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Les nouvelles ambitions de

"Espace-vie" se plonge ces prochains mois dans le devenir des cinq plus importantes communes du Brabant wallon. On commence avec Braine-l’Alleud, entité la plus peuplée de la province. On y retrouve des chantiers à la pelle, des défis à relever et quelques manquements criants. (Série 1/5)

Texte : Xavier Attout - Photos : X. A.

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Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Si Braine-l’Alleud est la plus importante commune du Brabant wallon en termes de population, elle n’est en fait jamais parvenue à traduire ce leadership sur le plan culturel, commercial, politique, judiciaire ou sportif. Aucun secteur où elle n’émerge. Au contraire d’autres entités qui s’en sont emparées pour devenir – ou s’autoproclamer – tête de pont en la matière. Laissant Braine-l’Alleud à son étalement urbain. Et à tenter de renforcer ses équipements et ses services pour ne pas apparaitre comme une ville dortoir. Un paradoxe bien étonnant.

Heureusement pour elle, cette mutation a été plutôt réussie. La commune a été réorganisée par pôles (culturel, médical, sportif, historique, administratif, de loisirs, etc.) ces dernières années. La concrétisation d’un plan sur dix ans élaboré en 2010. Une transformation qui est même saluée par les détracteurs du bourgmestre Vincent Scourneau, qui a entamé en 2018 son troisième mandat. Tour d’horizon des grands changements. Et détails des prochains chantiers.

Appartement toute

La commune comptait 38 244 habitants en 2010. On en dénombre aujourd’hui 40 220. Une hausse de 5 % en dix ans. Alors que la hausse moyenne en Brabant wallon était de 7 % sur la même période. L’urbanisation galopante de ces quarante dernières années semble s’être quelque peu ralentie aujourd’hui. Il faut dire que les grands espaces se raréfient. L’idée étant aujourd’hui de davantage équilibrer la typologie du bâti et de moins faire la part belle aux maisons bel étage et aux villas. « La volonté a toujours été de calmer les ardeurs des promoteurs, lance Vincent Scourneau. Des projets comme ceux situés à Merbraine, à l’ancien lycée ou à l’Alliance datent des années 1990. Il faut donc être patient quand on souhaite développer un dossier chez nous. Tous les bras de fer que nous avons avec des promoteurs concernent une diminution de la densité. Le leitmotiv de base reste en tout cas le même : privilégier la qualité à la quantité. » D’où le recours depuis une décennie à une politique urbanistique n’autorisant que les appartements de plus de 120 m 2 . Un choix qui fait toujours grincer des dents. « Il s’agit surtout de diversifier l’offre d’appartements dans notre commune, précise Vincent Scourneau. Auparavant, les Brainois devaient aller à Waterloo ou à Nivelles pour trouver un appartement de qualité. Nous avons voulu résorber ce déficit. » La commune a toutefois lâché un peu de lest en la matière, puisque cette norme de 120 m 2 doit dorénavant s’inscrire dans une moyenne globale : un projet peut englober des appartements de 140 m 2 et d’autres de 80 m 2 . Comme le démontre le projet Bellecour (Unibra Real Estate et Belfius Immo), sur le site de l’ancien lycée (98 appartements). La livraison est prévue en 2023.

Tous les bras de fer que nous avons avec des promoteurs concernent une diminution de la densité. Le leitmotiv de base reste en tout cas le même : privilégier la qualité à la quantité.

Vincent Scourneau, bourgmestre de Braine-l’Alleud

Un centre-ville en désuétude

L’attractivité du centre-ville reste faible. Peu d’habitants, peu de commerces, peu d’animations. « Une quadrature du cercle qui est similaire à ce que l’on retrouve dans bon nombre de communes wallonnes, tempère Vincent Scourneau. Toutefois, si la situation ne s’est pas vraiment améliorée, elle n’a pas empiré. Nos investissements vont se poursuivre. » Une reconfiguration du centre-ville se dessine à nouveau. L’ancien hôtel de ville est devenu une maison des associations, histoire d’amener davantage de vie dans le centre via le passage de près de 5 000 bénévoles. La GrandPlace actuelle, qui est en fait un parking à ciel ouvert, sera remplacée par une version repensée de la place de la Cure, piétonne et aérée. Une nouvelle voirie sera créée de l’avenue SaintJacques à l’avenue Léon Jourez, de manière à créer un nouvel ilot dédié à la santé. Les abords de la gare doivent quant à eux toujours être redynamisés. La Ville cherche un promoteur immobilier pour valoriser ces espaces le long des voies. Sur le terrain vague situé au-delà du pont Courbe, une résidence pour seniors de standing est à l’étude. « Il faut avancer pas à pas pour redonner envie d’habiter dans le centre. »

Partir d’une friche pour donner un nouveau souffle au centre de Braine-l’Alleud est un projet ambitieux qui pourra, je l’espère, servir d’exemple pour d’autres communes du Brabant wallon. Osons aussi les gestes architecturaux !

Nathalie Smoes,fonctionnaire déléguée

Des projets multiples

C’est le groupe Kinepolis (Imagibraine) qui a ouvert la voie du site du Parc de l’Alliance, à la fin des années 1990. Un parc d’activité économique s’y est développé avant qu’un volet résidentiel ne soit en développement depuis 2013. AG Real Estate va y construire 800 appartements. La seconde phase sort de terre. Ce site, particulièrement bien situé, regorge encore de possibilités de développement. Ajoutons que les services administratifs de la Ville y sont désormais implantés.

Pour le reste, deux zonings supplémentaires sont également à l’étude sur le territoire brainois. Aucun des deux ne devrait voir le jour. « Je vais renoncer à celui souhaité par in BW (ndlr : 28 ha le long de la chaussée de Tubize) », précise Vincent Scourneau. Parmi les projets en cours, la construction d’une nouvelle piscine sur le site du Paradis se terminera en septembre, alors que la volonté de l’APIBW de construire du logement abordable sur le site de l’ancienne piscine Neptune a du plomb dans l’aile, vu les divergences de vues entre la commune et l’Agence de promotion immobilière.

Changement de braquet pour le vélo

Braine-l’Alleud compte 29 282 voitures pour plus de 40 000 habitants. Des chiffres démesurés. Ils s’expliqueraient par la présence de nombreuses sociétés, dont les voitures sont immatriculées à Braine-l’Alleud. Reste que la politique de mobilité a nettement évolué en dix ans. « Il n’y aura pas d’aménagements spécifiques pour les vélos ou pour la mobilité douce dans le centre, affirmait Vincent Scourneau en 2010 dans Espace-vie. Les Brainois ont une voiture et doivent l’utiliser. » Depuis, l’homme a radicalement changé son fusil d’épaule. Près de 50 km de pistes cyclables ont été créées. Toutes en site propre. « J’ai changé d’avis, je l’avoue, confesse Vincent Scourneau. L’avènement du vélo électrique a complètement modifié ma perception. Ce mode de déplacement est formidable. Il est donc important de rejoindre nos différents pôles sur des voies sécurisées. » Ajoutons qu’un partenariat a été signé avec une société privée pour mettre à disposition des voitures électriques à partager et que la SNCB a confirmé qu’une gare RER était prévue à Braine-Alliance en 2025. Ce sera la troisième de l’entité. « De quoi renforcer notre projet de ville multipôles. »

Le Parc de l'Alliance accueillera près de 800 logements dans la prochaine décennie.

Le Parc de l'Alliance accueillera près de 800 logements dans la prochaine décennie.

LE REGARD DE LA FONCTIONNAIRE DÉLÉGUÉE

Nathalie Smoes, fonctionnaire déléguée du Brabant wallon, et sa collaboratrice, Annick Vousure, attachée architecte

« Pour Braine-l’Alleud, je souhaite mettre en avant deux projets exemplaires tout en étant dans des registres très différents. L’un est un projet en centre urbain, d’initiative privée, que la commune a judicieusement choisi de soutenir. Il vient d’être autorisé. L’autre projet est d’initiative publique et a permis la création d’un espace de détente à côté du centre.

INITIATIVE PRIVÉE. Le projet d’Unibra Real Estate et Belfius Immo se développe sur le site de l’ancien Lycée royal repris comme « secteur à projets » au Schéma de Développement communal et situé en plein cœur de Braine-l'Alleud. Ce projet mixte, dédié aux services, à la distribution et au logement, sera un véritable moteur pour donner une plus grande attractivité au centre-ville, redessiner son image et insuffler une vision architecturale plus innovante. Il s’inscrit dans la trame urbanistique tout en innovant par sa forme et son expression. Encourager un projet de cette envergure, de cette qualité et ayant une allure très contemporaine est un signal fort pour le développement de Braine-l’Alleud. Partir d’une friche pour donner un nouveau souffle au centre de Braine-l’Alleud est un projet ambitieux qui pourra, je l’espère, servir d’exemple pour d’autres communes du Brabant wallon. Osons aussi les gestes architecturaux !

INITIATIVE PUBLIQUE. Si le projet précédent s’est développé sur un chancre urbain, c’est suite à des problèmes d’inondation que le site du Paradis a finalement pu aboutir alors que des intentions communales existaient déjà avant 2000. Ce vaste lieu de promenade et de détente autour de plans d’eau, situé à quelques centaines de mètres du centre de la commune, renforce l’attractivité de son espace urbanisé et permet une gestion qualitative du cadre de vie, ce qui rencontre au moins deux des objectifs du Schéma de développement du territoire (SDT). Il sera conforté dans son rôle de pôle de détente et de loisir par l’implanta tion de la piscine à proximité immédiate. Ce projet met en lumière l’importance de la présence d’espaces verts publics dans et à proximité des centres.

Dans les deux projets ci-dessus, les contraintes des terrains ont été les moteurs de leur développement. »

Le plateau de la gare, terre en friche.

Le plateau de la gare, terre en friche.

Pour aller plus loin

Relisez sur espacevie.be l'article de fond écrit sur Braine-l'Alleud en 2010, de manière à mieux percevoir l'évolution de la commune.

Interview : « S’inventer une nouvelle identité »

Enguerrand de Pierpont est notaire à Braine-l’Alleud.

Propos recueillis par X. A.

Comment s’est porté le marché immobilier à Braine-l’Alleud ces derniers mois ?

Il fonctionnait très bien avant de subir de plein fouet, comme partout, la crise du Covid-19. Il s’agit d’un marché relativement stable, sain et régulier.

Quelles sont les grandes tendances actuelles ?

Il y a de plus en plus de projets d’appartements neufs. Je crains d’ailleurs un certain embouteillage en la matière. La demande parviendra-t-elle à absorber cette offre ? C’est une grande interrogation. Car outre les trois grands projets (Alliance, Merbraine et ancien lycée), il y a de nombreuses petites promo tions qui proposent également des appartements. Même si, il faut le reconnaitre, tout se vend.

Cet afflux d’appartements neufs répond-il à un déficit en la matière ?

En effet. Il y avait un manque de produits de qualité. Notamment pour les seniors qui souhaitent délaisser leur maison bel étage.

Le schéma classique du Brabant wallon…

Oui, même si, à Braine-l’Alleud, cela concerne davantage les maisons bel étage que les villas. Ces dernières gardent une certaine attractivité. La gamme intermédiaire, entre 600 000 et 1 million d’euros, souffre davantage que les villas dont les prix sont inférieurs et supérieurs.

La norme des 120 m 2 pour un appartement engendre-t-elle l’arrivée d’une population nouvelle ?

Elle écarte en tout cas du marché les jeunes ménages. Pour acheter un appartement de 120 m 2 , il est nécessaire d’avoir deux très bons revenus. Cette norme a donc un effet pénalisant. Le produit phare pour les jeunes couples reste toutefois la maison bel étage, dont les prix varient de 250 000 à 350 000 euros.

Comment ramener des habitants dans le centre-ville ?

Le centre doit être revitalisé depuis des années. Les commerces souffrent. Il n’y a pas de recette miracle pour le redynamiser. Braine-l’Alleud pâtit de ce cliché d’être une cité-dortoir car elle est bien desservie au niveau ferroviaire ou via le ring. Elle doit s’inventer une nouvelle identité.

Les Papeteries de Genval, cinq après son inauguration.

Les Papeteries de Genval, cinq après son inauguration.