

La genèse du projet « Chez-soi, En-soi » trouve sa source dans les liens déjà existants entre l’équipe de La Chambre et celle de la SEI du Ried. La connaissance du travail mené au quotidien au sein de la structure, les réalités auxquelles font face les équipes d’éducateur·rices et aussi la vocation qui les anime ont motivé le choix de La Chambre de s’associer à elles·eux pour cette nouvelle proposition au dispositif Entre les images. 16 résident·es de la SEI du Ried ont participé à ce cycle d’ateliers menés par la photographe Nathalie Dolhen : Lucas, Déolinda, Marine, Sofiane, Florian, Enzo, Quentin, Loïc, Ajla, Cecilia, Virginie, Quentin R, Kevin, Mattéo, Mylène. Ces jeunes pris·es en charge par plusieurs structures, quelquefois deux ou trois par semaine (IMPro, Institut Médico-Professionnel et ITEP, Institut thérapeutique éducatif et pédagogique), sont accueilli·es à l’Escale seulement pendant les week-ends et les vacances. Ils·elles sont donc logé·es dans des chambres qui ne leur appartiennent pas et qui sont occupées par d’autres jeunes le reste de la semaine. Comment, dans ces conditions, prendre ses marques dans la structure pour finalement se sentir chez soi ? Qu’est ce qui fait d’un endroit un foyer ? Comment investir un espace qui ne nous appartient pas ?
C’est autour de ces questions que s’est articulé le projet « Chez-soi, En soi ». Le médium photographique y sert un but introspectif, outil de réflexion mais aussi d’affirmation, pour permettre aux adolescent·es impliqué·es dans le projet de se réapproprier non seulement leur image mais aussi leur cadre de vie. La photographe Nathalie Dolhen les invite à poser leur regard sur les détails du quotidien, objets, lieux, personnes, qui façonnent leur chez-soi. Le projet les a également emmené·es au TNS, voir un spectacle sur le thème de l’émancipation et visiter les ateliers des décors, une manière de les inviter à mettre en perspective leur expérience et de leur faire découvrir les coulisses du théâtre.
Les photos sont exposées à La Chambre en juin 2024, puis à la SEI du Ried en septembre suivant afin de valoriser le travail accompli et le restituer dans un cadre professionnel d’exposition. La diffusion du projet auprès du grand public permet également de nourrir la réflexion et de la partager au plus grand nombre.
L’équipe de La Chambre



Quand on parle de l’intime on ouvre les portes de la vie. La vie de chacun et chacune avec ses joies et ses blessures. Il faut entrer à pas feutrés. ll faut regarder l’autre sans le mettre en difficulté, sans le gêner. Si l’autre vous accepte, alors sourires et connivence engendrent partage. Ce projet est le fruit de nombreux partages. Chacun et chacune a déployé son « chez-soi » comme une coquille d’escargot. La photographie délie les langues et les yeux. Nous avons arpenté ensemble des univers différents rendant compte ainsi de la diversité et de l’originalité des uns et des autres. Nous avons scruté les lieux et espaces familiers, depuis la chambre jusqu’à la forêt. Donner à voir son intérieur, l’espace où l’on devrait se sentir chez-soi, n’est pas de prime abord chose aisée pour des personnes loin de leur foyer et hébergées dans une chambre anonyme. Comment être chez soi justement alors que l’on « trimballe » son bagage d’une chambre à une autre ? Comment rencontrer et se créer de l’intimité ?



Pour mener à bien cette transaction j’ai invité les jeunes à travailler avec des objets transitionnels / émotionnels qui ont permis d’investir les lieux. La mise en scène des objets était au cœur du projet. L’objet permettant de prendre du recul en devenant sujet de la mise en scène. Il a permis aussi de faire passerelle entre le monde intérieur et le monde extérieur. Un autre temps fut réservé à un dispositif structuré autour de l’autoportrait avec ou sans objets. Là aussi des mises en scènes furent convoquées dans le but de travailler sur l’estime de soi. Les jeunes étaient donc invités à réaliser une représentation d’eux-mêmes, l’autoportrait agissant comme un miroir de soi et permettant de rechercher une certaine confiance, un espace protecteur.
C’est ainsi que tout naturellement mon regard, mon approche du projet m’ont conduite à concevoir une scénographie en constellation. Parcourir leur univers intime dans ces constellations m’a révélé à quel point ces jeunes sont en demande et à quel point la création peut ouvrir l’imaginaire. Mon travail ayant consisté en une série de rencontres permettant par la photographie documentaire de révéler les détails cachés à nos yeux et créant je l’espère une certaine complicité avec le spectateur.
Nathalie Dolhen



































Née en 1963, Nathalie Dolhen a passé 20 ans à Paris où elle a travaillé au journal Le Parisien. Établie à Strasbourg depuis 2001, elle en a profité pour partager son univers lors d’ateliers et de masterclasses. Elle poursuit son travail par des commandes comme celle du P.R.U. (Projet de Renouvellement Urbain) en 2012 autour de la rénovation du quartier de Hautepierre à Strasbourg, documentaire qu’elle a conçu et réalisé pendant 2 ans avec les habitant·es relogés. Elle expose depuis 1986 entre autres au Grand Palais à Paris, au Syndicat Potentiel et à la Chaufferie à Strasbourg, au Parc de la Seille à Metz.
Plasticienne documentariste, elle filme, photographie et enregistre, en les interrogeant, nos interactions, notre lien à la mémoire et aux territoires, questionnant les limites, les frontières, entre imaginaire et concret.
Mêlant le possible au devenir, elle fabrique du documentaire sensible. Elle travaille aussi à l’éducation à l’image, mettant en avant la construction et la compréhension de l’image comme objets d’analyse et assiste des regards à devenir autonomes. Elle anime actuellement une masterclass à Photo-Forum à Metz où les étudiant·es progressent autour de la notion de récit photographique.








