Journal l'éduc' pop' en Ile-de-France n°9

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L’éduc’ pop’en île-de-France

Journal d’information des réseaux d’éducation populaire en Île-de-France

Juin 2012

DOSSIER : « L’éducation populaire : des chemins pour apprendre et pour agir »

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ÉDITO Tout animateur, enseignant, ou travailleur social s’interroge sur les conséquences de ses interventions. Quel type d’humain se profile derrière ses actions ? Plus encore, quelle forme de société peut se développer avec ces humains en devenir ? Il ne s’agit pas de croire en une illusoire toute puissance du travail pour autrui, mais simplement, de pointer qu’aucun intervenant n’échappe aux questionnements sur les finalités éducatives de ses actes. Les questions de l’éducation ne se limitent pas aux enfants et aux jeunes, elles sont présentes tout au long de l’existence comme un processus jamais achevé. Ces questions renvoient systématiquement à un double mouvement d’inscription et de rupture. Inscription, car l’éducation vise à la transmission du patrimoine que l’on peut exprimer schématiquement comme la somme de savoirs, savoir-faire, et savoir-être qui permettent la participation à la vie sociale. Rupture, car cette éducation vise aussi à la transformation des personnes et au développement de leurs capacités à agir dans et sur leur environnement. Pour prendre sens et valeur, les processus d’apprentissage et les savoirs transmis doivent avoir leur place dans le parcours biographique des apprenants. C’est à cette seule condition que pourront être réduites les inégalités face à l’investissement dans le rapport au savoir. C’est un des aspects pertinents de l’apprentissage dans le cadre de l’éducation populaire. L’exemple de la requalification du Contrat d’engagement éducatif (CEE) dans le cadre de la seule logique de droit privé, avec l’obligation d’un « repos compensateur » pour les animateurs de centres de vacances, démontre qu’il est essentiel de revenir aux sources de l’éducation populaire, mouvement social s’appuyant sur le volontariat et l’engagement. Pour ces jeunes, c’est la capacité à prendre des initiatives, des responsabilités, à exercer des compétences, à être reconnus comme de véritables acteurs d’une action éducative, dans la construction commune d’un projet, qui est en jeu. Gageons que la place retrouvée de « l’éducation populaire » au sein d’un de nos ministères, réinterroge le recours systématique à la professionnalisation, garantie d’une certaine qualité mais peu génératrice de créativité, de sens, et de spontanéité. Ce n’est pas à un processus figé, une méthode unique suivant des étapes pré-établies, que nous avons affaire mais bien à des formes d’actions originales inscrites dans une réalité quotidienne. Il s’agit de relier individu et groupe, expérience intime et sociale, dans une aventure collective et partagée. Elle peut être utilisée partout où l’on cherche des moyens « d’humaniser la société ».* Pour le bureau de la CRAJEP ÎdF, Patrice RAFFET. * En référence au « Manifeste de Villeurbanne », rédigé sous l’impulsion de Roger Planchon et de Francis Jeanson, avec la participation des directeurs des Centres dramatiques et des Maisons de la culture, adopté le 24 mai 1968.

SOMMAIRE P.3

La CRAJEP, l’éducation populaire en interactions.

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DOSSIER : L’éducation populaire : des chemins pour apprendre et pour agir.

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La CRAJEP, l’éducation populaire en interactions La CRAJEP Île-de-France interpelle les candidat-e-s aux législatives. Les élections législatives se sont déroulées les 10 et 17 juin 2012. Nos réseaux associatifs franciliens, rassemblés au sein de la Coordination régionale des associations de jeunesse et d’éducation populaire, entendent poursuivre le travail d’interpellation engagé ces derniers mois au niveau national par le CNAJEP, et continuer ainsi à faire entendre la voix de la jeunesse et de l’éducation populaire.

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es activités menées dans le cadre d’associations de jeunesse et d’éducation populaire font partie du quotidien des populations franciliennes, répondent à de réels besoins sociaux, contribuent à un aménagement équilibré du territoire et favorisent un accès de toutes et tous à l’éducation et la culture. Elles se traduisent par des projets (accompagnement à la scolarité, soutien à la parentalité, soutien à l’intégration et lutte contre les discriminations, actions et stages de formation, actions et accompagnement culturels et artistiques, actions sportives, chantiers de jeunes, éducation à la citoyenneté, éducation à l’environnement et au développement durable, échanges internationaux…) et se matérialisent par des espaces d’accueil et d’animation (centres de loisirs, séjours de vacances, maisons de quartier, maisons des jeunes et de la culture, foyers de jeunes travailleurs, centres sociaux, ludothèques…). Ces activités et lieux d’accueil concernent plusieurs millions de personnes en Île-de-France (enfants, jeunes, adultes). En raison même de leur utilité publique, leur coût constitue un investissement qui contribue à la production de richesses pour la Région.

en vue des élections de 2012 :  favoriser l’émancipation des jeunes, agir par l’éducation populaire et reconnaître la contribution des associations à la production de richesses ; ainsi que la plateforme collective « Pour un big-bang des politiques jeunesse » qui propose un droit pour chaque jeune à construire son parcours et à vivre dignement. À travers ces propositions, notre volonté est bien de contribuer à l’émancipation et permettre à chacune et chacun de trouver une place dans la société pour agir et participer à la vie de la cité. http://www.bigbangjeunesse.net

Pendant la campagne des législatives, la Coordination régionale des associations de jeunesse et d’éducation populaire d’Île-de-France a relayé les analyses et les propositions que les réseaux associatifs de jeunesse et d’éducation populaire ont travaillées et portées au sein du CNAJEP ces derniers mois. Elle a en effet envoyé aux candidates et candidats des circonscriptions franciliennes la publication du CNAJEP « Agir par l’éducation populaire pour une jeunesse émancipée » qui détaille les propositions du CNAJEP

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Les associations d’éducation populaire se forment aux questions de genre. Depuis juin 2011, la CRAJEP Île-de-France mène un travail pour partager les travaux menés par plusieurs réseaux membres et qualifier nos associations sur les questions de genre. En 2012, quatre journées de formations sont prévues sur ce thème. questions de genre et d’égalité interpellent L esl’ensemble de la société dans toutes ses composantes, et interrogent notre modèle de société, de vivre ensemble et d’éducation.

Afin de partager et de valoriser les travaux menés par plusieurs réseaux membres sur les questions de genre, la CRAJEP a organisé un premier temps d’échanges, de restitutions d’expériences et de débat le 21 juin 2011. En décembre 2011, le journal numéro 8 de L’éduc’ pop’ en Île-deFrance a été consacré à : « Mixité et égalité  : le genre en question ou une question de genre ? ». Il met en exergue trois types d’enjeux : des enjeux éducatifs à l’égard des enfants et adultes que nos associations rencontrent au quotidien, des enjeux de formation des équipes d’animation et d’encadrement, des enjeux qui invitent à réinterroger le fonctionnement même de nos organisations associatives. Souhaitant poursuivre la réflexion et les travaux amorcés au sein de la CRAJEP sur ces questions de mixité et de genre, un groupe de travail s’est constitué en mars 2012. Celui-ci rassemble les principaux réseaux déjà engagés dans des actions, études, formations : Association des ludothèques en Île-de-France, Ligue de l’enseignement-FOL 93, Ceméa Île-de-France. Dans ce groupe, il a été décidé de mettre en place des actions de formation dans une démarche de valorisation et de partage d’expérimentations entre les réseaux membres de la CRAJEP. Le public visé est large : il concerne aussi bien les dirigeant-e-s, les salarié-e-s et bénévoles des associations, les responsables d’activités, les animateurs-trices ou les stagiaires

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en formation issus des associations membres de la CRAJEP et de leurs réseaux. Promouvoir une éducation non sexiste n’est pas évident même si la majorité des éducateur- trice-s pensent qu’ils donnent une éducation égalitaire et indifférenciée entre les filles et les garçons. L’objectif est donc de sensibiliser un large public à cette thématique pour qu’il y ait dans un premier temps une prise de conscience et une interrogation sur ses propres stéréotypes. Dans un second temps, grâce aux connaissances acquises et aux échanges des différentes pratiques entre associations ; le but est de donner la possibilité à chacun-e d’intégrer ces données dans une posture professionnelle au quotidien. Le thème transversal du cycle de formation est : « Mixité, genre et éducation populaire :  interroger ses propres stéréotypes et construire sa posture d’éducateur-trice ». Chaque journée est organisée en trois temps : déconstruire ses stéréotypes avec des échanges et analyses de pratiques qui existent dans les réseaux associatifs ; lutter contre les idées reçues avec un temps de réflexion et d’apports théoriques sur la question (interventions d’expert-e-s en histoire, éducation, psychologie, sociologie…) ; et enfin, construire sa posture d’éducateur-trice avec la recherche des modes d’intervention. La première journée de formation s’est déroulée le 5 juin 2012 et a porté sur « L’identité en construction ». Elle a réuni près de 35 partcipant-e-s. Contact : Lucie Groussin, CRAJEP Île-de-France. http://www.crajep-idf.org/questionsdegenre


Partager, valoriser, qualifier les actions culturelles. La commission culture-éducation populaire de la CRAJEP Île-de-France se réunit depuis 2004. Elle s’est constituée afin de mettre en œuvre des chantiers communs. Elle suscite des échanges entre les réseaux d’éducation populaire franciliens et a pour objectif, à plus long terme, de donner une meilleure visibilité auprès des pouvoirs publics régionaux (État et Conseil régional) des actions culturelles menées dans nos associations. Elle offre un cadre permanent de réflexion politique sur les pratiques et actions culturelles. culture éducation-populaire est L aunecommission des commissions de travail qui, au sein de la

- l’organisation de rencontres inter-réseaux, en partenariat avec des établissements publics culturels : la Villette, la Maison des Métallos, Musée de l’Orangerie... Ces rencontres favorisent à la fois une meilleure connaissance des actions menées dans les différents réseaux ainsi que les croisements entre les pratiques d’éducation populaire et des démarches artistiques et culturelles d’autres acteurs : artistes, établissements publics, associations culturelles... ; - la construction et la mise en œuvre d’une interpellation des pouvoirs publics régionaux (la Direction régionale des Affaires culturelles, le Conseil régional d’Île-deFrance, les collectivités) nécessaire à la reconnaissance des actions développées dans nos réseaux.

En 2011, la commission a finalisé son travail sur « Histoire et mémoire de l’immigration » en publiant un document qui reprend de manière synthétique les apports méthodologiques glanés tout au long du cycle de rencontres « L’immigration » et nous ? (2008-2010).

À plus long terme, la commission culture entend : - construire un contenu de formation pour intervenir dans les formations universitaires de niveaux II et I dans les champs culturel et artistique ; - s’engager dans une dynamique d’échanges avec plusieurs pays européens sur « Culture et éducation populaire » (programmes Grundtvig, PEJ).

CRAJEP, offrent des espaces privilégiés de réflexion collective et de travail autour d’objets communs.

En 2012, les missions que se fixe la commission culture croisent les objectifs du plan d’action 2010 - 2012 de la CRAJEP : développer l’expression politique de la CRAJEP, accroître la visibilité et la lisibilité de l’éducation populaire, construire de l’action collective et des coopérations. Cela s’illustre à travers : - un travail d’état des lieux interne et de valorisation des actions culturelles et artistiques menées par les réseaux membres. Un espace ressources sur le site internet de la CRAJEP sera consacré à la promotion de ces démarches. Un travail similaire avait été effectué en 2007 et avait donné lieu à la « première rencontre régionale : Culture et éducation populaire en Île-de-France au Centre Pompidou. » Le numéro 5 (mai 2010) du journal L’éduc’ pop’ en Île-de-France avait par ailleurs été consacré aux pratiques culturelles et artistiques des associations d’éducation populaire ;

Coordinateur de la commission : Jean-Pierre Weyland, CEMÉA Île-de-France. Contact : Marie Hatet, CRAJEP Île-de-France. http://www.crajep-idf.org/commissionculture « Histoire et mémoire de l’immigration : repères pour les associations d’éducation populaire » publié par la CRAJEP Île-de-France.

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DOSSIER

« L’éducation populaire : des chemins pour apprendre et pour agir » Les dimensions multiples et plurielles de l’action éducative. À l’heure où le nouveau Président de la République se fixe comme priorités la jeunesse et l’éducation, que le Conseil régional d’Île-de-France met en place un dispositif régional de lutte contre le décrochage scolaire, les associations de jeunesse et d’éducation populaire (JEP) rassemblées au sein de la CRAJEP Île-de-France souhaitent, à travers ce neuvième numéro de L’éduc’ pop’ en Île-de-France, réaffirmer l’action éducative dans ses dimensions multiples et plurielles. que l’individu se construit tout au long C onsidérant de sa vie, les associations JEP défendent le droit

de chacun d’accéder à des parcours éducatifs et de formation quels que soient son âge, ses pré-requis, son statut social, familial, ses appartenances culturelles, confessionnelles, militantes. La sphère éducative ne se réduit pas au périmètre de l’école. Les ludothèques, les centres de loisirs, les maisons de jeunes et de la culture, les centres sociaux… offrent des espaces multiples où - l’enfant, le jeune, l’adulte - explore le monde qui l’entoure, acquiert des clés pour le comprendre et y trouver sa place.

Au sein ou en dehors de l’école, les associations JEP agissent pour que chacun accède aux savoirs, qu’ils soient théoriques et disciplinaires (accompagnement à la scolarité, prévention de la déscolarisation) ou issues de l’expérience directe. Tous les apprentissages en effet ne sont pas scolaires. Le jeu, les loisirs, la culture, les activités manuelles ont toute leur place dès lors que l’on considère les personnes dans leur complexité, c’està-dire inscrites à la fois dans un cadre familial, social, économique, culturel et sociétal. Les associations JEP, à travers leurs actions, en direction des enfants, des jeunes, des parents, des adultes pensent et proposent au quotidien des espaces où l’expérimentation, l’entrée dynamique et spontanée dans une activité, contribuent à se construire comme acteur (pp. 7-11). En cela les associations JEP contribuent au développement des personnes. Cette dimension émancipatrice de l’éducation est au cœur de la démarche d’éducation populaire. C’est par l’éducation que l’individu élabore son esprit critique, se construit comme citoyen, agit. Considérant que la communauté éducative est plurielle, les associations JEP défendent le principe des coopérations éducatives entre école, parents, associations, chercheurs, État et collectivités (pp. 18-27, 29-31). À travers des actions diverses, elles contribuent à garantir la continuité éducative : accompagnement   à la scolarité, prévention de la déscolarisation, remobilisation de jeunes en décrochage (pp. 1217, 24-25), accompagnement à la parentalité (pp. 20-23), éducation aux médias (p. 28), formation des éducateurs, des équipes pédagogiques et responsables de structures d’accueil et d’activités (pp. 10-11, 18-19). Marie Hatet, CRAJEP Île-de-France.

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Éducation en jeu. Si comme le dit Freud, « le contraire du jeu n’est pas le sérieux, mais la réalité », dans la réalité justement, le jeu n’est pas suffisamment pris au sérieux. En tant que loisir actif, véhicule de socialisation, déclencheur d’aptitudes motrices, sensitives, cognitives, affectives et langagières, le jeu ne devrait pas être un privilège, mais est un droit pour tous. ainsi que sont nées les ludothèques, qui C ’est par la diversité et le nombre de jeux et de jouets

proposés et leur disposition attractive, favorisent le jeu libre. Consacrée au jeu et à lui seul, la ludothèque lui offre un espace et un temps spécifiques. C’est une de ses spécificités que de donner à l’enfant un cadre d’exploration « sans risque ». Il y trouve toutes les conditions pour que son jeu lui appartienne et soit respecté, donc se déroule comme il le souhaite pour satisfaire ses besoins du moment. C’est une des raisons pour lesquelles il est important que la ludothèque présente un matériel ludique le plus complet possible et s’adressant à tous les âges. Les usagers vont ainsi, enfants comme adultes, trouver du matériel correspondant à tous les stades de leur développement cognitif et affectif, qu’ils pourront utiliser sans jugement, pour le plaisir. C’est l’exploration « à

l’aveugle » qui fait progresser dans l’organisation interne, c’est en tâtonnant qu’on découvre, par exemple, la stratégie base de l’anticipation. Cette notion d’expérimentation est un élément fort et récurrent, présent dans tous les types de jeux, pour tous et tout au long de la vie. L’espace d’expérimentation créé par le jeu est unique, car il se situe sur un plan fictionnel. Des éléments de la vie réelle peuvent y être joués, « symbolisés », modélisés, dans un cadre précis limité dans l’espace et le temps, sur un mode dédramatisé car détaché de la réalité. Expérimentation de soi, du monde extérieur, de ses compétences cognitives et fonctionnelles, de sa capacité à raisonner et à résoudre une problématique, un conflit, à imaginer, inventer des scénarios de plus en plus élaborés… L’acquisition des apprentissages Dans ses partenariats locaux, la ludothèque ne se substitue pas à l’école dont le rôle est d’apprendre, mais elle la complète. « Le jeu est un complément pour apprendre ce qui ne s’apprend pas » explique Odile Périno - directrice de la ludothèque Quai des Ludes à Lyon. Les compétences langagières, la motricité fine, le repérage dans l’espace et dans le temps, l’élaboration de stratégies, et tant d’autres compétences transversales se développent et s’affinent par le jeu. Ces compétences sont le socle nécessaire à l’acquisition des apprentissages. C’est ce qui fait dire aux ludothécaires que plus un enfant joue, plus et mieux il apprend, à condition justement qu’il n’y ait pas de fins pédagogiques à son jeu. Les étiquettes « jeux pédagogiques » ne sont que des arguments de vente pour écouler du matériel pédagogique déguisé en jeu. Les enfants ne s’y trompent pas et c’est cela que permet le libre jeu : laisser les enfants être acteurs de leur propre jeu. Natacha Deshayes, Association des ludothèques en Île-de-France.

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De l’activité. Tout ce qui s’agite n’agit pas. Alain Gheno, militant Ceméa, dans cet article - dont nous proposons ici un extrait - se propose de rappeler les enjeux d’une réflexion à mener sur la notion d’activité et le sens de l’agir. mettre en face à face, aujourd’hui, ce qui précède et À fonde ce qu’est l’activité, et ce que nous constatons ou percevons des pratiques, fait ressortir pour le moins

un besoin d’analyses fines. Le premier degré d’analyse pourrait être de se demander qui l’activité pratiquée valorise : la personne à laquelle elle s’adresse, ou celle ou celui qui propose et anime ? Une activité, quelle qu’elle soit, qui ne tient pas compte des besoins, envies, désirs ou toutes autres définitions d’une motivation personnelle ne peut être qu’au service de l’organisateur ou de l’animateur. On dépasse alors la simple définition de l’activisme, pour aller vers une activité de consommation, dans laquelle le participant est l’objet même ! Être parfois soi-même en plein activisme, en pleine agitation peut procurer quelques plaisirs immédiats, être objet de consommation ou simples objet de l’effectuation de l’activité d’un autre est plus... ambigu. De fait, cela présuppose une conscience d’être ou d’entrer en activité. Une conscience de sa place et de son rôle. La notion de choix n’est pas suffisante. Parmi les activités proposées, on pourra toujours « choisir » passivement. Le choix n’implique pas une entrée dynamique dans l’activité, une façon de s’approprier l’activité, les conditions de sa réalisation, le cheminement pour y accéder ou la réaliser. De fait, le type d’activité n’a pas une importance considérable. Le bon sens nous fera dire qu’elle doit bien correspondre pour le moins à

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une attirance, une appétence. Il n’y aura pas de bonnes ou de mauvaises activités. Il y aura celles où on pourra trouver réponse, consciente ou non, consciemment reste quand même une avancée vers sa propre autonomie, à des besoins, des intérêts. La manière d’y accéder est plus intéressante. Le cadre, l’environnement dans lesquels cela se réalise a une grande importance. Si l’on s’en réfère à des enfants ou des adolescents, c’est très souvent le cadre, l’environnement et le milieu qui vont servir à la fois de déclencheur et d’aliment à l’activité. L’activité spontanée Un autre volet d’approche de l’activité a disparu, en tous cas des consciences : l’activité spontanée. Là encore, la pression culturelle fait qu’une activité se doit d’être planifiée, organisée, pensée à l’avance. Toute tentative d’activité spontanée, d’organisation de cadre pédagogique qui la facilite est vouée aux gémonies de la raison et de la sur-organisation. Quand elle n’est pas accusée d’un laxisme suspect. La peur du laisser-faire conduit à un activisme absurde.


Or, la seule vraie « primactivité » est l’activité spontanée. Patrick Dessez a écrit dans les colonnes des Cahiers de l’animation un remarquable texte sur l’activité spontanée, qui en montre toute la richesse, et combien elle reste indispensable. « La spontanéité provient du dedans. Elle émane de l’énergie vitale de l’être tout entier qui s’actualise en activités lorsque l’adulte construit pour l’enfant un milieu qui permet une pratique répondant à son intérêt et ne nécessitant pas des simulations artificielles des motivations. L’action pédagogique s’étaye sur l’activité spontanée. “Il ne suffit pas que l’enfant soit actif mais il faut qu’il soit actif par lui- même et qu’il soit actif par lui-même ne signifie pas seulement qu’il doit être lui-même actif mais que le principe de ce qui le contraint à l’activité doit être en lui-même et que cette contrainte doit émaner de lui-même, de ses propres intérêts, et traduire l’urgence avec laquelle ceux-ci réclament les moyens de leurs satisfactions1“. La conduite active ne se définit plus par l’intensité d’activités constatées chez l’enfant mais par le degré d’initiative mentale opérée par l’enfant et permise par l’adulte2. » Enfin, une réflexion sur l’activité se doit d’interroger la notion de projet. D’abord parce que le terme même est tellement galvaudé qu’il n’a plus de sens ou qu’il en a trop. L’écoute attentive d’une heure de radio d’information, la lecture d’un quotidien fera tinter des dizaines de fois le terme de projet. Tout est projet, tout le monde a des projets et « quel est ton projet ? » devient une antienne banale. Dans le domaine de la pédagogie, il importe de bien maîtriser la distinction entre une méthodologie du projet adaptable à toute forme d’activité, y compris industrielle et une pédagogie du projet qui, et cela s’est considérablement dilué dans l’emphase verbale, est une pédagogie de la liberté ! 1 2

Le jeu libre dans les ludothèques. Le jeu libre se définit comme une activité ludique, sans intervention obligatoire d’animateur, mais sous le regard bienveillant d’un accueillant, le ludothécaire, qui en a en amont prévu les modalités (aménagement, stock diversifié) pour que le jeu se déroule dans les meilleures conditions. Les ludothèques considèrent que le jeu n’a d’autre finalité que le déroulement du jeu en lui-même. Dans les partenariats locaux que les ludothèques contractent avec les écoles, les questions du jeu libre se heurtent régulièrement à la volonté des adultes de diriger les enfants vers des jeux dits de règles ou de société. Dans cette course à la compétitivité, à la rentabilité, à l’individualisme, la société tout entière ne permet plus aux enfants d’être des enfants. Ne pas laisser le temps à l’enfant d’aller lui-même vers les jeux qui l’intéressent, c’est le priver de certaines marches, de certains jalons dans son développement. Bref, c’est le déstabiliser. Et donc, parfois, le mettre en situation d’échec. Les ludothèques peuvent être des partenaires précieux de l’accompagnement à la scolarité, dès lors que les intervenants acceptent ces deux préalables de l’enfance, à savoir que chaque enfant est différent et que l’enfant apprend en jouant. Association des ludothèques en Île-de-France.

M. A. Bloch, Philosophie de l’Éducation nouvelle, Puf, 1948. Patrick Dessez, in Les Cahiers de l’animation, n°34, 2001, page 17.

Extrait de l’article d’Alain Gheno paru dans le n°545 de Vers l’éducation nouvelle, janvier 2012. Lire l’article exhaustif : www.crajep-idf.org/education

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Le centre de loisirs éducatif : agir pour l’éducation sur les territoires. Les Francas se sont lancés dès 2009, suite à leur Congrès de Bordeaux, dans une démarche de renforcement et de valorisation de la contribution éducative des centres de loisirs sur les territoires. Inscrivant leur action dans une perspective d’éducation globale, ils ont tout particulièrement souhaité promouvoir une approche : le centre de loisirs éducatif. de loisirs peine à faire connaître, reconnaître L esacentre dimension éducative. Trop souvent relégué, dans

l’esprit du grand public, comme des acteurs éducatifs locaux eux-mêmes, à sa mission d’accueil – pour répondre aux besoins de garde –, il est considéré comme un service à la population. Il remplit, certes, cette fonction sociale essentielle sur les territoires mais le cantonner à cette seule fonction serait par trop limitatif. Qu’est-ce que le centre de loisirs éducatif ? (CLE) Le CLE, espace de promotion et d’exercice des droits de l’enfant, est né d’une démarche nationale d’observation animée par la fédération nationale des Francas qui a donné lieu à plus de 200 recherches-actions dans 80 départements avec près de 2 000 structures éducatives de loisirs. Le CLE inscrit son action sur un territoire de vie d’enfants et d’adolescents dans une perspective d’éducation globale en remplissant des fonctions sociales, éducatives et culturelles complémentaires aux autres acteurs éducatifs : école, famille, associations… Le CLE a trois missions : une mission d’accueil de tous les enfants et les adolescents sur un territoire, tout particulièrement, durant leur temps libre ; une mission d’activité autour des pratiques de loisir éducatif ; une mission d’orientation en permettant aux enfants et aux adolescents de découvrir et comprendre leurs territoires - du local au monde - dans toutes leurs dimensions, d’y vivre et d’y agir.

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Le CLE est un espace de mobilisation, de participation et d’engagement d’enfants et d’adolescents, de parents, de jeunes comme les animateurs volontaires -, d’animateurs professionnels, d’élus, d’enseignants, de citoyens au service d’une éducation. En cela, il a vocation à contribuer dans des démarches d’éducation populaire à l’épanouissement et à l’émancipation de tous ces acteurs. En Île-de-France Après une phase de sensibilisation des organisateurs locaux affiliés, les Francas en Île-de-France se sont saisis de cette dynamique, pour lancer à leur tour des initiatives pour promouvoir et développer le centre de loisirs éducatifs : En Seine-Saint-Denis, l’association départementale des Francas a animé, avec le soutien du Conseil général, une démarche départementale d’observation sur les pratiques pédagogiques de participation des enfants dans les centres de loisirs de 15 villes du département. Ce travail a donné lieu à une synthèse et des préconisations pour mettre en vie des processus de participation active des enfants dans leurs loisirs. En Val-de-Marne, les Francas ont initié une démarche de labellisation Centre A’ERE*, centre de loisirs éducatif qui mettent au cœur de leur projet l’éducation relative à l’environnement vers le développement durable. Les inégalités sociales et territoriales d’accès aux savoirs, à la culture, aux loisirs sont de plus en plus criantes. Le centre de loisirs éducatif est un outil qui peut constituer une réponse à la réduction de ces inégalités s’il n’est pas cantonné à un simple service à la population mais qu’il s’inscrit dans un service public local d’éducation. Yann Renault, Francas Île-de-France. *Un Centre A’ERE est un centre à l’éducation relative à l’environnement. C’est un clin d’œil aux centres aérés, inventés par les Francas dans les années 1950.


Bibliographie : - « Grandir à loisirs ! La contribution des Francas au développement des centres de loisirs »

- « Le centre de loisirs éducatif, 12 clés, pour grandir à loisirs ! » Ouvrages disponibles auprès des Francas en Île-de-France, 10, rue Tolain, 75980 Paris cedex 20.

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« Ils sont reconnaissants qu’on ne les laisse pas chez eux ». Mathieu Chenon est animateur au centre socioculturel La Soucoupe* situé dans le quartier du BelAir à Saint-Germain-en-Laye (78). Il est animateur référent pour les jeunes du collège Les HautsGrillets exclus pour quelques jours et accueillis à La Soucoupe.

leurs tests d’orientation scolaire. Parfois, certains élèves que l’on connait sont exclus définitivement. On les aide pour leur réinscription dans un autre collège puisque la scolarité est obligatoire jusqu’à 16 ans. Il n’est parfois pas très rassurant pour un adolescent de se présenter dans un nouvel établissement.

Pouvez-vous nous expliquer ce dispositif ?

Quels sont les principaux aspects positifs de votre action ?

Nous sommes situés juste à côté du collège et jusque-là les élèves exclus temporairement (de trois jours à une semaine) n’étaient pas suivis pendant leur exclusion. La principale du collège ainsi que la co-directrice de La Soucoupe ont pensé qu’il serait intéressant de créer une structure d’accueil au sein de notre centre. C’est ce que nous faisons depuis la rentrée scolaire 2009-2010. En début d’année scolaire, nous présentons ce dispositif devant tous les délégués de classe du collège. Ce n’est pas un accueil systématique. La principale du collège propose ce dispositif aux élèves selon leurs profils et nous accueillons en moyenne entre cinq et dix élèves par an. Comment se déroulent ces journées ? Nous leur expliquons l’attitude à adopter en classe, la nécessité de respecter le cadre et celle d’être inscrit dans un parcours scolaire. Nous leur demandons un minimum de travail scolaire et récupérons quotidiennement les devoirs auprès d’un camarade de classe. Nous parlons également beaucoup d’orientation surtout avec les 4ème et 3ème, par exemple en les aidant à construire des « cartes de visite » qui sont des résumés de CV pour aller à la rencontre d’entrepreneurs. Cela peut permettre de préparer l’entrée d’un jeune en apprentissage, de partir deux jours à la recherche d’un patron pour un apprentissage en mécanique automobile par exemple. Nous accueillons, tout au long de l’année, des élèves pour les aider à rédiger leur CV ou à analyser ensemble

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Lorsqu’ils voient qu’on s’occupe d’eux, ces jeunes sont reconnaissants qu’on ne les laisse pas chez eux sans suivi. Un constat positif est que certains sont venus ensuite participer à d’autres actions. Nous avons réussi à les raccrocher sur d’autres activités hors du temps scolaire à La Soucoupe. Le partenariat avec le collège permet de construire, progressivement mais solidement, une confiance entre l’équipe du centre social et les équipes pédagogiques de l’établissement. Un gros travail a été fait avec ces dernières, notamment avec la principale du collège. Enfin, ce travail contribue à rapprocher les parents, l’élève et la principale ou principale-adjointe que nous rencontrons lors du temps précédant l’exclusion ainsi que lors du bilan collectif post-exclusion. C’est un point fondamental de ce dispositif. * Le Centre social La Soucoupe est membre de la Coordination régionale des fédérations de centres sociaux et socioculturels d’Île-de-France. Propos recueillis par Lucie Groussin.


Comment des acteurs de la sphère éducative des MJC abordent la déscolarisation. La communauté éducative est le plus souvent définie comme le rassemblement des élèves et de tous ceux qui dans l’établissement scolaire ou en relation avec lui, participent à la formation des élèves. Les MJC étendent cette notion aux parents, animateurs et éducateurs qui agissent en dehors de l’école dans la formation, mais aussi dans la construction de la personne en tant que citoyen actif. Une communauté éducative est avant tout diverse, altruiste et solidaire. Notre analyse sur la déscolarisation est donc un peu différente du constat purement scolaire de la sortie du jeune de l’enseignement. qu’un jeune sorte provisoirement (exclusion) L eoufaitdéfinitivement (abandon) du système scolaire

ne signifie pas obligatoirement qu’il quitte la sphère éducative. Des conventions sont, par exemple, passées entre des MJC et des collèges pour accueillir des jeunes en exclusion temporaire. Dans le même ordre d’idées, on a constaté que des jeunes sortant du système scolaire restent présents au sein d’une MJC et reviennent en formation quand ils souhaitent passer d’une pratique de loisirs à une pratique professionnelle. Les musiques actuelles en sont un très bon exemple. Des jeunes reviennent en formation dans les domaines du son, de la lumière ou de l’événementiel

après avoir quitté le milieu scolaire, et poursuivent leur parcours bénévole ou en insertion dans une MJC par l’organisation de concerts. Une instruction commune valorisée La prévention de la déscolarisation nécessite une certaine vigilance dans la mise en œuvre du projet associatif des MJC, en particulier sur les points suivants : - l’accompagnement à la scolarité doit laisser une très grande place à sa partie culturelle dans la mesure où elle anticipe une éventuelle déscolarisation sans sortie totale de la sphère éducative par le maintien d’une activité dans le cadre de la MJC. - Les parcours associatifs, à la fois exigeants dans leur cadre et souples dans le niveau de leur contenu, sont proposés aux jeunes dans une stratégie de préprofessionnalisation qui les amène à un retour vers des formations en alternance. - L’action des MJC propose aux jeunes des pédagogies complémentaires à celles développées dans l’enseignement : pédagogie institutionnelle, différenciée, de projet, du détour... On s’approche ainsi de l’objectif d’une instruction commune valorisée, étendue, complétée, consolidée et diversifiée par l’éducation populaire. Cette vision de la sphère éducative qui se concrétise au sein des MJC est aussi défendue par de nombreux pédagogues, dont Philippe Meirieu – chercheur et écrivain, spécialiste des sciences de l’éducation et de la pédagogie. Elle vise non plus à conditionner, mais à émanciper la jeunesse, à prévenir la déscolarisation plutôt qu’à essayer de l’empêcher par la contrainte, à la ramener à un instant qui ne doit pas être une fatalité. Claude Bourquard, Les MJC en Île-de-France, fédération régionale.

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L’auberge de la parole. En janvier 2009, la Maison des jeunes et de la culture - Centre social de Ris-Orangis (91) a lancé une Université populaire dans laquelle plusieurs parents d’élèves du collège se sont investis et ont commencé à réfléchir sur le thème de l’éducation et des phénomènes de violence au sein du collège. Le projet « auberge de la parole » est né du partenariat entre la MJC de Ris-Orangis et l’association des parents d’élèves du collège Albert Camus. initial de 2009 était de construire des groupes L edeprojet recherches-actions autour des problématiques

locales avec des habitants. À partir de ces préoccupations se sont tenues des rencontres entre les habitants et des experts pour réfléchir ensemble à des solutions. À cette occasion, un des problèmes soulevés par des parents d’élèves a été celui de la violence scolaire. Riche de son expérience de travail auprès des jeunes de Ris-Orangis, la MJC - Centre social a proposé la mise en place d’un groupe de paroles au sein du collège pour échanger avec les jeunes sur les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien. Les adolescents ont une place et un rôle à jouer dans la cité, ce sont les futurs citoyens de demain et il paraît donc essentiel de les former à une pratique citoyenne, en adéquation avec les valeurs du pays dans lequel ils vivent. Et si la MJC pouvait être le lieu et la méthode pour dire ce qu’on a envie de dire ? Le lieu pour discuter de ce qui nous concerne ? Le lieu pour prendre ce droit qui nous est offert par les textes mêmes qui fondent les MJC ? La MJC peut devenir le lieu pour imaginer ensemble des changements dans son environnement proche et dans la société.

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Construire un groupe de parole Le projet consiste en l’animation d’un groupe de parole réunissant douze élèves du Collège Albert Camus de RisOrangis, allant de la 4ème à la 3ème. Ce groupe est constitué avec des adolescents du collège repérés comme ayant un problème de violence. Une des explications à cette violence est leur incompréhension du système scolaire. Un travail de décryptage du règlement intérieur a donc été élaboré entre les deux animatrices de la MJC, la conseillère principale d’éducation et les jeunes. Ce groupe aborde tous les sujets liés à la vie scolaire dans l’objectif de comprendre le système scolaire et d’avoir la possibilité de le transformer. Le groupe se réunit à raison de deux séances hebdomadaires dans une salle de la MJC. Des propositions de modification du règlement intérieur peuvent être portées par ces jeunes au sein du collège. Grâce à ce projet, les autres collégiens peuvent changer de regard sur ces élèves.


À la découverte du système scolaire suédois.

Photos : à gauche et ci-dessus : le voyage des jeunes Rissois à la découverte du système scolaire suédois.

Un projet de permanence administrative Lors de l’organisation d’un voyage scolaire, les animatrices se sont rendu compte que plusieurs collégiens, fautes de papiers d’identité à jour, n’ont pas pu se rendre à l’étranger. Certains parents, à cause de problèmes de maîtrise de la langue ou de disponibilités, n’ont pas eu la possibilité de se rendre en mairie pour effectuer les formalités. Il a donc été décidé de monter une permanence administrative qui sera utile aux 700 élèves du collège. Depuis que l’« auberge de la parole » est née, les jeunes suivis durant leur scolarité n’ont plus rencontré de problème de conseils de disciplines ou d’avertissements. Une vraie dynamique a été mise en place ! À la rentrée scolaire 2012, la MJC entend relancer cette expérience avec un nouveau groupe de travail pour que cette action contre la violence scolaire s’inscrive dans la durée. Carole Berrebi, MJC-Centre social Ris-Orangis, Les MJC en Île-de-de-France, fédération régionale, Coordination régionale des fédérations de centres sociaux et socioculturels d’Île-de-France.

Un voyage d’étude a été organisé en février 2012 avec le groupe de jeunes inscrits dans le projet « l’auberge de la parole ». L’objectif était d’aller observer et étudier le système scolaire suédois et de rencontrer un groupe de jeunes suédois du même âge pratiquant le théâtre au « K » Kulturskollan (Maison de la Culture) de Jarfalla, en Suède. Pour les trois-quarts des jeunes, il s’agissait du premier voyage à l’étranger. Une visite d’un lycée d’enseignement professionnel a été organisée. Les Rissois ont pu assister et participer à un cours de Français d’une classe de seconde, prendre le déjeuner dans la cantine de l’établissement et poser diverses questions lors d’un échange avec les lycéens suédois dans le foyer de l’établissement. Dans un second temps, ils sont allés dans une classe de 3ème, passer la matinée et voir comment s’organisaient les cours au collège. L’école suédoise a une mission démocratique. Il s’agit de donner aux élèves une meilleure compréhension de la démocratie et de promouvoir les valeurs fondamentales de l’éducation, aussi bien que de contribuer à faire des élèves des citoyens démocratiques. Il s’agit aussi de promouvoir le droit des élèves – et des personnels scolaires – à exercer leur influence sur la vie quotidienne de l’école, depuis les matières enseignées en classe jusqu’à la « vie scolaire ». Ainsi, les jeunes Français ont pu comparer les deux systèmes scolaires en vivant plusieurs journées au sein des établissements. À l’issue de chaque journée, des films ont été réalisés pour recueillir les observations des jeunes de « auberge de la parole » à ce sujet. La rencontre avec les jeunes du « K » a pu se faire autour d’ateliers théâtre en commun menés par les deux équipes française et suédoise. L’art est un moyen de communication, quand la langue est une barrière. Ces films vont être diffusés au collège pour que ces échanges culturels européens enrichissent tous les élèves du collège Albert Camus.

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L’atelier-relais : un réel laboratoire pédagogique. Dans le cadre de sa réflexion autour des problématiques liées au décrochage scolaire, à la démotivation, ou encore à la désocialisation, la Ligue de l’enseignement aux côtés d’autres associations d’éducation populaire, s’est engagée depuis 2002 dans le dispositif atelier-relais en partenariat avec l’Éducation nationale. la Ligue porte environ 70 ateliers-relais N ationalement, répartis sur une quarantaine de départements. Si on

étend, aux autres associations d’éducation populaire, on dénombre une centaine d’ateliers-relais en activité sur le territoire français. L’éducation populaire, en tant que courant d’idées, milite pour une diffusion de la connaissance au plus grand nombre afin de permettre à chacun de s’épanouir et de trouver la place de citoyen qui lui revient. C’est une éducation qui reconnaît à chacun la volonté et la capacité de progresser et de se développer, de faire ses choix en connaissance de cause, à tous les âges de la vie. Un dispositif d’aide aux collégiens L’atelier-relais est un dispositif d’aide aux collégiens qui se trouvent dans une situation de rejet de l’institution et/ ou en voie de déscolarisation. Les jeunes sont accueillis dans des locaux, en dehors du collège, pendant une période de quatre à dix semaines. Cette prise en charge sur temps scolaire, concourant à la remobilisation autour des apprentissages, vise le retour des jeunes dans leur classe d’origine. Pour ce faire, une équipe éducative composée d’intervenants locaux de tous horizons (Éducation nationale, associations, mairie…) travaille de concert autour d’un projet pédagogique dont un des objectifs premiers est la remobilisation autour des savoirs et de la scolarité. En effet, cet accompagnement a pour objet de réinsérer durablement ces élèves dans un parcours de formation en les engageant simultanément dans des processus de resocialisation et de réinvestissement dans les apprentissages scolaires ou non. La durée de

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prise en charge de ces jeunes étant courte (de 4 à 10 semaines selon les endroits), ce dispositif doit s’ancrer dans une dynamique territoriale forte, afin de permettre à ces jeunes de trouver des relais solides pendant leur passage à l’atelier et qui leur serviront de ressources durables par la suite. Le partenariat noué autour de cette action se matérialise au quotidien par un travail en équipe pluri-professionnelle. De fait, l’atelier-relais constitue un réel laboratoire pédagogique dont les pratiques peuvent être transposables au sein des collèges à moyen terme. Ainsi, le croisement des regards de tous ces professionnels - enseignants, acteurs associatifs du monde de l’animation, intervenants artistiques sportifs et culturels - permet de construire des pratiques pédagogiques dans une logique de co-éducation. Ainsi, des questions prégnantes comme celles de l’évaluation ou de la sanction sont travaillées en équipe, discutées et réfléchies afin d’atteindre un objectif affiché de cohérence des pratiques. Un bilan positif Depuis sa création, il y a dix ans, ce dispositif, pourtant loin de la perfection, a de bons résultats. Pour les élèves accueillis, la remotivation et le « mieux-être » au collège sont les premiers effets d’un raccrochage réussi après une session en atelier-relais. Même s’il est difficile de juger de l’impact d’un tel dispositif à l’échelle d’une scolarité de plusieurs années, il n’en demeure pas moins que certains indicateurs, comme la baisse significative des exclusions après un passage en atelier-relais, restent intéressants à observer. De plus, nous avons pu constater que la quasi-totalité des élèves accueillis en atelier-relais au collège iront jusqu’à la fin de leur scolarité obligatoire. Les conditions pour une session réussie à l’atelier-relais, sont maintenant connues. Cela passe d’abord par l’adhésion de l’élève et de sa famille, qui reste indispensable au bon fonctionnement du dispositif. Il y a également quelques conditions plus matérielles maisqui restent essentielles. Le territoire de recrutement des élèves doit être de petite taille (moins de 10 collèges


Une sortie dans le cadre d’un atelier-relais avec des collégiens du Val d’Oise.

de rattachement) pour permettre de garder le lien entre le dispositif et l’établissement d’origine des collégiens accueillis. Des temps de réunion hebdomadaires doivent être programmés afin que les équipes puissent réfléchir et confronter leurs points de vue, tant par rapport aux situations d’élèves, qu’au regard des projets menés. Ceci a permis, à certains endroits, un gros travail sur la construction et l’amélioration des livrets de compétences. Enfin, concernant le public lui-même, il est indispensable d’avoir une mixité des publics tant sur l’équilibre entre les sexes que sur les niveaux de difficulté de chacun. De la même manière, le taux d’encadrement doit rester raisonnable (groupe de 6 à 8 élèves maximum), au regard

de la prise en charge quasi-individuelle des élèves. Ainsi, toutes ces conditions demandent une vraie démarche volontariste de la part des différents partenaires. Après dix ans de fonctionnement, la confiance semble s’être installée sur la qualité du travail développé dans ces dispositifs. Cela permet d’être optimiste sur l’avenir de ce projet qui reste une occasion de travail inédite entre Éducation nationale et éducation populaire, permettant de s’enrichir des pratiques des uns et des autres. Farid Benlazar, Ligue de l’enseignement Île-de-France.

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Les CEMÉA, l’élan formation. Ces quelques mots « l’élan formation » attachés à notre sigle ne sont pas qu’un simple slogan. Les CEMÉA, depuis leur origine ont mis la formation au cœur de leur action pour promouvoir au quotidien et auprès d’acteurs éducatifs différents les principes de l’éducation populaire, les idées de l’éducation nouvelle et le projet de transformation sociale, d’émancipation des personnes. stage a eu lieu en mars 1937, il deviendra, L ea premier posteriori, l’événement symbolique fondateur

des CEMÉA. À cette époque, le notion de stage de formation n’existait pas encore dans le domaine éducatif et est mettre au crédit des CEMÉA. Cette innovation va provoquer un renversement complet de l’idée de rapport au savoir. Ce premier stage s’est déroulé en internat et, petite révolution pour l’époque, était mixte.

Les idées développées par Gisèle De Failly - une de nos fondatrices - nous les portons depuis nous pouvons les résumer ici par un principe d’éducabilité porté par chacun et auquel chacun a droit tout au long de sa vie.

Pour les CEMÉA, la formation doit être au plus proche du terrain d’action, dans une dialectique permanente entre la théorie et la pratique. Nos méthodes d’éducation active favorisent ainsi le fait que chaque stagiaire soit acteur de sa formation, c’est à dire qu’il l’investisse en repérant ses besoins, en définissant ses attentes. Ce processus est inévitablement inscrit dans la durée. Le stagiaire se construit et le formateur l’accompagne dans cette construction, dans son évolution : on parle alors d’apprentissage. Les méthodes de formation sont déterminantes : elles doivent faire place au travail d’équipe, à la coopération, à l’évaluation autocritique et doivent favoriser la participation des stagiaires, la conduite de projets. Former c’est d’abord se déformer !... pour mieux se reformer. Il s’agit donc d’accepter, dans un premier temps, que nous ne sommes pas parfaits, que l’on a besoin d’être formé. Le reconnaître n’est pas chose facile, mais il s’agit bien d’une première étape pour entrer en formation. Ayant choisi le terrain de la formation « d’éducateurs », les CEMÉA attachent de l’importance à la réflexion sur : la collectivité ; la formation avec et par ses pairs ; une pratique exigeante du travail d’équipe ; l’expression de chacun : la place de la parole, en confiance ; l’ouverture culturelle et l’accession pour tous et par tous à la culture. Notre posture permanente est de vouloir que chaque acteur éducatif, quels que soient ses fonctions, sa mission et son terrain d’action, soit formé. Tous les domaines et tous les moments sont des champs et des moments d’éducation : école, crèche, accueil collectif de mineurs, famille...

Formation BAFA aux CEMÉA d’Argenteuil (92).

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Intervenir auprès     d’un public d’enfants, d’adolescents n’est pas anodin ; les adultes concernés doivent s’y préparer mentalement, physiquement et acquérir des notions fondamentales à la réussite de leur engagement, de leur métier. C’est dans cette optique que les CEMÉA, dénonçant le manque de formation pédagogique des personnels de l’Éducation nationale, induit par la dernière réforme, ont souhaité s’engager dans cette démarche de formation. La formation des personnels de l’Éducation nationale : un enjeu pour les CEMÉA... et pour la société Les CEMÉA interviennent sur trois types de formation continue, essentiellement dans le second degré : des stages touchant à des compétences transversales et ouverts à tous les personnels : accompagnement de l’élève, éducation à l’égalité filles/garçons, gestion de conflit, etc. ; des stages destinés à des catégories de personnels dont les missions sont liées à la vie de l’élève (formation des assistants pédagogiques, des CPE sur le travail d’équipe ou la vie citoyenne dans l’établissement) ; des stages sur site selon les demandes d’établissements scolaires précis. Il s’agit d’un véritable positionnement pour notre association : nous souhaitons des personnels formés auprès des élèves. Nous sommes force de proposition pour contribuer à leur formation. Nous ne pouvons pas nous contenter de ne pas nous satisfaire de l’état de

l’école actuellement ; nous nous donnons des moyens pour y agir directement. En effet, de part leur histoire, les CEMÉA sont tout à fait légitimes pour encadrer ce type de formation. Nous sommes un mouvement complémentaire de l’école qui porte un projet pour l’école où l’élève et les savoirs sont mis en avant. Nous avons toute légitimité, et notamment en raison des réformes actuelles ou à venir du système éducatif, à faire entendre nos différences, à continuer à interroger la place des élèves, les pédagogies mises à l’œuvre, à lutter contre les inégalités éducatives selon les territoires. Par ce biais, nous portons nos idées et nos valeurs au sein même du système éducatif. La formation des personnels en est, comme dans les autres champs des CEMÉA), un formidable vecteur en adéquation avec ce que nous défendons en termes de transformation des personnes. Stéphane ARCHIMBAUD, CEMÉA Île-de-France.

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Accompagner les parents dans leur rôle éducatif. L’association des avocats et des juristes francoberbères (AJFB) a, dès sa création au Barreau de Paris, en 1991, mobilisé ses avocats membres dans deux directions : la mise en place de permanences d’accès au droit et des interventions à caractère pédagogique et préventif en milieu scolaire.

L

’action menée par des professionnels du droit contribue à la démocratisation du droit, à permettre au plus grand nombre l’accès, la connaissance ou la compréhension du droit dans ses acceptions et ses dimensions multiples. Une appréhension du droit comme fondateur de notre pacte républicain contribue au développement du sentiment d’appartenance à notre pays et à sa cohésion. L’AJFB a identifié de nouveaux besoins à l’école dont celui de l’accompagnement des parents dans leur rôle éducatif. Des parents peuvent se sentir démunis et impuissants face à des interrogations et certains des comportements de leurs enfants. Ces situations apparaissent à différentes étapes du développement de l’enfant et peuvent se traduire par des conflits, des difficultés ou des échecs scolaires. Certains parents cumulent des difficultés sociales et de compréhension des lois et des règles d’organisation et de fonctionnement de notre société. Ceux issus de l’immigration peuvent également être confrontés à la barrière de la langue française. Ils peuvent alors devenir dépendants de leurs enfants dans les relations à l’école et aux autres institutions. Comment tenir son rôle auprès de ses enfants dans une institution telle que l’école ? Dans les établissements scolaires où l’AJFB intervient, les parents bénéficient, tout au long de l’année, d’un véritable accueil et d’une formation soutenue comportant plusieurs volets : l’initiation à la loi, l’institution judiciaire, le règlement intérieur, l’autorité parentale ou encore le droit des mineurs (protection et répression). L’action menée par l’AJFB a pour objectif de les conforter dans leurs compétences et leur autorité parentales et de leur faire prendre conscience de leurs droits et

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de leurs devoirs. L’expérience a montré que dans les établissements scolaires où les équipes dirigeantes manifestent une volonté de redonner une place forte aux parents d’élèves, un travail sur la durée finit par porter ses fruits. À titre d’exemple, des actions menées dans des établissements, dont l’image était négative, désertés par les parents et donc dépourvus d’association de parents d’élèves, ont permis, après cinq années de travail avec l’AJFB, le retour progressif de parents dont on disait qu’ils étaient démissionnaires. Dans ces établissements, ils ont relancé de nouvelles associations de parents d’élèves et participent aujourd’hui aux différentes instances. Samia Ould Amara, Association des avocats et juristes franco-berbères.

Séminaire EPE-Îdf « Prévention du harcèlement à l’école » Faisant le constat que près de 1000 jeunes se suicident chaque année en France et que près d’un jeune sur cinq est concerné par un phénomène de bouc-émissaire dans les collèges et lycées (en tant que victime ou auteur), l’École des parents et des éducateurs d’Île-de-France, la Ligue française pour la santé mentale et le Comité de pilotage contre le harcèlement à l’école, ont décidé d’organiser un séminaire consacré à la prévention du harcèlement à l’école. Cinq journées ont été organisées durant l’année scolaire 2011/2012 : Bilan des Assises nationales sur le harcèlement à l’école ; la prise en compte des victimes ; les solutions en prévention et en situation de crise ; la médiation entre pairs ; comment un groupe peut-il bien fonctionner, accepter la différence et devenir créatif ? http://www.epe-idf-formation.com/seminaire-prevention-duharcelement-a-lecole


Un pacte contre l’échec scolaire. L’association de la fondation étudiante pour la ville (AFEV) a lancé le 12 janvier 2012 un pacte national de lutte contre l’échec scolaire. Elle a soumis cet appel à tous les candidat-e-s à l’élection présidentielle pour qu’un débat de fond s’ouvre sur le modèle éducatif et que la lutte contre l’échec scolaire devienne enfin une priorité des politiques éducatives. La France, 5ème puissance mondiale, connaît un échec scolaire massif qui se traduit par la sortie du système éducatif de 150 000 jeunes sans diplôme chaque année. Fortement inégalitaire, cet échec scolaire menace la cohésion sociale, à une époque où la réussite scolaire est un sésame de plus en plus indispensable à l’insertion sociale et professionnelle. […] Notre système scolaire est en effet caractérisé par une forte pression sur les élèves et leurs parents et par une compétition qui créent de la souffrance et nuisent à son efficacité. Il faut passer d’un système de « sélection » à un modèle de « promotion », d’où chaque enfant, quelles que soient ses difficultés et ses appétences, pourra sortir avec la qualification et les compétences nécessaires à son futur parcours, avec un rapport confiant aux apprentissages et une image positive de soi. […] Lire le texte intégral sur : http://www.pacteechecscolaire.org

Structures signataires : Les Cahiers Pédagogiques / La FCPE / Léo Lagrange / La Ligue de l’Enseignement / Le Sgen Cfdt / Le Se Unsa / Le SN Uipp

Un observatoire universitaire sur l’éducation et la prévention. L’Observatoire universitaire international de l’éducation et de la prévention (OUIEP) est ouvert depuis septembre 2011 au sein de l’Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne. Ce nouvel observatoire est dédié à l’étude de la prévention comme moyen de transformation des conditions d’éducation et comme outil de traitement d’un certain nombre de problèmes sociaux dans les champs de l’école, de l’intervention sociale et de la protection de l’enfance, sur certains des terrains les plus sensibles. Il est directement impliqué dans le conseil et l’évaluation de politiques publiques et dans la formation de haut niveau des personnels et des acteurs en lien avec ces terrains. De manière consciente, il entend contribuer à faire de fragilités territoriales connues une force d’expérimentation où s’allient la recherche et l’action. Lire l’interview de Benjamin Moignard, membre de l’équipe de recherches à l’OUIEP, Maître de conférences en sociologie, dans L’éduc’ pop’ en Île-de-France n°4 (novembre 2009) « Jeunesse(s) : les associations d’éduction populaire contribuent au débat. » http://www.crajep-idf.org/fichiers/diffj4brochure_educpop_ ARDEVA2009.pdf

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Une ligne téléphonique de soutien à la parentalité.

L’École des parents et des éducateurs d’Île-deFrance (EPE-ÎDF) est une association qui a pour but d’aider les membres du groupe familial à développer leurs capacités personnelles, leurs facultés d’analyse, leurs connaissances afin que chacun puisse devenir acteur de sa propre vie en prenant compte la dynamique des générations ainsi que le contexte culturel, économique et social dans lequel ces membres évoluent. des parents et des éducateurs d’Île-de-France L ’École (EPE-ÎDF) gère un service d’écoute, d’information et d’orientation au téléphone et sur Internet qui regroupe 10 lignes téléphoniques : 7 lignes de soutien à la parentalité, Stop harcèlement à l’école (0 808 80 70 10),

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Fil santé jeunes (32 24) et Jeunes violence écoute (0 808 807 700). En 2011, l’EPE-ÎDF a traité 228 854 appels pour l’ensemble de ces lignes. Parmi ses lignes, l’EPE-ÎDF propose un soutien à la parentalité via Inter Service Parents. Une équipe pluridisciplinaire (psychologues, juristes, conseillers scolaires et sociaux) se relaie pour répondre aux questions des parents : « Comment communiquer avec mon adolescent ? », « Ses résultats scolaires m’inquiètent. Que faire ? » « Où puis-je m’adresser près de chez moi ? » De façon anonyme, le temps d’un appel, l’équipe est là pour informer, accompagner le parent dans sa réflexion, l’aider à trouver des réponses ou des adresses près de chez lui.


année scolaire, tu es en train de gâcher ta vie ». Carole Wiard propose de nouvelles pistes aux parents qui ont parfois l’impression de « tourner en rond ». « Lorsqu’ils sont régulièrement convoqués par les équipes pédagogiques pour des problèmes de comportements ou d’absentéisme de leur enfant, certains parents intériorisent une image négative de leur enfant. » Or, il est rare qu’un jeune n’ait aucun centre intérêt. Le travail des écoutants consiste alors à faire prendre conscience aux parents des différentes potentialités de leur enfant. L’anonymat permet une libération de la parole puisque la pression sociale des tiers est forte sur les parents d’un jeune en échec scolaire.

L’EPE-ÎDF existe depuis 1929 et la ligne Inter Service Parents depuis 1971. C’est la première ligne de téléphonie sociale professionnelle qui a été mise en place en France. Certains parents appellent aujourd’hui sur les conseils de leurs propres parents ou grandsparents. Les écoutants constatent depuis quelques années un changement du contexte économique et social. La précarité économique vient souvent s’ajouter à des difficultés liées à la parentalité. Il n’y a pas plus de violences aujourd’hui mais le regard de la société a changé et certains sujets devenus moins tabous, comme les violences conjugales ou l’inceste, sont plus souvent évoqués. Carole Wiard, conseillère scolaire, écoutante sur Inter Service Parents Carole Wiard travaille sur la plate-forme téléphonique depuis 11 ans. Elle entend souvent des parents lui dire « Mon enfant ne veut rien faire ». Elle est là pour aider les parents à prendre du recul. « Notre travail, c’est de permettre aux parents d’envisager la situation sous un autre angle ». L’échec scolaire est une source d’inquiétude importante pour les parents qui peuvent parfois en arriver à dire à leur enfant : « Tu rates une

« Le problème de scolarité cristallise le problème d’un jeune ». 40 % des appels relèvent de problèmes psychologiques parmi lesquels 66 % portent sur les rapports enfants/parents. Explorer toutes les facettes de la vie d’un adolescent peut permettre d’identifier une situation de mal-être. « Quand un jeune ne veut pas apprendre, ne veut rien faire, abandonne son sport, ne va plus voir ses copains… Cela peut être symptomatique d’une dépression ». Carole Wiard oriente alors les parents vers une structure de proximité comme un point accueil écoute jeune, une maison des adolescents ou un centre médico-psychologique… Par exemple, elle a récemment orienté un jeune de 17 ans absent de l’école depuis 5 mois vers La Corde raide, une association parisienne qui propose des ateliers thérapeutiques de remotivation. L’EPE-ÎDF dispose d’une base de données d’environ 20 000 adresses dont 4 000 structures sur le territoire francilien dans les domaines de l’orientation scolaire, la santé physique, psychique, l’insertion sociale et professionnelle, le sanitaire et social… Lucie Groussin, CRAJEP Île-de-France.

Inter Services parents – 01 44 93 44 93 – Ouvert du lundi au vendredi de 9h à 18h (sauf le jeudi matin). http://www.epe-idf.com

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Une ouverture vers les métiers d’art. L’association REMPART Île-de-France propose, dans le cadre du programme C’MAdiversité initié par l’Institut national des métiers d’art, de faire connaître des métiers d’art à des publics dits éloignés. Des jeunes de l’Unité éducative d’activités de jour (UEAJ) à Malakoff (92) ont ainsi pu s’initier pendant plusieurs journées à la taille de pierre et à la mosaïque. est un projet porté par la mission Justice C’MAdiversité du ministère de la Culture qui a pour but d’aller

à la rencontre de différents publics afin d’ouvrir des perspectives culturelles et de constituer un tremplin pour favoriser un projet d’insertion sociale ou professionnelle. Avant la réalisation du projet, des journées d’information et des forums ont été organisés pour construire des passerelles entre les professionnels éducatifs et des artisans. Des visites ont été organisées pour mieux connaître les métiers d’art au Musée de l’Histoire de Saint-Denis ainsi qu’au Musée des Arts décoratifs. L’Unité éducative d’activités de jour de Malakoff, service de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) des Hauts-de-Seine, s’inscrit dans ce dispositif. Cette structure accueille des jeunes de 16 à 20 ans orientés par les Unités éducatives de la PJJ ou les missions locales. À partir d’une prise en charge individualisée, elle accompagne ces jeunes dans la construction de leur projet d’orientation et de formation en dispensant des activités scolaires, culturelles, sportives et des mises en situations professionnelles. C’est dans le nouveau restaurant d’insertion, qui permet d’initier les jeunes à la cuisine et au service en salle, que l’association REMPART ÎdF intervient. Dans une perspective d’expression artistique et de mise en valeur

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de leur lieu de formation les jeunes vont agrémenter le jardin du restaurant d’un ensemble de tables et de bancs en pierres ornés de mosaïque. La transmission du savoir-faire Dans le jardin, plusieurs blocs de pierre sont dressés et trois jeunes sont concentrés sur leurs ouvrages. Le travail sur la taille de pierre et la mosaïque va permettre de réaliser une table de jardin avec des motifs végétaux dans le style Art nouveau. Un chantier plutôt audacieux pour des jeunes qui n’ont encore jamais touché à la taille de pierre ! Mais Pierre Muller, l’artisan tailleur de pierre, est là pour leur apprendre comment tailler avec des ciseaux à dents ou droits, des taillants pointus. Il donne des conseils, montre comment dégrossir la surface de cette pierre tendre. Pour l’équipe éducative, cette expérience permet aux jeunes de découvrir des métiers d’arts, de partager avec les artisans la passion de leur métier, d’observer puis de se confronter à des techniques professionnelles, d’être fiers de leurs productions. La régularité des ateliers permet de travailler aussi la ponctualité, la motivation, la


Pierre Muller, tailleur de pierre Tailleur de pierre par goût et par formation, attaché à la sauvegarde de patrimoine et à la transmission des savoir-faire, Pierre Muller est tailleur de pierre depuis une trentaine d’années. « C’est pour nous un devoir de transmettre, de faire passer le métier. » Pendant dix ans, il a travaillé sur de nombreux chantiers de monuments historiques à Paris et en Île-de-France (Louvre, Invalides, place des Vosges). Dans les années 1990, il a été artisan dans le Gers où il a développé son savoir-faire de taille de pierre, ses connaissances en maçonnerie, architecture et décoration. Après avoir encadré jusqu’à dix salariés, il a décidé aujourd’hui de faire découvrir sa passion à différents publics. Pour l’association REMPART ÎdF, il mène deux types d’action. L’été, il s’occupe d’un chantier de bénévoles et œuvre à la restauration d’un vieux lavoir de 1806 à Villiers-Adam (Val-d’Oise). Ce chantier de maçonnerie rassemble des jeunes européens entre 18 et 20 ans.

persévérance et l’implication dans un tel projet. Pour des personnes aussi jeunes « il est parfois difficile de conceptualiser, la réalité d’une mise en situation professionnelle. Ce type de rencontre leur permet à la fois une découverte culturelle et une ouverture vers l’extérieur » explique Anita REMAUD responsable de l’UEAJ. Solène Léglise, artisan d’art mosaïste et Pierre Muller, tailleur de pierre savourent cette transmission du savoir-faire. Pour les jeunes, c’est la découverte de nouveaux gestes professionnels et la fierté de pouvoir accomplir une œuvre d’art. Lucie Groussin, CRAJEP Île-de-France.

La seconde action consiste à faire découvrir son métier aux nouvelles générations comme sur ce projet à Malakoff. « C’est une activité physique qui demande de la dextérité, où l’on manie de vrais outils » explique Pierre. Elle développe aussi des notions de géométrie et d’architecture. Ces jeunes n’ont jamais touché la pierre. « C’est assez osé mais on va essayer de le faire. Cet artisanat permet de « lire chez le jeune la résistance mentale et physique, le respect des règles, de la matière, des outils » indique l’artisan. Dans la taille de pierre, à chaque geste correspond le bon outil. Et pour mieux ciseler il faut savoir écouter la pierre. « On entend chanter la pierre, elle nous parle. » Pierre Muller, par son charisme et son autorité, a réussi à captiver plus particulièrement l’intérêt d’un des jeunes garçons pour la taille de pierre. « Cela lui plaît parce que c’est sa pierre. » Devant son enthousiasme, Pierre Muller envisage de le prendre en stage dans son entreprise. Peut-être une future vocation de tailleur de pierre ?

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L’accompagnement des parcours tout au long de la vie, dans les champs scientifiques et techniques. Le réseau des Petits Débrouillards est un mouvement de jeunesse émancipateur qui propose aux jeunes des parcours socio-scientifiques diversifiés pour développer leur capacité de questionnement et soutenir leur action sociale et citoyenne. En cela notre approche éducative répond pour une grande part aux compétences clefs du cadre européen pour l’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie. pour ne pas être abstraites, doivent être C elles-ci, mises en relation avec l’évolution des parcours

des jeunes. Or, on le sait, ils sont loin d’être linéaires et peuvent être vécus tout autant comme une occasion de se nourrir de multiples expériences, que comme une injonction à tout remettre en cause en permanence (ses

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acquis, ses relations affectives, ses engagements...). Notre société demande ainsi à la jeunesse des qualités qui peuvent se révéler antinomiques voire paradoxales : être à la fois un agent économique concurrentiel, responsable de son devenir, et un citoyen critique et solidaire. La frontière entre les deux est ténue et l’équilibre parfois fragile. On risque alors de voir se développer des comportements toujours plus individualistes au détriment de comportements civiques, solidaires et coopératifs. Pour soutenir ceux-ci, on ne peut travailler uniquement avec les personnes. Il nous faut agir également au niveau des institutions, afin d’ancrer notre démarche dans le concret de leur fonctionnement. Sur ce versant


Parmi elles, citons la conception majoritaire de l’éducation qui ne nous semble pas en mesure actuellement de développer des capacités pourtant essentielles : celle de penser la complexité et d’agir collectivement dans un monde incertain. Ceci est en partie lié au fonctionnement même de l’institution scolaire, qui déploie un enseignement encore très disciplinaire et programmatique. Or si on peut éventuellement admettre que l’école soit le lieu privilégié des connaissances disciplinaires, on ne peut réduire l’éducation à cela. Il nous faut donc remodeler les coopérations éducatives afin que les jeunesses osent questionner le monde qui les entoure et inventer leur avenir, sans le confier à un système technoscientifique censé trouver une réponse à tous les problèmes actuels (santé, alimentation, eau, énergies...). Un tel enjeu ne peut reposer sur les individus seuls. C’est pourquoi, notre réseau a construit avec ses partenaires différents programmes éducatifs et de recherche. Marie Bodeux, les Petits Débrouillards Île-de-France. Vivien Braccini, les Petits Débrouillards Alsace.

Photos : à gauche, stand à la découverte du système solaire à « Paris plages » en partenariat avec la Cité des Sciences. Ci-dessous, une animation à la Cité débrouillarde à Valenton.

« UniverCité » Le programme « UniverCité » ouvre les portes de l’Université aux jeunes de 8 à 16 ans, pour leur permettre de dialoguer avec les chercheurs à propos de questions qui leur tiennent à cœur. D’un point de vue institutionnel, il s’agit de (re) positionner l’université comme un acteur clé d’une éducation scientifique et citoyenne tout au long de la vie. Ce programme comporte plusieurs volets : des ateliers scientifiques ayant pour objectif de faire émerger les questions à caractère scientifique à partir des pré-occupations quotidiennes des jeunes ; la formation d’Ambassadeurs Universitaires (réseau d’étudiants de toutes les disciplines) à la médiation scientifique ; une mise en relation des jeunes et des chercheurs avec organisation de conférences, visites de laboratoires ; un parcours de découverte des métiers scientifiques et techniques.

« Quartier de la Connaissance » Le programme « Quartier de la Connaissance » vise à instituer des collaborations entre laboratoires de recherche et habitants, en particulier les jeunes, afin de soutenir les initiatives à caractère socioscientifiques et socio-économiques. Il s’appuie notamment sur la formation d’un réseau de jeunes investis sur ces quartiers (25-30 ans) ; un dispositif de formation/responsabilisation progressive des jeunes (à partir de 12/13 ans) ; la création de lieux comme point d’appui des actions ; la mise en réseau des acteurs entre eux et des acteurs avec les laboratoires de recherche en fonction des problématiques émergentes. http://www.lespetitsdebrouillards-idf.org

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« Je sais pas, je vais regarder sur Internet ». Le 29 mars 2012, l’Union régionale des foyers et services pour jeunes travailleurs d’Île-de-France (URFJT IDF) et le foyer de jeunes travailleurs de Mantes Val-de-Seine ont coproduit la journée « Culturenum », qui portait sur le numérique dans les apprentissages. XVIII siècle, Voltaire se plaignait de ne plus A upouvoir se concentrer sur son travail à cause d’un ème

« progrès » : la distribution à domicile du courrier par les services postaux. Depuis une dizaine d’années, nous vivons une nouvelle accélération dans les modes de communication, qui modifie nos façons de vivre… et d’apprendre. Si les Lumières ont cru que le progrès pouvait « sauver le monde », on sait aujourd’hui que les choses ne sont pas si simples. On en vient même, tel Magritte

qui disait que « Le progrès est une idée saugrenue », à remettre en cause l’idée que la croissance serait le meilleur moyen d’assurer l’amélioration de la condition humaine. L’éducation et les apprentissages se situent sans cesse à cheval entre deux objectifs : d’une part celui de donner les clefs, de rendre libre et indépendant, et d’autre part celui de « normaliser », de faire rentrer dans le moule. Ce second objectif est celui qui domine depuis que le chômage est une menace qui pèse sur chacun d’entre nous : la formation, qu’elle soit initiale ou continue, vise avant tout à développer l’« employabilité » des individus. Les formations d’ordre général, qui visent à donner à chacun les moyens de se positionner dans le monde, sont de moins en moins considérées comme primordiales. C’est pourtant le rôle de l’éducation populaire. Comme tout objet technique, Internet est ce que, à la suite des Grecs anciens, on appelle un « pharmakon » : il est à la fois poison et remède. Internet est un puissant outil d’émancipation, qui peut néanmoins, si on ne l’utilise pas avec un certain recul, produire l’effet inverse. Un nombre incroyable d’informations sont disponibles via Internet. Mais les plus visibles ne sont pas forcément les plus documentées : ce sont celles que diffusent ceux qui savent jouer de cette industrie de l’influence. Particulièrement sur Internet donc, les informations sont à vérifier et à prendre avec du recul. Mais prendre du recul et se positionner dans le monde, cela demande du temps, de la réflexion. Or, la permanence de l’accès à Internet, depuis les téléphones mobiles dans les transports en commun jusqu’à la télévision connectée, réduit voire tend à faire disparaître les temps morts. Or ces temps morts sont les temps de l’imagination, de la création, de la réflexion, de la prise de recul. Si cela souligne l’importance d’une éducation aux médias et à Internet, c’est pour mieux profiter de cette formidable source d’information et de coopération nonmarchande qu’est Internet. Adeline De Lépinay, URFJT Île-de-France.

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Entretien avec Guillaume Balas,

Conseiller régional et Président du groupe socialiste de la Région Île-de-France.

Un projet d’action régionale «Lutter contre le décrochage scolaire», a été déposé par le groupe socialiste et voté lors de la séance du Conseil régional en septembre 2011. Dans le cadre de la mise en oeuvre de ce projet, les réseaux membres de la CRAJEP Île-de-France, ainsi que d’autres acteurs de l’éducation, ont été sollicités pour être parties prenantes des travaux du Conseil régional. En matière éducative, quelles priorités se fixe la Région  ? n ce qui concerne les politiques éducatives, la Région a fait un effort considérable et s’attache à développer des programmes d’aide aux élèves les plus en difficulté. Le dispositif « Réussite pour tous » est à ce titre emblématique de l’intervention régionale. La politique de lutte contre le décrochage scolaire, initiée par le groupe socialiste en fin d’année 2011, montre notre détermination à agir dans un domaine particulièrement sensible, qui touche environ 10% des élèves franciliens. Nous ne sommes pas là sur une action à la marge, mais bien au cœur de ce que notre institution peut faire pour endiguer un phénomène qui s’amplifie. C’est pourquoi, seront organisées les Assises de la lutte contre le décrochage scolaire à la rentrée, pour donner à cette mobilisation un événement qui marquera le début d’une action concertée entre acteurs franciliens.

E

Quelle place les associations et mouvements d’éducation populaire ont-ils selon vous dans l’espace éducatif régional ? Ce qui frappe lorsque l’on cherche à connaître ce paysage associatif francilien, c’est, tout d’abord, la multitude de structures à l’œuvre, la très grande diversité de profils, ensuite, et, enfin, la pluralité de champs d’intervention. Les associations qui œuvrent en Île-de-France sont de taille et de surface d’intervention nationale, régionale ou locale. Le mouvement d’éducation populaire est bien entendu fortement représenté. Leurs champs d’activités sont transverses, de la prévention au raccrochage en passant par l’accompagnement scolaire classique et le soutien aux enfants et aux jeunes dans leur parcours. En complément, nombre de

structures associatives mènent une action en direction des familles, avec des projets d’aide et de soutien à la parentalité, ou de manière plus indirecte en proposant un accompagnement des jeunes au domicile, au sein des familles. J’ai pu constater également que les associations qui exercent dans les quartiers prioritaires mettent en œuvre des projets concomitants et complémentaires au scolaire, notamment dans le domaine de l’ouverture culturelle ou de l’accès à la mobilité. Les associations ont un lien avec les familles que l’école n’a plus, notamment dans les quartiers populaires. Bien souvent elles travaillent à retisser ce lien, à rapprocher les parents éloignés de l’institution. Ce trait d’union avec les familles est précieux, non seulement pour le soutien des enfants et des jeunes dans l’accompagnement à la scolarité, qui s’en trouve facilité et valorisé, mais également lors de la démarche de « raccrochage » dont on sait que si elle n’est pas conduite avec les parents elle est encore plus difficile voire compromise. À l’image d’une mosaïque, le tissu francilien est composé d’une multitude de petites pièces qui ont une existence propre et font sens quand elles sont prises dans leur globalité. La mise en concurrence des acteurs éducatifs et la logique de guichet fragilisent ces acteurs et mettent à mal la continuité éducative. Comment une collectivité telle que le Conseil régional d’Île-deFrance peut-elle agir dans le sens d’une véritable politique éducative ? J’ai la conviction que l’échelon régional est le bon périmètre de réflexion et d’action dans la lutte contre le décrochage scolaire. Cette affirmation n’est pas le produit d’un à priori « régionaliste » mais d’une analyse pragmatique issue de nombreuses rencontres avec les acteurs du monde éducatif. Il ne s’agit en aucun cas de nier le rôle de l’État dans les politiques éducatives mais bien de compléter son action en mettant en lien institution scolaire, territoire, associations, famille et élève. Refaire de la réussite d’un jeune un projet collectif passe par la réalisation de cet objectif. Propos recueillis par Marie Hatet, CRAJEP Île-de-France.

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La déclaration commune des associations complémentaires de l’école publique. Le Collectif des associations partenaires de l’école (CAPE) s’est constitué en 2009 sur l’initiative d’associations qui se sont regroupées autour d’une déclaration commune rendue publique le 6 janvier 2010. Il prolonge les activités du CLIMOPE (Comité de liaison des mouvements pédagogiques) et celles du groupe plus informel des « 8 associations complémentaires de l’école publique ». coordination des associations éducatives C ette et pédagogiques laïques partenaires de l’École

publique regroupe 20 associations éducatives complémentaires de l’École et mouvements pédagogiques*. Elle s’est constituée autour d’une déclaration commune (6 janvier 2010) : « Nos associations nationales ont une proximité fondatrice avec l’École publique (1). Qu’elles soient associations complémentaires de l’École, mouvements pédagogiques, mouvements d’éducation populaire, parfois les deux ou les trois en même temps, elles situent leur action avec, dans et autour de l’École. Elles ont pour beaucoup contribué à la construction de l’École de la République, en la promouvant, en la faisant progresser, en s’attachant à la rendre plus démocratique au-delà de l’accueil de tous les enfants et de tous les jeunes, par un accès réel à la diversité des savoirs. Sans elles, jamais l’éducation scolaire n’aurait eu la forme de son service public, ses contours, ses fondements, ses réalités. Parce qu’elles en partagent et font vivre les valeurs d’égalité, de justice sociale, de liberté, de solidarité et de fraternité et font de la laïcité leur culture commune. Sans elles, jamais sans doute l’éducation ne se serait étendue au-delà de la famille et de l’École pour prendre place dans la cité. Nos associations favorisent par la diversité de leurs actions l’implication de chacun dans la mise en œuvre d’une éducation globale.

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Attachées à la dimension nationale de l’École et des politiques publiques d’éducation, elles savent aussi que la continuité territoriale de la République implique une nécessaire et réelle convergence de l’action de l’État et des collectivités territoriales. Nos associations en sont d’ailleurs des partenaires reconnus, mais indépendants et autonomes dans leurs projets. Nous sommes un des acteurs d’une éducation devenue plus que jamais mission partagée. Notre philosophie éducative, nourrie de l’éducation nouvelle et de l’éducation populaire, se fonde sur trois convictions :  - l’éducabilité de tous les enfants et de tous les jeunes sans aucune exception ; - la dimension émancipatrice des savoirs pour penser, être et faire ; - l’implication des enfants et des jeunes dans leurs apprentissages. Notre action se conçoit en étroite articulation avec tous les acteurs de l’éducation, dans une perspective réelle d’éducation et de formation tout au long de la vie. Elle vise à combiner et faire interagir les dimensions formelles, non-formelles et informelles de l’éducation de base afin de qualifier des personnes autonomes et solidaires capables d’apprendre toute leur vie et de se situer dans un monde complexe et incertain. Pour que tous les enfants et les jeunes de notre pays soient les enfants de la République, ils doivent y être préparés et y grandir dignement. C’est le sens de notre engagement. À l’heure où notre société est confrontée à des transformations inédites par leur nature, leur ampleur, leur ambivalence, leur brutalité parfois, où les responsabilités humaines sont étendues dans leurs objets et leurs périmètres, seule une politique éducative publique imaginative, ayant pour mission l’élévation de la citoyenneté démocratique, faisant appel à toutes les forces éducatrices devrait prévaloir. Nos associations sont prêtes à y concourir.


Afin de conforter leur travail et leur efficacité au service d’une éducation humaniste et laïque, elles décident de renforcer leur coopération pour :

- faire connaître et promouvoir les réalisations de chaque association constituante (publications, formations, événements, etc.) ;

- organiser la réflexion collective sur les grandes questions éducatives et pédagogiques dans la diversité des approches et des positions ;

- établir un rapport collectif plus efficace dans les relations politiques et fonctionnelles avec l’État, en particulier le ministère de l’éducation nationale, les associations nationales de collectivités territoriales. »

- créer les conditions de leur expression publique sur les politiques éducatives et scolaires ;

(1) Par le terme École, nous entendons l’ensemble de l’éducation scolaire initiale, de la maternelle au lycée, ainsi que les diverses formes de l’enseignement supérieur. *AFEV, AFL, CEMÉA, CRAPCahiers pédagogiques, Éducation & Devenir, EEDF, Fédération des clubs UNESCO, Fédération des CMR, Fédération des PEP, Fédération Léo Lagrange, FESPI, FOEVEN, Francas, GFEN, ICEM-pédagogie Freinet, Ligue de l’Enseignement, Mouvement français pour le planning familial, Mouvement français des Réseaux d’échanges réciproques de savoirs (Foresco), OCCE, Peuple et Culture.

www.collectif-cape.fr

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Éduc’ Pop’ en fête : l’éducation populaire, c’est par et pour vous, et c’est partout ! Le Cnajep a lancé en juin 2011 une campagne de promotion et de communication pour renforcer l’image et la notoriété de l’éducation populaire. Cette dynamique se poursuit en 2012 avec Éduc’ Pop’ en fête, un ensemble d’initiatives locales visant à promouvoir l’édcucation populaire. L’ événement de lancement d’Éduc’ Pop’ en fête s’est déroulé le 19 juin 2012 au Comptoir Général à Paris. Au lendemain des élections présidentielles et législatives, cet évènement a été l’occasion d’une prise de parole des associations de jeunesse et d’éducation populaire visant à positionner l’éducation populaire comme un enjeu central de la mandature en cours. Cette rencontre a été également l’occasion de connaitre les analyses et les propositions de Valérie Fourneyron, Ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative et de les mettre en perspective au regard de nos réflexions et de nos actions. À l’heure de définir concrètement les orientations qui structureront les politiques nationales de demain, le Cnajep, avec ses membres, souhaite ainsi contribuer au débat et demander aux nouveaux décideurs de s’engager résolument en faveur d’une vision renouvelée des politiques de jeunesse et d’éducation populaire, en étroite concertation avec les associations du secteur. Plus d’infos : http://www.educ-pop.org

www.creaepiphyte .com

Directeur de publication : Robert Turgis. Coordination de la rédaction : Lucie Groussin et Marie Hatet. Comité de rédaction : Catherine Bernard, Florence Durieux, Lucie Groussin, Marie Hatet. Rédacteurs-trices : Stéphane ARCHIMBAUD, Farid BENLAZAR, Carole BERREBI, Marie Bodeux, Claude BOURQUARD, Vivien Braccini, Adeline DE LÉPINAY, Natacha DESHAYES, Alain GHENO, Lucie Groussin, Marie Hatet, Samia OULD AMARA, Patrice RAFFET, Yann Renault. Mise en page : Lucie Groussin. Crédits images : Gauzère - Iconovox (couverture), Florence GATY (pp.6, 7, 8, 13, 18, 19, 22, 23, 25, 26, 27), Francas (p. 11), MJC-Centre Social Ris-Orangis (pp. 14-15), Ligue de l’enseignement 95 (p. 17), URFT ÎdF (p. 28), CRIF (p. 29), Mutio - Iconovox (p. 31). N°ISSN : 2106-4865. Dépôt légal juin 2012.

Les membres de la CRAJEP Île-de-France AJBF : Association des juristes berbères de France / ALIF : Association des ludothèques en Île-de-France / Au fil de l’eau / CEMÉA ARIF : Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active – Région ÎdF / CPCV ÎdF : Organisme protestant de formation / CFCS ÎdF : Coordination régionale des fédérations de Centres sociaux / Culture et Liberté ÎdF / EEDF : Éclaireuses et éclaireurs de France - Région Île-de-France / EPE ÎdF : École des parents et des éducateurs d’Île-de-France / FFMJC : Fédération française des Maisons des jeunes et de la culture / FIA-ISM : Femmes inter associations - Inter service migrants / UR Francas : Union régionale des Francas / FUAJ : Fédération unie des auberges de jeunesse / GRAINE : Groupement régional d’animation et d’information sur la nature et l’environnement / JPA : Jeunesse au plein air / La Ligue de l’enseignement – Région Île-de-France / LL : Léo Lagrange Île-de-France / MJC : Maisons des jeunes et de la culture en Île-de-France - Fédération régionale / APDIDF : Les Petits débrouillards Île-de-France / Peuple et Culture Île-de-France / Union REMPART ÎdF / SGDF : Scouts et guides de France — Région Île-de-France / SJT : Solidarité et jalons pour le Travail / UFCV : Union française des centres de vacances d’Île-de-France / UFJT : Union des Foyers pour les jeunes travailleurs d’Île-de-France / Vacances et Familles. CRAJEP Île-de-France - 39, rue des Cascades 75020 Paris - Tél. 01 45 65 23 33 - www.crajep-idf.org Ce journal bénéficie du soutien financier du Conseil régional d’Île-de-France et de la DRJSCS d’Île-de-France.

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