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Stina Nilsson, le choix des armes
STINA NILSSON
Le choix des armes
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Le 22 mars dernier, la Suédoise Stina Nilsson, 27 ans, surprenait le monde du ski nordique en annonçant son passage du ski de fond au biathlon. La championne olympique du sprint en 2018 à Pyeongchang explique à Nordic Magazine ce qui l’a motivé à skier avec une carabine.
Après 23 victoires en coupe du monde de ski de fond, Stina Nilsson a décidé, au printemps dernier, de changer de sport pour se consacrer au biathlon.
b PER DANIELSSON / PROJEKT.P SVENSKT SKIDSKYTTE
La relation entre Jean-Marc Chabloz, le coach suisse du tir suédois, et Stina Nilsson, sa nouvelle élève, est très forte et marquée du sceau de la confiance mutuelle.
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En officialisant, le 22 mars en soirée, son choix d’abandonner le ski de fond pour le biathlon, la Suédoise Stina Nilsson, 27 ans, a provoqué un séisme dans le monde du ski nordique. Avec de nombreuses réactions, positives, surtout, mais aussi néPour être claire, c’était le biathlon ‘‘Stina Nilsson ex-fondeuse gatives, parfois. « Je sais que tout cela ou rien peut sembler irréfléchi, explique-t-elle à Nordic Magazine. Tout paraît avoir d’autre. été précipité, mais la vérité est que j’ai toujours été intéressée par le biathlon, un sport qui a continuellement attisé ma curiosité. J’ai toujours su, au fond de moi, que je changerais de sport pour terminer ma carrière comme biath- olympiques de Pékin en 2022. Finalelète. » À 26 ans, assure le numéro un ment, sa saison 2019/2020, raccourcie mondial Johannes Thingnes Boe, cela par une vilaine blessure aux côtes, a mopeut même se révéler un atout: « Ce difié son agenda. « Je ne pouvais plus n’est pas si stupide que cela de changer attendre », racontait-elle, pleine d’ende sport si tard tout simplement parce vie, au moment de dévoiler la grande que le biathlon, surtout le tir, demande nouvelle. « Il était si tentant et excitant de la maturité. » d’essayer le biathlon que je n’ai pas pu
Médaillée d’or olympique en sprint résister, complète aujourd’hui la biathen 2018 sur les pistes sud-coréennes du lète de Mora, ville arrivée de la Vasalopcentre nordique d’Alpensia, à côté de pet, plus grande course de ski de fond au Pyeongchang, double championne du monde. Pour être claire, c’était le biathmonde en relais l’année suivante à See- lon ou rien d’autre. » feld (Autriche) et lauréate du petit globe de cristal du sprint au terme de ce même Quatre kilos dans le dos hiver, Stina Nilsson était pourtant l’une Directement intégrée à l’équipe natiodes reines du ski de fond mondial. Un nale suédoise, privilège de championne, territoire dont, assure-t-elle, elle avait Stina Nilsson a beaucoup travaillé, fait le tour. D’ailleurs, la fondeuse avait notamment au tir sous la houlette du décidé de tourner la page après les Jeux Suisse Jean-Marc Chabloz, coach •••

Stina Nilsson lors du sprint d’Idre, sa première course en tant que biathlète.
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Des précédents célèbres

Stina Nilsson n’est pas la première fondeuse à être passée au biathlon. Avant elle, il y a le prestigieux précédent de sa compatriote Magdalena Forsberg, sextuple vainqueure du gros globe de cristal entre 1997 et 2002 et autant de fois championne du monde. L’Allemande Miriam Goessner, double championne du monde de relais et trois fois vainqueure en coupe du monde, s’y est également essayé au tournant des années 2010. En France, Célia Aymonier, olympienne en ski de fond en 2014 du côté de Sochi (Russie), est devenue biathlète au printemps 2015, montant sur dix podiums lors de l’exercice collectif, décrochant, au passage, une médaille de bronze mondiale. En avril dernier, elle annonçait mettre un terme à sa carrière. Par ailleurs, la Finlandaise Kaisa Mäkäräinen, elle aussi fraîchement retraitée, était une grande fondeuse, participant notamment aux Mondiaux de 2013 dans le Val di Fiemme, en Italie. Actuellement, l’Allemande Denise Herrmann, spécialiste du sprint comme Stina Nilsson, a fait carrière dans le ski de fond avant de passer au biathlon.

du groupe coupe du monde depuis le printemps. Après quelques semaines d’apprentissage, celui-ci se montrait dithyrambique: « Je suis obligé de la ralentir tellement elle veut travailler: elle tire 1200 balles par semaine, c’est unique! », s’enthousiasmait alors l’Helvète sur la SVT. « Jean-Marc est une telle star, lui retourne sa protégée. J’aime vraiment beaucoup travailler avec lui, il est toujours positif et j’adore l’entendre être fier des efforts que je fais pour m’améliorer sans cesse. »

Un sprint à Idre Fjäll pour commencer
Au-delà de la technique de tir, la sportive a également dû appréhender le ski avec une carabine 22 Long Rifle dans le dos. « Sur les ski-roues, je me cogne toujours la tête contre la carabine », témoignait la vainqueure de 24 coupes du monde, sourire aux lèvres, dans les pages sportives du quotidien Aftonbladet en juillet dernier. Une relation longue à construire pour une ancienne fondeuse peu habituée à avoir cette charge de quatre kilos à porter sur la piste: « Ma carabine et moi commençons à devenir bonnes amies, rigolet-elle aujourd’hui quand Nordic •••

Le tir en compétition, avec le stress, est l’exercice le plus difficile à maîtriser pour Stina Nilsson.
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Sandrine Bailly, vainqueure de la coupe du monde en 2005 TIRER VITE ET BIEN N’EST PAS DONNÉ À TOUT LE MONDE MAIS, AU BOUT D’UN MOMENT, ON PEUT Y ARRIVER. ‘‘
Magazine aborde à nouveau le sujet. Au début, je pensais que c’était vraiment un handicap de skier avec ce poids dans le dos mais, à force d’entraînement, je suis maintenant à l’aise. »
C’est d’ailleurs ce passage sur le pas de tir qui fait vibrer Stina Nilsson, ce qui lui a donné envie d’ouvrir un nouveau chapitre. « L’excitation ressentie pendant le tir, j’adore ça! », s’extasie la Scandinave.
En passant de la tribu du ski de fond composée de Charlotte Kalla, Linn Svahn, Ebba Andersson ou Frida Karlsson à celle des biathlètes comprenant Hanna et Elvira Oeberg, Linn Persson, Mona Brorsson ou sa coéquipière de club Johanna Skottheim, avec qui elle s’est entraînée tout l’été, Stina Nilsson est loin d’avoir perdu au change. Les performances réalisées par ses nouvelles coéquipières depuis le début de l’hiver en témoignent. « Elles le méritent vraiment, félicite la recrue. C’est une grande inspiration pour moi, ce sont mes idoles dans le biathlon. Elles ont été si accueillantes avec moi lors de mon arrivée que je me sens privilégiée d’avoir l’opportunité de m’entraîner avec elles. »
Après avoir subi une blessure au coude fin août – « la bonne nouvelle, c’est que je me suis beaucoup entraînée au tir debout », relativise-t-elle –, les grands débuts de la Suédoise en biathlon n’ont eu lieu que le 14 novembre dernier.
Dans le brouillard et le vent d’Idre Fjäll, vêtue d’une combinaison verte aux couleurs de son club, la jeune femme, regard concentré, consciente d’être sous le feu des projecteurs, a inauguré sa carrière à l’occasion d’un sprint. Une journée lors de laquelle, onzième avec un 8/10, elle a impressionné son monde. « Ce sera l’or olympique à la fin », s’est même enflammé Bjoern Ferry, ancien biathlète devenu consultant pour la télévision publique suédoise. Le lendemain, avec un 10/20 lors de l’individuel court, son premier exercice à quatre tirs, tout devenait plus compliqué. Comme pour la prévenir que rien n’est joué d’avance, surtout dans un exercice aussi exigeant que le biathlon. Ce que confirme Sandrine Bailly, lauréate de la coupe du monde en 2005: « Tirer vite et bien n’est pas donné à tout le monde, éclaire la consultante d’Eurosport. Mais au bout d’un moment, on peut y arriver. Il n’y aura que les courses qui feront progresser Stina, notamment dans la gestion de l’effort. »
L’IBU Cup pour apprendre
Depuis ce premier week-end de compétition, Stina Nilsson, après l’annulation des coupes de Suède et des IBU Cup, le circuit B, du mois de décembre à cause de la pandémie de coronavirus, a dû ronger son frein. « Comme compétitrice, bien sûr que je voulais concourir, mais la Covid-19 est tellement plus grande que mes petits intérêts », relatet-elle, modeste et très prudente.
Finalement, avant Noël, la Suédoise a pu renouer avec son nouveau sport à

l’occasion des chronos de sélection organisés sur le stade d’Östersund, son fief depuis ses débuts dans le biathlon. Treizième (6/10), après avoir notamment chuté sur le pas de tir en se prenant les skis dans un tapis et s’être trompée de chemin en fin de course, puis troisième, avec un excellent 9/10, lors des deux sprints du programme, la biathlète a décroché son ticket pour l’IBU Cup d’Arber (Allemagne).
Une première qui s’est avérée compliquée pour la Suédoise, 99e (5/10) puis 69e (7/10) pour ses premiers pas sur la scène internationale.
Rattrapée par la pression, elle n’est jamais parvenue à être actrice de ses courses, notamment sur les skis. « Le biathlon ne s’invente pas, il se construit, éclaire la Dauphinoise Anaïs Chevalier-Bouchet. C’est du boulot et c’est normal qu’elle ne claque pas dès la première course, ce serait trop facile. »
« Je vis mon rêve. Le chemin pour atteindre un objectif, c’est toujours cela qui compte », philosophe Stina Nilsson. Un parcours qui passe donc par le deuxième échelon du biathlon. Avant la première division, si tout se passe bien, en début de saison prochaine. « Pour le moment, j’apprends et, peu importe comment cela se passe, je ne regretterai jamais mon choix », termine celle qui a osé faire le coura geux choix des armes. n -

Stina Nilsson, si elle parvient à marcher sur les traces de Magdalena Forsberg, pourrait bien devenir une des meilleures biathlètes de la planète dans le futur. Elle en a les moyens.
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