faire le Gilles

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Photo : Jean-Michel frodon

Faire le Gilles

Textes de Gilles Deleuze mise en scène: Robert Cantarella conception musicale : Alexandre Meyer Lumières : Yves Godin collaboration artistique : Julien Fišera, Maël Guesdon, Production : Constance de Corbière Et la participation d’un chœur amateur Durée : environ 4 heures Contact :

R&C Constance de Corbière Constance2corbiere@hotmail.com +336 68 13 26 19


Faire le Gilles Depuis plusieurs années, Robert Cantarella fait le Gilles, c’est-à-dire qu’il refait les cours de Deleuze avec un système d’oreillettes. Il répète mot pour mot les cours que le philosophe a donnés pendant plusieurs années à Vincennes et à Paris 8. Toutes les intonations, les hésitations, les toux et la pensée qui avance sont redites à l’identique. Après avoir passé un an sur Spinoza avec Deleuze, un an et demi l’année 1981 sur Image/mouvement, Robert Cantarella a choisi de monter dans une forme complète de 4 heures, l’intégralité du cours de 1980 sur l’anti-oedipe et autres réflexions . Pour cela il sera accompagné par Alexandre Meyer qui travaillera dans chaque ville d’accueil avec un chœur amateur. Yves Godin imaginera les lumières.

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Bon. Etre digne de ce qui nous arrive, c’est une idée très curieuse, ou c’est un vécu très très curieux. C’est-à-dire ne rien médiocriser, quoi. Il y a des gens qui médiocrisent la mort. Il y a des gens qui médiocrisent leur propre maladie, pourtant ils ont des maladies. Je sais pas, oui, ils ont des maladies événements. Ben, il y a des gens qui rendent tout sale.., comme le type qui écrit "suicidez vous". Voilà une formule de médiocrité fondamentale. C’est pas quelqu’un qui a un rapport avec la mort.., absolument pas. Les gens qui ont un rapport avec la mort, ils ont au contraire un culte de la vie.... qui est autre chose et ils ne font pas les petits cons comme ça. Alors, bon, comprennez ? C’est ça être digne de ce qui arrive, c’est dégager dans l’événement qui s’effectue en moi ou que j’effectue, c’est dégager la part de l’ineffectuable. Gilles Deleuze, fin du dernier cours à la faculté expérimentale de Vincennes Juin 1980


Deleuze, une expérience par la voix : Passer par la voix est un des accès aux sens et à la sensualité, incarnés de façon provisoire, passagère, pendant la durée réelle d’un échange de cours. La théâtralité est réduite à son minimum. Je suis assis, des oreillettes de petits formats me font entendre la voix de Deleuze, je redis ce que j’entends au plus près de la voix d’origine, en refaisant les inflexions, les suspens, et les interventions. Chaque cours est de plus de deux heures. J’ai d’abord écouté, puis j’ai voulu le faire passer par un corps, le mien, pour repérer les effets physiques d’une copie sonore. Gille Deleuze, lui-même construit sa séance à partir d’un cours préparé et improvise au contact des étudiants. Le rythme, la fréquence, le battement des idées en train de constituer par la voix s’entend, et se ressent. Je ne copie pas les attitudes ou bien une manière d’être, au contraire le texte traverse le passeur qui le retransmet avec la réalité de son corps et du grain de sa voix, dans une proximité qui, elle, peut rappeler les regroupements des cours d’origine. Je n’ai pas assisté à ces cours. J’ai, comme beaucoup, découvert d’abord l’écriture, puis la voix de Deleuze, dans ce sens-là. La voix, comme moyen de transport m’a souvent facilité la compréhension, je dirai justement la sensation d’une idée, et surtout du chemin de son développement. C’est en jouant avec sa voix que peu à peu je me suis pris à le dire, puis à en faire une copie exhaustive. Mon métier de théâtre me fait souvent dire à un acteur « dis un peu pour voir » et particulièrement quand le sens paraît bouchonner. J’ai pensé aux exercices de copie si habituels en peinture, et j’ai entamé des ateliers de copie sonore. La pratique, comme en peinture, est jubilatoire pour celui qui fait, et pour celui qui reçoit. Robert Cantarella


REVUE DE PRESSE Du 4 avril 2011 à juillet 2012, Robert Cantarella investit la Ménagerie de Verre tous les premiers lundis du mois à 18 heures. Pendant plus d’un an il refait le séminaire de Gilles Deleuze de 1981 sur l’image/mouvement. Il copie vocalement la voix de Gilles Deleuze en répétant le texte des cours en intégralité. Passer par un autre corps pour percevoir la jubilation d’une pensée à haute voix. Revue ETUDES : octobre 2011 Robert Cantarella fait le Gilles Le metteur en scène Robert Cantarella propose une performance intéressante et décalée, dans un lieu de création contemporaine tout à fait passionnant, la Ménagerie de verre, dans le 11e arrondissement de Paris. Le projet vise à refaire le séminaire sur le cinéma que Deleuze donna à l’Université de Vincennes en 1981 (et qui donna ensuite la fameuse publication aux Éditions de Minuit de deux livres célèbres : L’image-­temps et L’image-­mouvement)1. Le titre donne une idée de ce qui se passe devant les spectateurs qui deviennent eux-­‐mêmes de facto des étudiants tour à tour attentifs, fascinés et parfois aussi fatigués par la densité du propos. Si Cantarella « fait le Gilles » en effet, il n’en propose pas un pastiche pour autant, à tel point qu’il est difficile de définir cet objet théâtral qui propose un détournement pour ainsi dire de la voix de Deleuze, une sorte de « déterritorialisation » de sa parole, pour reprendre un des concepts les plus dynamiques de sa philosophie. Car Cantarella, écouteurs aux oreilles, redonne en le temporisant tout le texte du séminaire verbatim2, avec les scories inévitables de l’oral, ses incidents, mais aussi son tempo obstiné et même son propre timbre, un peu métallique3. La réception d’un tel objet garde toute son hétérogénéité, entre présentation performative et représentation théâtrale. Quand le flux de la parole magistrale, grâce à ou à cause de ses méandres, se développe continûment et non linéairement (plutôt de façon rhizomatique précisément), il coule de source et nous emporte dans une histoire conceptuelle où le conteur se superpose au philosophe. En revanche, que surviennent une trace d’oralité, un incident matériel ou conceptuel, et tout à coup Cantarella « fait le Gilles » : une théâtralité excentrique, un « écart » ou un « détour » surgissent, pour rester dans les termes d’une poétique chère à Deleuze. Ce qui finalement est fascinant, c’est de retrouver dans le geste de la performance quelque chose comme le style même d’une pensée, comme si Cantarella faisait avec l’événement de la parole du philosophe ce que le cinéma, selon Deleuze, fait avec l’univers (ou « l’agencement machinique des images-­‐mouvements ») : créer un intervalle temporisé pour une image « spéciale » qui agirait et réagirait, dans l’écart. Yvon Le Scanff


France Inter : Studio Théâtre de Laure Adler le 29 avril A Paris, à la Ménagerie de Verre se tient une cérémonie passionnante, « faire le Gilles ». Nous entrons, nous spectateur et nous asseyons. Robert Cantarella, vous êtes si impressionnant dans votre façon de « faire le Gilles » que nous sortons nos cahiers pour prendre des notes. Tout est vrai dans ce moment de théâtre que vous nous permettez de vivre, y compris avec votre petit dispositif scénique puisque vous avez un comparse dans la salle qui fait l’étudiant et qui lève la main. Ce qui est très émouvant, c’est votre rythme de voix, votre musicalité de la langue de Deleuze que vous nous transmettez, il y a une pensée en train de se contruire devant des gens vivants, c’est là qu’il y a conjonction entre théâtre et philosophie.

France Culture: Mercredi du Théâtre de Joëlle Gayot le 27 avril Ce que vous faites Robert Cantarella est élémentaire. Je suis en face d’un faux professeur de philosophie, mais d’un vrai acteur, et moi qui suis-je ? une vraie spectatrice mais aussi une vraie étudiante mais dans un faux cours. J’admire cette démarche de gratuité de mise à disposition d’un texte philosophique. Le but est dans l’accessibilité pour tous de ce texte qui n’a pourtant a priori rien de théâtral. Et le plaisir d’entendre ce texte de Deleuze. Radio Libre d’Arnaud Laporte le 30 avril Visuellement , c’est assez saisissant car c’est vous qui parlez mais en fait, ce n’est pas vous…

Les Inrockuptibles le 27 avril En s’offrant à l’heure du thé la tête de Gilles Deleuze sur un plateau d’argent, Robert Cantarella partage avec nous une madeleine qui renvoie chaque spectateur à ses chères années d’études et aux souvenirs enfouis de plaisir mêlé d’excitation et d’ennui d’assister à un cours magistral. Plus qu’un spectacle, c’est une cure de jouvence que Robert Cantarella nous offre en faisant ainsi le Gilles avec tant d’humilité et d’humour pince-sans-rire. Patrick Sourd


BIOGRAPHIES ROBERT CANTARELLA Né en 1957 à Marseille. Formation aux Beaux-Arts de Marseille. Élève d'Antoine Vitez à l'Ecole du Théâtre National de Chaillot. Il fonde en 1983, avec Grégoire Ingold, le Théâtre du Quai de la Gare, puis crée, en 1985, la Compagnie des Ours avec la volonté de faire découvrir ou redécouvrir les auteurs du XXe siècle. En 1987, c’est la création d'Inventaires de Philippe Minyana. La pièce connaît un succès immédiat - tournée dans plus de 50 villes en France et à l'étranger - et marque le début d'une amitié et d'un compagnonnage avec l’auteur, dont Robert Cantarella monte successivement Les Petits Aquariums (1989), Les Guerriers (1991), Drames Brefs 1 (1 996), Anne-Laure et les fantômes (1999), puis Pièces (2001). Ensemble, ils cosignent la mise en scène du Sang chaud de la terre de Christophe Huysman. Entre 1989 et 2007, Robert Cantarella a mis en scène Le Voyage d'Henry Bernstein, Divertissements touristiques de Noëlle Renaude, Sourire des mondes souterrains de Lars Nören, Le Siège de Numance de Cervantès au Festival d'Avignon, J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne de Jean-Luc Lagarce, Sa Maison d'été de Jane Bowles, Oncle Vania de Tchekhov, Hamlet, de William Shakespeare, Samedi, dimanche et lundi, d'Eduardo de Filippo, Les Apparences sont trompeuses de Thomas Bernhard, Werther de Jules Massenet, 1ère mise en scène d’Opéra, Le Chemin de Damas, de August Strindberg et Hyppolite de Robert Garnier pour le Festival d’Avignon 2007. Depuis 1993, Robert Cantarella exerce également une activité régulière de formation tant en France qu’à l’étranger notamment à Berlin, Cannes, Avignon, Rabbat. En 1997, Robert Cantarella collabore à la rédaction et à l'édition du manifeste « Pour une formation à la mise en scène », éditions Entre/Vues. En 1999, il crée « l'Association Théâtres Écritures » ayant pour objet la réalisation et la publication d'une revue intitulée Frictions, pour favoriser la réflexion et la recherche dans le domaine du spectacle. Robert Cantarella est nommé directeur du Centre Dramatique National de Dijon en juillet 2000. Il y crée le festival Friction en mai, ayant pour vocation de montrer les formes nouvelles de l’écriture scénique. Il publie en 2004 sa première œuvre de fiction : Le Chalet aux éditions Lignes dirigées par Michel Surya et réalise en 2005 son premier documentaire « carrosserie ». En 2006, pour la création de ça va de Philippe Minyana, il réalise « la route », film de fiction d’une heure. De décembre 2005 à mars 2010, il a été co-directeur du CENTQUATRE à Paris. La même année, il prend la direction du Centquatre avec Frédéric Fisbach, lieu de résidence d’artistes qu’ils ont sorti de terre pendant 4 ans. www.robertcantarella.com

Alexandre Meyer Né en 1962 Compositeur/Interprète (guitare) Membre de divers groupes depuis 1982 : Loupideloupe, les Trois 8, Sentimental Trois 8. Travaille avec Fred Costa, Frédéric Minière, Xavier Garcia, Heiner Goebbels, les metteurs en scène Clémentine Baert, Maurice Bénichou, Patrick Bouchain, Robert Cantarella, Véronique Caye, Michel Deutsch, Pascal Rambert, Jean-Paul Delore, Jacques Vincey, Philippe Minyana, Marie-Christine Soma ; les chorégraphes Odile Duboc, Mathilde Monnier, Julie Nioche, Rachid Ouramdane ; le sculpteur Daniel Buren ; la conteuse Muriel Bloch ; pour France-Culture avec Blandine Masson et Jacques Taroni.


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