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Quand une page se tourne

La commune ayant un besoin de place de stationnement dans le village vient de racheter un ancien garage de quelques 250m2 que l’on a coutume d’appeler « le garage Gibert » Cet espace permettra le stockage d’une douzaine de véhicules et, par là même, sécurisera le tournant dit « de Calet » sur la route départementale n°5. Les engins s’activent donc pour cette démolition et c’est l’occasion d’un bref retour en arrière avec quelques anecdotes assez truculentes pour qui connait le village. Ce bâtiment datant du 19eme siècle était une écurie qui appartenait à Monsieur Régis Coudène, agriculteur de son état, comme d’ailleurs beaucoup d’habitants du village qui comptait près de mille âmes. Cette personne avait pour gendre Clovis Brioude, menuisier, dans le village et plus précisément en sortie nord, où les locaux existent encore. Une partie de son bois d’œuvre était stocké sur les deux côtés de la route nationale que l’on pouvait traverser alors, sans danger des véhicules qui circulent très nombreux sur cet axe de nos jours. L’entreprise Brioude prenant de l’ampleur, il fallait à Clovis Brioude plus de place pour ses activités de menuiseries grandissantes.

Au décès de son beau-père Clovis Brioude reprend alors le local en question qui servait alors d’écurie où les chèvres, les lapins, les poules etc... Et surtout ‘’la blonde’’ une magnifique jument comtoise, résidaient en ces lieux. Il est bon de préciser que le cheval était très important à cette époque, pour le travail dans les champs mais aussi pour la charrette et autres outils. Les familles qui en possédaient un en prenait un soin particulier et le choyait comme il se doit. Elle avait fière allure la ‘’blonde’’ attelée de sa jardinière pour sortir le dimanche en parcourant les routes en toutes saisons. Pour en revenir au sujet, ce bâtiment sera donc transformé en atelier de menuiserie en 1955 avec des machines modernes pour l’époque, la dégauchisseuse/raboteuse, la toupie etc. qui prenaient place dans ce bel atelier.

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L’entreprise prenant toujours plus d’ampleur une autre unité de fabrication sera investie par Clovis Brioude, dans le village toujours, pour la fabrication de portes iso planes, technique révolutionnaire à cette époque, nous étions alors en 1957. Il sortait de cet atelier une centaine de portes par jour et l’entreprise comptait une dizaine d’ouvriers.

A ce propos Clovis Brioude, qui avait un fort caractère, avait eu une vive discussion avec le curé d’alors, le père Robert Revest, au sujet de la première antenne de télévision que l’ORTF avait jugé bon de placer sur le toit de l’église de Niéigles, le curé lui trouvant à redire alors que le Maire n’y était pour rien, il déboutonna sa veste violemment pour corriger le curé qui était un peu virulent envers le Maire. Fort heureusement pour le curé ce n’est pas allé plus loin. C’était notre rubrique de Clovis et Robert non pas à Brescello mais à Pont de Labeaume.

L’entreprise allant toujours de l’avant, dans les années 1958/1960, il fallait encore trouver de la place pour l’expansion de celle-ci. Les espaces étant rares et après avoir longuement cherché, Clovis Brioude dût se résoudre à transférer son entreprise sur Aubenas qui sera reprise après son décès prématuré en 1965, par ses enfants et fonctionnera jusque dans les années 2010 environ. Les rumeurs de départ de l’entreprise allaient bon train dans le village et certaines personnes étaient sur le ‘qui vive’. Henri Belin, qui tenait un commerce de grossiste en chaussures, avait invité Clovis Brioude pour lui tenir un discours, dans la langue commune de cette époque le patois.

« Clovis ès entendu dire qué voulios parti vei Aubénas, mé vas pas laïssa soulé emé tout ei lous coumunistes » Ce qui en bon français donne : Clovis j’ai entendu dire que tu allais partir à Aubenas, tu ne vas pas me laisser tout seul avec tous ces communistes. Je ne ferais aucun commentaire pour ce trait d’humour ou pas ?, mais pour qui a connu Henri Belin, ceci reflétait assez bien son esprit quelquefois un peu rustique et son langage familier !!!

Quelques années plus tard, le bâtiment désaffecté deviendra la propriété de Georges Gibert Boucher de son état, qui avait besoin de place pour son commerce. En 2020, la commune rachète ce bâtiment pour en faire une aire de stationnement où la blonde hippomobile a laissé la place à la multicolore automobile. Un grand merci à Pierre et Alain Brioude pour leur contribution à ce bref historique.

Yves Veyrenc

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