luc L’alambic qui fabrique de la liberté
Luc Grün est incontestablement le personnage le plus haut en couleurs de Riquewihr. Peintre, philosophe, anarchiste libertaire (sic), cet ex-prof de physique règne sur son atelier, un royaume de quelques mètres carrés à peine au cœur du village. L’écouter est un moment de pur bonheur… Quand nous avons rencontré Jean Buttighoffer, le maire de Riquewihr, nous lui avons demandé de nous indiquer un personnage haut en couleurs, suffisamment « Or Norme » pour mériter de figurer dans nos pages spéciales. Il n’a pas hésité une seconde à nous conseiller de rencontrer Luc Grün, « un peintre un peu atypique mais un vrai personnage avec une grande culture ». Très bien vu, Monsieur le Maire…
Et au fond coule une rivière de culture… Raisonnablement, on peut manquer l’endroit. Un tout petit corridor, au détour d’un restaurant, qui conduit à boutique au fort
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Grün
relent asiatique. Et au fond, sur le pas de sa porte, un bon géant massif, aux yeux clairs, qui nous attend. Et qui, immédiatement, parfaitement rodé, ouvre la boîte aux souvenirs : « J’ai 77 ans et je suis un Lorrain d’Alsace, né à Sarreguemines. Seulement voilà, mon épouse est née à Riquewihr et, comme le service militaire m’a appelé à Meyenheim, dans l’Armée de l’Air, je me suis fixé ici. Oui, j’ai été prof de physique à Nancy, un temps… J’en suis vite sorti, arrivé de bonne heure et parti de bonheur ! » Et là-dessus, un premier rire, gargantuesque ! « Attention » reprend-il, « je suis resté un passionné de physique quantique, mais la peinture m’a pris très tôt, comme un prurit. Ma première expo date de 1962. J’ai eu du bol : un passionné, M. Durand-Ruel, le petit-fils de celui qui a lancé les impressionnistes aux Etats-Unis, m’a tout acheté d’un coup ! C’était parti… Je me suis alors définitivement fixé ici où je suis devenu un artiste maudit. Dabs le dictionnaire, on me trouve entre Grünenwald et Gutenberg !.. » Deuxième éclat de rire, encore plus sonore. Un passant qui marche sur le trottoir, à six mètres de là, sursaute brusquement…
« J’arrêterai la peinture quand je ne pourrai plus… » Adoptant brutalement le tutoiement (ça le fait parfaitement pour nous…), le bon géant nous entraîne dans son atelier et nous découvrons alors un véritable capharnaüm. Le moindre centimètre carré de mur est couvert par une toile, c’est un bazar incroyable mais noble : un bazar d’artiste. « Je ne