Nouvelles N° 2294

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Jeudi 14 février 2019 - N° 2294 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

E I T A R C ER O M G É N D DA EN t5

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MOBILISATION

EUROPE

SOLIDARITÉ À BORDEAUX

Apple paye tes vrais impôts !

Le PCF lance sa campagne à Marseille

Soirée d’intégration pour Drita

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ACTUALITÉ MOBILISATION

DÉBAT D’ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES À LA MÉTROPOLE

Apple paye tes vrais impôts !

La politique gouvernementale plombe les comptes publics À l’occasion du débat d’orientation budgétaire, lors du dernier Conseil de métropole, Léna Beaulieu est intervenue, au nom des élus communistes. Elle y a dénoncé une « cure d’austérité imposée à l’action publique » qui « détricote les solidarités » pourtant essentielles et « s’avère inefficace pour répondre aux enjeux économique et budgétaire de notre pays ». Ci-dessous son intervention.

Une quinzaine de militants communistes bordelais se sont rassemblés, vendredi 8 février, devant la boutique Apple pour dénoncer les pratiques d’optimisation et d’évasion fiscale de la multinationale, avec le sénateur Fabien Gay en renfort (voir aussi page 7). « Apple paye tes vrais impôts ! », cette interpellation n’a pas manqué d’arrêter les passants. Les communistes les informaient alors du fait que la multinationale vient de conclure un accord amiable avec le Fisc français sur ses arriérés d’impôts pour 500 millions d’euros. « Avec cette transaction, Apple reconnaît donc qu’elle use d’un mécanisme d’évasion fiscale. Mais combien la multinationale nous doit-elle réellement ? Interroge le PCF. Combien les Amazon, Facebook, Google et autres Nike, Mc’Do, etc. font-ils échapper au Fisc et donc aux moyens de financer nos services publics ? » Un certain nombre de réponses existent, notamment révélées par les Paradise papers en 2018 : 40 % des profits des multinationales échappent à l’impôt, grâce au transfert artificiel dans des paradis fiscaux, soit 529,5 milliards d’euros. 2,4 et 6 milliards d’euros sont les montants des pertes de recettes en France d’impôts sur la société (IS) dues aux baisses imposables et aux transfert des bénéfices. Au même titre que l’État a mis le prélèvement des impôts à la source pour les citoyens, le PCF propose de le faire pour les activités des multinationales réalisées en France, dont le chiffre d’affaire peut être connu grâce à la TVA. C’est dans ce sens que Fabien Roussel, député communiste, a déposé un projet de loi à l’Assemblée nationale.

DÉCÈS DE JEAN RENÉ MELLIER

Communiqué de l’Association du Souvenir des Fusillés de Souge « Jean René Mellier est décédé. Souffrant depuis quelques années, il avait néanmoins, le 23 octobre dernier, déposé la gerbe de notre association lors de la cérémonie commémorative annuelle au Mémorial de Souge. Son père René Mellier, dessinateur à la SNCASO, résistant communiste, a été fusillé le 21 septembre 1942 lors de la fusillade massive (70 otages) décrétée par les nazis en représailles d’un attentat contre des soldats allemands au cinéma Le Rex à Paris. Si Jean René n’a pas connu son père, il a été élevé dans le souvenir de son engagement. Il a représenté longtemps en Gironde l’Association nationale des familles de Fusillés dont il a été un des administrateurs nationaux, a aidé de nombreux descendants à faire valoir leurs droits et a collecté de nombreux renseignements concernant les victimes et leurs familles. Durant plusieurs décennies il a participé à l’animation de notre association, en tant qu’administrateur, membre du bureau, secrétaire et notre récente assemblée générale l’avait encore élu administrateur. Il a notamment accompagné de nombreux scolaires visiter le mémorial à Souge où, avec émotion et précisions, il évoquait les raisons de la montée du nazisme, l’attitude liberticide de Vichy, la résistance, la répression et la nécessité aujourd’hui de continuer à honorer la mémoire des victimes. Merci pour tout ton apport Jean René. Toutes nos condoléances à sa famille. » Jean Lavie, Secrétaire général de l’Association 2 • Les Nouvelles 14 février 2019

« La politique macroéconomique du gouvernement, d’allégement des charges fiscales sur les plus riches et les entreprises, est loin de donner les résultats qui avaient été annoncés et plombe les comptes publics. Plus grave, elle obère l’action publique, ce qui tend à peser sur la croissance et l’emploi. Le nœud de la croissance économique reste la question de l’emploi. Si l’action de l’État n’est pas la seule en question, celle-ci peut peser positivement ou négativement sur la conjoncture économique et finalement sur les comptes publics. La politique du ruissellement voulu par le président de la République ne permet en rien de construire une croissance solide

pour notre pays. La cure d’austérité imposée à l’action publique détricote les solidarités essentielles pour nos concitoyens et s’avère inefficace pour répondre aux enjeux économique et budgétaire de notre pays. C’est dans ce cadre que s’établit notre débat sur le budget de la métropole. En effet, notre établissement est cruellement dépendant des décisions du gouvernement. Les gouvernements précédents ont largement amputé notre autonomie financière, notamment avec la suppression de la taxe professionnelle, nous rendant totalement dépendants des subsides de l’État. Les chiffres sont là, et cruels pour notre établissement puisque les baisses de dotations sont à hauteur de 200 millions depuis 2013. Je sais que certains n’aiment pas ce mot parce que cela froisse leurs oreilles mais incontestablement, nous sommes face à une politique d’austérité. Les ratios de ce rapport illustrent ce manque et marquent une nette dégradation, que ce soit pour notre taux d’épargne ou notre capacité de désendettement. 200 millions, ce sont autant d’investissements que nous n’avons pu réaliser et, au vu de l’état de nos piscines

sur l’agglomération, ils auraient été les bienvenus. Ces pertes sont en partie compensées par la contribution des ménages et des usagers. En effet, comme le montre le rapport sur les DOB, la TEOM a progressé de 18 millions en 5 ans et chaque année, les tarifs de transports augmentent de 3 %. Nous restons, pour notre part, opposés à la logique de contractualisation qui ne vise qu’à contenir nos dépenses en personnel. Nous sommes un établissement de service public ; pour réaliser celui-ci, nous avons besoin d’hommes et de femmes qualifiés pour répondre aux besoins quotidiens, instruire des dossiers, pour réaliser des investissements. Les fonctionnaires dans cet établissement, comme dans l’ensemble de la fonction publique, ne sont pas une charge mais contribuent à la création de richesses, répondent à des besoins sociaux essentiels. Je voudrais conclure sur une note positive, en notant que les investissements sur la métropole restent à un haut niveau et nous pouvons nous en féliciter. Mais incontestablement, les nuages s’amoncellent. »

PÔLE NAVAL À BACALAN

Développons le trafic de marchandise ! Les élus communistes à la Métropole ont exprimé leur « très grande satisfaction » à l’occasion de la délibération sur le soutien à la création et au développement d’un pôle naval à Bacalan, sur les bassins à flots et Bassens. Mais ils veulent aller beaucoup plus loin dans l’utilisation de cette voie navigable. « Ce fut un des combats de notre collègue

Vincent Maurin, qui n’a eu de cesse de défendre ce projet de cluster Refit avec la réhabilitation des formes de radoub, qui sont aujourd’hui au cœur des financements du plan État-Région », a rappelé Jacques Padie. « Nous nous satisfaisons du fort développement du tourisme fluvial qui permet de redécouvrir notre si beau fleuve. Mais dans son histoire, il a connu un fort trafic de marchandises et nous regrettons qu’aujourd’hui, cet axe soit si souvent oublié dans le trafic

de fret. Une barge, ce sont des dizaines de camions en moins sur la rocade, déjà largement thrombosée. Airbus a su ouvrir la voie et passer sous le pont de pierre. Travaillons à développer ce trafic, notamment pour le transport des déchets ou des matériaux de construction nécessaires aux très nombreux chantiers sur la Métropole, développons le trafic en lien avec le port du Verdon, véritable atout pour le commerce international. »

MOBILISATION

La Santé : un droit pour tous

Les 7 et 8 février, la Cité Mondiale accueillait le deuxième forum Santé-Avenir. La ministre, Agnès Buzin était annoncée ; l’occasion pour le collectif « La Santé un Droit pour Tous » de l’interpeller pour exiger la fin des dépassements d’honoraires médicaux et de la fermeture d’hôpitaux publics.

Malgré l’horaire très matinal et les conditions météorologiques aléatoires, une trentaine de militants se sont retrouvés sur le parvis pour aller à la rencontre des participants et passants. La ministre n’est pas venue ; agenda chargé parait-il !

L’opération est tout de même une réussite, au regard des discussions avec les gens qui comprenaient très bien que les dépassements d’honoraires médicaux, les multiples franchises sur les médicaments, les forfaits hospitaliers ou sur les actes lourds, sont devenus un problème de santé publique. Une Santé à plusieurs vitesses qui s’est bien éloignée du principe fondamental de la Sécurité Sociale : « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». Le collectif fait signer une pétition : « Supprimons les dépassements d’honoraires médicaux » accessible par le lien : http://chng.it/wcNvz5XX. Jean-Jacques Bordes


ACTUALITÉ

Editorial

EUROPE

Changeons de propriétaires

Le PCF a lancé sa campagne pour les européennes lors d’un meeting à Marseille le 5 février au soir, sous le slogan : « L’Europe des gens, pas l’Europe de l’argent ! » Un objectif qu’incarne, selon Ian Brossat, la liste qu’il conduit avec 50 % d’ouvriers et d’employés et qui veut imposer d’autres propriétaires à l’Europe des banquiers. La liste du PCF menée par Ian Brossat veut incarner « l’Europe des gens » or il existe un gouffre entre la société et la représentation politique. « Le Parlement européen compte 3 ouvriers pour plus de 700 eurodéputés, explique le candidat. Cela en dit long et contribue très largement à la défiance. Nous, nous avons construit une liste à l’image de la société française, composée à 50 % d’ouvriers et d’employés ». Pour Ian Brossat, cette liste traduit la volonté de sortir l’Europe des mains des banquiers et des lobbies. Elle est aussi à l’image des mobilisations qui se sont levées depuis de nombreux mois contre la politique d’Emmanuel Macron, « avec des gilets jaunes, des

cols bleus, des blouses blanches, des robes noires… » « En cette période, beaucoup s’interrogent sur l’avenir de la gauche, se demandent où elle est. En réalité, elle est partout. Ce sont ces ouvriers qui occupent leur usine pour la sauver, ces salariés d’EDF qui font passer l’électricité à tarif réduit le 24 décembre, ces hommes et femmes qui font vivre tous les jours la solidarité avec les migrants… C’est cette gauche-là que nous avons cherché à fédérer. J’y vois les ferments d’une gauche nouvelle, hors les murs, sociale, qui ne se reconnaît pas toujours dans les partis politiques, mais qui peut se retrouver dans notre liste ». Mais pour arriver à une « Europe des gens », il faut des transformations. « Il faut rompre avec la logique des traités européens fondée sur deux dogmes : l’austérité avec sa règle absurde des 3 %, et la concurrence qui nous incite à nous tirer dans les pattes à coups de dumping, social et fiscal. » Le candidat communiste décline ce que cela implique concrètement : en finir avec la concurrence entre les travailleurs par un Smic européen harmonisé par

le haut, interdire les délocalisations à l’intérieur de l’Union européenne et en finir avec le travail détaché, développer les services publics avec un fonds de développement de la Banque centrale européenne. « Ce sera un pilier de notre campagne et, dès la semaine prochaine, j’entame un tour de France des maternités en danger à Creil ». Imposer une autre utilisation de l’argent est aussi fondamental. « Que des pays à l’intérieur même de l’Union se comportent en paradis fiscaux et transforment de fait l’Europe en passoire fiscale n’est pas acceptable. Nous proposons de taxer à la source les multinationales et d’harmoniser par le haut l’impôt sur les sociétés partout en Europe. » Réagissant à l’idée de Macron d’organiser un référendum le même jour que les élections européennes, Ian Brossat estime que l’enjeu européen passerait alors complètement par pertes et profits. « Emmanuel Macron a peur parce que sa conception de l’Europe est massivement rejetée, mais cette élection doit être l’occasion d’en parler. En outre, le président de la République envisage un référendum qui porterait exclusivement sur les enjeux institutionnels. C’est lunaire. Les Français depuis des semaines se mobilisent sur la question de l’ISF, l’augmentation du Smic, des salaires, des pensions de retraite, et on envisage de les interroger sur la diminution du nombre de députés. Les enjeux institutionnels sont importants, mais cela ne règlera pas le problème de pouvoir d’achat rencontré massivement par les Français. »

la youtrerie universelle »), le centre de Paris (« Macron Jews’ Bitch », soit « pute des juifs » en anglais) (« truie juive ») ont été tagués. Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, se défendait lundi sur France 2 de tout « amalgame »… tout en affirmant que c’est souvent « en marge de ces cortèges » de gilets jaunes, où « une part d’extrême gauche et une part d’extrême droite se mêlent », qu’on « retrouve ces inscriptions antisémites ». Et de renvoyer dos à dos, du même élan, extrême droite et extrême gauche à leurs « difficultés à dire qu’(elles) condamnaient les violences sans aucune ambiguïté »… Une énième accusation qui a provoqué de vives réactions. Alexis Corbière a condamné ces actes, dans la foulée du premier secrétaire du PS, Olivier Faure, ou de son mentor, Jean-Luc Mélenchon, selon qui ces tags « expriment la stupidité meurtrière sans fin des préjugés racistes ». Puis le député de la France insoumise a égratigné Benjamin Griveaux, qui « en profite pour faire de la politique politicienne ». Interrogé par l’Humanité, le député PCF Pierre

Dharréville va plus loin. Notant une « recrudescence préoccupante de tous les racismes qui cherchent à s’exprimer », il appelle à « les combattre et les faire reculer ». D’autant plus que le contexte est à la « résurgence d’un certain nombre de courants d’extrême droite qui cherchent à se structurer dans les territoires. Il faut leur opposer une reconquête républicaine ». « Comme toujours, lorsque la crise sociale est forte, explique le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, dans un communiqué, lorsque la question sociale monte, l’extrême droite s’agite et tente de dévoyer l’exaspération populaire vers ses obsessions identitaires, ethniques ou religieuses. C’est sa manière d’exonérer les fauteurs de crise de leurs responsabilités et de faire de l’Autre le bouc-émissaire des problèmes de nos concitoyens. (…) Nous dénonçons les actes antisémites qui se multiplient, comme nous combattons toutes les manifestations de racisme. Leurs auteurs et ceux qui les encouragent, quels qu’ ils soient, doivent être retrouvés, jugés et sévèrement condamnés. »

ANTISÉMITISME

Un air vicié La dénonciation de la montée des actes antisémites, qui a connu un pic inquiétant ce week-end, a donné lieu à des lectures politiciennes, du gouvernement comme du RN. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur dressait, lundi, un bilan sans appel des actes antisémites, qui ont progressé de 74 % en 2018 (541 recensés, contre 311 en 2017). Ce week-end, surtout, un pic a été atteint dans l’ignominie. Samedi, la vitrine du restaurant parisien Bagelstein a été taguée d’un « juden » (juifs, en allemand). Lundi, l’un des arbres plantés à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne) en mémoire d’Ilan Halimi, un jeune homme juif séquestré et torturé en 2006 en raison de son appartenance religieuse, a été retrouvé scié. Le même jour, deux portraits de Simone Veil, ancienne ministre rescapée de la Shoah, dessinés à l’occasion de sa panthéonisation en 2018 par l’artiste C215 sur deux boîtes aux lettres, ont été recouverts de croix gammées ; le siège du Monde (« Micron Rothschild », la « putain de

Et si le « tous ensemble » devenait possible ! Syndicalisme et gilets Jaunes, politique et gilets Jaunes, qui aurait dit il y a quelques mois, quelques semaines que des convergences étaient envisageables ? Et pourtant que ce soit dans les manifestations du 5 février, dans la rencontre de notre sénateur Fabien Gay avec, à leur demande, les gilets jaunes de Libourne, la démonstration a été faite que défiler, discuter, échanger, lutter côte à côte pour une vie meilleure est possible. Les tentatives de faire passer les gilets jaunes comme étant infréquentables et les syndicats, les partis politiques comme étant « tous pourris » ont échoué au fur et à mesure que se sont exprimées dans les ronds-points, dans la rue, les revendications de justice fiscale, d’amélioration du niveau de vie, du manque de démocratie, dénouant ainsi les liens de méfiance parfois légitimes mais surtout entretenus par le gouvernement et le patronat afin d’éviter leur grande peur : la convergence des luttes. Pour faire face à cette situation de crise, le gouvernement a lancé le grand débat national qui, tel qu’il l’a imaginé pourrait se traduire par « questions pour un champion ». Mais là encore, les citoyenne-s ont largement investi ces lieux de réflexion et d’échanges, en comptant bien ne pas se laisser cadrer, orienter ou voler la parole. Si, légitimement, les revendications exprimées lors de ces débats portent sur les inégalités sociales et salariales perçues par beaucoup de Française-s comme insupportables, la responsabilité des entreprises, la toute-puissance des actionnaires ne font pourtant pas ou peu partie des analyses qui en ressortent. La suppression du CICE, la taxation à la source des dividendes des multinationales, le coût du capital, la répartition des revenus et une autre utilisation des richesses, de nouveaux droits pour les salariés dans les entreprises … sont encore loin d’être des mesures essentielles aux yeux des Français-e-s pour plus de justice sociale. Il s’agit bien donc pour nous, militants syndicaux et politiques, d’investir ces débats, de les bousculer, d’en organiser avec d’autres, en débattant des solutions à construire et en pointant les responsables que sont le patronat et la finance avec la complicité du gouvernement. Quant au RIC, qui traduit l’aspiration démocratique manifestée largement par le mouvement des gilets jaunes, il est difficile d’y être défavorable. Mais, pour l’instant, ce qui nous est proposé c’est un référendum d’initiative présidentielle et absolument pas d’initiative populaire et citoyenne. Même si la colère sociale qui s’exprime de diverses façons aujourd’hui présente une tentative certaine de récupération à la fois par Macron et l’extrême droite, ne laissons pas passer les aspirations de justice sociale qui montent dans le pays sans nous en mêler.

Maryse Montangon membre de l’exécutif du PCF 33 et du comité exécutif national

Les Nouvelles 14 février 2019 • 3


DÉMOCRATIE APPEL

LIBERTÉS PUBLIQUES

Nous exigeons les vrais chiffres de tous les blessés depuis l’Acte I

Bienvenue au pays du libéralisme autoritaire

Publié sur le blog Les invités de Mediapart le 6 février 2019. Dominique Cabrera, Annie Ernaux, Lola Lafon, Henri Leclerc, Nicolas Mathieu, Edwy Plenel, Éric Vuillard, avec les gilets jaunes de Commercy, des dirigeants du SNESup, SNJCGT, Solidaires, et 100 autres personnalités, demandent à la ministre de la Santé de publier les chiffres du « nombre de manifestants et de membres des forces de l’ordre qui ont été hospitalisés ». La vérité, rien que la vérité, toute la vérité !

« Les rues de France connaissent l’épisode de répression le plus violent depuis 1968. Une marseillaise est décédée, Zineb Redouane, des lycéens ont été éborgnés, des ados sont mutilés, des femmes et des hommes

apprennent à vivre avec des gueules cassées, avant des mois, voire des années, de réparations esthétiques. Et, cependant, l’administration de la santé publique se tait. Nous sommes choqués par ce silence, plus de 80 jours après les premières violences. À l’État, et en particulier au ministère de la santé, nous demandons de lever le voile, maintenant, sur le nombre de manifestants et de membres de forces de l’ordre : - qui ont été hospitalisés depuis le 17 novembre 2018 et le type de blessures dont ils souffraient ; - qui ont subi des dommages irréversibles (éborgnement, diminution de l’acuité visuelle, surdité, diminution de l’acuité auditive, amputations, etc.). Nous espérons que tous persisteront à soulever ces questions pour que la vérité, rien que la vérité, toute la vérité soit faite. »

RÉFORME

Une Justice au rabais, contre l’avis des professionnels Cette semaine débutait au sénat l’examen du projet de réforme de la justice à laquelle se sont opposé les députés de gauche et qui fait l’unité contre elle des professions de justice. Le texte prévoit certes d’accroître le budget de la justice de 1,6 milliard d’euros en cinq ans, et de recruter 6 500 « équivalents temps plein » pour enfin sortir le secteur de la « situation de sinistre » décrite par l’ex-garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, en 2016. Mais il se fixe aussi, surtout, comme fil rouge de désengorger à tout prix tribunaux et lieux de détention, en misant sur la numérisation, l’accélération et la simplification des procédures civiles et pénales ainsi

qu’une réorganisation des juridictions et des peines, qui pourrait bien se faire sur le dos des justiciables. « Nous sommes devant un bel exemple de la verticalité du pouvoir, de cette arrogance avec laquelle le pays est dirigé », a déclaré le député PCF Stéphane Peu, dont le groupe a demandé un moratoire. L’ancienne ministre (PS) et avocate George Pau-Langevin a, fustigé « un mauvais texte contre la justice, contre les Français ». Une quinzaine d’organisations professionnelles et de défense des droits n’ont cessé d’affirmer leur opposition à ce projet de loi. « Cette réforme sacrifie la qualité du débat judiciaire, l’accès de tous à la justice, les libertés individuelles et les droits de la défense dans une course aveugle à la productivité et aux économies d’échelle. »

SHOW PRÉSIDENTIEL

Déni de démocratie Dans une question au gouvernement le 4 février, le sénateur communiste Pierre Laurent, a interpellé sur les conditions d’exercice du pluralisme dans le débat politique et médiatique. « Déjà, vous voulez restreindre la liberté de manifester. La liberté de la presse, elle, est mise à mal comme l’illustre la lamentable tentative de perquisition de Mediapart ou la situation de L’Humanité qui appelle à la plus grande solidarité. Mais qu’en est-il du grand débat national ? Il est censé donner prioritairement la parole aux Français. D’ailleurs des centaines de milliers de personnes s’en emparent 4 • Les Nouvelles 14 février 2019

et utilisent toutes les occasions de se faire entendre. Mais force est de constater que s’il est impossible de fermer le couvercle de la marmite, c’est le Président de la République qui se taille la part du lion médiatique avec des retransmissions intégrales des shows présidentiels dans lesquels il ne répond d’ailleurs jamais positivement aux demandes exprimées et passe son temps à plaider pour sa politique. (…) Quelles mesures le gouvernement et les garants du débat national entendent-ils prendre pour mettre fin à ce déni de démocratie et rétablir au plus vite le pluralisme des temps de parole politiques dans les médias et les espaces de débats ? »

7 000 Arrestations, 1 900 blessés, 1 000 condamnations en deux mois… cette répression policière – et judiciaire – ne suffisait pas pour défendre l’ordre établi. Désormais, le pouvoir attaque la liberté de manifester et le droit à l’information. À la violence policière s’ajoute, comme le déplore l’avocat Raphaël Kempf, une « violence judiciaire » orchestrée par un parquet plus que jamais aux ordres. Avec la loi dite anti-casseurs, votée le 5 février par l’assemblée nationale, il s’attaque désormais au droit de manifester. Décryptage d’une véritable dérive autoritaire. 1 - La loi « anti-casseurs » s’attaque au droit de manifester

Interdiction de manifester, fouilles, fichage… si beaucoup de députés trouvaient à redire au texte, peu pourtant ont assumé de voter contre. Le texte dit « anti-casseurs » a donc été voté largement le 5 février par la majorité LaREM, avec l’appui de la droite LR, d’une majorité de députés Modem et UDI (387 pour, 92 contre) ; 74 députés parmi la majorité et ses soutiens se sont abstenus, témoignant des questions lourdes qu’il soulève en termes de libertés publiques, notamment son article 2 qui donne aux préfets le pouvoir d’interdire à quelqu’un de manifester avant même toute infraction commise. Le groupe UDI devait ainsi en majorité voter le texte, quand bien même Michel Zumkeller (UDI) pointe l’absence de débat – avec un texte de la rapporteure déposé deux minutes avant l’heure limite de dépôt des amendements – et s’insurge contre un texte outrancier rédigé par la droite du Sénat. Le gouvernement s’est saisi de la proposition LR, et c’est une version à peine édulcorée qui a été mise au vote, avant de revenir au Sénat le 12 mars. Le texte, convient aussi Olivier Becht (UDI), est ainsi « bricolé » en cours de route, durant le travail parlementaire. Si le gouvernement procède de la sorte, c’est que, s’il avait présenté son propre projet de loi, il aurait dû présenter en même temps une étude d’impact, « ce dont il ne voulait sans doute pas », relève Michel

Zumkeller. Pour la socialiste Valérie Rabault, « il y a déjà dans la loi le délit de préparation à un acte de violence avant une manifestation », l’arsenal est suffisant. Son groupe annonce un recours devant le Conseil constitutionnel. Sébastien Jumel (PCF) effectue un parallèle avec la tentative de perquisition à Mediapart, lundi, et évoque « la trumpisation d’Emmanuel Macron ». « C’est une liberté de la presse sous contrainte que veut Macron », dénonce le député de seine-maritime. Sa collègue Elsa Faucillon critique une loi qui « fait le trait d’union entre casseurs et manifestants, alors que des lois existent déjà », dans un « oubli de la mémoire », rappelant que « notre fête nationale, c’est le 14 juillet », et que cela devrait faire sens aujourd’hui. 2 - Une mansuétude coupable face aux violences policières

La loi anti-casseurs va de pair avec la propension du gouvernement à fermer les yeux sur les violences policières qui émaillent les rassemblements de gilets jaunes depuis trois mois. Face aux vidéos accablantes et à un bilan déjà historique (1 mort, 129 blessés graves, dont 20 énucléations et 4 mains arrachées, selon le site Désarmons-les), l’exécutif, loin de condamner les exactions de certains agents, joue la stratégie de la tension, espérant écœurer la contestation sous la lacrymo et les batailles rangées avec les casseurs. À ce jeu-là, le déni de réalité prend des proportions ubuesques. « Aucun policier n’a attaqué des gilets jaunes », osait Christophe Castaner, le 15 janvier, alors que l’IGPN (la « police des polices ») a été saisie de 116 enquêtes et a reçu plus de 300 signalements. Même irresponsabilité face à ceux (CGT, Ligue des droits de l’homme, Défenseur des droits) qui demandent à suspendre, lors des manifs, l’emploi des LBD 40 et autres grenades GLIF4, à l’origine de graves mutilations. Pas question ! « Ces armes intermédiaires sont fondamentales », a martelé le secrétaire d’État à l’Intérieur, Laurent Nunez. Pour le sociologue Christian Mouhanna, c’est clair : le gouvernement accroît une dérive violente du maintien de l’ordre sans chercher de procédés plus pacifiques comme la négociation et l’isolement des casseurs. « Le ministère de l’Inté-

rieur semble n’avoir aucun recul sur la gravité de la situation, s’étonne le chercheur. On est dans une pauvreté de réflexion incroyable. Même un ministre jugé réactionnaire comme Charles Pasqua avait supprimé les voltigeurs à son époque… » 3 - Une ingérence dans la fabrique de l’information

La tentative de perquisition de Mediapart, lundi 4 février, est une atteinte directe à la liberté de la presse, et surtout au secret des sources qui permet aux journalistes de recueillir des informations sensibles. « Ce secret est protégé par la loi française et ne peut céder que lorsqu’il y a un motif prépondérant d’intérêt public », explique, très ferme, Christophe Bigot, avocat spécialiste du droit de la presse. Or, « on ne voit pas bien comment une atteinte à la vie privée peut entrer dans ce cadre ». Et quand bien même le parquet, hier, invoquait une enquête pour « utilisation de matériel d’interception », l’avocat s’étonne qu’on puisse le reprocher à Mediapart. Et, insiste-t-il, « ce serait, le cas échéant, à un juge de trancher ». Il est aussi très ferme sur les propos d’Emmanuel Macron rapportés par le Point le week-end dernier. Pour garantir une information « neutre », le chef de l’État plaiderait pour « une forme de subvention publique assumée, avec des garants qui soient des journalistes ». Soit une sorte de conseil de la « vérité ». Ce qui fait bondir Christophe Bigot, qui parle « d’une ingérence et d’une intrusion dans la fabrique de l’information ». Ce conseil de déontologie « est totalement contraire à la tradition juridique du droit de la presse en France ». Selon lui, ce droit repose « sur un principe de liberté et un certain nombre d’infractions très précises ». 4 - Une justice aux ordres, ça peut servir…

C’était il y a quelques mois, les gilets jaunes ne battaient pas encore le pavé, mais l’affaire Benalla était déjà venue rappeler que des magistrats aux ordres – ou redevables –, ça pouvait servir. « J’assume parfaitement le fait d’être certain que celui qui sera proposé à la nomination (au poste de procureur de Paris – ndlr) sera parfaitement en ligne et que je serai parfaitement à l’aise avec ce procureur », avait admis


E EN DANGER Édouard Philippe, le 2 octobre. « En ligne et à l’aise »… exit, donc, les trois candidats proposés par la garde des sceaux pour succéder à François Molins, au profit du très macron-compatible Rémy Heitz. On comprend mieux aujourd’hui pourquoi… Révélé par le canard enchaîné du 30 janvier, un courriel du parquet destiné aux magistrats parisiens délivre ainsi d’incroyables consignes de fermeté à l’égard des gilets jaunes, invitant les juges à « maintenir »

l’inscription au fichier du traitement des antécédents judiciaires même lorsque « les faits ne sont pas constitués » et à ne « lever les gardes à vue » des manifestants interpellés que « le samedi soir ou le dimanche matin ». On n’est jamais trop prudent… autre illustration de cette dangereuse proximité entre pouvoirs exécutif et judiciaire : l’invraisemblable tentative de perquisition de Mediapart. « Engager une procédure pareille, aussi sensible, qui menace liberté de la presse et protection des sources, est très surprenant », estime Vincent Charmoillaux, vice-procureur au TGI de Lille et secrétaire général du syndicat de la magistrature. « C’est même surréaliste, appuie Me François de Castro. Le responsable du parquet ne se cache même plus d’agir pour le compte de celui qui l’a nommé ! Et ce, sans saisir un juge des libertés, qui aurait pu, lui, imposer une perquisition sans assentiment… » pour l’avocat parisien, « le procureur de paris n’a sans doute jamais été aussi dépendant du pouvoir exécutif » Avec L’Humanité du 06/02/19

DES DÉPUTÉS S’ENGAGENT POUR LA LIBERTÉ D’EXPRESSION

La République ne peut pas se passer d’humanité Sébastien Jumel (PCF) : Sans l’Huma, l’affaire Audin n’aurait jamais été bousculée, sans l’Huma, la parole aux sans grades, à la France qui manque, à la France qui souffre ne serait pas le quotidien et donc l’appel à la mobilisation pour que la République ici ne puisse pas se passer d’humanité, c’est un appel qu’on propose de décupler à plusieurs voix.

Parmi les nombreux messages que reçoit le journal l’Humanité qui a été placé en redressement judiciaire (lire page 7), trois députés expriment leur soutien dans une vidéo diffusée sur le site du journal. Ci-dessous la transcription. François Ruffin (FI) : « Les gueules cassées demandent des comptes », tu peux te demander si cette Une-là tu l’auras un jour dans le Parisien, si tu l’auras dans Les Échos et même au Monde ou à Libération. Vraisemblablement que non. Donc la nécessité qu’un journal puisse apporter cela va de soi. Ce qui ne va pas de soi c’est que les aides à la presse aujourd’hui servent essentiellement à diffuser des catalogues publicitaires. Donc il faut qu’il y ait une réorientation des aides à la presse vers les titres qui disposent le moins de publicités.

Richard Ramos (Modem) : Moimême, au Modem, qui ne suis pas de cette sensibilité politique, le premier mot pour définir le Modem en 2007 ça a été un projet « humaniste ». L’huma, c’est l’humain d’abord. Ça veut dire aller chercher toujours ceux qui sont le maillon le plus faible de la société. Et le diagnostic est toujours juste dans L’Humanité, après on peut diverger des fois sur le remède au diagnostic mais ce n’est pas un journal technocrate, c’est un journal qui va chercher ce qui n’est pas visible, ce qui n’intéresse personne, les gens qui sont cassés, qu’on ne met pas en avant. Je pense que tous les gens qui ne sont pas communistes, qui ne sont pas pour L’Humanité doivent quand même s’abonner à L’Humanité. Je vais m’abonner à L’Humanité car ça ne peut pas disparaître, c’est une part de liberté qui disparait si le journal L’Humanité disparait. Comme on l’a fait avec Charlie Hebdo à un moment donné, faut qu’on prenne un abonnement car cette liberté d’expression passe par la liberté de la presse et elle passe par la survie de L’Humanité.

RÉVÉLATIONS MÉDIAPART

L’affaire Benalla en dit long sur l’état de notre démocratie Alors que les institutions sont contestées, les révélations du journal en ligne Mediapart sur l’affaire Benalla ouvre boîte de Pandore où se côtoient impunité, business, mélange des genres, affaires étrangères et en disent long sur l’évolution de notre République. Le 4 février au matin, deux procureurs et trois policiers ont tenté de perquisitionner les locaux de Mediapart dans le cadre d’une plainte pour « atteinte à l’intimité de la vie privée ». Pour protéger le secret des sources, inestimable dans le rôle démocratique que joue la presse, les journalistes se sont opposés à la perquisition mais ont, en revanche, donné suite à la réquisition formulée par les juges de l’affaire du 1er Mai, en remettant sept enregistrements, dont un inédit, dans lequel Benalla et Crase discutent de détruire des preuves. Quatre jours auparavant, le journal en ligne avait révélé ces enregistrements de conversations, du 26 juillet dernier, entre Alexandre Benalla et Vincent Crase, les deux protagonistes de l’affaire. À cette date, les deux compères étaient sous contrôle judiciaire et n’avaient pas le droit de communi-

quer. On y apprend notamment que, contrairement à ce qu’Alexandre Benalla a affirmé sous serment devant la commission d’enquête parlementaire du Sénat, il avait connaissance des liens et du montage financier qui liait l’entreprise de Vincent Crase, Mars, et Iskander Makhmudov, oligarque russe, proche du Kremlin. Depuis, la dernière enquête de Mediapart a révélé qu’Alexandre Benalla a bien été l’architecte, depuis l’Élysée, d’un contrat sécuritaire avec un proche de Poutine, soupçonné de liens mafieux. L’ancien conseiller de Macron a également fait affaire, en décembre dernier, avec un second oligarque russe. Au total, ces contrats s’élèvent à 2,2 millions d’euros. Une partie des fonds a été perçue par Benalla au Maroc. Ni l’exécutif, ni la justice ne semble pourtant s’émouvoir. Aucune action n’a été engagée quant à la violation du contrôle judiciaire, à l’effacement de preuves… Depuis son commencement, en juillet 2018, un parfum d’impunité entoure cette affaire. « Qu’il vienne me chercher », avait tonné le président à cette époque, toisant ceux qui attaquaient Benalla avant de réclamer à l’automne « l’indulgence » pour son ancien protégé. Les enregistrements de Mediapart

révèlent un Benalla qui se vante du soutien présidentiel : « Tu vas les bouffer. T’es plus fort qu’eux », aurait écrit le président à Benalla. « Tout cela montre que les institutions ne sont pas respectées et que les prérogatives du président sont bien trop importantes », souligne Éliane Assassi qui a assisté aux auditions au Sénat comme présidente de groupe. Edwy Plenel, qui participait mardi au festival « La classe ouvrière, c’est pas du cinéma » à l’invitation d’Espace Marx et de l’Utopia Bordeaux, accuse Matignon de « porter atteinte à des libertés fondamentales » comme celle de « révéler des informations d’intérêt public ». « Le Parquet et le Procureur de Paris ne sont pas indépendants dans notre pays, ce dernier a été choisi par monsieur Macron et monsieur Philippe et ce monsieur, sans délit, sans plainte, sans atteinte à la vie privée, décide de perquisitionner le journal ». « C’était une tentative d’intimidation contre nos sources, ils cherchent qui a parlé. » Mais « par rapport à la barbouzerie qu’incarne monsieur Benalla, il y a au cœur de l’État des fonctionnaires, qu’ils soient civils, policiers, militaires, qu’ils soient de tout corps qui, eux, sont choqués. » Pas sûr que cela soit rassurant…

VIOLENCES LORS DE MANIFESTATIONS

Une loi inutile et dangereuse Les députés communistes ont voté contre la « loi anti-casseurs » qu’ils considèrent comme inutile et dangereuse, qui ne permettra pas d’arrêter plus facilement les casseurs, ni de prévenir les violences, ni de calmer les tensions actuelles. Explication dans l’hémicycle par le député Stéphane Peu, le 5 février. « Face au grand mouvement populaire qui traverse notre pays, le Gouvernement a fait montre d’une indifférence coupable. Il a géré cette crise de la plus mauvaise des manières, en méprisant, en sous-estimant, et même parfois en moquant, ce mouvement et l’ampleur de la colère. Votre attitude n’a fait que renforcer les tensions et aggraver la crise. Depuis quelques années, depuis la mobilisation contre la loi El Khomri et lors des récentes manifestations, la gestion du maintien de l’ordre a été indubitablement fautive. Comment expliquer qu’avec un même cadre législatif, la violence à l’occasion des manifestations ait décru pendant ces trente dernières années ? Comment expliquer que les forces de l’ordre aient su gérer, avec beaucoup moins de blessés, les émeutes urbaines de 2005, pourtant beaucoup plus violentes ? Comment l’expliquer autrement que par une doctrine du maintien de l’ordre qui s’est progressivement éloignée de l’objectif préventif et de sécurisation des manifestations ? Les conséquences sont lourdes : onze morts, des milliers de blessés et de mutilés, des policiers épuisés, envoyés à l’affrontement. Cela a contribué à étioler le lien de confiance entre la

population et les forces de l’ordre. Face à ces drames humains, face à la colère immense, votre seule réponse concrète, c’est la répression et la restriction des libertés. Vous nous présentez aujourd’hui une proposition de loi reprise dans la précipitation, qui illustre un état d’esprit opposé aux mobilisations populaires. Le Syndicat des avocats de France dénonce “des mesures générales contre les manifestants”. La Commission nationale consultative des droits de l’homme s’inquiète de la “logique sécuritaire du texte, qui heurte la liberté fondamentale de manifester”. Votre texte inquiète très largement, jusque dans les rangs de votre propre majorité. Or vous persistez à vouloir le faire adopter, dans un pur souci de communication, dans une logique d’affichage, sans prendre en considération les risques pour les libertés fondamentales qu’il porte en germe. Vous le savez, les députés communistes condamnent avec la plus grande fermeté tous les actes de violence qui ont émaillé les manifestations de ces dernières semaines et ces dernières années. C’est la raison pour laquelle j’avais, avec le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, et bien avant l’affaire Benalla, demandé la création d’une commission d’enquête à l’Assemblée nationale. L’objectif était de faire toute la lumière sur la gestion des violences survenues à l’occasion du défilé du 1er mai 2018. Vous avez rejeté cette demande. Cet épisode témoigne de vos contradictions, que l’on retrouve à l’occasion de l’examen de cette proposition de loi. Vous nous présentez, monsieur le ministre de

l’Intérieur, un texte issu du groupe Les Républicains du Sénat, que votre gouvernement et la majorité avaient dans un premier temps rejeté. Cette proposition de loi est à la fois inutile et dangereuse. Elle est inutile, car des dispositions législatives existent déjà pour interpeller et condamner les personnes commettant des infractions lors de manifestations. Notre arsenal juridique actuel permet de faire face aux violences et d’agir contre les casseurs. Elle est dangereuse, car les dispositifs législatifs prévus apparaissent disproportionnés et attentatoires aux libertés publiques. Une interdiction de manifester pourra être décidée par le préfet, sans le contrôle d’un juge, sur des fondements aussi vastes qu’imprécis. Les personnes interdites de manifestations, y compris par l’administration, feront l’objet d’un fichage, sur le modèle de celui des personnes interdites de stade. Cela assimile un droit constitutionnel, celui de manifester, à la possibilité d’aller assister à un spectacle sportif. L’ensemble de ces mesures ne permettra pas d’arrêter plus facilement les casseurs. Elles ne permettront ni de prévenir les violences, ni de calmer les tensions actuelles. Cette proposition de loi anti-gilets jaunes, ce texte de circonstance, restreint de manière inquiétante la liberté fondamentale de manifester, en dehors de toute logique de prévention ou d’apaisement des relations entre les forces de l’ordre et la population. Les députés communistes voteront résolument contre cette proposition de loi inutile, contre-productive et dangereuse pour les libertés publiques. » Les Nouvelles 14 février 2019 • 5


INTERNATIONAL MÉMOIRE DE LA COLONISATION

ESPAGNE

Juppé renonce à une ruelle FrantzFanon

Le budget donne des sueurs froides au socialiste Pedro Sanchez

Le Maire de Bordeaux cède aux injonctions de l’extrême droite, qui vilipende le combat de Fanon pour l’indépendance algérienne. Ce n’était pas un boulevard : juste une discrète ruelle. Jeudi, le maire de Bordeaux, Alain Juppé, a décidé de « surseoir » à l’inscription du nom de Frantz Fanon dans l’espace public. Au mois de décembre, le conseil municipal avait entériné le choix de donner à une sente du nouveau quartier Ginko, dans le nord de la ville, le nom du psychiatre martiniquais, figure de la résistance à l’oppression coloniale et combattant de l’indépendance algérienne. Il n’en fallait pas davantage pour provoquer l’un de ces déchaînements de haine dont se repaissent les nostalgiques de la colonisation. Depuis le marigot du site Internet de Riposte laïque, c’est l’élu RN François Jay qui a donné le signal de la curée, en dénonçant l’hommage « à un homme qui a pris, il y a soixante ans, fait et cause pour le terrorisme algérien ». Assimiler la lutte de libération algérienne à une entreprise terroriste, mettre le médecin chef de l’hôpital de Blida, penseur

de l’émancipation humaine, dans le même sac que Daech : l’ignorance et la nigauderie le disputent ici à la falsification historique. Les vociférations de quelques extrémistes excités ont pourtant suffi à faire reculer Juppé. « Aujourd’ hui, le choix du nom de Frantz Fanon suscite des incompréhensions, des polémiques, des oppositions que je peux comprendre », explique, complaisant, l’édile. À Bordeaux, ancien port négrier, les noms des opulentes fortunes bâties sur le commerce du « bois d’ébène » dessinent une toponymie urbaine oublieuse. Colbert, l’auteur du Code noir, a sa rue. Tout comme Faidherbe ou Gallieni, grands massacreurs coloniaux. Et le scandale serait, dans cette géographie, le nom d’un combattant de la liberté ? Fanon voulait restaurer l’humanité là où elle a été déniée. Cet horizon politique impliquait, pour lui, de guérir le colonisé et de découvrir l’homme derrière le colonisateur. Seul quelque esprit rance peut trouver là matière à polémique. Rosa Moussaoui, L’Humanité du 11/01/2019

RWANDA

Paris et la piste des ultras hutus Une note de la DGSE tient les extrémistes hutus pour les probables auteurs de l’attentat du 6 avril 1994. Le 26 décembre dernier, après vingt ans d’instruction, la justice française prononçait un non-lieu pour les sept proches de l’actuel président du Rwanda, Paul Kagame, soupçonnés d’avoir organisé l’attentat du 6 avril 1994, à Kigali, contre l’avion présidentiel qui transportait Juvénal Habyarimana. Celui-ci revenait d’Arusha (Tanzanie), où il avait conclu de mauvaise grâce un accord de paix avec les rebelles tutsis du Front patriotique rwandais (FPR). La mort de l’ancien président rwandais donnait, ce jour-là, le signal du génocide des Tutsis. Longtemps, Paris, pour justifier son appui aux autorités génocidaires, a défendu la thèse d’un attentat perpétré par le FPR. Version mise à mal par ce verdict… Une note déclassifiée par le ministre de la Défense en 2015

L’enquête conduite par les juges d’instruction Marc Trévidic et Nathalie Poux a permis, entre autres, d’exhumer un document du renseignement français, estampillé « confidentiel défense », qui jette une lumière crue sur les éléments dont disposaient à l’époque les autorités françaises. Radio France et Mediapart ont révélé hier la teneur de cette note 6 • Les Nouvelles 14 février 2019

de la DGSE datée du 22 septembre 1994 et déclassifiée par le ministre de la Défense le 17 septembre 2015. Elle désigne deux extrémistes du régime, les colonels Théoneste Bagosora, ancien directeur de cabinet du ministre de la Défense, et Laurent Serubuga, ancien chef d’état-major des Forces armées rwandaises (FAR), comme « les principaux commanditaires de l’attentat du 6 avril 1994 ». « Cette opération aurait été préméditée de longue date par les extrémistes hutus », avancent les auteurs de cette note, qui voient dans « l’assassinat de ministres de l’opposition modérée et de Tutsis, moins d’une demi-heure après l’explosion du Falcon présidentiel », la confirmation du « haut degré de préparation de cette opération ». La piste des faucons du régime hostiles à l’accord d’Arusha était donc connue de Paris, les services de renseignements la jugeant « la plus plausible ». Ce qui n’a jamais dissuadé la France de soutenir les extrémistes hutus qui se sont emparés du pouvoir au lendemain de l’attentat, ni d’apporter son appui aux Forces armées rwandaises pour les aider à combattre le Front patriotique rwandais, dont l’avancée mettait pourtant seule fin aux massacres. Vingt-cinq ans après le génocide des Tutsis, l’ombre se dissipe peu à peu sur l’implication de la France et de son armée au Rwanda. Rosa Moussaoui, L’Humanité du 7/02/19

Pris en étau par la droite, les fascistes et les indépendantistes, le chef du gouvernement peine à faire adopter son projet de loi de finances. La droite et l’extrême droite ressortent le crucifix. Dans le rôle du supplicié, le chef du gouvernement Pedro Sanchez, qui s’était déjà vu affublé du nom de « Judas » après la destitution, en juin 2018, de son prédécesseur Mariano Rajoy (Parti populaire, PP). Cette fois, il incarne le « plus grand félon de l’histoire démocratique de l’Espagne ». Celui qui permet aux conservateurs et aux fascistes de gagner la rue ensemble, comme ce fut le cas en octobre 2017 à la suite de la déclaration unilatérale d’indépendance de la Catalogne. Hier, ils étaient ainsi 45 000 à manifester sous une nuée de drapeaux espagnols, Plaza de Colón, à Madrid, à l’appel du PP, qui avait déjà servi en son temps de voie de recyclage aux franquistes les plus zélés, et des ultralibéraux de Ciudadanos. Les fascistes de Vox, alliés de ces deux formations au sein du Parlement andalou, du parti Espagne 2000 et de la plateforme ADÑ, qui regroupe la Phalange, l’Alternative espagnole et la Démocratie nationale, sont venus renforcer le front anti-Sanchez. Les

violents identitaires de Hogar social se sont également joints au rassemblement. Mais, l’ancien premier ministre français Manuel Valls, candidat à la mairie de Barcelone soutenu par Ciudadanos, qui participait au rassemblement, y voyait une innocente « manifestation transversale ». L’opposition veut profiter de la situation en Catalogne

L’objet de leur haine ? Le dialogue engagé par le premier ministre socialiste avec les indépendantistes catalans et la présence d’un « rapporteur » indépendant chargé de faciliter le dialogue entre les partis de la région autonomiste, comme le demandaient les régionalistes. À deux jours de l’ouverture, mardi, du procès de douze dirigeants indépendantistes pour leur rôle dans la sécession, l’opposition réclamait donc la tenue d’élections anticipées, le « retour à l’unité de l’Espagne », comme si celle-ci avait été entamée, et l’incarcération des « putschistes ». Lors de la manifestation d’hier, le dirigeant de Vox, Santiago Abascal, a ainsi requis la suspension de l’autonomie de la Catalogne et l’arrestation de son président, Quim Torra. La situation catalane fait en effet figure d’aubaine pour l’opposition.

La vice-présidente du gouvernement, Carmen Calvo, a ainsi accusé les droites « d’utiliser la situation complexe en Catalogne à des fins partisanes ». Derrière son think tank ultraconservateur, Faes, l’ancien premier ministre atlantiste José Maria Aznar tente de fait de construire un bloc des droites destiné à gagner l’hégémonie sur le modèle de l’Andalousie, où le parlement fut ravi, en décembre, au Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), qui le dominait depuis trente-six ans. Ce type d’alliance entre la droite et son extrême pourrait servir de modèle en vue des municipales prévues en mai. Les indépendantistes, maîtres du jeu

Déjà fragilisé par une majorité constituée de seulement 84 des 350 députés, Pedro Sanchez paraît de plus en plus isolé. S’il a obtenu le soutien critique d’Izquierda Unida et de Podemos, il a également à charge de rallier les indépendantistes basques et catalans pour le vote du prochain budget. Pour l’heure, ces derniers s’y refusent. Le débat qui débute mercredi est donc à hauts risques pour l’exécutif. S’ils ne sont pas retirés d’ici mardi, les amendements au projet de loi de finances, déposés par les Catalans pour demander un geste de Madrid en faveur de leurs leaders, pourraient déboucher sur un rejet du texte. Et, in fine, aboutir à de nouvelles élections anticipées avant l’échéance de 2020. Pedro Sanchez semble bel et bien pris en étau. Lina Sankari, L’Humanité du 11/02/19

EUROPE

Le petit jeu de Macron et Salvini Les deux leaders mettent en scène leur opposition. Paris a rappelé son ambassadeur à Rome. Le Quai d’Orsay a rappelé, jeudi 7 février, son ambassadeur en Italie, Christian Masset, pour consultation. Un geste rarissime entre alliés européens. Tout en mettant en avant la « relation d’amitié » entre les deux pays, la porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Agnès von der Mühll, justifie cette décision par les « accusations répétées », les « attaques sans fondement » et les « déclarations outrancières » prononcées par des ministres italiens à l’endroit du gouvernement français. C’est Luigi Di Maio, chef politique du Mouvement 5 étoiles (M5S) et vice-président du Conseil italien, qui a fait craquer l’allumette, mardi, en annonçant avoir rencontré des représentants des gilets jaunes, en l’occurrence Christophe Chalençon.

« Le vent du changement a franchi les Alpes », avait-il exulté. Fin janvier, il s’en était pris à la politique extérieure de la France. Si elle « n’avait pas les colonies africaines, qu’elle appauvrit, elle serait la quinzième puissance économique internationale et pourtant elle est parmi les premières grâce à ses agissements en Afrique », avait-il dénoncé. Le Quai d’Orsay avait tenté de le rappeler à l’ordre, le 21 janvier, en convoquant l’ambassadeur italien à Paris, Teresa Castaldo. Salvini cherche à souder tous les nationaux-libéraux du continent

Ces attaques de dirigeants italiens contre la France se nourrissent de la concurrence entre les deux forces qui composent le gouvernement italien : les démagogues du Mouvement 5 étoiles et les xénophobes de la Ligue de Matteo Salvini. Depuis que ce dernier est devenu numéro deux du gouvernement, en juin dernier, il a

savamment mis en scène sa rivalité, sur le plan européen, avec Emmanuel Macron, qui n’en demandait pas moins. Cela permet au président français de se présenter en héraut des valeurs démocratiques européennes alors qu’en France le Parti socialiste et « Les Républicains » sont en perte de vitesse et que la chancelière allemande, Angela Merkel, est affaiblie. En revêtant les habits d’opposant numéro un à Macron, Salvini cherche à souder derrière lui tous les nationauxlibéraux du continent, de la dirigeante frontiste Marine Le Pen au premier ministre hongrois, Viktor Orban. « La campagne pour les élections européennes ne saurait justifier le manque de respect de chaque peuple ou de sa démocratie », dénonçait jeudi le Quai d’Orsay. Il semble que l’on soit en campagne des deux côtés des Alpes. Gaël De Santis, L’Humanité du 08/02/19


PCF SECTION DE BORDEAUX

PCF MÉRIGNAC

Fraternité et travaux pratiques

Reunion publique Mercredi 20 fevrier, 18h30 salle de capeyron place jean jaures, Mérignac. Débat sur les europénnes avec la participation de : Arthur Hay, candidat girondin sur la liste de Ian Brossat ; David Plages, syndicaliste cheminot ; Jean Querbes, ancien député européen.

L’HUMANITÉ EN REDRESSEMENT JUDICIAIRE

Amplifier la mobilisation Le Tribunal de commerce de Bobigny a décidé de placer L’Humanité en redressement judiciaire, assorti d’un plan de continuation, avec une période d’observation de six mois renouvelables.

Près de 80 personnes étaient réunies à la salle Pierre Tachou, le vendredi 8 février au soir pour une soirée couscous très conviviale et intergénérationnelle, précédée par un tour d’horizon politique effectué par Jean-Jacques Bordes, secrétaire de la section, le sénateur communiste Fabien Gay et Arthur Hay, candidat aux élections européennes. Jean-Jacques Bordes a rappelé les objectifs posés par le congrès d’Ivry du PCF en termes de visibilité et d’utilité de l’organisation. « Il n’y a pas eu à attendre longtemps pour entrer dans les travaux pratiques avec l’émergence du mouvement des gilets jaunes. Ce mouvement populaire nous bouscule, c’est indéniable, mais il a le mérite de ne laisser personne insensible aux questions politiques aujourd’hui. En termes de visibilité, ce sont certains de nos slogans qui sont visibles dans les rassemblements et manifestations hebdomadaires : l’ISF bien sûr, la fraude fiscale, le CICE, jusqu’au référendum d’initiative citoyenne que nous nommions, nous, le RIP (d’initiative populaire). Nous faisons la preuve de notre utilité en allant à la rencontre des habitants dans les quartiers et des salariés dans les entreprises pour apporter un contenu transformateur aux revendications sur le pouvoir d’achat, sans compter le travail énorme de nos députés et sénateurs ». Le secrétaire de section a abordé l’échéance électorale du 26 mai avec l’entrée en campagne du PCF par le meeting du 5 février à Marseille, « qui donne la pêche » et « envie de populariser les candidat-e-s tant ils et elles sont représentatif-ve-s de notre société, du monde du travail ». Il a ensuite passé la parole au candidat girondin, présent sur la liste menée par Ian Brossat.

Arthur Hay, livreur à vélo, d’abord micro-entrepreneur en relation avec les plateformes ubérisées, a expliqué sa participation à la création d’un syndicat de coursiers à vélo en Gironde et ce combat qui s’organise à l’échelle de l’Europe pour l’égalité des statuts, dans un contexte de mondialisation de ce nouveau mode d’exploitation. « On va essayer de piquer du temps de parole à l’équipe de Macron – qui a pris l’avantage avec ce grand débat qu’ils ont créé eux-mêmes – pour faire valoir nos idées », a affirmé le jeune candidat évoquant la campagne et toutes les valeurs qu’il partage avec les communistes. Mais la vedette de la soirée, c’était Fabien Gay, parce qu’il est « un enfant de Bacalan », comme il le dit, et que Pierre Tachou, dont la salle porte le nom, a contribué à son éducation, « à faire le mec que je suis aujourd’hui », dit-il avec beaucoup d’émotion. La fatigue n’y est sans doute pas pour rien, le sénateur sort tout juste de 9 jours et 9 nuits de débat avec Bruno Lemaire sur la loi Pacte. Il ne manque cependant pas d’énergie pour évoquer « une période assez particulière où tous les possibles sont ouverts ». Il évoque le scandale des aides publiques versées aux entreprises du CAC40, cite le PDG de Carrefour « qui gagne plus de 10 millions d’euros par an » et « emploie des gens à 800 euros pour tenir les caisses et leur explique qu’il n’y a pas d’argent pour augmenter les salaires », les 2 milliards d’euros d’aides publiques touchés par le groupe, dont 740 millions de CICE et « dans le même temps, comme dirait Macron, il a versé 2 milliards d’euros aux actionnaires ». « On s’est senti parfois un peu à contre-courant à dénoncer ce genre de choses et aujourd’hui une majorité d’idée se dégage pour ça ». Évoquant sa rencontre avec des gilets jaunes dans le libournais, il invite à ne pas

« regarder ce mouvement en chien de faïence et se demander si ces gens étaient avec nous dans les luttes ces dix dernières années ». « Peut-être pas, souvent pas d’ailleurs, parce qu’ils ne se sentaient pas concernés ou parce qu’ils ne savaient pas comment faire mais aujourd’hui ils sont dans la rue et ils ont envie de refaire de la politique, peut-être pas comme on aimeraient qu’ils la fassent mais si on ne discute pas avec eux, d’autres vont s’en charger et ils ont commencé ». Il parle bien entendu de l’extrême droite ou encore de Macron et ses 7 heures d’antenne sur toutes les chaines de télé. « Les communistes sont les meilleurs, les plus inventifs quand ils sont au contact de la population ». Il explique comment, dans l’hémicycle, à force de ramener la question des salaires sur la table, certains députés de droite on finit par concéder qu’il fallait s’en préoccuper. « Ils sentent bien sur le terrain que ça pousse sur cette question, à nous de souffler sur les braises ». « Le FMI, le 3 %… tout ça je m’en balance »

Le sénateur a lui aussi évoqué la campagne pour les européennes. « Je suis fier d’avoir des camarades de lutte comme Arthur sur cette liste. Il mène un combat pas simple, celui des exploités de l’ubérisation qui ne touchent même pas le Smic horaire, n’ont aucune protection sociale alors que dans le même temps les entreprises encaissent des milliards, ne paient même pas leurs impôts en France et pratiquent l’optimisation et l’évasion fiscale. Les initiatives comme celles que nous avons menées à Apple tout à l’heure, il faut les démultiplier dans la période qui arrive car il faut faire rendre gorge aux Gafam et leur faire rendre l’argent qu’ils doivent sur notre territoire ». « Je compte sur Arthur, Ian et l’ensemble de la liste pour qu’on parle aux gens. Moi j’aime bien le slogan qu’on a choisi : l’Europe des gens, pas celle de l’argent. Partons des préoccupations des gens et mobilisons l’argent pour répondre aux besoins des citoyens. Je l’ai dit à Bruno Lemaire, moi je n’ai pas été élu pour répondre aux injonctions du FMI, du 3 % et tout ça, je m’en balance. Moi j’ai été élu pour répondre aux attentes populaires, pour l’intérêt général et pas pour quelques nantis qui profitent de notre système ». Christelle Danglot

Cette décision et la période de transition qui s’ouvre désormais doivent permettre, dans un premier temps, de consolider notre économie de court terme tout en travaillant à un projet de pérennisation de l’entreprise. Celui-ci passe notamment par la poursuite de la campagne de dons et de souscription, par la promotion des contenus de nos journaux et une augmentation des lecteurs et abonnés à L’Humanité et L’Humanité-Dimanche. Nous remercions toutes celles et tous ceux qui se sont déjà inscrits de diverses manières dans la chaine de solidarité pour protéger L’Humanité. Plusieurs centaines de personnalités d’opinions diverses, de syndicalistes et de syndicats, d’associations, de créateurs, de penseurs, de journalistes, des parlementaires et responsables politiques, ont tenu à manifester leur solidarité par des messages de soutien ou des dons. Des centaines de lectrices et lecteurs ont apporté en quelques jours 700 000 euros en souscription populaire. 470 abonnements ont été réalisés en moins de 10 jours auxquels s’ajoutent les abonnements que réalisent des lectrices et lecteurs dans le cadre de la campagne « à chaque lectrice, lecteur son (sa) nouvel(le) abonné(e) ». Cette large mobilisation entamée conforte toutes les équipes de L’Humanité dans le difficile combat engagé. Elle doit encore s’amplifier. Samedi prochain, l’assemblée des amis de L’Humanité sera un moment de ce débat pour réussir une multitude d’initiatives visant à promouvoir L’Humanité, L’Humanité-Dimanche, humanite.fr, leurs contenus, leur rôle au service d’une information diversifiée et de qualité prenant le parti de la justice sociale, de la démocratie, d’une planète vivable et durable, du désarmement et de la paix. La soirée de mobilisation du 22 février s’annonce déjà très importante. Elle sera à la fois la manifestation concrète de la mise sous protection populaire de L’Humanité, et l’un des moments importants pour créer les conditions d’un nouvel élan pour L’Humanité. Par Patrick Le Hyaric, directeur du journal, le 7 février

Votre don vous donne droit pà une réduction d’impôt de 66 %, dans la limite de 20 % du revenu imposable.

SOUSCRIPTION

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ILS ONT DONNÉ 1 009,50 euros : M. AIRAULT René, Bègles ; Section des Deux Rives ; M. SENGAYRAC Bernard, Illats ; Mme Watremel Michèle, Chanteloup-les-Vignes ; Mme AMIRAULT Nicole, Bègles ; Mme CHARBONNEAU Chantal, Bègles ; M. QUERBES Michel, Bègles ; M. & Mme DUPUY Michel, Bègles ; Mme MICHEL-CARTAIGNET Mélanie, Bègles ; M. & Mme BORDAS Pierre, Bègles ; Mlles CASAMAJOR, Bègles ; M. MONRIBOT Janick, Le Taillan Médoc ; M. ALVAREZ Armando, Pessac ; M. CAZENAVE Pierre, Mérignac

Les Nouvelles 14 février 2019 • 7


CULTURE & SOLIDARITÉ SOLIDARITÉ À BORDEAUX

CHRONIQUE par Jeanne R.M.

Soirée d’intégration de Drita

« La neige et le sang » Aux 68 travailleurs sans-papiers de Creil

Lors d’un précédent rassemblement.

Pour répondre au Préfet de la Gironde qui estime que « les circonstances […] ne permettant pas de conclure que [Drita] est particulièrement insérée dans la société française », le Collectif pour Drita invitait les citoyen-ne-s à participer à la soirée d’intégration de Drita au Grand Théâtre de Bordeaux, ce vendredi à 18h devant le grand Théâtre. Drita Kurtsmajlaj est une jeune albanaise de 23 ans, soutenue par un collectif de personnalités politiques de tous bords, des dizaines d’associations, d’organisations non gouvernementales et d’institutions, et des milliers de citoyens de la métropole bordelaise. La préfecture de Gironde vient de refuser sa demande de régularisation. « Drita se voit refuser son titre de séjour notamment pour faute de preuve du danger encouru en cas de retour en Albanie, explique le collectif de soutien. Un comble lorsqu’on sait que 4 jours avant d’écrire cette lettre de refus, la préfecture recevait un courrier

recommandé de la part du collectif qui lui demandait une audience afin d’apporter des éléments complémentaires dont un témoignage assermenté du maire de la commune de Markaj qui atteste du danger qui attendrait la famille Kurtsmajlaj en cas de retour en Albanie. » Si Drita est si soutenue, c’est qu’elle a fourni des services d’interprétariat bénévoles dans les hôpitaux, tribunaux, prisons, associations… Un service pour lequel elle a même été assermentée et régulièrement contactée, voire réquisitionnée, par nos institutions. Depuis son arrivée sur le territoire français, il y a 4 ans, explique encore le collectif, elle est aussi venue en aide à des centaines de familles (de toutes origines) pour lesquelles elle a trouvé un hébergement d’urgence, collecté des dons, organisé des repas et Noël solidaires, mais aussi tous ceux qui l’ont sollicitée pour lesquels elle a fourni des services. Les services du 115 l’appellent quand ils n’ont plus de solutions d’hébergement d’urgence pour des familles.

« Après avoir fui l’Albanie avec sa famille, où sa maison et le commerce familial ont été brûlés, où elle est menacée de mort par la vendetta (comme témoigne le maire de son ancien village), après avoir appris le Français et avoir montré une attitude plus exemplaire que la plupart des français, faisant honneur au mot “ fraternité” de notre devise, Drita se voit refuser le droit de rester et de travailler en France. Le Collectif pour Drita dénonce une attitude hypocrite et inacceptable de l’État et demande une régularisation de Drita en raison de ses services rendus à la France, et du danger qu’elle et sa famille encourent en retournant en Albanie. » Pour répondre au préfet qui ne considère pas Drita comme étant particulièrement intégrée, le collectif a décidé de rassembler le maximum de soutiens ce vendredi. Une pétition est aussi en ligne : http://bit. ly/PetitionCollectifPourDrita

FORD BLANQUEFORT

Concert de soutien

Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest S.A.S. au capital de 37 000 euros Associés (à parts égales) : L. Chollon, F. Mellier, S. Laborde, M. Lavallée Directeur de la publication : Frédéric Mellier Abonnement 1 an : 25 euros. Abonnement de soutien : 40 euros Rédaction, composition, impression : S.A.S. Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Tél. 05 56 91 45 06 - Fax 05 56 92 61 01 - Annonces légales : annonces@nbso.fr Comptabilité : compta@nbso.fr - Redaction/Proposition d’article : redaction@nbso.fr @nvlbx Les nouvelles de bordeaux nbso.fr Commission paritaire de presse : 0123 C 85932

8 • Les Nouvelles 14 février 2019

Si la Direccte n’a pas homologué le plan de licenciement de Ford pour son site de Blanquefort, obligeant la compagnie à revoir sa copie, rien ne semble avancer dans le bon sens pour autant. La cession d’activité est prévue au 31 août, ce délai pourrait encore servir à trouver un repreneur ou à confirmer l’intérêt des clients de celui existant. « Au lieu de cela, Ford refuse de continuer cette procédure de recherche, ce qui démontre clairement sa seule volonté de fermer l’usine et de supprimer tous les emplois », dénonce la CGT. De soutien, les salariés ont donc bien besoin. C’est l’objet du concert organisé : Samedi 2 mars à partir de 19h, salle du Grand Parc à Bordeaux. Avec Cali, Les Hurlements d’Léo, The Hyènes, Balbino Medellin, Giorgio Sinicorni. Prix : 10€ Achat des places sur : https://www. concert-solidarite-ford.org/

Il neige, brutalement c’est devenu beau. Fatou sous sa couverture, dans cette salle commune devenue sa maison. Il neige, c’était prévu par la météo, mais ce fut une surprise. Dix centimètres de blancheur craquante et croustillante. La terre recouverte de son manteau d’albâtre, de sa couverture apaisante, imposante, de ce calme soudain. Fatou attend. Le cerisier recouvert, le sapin qui ploie sur la nature endormie. Une accalmie, le temps suspendu par cette poudre qui endort, la poudre blanche, la poudreuse gelée. La rue sourde, les piétons absents, les voitures immobiles dans ce chaos insolent et muet. Le préfet réfléchit. Dans son bureau, les fenêtres inondées de blancheur. La vague de froid annoncée, chacun attend avec impatience ce changement prometteur. La neige sans altitude, la luge dans le jardin et les boules sans chocolat ni vanille. Fatou a froid dans ses frileux vêtements. Elle a froid d’être loin, d’être seule depuis déjà tant d’années. Elle frissonne de cette attente. Une attente gelée depuis quelque temps, des mois, des années maintenant. Fatou est une « sans ». Les tapis de la préfecture rouges et or, de sang, des mines. Le hall est jonché, le sol tapis, les fauteuils de velours. Verts, marrons, les assises marquetées, les crapauds, les voltaires dorés se regardent et coassent autour de cette table basse immense. Le salon dont rêvent les nostalgiques d’une époque pré-républicaine, chaud et propre. Les gravures sur les murs en bois cirés, offrant les paysages d’un port lointain, un probable lieu de vie prospère, un carrefour navigable, triangulaire. Les appliques lumineuses rappelant les bougies et les miroirs renvoyant à l’infini cette ambiance réconfortante. La préfecture reçoit. Toujours des hôtes d’honneur qu’il convient de respecter et de choyer. Il faut y aller. Affronter cette neige, dépasser ce simple regard de la fenêtre qui nous transporte dans nos rêves alpins. Il faut le retrouver ce trousseau d’hiver exceptionnel, les bottes fourrées et ridicules, les gants et le bonnet, rangés et patients dans le grenier. Une couverture blanche qui nous appelle et nous attire, la sirène du solstice. Fatou a rendezvous avec la République Française. J’ai rendez-vous avec Fatou. Un froid qu’elle ne connait pas, qu’elle n’intègre pas comme possible. Sa chemise africaine, wax chatoyant, légère et colorée a recouvert un pull. Son bonnet de laine trop petit, lui couvre difficilement les oreilles. Le blouson en jean assure une première protection contre ce vent glacial. Les mains enfoncées dans ses poches froides. Les gants, l’écharpe, l’entreprise de nettoyage des grands hôtels ne les lui a pas fourni. Le préfet retourne dans tous les sens ce dossier qu’il ne peut pas… des consignes d’en haut, une intime conviction, une humeur maussade, un avis personnel, des ordres et des contre-ordres : OQTF* *Ordre de Quitter le Territoire Français

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