient avec l’Albaycin une relation de symétrie de translation sur un axe perpendiculaire au Darro. Elle est comme le reflet dans un miroir de l’Alcazaba Qadima, et ils ont une relation visuelle réciproque par la vallée du Darro. » Traduction de l’espagnol de Gamiz Gordo Antonio, La Alhambra Nazarí, 2001 (ILLUSTRATION 3.12)

Les impressionnants travaux militaires terminés par les Zirides ont déterminé la structure de la ville musulmane et l’ont convertie en un lieu très sûr et en conséquence, très attractif. L’architecture militaire nasride reste, elle, limitée à des dispositifs défensifs, travaux obligés engendrés par l’ajout de nouveaux quartiers situés au départ extramuros.

Les quartiers de l’Arenal, des Alfareros et de la Lona sont fortifiés. Un quartier appelé Albaycin, Rabad al-Bayyatin, surgit à l’extérieur des anciennes murailles de l’Alcazaba Qadima, et il est lui aussi fortifié. C’est le quartier le plus peuplé de toute la Médina à l’époque nasride. Après le déplacement du pouvoir à l’Alhambra, le quartier ne perd pas de son importance dans l’ensemble de la Médina et la population des quartiers qui se sont développés aux alentours de l’Alcazaba Qadima continue de croitre. La muraille extérieure de la ville, aussi appelée Cerca de Don Gonzalo, date de la seconde partie du XIVe siècle et du début du XVe siècle, et le début de sa construction a été ordonné par le ministre et général Yusuf I en 1327. Adaptée à la topographie de la colline, sa construction commence par le conditionnement du terrain, suivi de l’installation d’un système de drainage. Au XVe siècle, en plus de ses habitations et palais, l’Albaycin se voit agrémenté de zones de potagers.

(ILLUSTRATION 3.9 ET 3.10) Dans toute la zone entre les deux murailles, la ziride et celle de Don Gonzalo, selon l’investigateur Vilches, directeur de l’intervention archéologique, « il n’existerait pas de trame urbaine à proprement parler, 52

car en se fermant par des murailles au XIVe, le quartier de l’Albaycin s’est fait avec des prévisions de futur qui ont perduré jusqu’au XXe siècle » 21..

Sur la Plateforme de Vico, on observe une trame urbaine aux alentours immédiats de la Puerta de Fajalauzza, et sur la Carte du Dalmau de 1796, les abondantes zones de potagers de l’Albaycin sont toujours présentes.

Après l’ajout de plusieurs faubourgs et la création de nouvelles enceintes, Grenade est partagée, selon Sanchez Acale Fernando 22 en quatre quartiers principaux qui forment la ville du XVe siècle : Au Nord, rabad al-Bayyazin, quartier des fauconniers, le plus important et le plus peuplé, avec sa propre Grande Mosquée et une administration autonome ; au Sud-Ouest, en dehors des murs près du Genil, rabad alFajjarin, quartier des potiers, toujours agrémenté de nombreux potagers ; au centre, rabad bab al-Rambla, quartier de la porte de l’Arenal et au Sud-Est, rabad Nayd, avec de nombreux pavillons et jardins.

La physionomie de la ville nasride du XVe siècle est le résultat de la mutation de la capitale politique d’Elvira à Garnatha par les Zirides et de la forte croissance urbaine qui a lieu du XIe au XVe siècle. André Miquel dit de l’évolution urbaine qu’ « elle a effacé ou presque le plan en damier de la cité antique préexistante et remplacé la trame médiévale par une plus moderne » 23 . L’espace urbain est modelé par l’Islam et, contrairement à la ville européenne médiévale, il n’est pas marqué par des autorités. La ville est un tout, les ruelles sont refermées sur ellesmêmes et les maisons tassées les unes contre les autres. Le maure dira de la ville qu’elle est « le reflet des valeurs musulmanes révélées à tous »24.

C’est sur ce paysage urbain que se produiront les réformes castillanes.

Dès 1419, l’instabilité augmente dans le Royaume de Grenade et en 1482, les rois catholiques partent à la conquête de Grenade.

21

José Miguel Puerta Vilchez, 1987, dans Catalago de Patrminonios especiales, Ayuntamiento de Granada 22 Sanchez Acale Fernando, Plazas y paseos de Granada, de la remodelación cristiana de los espacios musulmanes a los proyectos de jardines en el siglo XVIII, Universidad de Granada, Granada, 2005 23 André Miquel, L’Islam et sa civilisation dans Nadjm Oud-Dine Bammate, Cités d’Islam, Arthaud, Paris, 1987 24 Nadjm Oud-Dine Bammate, Cités d’Islam, Arthaud, Paris, 1987

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ILLUSTRATION 3.9

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LES MURAILLES DE GRENADE ET SES PORTES

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ILLUSTRATION 3.10

1.

MORPHOLOGIE URBAINE DE LA MEDINA

BASES JURIDICO-ADMINISTRATIVES : Un urbanisme non-planifié En général, la société islamique du moyen-âge est composée des mêmes classes sociales que dans le reste de l’Europe : L’aristocratie, la classe supérieure, les hommes libres et les esclaves. La population vit en groupes, selon leurs croyances religieuses (chrétiens, juifs ou musulmans), leurs origines (berbères, maures, juifs,…) mais plus fréquemment selon leurs professions. Au XVe siècle, dans la ville, 40,6%, majoritairement des Maures, travaillent dans le secteur secondaire, contre 46,9%, majoritairement chrétiens, qui travaillent dans le secteur tertiaire25.

L’historien anglais Erwin A. Gutkind précise qu’il n’y a pas de qualification spéciale à avoir pour être admis en ville. Il n’y a pas non plus d’autorité politique qui peut garantir de privilèges particuliers, ni de développement de l’appareil administratif. En conséquence, ajoute-t-il, les cités islamiques grandissent à partir de la maison familiale. Le modèle des rues et des districts n’étant pas imposé par un pouvoir supérieur, le caractère labyrinthique des rues se développe, et surtout, la primauté des maisons sur les rues. En effet, la fonction la plus importante est le lieu de résidence, la fluidité du trafic est d’importance secondaire.26 Le système juridique et administratif musulman est fondé sur le sens communautaire et la cohésion sociale, contrairement à l’organisation occidentale, basée sur l’autonomie municipale et l’autogouvernement local. Les pouvoirs musulmans, conformément aux préceptes coraniques, se voient aussi contraints de donner un abri aux familles qui intègrent la communauté afin de pouvoir développer leurs activités. C’est leur religion et leur appartenance tribale qui fondent leur identité. L’autre est fondamentalement le non musulman, espagnol ou non, même si la 25

Sources : Commune de Grenade Traduction de l’anglais de : Erwin Anton Gutkind, International History of City developement, Urban developement in Southern Europe : Spain & Portugal, Vol III, 1964)

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cohabitation n’est pas exclue. On peut dire que la structure des pouvoirs publics est désagrégée, régie par un système spatial de barrières et de ségrégations qui définissent l’ensemble des lieux différenciés, pour des raisons ethniques, professionnelles, religieuses ou politiques.

Le code de Yusuf Ier précise que Grenade est divisée en quartiers, chacun d’eux soumis à la vigilance d’un qadi respectif qui assiste aussi aux marchés pour maintenir l’ordre. Chaque quartier a une délimitation exacte et la surveillance est assurée par une ronde nocturne ainsi que l’ouverture et la fermeture des portes de ses murailles, exactement de la même manière que les portes principales de la ville.27 Malgré les textes dictés par le Coran, on rencontre peu de conversions brutales et forcées en Andalousie. Il paraît en effet plus simple et plus avantageux de maintenir les structures sociales et administratives et de faire rentrer des impôts. C’est pourquoi une cohabitation pacifique règne en général parmi les citoyens d’al-Andalus, donnant à ses villes un aspect différent de celles du Maghreb.

27

Codigo de Yusuf I dans Jerez Mir Carlos, Guía de arquitectura de Granada, Comares, Granada

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STRUCTURE ET FORME : AUTOUR DE LA MOSQUEE « Les bâtiments, mosquées, marchés, demeures, sont pris dans un écheveau de passages, d’arcatures et d’encorbellements qui font de la Médina une unité organique. » (Nadjm Oud-Dine Bammate)28 La Médina est le lieu dans lequel les devoirs de la religion et les idéaux sociaux peuvent être réalisés complètement. La ville est considérée comme l’unique endroit dans lequel la vie peut être accomplie comme prescrite dans le livre d’Allah et du Prophète.

Noyau fortifié et surélevé, la Médina devient donc le centre de l’animation. Elle regroupe la Grande Mosquée, le caravansérail, les principaux marchés de la ville, et une série de faubourgs, relativement autonomes par rapport à la Médina, également protégés par une enceinte de murailles.

Elle est, avec ses fortifications, le symbole de l’unité spirituelle et physique de la ville, unité différente des autres villes occidentales. Il y a une distinction fondamentale à faire entre le quartier central animé et le calme des quartiers résidentiels, entre la partie publique et la partie privée, communautaire.

LA MEZQUITA La mosquée est le lieu du culte musulman, mais aussi le lieu de l’enseignement et de la justice, et sa place reçoit quotidiennement les étals et commerces des souks. Dans ses annexes logent les étudiants et les docteurs de la loi. Elle est aussi le centre des autres mosquées de quartier et les bains principaux de la ville y sont accolés. La vie quotidienne est intrinsèquement liée à la mosquée. Cette dernière doit donc avoir un lien permanent avec l’extérieur, mais aussi pouvoir recevoir toute la communauté des fidèles. L’espace sacré côtoie le profane, il n’y a pas de rupture, mais réciprocité. À l’opposé de l’église Chrétienne, lieu sacré, maison de Dieu, la mosquée est la maison des croyants, car le seul édifice de l’Islam est le Coran. Les éléments qui composent une mosquée sont la qibla, le mihrâb, le minbar, le minaret et une salle de prière orientée vers La Mecque. Elle est toujours accompagnée d’une citerne pour les ablutions.

28

NADJM OUD-DINE Bammate, Cités d’Islam, 1987

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La ville est divisée en cercles concentriques autour de la Mosquée, qui répartit les différents usages et fonctions entre la Médina, les faubourgs et l’Alhambra, siège du pouvoir. La partie centrale est réservée aux activités publiques et commerciales qui bordent la Grande Mosquée, comme le souk et les fondouks, le hammam, l’école coranique, les librairies et le tribunal du Qadi. La seconde zone est destinée aux industries et à l’artisanat, comme les écorcheurs, les tanneurs, les teinturiers. La dernière zone est résidentielle.

Ces parties résidentielles, relativement autonomes sont rattachées à la Médina par des murailles. Chaque faubourg est semblable à la Médina elle-même, s’articulant autour de sa propre mosquée, et dotée d’un souk, de magasins, de bains, et subdivisée en quartiers ou arrabales.

Plusieurs ‘médinas’ entourent donc la Médina principale.

Jean-Bernard Racine dit de la médina : « Le désordre et le fouillis apparents ne doivent pas tromper l’observateur. La masse compacte de la ville, avec ses maisons et ses terrasses, est entourée de remparts percés de portes (Bâb) et dominée par sa citadelle. En son sein, de disposition concentrique, la Médina hiérarchise avec soin ses différents quartiers en dissociant l’habitat du travail et en cloisonnant topographiquement les corporations d’activités tout en les concentrant. La ségrégation est tout aussi nette dans les quartiers de résidences, mais cette fois sur le plan ethnique et religieux. »29 Les quartiers qui composent la Médina sont divisés en différentes zones urbaines d’aires variables, constituées d’un réseau de ruelles. Ils sont ceints par des murailles et souvent séparés par des portes. Si le quartier prend une certaine ampleur, en plus des bains, écoles, fours et entrepôts, il possède une mosquée propre, qui prend généralement le nom de la profession établie dans le quartier.

Des propriétés dynastiques sont disséminées dans la trame urbaine, comme le palais de Dar-al-Horra. En dehors de la ville, on trouve les maqbarat, les nécropoles musulmanes, et les alquerias, fermes qui sont aussi utilisées comme villas d’agrément.

29

Racine Jean-Bernard, La ville entre Dieu et les hommes, Presses Bibliques Universitaires et Anthropos, Suisse, 1993

59

LE SUQ Le souk, sûq en arabe, est le principal centre commercial et économique de la ville. Il se situe traditionnellement au centre de la Médina et s’implante en général sur la place de la Grande Mosquée et le long des rues environnantes. A Grenade, il comprend près de 50 étals et quatre entrepôts, qui servent aussi de logement aux marchands venant de l’extérieur des murailles. Il est hiérarchisé : les activités les plus nobles, comme les objets du culte, les livres et les étoffe, se trouvent à proximité de la mosquée, tandis que les activités plus dégradantes ainsi que les lieux d’échanges avec le monde rural sont rejetés aux portes de la cité. En conséquence, les producteurs ou revendeurs de mêmes catégories de bien vont toujours occuper des étals adjacents. Comme dans les villes médiévales d’Europe, une bonne partie des commerces contiennent l’atelier dans lequel se confectionne la marchandise.

L’Alcaiceria (ILLUSTRATION 3.11) de Grenade est un autre type de centre commercial, noyau urbain isolé du reste de la Médina par des portes. Il s’agit d’un habitat collectif où se pratiquent aussi des activités artisanales. À l’intérieur de ce complexe, on travaille en particulier les soies et laines, le lin, le coton et le poil de chèvre. « Marché spécifique de soies et produits de luxe. Enceinte à laquelle on accédait par dix portes, fermées la nuit, et la journée restreintes par une chaîne pour ne pas laisser le passage aux hommes à cheval. Il est en plan orthogonal rempli de nombreuses échoppes et édifications auxiliaires. » Seco de Lucena Paredes Luís, La Granada Nazarí del siglo XV, 1975

Etals Magasins Librairies

ILLUSTRATION 3.11

Bureaux de la soie Chapelle de Nuestra Señora Maison de l’administration

Maisons privées Place de la garde Garde des chiens

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ÉLEMENTS STRUCTURANTS : UN MUR, UNE MOSQUEE, UNE MAISON Malgré le peu d’administration urbaine et la confusion que cela provoque, la ville est structurée par quelques éléments dominants qui permettent de se repérer. Il est important de noter que la Médina de Grenade suit le schéma de base d’une ville musulmane à la même époque, ce qui permet, par exemple à un musulman de Fez de se retrouver à Grenade.

Au niveau urbain, on retrouve, comme éléments unificateurs de la ville, les murailles et les portes qui les relient entre elles. Les murailles jouent un rôle de séparateurs, mais aussi de connecteurs linéaires le long du périmètre de la ville. De plus, la Grande Mosquée réunit les croyants et engendre un rassemblement de population dans les souks qui l’entourent. Les entrepôts, les souks et le caravansérail forment le complexe commercial qui réunit et structure la confusion urbaine.

Au niveau civil, l’Alhambra, bien qu’elle jouisse d’une autonomie fonctionnelle et juridico administrative, reste en contact étroit avec la ville et lui confère un point de repère permanent et sécurisant. Elle est reliée au reste de Grenade par des fortifications. (ILLUSTRATION 3.12) Au niveau social et économique, on peut dire que le quartier est un élément structurant du système urbain, c’est le lieu ou tous se rencontrent et se côtoient.

Au niveau domestique, le patio, espace ouvert central, organise et distribue les différentes pièces de la maison. « Il crée un vide dans l’intérieur des maisons, opposé à la compacité du bloc urbain » 30 . Ses façades intérieures richement décorées s’opposent à la nudité des pans aveugles extérieurs.

ILLUSTRATION 3.12 30

Traduit de Jerez Mir Carlos, Guia de Arquitectura de Granada, Comares, Granada, 2001

61

2.

LA NON-QUALIFICATION DES ESPACES PUBLICS

Dans la médina, il n’y a pas de grands espaces libres. La ville musulmane, dans son expansion, ne laisse pas de place au développement d’espaces publics ouverts, si ce n’est quelques placettes, signes de la proximité d’une mosquée, d’un marché ou d’une porte de la ville. Les lieux publics musulmans sont généralement petits, à l’opposé de l’idée d’espace de la ville castillane. Il s’agit parfois d’un simple élargissement de la voierie.

Une place est définie par le statut des édifices qui l’entoure. Dans la ville musulmane, le concept de place est généralement représenté par un lieu présidé par des édifices public. Torres Balbas définit deux archétypes d’espaces publics ouverts musulmans dans la médina : la rahba et le souk, qui peuvent être classifiés selon leur usage, leur position dans la ville et leur morphologie.31 La rahba est la place associée à une mosquée. A Grenade, vu le grand nombre de mosquée, il y a de nombreuses places de ce type, comme la rahbad Bab al-Bunud, actuelle place de Bibalbonud. (ILLUSTRATION 3.13, plan actuel) :

31

Torres Balbás Leopoldo, Ciudades Hispano-musulmanas, Madrid, 1985

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Le patio de la mosquée, au caractère semi-public, complète parfois l’espace de sa propre place afin de répondre à une demande spatiale toujours plus grande. Le souk est le lieu qui abrite magasins permanents et commerces provisoires. On parle de suwayqa pour désigner une place de marché de plus petite envergure.

Proche des portes extérieures de la ville et entre les différents quartiers, des espaces libres, intra- ou extramuros, se sont définis comme places à travers le temps. Au départ, ces terrains vagues, situés près des portes de la médina, sont justifiés par le transit élevé de personnes et de marchandises qui veulent entrer ou sortir de la ville. Par la suite, la ville s’agrandit et ces lieux se retrouvent englobés à l’intérieur même de la Médina. Les portes qui, au départ, sont des portes d’accès à la ville modifient leur fonction et deviennent des nœuds de communication inter-quartiers. (ILLUSTRATION 3.14 : espaces entourés en mauve) Ces esplanades improvisées sont parfois utilisés comme centres commerciaux et transformés en souks, qui ont l’avantage de pouvoir s’approvisionner facilement dans les commerces situés plus loin du centre, et donc plus près d’eux, comme les boucheries, les abattoirs, les poissonneries, … Ce type d’espaces urbains se retrouve, par exemple, à la place Bibarrambla ou à la place déjà citée de Bibalbonud.

(ILLUSTRATION 3.13) Les places occupent donc des fonctions commerciales, sociales et fonctionnelles. La médina, parsemée de ces espaces ambigus, forme un ensemble organique dense et irrégulier. Les rues, ruelles et darb forment un tissu de placettes et de terrasses, qui ne sont parfois pas plus qu’un simple élargissement de la voierie, et donne au passant la possibilité de se reposer du flux de circulation. Ces espaces sont la plupart du temps agrémentés d’un réservoir d’eau ou d’une fontaine, unique élément ornemental du lieu, comme à la Placeta de la cruz Verde.

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Les musulmans ont plus besoin d’un contact avec la nature que leurs contemporains chrétiens. Cette nécessité est probablement lié à leur urbanisme : le musulman veut s’échapper des rues bruyantes et étroites de la Médina. Comme il y a peu d’espace intramuros, les gens se déplacent à l’extérieur, et s’ils le peuvent, ils ont une maison de campagne. Dans l’enceinte de la médina, la compensation du manque d’espaces publics se fait par l’abondance d’arbres et arbustes sur les placettes et dans les rues. Parfois, ces lieux sont connus par le nom des arbres qui les ornementent, comme la Zanaqat Saqayat al-Habba, Rue de la Fontaine du Cerisier.

Le nouveau quartier de l’Albaycin, en particulier, bénéficie de la présence de nombreux jardins, patios et potagers à l’intérieur même des maisons, qui forment les carmens.

LE CARMEN Le Carmen, dérivé du mot arabe karm, qui signifie vigne, désigne une maison de campagne de Grenade, avec son jardin et ses potagers. Ce type d’habitat traditionnel de l’Albaycin est constitué d’une maison flanqué d’une tour, avec une pépinière moitié jardin moitié potager et d’un darb surplombé d’un haut mur qui le sépare de la rue. La maison est petite, en matériaux simple comme la brique et la chaux, le plus important étant la partie extérieure. Au XVe siècle, la ville de Grenade compte 37 carmens, dont 26 occupés par des Chrétiens et 11 par des Morisques.1 Au XIe et XIIe siècle, le terme désigne plutôt une ferme située à l’extérieur des murs. Au XIVe siècle, l’écrivain Ibn al-Jatib fait une description des alentours de Grenade et explique qu’ « à l’extérieur des murs, il n’y a pas un seul espace libre car tout est occupé par des potagers, carmens, et jardins. » (dans El Carmen, une vivienda hispano-musulmana », Bruno Alcaraz Masáts, Revista de la UNED (Universidad Española a Distancia) n°1, dans la section Firmas invitadas, octobre 2008) Au départ extramuros, les carmens ont fini par faire partie intégrante de la ville, dû à l’extension de celle-ci, et ils en sont devenus peu à peu des habitats privilégiés. Le Carmen actuel résulte plus du XIXe siècle, quand la bourgeoisie de Grenade, influencée par l’orientalisme du XVIIIe siècle, commence la revitalisation de l’Albaycin en reconstruisant les anciens carmens, tout en y ajoutant des fausses décorations orientales, mais en gardant son raffinement et son intimité originelle.

Les versants de l’Albaycin sont aujourd’hui couverts de carmens qui donnent sur l’Alhambra et sur la Vega de Grenade.

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3.

IMPREVISBILITE DU RESEAU VIAIRE

Le système de voieries est composé d’un réseau primaire d’axes radiaux, connectés entre eux par les principales portes de la ville, et d’un réseau secondaire de ruelles, qui pénètrent à l’intérieur du bloc urbain.

Les rues sont courtes et anguleuses et forment un agglomérat urbain très dense. Leurs petites longueurs limitent les perspectives, donnent une échelle humaine à la ville et leur confèrent de l’intimité. Seule la Calle Elvira a une longueur conséquente et un tracé plus ou moins rectiligne.

Ce système viaire contribue à la densification du tissu urbain, à la nature intimiste de la maison et à l’indifférence entre le public et le privé, manifesté par les darb, nombreuses ruelles sans issues ou fermées par des portes. Celles-ci servent à la sécurité du quartier, elles sont ouvertes uniquement la journée pour le transit, et fermée la nuit ou en cas d’alarmes. Des petites arches sont également construites afin d’éviter les effondrements. Elles soutiennent la partie supérieure de l’édifice, souvent mal construit et en danger d'affaissement. Alarbeas, Rasif, Darb, Nadi, Rasif, Simat, Tariq, Zanaqa, Zuqaq32 forment le réseau viaire particulier de la Médina.

Ces éléments architectoniques donnent un caractère intimiste aux rues de la ville musulmane, déjà établi par les nombreux murs aveugles. « Les maisons de Grenade étaient si proches au temps des Maures, et les rues étaient si étroites, qu’une fenêtre à l’autre s’atteignait avec le bras ; et il y avait beaucoup de quartiers où les cavaliers ne pouvaient pas passer avec leurs lances dans les mains et ils devaient percer les maisons d’une façade à l’autre pour pouvoir passer, et les Maures disaient qu’ils l’avaient fait exprès pour une plus grande force de leurs villes. »33 (Luis Marmol Carjaval au XVe siècle) 32

Voir lexique. Dénominations données par Luís Seco de Lucena Paredes dans « La Granada Nazarí del siglo XV », 1975 33 Traduction de l’Espagnol de : Luis Marmol Carjaval, Historia del rebelión y castigo de los moriscos del Reino de Granada, XVIe siècle, sur http://www.cervantesvirtual.com/obra/historia-del-sic-

65

Le dessin des rues musulmanes est opposé à celui, plus systématique, des Romains et des cités médiévales de l’Europe contemporaine.

Gutkind 34 oppose la planification intentionnelle et le besoin d’une circulation facile des villes occidentales avec la croissance naturelle des villes musulmanes et leur besoin d’un accès piéton à leur logement, manifesté par les darb.

ILLUSTRATION 3.14

rebelion-y-castigo-de-los-moriscos-del-reino-de-granada--0/. On cite aussi Jeronimo Münzer qui dira en 1494 : « The streets are so intimate and narrows that the majority of the houses touched one other with their upper parts and a donkey could not pass another donkey nor could, in the more important streets which were perhaps four or five codos (a yard) wide, a knight on horseback pass another one. » Viajes de Extranjeros por España y Portugal, Aguilar, Madrid, 1952 34 Gutkind, Erwin Anton, International History of City developement, Urban developement in Southern Europe : Spain & Portugal, Vol III, 1964

66

4.

VERS LE DEMANTELEMENT DU PARCELLAIRE ET SA RECONSTRUCTION

Le processus de croissance urbaine implique la fragmentation des espaces habités depuis le XIe et le XIIe siècle, c’est-à-dire la compartimentation en plus petites unités des maisons existantes et des constructions nouvelles. La muraille de la zone basse de la ville impose une rigidité qui motive ce processus d’extension, dû à l’augmentation de la pression urbaine intramuros, obligeant les habitants à compartimenter les structures antérieures ou à les remodeler jusqu’à les adapter à la croissance de la famille, afin d’héberger plus de monde.

Le parcellaire n’est pas vraiment défini : les volumes construits ne sont pas toujours divisés de manière visible, et il n’est pas rare que plusieurs volumes se chevauchent et s’entremêlent. Ils donnent des accès différents aux propriétés ou mettent en liaison diverses unités résidentielles.

Les exemples d’architecture domestique du XVe siècle (ILLUSTRATION 3.15 : maison nasride des Zafra, XIVe siècle) montrent une grande maturité dans les typologies utilisées. La maison arabe médiévale est un lieu strictement privé, réservé à la famille. De la rue, on y accède toujours par une impasse étroite qui conduit à la porte, située sur un coté latéral, ce qui lui donne déjà un avant-gout d’intimité. Une fois l’accès franchi, on débouche sur un petit vestibule pavé en briques, par lequel on accède aux latrines et à l’escalier qui conduit à l’étage. Les façades à rue sont aveugles ou munies d’ouvertures extérieures masquées par des moucharabiehs en encorbellement : toutes les ouvertures donnent sur le patio central, auquel on accède par un passage coudé depuis le vestibule.

Le patio, de plan carré ou rectangulaire, est muni en son centre d’un bassin de petite dimension, le plus souvent relié à une entrée et à une sortie d’eau. Bien qu’il soit déjà utilisé avant la naissance de l’islam, le patio a une signification particulière dans la maison musulmane. Il est le reflet de l’intimité et de la ségrégation de la femme, et le centre fonctionnel et symbolique de la maison. Sa taille et sa structure varient selon le statut social de ses habitants.

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Si la maison est grande, ce dernier est entouré de couloirs latéraux sur ses quatre cotés, sinon, il forme avec ces couloirs un plan en L ou en U. Les plus petits cotés ont des portiques par lesquels on accède aux salles principales de la maison, comme la cuisine. À l’intérieur, on note l’absence de meubles et d’objets. Le sol et les murs sont recouverts de tapis et de coussins. L’habitat est considéré comme un « espace neutre indifférencié qui peut donc remplir des fonctions multiples, au gré des saisons, de la nécessité ou seulement du caprice. »35 La nouvelle typologie domestique, plus haute et plus étroite, vient répondre à la demande de la croissance urbaine constante.

ILLUSTRATION 3.15

35

NADJM OUD-DINE Bammate, Cités d’Islam, 1987

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69

LA RECONQUISTA La récupération de l’espace public

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71

La connivence pacifique (1492-1499) 1.

L’INSTAURATION DE PILIERS POLITICO-JURIDIQUES OCCIDENTAUX

Après une guerre de dix ans, le sultan Boabdil signe un pacte de capitulation et remet la ville aux mains des Rois Catholique le 2 janvier 1492, mettant fin à 781 ans de domination musulmane.

Les propriétés des seigneurs musulmans sont réparties entre les immigrants chrétiens attirés par les exemptions fiscales. Les habitants sont priés d’honorer le pacte qui invite à respecter les propriétés des habitants autochtones : « […] et en tout temps pour toujours à jamais, sans qu’il ne leur soit fait aucun mal ni douleur, ni aucun dommage contre demande de justice, et qu’il ne leur soit pris aucun de leurs biens ; ils seront bien traités devant vos altesses et vos gens vertueux comme vos serviteurs ou vos vassaux »36. (Carta de privilegio real : Capitulaciones de Granada) L’expulsion des juifs d’Espagne la même année fait perdre au pays plus d’un million de ses citoyens les plus riches et les plus érudits. Les souverains catholiques, Fernand et Isabelle, encouragent l’industrie de la laine et du mouton, ainsi que le commerce mais délaissent l’agriculture, ressource pourtant inépuisable de la Vega de Grenade. Ils entreprennent de grandes modifications de la ville, qui transformeront complètement la Médina.

La principale préoccupation des Rois Catholique entre 1492 et 1495 consiste à consolider et à reconstruire les systèmes défensifs de la ville, et inclure la construction de nouvelles fortifications dans les zones les moins protégées.

Politiquement, le dernier règne islamique disparait définitivement de la péninsule ibérique, mais culturellement et structurellement, la civilisation islamique tarde à disparaître. Durant les premières années suivant la reconquête, la population musulmane de Grenade maintient ses us et 36

Carta de privilegio real : Capitulaciones de Granada apud. GARRIDO ATIENZA, dans JEREZ MIR Carlos, Guia de Arquitectura de Granada, Comares, Granada

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coutumes grâce aux accords avantageux rédigés dans le traité de capitulation. Celui-ci leur accorde le statut de mudéjars et stipule qu’ils ont le droit de conserver leur législation et leur religion. Les Rois Catholiques veulent aussi s’assurer que tous les habitants, catholiques ou non, payent l’impôt.

Il se produit alors un processus de culturation pacifique, pris en charge par le premier archevêque de Grenade, Don Hernando de Talavera.

Des facilités sont mises en place pour permettre aux musulmans qui voudraient s’établir en Afrique du Nord, de quitter Grenade. Mais la plus grande partie de la population reste en ville et dans les villages de la Vega, faute de moyens, et seules les familles les plus aisées optent pour la sortie du Royaume. Les musulmans restés à Grenade se regroupent dans les différents quartiers de l’Albaycin, dans lequel la population s’est réduite de manière considérable.

La connivence pacifique entre maures et chrétiens s’achève à la fin du XVe siècle avec le soulèvement de l’Albaycin, le 18 décembre 1499, dû à l’implantation d’une politique radicale de conversion par le Cardinal Cisneros, rompant ainsi avec le Traité de 1492. Un changement de politique se produit alors et la permissivité avec laquelle cohabitaient les deux religions se transforme en une conversion forcée au catholicisme.

Dès ce jour, les anciens nasrides sont appelés nouveaux chrétiens ou morisques, et, bien qu’ils soient officiellement convertis à la foi chrétienne, dans leur intimité ils continuent à croire et à pratiquer l’Islam.

Les mosquées deviennent donc superflues et sont converties en églises, ou simplement détruites. Ces bouleversements religieux vont aussi profondément affecter l’architecture de la ville de Grenade.

Dès le XVe siècle, deux grands programmes de modifications urbaines sont mis en places. D’une part, les programmes promus par la Couronne, qui consistent à mettre en adéquation l’espace urbain avec les exigences représentatives du cérémonial religieux (et impérial sous Charles-Quint). D’autre part, les programmes développés par le gouvernement local (Conseil municipal et autres institutions civiles) : la modification des alignements, des infrastructures, des places, des réglementations de la construction et des modes de financement.

73

2.

LA RATIONALISATION DU SYSTEME DE VOIERIE

Depuis 1492, les régisseurs de Grenade s’organisent pour détruire systématiquement des entrepôts et des remises. Pour aménager une place ou élargir une rue, ils n’hésitent pas à faire tomber un grand nombre de maisons musulmanes si bien qu’en 1499, les propriétaires des maisons voisines menacent les Rois Catholiques, « s’il résulte des dommages chez les voisins par la destruction de leurs propres maisons en voulant agrandir les rues. » 37 La rationalisation du système de voierie entraine la perte de l’identité urbaine. Les interventions consistent principalement à organiser des nouveaux alignements et à élargir les rues. La Calle Elvira est élargie au XVIe siècle afin de relier la Puerta Elvira avec la nouvelle Plaza de San Gil, importante connexion entre la Médina et les faubourgs de l’autre côté du Darro.

37

Selon Francisco de Paula Valladar dans Gallego Roca, Mezquita de Halabin e Iglesia de San Gil, Centro de estudios historicos de Granada, Granada, 1991. Traduction de l’espagnol

74

3.

NOUVELLE VISION DE L’ESPACE : Vers la structuration de la ville moderne

Les programmes instaurés par les Rois Catholiques et les pouvoirs publics sont inscrits dans un processus de transformation bien plus étendu, d’après Bernard Vincent, hispaniste français, le choc des cultures, conflit entre une population autochtone et une organisation politique de cour occidental38.

Le processus de christianisation consiste en l’adoption d’un ensemble de mesures, renforcées au fil du temps, qui se finalisera par l’expulsion des maures en 1570. Le processus commence par la création d’un réseau paroissial et la fondation de nombreux couvents, qui auront une influence décisive sur l’urbanisme et la configuration du paysage urbain.

Petit à petit, les lieux du culte musulman sont détruits ou convertis en églises.

Dès 1498 commence un isolement progressif de la communauté musulmane, qui passe, non seulement, par la construction de nouvelles infrastructures réservées uniquement à l’utilisation des chrétiens mais aussi par de nombreuses interdictions. « Qu’aucun chrétien ni chrétienne ne vendent du vin aux maures, ne mangent des oiseaux tués par eux, ne se baignent dans leurs bains »39. Un vrai régime de ségrégation se met en place. En 1501 est instauré un programme complet de contrôle de la communauté musulmane. Des paroisses sont créées dans toute la ville, éléments de contrôle efficaces sur toute la population non-chrétienne.

En 1502, les musulmans non convertis de la ville sont expulsés. À la christianisation de la ville se superpose sa castillanisation. Le processus de castillanisation se construit autour de 3 axes majeurs40 : Premièrement, la création d’un gouvernement politique local qui dirige, contrôle et régule à travers une organisation administrative. Ainsi, le 38

Selon Bernard Vincent dans Jerez Mir Carlos, Guía de arquitectura de Granada, Comares, Granada, 2003. Traduction de l’Espagnol 39 Anonyme dans Sanchez Acale Fernando, Plazas y paseos de Granada, de la remodelación cristiana de los espacios musulmanes a los proyectos de jardines en el siglo XVIII, Universidad de Granada, Granada, 2005. Traduction de l’espagnol 40 Selon Jerez Mir Carlos, Guía de arquitectura de Granada, Comares, Granada, 2003. Traduction de l’Espagnol

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tracé de la ville est modifié pour s’adapter aux usages, aux conventions sociales et aux aspects de la ville castillane. La structure traditionnelle est changée pour s’adapter aux nouvelles relations sociales et productives.

De plus, la définition d’une nouvelle trame institutionnelle avec des grandes compétences juridictionnelles, la Chancellerie et la Capitainerie, apporte une réorganisation du tissu territorial.

Deuxièmement, Les institutions gouvernementales locales (le conseil de la ville) contrôlent et supervisent le programme de rénovation à travers les régulations de la ville, avec des fonds transférés par Charles-Quint de l’impôt d’Hagüela.

Troisièmement, la systématisation de la morphologie urbaine comporte une série d’actuations sur la voierie, élargissements, modifications de l’alignement, créations de rues royales, ouvertures des places, et la régulation des divers bâtiments qui empiètent sur la voie publique.

L’Intervention sur la structure urbaine entraine la concentration des édifices par zones et la suppression des magasins laissés au hasard. La ségrégation spatiale de la population pour des motifs ethniques et politiques est avec la démarcation de quartiers maures, les morerias en espagnol, dès 1498.

76

77

L’Albaycin au XVIe siècle La ville maintient son importance acquise à l’époque musulmane : elle se convertit en archevêché et la chancellerie royale y est établie en 1505.

L’empereur Charles-Quint crée son université à Grenade en 1526 et installe sa Cour à l’Alhambra. Face à l’arrivée de la Renaissance, puis du Baroque, Grenade commence à perdre ses racines arabes. Le processus de christianisation, initié à la fin du XV siècle, se poursuit et donne lieu, entre autres, au brulage de corans, Plaza Bibarrambla et à l’implantation des premières paroisses, comme organismes d’endoctrinement et de contrôle de l’orthodoxie religieuse. L’Albaycin, au XVIe siècle, devient l’ultime noyau morisque. Les premières transformations du quartier apparaissent.

1.

ELARGISSEMENT DES VOIES ET ESPACES PUBLICS

« La trame urbaine de Grenade se trouve parsemée d’espaces libres, fruits de la superposition des différents tissus qui forment la ville.

L’installation musulmane sur la colline de l’Albaycin a créé de nombreux espaces transitoires qui étaient plus que de simples lieux de circulation : des espaces imprévisibles, non planifiés. L’évolution de la ville du XVe au XIXe passe par la transformation nécessaire du concept de l’espace public, consolidant les nouveaux espaces et créant de nouveaux lieux de divertissement comme des lieux de promenades et des jardins, éléments de connexion entre la ville et la campagne. » (SANCHEZ ACALE F, Las plazas de la ciudad cristana, 2005)41 La période comprise entre l’arrivée des Rois Catholiques à Grenade jusqu’au milieu du XVIe est un moment de changements et de 41 Sanchez Acale Fernando, Plazas y paseos de Granada, de la remodelación cristiana de los espacios musulmanes a los proyectos de jardines en el siglo XVIII, Universidad de Granada, Granada, 2005.

Traduction de l’espagnol

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transformations pour le trafic public dont soufre la ville. La nouvelle présence chrétienne implique la modification de l’intérieur de la ville dans son entièreté et de la manière de la vivre, de la société et de ses coutumes, tout cela accompagné par l’appropriation symbolique de l’espace urbain et par l’implantation de coutumes qui finiront par modifier la trame de la ville musulmane.

La conquête castillane affecte ce qui avaient été jusque là les voies d’accès principales, avec le démantèlement du pan ouest de la muraille de l’Alcazaba Qadima. Ces travaux facilitent ainsi le passage vers San Miguel Bajo, jusque là possible seulement à travers la Puerta Monaita ou à travers la Puerta del Leon. Cette dernière disparaît à cette époque. Les zones de forte pente sont aplanies et commencent à être édifiées, par exemple l’Hopital de los peregrinos ou le couvent de San Antonio.

La Grenade castillane introduit dans la ville le concept de place programmée, opposé à l’urbanisme aléatoire musulman, provocant la transformation rapide du tissu urbain. On voit l’apparition de l’esplanade del Triumfo, de la plaza Nueva, du paseo de los Tristes, par exemple, et l’élargissement des places de San Gil et, de la Plaza Larga, … Ces nouvelles places ont le même dénominateur commun : ampleur et régularité. On cherche des espaces clairs et flexibles.

La construction de la Plaza Nueva (ILLUSTRATION 4.1), au XVIe siècle, nœud articulateur entre l’Albaycin, l’ancienne Médina et la colline de l’Alhambra, est située à côté de la nouvelle Plaza de San Gil. Frenando Sanchez Acale dit de la Plaza Nueva qu’elle est « érigée pour répondre à la nécessité d’équiper la ville d’espaces publics ouverts qui répondront mieux aux nouveaux idéaux spatiaux et idéologiques : une rupture est créée par rapport à la compacité et l’organisation de la structure urbaine musulmane.

De plus, la ville a besoin d’un espace de cérémonie moderne, démonstration du nouveau pouvoir établi. »42 Malgré toutes ces transformations dans la ville, le poids de l’étape islamique se maintient en bonne partie dans le tissu urbain de l’Albaycin.

42

Sanchez Acale Fernando, Plazas y paseos de Granada, de la remodelación cristiana de los espacios musulmanes a los proyectos de jardines en el siglo XVIII, Universidad de Granada, Granada, 2005.

Traduction de l’espagnol

79

ILLUSTRATION 4.1 80

2.

IMPLANTATION DE PAROISSE ET CREATION DE MONASTERES

Les quartiers de la ville de Grenade sont organisés en paroisse.

Concrètement, l’Albaycin reste à l’intérieur de la démarcation juridique de la paroisse de San Miguel Bajo.

En général, les Chrétiens conservent les mosquées et les transforment en lieu de culte chrétien. La fonction de minaret est substituée par celle du clocher, comme à l’Eglise de San Jose, ancienne mosquée des ermites, ou seul le minaret a été conservé et intégré au plan du nouvel édifice chrétien.

Pour la nouvelle église de San Gil (ILLUSTRATION 4.2), anciennement mosquée del Hatabin (ILLUSTRATION 4.3), on passe par la suppression des ruelles le long de la mosquée, tout en gardant leur emplacement initial, car elles sont trop étroites et ne correspondent pas à l’idéal de la ville castillane. « Ce genre d'opérations, dans cette partie de la ville, marque d’une manière particulière un type d’intervention qui va se propager dans l’urbanisme de Grenade et que nous allons tenter de définir comme un urbanisme caractérisé par l’agrégation de structures à petite échelle. Ces agrégations sont motivées principalement par la nécessité d’élargir les rues et d’agrandir les maisons »43. (GALLEGO ROCA, Mesquita de Halabin e Iglesia de San Gil, 1991) C’est à cette époque que la zone en dehors des murailles musulmanes commence à être peuplée avec l’apparition de nouvelles paroisses comme celle de San Ildefonso.

43

GALLEGO ROCA, Mezquita de Halabin e Iglesia de San Gil, Centro de estudios historicos de Granada, Granada, 1991

81

82

ILLUSTRATION 4.3

ILLUSTRATION 4.2

La ville concède aux nouveaux monastères et couvents de grands espaces à l’intérieur de l’antique trame urbaine nasride. L’installation des premiers ordres religieux dans le quartier donne lieu à la création de nouvelles constructions ou à l’adaptation des manufactures existantes pour les accommoder aux fonctions monacales. Les fondations des couvents sont précédées d’un processus de concentration et de réhabilitation des parcelles urbaines. On assiste à l’acquisition d’un ou plusieurs ilots de maisons nasrides qui sont démolies et au remplissage des terrains d’un ou deux mètres de terre dans le but de créer des zones de potagers annexes.

Par exemple, on découvre en dessous de l’Antiguo mercado de San Agustin (1513), l’ancienne trame nasride, et avec elle le processus d’amortissement du terrain qui a servi à la construction du couvent.

Celui-ci utilise les espaces utiles de l’ancien tracé : certaines des pièces destinées au stockage des marchandises, une partie des bains de Abu-l‘Asi et le bassin qui appartenait à une maison nasride. La structure du couvent ne s’adapte pas seulement à l’urbanisme préexistant, il le transforme aussi en fonction de ses besoins.

Les Couvents de San Agustin (1513), Sancti Spiritu (1520), Santa Paula (1er quart du XVIe), de San Francisco de l’Alhambra, de San Francisco Casa Grande, de Santa Cruz la Real, de San Jeronimo, de la Merced Calzada, de Santa Isabel la Real (1507), sont tous le fruit du processus de la christianisation qui touche Grenade dès 1492.

Après la conversion forcée des musulmans, les mosquées ne sont pas les seuls lieux de cultes cessent d’avoir du sens. Avec la conversion des maures au catholicisme, les anciens rites funéraires sont abandonnés et, à partir de 1511, on observe la disparition des nécropoles islamiques du paysage urbain. Par exemple, sur le site du maqbarat Sahl Ben Malik, à l’extérieur de la Puerta Elvira, sont édifiés l’Esplanade du Triomphe et l’hôpital royal.

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3.

ETABLISSEMENT DES RESIDENCES SEIGNEURIALES

Il existe certaines différences quant à la structure et à la planification de la maison morisque et chrétienne. En effet, la dualité de la société de Grenade au XVIe siècle s’observe aussi dans l’architecture domestique.

Certaines maisons gardent une structure essentiellement islamique, et ce spécialement dans l’Albaycin. En effet, le long du XVe siècle, l’Albaycin est principalement peuplé de morisques, à l’exception de la zone basse.

Ces maisons maintiennent le schéma nasride de la maison avec des incorporations décoratives plus typiques du XVe et XVIe siècle, comme la casa del Horno de Oro. (ILLUSTRATION 4.4) Au XVe siècle, l’Albaycin est quasi exclusivement occupée par des morisques

La partie basse de l’Albaycin est réhabilitée pour accueillir les nobles Chrétiens qui s’installent sur les rives du Darro.

D’autres maisons sont réhabilitées selon des coutumes castillanes plus traditionnelles. Une des premières réformes consiste en l’ouverture d’une nouvelle porte d’entrée qui donne accès directement sur la rue.

La construction des nouvelles maisons chrétienne est, elle, précédée, comme vu précédemment, d’un nettoyage du sol qui permet la configuration d’un nouveau plan.

Le XVIe siècle est aussi l’époque de la construction des premières grandes infrastructures publiques exclusivement castillanes, symboles du 84

nouveau pouvoir mis en place. Cette architecture civile est située à des endroits stratégiques de la ville, dans des lieux centraux ou périphériques, en vue d’instaurer un nouvel ordre social. L’Hôpital royal commence sa construction en 1511, à côté de la Puerta Elvira, le Palais de Charles Quint en 1527, sur le site de l’Alhambra, la Chancellerie royale en 1531 sur la Plaza Nueva.

ILLUSTRATION 4.4

85

L’EXPULSION DEFINITIVE DES MORISQUES (1568-1608) Les tensions entre les catholiques et les musulmans se multiplient et aboutissent à la révolte des Alpujarras de 1568-1570. Dans les années qui suivent, tous les biens des maures sont séquestrés et ils sont déportés massivement dans différentes zones d’Andalousie, d’Extremadura et de Castille.

Le quartier de l’Albaycin est pratiquement dépeuplé. La couronne tente alors d’implanter une politique de repopulation qui est un désastre total, car les colons refusent de vivre sur la colline. Les catastrophes naturelles accentuent le processus de ruine urbaine qui englobe toute la colline excepté la zone de la rive droite du Darro qui est occupée par les nobles chrétiens.

Malgré de nombreuses persécutions et discriminations, les musulmans convertis ou morisques continuent de pratiquer leurs coutumes. Ils sont expulsés définitivement de la Péninsule Ibérique en 1609, sous le règne de Felipe III. A partir la prise de la ville en 1492 et du soulèvement morisque qui s’ensuit, on observe donc un changement complet, à tous les niveaux de la vie publique et privée, de la configuration spatiale de la ville,

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ILLUSTRATION 4.5 PLATAFORMA DE AMBROSIO DE VICO, XVIE SIECLE

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LA REFORME BOURGEOISE Les éléments essentiels du changement

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Le Siècle d’Or laisse aussi son empreinte sur Grenade, en conférant à la ville une intense activité artistique baroque. Une multitude d’édifices nouveaux surgissent dans la ville, comme si elle savait qu’il était temps de rompre avec les splendeurs du passé.

Au XVIIe siècle, l’Albaycin vit un état d’abandon et de ruine, y subsiste seulement une population minime dédiée en plus grande partie à l’agriculture et à quelques activités traditionnelles.

L’évolution ralentie de la population depuis le début du XVIe siècle montre les conséquences de la crise démographique qui résulte de l’expulsion des juifs et des morisques. A partir de ce moment là, une lente récupération de la population commence. C’est seulement au XVIIIe siècle que la ville récupère le niveau de population qu’elle a eue trois siècles plutôt, avec plus de 75000 habitants, mais la croissance de la ville se paralyse à nouveau, suite à l’occupation française en Espagne.

Durant les XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, la structure sociale et les activités économiques qui se développent dans la ville se caractérisent par la perte d’importance des manufactures, par le maintien de la base paysanne dans l’économie et surtout par l’influence toujours plus grande des institutions administratives, comme la Capitainerie générale, l’Archevêché, la Chancellerie et l’Université.

Au XIXe siècle, Grenade acquiert le statut de ville romantique, grâce à ses nombreux monuments à l’état de ruine. L’évolution de la population est lente et irrégulière. La ville, dont l’économie se base sur l’agriculture, passe à côté de l’industrialisation moderne. (ILLUSTRATION 5.1) Dans ces conditions, la formation et le développement de la ville bourgeoise ne trouve pas de bases solides pour réaliser de grands projets d’élargissement, mais l’on peut voir aujourd’hui dans la ville les transformations qui ont affecté le parcellaire et le paysage urbain des espaces publics et privés. On voit l’apparition de nouveaux espaces publics dans la trame médiévale, surtout des jardins et des places, la construction d’édifices publics destinés à répondre aux nouvelles réglementations d’hygiène et la réutilisation à usage privé d’antiques édifices de propriété religieuse.

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C’est en 1836 que commencent les premier grands projets urbains, avec le rétablissement des communes et le désamortissement ecclésiastique, donnant origine à un processus urbain caractérisé par les démolitions, la décentralisation et les alignements, qui ont favorisé la spongiosité de la ville et la création de nouvelles places, (plaza de la Trinidad, del Carmen, …) sur la trame dense des rues.44 Jusqu’à la fin du XIXe siècle, différentes révoltes continuent la destruction du patrimoine de Grenade. Durant la Guerre Civile, Grenade ne souffre pas de grands dommages patrimoniaux.

Le voutement du Darro (ILLUSTRATION 5.2) entre 1854 et 1880 est l’un des éléments architectoniques le plus significatif de la ville bourgeoise. La Gran Via de Colon est construite entre 1895 et 1903 et est l’une des plus grades entreprises urbanistiques du début du XXe siècle, qui facilite la liaison entre les nouveaux quartiers et l’ancienne Médina.

L’évolution architecturale de la ville depuis le XVIe siècle jusqu’au XIXe passe par la transformation nécessaire du concept d’espace public, consolidant les espaces insérés dans la trame urbaine dès les premiers moments de l’occupation chrétienne et, ce qui est le plus important, créant de nouveau lieux de détente, comme des paseos et des jardins, qui de cette manière restent intégrés dans la trame urbaine, comme éléments de connexion entre la ville et la campagne.

ILLUSTRATION 5.2

44

Source : Commune de Grenade. Centro Historico de la ciudad historica, Granada, Patrimonio Municipal et Fundacion Albaycin, http://www.documentaciongranada.org/

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ILLUSTRATION 5.1

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VERS UN NOUVEL ALBAYCIN En guise de conclusion

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La croissance urbaine de Grenade au XXe siècle provoque un élargissement de la ville sans précédent mais n’a cependant pas de répercussions sur le quartier de l’Albaycin. Il cesse d’être peu à peu une ville à l’intérieur de Grenade, pour progressivement se convertir en un quartier résidentiel, avec ses carmens qui englobent plusieurs parcelles et transforme les anciennes maisons voisines en luxueuses résidences. Dans la partie basse de l’Albaycin, on observe la conversion de grandes parcelles, jusqu’à des ilots, en appartements résidentiels. Dans tous les cas, ces changements supposent des modifications substantielles dans le système d’infrastructure (alimentation en eau, nouveau réseau d’assainissement, câbles électriques et téléphoniques, construction de caves, rues adaptées à la nouvelle configuration du quartier et à la croissance de la population, l’implantation de piscines dans les zones vertes, création de plus grands espaces verts et instauration de parkings publics) et un changement énorme dans l’aspect du quartier !

A partir de 1929, Grenade est déclarée « Ciudad Artistica », ville artistique, par le gouvernement espagnol. Cette nomination n’aura aucun impact sur la protection de son patrimoine. En 1951, l’Alhambra et l’Albaycin sont considérées comme « zones » historiques et artistiques. Mais malgré tous ces efforts pour une protection plus assidue des vestiges historiques, les intérêts spéculatifs finissent par s’imposer.

Avec le nouveau modèle urbain, les édifices sont construits pour le marché immobilier naissant et non plus à la demande des propriétaires même. Les rues s’élargissent et s’alignent pour servir le trafic de personnes et de marchandises jusqu’au nouveau centre urbain.

Les premières intentions de récupérer et protéger le centre historique ont lieu dans les années 70. Pour faire face à de graves menaces du patrimoine urbain, se créent des mouvements d’opposition de la part des citoyens face à certaines propositions de projet qui implique la destruction d’éléments historiques. Grâce à ces mouvements, la commune de Grenade se charge en 1972 de l’établissement d’un plan spécial pour l’Albaycin qui n’est pas approuvés face aux pressions des promoteurs immobiliers. A la place se réalisent de nombreuses transformations très critiquées qui vont jusqu’à ne pas respecter les vestiges archéologiques.

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En 1985, se produisent deux faits importants : la promulgation de l’Alhambra, du Généralife et de l’Albaycin comme patrimoine mondial et historique espagnol ainsi que l’approbation du plan général d’agencement urbain de Grenade, le PGOU - 85. Ce plan incorpore pour la première fois des normes de protection du patrimoine architectonique lié à la rédaction d’un important catalogue d’édifices des noyaux urbains et l’établissement de plans de récupération et de réhabilitation des différents quartiers du centre historique de la ville.45 L’Albaycin a, depuis 1990, une planification spéciale en vigueur. Les difficultés ont été nombreuses pour accomplir et développer cette planification mais elle est aujourd’hui en cours grâce à la création de divers organismes comme la Fundacion Albaycin-Granada.46 Il projette, par exemple, la restauration de la muraille ziride, de nombreuses fouilles archéologiques, la réhabilitation du monastère de Santa Isabel la Real, du Jardin du mirador San Nicolas, …

Grenade est une ville moderne qui a su conjuguer la conservation du riche patrimoine historique et artistique de l’Albaycin avec l’intégration de différentes cultures, principalement grâce à sa proximité historique et géographique avec le monde islamique.

Il nous est permis d’espérer que la récupération et la réhabilitation du centre historique de Grenade permettra aux générations futures d’admirer le compromis urbanistique et architectural qui s’est développé dans l’Albaycin entre les civilisations musulmanes et castillanes

45 46

Source : Angel Isac, Historia Urbana de Granada - Fundacion Albaycin de Granada, Ayuntamiento de Granada, http://www.albaicin-granada.com/

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ILLUSTRATION 6.1

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ILLUSTRATION 6.2

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GLOSSAIRE Al-Andalus Alarbeas Alcazar Alcazaba Alcaiceria Alfiz Aljibe Alqueria Arabes Arc outrepassé en plein cintre Arrabale

Terres sous domination musulmane au Moyen-Age, dans la péninsule ibérique et la Septimanie Petits vides généralement de plan carré, dont les édifices adjacents étaient occupés par des commerces d’un même marché. (Seco de Lucena) De l’arabe, qsar. Palais fortifié d’usage militaire et d’agrément De l’arabe, kasbah, château. Citadelle, forteresse, peut être considéré comme un synonyme de médina Marché de la soie De l’arabe, hayyiz. Ornementation qui consiste en un encadrement rectangulaire autour du linteau d’un arche ou d’une porte De l’arabe, gubb. Citerne d’eau potable De l’arabe, qaria. Hameau ou petite communauté rurale, en bordure de médina Groupes ethniques issus du Maghreb et du Moyen-Orient, généralement musulmans, ayant des liens généalogiques, linguistiques ou culturels Arc en fer à cheval. Forme d’arc la plus courante de l’architecture andalouse. On le voit déjà fréquemment dans l’architecture wisigothique d’Espagne Faubourg Bas quartier qui entoure la Médina, généralement fermé par une enceinte

Bâb

Porte, Pont, Seuil

Caravansérail

Fondouk Marché couvert, sorte d’habitat collectif où se pratique activités artisanales. En général, c’est un lieu fortifié dans marchands font halte et l’on y trouve des écuries pour les activités artisanales et commerciales et des chambres voyageurs.

A l’époque romaine, axe nord-sud structurant la ville Voie principale

Cardo

Dâr Dâr-al-wadu Darb

aussi des lequel les bêtes, des pour les

Maison Maison des ablutions Petit quartier ou association de quartiers qui en forment un seul Impasse ou rue fermée avec une porte

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Decumano

A l’époque romaine, axe ouest-est structurant la ville

Hagüela

Ancienne taxe musulmane utilisée pour payer les travaux d’ordre public, et qui continua d’être utilisée par la suite par Charles-Quint Bains musulmans Quartier

Hammam Hára Imam Impluvium

Chef spirituel de la communauté musulmane. Dans de petites communautés, il peut aussi être le chef politique Bassin situé au centre de l’atrium de la maison romaine, destiné à récolter les eaux de pluie

Khan

Dans le souk, vaste élément multifonctionnel, sorte d’hôtelentrepôt réservé au commerce de gros

Madrasa

École musulmane pour étudiants internes où l’on enseigne, entre autres, le droit islamique et l’étude du Coran Hôpital Pièce ouverte donnant sur un patio, cours intérieure.

Balcon surplombant une cours intérieure Du grec, Moros, sombre Au Moyen-Age, le terme est plutôt utilisé pour désigner les musulmans d’Espagne Ville. En Afrique du Nord et en Espagne, partie ancienne de la ville musulmane en opposition à son extension européenne.

Mosquée, lieu du culte musulman De l’arabe, masyi yami désigne la Grande Mosquée ou Mosquée du vendredi, l’édifice le plus important de la ville islamique. Tous les hommes adultes doivent s’y réunir pour la prière du vendredi midi Dans une mosquée, niche dans le mur qibla, souvent fort décorée, qui indique la direction de La Mecque, et vers laquelle les croyants font face lors de leur prière. C’est le muezzin, administrateur religieux, qui est en charge d’annoncer les cinq prières journalières du haut du minaret Plus haute tour de la mosquée, point élevé pour les appels à la prière, symbole de la cité Dans une mosquée, chaire à prêcher Musulman converti de force au catholicisme et resté en péninsule ibérique après la Reconquête Ecrans de lattes de bois faits de pièces de bois assemblées ensemble pour former une fenêtre grillagée Le moucharabieh permet de protéger des regards, spécialement les

Mâristân Maq’ad Maure Médina Mezquita Mezquita Aljama Mihrâb

Minaret Minbar Morisque Moucharabieh

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Mozarabe Muladi Mudéjar Muqarnas

femmes, et sa surface maillée améliore le passage du vent, créant ainsi une ventilation naturelle. Généralement, on associe le moucharabieh à une surface humide.

Chrétien sous la domination musulmane Chrétien converti à l’Islam sous la domination musulmane De l’arabe, mudajan, ‘ceux qui peuvent rester’. Terme appliqué aux musulmans restés en Andalousie devenus sujets du Royaume catholique d’Espagne.

Ornement en forme de stalactite dans les coupoles et voûtes musulmanes

Nadi

Coin qui servait de lieu de réunion pour les artisans et les ouvriers d’une même profession. (>Nadi al-Qattanim, algodoneros) >DOC6

Qadi Qibla

Juge musulman Dans une mosquée, mur qui désigne l’orientation de La Mecque Direction of Ka’ba towards which believers turn to face for prayer.

Wall of mosque in which the mihrab is situated >DOC33

Rasif

Rue en bord de rivière ou d’un bord escarpé, c’est-à-dire avec des maisons d’un seul côté (Riberilla)

Simat Souk

Rue bordée par un ou deux côtés d’ateliers de la même profession (Acera) De l’araba, sûq. Souk, marché au cœur de la Médina.

L’étymologie du mot renvoie à l’idée d’ensemble des rues, places et espaces publics

Tariq

Chemin. À Grenade, désigne une rue anonyme

Zanaqa Zuqaq

Rue importante, désignée par un nom propre Ruelle anonyme avec ou sans sortie

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INDEX DES DOCUMENTS GRAPHIQUES 1

LES ORIGINES

Illustration 1.1 – Reconstitution d’une maison Ibère selon Angel Rodriguez Aguilera, Granada y sus barrios : Granada Arqueológica, Comares, Granada, 2001

Illustration 1.2 – Restes du Forum romain de Iliberri, Carmen de la Concepcion, dessin de Gomez-Moreno, 1889 dans « 2.2. Catalogo Patrimonios especiales », Archives de la Commune de Grenade.

Illustration 1.3 – Elévation de l’Aljibe de San Miguel Bajo, Orihuela Uzal Antonio, Sanchez Carlos, Almagra Antonio, Granada, Map & Guide of The Andalusi Albayzin, Rugoma, Madrid

2

LE HAUT MOYEN AGE

3

LA VILLE MEDIEVALE

Zirides Illustration 3.1 – Emplacement de la Grande Mosquée, tire du plan de Ambrosio de Vico, Archives municipales de la commune de Grenade Illustration 3.2 – Plan de la Grande Mosquée de Grenade, selon le plan de José Sanchez et Sebastian Diaz, 1704 Illustration 3.3 – Plan et élévation du Minaret de l’église San José, Orihuela Uzal Antonio, Sanchez Carlos, Almagra Antonio, Granada, Map & Guide of The Andalusi Albayzin, Rugoma, Madrid Illustration 3.4 – Coupe dans la citerne de la Grande Mosquée, Bruno Alcaraz Masats, documentalista del Centro de Documentación Histórica de la U.E. como Investigador U.E. y miembro del Centro UNESCO de Andalucía, http://brunoalcaraz.blogspot.com/ Illustration 3.5 – Puerta de Hernan Roman, Granada Arqueologica : Superposition des fortifications zirides de Zawi ibn Zirí, construites à quelques années d’intervalle Illustration 3.6 – Plan et Elevation de la Puerta Monaita, Granada, Map & Guide of The Andalusi Albayzin, Rugoma, Madrid Illustration 3.7 – Plan et coupe du Bañuelo, Granada Orihuela Uzal Antonio, Sanchez Carlos, Almagra Antonio, Granada, Map & Guide of The Andalusi Albayzin, Rugoma, Madrid Nasrides Illustration 3.8 – Plan général de l’Alhambra, Monclus Oyon, Sanz Guardia, Granada, Córdoba, Sevilla – Guía, ETSAV, BCN, 1999 Illustration 3.9 – Plan de Grenade musulmane au XVe siècle, Seco de Lucena Paredes Luís, Planos de la Granada Arabe, 1910 Illustration 3.10 – Portes et murailles de la Grenade musulmane, Seco de Lucena Paredes Luís, La Granada Nazarí del siglo XV, 1975

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Illustration 3.11 – Plan de l’Alcaiceria de Grenade en période chrétienne (XVIe – XVIIIe), Jerez Mir Carlos, Guía de arquitectura de Granada, Comares, Granada Illustration 3.12 – L’Alhambra baja y alta, Gamiz Gordo Antonio, La Alhambra Nazarí, Apuntes sobre su paisaje y arquitectura Illustration 3.13 – Schéma basé sur le plan : Orihuela Uzal Antonio, Sanchez Carlos, Almagra Antonio, Granada, Map & Guide of The Andalusi Albayzin, Rugoma, Madrid Illustration 3.14 – Plan du réseau viaire de l’Albaycin au XVe siècle, basé sur la plan de la Grenade musulmane de Seco de Lucena Paredes Luís, Planos de la Granada Arabe, 1910 Illustration 3.15 – Plan et coupe de la maison nasride de Zafra, XIVe siècle, Martin Martin Eduardo, Granada, guía de arquitectura, 1998

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LA RECONQUISTA

Illustration 4.1 – Plan et projet de l’alignement de la Plaza Nueva de José Contreras, 1861, Archive Historique Municipal de la Commune de Grenade, dans Angel Isac, Historia Urbana de Granada Illustration 4.2 - Plan de l’église de San Gil, Gallego Roca, Mezquita de Halabin e Iglesia de San Gil, Centro de estudios historicos de Granada, Granada, 1991 Illustration 4.3 – Plan de la mosquée del Hatabin, Gallego Roca, Mezquita de Halabin e Iglesia de San Gil, Centro de estudios historicos de Granada, Granada, 1991 Illustration 4.4 - Plans et coupes de la Casa del Horno de Oro (XV-XVe siècle), Martin Martin Eduardo, Granada, guía de arquitectura, 1998 Illustration 4.5 – Plataforma de Ambrosio de Vico (1596-1614), premier plan précis de Grenade, Archives municipales de la commune de Grenade

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LA REFORME BOURGEOISE

Illustration 5.1 – Plan topographique de Francisco Martinez Palomino, 1845, Archives municipales de la Commune de Grenade Illustration 5.2 – Voutement du Darro, Archives municipales de la Commune de Grenade

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VERS UN NOUVEL ALBAYCIN

Illustration 6.1 – Croissance de la ville au XXe siècle, Angel Isac, Historia Urbana de Granada, Pages146-147 Illustration 6.2 – Zoom sur la muraille ziride actuelle de l’Albaycin, Granada Orihuela Uzal Antonio, Sanchez Carlos, Almagra Antonio, Granada, Map & Guide of The Andalusi Albayzin, Rugoma, Madrid

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Liste des sites souvent consultés sur Internet : - Centro Historico de la ciudad historica, Granada, Patrimonio Municipal et Fundacion Albaycin, http://www.documentaciongranada.org/ - Fundacion Albaycin de Granada, Ayuntamiento de Granada, http://www.albaicingranada.com/ - Ayuntamiento de Granada, http://www.granada.org/ - Escuela de Estudios Arabes, Consejo Superior de Investigationes Scientificas (CSIS), http://www.eea.csic.es/ - Bruno Alcaraz Masats, documentalista del Centro de Documentación Histórica de la U.E. como Investigador U.E. y miembro del Centro UNESCO de Andalucía, http://brunoalcaraz.blogspot.com/ - Luis Marmol Carjaval, Historia del rebelión y castigo de los moriscos del Reino de Granada, XVIe siècle, sur http://www.cervantesvirtual.com/obra/historia-del-sic-rebeliony-castigo-de-los-moriscos-del-reino-de-granada--0/ - Universidad de Granada, http://www.ugr.es/

Note : les documents procurés à la commune de Grenada contiennent les plans de nombreux édifices historiques, de l’époque musulmane à aujourd’hui. Ils contiennent également les catalogues des édifices, jardins et mobiliers urbains des différents quartiers de Grenade, complétés par une description historique et évolutive.

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