Espace-vie n°296 - Juin 2020 - Les nouvelles ambitions de Braine-l'Alleud

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DÉCOUVRIR

APPRENDRE

Confinement et télétravail : quelles distances ?

Réinventer la ville via l’urbanisme circulaire

Quand balcons et salons deviennent des scènes

espace

La revue qui décode les enjeux territoriaux du Brabant wallon

Les nouvelles ambitions de Braine-l’Alleud

Quel avenir pour nos communes ? (1/5)

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Juin 2020 Bimestriel


sommaire

Vos nouvelles rubriques en bref

apprendre

répondre

thématique nouvelle qui suscite le débat.

découvrir

Quel est le poids réel du citoyen en urbanisme ?

On part à la découverte d’initiatives positives tournées vers l’avenir et vers un développement durable du territoire.

comprendre

apprendre

Confinement et télétravail : quelles distances ? apprendre

Les nouvelles ambitions de Braine-l’Alleud

On approfondit une

respirer

Monuments vivants

Il s’agit de décrypter un enjeu, une prise de position, une politique. On prend le temps d’analyser la situation.

répondre

Espace-vie propose à ses lecteurs un éclaircissement sur une question que l’on peut se poser dans son quotidien en matière de cadre de vie.

rencontrer

Portrait d’une personnalité ou d’un citoyen actif dans le monde de l’aménagement du territoire en Brabant wallon.

explorer

L’idée est de partir à la découverte d’initiatives originales expérimentées en dehors du Brabant wallon et de voir comment elles pourraient servir d’exemples pour le Brabant wallon.

évoluer

découvrir

L’urbanisme circulaire de Sylvain Grisot respirer

Un grand cru découvrir

apprendre

Quand balcons et salons deviennent des scènes

agenda

Un mètre pour élargir ses horizons

Tactiques pour des villes apaisées

Espace-vie est la revue bimestrielle de la Maison de l’urbanisme du Brabant wallon – Centre culturel du Brabant wallon ( janvier, avril, mai, juillet, septembre et novembre). Elle traite de sujets relatifs à l’aménagement du territoire, à l’urbanisme et aux enjeux culturels en Brabant wallon. Créée en 1989, Espace-vie est indépendante de tout parti politique et dispose d’une entière liberté éditoriale.

On jette un regard sur un sujet traité par le passé et on le confronte aux réalités actuelles.

débattre

Espace-vie s’ouvre à ses lecteurs et propose un espace de confrontation des points de vue.

respirer

Une image marquante qui possède une histoire forte.

Suivez-nous sur les réseaux sociaux maisonurbanismebw Linkedin.com/company/la-maisonde-l-urbanisme-du-brabant-wallon

Éditeur responsable : Nicolas Van der Maren - Rédacteur en chef : Xavier Attout (x.attout@ccbw.be) - Rédacteurs : Caroline Dunski (c.dunski@ccbw.be), Karima Haoudy (k.haoudy@ccbw.be) - Avec la contribution de : Joëlle Rigaux, Agnès Chevalier, Maureen Schmetz Équipe de la Maison de l’urbanisme : X. Attout, A. Chevalier, K. Haoudy, M. Schmetz - Président de la Maison de l'urbanisme : Mathieu Michel - Maquette : Louise Laurent (www.louiselaurent.be) - Mise en page : Louise Laurent - Dessins : Marco Paulo - Imprimeur : Artoos Group - IPM Printing - Tirage : 7 000 exemplaires - Adresse : 3, rue Belotte, 1490 Court-Saint-Étienne - Contact : 010 62 10 50 ou m.urbanisme@ccbw.be - www.mubw.be - www.ccbw.be Espace-vie est publié avec le soutien de la Wallonie et du Brabant wallon. La revue est envoyée sur demande et gratuitement aux habitants du Brabant wallon, abonnement de 12 euros/an hors Brabant wallon. Ne peut être vendu. Si vous préférez recevoir Espace-vie en version numérique, n’hésitez pas à nous le signaler. Toute reproduction partielle ou totale nécessite une autorisation préalable de l’éditeur responsable. La clôture de ce numéro s’est déroulée le 19 mai 2020. © Photo de couverture : Buildinginvest Espace-vie est imprimé sur du papier recyclé dans une imprimerie climatiquement neutre. Les émissions de CO2 sont neutralisées à 100 % par le biais de plantations d’arbres. L’emballage qui entoure la revue lors de l’envoi est en maïs.


avant-propos

« Se réapproprier l'avenir » Du Covid-19 nous garderons en mémoire l’image des espaces publics vides : le no man’s land imposé par un confinement quasi planétaire. Dans ce numéro, nous avons notamment voulu cerner, à l’aune de l’actualité mouvante, l’impact de cette crise sur nos espaces intérieurs et extérieurs. Y aurait-il un avant et un après Covid-19 sur les manières d’occuper le territoire ? La crise sanitaire que nous vivons fait rejaillir des enjeux cardinaux en matière d’aménagement et de ménagement du territoire. Rien de neuf sous le soleil (plus brulant) de l’urgence écologique et sociale. Dans le faisceau de ces enjeux, quatre d’entre eux émergent.

Enfin, dernière dimension : la résilience, la capacité « à faire avec, malgré tout ». Cette agilité qui anime tous les organismes, sociaux ou urbains, montre que le territoire peut s’adapter aux usages réinventés. C’est le cas de ces reconversions d’espaces (du dedans et du dehors) pour répondre à l’urgence ou à d’autres besoins. À l’image des balcons qui ont servi d’agoras. Cette flexibilité du territoire n’est possible que s’il y a un cadre structurel, une armature nommée intérêt général. Ainsi, aux confinements, aux rétrécissements de nos espaces, a répondu une ouverture vers l’expérimentation d’autres modes de vie. Alors, si l’incertitude se rappelle à notre quotidien, la seule brèche certaine qui se présente à nous aujourd’hui, comme l’affirme la philosophe Isabelle Stengers, c’est le « pouvoir de se réapproprier l’avenir. » Karima Haoudy

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Le premier concerne les inégalités sociales et territoriales. Déjà profondément creusées, elles se sont renforcées pour ceux et celles dont le confinement est synonyme de rétrécissement brutal des ressources. « Les conditions d’hébergement, la possibilité de partir, le choix de consommer autrement, l’accès facile au numérique ne sont pas les mêmes pour tout le monde », déclare l’urbaniste Fouad Awada. L’autre enjeu c’est celui de la dichotomie ville-campagne. La maison-individuelle-avec-jardin a renchéri le modèle de la vie préservée des maux des villes. Trop grandes, trop complexes, trop peuplées. Or, cette représentation est à manipuler avec prudence. Les villes bien faites, parce qu’elles combinent à la densité des aménités et une mixité, ont constitué aussi des foyers de solidarité. De cette crise, on retiendra aussi les vertus de la proximité. De la « ville du quart d’heure », selon Carlos Moreno, où l’ensemble des services de nécessité est accessible à l’effort de la marche ou du vélo. Mais l’appréciation de cette échelle locale ne doit pas éclipser l’importance de l’échelle globale qui permet de connecter des pays, des régions, des territoires, en difficulté.


en bref

Le nombre de personnes qui ont bénéficié d’une prime provinciale de maximum 200 euros pour l’achat d’un vélo électrique en 2019. © Jaspers-Eyers

Un pari architectural 4

Il y a des architectures que l’on voit moins souvent que d’autres en Brabant wallon. Celle développée en pleine centre de Braine-l’Alleud, conçue par l’un des plus grands bureaux d’architecture belges, Jaspers-Eyers, devrait assurément faire parler d’elle. Le permis d’urbanisme a été octroyé à Unibra Real Estate et Belfius Immo. De quoi permettre, d’ici le printemps 2023, la construction de 98 appartements et de 9 commerces (2.400 m2) au coeur d'un îlot de 60 ares situé sur le site de l'ancien lycée royal. Les architectes ont dessiné un immeuble comprenant un important jeu de terrasses et des ouvertures multiples, des façades courbes aux étages supérieurs de même que des percées au rez qui permettent aux visiteurs extérieurs de circuler à travers les bâtiments. « Les architectes ont eu cette volonté de ne pas créer un intérieur d'îlot classique avec des immeubles à front de rue et un jardin au milieu, précise David Syenave, responsable immobilier d'Unibra. L'idée est de favoriser la circulation et de permettre à tout le monde de traverser de petites cours. ».

Si vous avez des idées de sujets que vous souhaiteriez que l’on aborde, n’hésitez pas à nous soumettre vos propositions. De même, si vous souhaitez écrire une carte blanche, nos pages peuvent vous être ouvertes sous certaines conditions. E-mail : x.attout@ccbw.be

Si on a souvent aménagé l’espace pour gagner du temps, on a trop rarement aménagé les temps pour gagner de l’espace. Luc Gwiazdzinski, géographe, Sylvain Grisot, urbaniste et Benjamin Pradel, sociologue, dans une tribune publiée dans Libération.

Tubize et Jodoigne bientôt désenclavées Des avancées dans les différents projets de contournements routiers en Brabant wallon. À Jodoigne, la première phase des travaux se déroulera en août tandis que la phase 2, soit le tronçon Sud-Est, est programmée pour 2023. À Tubize, les emprises doivent débuter au mois de juin tandis que les travaux sont programmés à partir de la fin 2021 ou début 2022. Moins de précisions pour le dossier du contournement nord de Wavre, qui est sujet à des recours au Conseil d’État. Des éléments de réponse donnés par le ministre wallon de la Mobilité, Philippe Henry.

Retrouvez tout le contenu d'Espace-vie, de nouvelles informations, des vidéos et autres infographies sur notre site internet espacevie.be.


répondre

Quel est le poids réel des citoyens en urbanisme ? Une question de Vincent Informaticien, 58 ans, de Grez-Doiceau

Une réponse de Fabrice Evrard Avocat spécialisé en droit de l’urbanisme, de l’environnement et de l’aménagement du territoire au sein du cabinet wavrien HSP

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La place des citoyens dans la construction ou l’aménagement des villes a souvent fait l’objet de longs débats. Certains avançant qu’elle était trop faible, d’autres trop importante. Une chose est certaine : quand on regarde l’évolution des grands projets immobiliers en Brabant wallon, les citoyens sont de plus en plus sollicités. Un promoteur ne déposera en tout cas plus jamais un projet d’envergure sans avoir consulté commune, riverains et autres, comme c’était parfois le cas auparavant. L’idée étant avant tout d’éviter un recours au Conseil d’État, voie juridique qui peut retarder un projet de plusieurs années. « Le chemin le plus long est en effet parfois le plus rapide », sourit l’avocat du cabinet HSP, Fabrice Evrard. Un citoyen peut aujourd’hui faire entendre sa voix de plusieurs manières : lors d’une enquête publique, dans le cadre d’une charrette urbanistique ou d’ateliers participatifs, au sein de la Commission communale consultative d'aménagement du territoire et de mobilité de sa commune (CCATM), voire lors d’un recours au Conseil d’État. « Les ateliers participatifs se multiplient aujourd’hui dans le cadre de projets d’envergure, poursuit Fabrice Evrard. C’est intéressant car cela permet, en amont, d’apporter une perception et une connaissance différentes de celles des experts. Toutefois, ces phases alternatives de participation ne sont pas inscrites dans les textes, au contraire des principes généraux liés à la participation du public, tels que définis par le droit européen, dans le cadre de l’élaboration d’un projet ou d’un plan d’urbanisme, et applicables en droit wallon. Cela permet à un citoyen de formuler ses remarques au plus tôt dans le processus menant à l’octroi d’un permis. C’est d’ailleurs ce principe qui prévaut dans le cadre des réunions d’information préalables à l’étude d’incidence d’un projet. » L’enquête publique est un autre espace de participation citoyenne. Plus cadrée, elle dure habituellement 15 jours, voire 30 ou 45 dans certaines hypothèses, et concerne un projet bien précis, dans un espace déterminé. L’avis déposé par un citoyen reste consultatif. « Même si les remarques peuvent partir dans tous les sens, l’autorité a le devoir d’y répondre.» Si faire partie d’une CCATM permet d’avoir une vue d’ensemble sur les projets développés dans sa commune, un dernier levier d’action reste le recours au Conseil d’État. Si certains en abusent (ils sont alors appelés recours vexatoires ou téméraires), le recours offre néanmoins la possibilité de s’opposer sur la forme à un projet. « La place qui est aujourd’hui octroyée aux citoyens me semble pertinente et équilibrée, estime Fabrice Evrard. Ils possèdent des espaces pour faire entendre leurs voix et proposer des remarques intéressantes. Mais, à un moment, il faut fixer une limite. Sinon, ce serait aux riverains d’octroyer un permis et plus aux autorités publiques… » X. A.


Les nouvelles ambitions de Espace-vie se plonge ces prochains mois dans le devenir des cinq plus importantes communes du Brabant wallon. On commence avec Braine-l’Alleud, entité la plus peuplée de la province. On y retrouve des chantiers à la pelle, des défis à relever et quelques manquements criants. (Série 1/5) Texte : Xavier Attout - Photos : X. A.


apprendre

Appartement toute

Le Parc de l'Alliance accueillera près de 800 logements dans la prochaine décennie.

La commune comptait 38 244 habitants en 2010. On en dénombre aujourd’hui 40 220. Une hausse de 5 % en dix ans. Alors que la hausse moyenne en Brabant wallon était de 7 % sur la même période. L’urbanisation galopante de ces quarante dernières années semble s’être quelque peu ralentie aujourd’hui. Il faut dire que les grands espaces se raréfient. L’idée étant aujourd’hui de davantage équilibrer la typologie du bâti et de moins faire la part belle aux maisons bel étage et aux villas. « La volonté a toujours été de calmer les ardeurs des promoteurs, lance Vincent Scourneau. Des projets comme ceux situés à Merbraine, à l’ancien lycée ou à l’Alliance datent des années 1990. Il faut donc être patient quand on souhaite développer un dossier chez nous. Tous les bras de fer que nous avons avec des promoteurs concernent une diminution de la densité. Le leitmotiv de base reste en tout cas le même : privilégier la qualité à la quantité. » D’où le recours depuis une décennie à une politique urbanistique n’autorisant que les appartements de plus de 120 m2. Un choix qui fait toujours grincer des dents. « Il s’agit surtout de diversifier l’offre d’appartements dans notre commune, précise Vincent Scourneau. Auparavant, les Brainois devaient aller à Waterloo ou à Nivelles

pour trouver un appartement de qualité. Nous avons voulu résorber ce déficit. » La commune a toutefois lâché un peu de lest en la matière, puisque cette norme de 120 m2 doit dorénavant s’inscrire dans une moyenne globale : un projet peut englober des appartements de 140 m2 et d’autres de 80 m2. Comme le démontre le projet Bellecour (Unibra Real Estate et Belfius Immo), sur le site de l’ancien lycée (98 appartements). La livraison est prévue en 2023.

Tous les bras de fer que nous avons avec des promoteurs concernent une diminution de la densité. Le leitmotiv de base reste en tout cas le même : privilégier la qualité à la quantité.

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Vincent Scourneau, bourgmestre de Braine-l’Alleud

Un centre-ville en désuétude L’attractivité du centre-ville reste faible. Peu d’habitants, peu de commerces, peu d’animations. « Une quadrature du cercle qui est similaire à ce que l’on retrouve dans bon nombre de communes wallonnes, tempère Vincent Scourneau. Toutefois, si la situation ne s’est pas vraiment améliorée, elle n’a pas empiré. Nos investissements vont se poursuivre. » Une reconfiguration du centre-ville se dessine à nouveau. L’ancien hôtel de ville est devenu une maison des associations, histoire d’amener davantage de vie dans le centre via le passage de près de 5 000 bénévoles. La GrandPlace actuelle, qui est en fait un parking à ciel ouvert, sera remplacée par une version repensée de la place de la Cure, piétonne et aérée. Une nouvelle voirie sera créée de l’avenue SaintJacques à l’avenue Léon Jourez, de manière à créer un nouvel ilot dédié à la santé. Les abords de la gare doivent quant à eux toujours être redynamisés. La Ville cherche un promoteur immobilier pour valoriser ces espaces le long des voies. Sur le

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C

e n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Si Braine-l’Alleud est la plus importante commune du Brabant wallon en termes de population, elle n’est en fait jamais parvenue à traduire ce leadership sur le plan culturel, commercial, politique, judiciaire ou sportif. Aucun secteur où elle n’émerge. Au contraire d’autres entités qui s’en sont emparées pour devenir – ou s’autoproclamer – tête de pont en la matière. Laissant Braine-l’Alleud à son étalement urbain. Et à tenter de renforcer ses équipements et ses services pour ne pas apparaitre comme une ville dortoir. Un paradoxe bien étonnant. Heureusement pour elle, cette mutation a été plutôt réussie. La commune a été réorganisée par pôles (culturel, médical, sportif, historique, administratif, de loisirs, etc.) ces dernières années. La concrétisation d’un plan sur dix ans élaboré en 2010. Une transformation qui est même saluée par les détracteurs du bourgmestre Vincent Scourneau, qui a entamé en 2018 son troisième mandat. Tour d’horizon des grands changements. Et détails des prochains chantiers.


apprendre

terrain vague situé au-delà du pont Courbe, une résidence pour seniors de standing est à l’étude. « Il faut avancer pas à pas pour redonner envie d’habiter dans le centre. »

Partir d’une friche pour donner un nouveau souffle au centre de Braine-l’Alleud est un projet ambitieux qui pourra, je l’espère, servir d’exemple pour d’autres communes du Brabant wallon. Osons aussi les gestes architecturaux ! Nathalie Smoes,fonctionnaire déléguée

Des projets multiples

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C’est le groupe Kinepolis (Imagibraine) qui a ouvert la voie du site du Parc de l’Alliance, à la fin des années 1990. Un parc d’activité économique s’y est développé avant qu’un volet résidentiel ne soit en développement depuis 2013. AG Real Estate va y construire 800 appartements. La seconde phase sort de terre. Ce site, particulièrement bien situé, regorge encore de possibilités de développement. Ajoutons que les services administratifs de la Ville y sont désormais implantés.

Pour le reste, deux zonings supplémentaires sont également à l’étude sur le territoire brainois. Aucun des deux ne devrait voir le jour. « Je vais renoncer à celui souhaité par in BW (ndlr : 28 ha le long de la chaussée de Tubize) », précise Vincent Scourneau. Parmi les projets en cours, la construction d’une

LE REGARD DE LA FONCTIONNAIRE DÉLÉGUÉE Nathalie Smoes, fonctionnaire déléguée du Brabant wallon, et sa collaboratrice, Annick Vousure, attachée architecte « Pour Braine-l’Alleud, je souhaite mettre en avant deux projets exemplaires tout en étant dans des registres très différents. L’un est un projet en centre urbain, d’initiative privée, que la commune a judicieusement choisi de soutenir. Il vient d’être autorisé. L’autre projet est d’initiative publique et a permis la création d’un espace de détente à côté du centre. INITIATIVE PRIVÉE. Le projet d’Unibra Real Estate et Belfius Immo se développe sur le site de l’ancien Lycée royal repris comme « secteur à projets » au Schéma de Développement communal et situé en plein cœur de Braine-l'Alleud. Ce projet mixte, dédié aux services, à la distribution et au logement, sera un véritable moteur pour donner une plus grande attractivité

au centre-ville, redessiner son image et insuffler une vision architecturale plus innovante. Il s’inscrit dans la trame urbanistique tout en innovant par sa forme et son expression. Encourager un projet de cette envergure, de cette qualité et ayant une allure très contemporaine est un signal fort pour le développement de Braine-l’Alleud. Partir d’une friche pour donner un nouveau souffle au centre de Braine-l’Alleud est un projet ambitieux qui pourra, je l’espère, servir d’exemple pour d’autres communes du Brabant wallon. Osons aussi les gestes architecturaux ! INITIATIVE PUBLIQUE. Si le projet précédent s’est développé sur un chancre urbain, c’est suite à des problèmes d’inondation que le site du Paradis a

finalement pu aboutir alors que des intentions communales existaient déjà avant 2000. Ce vaste lieu de promenade et de détente autour de plans d’eau, situé à quelques centaines de mètres du centre de la commune, renforce l’attractivité de son espace urbanisé et permet une gestion qualitative du cadre de vie, ce qui rencontre au moins deux des objectifs du Schéma de développement du territoire (SDT). Il sera conforté dans son rôle de pôle de détente et de loisir par l’implantation de la piscine à proximité immédiate. Ce projet met en lumière l’importance de la présence d’espaces verts publics dans et à proximité des centres. Dans les deux projets ci-dessus, les contraintes des terrains ont été les moteurs de leur développement. »


interview

« S’inventer une nouvelle identité » Enguerrand de Pierpont est notaire à Braine-l’Alleud. Propos recueillis par X. A.

Comment s’est porté le marché immobilier à Braine-l’Alleud ces derniers mois ?

Il fonctionnait très bien avant de subir de plein fouet, comme partout, la crise du Covid-19. Il s’agit d’un marché relativement stable, sain et régulier.

Quelles sont les grandes tendances actuelles ?

nouvelle piscine sur le site du Paradis se terminera en septembre, alors que la volonté de l’APIBW de construire du logement abordable sur le site de l’ancienne piscine Neptune a du plomb dans l’aile, vu les divergences de vues entre la commune et l’Agence de promotion immobilière.

Cet afflux d’appartements neufs répond-il à un déficit en la matière ?

En effet. Il y avait un manque de produits de qualité. Notamment pour les seniors qui souhaitent délaisser leur maison bel étage.

Changement de braquet pour le vélo Braine-l’Alleud compte 29 282 voitures pour plus de 40 000 habitants. Des chiffres démesurés. Ils s’expliqueraient par la présence de nombreuses sociétés, dont les voitures sont immatriculées à Braine-l’Alleud. Reste que la politique de mobilité a nettement évolué en dix ans. « Il n’y aura pas d’aménagements spécifiques pour les vélos ou pour la mobilité douce dans le centre, affirmait Vincent Scourneau en 2010 dans Espace-vie. Les Brainois ont une voiture et doivent l’utiliser. » Depuis, l’homme a radicalement changé son fusil d’épaule. Près de 50 km de pistes cyclables ont été créées. Toutes en site propre. « J’ai changé d’avis, je l’avoue, confesse Vincent Scourneau. L’avènement du vélo électrique a complètement modifié ma perception. Ce mode de déplacement est formidable. Il est donc important de rejoindre nos différents pôles sur des voies sécurisées. » Ajoutons qu’un partenariat a été signé avec une société privée pour mettre à disposition des voitures électriques à partager et que la SNCB a confirmé qu’une gare RER était prévue à Braine-Alliance en 2025. Ce sera la troisième de l’entité. « De quoi renforcer notre projet de ville multipôles. »

Le schéma classique du Brabant wallon…

Oui, même si, à Braine-l’Alleud, cela concerne davantage les maisons bel étage que les villas. Ces dernières gardent une certaine attractivité. La gamme intermédiaire, entre 600 000 et 1 million d’euros, souffre davantage que les villas dont les prix sont inférieurs et supérieurs.

La norme des 120 m2 pour un appartement engendre-t-elle l’arrivée d’une population nouvelle ?

Elle écarte en tout cas du marché les jeunes ménages. Pour acheter un appartement de 120 m2, il est nécessaire d’avoir deux très bons revenus. Cette norme a donc un effet pénalisant. Le produit phare pour les jeunes couples reste toutefois la maison bel étage, dont les prix varient de 250 000 à 350 000 euros.

Pour aller plus loin Relisez sur espacevie.be l'article de fond écrit sur Braine-l'Alleud en 2010, de manière à mieux de Les Papeteries Genval,l'é cinq aprèsde son percevoir volution la commune.inauguration.

Comment ramener des habitants dans le centre-ville ?

Le centre doit être revitalisé depuis des années. Les commerces souffrent. Il n’y a pas de recette miracle pour le redynamiser. Braine-l’Alleud pâtit de ce cliché d’être une cité-dortoir car elle est bien desservie au niveau ferroviaire ou via le ring. Elle doit s’inventer une nouvelle identité.

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Le plateau de la gare, terre en friche.

Il y a de plus en plus de projets d’appartements neufs. Je crains d’ailleurs un certain embouteillage en la matière. La demande parviendra-t-elle à absorber cette offre ? C’est une grande interrogation. Car outre les trois grands projets (Alliance, Merbraine et ancien lycée), il y a de nombreuses petites promotions qui proposent également des appartements. Même si, il faut le reconnaitre, tout se vend.


découvrir

réinventons plus La structuration du territoire autour de la voiture, modèle qui a contribué à l’étalement urbain, est à bout de souffle, estime Sylvain Grisot. Il publie un Manifeste pour un urbanisme circulaire et appelle à revoir complètement la manière dont on fabrique la ville. Et vite. Car la cité de 2050 se construit aujourd’hui. Texte : Xavier Attout Photo : Neolegia

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n succès pour un sujet de niche. Avec 2 000 exemplaires vendus depuis la mi-février, l’urbaniste nantais Sylvain Grisot, fondateur de l’agence de conseil et d'innovation pour la transformation de la ville dixit.net, est le premier étonné de voir son Manifeste pour un urbanisme circulaire susciter autant de commentaires. La preuve qu’il est temps de changer de modèle ? ESPACE-VIE. La période de confinement que nous avons traversée a notamment été propice à la réflexion sur les questions du partage de l’espace public. Avez-vous senti que les thématiques que vous mettez en avant, comme l’urbanisme circulaire et l’urbanisme tactique, ont eu davantage d’écho ces derniers temps ? SYLVAIN GRISOT. Il y a eu en effet une accélération des questionnements sur ces matières. Les changements induits par cette crise sanitaire poussent à réinventer la manière dont on aborde le territoire et son environnement. La crise est un moteur de changement. Elle révèle nos fragilités. Nous devons en tirer des leçons pour le futur, pas pour adapter nos espaces à cette seule pandémie ou aux suivantes, mais pour les rendre adaptables aux crises et changements à venir. Je m’aperçois en tout cas que de plus en plus de citoyens se sont emparés de ces matières. C’est une satisfaction.

L’urbanisme circulaire, une ville qui donne envie d'y vivre.

Quel est votre définition de l’urbanisme circulaire ? Il est difficile d’accoler une définition précise. L’idée est avant tout de mettre fin à l’étalement urbain et de proposer de nouvelles manières de voir la ville. L’urbanisme circulaire propose de repenser les processus de fabrication de la ville pour bâtir une ville flexible capable de s’adapter en continu à l’évolution des usages. Elle doit être frugale en matériaux et en énergie, mais surtout en espace, par l’application des principes de l’économie circulaire. Cet urbanisme privilégie le recyclage des friches urbaines à l’étalement de la ville, la transformation des bâtiments existants à leur destruction, l’intensification des usages de l’existant à la construction. Nous devons apprendre à mieux développer la ville en construisant moins et en la réinventant plus. La fin de l’étalement urbain et la densification à proximité des lieux de services et des transports en commun sont des concepts aujourd’hui bien ancrés. Avec l’urbanisme


circulaire, l’idée est d’aller un cran plus loin ? Je ne sais pas exactement comment cela se passe en Belgique mais je pense que la situation est relativement similaire à la France. On discute depuis vingt ans des concepts de fin de l’étalement urbain et de reconstruction de la ville sur la ville. C’est devenu un lieu commun en urbanisme. Tout le monde est à peu près d’accord sur ces principes mais rien n’est mis en place concrètement pour les réaliser. Le plus souvent, on simplifie les discours, ce qui les dénature. Il est temps d’avancer. Il semble y avoir un double discours entre les tenants des nouvelles tendances d’aménagement du territoire et la réalité de terrain, où le grand public rêve encore de quatre façades. Comment répondre à ce grand écart ? Le principal problème est le déficit d’alternatives à la villa quatre façades. L’offre qui est actuellement déployée dans les centres urbains n’est pas suffisamment qualitative. Aujourd’hui, les gens ont le choix entre vivre dans une quatre façades

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ou dans une cage à poules. Cette tendance de créer des logements de plus en plus petits n’est pas une solution. En France, elle répond surtout à une défiscalisation des promotions immobilières. Il n’est pas normal que les typologies de logements soient déterminées par des questions fiscales. Résultat : il y a un déficit de grands logements et d’une offre urbaine qualitative. Vous évoquez dans votre ouvrage l’ambition de développer une ville frugale, proche, résiliente, pour tous et flexible. N’est-ce pas une vision idéaliste de la ville quand on voit les modèles qui se sont développés aujourd’hui ? Cette vision émerge déjà actuellement, mais par petits bouts. Notre société a été conçue autour d’une dépendance à la voiture dont il est nécessaire de se détacher. C’est une vraie nécessité. Et l’avènement de la voiture électrique ne changera rien, car sa fabrication a un impact carbone important. Ce qu’il faut, c’est avant tout réduire les distances parcourues.

Manifeste pour un urbanisme circulaire. Pour des alternatives concrètes à l’étalement de la ville. De Sylvain Grisot, auto-édité via dixit.net. Infos : urbanismecirculaire.fr


découvrir

Peut-on encore tendre vers ce type de ville ? Quand on regarde l’histoire des villes, l’étalement urbain ne date que d’il y a cinquante ans. C’est très court. Avancer par petits pas ne mènera à rien. Évoquer la ville en 2050 est déjà presque trop tard. La ville de 2030 est celle que nous construisons aujourd’hui. Nous avons dix ans pour apprendre à faire celle de 2050. Une ville frugale, proche et pour tous. L’étalement urbain n’est pas le principal problème, ce n’est que le symptôme d’une fabrique de la ville qui ne sait pas faire autrement que de déléguer son aménagement à la voiture. Or, ce système ne fonctionne plus : embouteillages, pollution de l’air, augmentation des prix de l’immobilier, ségrégations territoriales, sécurité alimentaire, faible place donnée aux modes alternatifs à la voiture le démontrent. Les leviers du changement doivent être actionnés au plus vite.

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C’est quoi une ville frugale et résiliente ? Pour construire un ville frugale, nous avons besoin d’avoir une ville qui encourage la proximité. Soit, offrir le choix aux habitants de laisser leur voiture au garage, en rapprochant les usages pour limiter les besoins de mobilité et en multipliant les alternatives à la voiture. Faire la ville pour tous, c’est donner à tout le monde la possibilité de vivre dans cette ville de la proximité. Bâtir une métropole vertueuse n’a aucun sens si une partie de ses habitants doit vivre dans une périphérie qui ne l’est pas. L’urbanisme circulaire est avant tout une ville dans laquelle nous avons envie de vivre. C’est très simple. La matière première d’une ville est le foncier. Or, il est aujourd’hui confisqué par sa valeur. Beaucoup d’espaces sont délaissés, d’autres sont sous-exploités. Il est temps de bien regarder la ville actuelle et de se demander si toutes les ressources sont bien utilisées. Dans la plupart des

L’urbanisme circulaire propose de repenser les processus de fabrication de la ville pour bâtir une ville flexible capable de s’adapter en continu à l’évolution des usages. Elle doit être frugale en matériaux et en énergie, mais surtout en espace. Sylvain Grisot, urbaniste

territoires, les responsables n’ont pas conscience du potentiel de leurs ressources. Le potentiel de végétalisation est par exemple gigantesque. S’il y a bien un endroit où il faut par exemple créer de l’espace public et des parcs, c’est sur les 48 % de l’espace d’une ville qui est dédié aux voitures. De plus en plus de promoteurs poussent à la démolition-reconstruction des immeubles. Vous allez à contre-courant de ce principe en favorisant l’intensification des usages, la transformation de l’existant et le recyclage des espaces. Comment cela se traduit-il ? La tendance actuelle est de démolir car cela coute moins cher et que c’est plus simple. Se concentrer sur le réemploi et la transformation des bâtiments permet de diminuer la production de déchets et les pertes d’énergie associées. Cela nécessite moins de béton mais plus d’intelligence. Il faut arrêter de construire des bâtiments dont l’obsolescence est programmée.

OTTIGNIES, MODÈLE WALLON C’est une première en Wallonie. Le projet Samaya, développé aux abords de la gare d’Ottignies par le promoteur BPI, a intégré une réflexion d’économie circulaire. S’il ne s’agit pas à proprement parler d’urbanisme circulaire, il intègre néanmoins un de ses composantes. Samaya doit en fait devenir le fer de lance d’une nouvelle génération de quartiers exemplaires et innovants. Le tout en

mettant l'accent sur la réutilisation, la réparation, la rénovation et le recyclage des matériaux et produits existants. Ce futur quartier de 11 hectares sera aménagé sur un terrain exploité par la société industrielle Benelmat. Il comprendra à terme près de 900 logements et sera organisé autour d’une dorsale verte dédiée à la mobilité douce (piétons, vélos, etc.). Cette voirie

doit rythmer le développement des différents ilots qui seront conçus par des architectes différents en respectant l'environnement et la qualité de vie. Au plus proche de la gare, le projet prendra un caractère plus mixte intégrant quelques commerces, des espaces pour PME et bureaux, ainsi que des services. La construction des premiers appartements est en cours.


respirer

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© FX Rombouts

Un grand cru Une belle prouesse architecturale. Le chai du vignoble du Château de Bousval a été inauguré il y a quelques mois. Il est l’œuvre du bureau d’architecture AWAA, de Charly Wittock. Le propriétaire des lieux, Michel Verhaeghe de Naeyer, souhaitait voir émerger sur ses terres un chai écoresponsable, à proximité du plateau accueillant les vignes et se fondant dans la nature environnante.

Il en ressort un chai tout en bois – la structure est en béton – dont la forme courbée donne des allures futuristes au bâtiment. La toiture verte fait écho à la faune et à la flore environnantes. Planté en 2014, le vignoble de 5,2 ha est composé de trois types de cépages différents : chardonnay (3,8 hectares), pinot noir (1,15 hectares) et pinot gris (35 ares). Il est spécialisé dans l’agriculture

bio et biodynamique. L’objectif est de produire 30 000 bouteilles par an. Ajoutons que le chai s’ouvre à l’art contemporain, la passion de la femme du propriétaire, en proposant chaque année une exposition différente. Des oeuvres du peintre Daniel Enkaoua sont actuellement accrochées sur les murs en béton brut du pressoir, du garage et de la cave.


découvrir

pour des villes apaisées

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Certains parlent d’urbanisme tactique. D’autres d’urbanisme temporaire. Quelques-unes des plus grandes villes du monde s’y attèlent ces dernières semaines, poussées dans le dos par la crise du coronavirus. De quoi permettre la création de pistes cyclables temporaires ou de zones de rencontre. Possible à l’échelle du Brabant wallon ?

S

Texte et photo : Xavier Attout

i ce concept périclite aujourd’hui dans quelques grandes villes, il a davantage de difficultés à s’imposer dans les communes du Brabant wallon. L’échelle d’action étant bien différente, de même que les problématiques. Pas de voiries à trois bandes en plein centre-ville ou de densification démesurée. Il n’en reste pas moins que certaines mesures ponctuelles peuvent être prises. « C’est le cas chez nous, sourit Paul Brassseur, échevin de la Mobilité à Wavre. Nous avons décidé de mettre deux des principales artères commerçantes à sens unique (rue Haute et rue du Pont du Christ) pour apaiser la circulation des piétons et des cyclistes. Des barrières Nadar sont installées le long de la voirie, de manière à rétrécir celle-ci et à permettre aux piétons d’avoir davantage de place pour circuler. Le stationnement est également interdit. Je suis agréablement surpris par les retours que nous obtenons. Les Wavriens apprécient cette nouvelle manière de vivre et de se déplacer. » Il s’agit en fait d’une mesure qui est inscrite dans le plan Wavre 2030. Elle vise à faire du centre-ville une zone plus apaisée. « Ces décisions préfigurent donc en quelque sorte ce que sera le

centre de Wavre à l’avenir, poursuit Paul Brasseur. Nous souhaitons vraiment en faire une zone de rencontre. » La décision sera effective jusqu’au 31 aout. Elle sera éventuellement prolongée dans le cadre de la crise du Coronavirus, mais en tout cas pas de manière définitive. Ce type d’aménagement étant ponctuel, si on veut le faire perdurer dans le temps, il faut passer par les voies habituelles. « À savoir entamer une réflexion avec tous les acteurs concernés et songer aux aménagements pérennes à mettre en place. Je pense que ce projet se concrétisera à l’avenir, d’une manière plus importante même. Il faut juste être patient. »

Une différence d’échelle À Waterloo, aucune mesure spécifique n’a été prise. Il faut dire que la commune est justement en train de tenter de mettre tous les quartiers de l’entité en « zone 30 ». « Mais nous profitons de cette période où de nombreux Waterlootois sortent leur vélo pour rappeler aux automobilistes les nouvelles règles de circulation, lance Cédric Tumelaire, échevin de la Mobilité. Nous avons la volonté de faire de Waterloo une commune plus apaisée en matière de mobilité et cette période peut être un accélérateur. » Du côté d’Ottignies-Louvain-la-Neuve, aucune mesure spécifique n’a été prise. De nombreux habitants ont pourtant interpellé la bourgmestre à ce sujet. « Mais il ne faut pas se tromper d’échelle, explique Julie Chantry, la bourgmestre d’Ottignies-LLN. Ce qui est possible dans de grandes métropoles ne l’est pas chez nous. Nous sommes déjà considérés comme une « Ville cyclable ». De nombreux efforts sont faits en la matière. Dont l’idée de faire une « zone 30 » intégrale pour toute la commune. Mais il faut avancer pas à pas, avec tous les acteurs. De plus, les seules voiries qui ont plus de deux bandes sont régionales. Nous ne pouvons donc agir dessus. »

Centre-ville de Wavre, sens unique et aménagements temporaires.


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DÉMONTRER LES CHANGEMENTS POSSIBLES L’urbanisme tactique a fait une irruption médiatique ces dernières semaines. Des urbanistes canadiens estiment qu’il s’agit « d’aménagements temporaires qui utilisent du mobilier facile à installer (et à désinstaller) pour démontrer les changements possibles à l’aménagement d’une rue, d’une intersection ou d’un espace public. On peut ainsi montrer comment l’aménagement peut influencer le comportement des usagers. » L’urbaniste new-yorkais Mike Lydon est dans la même lignée, affirmant qu’il s’agit « de gestes délibérés qui agissent localement, avec peu de moyens et pour un laps de temps relativement court sur un espace collectif sous ou mal utilisé. » En résumé, l’urbanisme tactique est une autre façon de concevoir la ville afin d’adapter au mieux l’espace aux besoins des habitants, et ce rapidement. Que ce soient des pistes cyclables éphémères, des places de stationnement pour élargir le trottoir ou encore des marquages temporaires pour montrer une certaine distanciation. Il doit réenchanter la ville en quelque sorte et inciter les concepteurs des villes à être plus à l'écoute des usages.


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apprendre

Confinement et télétravail :

Texte : Karima Haoudy – Photo : Tiemen Aperloo

U

n salarié sur cinq pratique le télétravail. Cette tendance s’est accentuée avec le confinement planétaire que nous vivons bon an mal an depuis la mi-mars. Du moins pour une partie des travailleurs qui disposent et maitrisent des ressources technologiques (PC, connexion numérique, smartphone, etc.) pour embarquer leur « bureau à la maison ». Cadres, de formation universitaire, émargeant du secteur tertiaire forment le profil saillant de ces télétravailleurs. Le Covid-19 a fait rejaillir les différences entre toute une série de métiers, notamment pour les filières manuelles et de services (corps médical et soignant, agriculteurs, employés des grandes surfaces, agents d’entretien, éboueurs, transporteurs, etc.) qui ne peuvent se faire à distance et dont la crise sanitaire « nous oblige à en réévaluer l’utilité sociale », comme le souligne Répartition en fonction du nombre de jours de télétravail par semaine la sociologue française Dominique Méda. « Le travail à domicile est lié au #Jours de télétravail % télétravail développement de l’économie numérique 12 % et à notre société qui articule les échelles 3,6 % globales et locales (glocal), observe 0,8 % Pierre Vanderstraeten, urbaniste, vice-doyen de la Faculté d'architecture, 0,6 % d’ingénierie architecturale, d'urbanisme Total : 16,9 % LOCI-UCLouvain. À la différence du Source : Chiffres clés du télétravail en Belgique, SPF paysan et de l’artisan qui autrefois Mobilité et Transports, 2018.

travaillaient de leurs mains dans un espace défini au labeur, le salarié moderne n’est pas plus propriétaire qu’il n’est maitre de la régulation de son outil de travail ».

Travail en ligne et lignes (floues) de démarcation Si le télétravail présente certains avantages, il peut - s'il n’est pas circonscrit par des balises claires (nombre limité de jours, horaires définis, etc.) - insidieusement démanteler la barrière qui sépare sphère privée et sphère professionnelle. L’absence de limites peut plonger le salarié dans un rythme de travail continu. Ce qui n’est pas sans provoquer des dysfonctionnements psychosociaux (stress, burn-out, isolement, etc.). Fortement prégnant dans la séquence Covid-19 pour une frange du moins de salariés, le télétravail doit en outre composer, non sans une laborieuse gymnastique organisationnelle, avec l’addition des tâches domestiques traditionnelles et inédites (faire la classe et la récré aux enfants) que le confinement a allègrement ajoutées. Peu de promoteurs et architectes ont anticipé cette hybridation des fonctions et leur bonne cohabitation au sein de la cellule nucléaire du foyer. Quand la lutte des espaces sème des frictions et tensions, particulièrement nocives au sein des ménages économiquement fragilisés : « Nous savons également que dans les grandes villes, l’accès à l’espace est un luxe, de nombreuses personnes sont forcées – surtout en ce moment de confinement – de télétravailler mais n’ont pas les moyens de s’aménager un espace adéquat pour se concentrer et se retirer de la vie domestique. Des études féministes montrent également qu’au sein des couples, l’accès à l’espace est le fruit de nombreuses négociations. Le besoin revendiqué dans Une chambre à soi par Virginia Woolf en 1929 est toujours d’actualité », explique Chloé Salembier, anthropologue et enseignante à LOCI-UCL.

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Aussi microscopique soit-il, le Covid-19 aura chamboulé nos modes de vie. Un des effets palpables a été le mélange, au sein du « chez soi », de fonctions multiples. C’est le cas du télétravail. Analyse ici avec trois acteurs attentifs à cette évolution pour mesurer les effets de cette hybridation de fonctions sur nos espaces intérieurs et extérieurs.


apprendre

Le commun pour compenser et composer ensemble Évolution de la surface habitable moyenne en Wallonie et en Braban wallon Source : Calcul CEHD d'après STATBEL Permis de bâtir concernant les logements résidentiels neufs

Wallonie :

2008 107 m2

2018 100 m2

Brabant wallon :

111 m2 2008

18

97,5 m2 2018

Mais justement, en parlant d’espace domestique, comment celui-ci s’adapte-t-il à cette hybridation ? Difficilement, quand on tient compte des standards de la taille de l’habitat moyen en Wallonie, qui s’amenuise. Des surfaces réduites alors que s’élargit l’internalisation des usages et fonctions, qui avaient lieu dehors. À la question de la taille se greffe la qualité d’adaptabilité et d’évolutivité de l’espace intérieur et du temps disponible pour le « modeler ». Face à ces contingences, émergent des solutions comme celle d’accoler aux unités de logement des espaces communs partagés, dévolus au télétravail et à d’autres usages (se divertir, se relaxer, se rencontrer, se documenter, etc.). Tant au niveau architectural que social, ces communs permettent de cultiver des liens réels (maintenant ainsi le rôle social du travail) et de pallier les dérives que peut semer l’entremêlement confus des

Nous savons également que dans les grandes villes, l’accès à l’espace est un luxe, de nombreuses personnes sont forcées de télétravailler mais n’ont pas les moyens de s’aménager un espace adéquat pour se concentrer et se retirer de la vie domestique. Chloé Salembier, anthropologue et enseignante à LOCI-UCL

fonctions au sein de la cellule nucléaire. Il existe dans ce registre des initiatives, avec des acteurs, des objectifs et des résultats, très différents. Des habitats groupés ou participatifs se développent un peu partout en Europe, généralement à l’initiative de groupes dotés de capitaux culturels et économiques. Même si on est loin des exemples innovants comme l’ensemble de Kalbreite (Zurich) au sein duquel les cellules individuelles sont fortement réduites (35m2 par personne alors que la moyenne à Zurich est de 55m2) pour offrir des espaces communautaires consacrés entre autres au travail, ces expériences de communs partagés sont des ateliers pour mettre en œuvre une hybridation fonctionnelle. Dans le champ de la promotion immobilière, on retrouve une évocation des « communs » sous la forme de services et espaces partagés, sujet de recherches de Constance Uyttebrouck, ingénieure-architecte, chercheuse au LEMA – ULiège. Émanant essentiellement de promoteurs privés, ces ensembles associent, aux

unités de logement, d’autres services accessibles aux résidents. Quelques exemples se développent essentiellement à Bruxelles, pour une clientèle économiquement favorisée. De la privatisation à la privation de l’espace, ces ensembles peuvent contribuer à l’entre-soi. « Par le fait que ces ensembles mixtes s’adressent préférentiellement à un certain public, ils favorisent l’entre-soi et un marché du logement plus exclusif », note Constance Uyttebrouck. D’autre part, ces ensembles mixtes sont en Belgique assez limités. La raison ? Une frilosité de certains promoteurs à dévier de l’offre traditionnelle résidentielle, risquant de passer à côté d’une mue déterminante des pratiques professionnelles et de leur impact sur l’organisation du logement.

Leurres du télétravail ? À l’heure de l’urgence écologique, le télétravail a souvent été utilisé comme un argument de poids pour contribuer à la réduction de notre empreinte carbone. La distance domicile-lieu de travail étant effacée par cette pratique. Mais cette réduction de l’empreinte est toute relative si l’on considère que près de 34% des télétravailleurs habitent à plus de 50 km de leur lieu de travail. L’impact du télétravail sur la réduction de l’étalement urbain et sa fidèle alliée, la voiture, serait à réévaluer. Le fait de pouvoir travailler de chez soi n’inciterait pas davantage à se rapprocher de son lieu de travail. Cette dimension doit être encore approfondie mais elle est un indice intéressant pour mesurer la contribution effective du télétravail dans la réduction de notre empreinte sur le territoire à de multiples échelles : de la mobilité à la consommation des sols. À l’aune de l’expérience du confinement et de cette crise dont nous n’entrevoyons, à ce stade, qu’une partie des conséquences, la remise en question du travail à distance plaide, plus que jamais, pour un urbanisme de proximité. Pourcentage de télétravail, réparti en fonction de la distance domicile - travail + 50 km

34 %

30 à 50 km

25 %

10 à 30 km

15 %

10 à 30 km

10 %

- de 5 km

10 %

Source : Chiffres clés du télétravail en Belgique, SPF Mobilité et Transports, 2018.


cultures

d'un territoire

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© Maureen Schmetz

Monuments vivants Sur son portail Environnement, le Service public de Wallonie (SPW) souligne que « l’histoire de l’homme a toujours été intimement liée à celle des arbres » et que ceux-ci « ont servi à travers les siècles, aussi bien de support à la foi et aux croyances, de lieu de justice ou d’instrument de gestion de l’espace des frontières ». Certains de ces témoins

naturels du temps sont protégés par le statut d’arbres remarquables, qui leur est attribué par la Région wallonne en raison de l’intérêt paysager, historique, folklorique, religieux ou dendrologique qu’ils présentent, de leur taille exceptionnelle ou encore de la curiosité biologique qu’ils constituent, comme les neuf tilleuls au lieu-dit « Arbre de la justice »

à Court-Saint-Étienne, qui se distinguent par leur valeur paysagère et historique. Aujourd'hui, à l'heure de l'urgence écologique, on s'occupe légitimement de leur sauvetage, mais quelle place occupent-ils encore dans l'imaginaire collectif que ces monuments vivants ont nourri de tout temps ? C. Du.


apprendre

Quand balcons et salons Le confinement d’une partie de la population a suscité l’émergence d’offres culturelles destinées à maintenir du lien, rompre une certaine solitude et permettre de s’évader tout en restant enfermé. Il a vu naitre aussi de belles initiatives de solidarité avec les plus faibles. Texte : Caroline Dunski – Photos : M.-J. Hanot, L. Joinnot et T. Sergoï

L

e numéro d'Espace-vie du mois d'avril évoquait l’appropriation de l’espace public par les arts et les citoyens, quand a surgi une crise sanitaire sans précédent. Celle-ci a confiné une partie de la population dans des intérieurs aux tailles socialement variables (à lire en page 16), tandis que l’usage de l’espace public était sévèrement restreint et contrôlé. Les réseaux dits sociaux ont alors connu une connexion massive et ont vu fleurir de nombreuses propositions culturelles offrant de nous divertir, de nous amuser, bien sûr, mais aussi de détourner notre attention d’une réalité angoissante.

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La première nécessité est donner de l'espoir. Que chaque texte porte une lumière douce, quelque chose de positif, de souriant, de profond et soit un baume réconfortant. Timotéo Sergoï, poète de rue

Citons les musiciens qui proposent des concerts « maison » depuis leur salon, les artistes qui s’adressent à d’autres sous forme d’un journal quotidien du confinement, ou encore des centres culturels qui remplacent les rencontres programmées par des rendez-vous virtuels, pour garder le contact, en attendant de pouvoir revivre tout cela dans les lieux culturels du territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le Centre culturel du Brabant wallon (CCBW), par exemple, a proposé de maintenir la « Scène slam ouverte » du 12 mai dernier sous forme d’un « Open Mic » virtuel, genre de mini-scène ouverte via un outil

Timotéo Sergoï, poète de rue, voyageur errant et conteur de résistances


Les illuminations de Rimbaud depuis chez eux. Dans un souci d’informer les gens sur les offres disponibles, la Fédération Wallonie-Bruxelles a également créé le portail « La Culture à la maison », qui donne un tour d’horizon de la foisonnante offre culturelle accessible dans ces moments où la maison est le lieu principal de nos activités. De cette façon, des espaces « privés » deviennent « publics », le « dedans » devient « dehors ». Certaines de ces multiples propositions prennent des formes plus participatives. Elles invitent à « faire », ensemble ou individuellement. Comme ce journaliste de la RTBF qui incitait ses amis et connaissances à constituer une chorale pour interpréter une chanson, avec autant d’écrans que de choristes. Ou encore Fidèline Dujeu et le Centre culturel de Quaregnon qui invitaient petits et grands à écrire un texte (dessiner, faire des collages ou chanter) en partant de ce que nous inspirent ce que nous voyons de notre fenêtre, une série de photos anciennes ou encore nos souvenirs enfouis. Un exercice ludique pour sortir de chez soi en pensée. C’est bien là tout l’enjeu. Rester en lien, s’évader tout en restant enfermé.

Prouver qu’on est vivant Avec « À chaque jour suffit son poème », Timotéo Sergoï, défini par certains comme poète de rue, voyageur errant et conteur de résistances, offrait sur Facebook une image-poème à imprimer. Il proposait à ses contacts et « amis » de l’afficher à leur fenêtre ou sur un mur de leur choix, visible par eux autant que par leurs voisins, les passants, les absents. « Le poème changera tous les jours. Cela prouvera à chacun·e que vous êtes vivant·e. Les clefs qui ouvriront toutes les portes s’appellent crayons, gommes et papier blanc. » L’artiste, qui avoue ne pas trop apprécier les communications électroniques auxquelles il préfère le papier et les murs, s’est demandé « comment la poésie peut trouver sa place ‘utile’ dans ce capharnaüm. (…) La première nécessité est donner de l'espoir. Que chaque texte porte une lumière douce, quelque chose de positif, de souriant, de profond et soit un baume réconfortant. Comme j'ai l'habitude d'afficher, ma première idée a été de sortir la nuit afficher un poème quotidien. Mais le public aurait été tout petit. Il se serait limité à mon quartier et, surtout, les gens ne sortant pas, l'affichage se serait révélé inutile. Alors j'ai pensé

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de visioconférence open source, exceptionnellement réservée aux femmes. Chaque jour pendant 53 jours, pour égayer notre confinement, depuis son domicile nivellois, Louison Renault, ancien président du CCBW et professeur au Conservatoire royal de Bruxelles, offrait un intermède musical interprété au piano, à l’accordéon ou encore au balafon. Avec son fils Elie Theunissen, étudiant en photographie à l’ESA « Le 75 », l’autrice et metteure en scène Brigitte Baillieux a entamé une « correspondance confinée », elle à la plume, lui derrière son objectif photographique. On a vu aussi les artistes formant la compagnie des Baladins du Miroir chanter


apprendre

à rentrer dans le salon des gens, puisqu'ils sont enfermés. Voilà la solution : le net. Ce n'est pas mon truc, mais là l'outil se révèle super efficace. J'ai deux fronts : chaque jour, j'envoie le poème en PDF à 200 adresses électroniques et je publie une image en jpeg du même poème sur Facebook. Les gens peuvent à leur tour diffuser plus loin et rendre la poésie publique. » Des photos témoignent du fait que les gens affichent les poèmes de Timotéo. « La plus assidue est Ludivine, bibliothécaire à Braine-l'Alleud qui, chaque jour, recopie le texte sur sa fenêtre, sur la table de jardin, sur une affiche... »

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Le temps passant, les supports sont venus à manquer, alors j’ai eu l’idée de faire circuler les poèmes autrement, en les récitant à voix haute, depuis ma fenêtre. Ça rythmait nos quotidiens en les allégeant. Ludivine Joinnot, bibliothécaire

Avec l’arrivée du confinement, la bibliothécaire a été happée par la question du lien rompu avec les lecteurs qui fréquentent habituellement les allées de la Bibliothèque de Braine-l’Alleud. La poésie fait partie du quotidien de Ludivine Joinnot. Elle l’enchante. Un projet avec Timotéo Sergoï se construisait progressivement, juste avant le confinement. C’est parce qu’elle ne dispose pas d’une imprimante chez elle que la bibliothécaire confinée a commencé à reproduire à la main les textes du poète, sur des supports de plus en plus originaux, qu’elle pouvait aussi partager avec ses voisins. « Le temps passant, les supports sont venus

à manquer, alors j’ai eu l’idée de faire circuler les poèmes autrement, en les récitant à voix haute, depuis ma fenêtre. Ça rythmait nos quotidiens en les allégeant. »

La culture solidaire On a vu aussi fleurir, ici et là, des initiatives de culture solidaire. Épaulé par KANAL-Centre Pompidou, Charles Kaisin a imaginé l’action artistique et participative « Origami for life », afin de financer des unités Covid-19 et la recherche de traitements à l’Hôpital académique Erasme. Le designer belge invitait chacun à confectionner des origamis qui rejoindraient une installation prenant la forme d’une grande maison pour symboliser l’unité de soin construite grâce à la mobilisation de tous. Pour chaque origami reçu, les partenaires de l’action s’étaient engagés à verser 5 euros à la Fondation Erasme. Ailleurs encore, l'opération « 1000 petits bonshommes » est menée au profit de l’asbl Infirmiers de rue. Les petits mannequins articulés qui servent généralement de modèles aux plasticiens ont été envoyés à des artistes belges, mais aussi à des personnalités du monde des médias, pour être habillés et devenir uniques, avant d’être vendus aux enchères. Plus fort encore, renonçant temporairement à leurs missions culturelles, certains acteurs culturels ont décidé de se rendre utiles en aidant les malades et les personnes isolées, en apportant leur aide, aussi modeste soit-elle. À l'heure où l'urgence est ailleurs, à l'essentiel, se nourrir et se soigner, ils ont choisi d’admettre leur


impuissance et de la convertir, le temps de cette crise, dans la force d'apporter une aide concrète, matérielle et humaine. À l’appel de l’Association solidaire des Masques stéphanois (ASMS), certaines travailleuses du Centre culturel du Brabant wallon ont rejoint l’énorme élan citoyen qui a rassemblé plus de 300 bénévoles pour prendre part à un atelier de couture afin de confectionner des masques pour les habitants et habitantes de Court-Saint-Étienne. Alors qu'aujourd'hui les artistes ont pu expérimenter d'autres formes de rencontres et d'interactions avec leurs publics, composant avec les règles de distanciation physique par écran ou balcon interposé, se pose la question de savoir comment le secteur culturel cultivera ces belles énergies qui nous ont toutes et tous réunis.

Pour aller plus loin Retrouvez sur espacevie.be une autre approche de ce sujet, avec l'intervention d'intellectuels qui questionnent la prolifération et le sens de ces distractions, propices à renforcer notre dépendance au numérique et à l'entre-soi.

a Maison de l’urbanisme du Brabant wallon a élaboré une démarche visant à offrir une fenêtre sur le territoire de la province et les enjeux de l’urbanisme. Réalisé par l’illustrateur Alain Maes, « L'urbanisme c'est nous » constitue un condensé du territoire et une invitation à s’approprier les enjeux de l’urbanisme. Pensé, inventé, fabriqué entièrement de A à Z par l'équipe de la Maison de l'urbanisme, au cours d’un chantier qui l'a mobilisée depuis 2018. À mi-chemin entre réalité et imaginaire, ce condensé est une invitation à prendre conscience que l’urbanisme fait partie de notre vie et que nous pouvons tous être acteurs de la fabrique du territoire (cf. Espace-vie n°295). En cette période difficile de confinement, avec cet outil entièrement dessiné, chacun et chacune pouvait réaliser une petite escapade hors de chez soi tout en restant chez soi, en partageant sa vision sur son cadre de vie, en complétant, coloriant, photographiant, découpant ou redessinant le condensé. Depuis le début de sa diffusion, la Maison de l’urbanisme du Brabant wallon reçoit régulièrement les contributions de personnes qui se sont emparées de l’objet et qui font part de leurs perceptions subjectives. Ces contributions émanent parfois de familles généralement peu intéressées par les questions d’aménagement du territoire. Elles viennent enrichir une perception collective de notre territoire et montrent que l’urbanisme est l’affaire de tous. Parmi ces contributions, celle de Marie-Joëlle Hanot. Confinée avec sa famille dans leur maison de l’extrême Est du Brabant wallon, elle a reçu cette grande carte dans sa boite aux lettres, avec le précédent numéro d’Espace-vie. « Nous l’avons étendue sur la table de la salle à manger avec des marqueurs et, de jour en jour, nous avons colorié les éléments qui nous plaisaient le plus. Au début, on s’est d’abord attaché à ce qui nous rappelait le plus notre environnement rural. Chaque jour, l’un de nous attirait notre attention sur des détails qu’il découvrait. Mais à la fin, il n’est plus resté un seul centimètre carré non colorié. On s’est fort amusés. Pas seulement pour le côté ‘fun’ du coloriage, mais aussi de découvrir différentes façons d’aménager le territoire. »

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L

fenêtre


agenda Vu la crise sanitaire actuelle, toutes nos activités rassembleuses de public sont annulées jusqu’au 30 juin 2020.

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