Nouvelles N° 2335

Page 1

Jeudi 28 novembre 2019 - N° 2335 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

LE 5 DÉCEMBRE ON MANIFESTE

11H PLACE DE LA RÉPUBLIQUE À BORDEAUX


LES NOUVELLES

Editorial HISTOIRE

Informer, débattre, nourrir le débat et l’action

Du « Travailleur » aux « Nouvelles »… et ensuite ?

Le 5 décembre à n’en pas douter ce seront des milliers de girondins qui fouleront les rues de Bordeaux pour s’opposer à cette nouvelle réforme de notre système de retraite. Cette mobilisation fera écho aux luttes des hospitaliers, des pompiers, des cheminots… Cette réforme sous prétexte d’égalité n’a d’autre ambition que de niveler à la baisse l’ensemble du système de retraite et de pousser des milliers de salariés vers les retraites par capitalisation. C’est en fait une entreprise de démolition qui est à l’œuvre afin d’offrir nos retraites aux banques et assurances, pour que celles-ci spéculent avec notre avenir. Le 11 décembre, l’ensemble des forces de gauche et syndicales se réuniront à l’invitation du PCF lors d’un meeting où chacun apportera ses propositions pour montrer qu’une autre réforme est possible afin de répondre aux besoins de tous. C’est le sens des propositions que nous mettons sur la table. Celle d’une société qui a l’ambition de répondre aux besoins du plus grand nombre au moment où nous n’avons jamais autant produit de richesses. Une volonté de transformer en profondeur le monde dans lequel nous vivons. Cette ambition prend sa source dans les injustices criantes que nous vivons au quotidien. Celles d’hommes et de femmes qui dorment dans la rue, de ceux qui sont en souffrance au travail, pressurés par les nouvelles techniques managériales qui poussent parfois jusqu’au suicide. Notre ambition est d’en finir avec une société qui transforme notre espace quotidien en usine à cash, sans se soucier des conséquences sociales et environnementales. C’est vrai dans nos campagnes avec des sols exploités jusqu’à l’infertilité, dans nos villes sans cesse démolies et reconstruites, devenant des zones de formidable concentration de capital. Tout cela a un sens, celui de la recherche toujours effrénée de profit, pour satisfaire la gloutonnerie de ceux qui ont déjà tout. Le combat de classe n’a jamais été aussi rude, aussi inégal qu’aujourd’hui. Les forces de l’argent ont mis la main sur tous les leviers de pouvoirs qui existent dans la société : politiques, financiers, directions des entreprises, medias. C’est donc partout qu’il faut aller les contester. C’est ce travail que s’assigne la presse communiste. Celle d’une presse qui ne prend pas ses ordres auprès des puissants, qui n’a pas pour ambition d’être dans la complaisance auprès de ceux qui décident. Les Nouvelles dans leur forme actuelle sont suspendues. Mais il ne s’agit en rien d’un enterrement. Notre ambition reste la même que celle des fondateurs du « Travailleur » : informer différemment, mettre en valeur ceux qui se battent, faire appel inlassablement à l’intelligence de tous, pour se donner la force collective de changer ce monde. Nous changerons les formes, nous inventerons de nouveaux supports, nous mettrons du commun, mais notre objectif est inchangé : informer, débattre, nourrir le débat et l’action.

Frédéric Mellier membre de l’exécutif du PCF 33 directeur des Nouvelles

2 • Les Nouvelles 28 novembre 2019

La suspension de notre hebdomadaire est une mesure conservatoire dictée par la réalité financière de notre publication. Elle s’inscrit dans un panorama plus large de crise que traverse la presse écrite et en particulier la presse d’opinion. Celle-ci souffre d’une baisse tendancielle de sa diffusion à l’exception de quelques revues « spécialisées » qui dans un temps donné maintiennent leurs ventes. Mais tous les journaux, quotidiens ou hebdomadaires, sont en difficulté. Difficultés aggravées par une politique d’aides gouvernementales à la presse d’opinion en recul permanent. Sans parler de la véritable discrimination dont fait l’objet la presse communiste en matière de publicité… Et c’est encore un autre débat que celui de l’écrit et des réseaux sociaux, de l’écrit et du visuel. L’arrêt momentané de notre « petit journal », en tout cas sous sa forme actuelle, nous obligera donc à faire preuve de beaucoup d’imagination et d’efforts. Une histoire riche

La presse communiste du sud-ouest a une longue, difficile, mais passionnante histoire. En 1921 la S.F.I.C. (Section Française de l’Internationale Communiste), qui deviendra le PCF, reste propriétaire du journal de Jaurès L’Humanité. Le PCF est en effet le seul des grands partis occidentaux à avoir conservé, au-delà de la scission, le vieux quotidien socialiste. En Gironde il lance « Le Travail du Sud-Ouest », journal du SFIC et des comités syndicalistes révolutionnaires que dirigent F. Barsac, et G. Gaye, Marius Olivier (futur maire communiste de Bègles en 1945), Cavaillé, etc. Ce journal deviendra le 3 mars 1928 « Le Travailleur », journal de la Région Bordelaise (la XIIIème) du PCF, qui comprenait la Gironde, les Landes, le Lot-et-Garonne. Le gérant du « Travailleur », Léo Pichon, secrétaire de la Région et du Rayon (section) de Bordeaux, fut arrêté et condamné en août 1929 à 6 mois de prison au Fort du Hâ pour « provocations de militaires à la désobéissance ». On a du mal à imaginer la

« gymnastique » que ces hommes et ces femmes étaient obligés de faire pour continuer à s’opposer à l’intervention contre la Russie, pour protester contre les guerres (celle du Riff au Maroc), aux occupations (la Ruhr en Allemagne), à s’engager dans le combat antimilitariste, contre les dictatures en Espagne, en Pologne, en Algérie, et pour résister à un patronat féroce. Ce furent des années de répression intense, de recul des effectifs du parti, commencé dès 1923, mais ce fut incontestablement aussi la naissance d’une pratique nouvelle de la politique, l’émergence de cadres d’un type nouveau, une audience de masse à travers la pratique que le Parti déploiera dans la galaxie des organisations dont il conserve ou acquiert la direction… Mais il ne pouvait se satisfaire d’une telle chute de ses effectifs. Il lui faudra aussi s’attaquer à la question des alliances, le mot d’ordre restant encore « classe contre classe ». Une partie de ces questions seront abordées par ce que les historiens ont appelé « Le tournant des années 30 ». Une partie seulement. En 1932, Hubert (Maxime) Ruffe devient responsable de la région bordelaise qui s’installe au 126, quai des Chartrons. En cette année de législatives, le PCF girondin cherche à résoudre ses problèmes de cadres et à redéfinir une nouvelle orientation. A ces difficultés s’ajoutent des problèmes financiers : la fusion par exemple du journal hebdomadaire « Le Travailleur de Gironde » avec

celui du Lot-et-Garonne en février 1932. Le journal reparaîtra cependant en juillet. Début 1935, Henri Chassaing arrive en Gironde ; où il devient secrétaire fédéral fin juin 1936. C’est dans cette période du Front Populaire que le PCF girondin accroît son influence et ses effectifs qui passent de 300 (1934/35) à près de 7 000 fin 1937 (témoignage d’H. Chassaing dans « Bordeaux et la Gironde en reconstruction »). Cette année-là, l’hebdomadaire « La Gironde Populaire » est intitulé « Organe du Front Populaire » édité par le PCF. Il sera interdit, comme l’ensemble de la presse communiste, le 27 août 1939… Durant l’occupation, « La Gironde Populaire » sera distribuée sous forme de tracts appelant à la Résistance. À la Libération…

Il reparaîtra comme quotidien en septembre 1944 avec 6 éditions. La crise de la presse française de 1944 à 1954, l’emprise du journal « SudOuest » construit avant-guerre et pendant la guerre sur l’audience de « La Petite Gironde », proche de la droite puis de Pétain, et de « La France-République » plus proche de la S.F.I.O, les évolutions contradictoires de la société française, amènent le PCF à transformer « La Gironde Populaire » qui devient fin octobre 1948 « Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest ». Sous la double pression de ses deux principaux concurrents et de la crise*, ses éditions départementales sont supprimées et il devient en 1950 un quotidien régional. Il suspendra sa parution de juin 1956 au 26 janvier 1959, date de sa sortie comme quotidien jusqu’en 1960 où il deviendra hebdomadaire. La vente des Nouvelles conjointe à celle de l’Humanité-Dimanche permettra durant plusieurs années, grâce à l’effort financier de la direction de notre hebdo national, d’assurer des rentrées de fonds précieuses. Jusqu’aux difficultés de notre « Huma » que tout le monde connaît aujourd’hui. Notre « capital », ce sont les femmes et les hommes engagés dans le militantisme communiste, mais aussi les porteurs de toutes les formes d’engagement progressiste, politique, syndical, social, associatif, etc. L’histoire s’interrompt un moment mais elle n’a pas de fin. A nous tous de construire une nouvelle épopée du combat émancipateur. Serge Gonzalez * Le prix du papier à la tonne était passé de 30 000 frs en 1948 à 84 000 en 1951. Les frais d’impression de 44 à 93 millions. Les dépenses annuelles de 77 à 137 millions. (Le Parti communiste en Gironde de 1945 à 1954 - UFR d’Histoire 1994-1995- G. Baillet).


LES NOUVELLES SUSPENSION DES NOUVELLES

La bataille pour la liberté de la presse et le pluralisme continue Chacun connaît les difficultés de la presse écrite et particulièrement de la presse régionale ainsi que les difficultés que rencontre l’Humanité, seul grand quotidien qui ne soit pas adossé à un grand groupe capitaliste et financier. Le pluralisme de la presse, la liberté d’expression, le droit de savoir, l’accès à l’information sont aujourd’hui accaparés par le capitalisme financiarisé avec deux objectifs : maîtriser la diffusion et la production d’information dans un contexte de bataille idéologique intense et, dans le contexte de la crise du capitalisme, concentrer les richesses produites, les pouvoirs entre les mains de quelques-uns. Les journaux l’Echo, la Marseillaise, le Travailleur Alpin, l’Humanité, l’Humanité dimanche et Liberté sont, dans cette situation de domination du Capital, des anomalies pour les groupes dirigeants. L’Etat et le législateur assèchent les ressources de ces journaux, libres face à la finance et au pouvoir des banques, renforçant ainsi cette domination et affaiblissant un peu plus cette presse. L’enjeu est politique. C’est celui du

droit à l’information, du partage des savoirs, de la liberté d’expression. Les Nouvelles de Bordeaux vont manquer et nous nous mettons au travail pour bâtir un nouveau journal. C’était le seul journal en Gironde qui transcrivait les luttes des salarié-e-s, tous les combats émancipateurs, de solidarité avec les peuples en lutte pour leur liberté. C’était un journal communiste, il racontait le monde et les mouvements de la société avec un regard particulier, une ligne éditoriale qui donnait à voir toutes les luttes, tous les combats émancipateurs dans le département, la région et nationalement. C’était un journal qui prenait parti, pour l’intérêt des salariés, des peuples en lutte. La suspension de sa parution était malheureusement une nécessité pour reconstruire un projet d’avenir, celui d’un nouveau journal, papier et numérique, qui poursuive le combat indispensable de la liberté et du pluralisme de la presse. Tout est à inventer, son format, sa fréquence de parution, ses moyens. Notre ambition est de faire naître une nouvelle parution dès l’automne prochain, car il y a besoin d’une analyse communiste des mouvements de la

société, d’une vision du monde qui ne considère pas celui-ci comme figé à jamais et dans lequel les dominations, la loi du marché, la domination du Capital, les guerres, seraient des règles naturelles immuables. Le partage des pouvoirs commence par le partage des savoirs et l’accès à l’information. Il y a besoin d’un journal des luttes, des batailles émancipatrices, un journal du salariat, de la jeunesse, un journal pacifiste et de solidarité entre les peuples. Et un tel journal est nécessaire au plan local, à l’échelle d’un département ou d’un territoire. C’est à cela que nous devons travailler dans les semaines et les mois qui viennent. Il ne s’agit donc pas d’une fin, ni d’un enterrement. Il s’agit de la reconstruction d’un outil pour la bataille politique et la bataille des idées dans nos territoires. Pour cela, l’emprunt militant que nous avons lancé devrait nous permettre d’apurer les dettes du journal et de rebâtir un projet viable, ambitieux et à la hauteur non seulement de nos besoins, mais aussi de nos possibilités.

besoin que nos camarades mettent la main et la tête à la pâte. Cela fait partie de notre manière de concevoir non seulement un journal, mais audelà, la politique. Vrais et faux pros, experts d’un jour ou d’un thème, le Parti communiste et ses publications, ses communications, ses informations, ont toujours mêlé savoirs et savoirs faire. Encore un grand merci !

"Caminante no hay camino, se hace camino al andar…"

Sébastien Laborde

BÉNÉVOLES

Un grand merci ! Sans eux, pas de journal. Qu’ils et elles soient plieurs, colleurs, encarteurs, pigistes, journalistes d’une semaine ou chroniqueurs, communistes, ami.es, chacun.e a amené sa pierre à cette construction collective hebdomadaire, parfois proche de l’acrobatie… Et ce n’est pas fini ! Il y aura toujours

Toi qui marches, il n'existe pas de chemin, Le chemin se fait en marchant… Alors, on avance. L’équipe de la Rédaction, la direction des Nouvelles, la direction du PCF Gironde

Un grand merci également, à l'équipe du mercredi soir, Nicole, Françoise et René.

Jeudi 28 décembre 2017 - N° 2235 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Prix : 0,80 euro

C ATA L O G U E N O Ë L 2017

TOUT

POUR LES RICHES

PRÉPARER L'AVENIR

Souscription et emprunt militants Des décisions difficiles ont dû être prises courant octobre concernant la société des Nouvelles et la parution du journal. Si les difficultés de ce dernier ne sont pas nouvelles, afin de préserver l’avenir et de conserver une société d’édition, des moyens d’impression et de travailler à la parution d’un nouveau journal, une suspension de parution du journal au 1er décembre a été nécessaire. La période à venir sera riche en rendez-vous et défis politiques : municipales de mars prochain, régionales et départementales en 2021, présidentielle et législatives en 2022. Afin de reconquérir des marges de manœuvre politiques pour affronter ces rendez-vous avec nos concitoyen.nes.s, nous devons nous doter d’un outil politique qui réponde à nos besoins et corresponde à nos moyens aujourd’hui et dans les années qui viennent. C’est pourquoi nous travaillons à un nouveau journal communiste, qui nous permette d’informer, de relayer les luttes, les batailles du monde du travail, des forces de paix et de solidarité, et le rôle de notre Parti dans ces luttes. Pour parvenir à cela nous avons lancé une nouvelle souscription, ainsi qu’un emprunt militant sur une année. Des camarades et ami.e.s ont déjà répondu à cette sollicitation d’emprunt et nous les en remercions. Pour celles et ceux qui souhaiteraint faire de même, ils peuvent s’adresser à la Fédération de la Gironde du PCF, à l’attention de Sébastien Laborde, secrétaire départemental, ou Frédéric Mellier, directeur des Nouvelles, ou Sophie Elorri, trésorière départementale. Par courrier : PCF Gironde – 15 rue Furtado – 33800 Bordeaux Par mail : gironde.pcf@gmail.com

L'équipe du jeudi matin.

SOUSCRIPTION

Tout versement par chèque ouvre droit à une réduction fiscale de 66% du montant versé. (chèque à l’ordre de ADF PCF 33). Les ressources financières du Parti communiste sont transparentes. Votre don, aussi modeste soit-il, contribuera efficacement à la démocratie, à l’expression et la prise d’initiative du Parti communiste. Cet ensemble sont les éléments majeurs pour continuer notre combat dans l’ambition d’une gauche forte et alternative. Les versements sont à envoyer à la fédération de Gironde du PCF - 15 rue Furtado - 33800 Bordeaux, à l’ordre de l’ADF PCF 33

ILS ONT DONNÉ 3 350 euros : Mme MOGA Fabienne, Bègles ; M. BORDAS Pierre, Bègles ; M. et Mme DANEY Claude, St Maixant ; M. GILI Georges, Mérignac ; Mme ROUZOUL Martine, Mérignac ; M. AYNIE Gerard, Bruges ; M. BIZE Christian, Bruges ; Mme NOUQUERET Yvonne, Bruges ; Mme MOISON Françoise, Gradignan ; Mme RUIZ Marie-Claude, St Gervais ; Mme DOMINIQUE M. Thérese, Castillon-la-Batailles ; M. ESCOTS Olivier, Bordeaux ; M. TACONET Vincent, Bordeaux ; M. DUROU Dominique, Bègles ; M. ARMAGNAC Michel, Cerons ; Mme GUERNE Christine, Salles ; M. GAI Christian, Yvrac ; Mme TAFFARD Evelyne, St-Germain-du-Puch ; Mme AGOSTINI Francette, Villenave-d'Ornon ; M. LECOCQ Paul, Carbon-Blanc ; M. LAMAISON Alain, Mérignac ; M. RIOLS Jean, Mérignac ; M. LASSALLE J. Benoît, Bègles ; Mme GESTAS Renée, Bègles

Les Nouvelles 28 novembre 2019 • 3


LE 5 DÉCEMBRE CHÔMEURS / PRÉCAIRES

RÉFORME DE L’ASSURANCE CHÔMAGE

Manifestation

La machine à fabriquer des pauvres est en marche

SAMEDI 7 DÉCEMBRE, 14H, PLACE DE LA BOURSE Ils/elles seront dans les manifestations du 5 décembre et du 7 décembre pour leurs droits. En détruisant l’assurance-chômage, le gouvernement et le patronat vont faire la chasse aux privés d’emploi tout en faisant 3.4 milliards d’euros d’économies sur leur dos !

REVENU UNIVERSEL D’ACTIVITÉ

Les APL bradées ? « Malgré les protestations de l’ensemble des acteurs du monde du logement, le gouvernement vient d’annoncer l’intégration des APL dans le nouveau revenu universel d’activité (RUA). Une information qui laisse présager le pire quand on sait que le fusionnement des aides sociales devrait se faire à budget constant… » souligne la Confédération Nationale du Logement (CNL) qui demande au gouvernement de revenir sur sa décision. « Annoncé comme une mesure de lutte contre le non-recours, le regroupement des aides sociales en un revenu unique devrait donc comprendre a minima le RSA, la prime d’activité et les aides personnelles au logement. Si nous partageons pleinement l’ambition de lutter contre le non-recours, nous ne pouvons cependant pas cautionner la logique du gouvernement qui omet que chaque aide a son propre objectif et public. Alors que le RSA et la prime d’activité sont des aides au retour à l’emploi, l’APL est de son côté destinée à subventionner la dépense logement des ménages modestes. L’aide au logement n’est pas une aide sociale et, par conséquent, elle ne doit

pas être assimilée à ces dernières. A qui profite cette confusion générale entretenue avec soin par le gouvernement ? Certainement pas aux allocataires de l’aide au logement. Le « supplément logement » dans lequel devrait être intégrée l’APL n’apporte aujourd’hui aucune garantie, ni sur les conditions de versement ni sur la lisibilité du système pour les habitants - et donc sur sa capacité à lutter contre le non-recours. La CNL s’inscrit dans le mouvement de protestation générale qui considère l’intégration des APL dans le futur revenu universel d’activité comme un non-sens dangereux pour les locataires modestes. Sans oublier que les discussions se font jusqu’à présent à budget constant. Comment le gouvernement peut-il prétendre mettre fin de manière effective au non-recours dans ces conditions ? La CNL demande que les APL n’intègrent pas le périmètre du RUA et soient immédiatement revalorisées pour « soutenir le niveau de vie des ménages les plus modestes » comme l’affirme la note technique diffusée par le ministère des Solidarités et de la Santé dans le cadre de la concertation sur le RUA. »

MARCHE POUR LE CLIMAT

#OnVeutRespirer DIMANCHE 8 DÉCEMBRE 2019 DE 14H30 À 17H30 En pleine COP 25 à Madrid, soyons nombreux à la Marche Mondiale pour obtenir, enfin, des mesures concrètes pour le Climat ! 4 • Les Nouvelles 28 novembre 2019

La remise en cause de l’assurance chômage comme celle des retraites constituent un recul des acquis sociaux. Dans le nouveau système des retraites voulu par le pouvoir, qui fait notamment fi de la notion de « meilleures années », la précarité des carrières viendra accentuer celle des futures retraites. Et cette précarité s’installe davantage encore depuis le 1er novembre, date à laquelle la Macronie a franchi un seuil supplémentaire, avec l’application de la réforme de l’assurance chômage. Une réforme, et non une nouvelle convention, puisque l’Etat a repris la main sur le sujet sur les cendres du dialogue social guidant jusque-là les conditions d’indemnisation des demandeurs d’emploi et qui n’a pas résisté à l’opposition patronale sur la taxation des contrats courts. Au final, le MEDEF peut donc se frotter les mains. Avec la précarisation des plus fragiles, le patronat et le capital sont les grands gagnants de cette réforme mise en œuvre par Muriel Pénicaud, ministre du Travail. Au final, ils comptent profiter de l’accélération du dumping social. Deuxième lame en avril

Ce qui a fait dire récemment à Ian Brossat, adjoint à la maire de Paris et candidat PCF lors des dernières élections européennes, que cette réforme était « une machine à fabriquer des pauvres ». « Un massacre » selon Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. Comme l’avait rappelé l’Humanité, la sidération est unanime du côté des syndicats de salariés : « Une réforme anti-jeunes, sexiste, visant les moins qualifiés » et qui « va forcer les privés d’emploi à prendre n’importe quel boulot » pour Denis Gravouil, en charge des questions d’emploi à la CGT ; tout simplement « une tuerie » pour Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. L’objectif du gouvernement est d’arriver à une économie de 3 milliards. Rappelons que peu ou prou, il s’agit du volume issu des cotisations (10 %) et versé par l’Unedic à Pôle emploi pour financer une partie de son fonctionnement. Car la balance cotisations/indemnisations est quant à elle excédentaire. En clair, et ce malgré les discours souvent approximatifs de la ministre du Travail, cette réforme vise à établir des économies

qui n’ont pas lieu d’être. Le système est à l’équilibre, mais on lui demande des efforts pour combler un déficit venant essentiellement de charges annexes. La charge libérale envers les plus précaires se concentre autour de deux mesures, relatives à la durée minimale de cotisations et au rechargement des droits. Pour avoir droit au chômage, il faut désormais avoir travaillé 130 jours (910 heures soit 6 mois) sur les 24 derniers mois (contre 4 mois sur les 28 derniers mois auparavant). Le seuil minimum pour recharger ses droits est porté à 6 mois, contre un mois auparavant. Par ailleurs, les hauts revenus sont également visés, avec la mise en œuvre d’une dégressivité de 30 % après six mois d’indemnisation. Le 7 décembre en écho du 5

Ce n’est pourtant que la première lame. La deuxième arrivera le 1er avril 2020. Les indemnités chômage seront alors calculées non plus sur les seuls jours travaillés mais sur le revenu mensuel du travail. Au total, entre 1,3 et 1,4 millions de personnes vont voir leurs droits diminuer ou disparaître, soit un chômeur indemnisé sur deux. Dans le « en même temps » macronien, sera appliqué un bonus-malus aux entreprises abusant des contrats courts. Mais dans ce domaine, l’application sera minimale, comme le rappelle l’Union syndicale Solidaires : « Seuls 7 secteurs (sur 38) seront concernés à compter du 1er janvier

2020. Le bâtiment et le médico-social seront exonérés de ce léger dispositif. Il ne concernera que les entreprises de plus de 11 salarié·es. La modulation des cotisations sera faible puisque ces dernières varieront entre 3 et 5 % (soit + 0,95 % au maximum pour les entreprises pénalisées). » Quant à l’indemnisation du chômage des démissionnaires, elle apparaît comme un piège pour les salarié·es qui voudraient fuir leurs conditions de travail et ne prendraient pas le temps d’un conseil en évolution professionnelle. Celle des indépendant.e.s est à relier avec l’évolution d’un secteur de plus en plus ubérisé. Concrètement, les conditions de droit à l’indemnisation sont telles que dans un contexte de précarité croissante, la mesure ne pourra s’appliquer qu’à une minorité. Ces deux nouveaux droits ne devraient concerner, selon l’UNEDIC, que 60 000 personnes environ. Outre le 5 décembre, la protestation face à ces nouvelles attaques libérales trouvera un écho dès le surlendemain, le samedi 7 à 14h place de la Bourse, avec l’habituelle manifestation contre les précarités, le chômage et les exclusions. Elle se tiendra à l’appel d’AC ! Gironde, du MNCP, de l’Apeis, de nombreuses et nombreux associations, syndicats et partis de gauche, dont le PCF. L’an dernier, cette manifestation fut pour beaucoup la première rencontre entre le mouvement des gilets jaunes et les cortèges syndicaux plus traditionnels. O.Escots

L’Inspection du travail en colère En première ligne dans le dossier de l’assurance-chômage, Muriel Pénicaud a ces dernières semaines attisé également la colère des services de l’Inspection du travail. Ce fut tout d’abord le cas le mois dernier, avec des déclarations niant le droit de retrait exercé par les agents SNCF, droit de retrait dont la légitimité avait pourtant été reconnue par les inspecteurs et inspectrices du travail territorialement compétents. Ce mois-ci, les agents d’Occitanie ont découvert un courrier de la ministre plein de complaisance adressé à un restaurateur étoilé pourtant épinglé pour des infractions relatives au temps de travail. Et surtout, sous la pression d’un plan communication de l’Elysée et du gouvernement auprès de la Commission européenne, des directeurs zélés poussent désormais les agents de contrôle à concentrer leur action sur le travail détaché, au détriment du service rendu aux usagers et de l’indépendance de l’Inspection du travail garantie pourtant par la Convention 81 de l’Organisation internationale du travail. Dans ce contexte tendu aussi par un rapprochement en cours des services du Travail et de l’Emploi d’une part, et de la Cohésion sociale d’autre part, l’intersyndicale CGT, CNT, FO, FSU et SUD appelle à une grève massive le 5 décembre contre la réforme des retraites et « pour exprimer le refus de cette politique de casse du service public ».


ON MANIFESTE 5 DÉCEMBRE… ET APRÈS ?

CGT

Les luttes : ça monte ! La guerre idéologique aussi !

Élections professionnelles

« Le seul objet, c’est de nous faire travailler plus pour gagner moins. » À elle seule, cette phrase extraite du communiqué commun des Unions départementales CGT, FO, FSU, Solidaires de la Gironde, témoigne de la lucidité devant la tentative du gouvernement Macron d’instaurer une contre-réforme systémique des retraites par un système universel par points. Elle accompagne la montée en puissance du mécontentement et la volonté de l’exprimer, comme le montre la participation, annoncée depuis, de la CFDT cheminote aux côtés de la CGT, FO, Sud et l’Unsa, en dépit de la position de la centrale de soutenir le projet par « points ». Depuis aussi, se sont joints à cette mobilisation qui se présente comme massive, différents acteurs sociaux : Attac, Economistes Atterrés, Fondation Copernic, Unef , le Syndicat de la Magistrature, des Avocats, etc… La presse qui aide à rétablir la vérité et à nourrir l’espoir

L’Humanité du 21 novembre a publié un dossier sur les « solutions » adoptées par le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) afin d’économiser 8 à 17 milliards. En fait les « pistes chocs » visent à faire travailler deux à quatre ans de plus les salariés proches de la retraite. Quant au montant global des pensions, il serait, au-delà des différences sociales et de carrières, très affecté. Le COR ne chiffre pas ces effets mais indique : « quelle que soit la mesure envisagée, la pension serait en moyenne moins élevée. » Dans son journal Contact distribué à plusieurs millions d’exemplaires, la CGT donne quelques exemples de perte de revenu sur les pensions, cite le contre-modèle suédois, montre que l’âge de la retraite sera repoussé et les retraités actuels touchés, comment la solidarité passe à la trappe… Elle fait des propositions pour réformer autrement afin d’assurer de meilleures retraites et comment les financer. Ce travail de dénonciation des mauvais coups et de propositions

alternatives est indispensable mais il ne peut se suffire. Le pouvoir, le patronat mènent une guerre idéologique qui a besoin d’une réplique offensive, tenace, mise en perspective dans un projet de société alternatif. Cela interroge la société tout entière sur son sens, interpelle et appelle à la réflexion chaque citoyen-acteur. Car les tenants du système travaillent à décrédibiliser toute issue au capitalisme. Prenons pour l’exemple deux nouvelles dans l’actualité du 23 novembre. De Jupiter à Mac Mahon…

E. Macron a décidé qu’il ne participerait pas à la COP25 sur le climat dont le coup d’envoi sera donné le 2 décembre à Madrid. Fin de semaine dernière, il était à Amiens pour un échange « tendu » avec les ex-salariés de Whirpool au chômage. Ceux à qui, dit-il, il n’aurait rien promis sur l’avenir de leur entreprise. Mais pour le président, l’objectif n’était pas de « se justifier » sur une décision qui a jeté plusieurs centaines de personnes dans la difficulté, mais de montrer qu’il ne se défilait pas. A travers ces deux événements, il veut apparaître comme « mobilisé » pour défendre son projet de retraite, son entière disponibilité pour convaincre notre peuple que le chemin pris est le bon, le seul possible. Si on ne sait pas encore de manière précise – à l’heure d’écrire cet article – ce qu’aurait déclaré Macron à Madrid (peut-être les bus Macron étaient-ils de nature à lutter contre le réchauffement climatique ?!), on sait par contre qu’à Amiens, devant les étudiants, il a estimé que « le pays ne va pas si mal… » que l’on « ne parle pas assez de la jeunesse qui réussit » pour ajouter : « On a l’impression, si on s’ écoute collectivement, si on branche la radio, regarde la télévision, que tout est terrible ! » Les 300 salarié.e.s de FIP apprécieront cette stratégie visant à mettre sur le dos des victimes la responsabilité de décisions « financières » prises sur injonction du ministère par la direction de Radio-France.

Les petits soldats

Le général a parlé et les petits soldats du gouvernement montent à l’assaut. Delevoye : « Il y a une inquiétude [sur la réforme] qui est nourrie par un certain nombre de personnes qui répandent des peurs, des contre-vérités. » Mais de qui parle-t’on ? De quelles rumeurs ? Le flou est volontaire, car il permet de laisser planer la suspicion. « Notre combat -dit le Haut commissaire aux retraites- c’est de pouvoir retricoter à l’envers ces fausses vérités et montrer à quel point le projet est porteur de solidarité, de générosité et de solidité. » Mais toute l’argumentation est soustendue par des avertissements envers les manifestants. Comme le souligne le sondeur Jérôme de Sainte-Marie, « Macron est prêt à s’appuyer sur la force régalienne : la police et la justice. Le message est que force restera à l’Etat. » En ne répondant aux propositions syndicales cheminotes lors des 4 rencontres ; l’exécutif souffle sur les braises, il veut affaiblir les corps intermédiaires, il mène la bataille de l’opinion publique. Donc il fait le choix de l’affrontement avec une nouvelle menace du secrétaire d’Etat aux Transports, indiquant : « Nous serons très vigilants sur les aspects d’ordre public. » Se hisser à la hauteur des enjeux de société

Loin de nous décourager et tout en étant lucide sur la capacité de nuisance et de provocation de cette équipe au pouvoir, nous devons nous hisser à la hauteur des enjeux de société : rassembler toujours et toujours plus. Protester certes, et dans le même mouvement débattre, argumenter, proposer des issues au capitalisme à partir des questionnements de la société réelle et du besoin grandissant de notre peuple, dans sa diversité et ses contradictions, d’être pleinement acteur de tout processus de transformation de la société. Serge Gonzalez

STE. La Cgt n’était plus présente depuis 20 ans dans cette entreprise de transport logistique (STE). Lors de l’élection du CSE*, elle obtient 39 % de voix dans le 1er collège (2 élus sur 6) et 30 % sur l’ensemble de l’entreprise (CFTC 4 élus). Ariane Group. Dans la société fabriquant les fusées Ariane et les missiles stratégiques de la défense française, les premières élections CSE se sont tenues sur les 8 établissements France où un peu plus de 7 000 salariés étaient appelés à se prononcer. La

représentativité de la CGT progresse de 4 %, passant de 18 % à 22 %. En Gironde, 3 500 salariés sont inscrits sur 3 établissements (le Haillan, Saint Médard et Issac.) Sur ces 2 sites, la CGT se stabilise à 13,5 %. Sur le Haillan, elle reste la première organisation syndicale avec 43,43 % (+ 7 points chez les cadres), passant de 24 à 31 % (9 élus sur 20, dont 1/2 au 1er collège, 5/9 au 2e et 3/9 au 3e). * Comité Social et Economique

RETRAITES

Le 5 contre la réforme Macron et le 11 pour porter l'alternative

Les membres du gouvernement se succèdent dans les médias pour attaquer les syndicats de salariés mobilisés en vue de la journée de grève du 5 décembre. La ministre de la santé Agnès Buzyn a ainsi osé affirmer que les syndicats « ne connaissaient pas la réforme ». De son côté, Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement s’en est pris à la CGT, accusée de « ne jouer pas le jeu de la démocratie sociale ». Ces déclarations sont inacceptables, d’autant plus de la part de membres d’un gouvernement qui prétend pratiquer le dialogue social. Elles sont en réalité le signe d’un exécutif sourd aux syndicats, et pris de panique devant l’ampleur de la mobilisation en vue des grèves du 5 décembre. Enseignants, cheminots, étudiants, personnels de santé, des transports aériens, policiers, avocats, gilets jaunes… La coalition des revendications et l’ampleur du mécontentement des Français poussent le gouvernement à l’affolement. Pour amplifier cette mobilisation qui s’annonce historique, Fabien Roussel a annoncé l’organisation par le PCF d’une rencontre publique rassemblant toute la gauche et les syndicats le 11 décembre. Les forces de gauche et syndicales sont invitées à mettre sur la table leurs propositions pour construire un système de retraites juste et solidaire. Ian Brossat, porte-parole du PCF

Lors du conseil national du PCF le 21 novembre, Fabien Roussel a mis en évidence le rôle que peuvent jouer les communistes, pour l’élargissement de la mobilisation du 5 décembre, mais au-delà d’aider à « ouvrir une perspective politique de progrès, de rupture ». Il s’agit de continuer notre action auprès des personnels en lutte mais aussi de mettre en évidence qu' « une politique alternative, conduite par une majorité de gauche et écologiste, est possible, dès lors que celle-ci se donne pour ambition de faire reculer la logique capitaliste et de contribuer à une nouvelle avancée de civilisation ». Sur cette base, il a proposé « de rassembler l’ensemble des forces de gauche le 11 décembre prochain, dans un grand meeting » qui se tiendra à la Bourse du travail de Saint-Denis. Des personnalités de chaque parti ont déjà confirmé leur présence, auxquels se joindront des dirigeants de diverses confédérations syndicales dont la CGT et Solidaires. Pour le secrétaire national du PCF, « ce rendez-vous peut être un signal très fort dans le pays, pour montrer que sur des sujets aussi important que celui là, les forces de gauche savent discuter et travailler ensemble, avec les forces syndicales ». Et il appelait à « démultiplier ces rencontres dans les régions ». Mais il appelait à poursuivre l’action « sans attendre pour que le 5 décembre soit le point de départ d’un large mouvement populaire qui permette de faire reculer Macron sur son projet » alors que « les grandes manœuvres gouvernementales ont commencé pour affaiblir la mobilisation ».

Les Nouvelles 28 novembre 2019 • 5


LE 5 DÉCEMBRE ON MANIFESTE HÔPITAL

CONTRE PROJET DE RÉFORME

Une ordonnance au rabais

Pour des avancées sociales dignes du 21e siècle Le Conseil national du PCF, réuni le week-end dernier, a validé le projet de réforme alternative proposé par les communistes. Fabien Roussel demande au gouvernement de l’examiner et invite la gauche à en discuter le 11 décembre. (extraits)

« L’hôpital attendait une ambition, il n’a eu droit qu’à des pansements. Ne boudons pas la reprise de 10 milliards de dettes dont les intérêts plombent le fonctionnement des établissements. Mais l’effort massif dans les investissements pour rouvrir des lits, les effectifs et les rémunérations, que réclamaient les luttes en cours, n’est pas au rendez-vous. D’ailleurs, bien des mesures annoncées par le gouvernement visent à diviser les personnels (entre la région parisienne et les régions, les médecins et les soignants…). L’Élysée veut gagner du temps et éviter que cette colère s’additionne aux mobilisations contre la casse des retraites. Après avoir fait adopter une économie de 800 millions d’euros sur l’hôpital lors du vote du budget 2020 de la Sécurité sociale, le gouvernement lâche 300 millions pour l’an prochain… Il reste 500 millions de moins et beaucoup plus est nécessaire pour rattraper le retard, L’hémorragie n’est pas stoppée, tout au plus ralentie. L’austérité bête et méchante menace

toujours une institution pourtant centrale dans le fonctionnement de notre société. Les personnels en souffrent, mais les patients que nous sommes aussi. L’excellence qui était la règle s’érode alors que les compétences sont au plus haut. Ce gâchis va à l’encontre de formidables progrès des connaissances et des techniques. Les normes d’encadrement et de soins sont souvent violées, faute de moyens pour les assurer. Une contradiction mérite d’être relevée : alors que les 100 familles françaises les plus riches se portent bien et ont même gagné chacune 1,6 million d’euros avec la suppression de l’ISF, le pouvoir néglige la santé du reste de la population. Le choix de favoriser la fortune ou la finance produit une régression de civilisation. Au-delà des conditions de travail insupportables, c’est ce qui unit les médecins et les infirmières, les aides-soignantes et les salariés divers des hôpitaux. Ce plan au rabais ne le fera pas oublier. Patrick Apel-Muller

MUTUELLES

Mauvais plan pour l'hôpital public ! « S'il faut regarder le “plan d'urgence pour l'hôpital” à la loupe, c'est pour arriver à le voir, tellement il est petit, étriqué, limité. » déclare la Fédération des mutuelles de France, suite aux annonces gouvernementales. « Les dépenses hospitalières du projet de loi de financement de la sécurité sociale augmenteront de 2,4 % en 2020, au lieu des 2,1 % initialement prévus et toujours très loin des 4,4 % nécessaires. C'est donc un petit allègement du plan d'économie qui assèchera cette année encore les finances de l'hôpital public. En reprenant 3,3 milliards d'€ par an, pendant 3 ans, des 30 milliards d'€ de dette hospitalière, le gouvernement ne “restaure” pas “l'équilibre financier des établissements” mais se contente d'octroyer une petite bouffée d'oxygène à 1 300 établissements victimes d'une décennie d'austérité. Pour accroitre les rémunérations, le gouvernement refuse d'augmenter les salaires et choisit l'astuce du versement de primes. Avec 66 € nets par mois pour les infirmiers et les aides-soignants en région parisienne

et 20 € nets par mois d'intéressement décidés par chaque établissement, on peut parler de primes modiques qui ne répondent ni à la souffrance des personnels, ni à leur surmenage, ni à leurs conditions de travail dégradées, en région parisienne ou ailleurs en France. Enfin, les 150 millions d'€ dédiés aux “investissements du quotidien” représentent, en moyenne, un peu plus de 100 000 € par établissement du secteur public, soit 300 € “quotidiens”, justement ! Après leurs annonces du 14 juin, du 2 septembre et du 9 septembre ponctuant 8 mois de mouvement social des personnels hospitaliers, le premier ministre et la ministre de la Santé ajoutent aujourd'hui du cosmétique au dérisoire. La Fédération des mutuelles de France dénonce ce mauvais plan pour l'hôpital public, par ailleurs muet sur la crise des EHPAD. En concluant sa conférence de presse, le premier ministre a parlé de “principe de confiance” à l'égard des professionnels de l'hôpital. Visiblement, il leur fait surtout confiance pour continuer à gérer la pénurie. »

6 • Les Nouvelles 28 novembre 2019

Vous appelez à la mobilisation du 5 décembre, quels sont vos griefs contre la réforme des retraites du gouvernement ? Fabien Roussel. (…) Avec ce système où le montant des pensions ne serait pas défini à l’avance puisque la valeur du point pourrait varier d’une année sur l’autre, le gouvernement veut nous pousser à souscrire à des retraites par capitalisation. C’est le cœur de cette réforme : casser notre modèle pour orienter les Français vers des assurances privées.

Vous organisez un meeting à Saint-Denis le 11 décembre avec l’objectif de ne pas en rester à la contestation de cette réforme. Pourquoi un contre-projet vous paraît-il indispensable ? F.B. On ne peut pas en rester au statu quo quand un tiers des retraités ont une pension inférieure à 1 000 euros et qu’en moyenne les pensions correspondent à 50-55 % du dernier salaire. Nous proposons d’en discuter avec les forces syndicales et politiques de gauche et écologistes pour voir tout ce que nous avons en commun et pouvoir dire « si demain nous sommes au gouvernement voilà ce à quoi nous nous engageons ». (…) Nous, PCF, mettons sur la table notre propre projet de réforme des retraites et demandons au gouvernement de l’étudier.

Vous proposez un régime « unifié » et plus simple, quels droits ouvrirait-il pour tous ? F.B. Le gouvernement martèle que l’existence de 42 régimes crée des injustices. Mais ceux qui subissent l’injustice sont ceux qui n’ont pas un régime leur permettant de partir à 55 ans quand les travaux sont pénibles ou à 60 ans avec une pension suffisante et garantie. Nous voulons un régime unifié par le haut. La France produit suffisamment de richesses pour cela.

Comment pérenniser le système par répartition alors que la durée de vie augmente ? F.B. Le gouvernement ne cesse de répéter que nous sommes passés de 4 actifs pour 1 retraité à 2 pour 1. Or, dans le même temps, entre 1960 et 2000, le PIB a été multiplié par 4, et

la production de richesses doublera presque d’ici à 2040. Pour pérenniser le système solidaire par répartition, il faut augmenter la part de richesses à y consacrer. Le gouvernement veut plafonner ce financement à 14 % du PIB, nous pensons qu’il faut le porter à 17 %. (…) Et changer le mode de production des richesses. Notre proposition, par son financement, est révolutionnaire. Il permet de répondre à l’allongement de la durée de la vie et propose un nouveau modèle économique respectueux des salariés et de la planète grâce à une modulation des cotisations.

Comment fonctionnerait un tel système ? F.B. Supprimer les aides publiques sans contrepartie, comme le Cice et toutes les exonérations de cotisations (66 milliards/an), pour que les cotisations financent bel et bien le système de retraites, alourdies pour les entreprises qui délocalisent, embauchent des intérimaires au lieu de CDI, ne forment pas leurs salariés, ne respectent pas les objectifs environnementaux. Au contraire, celles qui répondent aux objectifs écologiques et sociaux cotiseraient normalement mais seraient accompagnées dans leurs investissements par des prêts à taux 0 %. En cinq ans, 50 à 70 milliards d’euros peuvent ainsi être apportés au financement de notre système de retraites. Et c’est aussi l’un des leviers pour changer notre modèle économique [face à] l’incapacité du capitalisme à répondre à l’impératif social et écologique.

Quels autres leviers de financement défendez-vous ? F.B. L es revenus f ina nciers (298,8 milliards d’euros en 2018) doivent contribuer au même taux que les cotisations employeurs, soit 10,45 %. L’égalité salariale femmeshommes apporterait 6 milliards d’euros à la caisse des retraites : avec une loi contraignante, l’objectif peut être atteint en deux ans. Et enfin, la hausse des salaires. Nous demandons au premier ministre d’organiser une conférence sociale salariale pour qu’à la date du 1er janvier le Smic augmente de 20 %. (…)

Ce rendez-vous du 11 décembre est-il la première pierre d’un rassemblement appelé à dépasser la question des retraites ? F.B. Notre première préoccupation est d’essayer d’unifier le monde du travail, que le gouvernement fait tout pour diviser (…) Salariés du public « privilégiés » contre ceux du privé, usagers du train contre cheminots, ceux qui touchent le Smic contre allocataires du RSA, travailleurs contre chômeurs… Nous subissons

tous en réalité les mêmes maux, ceux d’un régime capitaliste qui pompe nos richesses. (…) Si nous sommes plusieurs à gauche à dire que c’est possible, nous serons plus audibles.

La gauche peut-elle y travailler de concert alors qu’elle se présente souvent en ordre dispersé aux municipales ? F.B. Dans 90 % des cas nous sommes unis avec d’autres forces de gauche et écologistes et nous faisons tout pour élargir ces rassemblements sur la base de projets locaux décidés avec les habitants. (…) Je regrette que des forces politiques qui ont déjà en ligne de mire la présidentielle ne fassent pas le choix du rassemblement (…).

Emmanuel Macron et Édouard Philippe essaient ces derniers jours de déminer le terrain, comme avec le plan Buzyn. Alors que les luttes sociales ont eu ces dernières années du mal à obtenir gain de cause, est-on à un point de bascule du quinquennat ? F.B. C’est possible. Sur l’hôpital, le gouvernement ne prend toujours pas la mesure des difficultés et n’y répond que partiellement en tentant de diviser les soignants pour qu’ils n’appellent pas à manifester le 5 décembre. C’est (…) sans doute le signe de leurs craintes. Sur les retraites, pour désamorcer la mobilisation, il prétend ouvrir la discussion mais uniquement sur la base de son système par points : il n’y a pas de dialogue. Au-delà des seules retraites, la vie chère mine le moral des ménages et plombe leur porte-monnaie. Le 5 décembre, ce sont aussi ces questions qui sont à l’ordre du jour. D’ailleurs, les gilets jaunes appellent à manifester. Quant à la gauche, sa responsabilité est immense. Dans une société si fracturée, l’insurrection peut être chaotique. Faute d’offrir une perspective progressiste, c’est l’extrême droite, le fascisme, qui peut être perçue comme l’alternative. À nous, forces de gauche, de travailler main dans la main avec les syndicats, les citoyennes et citoyens qui se mobilisent pour gagner de nouvelles avancées sociales dignes de notre siècle. Entretien réalisé par Julia Hamlaoui pour l’Humanité. 26/11/2019


PCF BÈGLES

Chantiers d’avenir partagé Samedis 30 novembre et 7 décembre, de 9h30 à midi 12, rue du Prêche à Bègles (tram C Belle Rose) Les communistes béglais organisent 4 ateliers publics pour partager réalités / propositions pour un projet municipal ambitieux Ouvert à tou.te.s Ils sont aussi sur les marchés les mercredis et samedis et devant les écoles pour inviter à la manif du 5 décembre

BORDEAUX

A la rencontre des habitants Samedi 30 novembre à partir de 10h Poste du Grand Parc et au marché des Capucins Pour amplifier la mobilisation du 5 décembre et apporter des propositions alternatives de financement de la protection sociale

FÉMINICIDES/VIOLENCES

Les féministes font entendre leur voix à Bordeaux MÉRIGNAC

Loto Vendredi 29 novembre, 20h30, salle des fêtes de Capeyron, place Jean Jaurès - Mérignac Bon d’achats jambons, Poulets fermiers paniers garnis corbeilles de fruits cartons de vins. Bourriche, crêpes, gâteaux, boissons. CARTONS 1 : 3€ – 2 : 5€ – 3 : 8€ – 4 : 10€ – 8 : 15€ – 10 : 18€ – 12 : 20€

BASSIN D’ARCACHON

Nous étions environ 3 000 dans les rues de Bordeaux, ce samedi aprèsmidi, pour manifester contre les féminicides, les violences sexuelles et sexistes, dans le cadre de la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Malgré la pluie battante, nous avons défilé pendant près de 3 heures, femmes, hommes et même enfants, uni.e.s par notre colère face aux 138 femmes mortes depuis le début de l'année en France sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Sous l’impulsion, notamment, du Collectif bordelais pour les droits des femmes, dont la Fédération de Gironde du PCF est membre, militant.e.s féministes, associations, syndicats, partis politiques, étudiant.e.s et citoyen.ne.s ont marché ensemble entre le miroir d'eau et le

commissariat de police, pour faire entendre la voix de celles qu'on ne peut plus entendre. Dans le cortège, une banderole en mémoire de Safia, jeune bordelaise du Grand Parc de 32 ans, mère de 4 enfants et assassinée en octobre par son ex-compagnon. Malgré son dépôt de plainte pour violences conjugales, rien n'a été fait pour arrêter cet homme. Face à ce silence coupable des autorités, les manifestant.e.s ont fait du bruit devant le commissariat pour exiger une véritable prise en charge des victimes et la fin de l'impunité pour les hommes coupables de violence. La communauté kurde bordelaise était présente nombreuse également pour dénoncer les violences faites aux femmes, notamment au Rojava où la population est massacrée par les troupes d'Erdogan, alors même que les combattantes kurdes ont joué un

rôle majeur dans la défaite de l’État Islamique. Des militant.e.s grimé.e.s en clown ont rendu hommage à l'artiste de rue Daniella Carrasco, retrouvée pendue à une clôture, après avoir été torturée et violée par la police chilienne. Cette militante participait à toutes les manifestations contre la dictature en place. Beaucoup de femmes, souvent jeunes, étaient venues avec un panneau qu'elles avaient confectionné pour crier leur colère, témoigner de leur vécu… Sur les visages, partout, se lisait notre détermination pour faire cesser ces violences, pour que le gouvernement, au-delà du très médiatique Grenelle des violences, se dote enfin de la volonté et des moyens de lutter pour que ces drames quasi quotidiens cessent. Pour cela nous avons besoin, notamment, de services publics de proximité avec des personnels formés à l'accueil des victimes, de moyens élargis aux associations d'aide aux femmes, d'éducation à l'égalité dès le plus jeune âge. Et puis nous devons écouter les femmes, les soutenir quand elles parlent. Hier, comme l'avait écrit une jeune femme sur son panneau, nous étions les pieds de celles qui ne peuvent plus marcher, les voix de celles qui ne peuvent plus parler. Pour toutes ces femmes, en France et dans le monde, les féministes ne sont pas prêt.e.s de se taire ! M.C. Gonzalez

Réunion publique Samedi 30 novembre, 15 h, à Lanton. Maison de quartier de Taussat (angle rue de la Gare et rue Elisabeth). Thème « Les Transports » Les communistes s’engagent pour défendre avec les citoyen.ne.s toutes les urgences sociales, économiques, environnementales, parce qu’il faut reprendre la main sur le travail, sur les services publics, sur les communes. Oui, l’énergie, les transports, l’école, l’eau, le traitement des déchets… sont des questions locales mais aussi nationales.

DÉCLARATION DU PCF

Contre les violences faites aux femmes Le PCF a participé à la marche contre les violences faites aux femmes. Cette année, la manifestation avait une résonance toute particulière alors que le 132e féminicide venait d’être perpétré et que le Grenelle des violences conjugales se tient depuis le 3 septembre dernier. L’égalité entre les femmes et les hommes a été érigée en grande cause nationale du quinquennat. Pourtant toutes les politiques publiques réalisées par le gouvernement vont à l’encontre de l’ambition affichée par Mme Schiappa. La casse des systèmes de Sécurité sociale et de l’Assurance chômage, la récente réforme des retraites, le projet de réforme de l’APL ou encore la baisse de 57 millions de la part allouée aux centres d’hébergement et de réinsertion sociale mettent les femmes en première ligne face à la précarité et donc aux violences. Les violences contre les femmes sont systémiques et la précarité est l’une des premières barrières qui empêche l’autonomie et donc la sortie des violences. Contrats précaires, hausse des prix et des loyers ou désengagement de l’État qui affecte les services publics comme ceux de la santé, de la police, de la justice et du système associatif notamment, ce sont d’abord et surtout les femmes qui en pâtissent.

Carnet « Claire et José Ovejero et leur famille, très touchés par les innombrables marques de sympathie et d'amitié qui leur ont été témoignés lors du décès de leur fils Olivier, et dans l'impossibilité de répondre à toutes, vous remercient de votre présence à leur côté. » Les Nouvelles 28 novembre 2019 • 7


CULTURE & SOLIDARITÉ

NOUVELLES IDÉES REÇUES

CONFÉRENCE/FORMATION

par Gérard Loustalet Sens www.nir-33.fr

Forces de la Culture

Vendredi 22 novembre à la fédération du PCF, L'Ormée (publication départementale du secteur culturel du PCF) et la toute neuve commission Culture, accueillaient Pierre Dharréville, député communiste de Martigues et nouveau responsable national à la Culture. La qualité des propos introductifs, la richesse des échanges auraient mérité une plus grande participation. Mais la petite trentaine de présent.e.s, harmonieusement répartie entre femmes et hommes, élus et militants, communistes et sympathisants, n'a pas regretté le déplacement. Sébastien Laborde présentait l'initiative en soulignant combien, pour les communistes, la culture, loin d'être un simple « supplément d' âme » (André Malraux), est un terreau d'émancipation, de partage d'expériences, de développement de l'esprit critique et de soutien à toutes les formes de créativité. En préambule, Pierre Dharréville adressait ses félicitations à l'existence de L'Ormée en Gironde, unique publication culturelle communiste départementale sur le territoire. Sa venue en Gironde avait notamment pour but de présenter le travail

collectif, fruit de multiples séances ouvertes, ayant abouti à la publication de l'ouvrage Culture en force*. Ces travaux, loin d'être figés, sont une « mise à jour non définitive », une étape, dont chacun.e peut s'emparer pour débattre et rendre visible la culture, si familière et si ignorée. Réduire l'action culturelle à des coûts (pass-culture, loto du patrimoine…) et des coups (événements clinquants), c'est oublier que la culture n'est pas une offre mais une construction dans l'expérience, dans « l'exploration de soi-même et du monde ». Les forces libérales se satisfont sans scrupule d’initiatives suscitant moins de critiques de l'ordre établi et des dominants qui s'en servent. Il n'est pourtant pas de culture sans remise en cause des dominations dans la société. Patriarcales et capitalistes, elles s'exercent dans les discriminations post-coloniales, sur les femmes, dans le monde du travail. Par exemple les comités d'entreprise subissent les pressions, les incitations diverses de marchandisation de la culture. « Encourager les imaginaires et les faire partager »

Pierre Dharréville montrait à quel point la culture sous toutes ses formes irrigue notre société et constitue un

enjeu pour nourrir le réel, lui donner du sens, ce qui implique que les politiques et la politique s'en emparent. Les communistes entendent ainsi, non pas imposer mais créer les conditions pour développer la culture et sa diversité, « encourager les imaginaires et les faire partager ». Bien sûr, la proximité des élections municipales a été évoquée, P. Dharréville rappelant à quel point les communistes peuvent s'appuyer sur la richesse du bilan de leurs municipalités, mais aussi combien les pratiques actuelles (activités quotidiennes d'éducation populaire, fêtes, Bègles et son Nouveau Festival des Terres Neuves, les débats…), étaient autant d'atouts pour nourrir les programmes et l'avenir. Plus d'une dizaine d'interventions, remarques et comptes rendus d'expériences ont permis d'entrer dans le vif. Réduire l'éducation en 2020 à « lire, écrire, compter, se respecter », comme le veut Blanquer, c'est reconnaître que les objectifs des dominants restent ceux… du XIXe siècle. Apporter au peuple une culture « à consommer sans modération » ou une culture figée, exaltant une identité mensongère, sont autant d'impasses insatisfaisantes. Avec la diversité des approches, des expériences, la culture s'enrichit du réel et le nourrit. Pierre Dharréville, rappelant Aragon, remarquait que « la littérature nous dit du monde ce que la science ne nous dit pas », ajoutant que « la culture ne fuit pas le réel mais nous invite à le voir autrement »… pour le transformer. Vincent Taconet * Culture en force, Avant-propos de Pierre Dharréville (éditions du croquant- 10€ -285 p.)

Faire rêver

Sébastien Laborde présentait le livre, Culture en force, co-écrit suite à la Convention du PCF pour la Culture tenue à l’automne 2018.

CHRONIQUE

« (…) Aujourd’hui la culture, la création artistique, littéraire, musicale… sont la proie de la sphère financière, pour deux raisons : la recherche de nouveaux marchés, de profit immédiat et pour asseoir sa domination. La culture est produit de consommation, qui s’achète et se vend. La dimension civilisationnelle, celle qui nous fait humains et que nous faisons société, est vidée de sa substance, de sa liberté et de sa créativité. (…)A quelques mois des élections

Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest S.A.S. au capital de 37 000 euros Associés (à parts égales) : L. Chollon, F. Mellier, S. Laborde, M. Lavallée Directeur de la publication : Frédéric Mellier Abonnement 1 an : 25 euros. Abonnement de soutien : 40 euros Rédaction, composition, impression : S.A.S. Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Tél. 05 56 91 45 06 - Annonces légales : annonces@nbso.fr Comptabilité : compta@nbso.fr - Redaction/Proposition d’article : redaction@nbso.fr @nvlbx Les nouvelles de bordeaux nbso.fr Commission paritaire de presse : 0123 C 85932

8 • Les Nouvelles 28 novembre 2019

municipales, (…) la question culturelle est essentielle, au même titre que celles plus « matérielles » du logement, des transports, de l’accès aux services publics… L’ambition de la convention était de réconcilier l’art, la culture, et l’éducation populaire. Cela implique des batailles immédiates : pour un grand service public de la culture, empêché aujourd’ hui par l’austérité budgétaire ; l’action pour que la culture et l’art reviennent dans les espaces publics, à l’école et au travail ; un accès égal dans tous les territoires, avec les possibles qu’ouvre le numérique. » Cet enjeu est aussi posé au PCF, « pour l’éducation populaire, comme son université permanente, ses revues, ses journaux, et ici en Gironde l’originalité da sa revue culturelle, l’Ormée. La culture, la création, la société ont cruellement besoin d’ imaginaire, d’ horizons nouveaux, de casser les codes, de faire rêver en un mot. »

Maccarthysme Dans la recherche universitaire, de nouveaux champs d'investigation apparaissent constamment. Et c'est tant mieux. Des hypothèses inédites, des enquêtes, des revues de question et des recherches de sources, des conclusions toujours provisoires, c'est le quotidien du chercheur. C'est ainsi que des problématiques originales se mettent en place, constituant ce qu'en jargon universitaire on appelle un nouveau paradigme. Il est très rare qu'un courant de recherche en voie de constitution fasse l'objet d'un appel à la censure voire d'une demande d'interdit. Cela a été le cas, à juste titre, des thèses du négationnisme et de leur enseignement consistant à réfuter ou à minimiser le génocide des Juifs par les nazis et l'existence des chambres à gaz. C'est aujourd'hui le sort que certains voudraient réserver à la modeste éclosion d'une théorie ultra-marginale à l'université sous l'enseigne des études décoloniales. Le courant décolonial se situe dans le prolongement des études post-coloniales, déjà elles-mêmes très mal vues par les gardiens installés d'une doctrine républicaine dont on voudrait nous faire croire qu'elle n'a jamais prêté la main aux entreprises coloniales et à leurs justifications racistes. En 2018, ce sont « 80 intellectuels » -liste où se côtoie tout ce que l'académisme compte de plus conformiste, d'Elisabeth Badinter à Pierre Nora en passant par l'inévitable Finkielkraut et quelques égarés comme Patrick Pelloux- qui s'en prennent avec une étonnante violence à ce qu'ils appellent le « décolonialisme » accusé d'être « hégémonique » à l'université -ce qui est d'une rare invraisemblance- et de s'attaquer « frontalement » à un « universalisme républicain » fétichisé et jamais interrogé par les gendarmes de l'ordre idéologique établi. Des organisations et des associations sont nommément dénoncées et livrées à la vindicte publique : Parti des Indigènes de la République (PIR), Conseil représentatifs des associations noires (CRAN), Les Indivisibles (Rokhaya Diallo), Campagne Boycott Désinvestissement Sanction (BDS), etc. Bref, que des indigènes dont l'ingratitude n'a d'égale que l'antirépublicanisme ! La chasse aux déviants de l'ordre républicain officiel est ouverte. A l'université cela rappelle de fort près le maccarthysme qui, aux Etats-Unis dans les années 50, avait fait de la traque des communistes un sport de combat. Et voilà qu'ils se sont mis à « 80 psychanalystes » pour en rajouter une couche (le Monde, 30.09.2019) dans la forme la plus complotiste du maccarthysme. Il paraît que la « pensée décoloniale » « s'insinue à l'université », « menace », « se répand » avec des « revendications totalitaires » et des « dérives sectaires »… Il n'y a plus qu'à embaucher (ou débaucher) Freud pour éduquer ces indigènes ignorants qui se croient affectés par le racisme et les discriminations alors qu'il ne s'agit que d'impressions personnelles, ce qui se dit en langage freudien : «processus singuliers de subjectivation ». Il n'y aurait que faire d'un « déterminisme culturel et social » qui ignorerait la « primauté du vécu personnel ». Ben voyons ! Tout le reste ne serait que « position victimaire », jusqu'à accuser les indigènes de ce que justement ils subissent : « racisme masqué », « sectarisme », « détestation du différent », « exclusion de fait »… Un dévoiement aussi stupéfiant de la théorie psychanalytique laisse pantois. On va même reprendre une de ces formules freudiennes vidées de toute substance à force d'être outrancièrement vulgarisée et mises à toutes les sauces : les indigènes se croient différents, racisés, discriminés ? Mais non, ils sont seulement enclins au « narcissisme des petites différences »… Non mais pour qui ils se prennent ! Petites différences en effet que les contrôles au faciès, les refus d'embauche, le tri dans l'accès au logement, les stigmatisations culturelles… Ils feraient mieux d'aller voir un psychanalyste… Toutes ces manœuvres d'intimidation s'en prennent aux études décoloniales avec pour objectif le déni d'un véritable racisme sans race qui se répand aujourd'hui que le racisme biologique est disqualifié. C'est un racisme colorblind, « aveugle à la couleur », mais bien réel qui conforte la bonne conscience universaliste. Comme disait l'historienne Ludivine Bantigny sur Médiapart : « cachez ce racisme que je ne saurais voir et s'il vous plaît n'en parlez pas ou sinon… ». Le mouvement décolonial produit un dévoilement de ce racisme ordinaire et structurel qu'un républicanisme universaliste abstrait satisfait de lui-même voudrait masquer.


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.