Une nouvelle maquette pour Etudes

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nous entraînent dans les pas de musiciens, mais aussi des cuisiniers, des politiciens, hommes de loi et politiciens, au rythme de concerts filmés en live dans la rue ou les bars. Nombre de musiciens interprètent d’ailleurs leur propre rôle, comme Kermit Ruffins, Allen Toussaint, Coco Robicheaux, Dr John, Elvis Costello ou encore le Rebirth Brass Band. Le choix des chansons colle à l’histoire des personnages, sans que cela soit une comédie musicale : c’est tout simplement qu’à la Nouvelle-Orléans, la musique et la vie sont intimement liées. « Vivre pour défiler, défiler pour vivre », comme le résume un des personnages, élu local s’apprêtant à défiler grimé pour le « mardi-gras ». La musique, l’identité d’une ville, cela suffirait sans doute à faire une bonne série, digne héritière des romans du XIXe siècle pour saisir l’esprit d’un temps et d’un lieu. Mais Tremé n’est pas qu’une bonne série, elle est plus que cela car ces personnages, héritiers d’une catastrophe démesurée aux échos profonds, sont le reflet de notre situation : nous sommes, comme eux, héritiers d’une catastrophe et la question est de savoir comment sauver nos vies. À travers l’histoire de LaDonna, femme de tête qui tient contre vents et marées un bar, du tromboniste Antoine Batiste qui apprend peu à peu à faire de sa musique un moyen de salut pour les jeunes, du chef cuisinier Janette Desautel pour laquelle cuisiner ressemble à un morceau de jazz, de l’avocate « Toni » Bernette qui lutte pied à pied avec la police corrompue de la ville, aidée par le lieutenant Terry Colson, du jeune investisseur latino Nelson Hidalgo paradoxal défenseur de la seconde chance, et de bien d’autres, c’est nous-mêmes que nous voyons, cherchant les moyens de sortir de la catastrophe : sauver nos vies, mais à quel prix ? La musique, dans la série, apporte non la réponse mais le lieu où chacun se décide entre son propre intérêt et le choix du monde, elle est une institution de salut. Celui-ci se tient dans l’écart entre fuir le monde – fuir Nola – et y habiter ensemble. La réponse se dessine dans les failles de la vie, dans des inflexions, qui nous aident à nous rappeler qu’aucune catastrophe ne peut submerger toute la vie dans sa brillance interne, ne peut gommer les raisons d’être. Si les séries ont une vertu, c’est celle de nous donner des compagnons de fiction qui prennent le temps de devenir et nous aident, lorsque le défi artistique est relevé, à réfléchir nos vies.

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