Approche cognitive de la neuroréhabilitation

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Définir l'approche cognitive de la neuroréhabilitation Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde.

Thomas Regazzola Deux évènements personnels : un frère (résident en Italie) affligé d'une SCA1 et un petit neveu (résident en France) victime d'un AVC, causé par une leucémie, m'ont poussé à chercher à comprendre, autant que possible, la nature des lésions neuromotrices, de façon à trouver (au-delà des soins médicaux) des thérapeutes compétents. Les interlocuteurs consultés (associations de malades neuromoteurs, neurologues, physiothérapeutes) m'ont parlé de "thérapies de confort" faites d'activités physico-musculaires et d'exhortations à la bonne volonté du patient... •

Recherche :

Toutefois, pour découvrir l'existence de stratégies "de reconquête" qui se proposent d'intervenir directement sur les structures cérébrales endommagées, en stimulant leur plasticité, il m'a fallu entreprendre une longue recherche sur Internet. J'ai décrit les résultats (provisoires) de cette recherche dans un article, publié par différents supports1. Par la suite j'ai décidé d'en mettre online une version corrigée, sous la forme du site Internet (bilingue) : http://www.ataxie-plasticitecerebrale-rehabilitation-fonctionscognitives.net •

Le terme « cognitif » :

Dans le foisonnement d'Internet, j'ai rapidement constaté la grande expansion de la qualification "cognitif", appliquée, désormais, à toute proposition de réhabilitation, à toute activité, à toute intervention impliquant ou s'adressant, d'une façon ou d'une autre aux facultés intellectuelles : exercices de mots croisés, pratiques de l'ergothérapie, musicothérapie, brain fitness, Cro-systhem, yoga, image virtuelle et, naturellement, la "réhabilitation neurocognitive" de l'E.T.C. Revendiquant ce déploiement, des psychothérapeutes, kinésithérapeutes, ergothérapeutes m'ont fait observer qu'il n'était que le reflet de la découverte que "toute stimulation (physique, émotionnelle, cognitive) active de façon plus ou moins marquée plusieurs zones du cerveau". Bien que formellement exacte, cette considération paraît bien trop générique pour devenir la référence théorique de pratiques particulières : si on en reste là, le terme cognitif devient tellement vaste et générique, qu'il ne définit plus rien de précis. •

Le stimulus :

Essayant de distinguer l'une de l'autre (discriminer) les propositions qui abondent sur Internet, de comprendre ce qu'il y a derrière et sur quelles évidences scientifiques elles se basent, il m'est apparu que l'objectif affiché par trois d'entre elles (il en existe probablement d'autres que je n'ai pas identifiées), ne consiste pas à stimuler génériquement les activités cérébrales, mais cible telle ou telle lésion, telle ou telle fonction, proposant d'agir sur ces dernières, de façon spécifiques (c'est-à-dire, en fonction de ce qu'on peut comprendre de la lésion), en stimulant leur plasticité, en modifiant leur architecture, grâce à des modalités d'exercice ancrées à des évidences convergentes de la neurophysiologie. La première de ces évidences est que le mouvement est tout autre chose que la concaténation mécanique entre stimulus et réponse... que la contraction musculaire, en tant que telle, ne possède pas de vertus thérapeutiques particulières, en ce qui concerne le SNC... qu'il n'existe pas de correspondance bi-univoque entre telle activité musculaire et tel noyau neuronal et que tel dysfonctionnement du mouvement nous dit rarement dans quelle structure neuronale la lésion est localisée. Pour qu'il devienne réponse, pour produire un mouvement adéquat, le stimulus doit en passer par une concaténation d'opérations d'interprétation, d'intégration, de représentation, de coordination que l'on nomme "fonction cérébrale". Cette dernière ne correspond ni à une "entité" localisée en une aire spécifique, ni à un locus particulier2 : elle doit être pensée, plutôt, comme une mosaïque distribuée (AR Lurjia), constituée par des liaisons fortes entre éléments, souvent distants, sélectionnés ad hoc, en assemblage temporaire, en vue de telle ou telle tâche, de tel ou tel but3, selon l'intention (la subjectivité) du geste4 et selon les informations que le cerveau reçoit, à propos de la situation où doit se dérouler l'action.... 1

"Ataxies - Plasticité cérébrale - Réhabilitation - Fonctions cognitives" a été publié, entre autres, par : Fisionline et Fisobrain (Octobre 2011); Psicolab (Janvier 2012); Groupe facebook "Progetto riabilitazione" (Février 2012); neuroscenze.net (Février 2013); kine-web.com (Janvier 2013); Groupe Parkinson 29 (Sepembre 2010); Alizé, (Février 2012); thierryperonmagnan.unblog (Janvier 3013). 2 Comme le croyaient les localisationnistes qui s'efforçaient de définir des "centres" de ceci ou de cela. 3 La corrélation entre la structure d'un système fonctionnel et les informations recueillies en vue d'une tâche, explique que, réciproquement, la modification d'un comportement ou du but d'une action puisse entraîner la modification de son architecture.

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