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Les grèves de 1995 à Brest
La récente crise sociale a été comparée à celle de 1995: cette année-là, débrayages et manifestations avaient composé le quotidien des Français et Brest ne fut pas épargnée.
22 septembre : Les syndicats de fonctionnaires appellent à la grève le 10 octobre pour protester contre le gel des salaires annoncé par le gouvernement.
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10 octobre : Six jours après l’annonce du président Chirac selon laquelle tous les revenus allaient être taxés pour rembourser le déficit de la Sécurité sociale, journée d’action pour la défense du service public. À Brest, sur fond d’énorme mobilisation nationale, un millier de personnes se rassemble à 8h30 devant la préfecture maritime puis défile sur la rue de Siam et la place de la Liberté avant de partir pour Quimper à 9h45. On compte près de 84% de grévistes à l’Arsenal, « du jamais vu » selon un témoin.
14 novembre : Trois semaines après l’annonce d’un nouveau tour de vis budgétaire, deux mille personnes se ras- semblent à 17h30 devant la faculté Victor Segalen : après une prise de parole commune rappelant les propositions de réformes des syndicats contre la fiscalisation et réaffirmant le droit à la santé pour tous, le cortège défile « dans le plus grand calme » sur la rue Jean Jaurès puis redescend jusqu’à la sous-préfecture.
21 novembre : Alors qu’un quart des universités françaises fait la grève contre le manque de moyens, de nombreux étudiants, enseignants et personnels techniques de l’UBO se rassemblent sur le parvis de la faculté Victor Segalen pour demander une dotation suffisante en postes et en crédits l’Université de Bretagne Occidentale avait besoin de 59 postes et n’en avait eu que 13 ! Les lycéens se joignent au cortège qui traverse le centre-ville aux cris de « Des sous pour l’UBO », portant à 2.000 le nombre de manifestants.
23 novembre : Tandis que se tient le conseil d’université, les facultés de lettres et AES sont occupées.
24 novembre : Quinze jours après la présentation du « plan Juppé » qui prévoyait notamment un gel des prestations sociales pour 1996, 5.000 manifestants se rassemblent sur la place de la Liberté : la CFDT, jugée trop tiède contre le gouvernement, y est huée. Le journal Ouest France ne paraît pas et les cheminots annoncent qu’ils poursuivent la grève.
27 novembre : Les étudiants en lettres bloquent leur faculté. À partir de 14 heures, ils sont 3.000 à défiler, le doyen Yvon Cousquer en tête. Les lycéens les rejoignent sur la place de la Liberté : ensemble, ils montent vers l’église Saint-Martin et redescendent la rue Jean Jaurès puis la rue de Siam jusqu’au pont de Recouvrance où ils feront un sit-in d’une heure.
28 novembre : Un millier d’étudiants fait une descente aux flambeaux dans le centre-ville puis se retrouve dans l’amphithéâtre Guilcher, à la faculté Victor Segalen, pour une soirée festive. Faute de pouvoir prendre le bus pour aller dresser un barrage sur le pont de l’Iroise, 600 étudiants bloquent les ponts de Recouvrance, de l’Harteloire et du Bouguen : la circulation restera paralysée pendant une heure et demie, l’embouteillage sera à son paroxysme vers 17h15.
29 novembre : 200 à 300 manifestants CGT font le tour des services publics brestois. Début du blocage des centres postaux de tri.

30 novembre : L’EDF-GDF rejoint le conflit. Nouvelle manifestation « calme et enjouée » pour l’université, le président de l’UBO, Jean-Claude Bodéré, y participe luimême.
2 décembre : Les agents grévistes CGT occupent un local EDF-GDF et branchent plus de cent mille abonnés sur le tarif « heures creuses ».
3 décembre : Sept occupants du local EDF-GDF sont assignés en référé : la direction est déboutée.
4 décembre : 700 personnes, dont 300 employés de l’arsenal, manifestent. Des grévistes d’EDF-GDF se cadenassent dans les locaux techniques du port.
5 décembre : 8.000 personnes manifestent à Brest, les enseignants rejoignent le mouvement.
7 décembre : Les centres de tri de Brest et de Quimper sont toujours bloqués, 200.000 lettres et 38.000 colis sont en souffrance dans le département. Plus de 10.000 personnes, essentiellement du secteur public, manifestent à Brest, les enseignants dopent la manifestation, mais le secteur privé aussi est représenté, notamment par les métallurgistes. La CFDT, décriée, défile séparément.
8 décembre : 400 cheminots et enseignants rejoignent les 230 grévistes d’EDF-GDF qui occupent toujours le centre du port.
12 décembre : Alors que les négociations s’ouvrent enfin, on compte 15.000 manifestants à Brest (sur un total d’1,5 million de manifestants dans toute la France), « du jamais vu depuis l’Amoco Cadiz » dit un témoin.

13 décembre : La contestation faiblit à l’arsenal où le taux de grévistes tombe de 59 à 16 %, mais les ponts de Recouvrance et de l’Harteloire sont bloqués par des barrages de pneus enflammés.
14 décembre : 800 manifestants défilent, le nom de Nicole Notat, secrétaire générale de la CFDT, est hué. Le travail reprend à l’Arsenal et au centre de tri postal, les employés de l’EDF-GDF et les cheminots résistent.
13 septembre 1995 : Coup de semonce
15 décembre : Les cheminots votent la reprise du travail « avec le sentiment d’avoir gagné »
16 décembre : 6.000 personnes défilent à Brest, une pétition circule contre les sanctions infligées au personnel gréviste à l’EDF-GDF.
18 décembre : L’EDF-GDF vote la poursuite la grève, la CGT refuse de libérer le centre du port de commerce.
19 décembre : La rencontre entre la direction de l’EDF-GDF et les grévistes n’aboutit pas : ces derniers s’enchaînent au portail d’une agence de la rue Jean Jaurès.
21 décembre : 800 salariés de l’EDF-GDF manifestent : à quatre jours de Noël, le mouvement est suspendu sans
En 1995, l’arrivée de capitaux privés, le gel des salaires des fonctionnaires, la révision de la loi de programmation militaire et la coupe de 8,4 milliards dans le budget de la défense inquiétaient les salariés de l’arsenal. Six organisations syndicales appelèrent donc à la grève pour défendre le statut d’État des établissements de la DCN. Le 13 septembre à 10h12, 2.500 à 3.000 manifestants sortirent des portes Tourville et Jean Bart aux cris de « Millon du pognon, Chirac arrête les arnaques ». Le maire Pierre Maille, qui n’avait pas reçu de réponse à son courrier adressé deux semaines auparavant au ministre de la défense, se joignit à cette manifestation « plutôt calme » qui monta jusqu’à l’avenue Clemenceau pour redescendre jusqu’à la préfecture maritime. Cela annonçait déjà les grandes manifestations de 1995 et le mouvement « Brest debout » qui allait marquer 1996.