F OND S PR OPR ES POUR L E PAS SAGE À L’É CH E LLE DE S P ME : E N T R E T I E N AVEC DEUX GESTI O N N AIRE S DE FON DS AFRICAIN S
LES PME INVOQUENT PRESQUE SYSTÉMATIQUEMENT LES DIFFICULTÉS D’ACCÈS AU FINANCEMENT COMME LE PRINCIPAL OBSTACLE À LEUR CROISSANCE. ÊTES-VOUS D’ACCORD ? L.K : En effet, le déficit de financement est probablement le principal obstacle à leur croissance. C’est particulièrement vrai en Éthiopie lorsqu’il s’agit d’obtenir des financements en devises étrangères, nécessaires à l’achat de machines et de matières premières. C’est également vrai
La réglementation a tendance à rendre l’activité des PME coûteuse, contrairement aux entreprises informelles qui ignorent les obstacles réglementaires.
au Kenya, pays le plus développé d’Afrique de l’Est, où le plafonnement des taux d’intérêt a sérieusement limité l’appétit des banques pour le crédit aux PME. En Ouganda, le financement bancaire est disponible, mais les taux d’intérêt (supérieurs à 20 %) sont impraticables pour la plupart des entrepreneurs. J-P.F : Une autre cause majeure est l’état de préparation des entreprises. Trop souvent, nous constatons la nécessité d’une introspection de la part des promoteurs : sur leur modèle économique, leur personnel, leur marché, ou leur stratégie, avant de pouvoir accéder au financement.
D’AUTRES RAISONS SONT AVANCÉES POUR EXPLIQUER LE MANQUE DE PME FORMELLES : DEMANDE EN AFRIQUE ENCORE ÉLEVÉE POUR DES BIENS DE BASE, 1 FISCALITÉ DÉSINCITATIVE, RÉGLEMENTATIONS CONTRAIGNANTES, ETC. CES EXPLICATIONS TIENNENT-ELLES LA ROUTE EN PRATIQUE ? L.K : Il est vrai que la réglementation a tendance à rendre l’activité des PME coûteuse, contrairement aux entreprises informelles qui ignorent les obstacles réglementaires et aux grandes entreprises dont les économies d’échelle permettent de supporter les coûts additionnels. Les PME ne sont pas nécessairement confrontées à une demande insuffisante pour leurs biens,
mais plutôt à une concurrence intense, non seulement de la part des acteurs locaux, mais aussi de la part des importations (souvent sans acquittement des droits de douane). Il est particulièrement difficile pour les entreprises locales d’être compétitives face à des importations bon marché, alors mêmes qu’elles ont parfois créé la demande et le marché au niveau local.
QUELS SONT, SELON VOUS, LES PRINCIPAUX OBSTACLES À L’INVESTISSEMENT DANS LES PME ? LE CAPITAL HUMAIN EST SOUVENT CITÉ COMME UNE PRÉOCCUPATION MAJEURE… L.K : Les ressources humaines posent souvent problème en effet, en particulier hors du Kenya. Par exemple, recruter un directeur financier expérimenté en Éthiopie est un exercice coûteux et chronophage. Beaucoup de pays (comme la Tanzanie) limitent aussi le recours à la maind’œuvre étrangère.
Mais à mes yeux, la principale barrière à l’investissement dans les PME est le manque de données fiables, qu’il s’agisse des indicateurs financiers de la société ou des données de marché. Le coût de l’institutionnalisation est une autre barrière importante. Les PME ont généralement
1 En vertu de la loi d’Engel, la part des dépenses allouées aux biens à faible valeur ajoutée et dont les barrières à l’entrée sont limitées (ex. minoterie, textile, métallurgie légère) est plus grande en Afrique que dans d’autres régions.
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