Omo ça coince

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www.revolutionofourtime.com présente une histoire qu'il ne faudra pas faire lire à ta grand-mère...

OMO ça coince par Charlie Clé et Raya B'Dull



Par un soir d'hiver glacial (et par soir, nous entendons, vers minuit-minuit et demi), Mik se trouve soudainement tirée de son sommeil sobre et profond par un appel déchirant venu de la rue. D'un bond, elle s'extrait de son lit non pas par compassion mais par pure curiosité malsaine. Prudemment, elle relève le store et glisse un œil commère sur le voisinage. Quelle ne fut pas sa surprise ! Surexcitée, elle se précipite dans la chambre de Mac et lui tient ce langage : « MAAAC ! Viens voir ! VIIIIIITE ! Y'a un type qu'est enfermé dans la laverie ! MWAHAHAH ! » Mac, les cheveux hirsutes, ne prend même pas le temps de passer un pyjama avant de se délecter du spectacle. « Oh attends ! Va chercher des chaises ! Moi je ramène des chips ! » lance Mik. Et c'est ainsi que les deux jeunes femmes s'installent devant la séance de cinéma-réalité de la rue de Belfort. Dans la pénombre de la laverie, se détache la silhouette d'un homme d'âge moyen, de taille moyenne. Un homme moyen sans charisme. Seul signe particulier, il n'est vêtu que d'un caleçon à première vue blanc (probablement crasseux), de chaussettes sombres et de mocassins noirs. Un chien (ou peut-être est-ce une chienne) se tient, fidèle, à ses côtés. Les mains en porte-voie, il s'époumone derrière une grande baie vitrée donnant directement sur la rue. Mik et Mac attendent patiemment la suite des évènements. Le type en question se sent minable. Aujourd'hui aura vraiment été une journée de merde, jusqu'au bout. Une demi-heure qu'il gueule. Une demi-heure qu'il appelle à l'aide. Personne ne lui répond. La rue reste déserte. Dans cinq minutes, il commencera à se demander s'il n'est pas seul au monde. Sa consolation, c'est que dans dix minutes il pourra remettre des fringues propres. Pourquoi cette satanée porte s'est-elle bloquée derrière lui ? Quelqu'un aurait-il été témoin de ses agissements ? Sa parano alliée à sa claustrophobie latente lui font perdre tous ses moyens. Soudain, un vrombissement assourdissant s'élève du fond de la laverie. Semi-paniqué, l'homme se retourne et constate que ce n'est que sa machine qui essore. « Putain... » Le chien, toujours placide, trimballe une chaussette inconnue dans son museau. Le cycle d'essorage touche à sa fin lorsque, soudain, émerge des ténèbres urbaines, un


groupe de jeunes. L'homme se jette contre la paroi vitrée et tambourine. Tambourine encore jusqu'à ce que l'un d'eux s'adresse à lui : « Vous avez un problème, monsieur ? » Ravivé par cette lueur d'espoir, le type lui répond : « QUE OUI ! Je suis enfermé là-dedans ! » Le jeune tente, connement et en vain, d'ouvrir la porte depuis l'extérieur. Mais c'est fermé, nous l'aurons compris. C'est ce moment précis que choisit la voisine de Mik et Mac pour ouvrir en grand la porte fenêtre de son appartement et se jeter par-dessus la rambarde de son balcon (Malheureusement, ce dernier point n'est qu'un rêve fou, un court-circuit dans l'imaginaire débridé de Mik et Mac). La voisine, donc, émerge sur le balcon et se met à gueuler de sa voix de poissonnière : « ça arrive tout le temps ! Y'a un bouton sur la gauche ! » Le jeune freluquet transmet le message au type qui lui répond : « y'a riien ! » Et la grosse globuleuse de rétorquer : « Mais sii ! Sur la gauche ! » Pris entre les deux feux d'un dialogue de sourd, le jeune prend une décision cruciale : il va appeler les flics. Ils auront surement la solution. Minutes de flottement. L'otarie est rentrée dans ses pénates. Le jeune passe son coup de fil à la police puis se casse, sa meuf l'attend. Le type met ses fringues dans le sèche-linge sous le regard blasé de son chien tandis que Mik et Mac se dépêchent d'aller chercher à boire. Soudain, l'homme de la laverie est aux aboies. Il vient de réaliser : le jeune a appelé les flics ! Paranoïa plus claustrophobie plus panique, il ne tient plus. Ce cocktail molotov a fait voler en éclat le peu de sang-froid qu'il lui restait. « Putain ! » Tout ce sang... heureusement, ses fringues sont propres. Il jette un œil à Fifi. Merde. Lui, il ne l'est pas, propre. Que faire ? Si les flics débarquent (et ils vont débarquer) et qu'ils trouvent son chien avec la gueule ensanglanté, ils embarqueront tout le monde, c'est sûr. Sans se douter que Mik et Mac l'observent avec attention, ni une, ni deux, le type retire son calbut et entreprend de nettoyer la gueule de son chien. A minuit, la bite à l'air dans une laverie fermée à clé, le type n'a qu'une pensée : « Fuck my life! » Une voiture arrive et s'arrête. « POLICE MUNICIPALE ! Vous avez un pro... » Le flic, surpris à la vue du type, ne finit pas sa phrase. En effet, celui-ci, derrière la vitre de la laverie, une main posée sur la tête de son chien et l'autre serrant ce qui pourrait s'apparenter à un chiffon sale, se présente à sa vue, complètement nu. Arrêt sur image pour Mik et Mac qui sont à deux doigts de se pisser dessus et, par la même, de se faire remarquer. A nouveau, la grosse qui fait irruption sur son balcon avec la même rengaine : « Y'a un boutooon ! Sur la gauche ! Ça arrive tout le temps ! » A moitié aveuglée par une virulente cataracte de naissance, elle ne s'aperçoit même pas du comique de situation. A se demander comment elle a pu voir ce fameux bouton sur la gauche. CLING ! Le sèche-linge a enfin terminé son cycle. A la va-vite, le type entreprend de se


rhabiller sans remettre son caleçon qu'il glisse discrètement dans sa poche. Pendant ce temps, le flic, armé de sa lampe-torche, inspecte la porte. Inquiet pour son avenir, l'homme tâtonne sur la gauche indiquée par le monstre. Enfin, ses doigts effleurent un bouton. Il le presse. CLANG ! A la surprise générale, sauf celle du chien, le mécanisme se déverrouille. « Quel con ! Je croyais que c'était le bouton de la lumière ! » A la sortie, le flic lui demande comment ils s'appellent. « Rex et Philippe. » lui répond l'homme. « Et bien, Philippe, enchaîne le policier, faîtes attention la prochaine fois ! » Le flic lui serre la main, hilare. « CUAL ES LA FECHA DE HOY? » gueule l'otarie depuis son balcon. Non, rassurez-vous, nouveau court-circuit débridé dans l'imaginaire fou de Mik et Mac. En réalité, peu familière des froids polaires, l'otarie s'est retirée dans son abri depuis deux bonnes minutes. Sous le regard médusé de Mik et Mac, Rex siffle Philippe et tout deux repartent vers de nouvelles aventures, sans être inquiété.

FIN


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