Cahier OST n°6

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N°6 novembre 2012

La santĂŠ des territoriaux au travail

Les cahiers de

Jardinier, un mĂŠtier en mutation Mieux vivre au travail, mieux vivre la ville.

En partenariat avec :

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L’auteur de cette étude et les personnes citées sont seuls responsables des opinions exprimées dans ce cahier. Ces opinions ne reflètent pas nécessairement les vues de la MNT, mais ont pour objet de nourrir un débat jugé nécessaire par l’Observatoire, illustré par l’atelier dont les travaux sont reproduits dans cet ouvrage.

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Jardinier, un métier en mutation Mieux vivre au travail, mieux vivre la ville.

Bernard, Serge,

jardinier

ier

sapeur-pomp

Michael,

Myriam, assistante

attaché territorial

Delphine,e bibliothécair

Étude réalisée par Jean Dumonteil Directeur d’Axe Image

Novembre 2012

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Sommaire

Avant-propos

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Introduction

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- Méthodologie de l’étude - Les jardiniers en chiffres et statut, une pluralité de métiers et d’organisation - Une forte culture professionnelle et des voies d’accès variées - Un métier en mutation : nouvelle approche de la nature en ville et politique de sécurité et de la santé au travail

1re partie : Les jardiniers face à une multiplicité de risques

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A. Des risques d’accident de service parfois spectaculaires 1. L’utilisation de matériels tranchants et coupants 2. Travailler sur la voie publique 3. Les accidents de la circulation et les risques routiers 4. La conduite d’engins de chantier et de nacelles 5. Travailler en hauteur

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B. Des risques à effets différés plus sournois 1. Le bruit 2. L’utilisation de matériels vibrants 3. Les risques chimiques 4. Les risques biologiques 5. Les allergies respiratoires 6. L’exposition aux intempéries et aux fortes variations de température

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C. Des risques plus généraux 1. Les TMS et les risques de posture 2. Les précarités sociales et psychologiques 3. De nouvelles organisations de travail qui déstabilisent

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D. Synthèse des causes de pathologies

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Sommaire (suite) 2e partie : L’émergence d’une nouvelle culture professionnelle

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A. Le tournant de la prévention et de la sécurité au travail 1. Le DU (Document unique) 2. Les EPI et des outils mieux adaptés 3. Des partenaires acteurs de la sécurité

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B. De nouvelles missions sur la nature en ville 1. L’influence de la gestion différenciée et écologique des espaces verts 2. Un métier choisi et aimé qui s’est renouvelé 3. Des rapports différents avec les habitants

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3e partie : Les pratiques territoriales et la parole de professionnels

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- Faire face au vieillissement des agents et aux problèmes de reclassement - Un service « vitrine de la ville » qui doit être public par excellence - Conserver une expertise publique malgré l’externalisation - Au sein d’un office public de l’habitat : un bureau d’études espaces verts - Ville de Paris : une solide culture de la prévention et des documents très pédagogiques - Gilles Clément : le jardinier devient un enseignant - Colette Clamens, directrice du CDG 31 : un nouveau référentiel métier intégrant les problématiques de santé

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4e partie : Pistes d’actions et recommandations - Approfondir la culture de la sécurité et de la prévention - Diminuer la pénibilité de certaines tâches - Agir dans la gestion des ressources humaines

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Synthèse de l’étude

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5e partie : Atelier de l’Observatoire Social Territorial

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A. Participants à l’atelier du 16 octobre 2012 B. Débats

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Annexe 1 : Bibliographie et documentation

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Annexe 2 : Conseil scientifique de l’Observatoire Social Territorial

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Annexe 3 : Conseil d’orientation de l’Observatoire Social Territorial

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Avant-propos Des risques pour la santé à la mutation de l’identité professionnelle des jardiniers territoriaux

A

partir de l’étude des demandes d’indemnisation des adhérents de la MNT pour plus de 3 mois d’arrêt de travail sur une année glissante, le service médical de la MNT a remarqué une forte sinistralité parmi les jardiniers territoriaux. S’emparant de ce constat, l’Observatoire Social Territorial créé par la mutuelle a voulu connaître et faire connaître les différents risques pour la santé de ces agents, comme il l’a fait à propos des auxiliaires de puériculture. Cette nouvelle monographie dresse un panorama complet des facteurs pouvant influencer la santé des agents des espaces verts. Certains risques sont connus, comme la pénibilité physique, mais d’autres risques présumés restent encore insuffisamment quantifiés, comme le lien entre cancers et toxicité des produits longtemps massivement utilisés. Appréhender ce métier par le prisme de la santé permet de mieux l’identifier. Cette étude nous amène à découvrir qui sont les jardiniers, leur identité professionnelle, leur positionnement. Les postes aux espaces verts font parfois office de voie de reclassement pour des agents en difficultés, physiques, mentales ou sociales, ainsi tenus à l’écart par exemple dans les serres, donc censés être protégés. Or, ce métier comporte ses propres exigences : connaissances des procédures de protection, manipulation de produits et outils dangereux. Mais le plus souvent, ce métier est exercé par vocation ; et au-delà de la simple exécution, il nécessite de s’adapter au changement radical des modes de gestion des espaces verts. Ainsi, l’écologie influence les choix environnementaux, provoquant une véritable mutation des missions de ces professionnels et de leurs conditions de travail. Ils sont passés d’une tâche d’embellissement du cadre de vie marquée par une forte culture horticole, à une fonction plus stratégique sur la nature en ville plus respectueuse de la biodiversité. Cette évolution a une conséquence sanitaire directe et bénéfique pour les agents avec la limitation drastique de l’utilisation des produits phytosanitaires, facteurs de risques chimiques très lourds. Si la culture de la prévention et de la sécurité se diffuse de façon croissante dans l’ensemble des services espaces verts, l’enjeu porte désormais sur l’adaptation à une nouvelle philosophie d’action, souvent contradictoire avec les précédentes pratiques.

Jean-René MOREAU Président de l’Observatoire Social Territorial Directeur général des Services, Ouest Provence Directeur du Master 2 Administration Publique-Gestion des Collectivités Locales à l’UPEC

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Introduction Méthodologie de l’étude Avec cette étude consacrée aux agents d’exécution des services espaces verts, centrée sur les jardiniers, agents des communes et intercommunalités, l’Observatoire Social Territorial de la MNT poursuit sa série de monographies sur la santé des agents territoriaux au travail. Une première étude publiée en 2011 avait été consacrée aux risques sanitaires des métiers de la petite enfance, aux auxiliaires de puériculture, un groupe sous tension, un univers professionnel territorial essentiellement féminin dans un environnement clos. La présente étude sur les jardiniers nous invite à la rencontre d’une autre famille de métiers territoriaux, issue de la filière technique, agents de production et agents d’entretien des espaces verts, à forte proportion masculine, évoluant essentiellement en extérieur. Le choix de ces thèmes d’étude sur la santé des agents territoriaux au travail ne doit rien au hasard. Les dossiers traités par le service médical de la MNT ont révélé une surreprésentation du risque dans certaines communautés professionnelles des bénéficiaires. La MNT protège plus d’1,1 million de personnes et accompagne 16 000 collectivités, pour la couverture des risques en santé prévoyance, c’est-àdire en cas d’arrêt de travail prolongé. Dans le cadre de cette activité, le service médical de la MNT dirigé par le Docteur Gilles Errieau, composé de quatre médecins conseils praticiens en cabinet et en milieu hospitalier, est conduit à observer les pathologies dont souffrent les agents pris en charge par la mutuelle pour les risques longs. Les dossiers concernant les jardiniers indiquent une surreprésentation de cette profession parmi les adhérents au régime de prévoyance de la MNT, qui comptent plus de 90 jours d’arrêts de travail sur les douze derniers mois, même de façon discontinue, et qui perçoivent ainsi des indemnités de la MNT pour compenser leur passage à demi-traitement. À partir du constat du service médical de la MNT, l’Observatoire Social Territorial a mené un travail d’enquête avec le Cabinet Axe Image, fondé sur des entretiens qualitatifs semi-directifs réalisés sur un échantillon de collectivités territoriales représentatif de la diversité territoriale : taille de communes, zones géographiques, type de collectivité ou EPCI, niveau d’implication dans la gestion des espaces verts, projet de management et de gestion des ressources humaines. Cet échantillon de collectivités et établissements publics a permis de rendre compte de la diversité territoriale et de dégager des tendances. À l’intérieur des collectivités et établissements sélectionnés, 54 entretiens ont été regroupés par métiers et niveaux : métiers d’exécution des espaces verts (agents d’entretien ou de production en serre), environnement professionnel (agents polyvalents de petites communes ou spécialisés dans de grandes collectivités), responsables de proximité (agents de maîtrise, chefs d’équipe), cadres intermédiaires ou chefs de service, directeurs d’espaces verts, de services techniques, directeurs généraux adjoints de collectivités, élus locaux (maires adjoints, vice-présidents ou conseillers délégués), services ressources humaines et professionnels de la prévention et de la santé.

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Taille de la commune ou autre collectivité

Moins de 2 500 hab.

2 500 à 6 000 hab.

6 000 à 40 000 hab.

40 000 à 90 000 hab.

Plus de 90 000 hab.

agents techniques

1

3

6

5

6

2

5

4

5

techniciens

1

1

Directeur adjoint espaces verts

1

2 2

agents de maîtrise

Directeur espaces verts

1

1

1

Responsable prévention sécurité

1

1

1

Maire-adjoint

1

OPH

CDG

1

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Médecin du travail Directeur centre de gestion

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OPH : office public de l’habitat ; CDG : centre de gestion

Ce travail d’enquête de terrain a été complété par des entretiens avec des personnes ressources (formateurs, experts, responsables associatifs, professionnels de santé publique…) qui avaient une expérience et un savoir-faire à communiquer dans le cadre de cette étude. L’Association Française des Directeurs de Jardins et Espaces Verts Publics qui s’appelle désormais « Hortis » s’est tout particulièrement mobilisée aux côtés de la MNT dans le cadre de cette étude en facilitant la conduite d’entretiens dans les services espaces verts. Les auteurs de l’étude tiennent à remercier le président et les administrateurs de cette association pour leur soutien actif dans la réussite de cette enquête. Une cinquantaine de personnes a été interrogée dans ce cadre. Les témoignages des professionnels qui ont accepté de répondre à notre enquête sont pour la plupart anonymes, afin de préserver la liberté de paroles des agents territoriaux, hors de toute contingence hiérarchique, administrative ou politique. Que tous ceux et toutes celles qui ont participé à ces entretiens trouvent ici l’expression de notre gratitude pour la confiance qu’ils nous ont manifestée. L’objet de l’étude est de faire un diagnostic de la réalité professionnelle territoriale des agents d’exécution des espaces verts et de dégager des axes de progrès en matière de santé et de bien-être au travail. Nous souhaitons donc que cette étude serve l’intérêt général et fasse progresser les pratiques professionnelles pour le bénéfice de l’ensemble des agents territoriaux et de leur santé.

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Les jardiniers en chiffres et statut, une pluralité de métiers et d’organisation Dans cette étude, nous n’abordons pas l’ensemble des métiers d’exécution des espaces verts territoriaux. Ainsi, les élagueurs constituent une communauté professionnelle particulière à l’intérieur des services espaces verts. Ils mériteraient une étude spéciale, compte tenu des particularités de leur activité et des risques qui y sont liés. Comme l’indique le responsable prévention d’une grande collectivité, « les élagueurs sont le corps d’élite de la Direction avec le niveau de risques le plus important et des professionnels assez chevronnés ». Et d’ajouter pour nuancer son propos dans sa collectivité : « Présentant toutefois des aspects ambivalents, ils sont très conscients de l’importance de la sécurité et de la prévention et en même temps, ils sont arc-boutés sur des pratiques historiques et résistants aux innovations réglementaires. » Nous avons centré notre étude sur les jardiniers, agents des communes et des établissements publics de coopération intercommunale qui constituent l’essentiel des effectifs. D’autres types de collectivités ou établissements publics peuvent employer des jardiniers : des conseils généraux quand une politique volontariste du paysage a été décidée par l’exécutif départemental pour la gestion d’aires jouxtant la voirie départementale ou quand le département gère directement des parcs et jardins liés au patrimoine départemental ; ou enfin des établissements publics qui se sont dotés de services dédiés aux espaces verts. Pour montrer cette diversité territoriale, nous avons consacré un éclairage particulier, dans la troisième partie de cette étude, à l’action du service espaces verts d’un office départemental de l’habitat en Île-de-France, témoignage de l’évolution des pratiques et de l’importance de réintroduire la nature dans l’espace urbain, qui est une préoccupation centrale des responsables territoriaux. Le Répertoire des métiers du CNFPT classe les différents métiers de jardiniers dans la famille « Espaces verts et paysage ». On y trouve les responsables de production végétale qui organisent, contrôlent et assurent la production végétale en fonction des besoins de la collectivité (catégories B et C de la filière technique, cadre d’emplois : techniciens territoriaux, agents de maîtrise territoriaux). Ce sont les managers de proximité des serres et pépinières municipales. On les appelle aussi chefs de cultures, responsables de centre de production horticole, responsables de pépinière, responsables de collection florale. Avec eux sont recensés les agents de production végétale (catégorie C de la filière technique, cadre d’emplois : adjoints techniques territoriaux). Ils produisent et élèvent les végétaux nécessaires au fleurissement et à l’aménagement des espaces verts de la collectivité. On les appelle aussi serristes, floriculteurs, agents pépiniéristes. Parmi ces agents, on trouve aussi les décorateurs fleuristes qui conçoivent, réalisent et entretiennent les compositions végétales d’intérieur pour les bâtiments de la collectivité et l’activité événementielle, fêtes et cérémonies… (catégorie C de la filière technique, cadre d’emplois : adjoints techniques territoriaux).

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La part la plus importante des agents revient à la catégorie intitulée dans le Répertoire des métiers du CNFPT « jardiniers des espaces horticoles et naturels ». Ils effectuent l’entretien des espaces verts et naturels dans le respect de la qualité écologique et paysagère du site (catégorie C de la filière technique, cadre d’emplois : adjoints techniques territoriaux). Selon les collectivités et leurs situations d’activité, on les appelle aussi ouvriers espaces verts, ouvriers de maintenance espaces verts, jardiniers, forestiers, agent d’entretien de l’espace rural, agents d’entretien des espaces naturels, agents agricoles. La version 2013 du répertoire des métiers devrait présenter le métier de jardinier avec plusieurs spécialités selon les typologies d’espaces de nature qu’il entretient : jardinier horticole, agent gestionnaire des espaces naturels, ouvrier agricole, agent serriste. Citons enfin les chargés de travaux espaces verts (agents de maîtrise territoriaux et techniciens des catégories B et C de la filière technique) qui contrôlent et guident de façon constante la réalisation de travaux neufs ou de rénovation des espaces verts, et vérifient leur bonne exécution. On les appelle aussi surveillants de travaux neufs espaces verts, conducteurs de travaux espaces verts, responsable de travaux espaces verts.

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Les jardiniers des espaces horticoles et naturels

(Extrait de la fiche métier à fort renouvellement d’effectifs – CNFPT) Domaine : interventions techniques Le jardinier des espaces horticoles et naturels effectue l’entretien des espaces verts et naturels dans le respect de la qualité écologique et paysagère du site. Ce sont des ouvriers de maintenance des espaces verts, des jardiniers, des forestiers, des agents d’entretien de l’espace rural ou des agents agricoles. I. Les caractéristiques Au 1er janvier 2007*, les jardiniers des espaces horticoles et naturels représentent environ 48 000 agents, soit 3 % de l’ensemble des agents territoriaux. À peine 3 % des effectifs sont des femmes. Les jardiniers des espaces horticoles et naturels sont exclusivement des agents de catégorie C, en grande majorité des adjoints techniques territoriaux. 6 % ont un cadre d’emplois d’agent de maîtrise. Ce métier est occupé principalement par des agents titulaires, à près de 80 %. L’âge moyen pour cette profession est de 42 ans, proche de la moyenne d’âge de l’ensemble des agents de la Fonction Publique Territoriale (43 ans). La part des plus de 55 ans qui exerce ce métier est inférieure (13 %) à une moyenne nationale de 16 %. Les jardiniers des espaces horticoles et naturels sont le plus fréquemment employés par les communes de plus de 10 000 habitants (43 %) et les communes de moins de 10 000 habitants (42 %). II. Les évolutions L’environnement professionnel - Les facteurs d’évolution de l’environnement professionnel portent principalement sur l’émergence d’une intervention des intercommunalités dans le domaine des espaces verts qui entraîne une nouvelle répartition des missions. Les communes se concentrent sur la gestion des espaces verts, alors que le niveau intercommunal se positionne plus sur de la planification et de la conception et de la gestion des espaces naturels périurbains. L’exercice de cette compétence est limité début 2007, dans la mesure où seulement 5 % des effectifs de jardiniers des espaces horticoles et naturels sont employés par des établissements publics de coopération intercommunale. - Une décentralisation et une territorialisation des équipes d’espaces verts : les équipes de jardiniers sont intégrées à des pôles techniques de proximité, conduisant à une plus grande polyvalence des agents d’intervention.

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Les principaux facteurs d’évolution Alors que les collectivités ont pratiqué jusqu’aux années 1990 une gestion horticole intensive, le développement durable est désormais un axe fort des politiques locales pour les services espaces verts. Le Grenelle de l’environnement (2008) et les démarches engagées par les collectivités ont des conséquences importantes sur l’évolution des pratiques avec l’introduction de nouvelles techniques d’entretien plus écologiques, telles que la gestion différenciée des espaces verts, le développement de techniques économes en eau (limitation de l’arrosage, des produits phytosanitaires, recyclage de déchets), le renforcement de la biodiversité écologique. Les collectivités tendent à développer des approches favorisant la concertation publique et sont attentives à l’évolution des attentes de la population, croissantes sur la propreté, la sécurité et la création de nouveaux paysages. Les activités et compétences professionnelles Les activités du jardinier des espaces horticoles et naturels sont fortement centrées sur l’entretien général en fonction des spécificités biologiques et paysagères du site, la préservation de la qualité des sites et la prévention des risques, l’entretien des équipements, le suivi des travaux sur le site, la participation à l’accueil du public. La tendance est à une professionnalisation renforcée de ce métier, la priorité étant mise sur les aspects de prévention des risques professionnels et de sécurité au travail, de relation avec les usagers et avec les autres acteurs de l’espace public. III. Les perspectives Soutenu par une prise en compte croissante des problématiques de développement durable, le métier de jardinier des espaces naturels et horticoles se développe fortement dans les collectivités et ses effectifs connaissent une constante progression. Environ 1 150 recrutements étaient envisagés en 2009 sur la famille professionnelle espaces verts. Le métier de jardinier des espaces naturels et horticoles est particulièrement concerné, dans la mesure où la majorité des recrutements (96 %) porte sur des agents de catégorie C. Cette profession est accessible avec un CAP/BEP agricole en horticulture, travaux paysagers, entre autres, ou avec une expérience professionnelle dans le domaine. Des évolutions de carrière sont possibles, soit vers un poste d’encadrant intermédiaire, soit en se spécialisant sur des métiers d’élagueur ou d’agent de production végétale. Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, les agents applicateurs de produits phytosanitaires devront avoir l’obligation de détenir du « certiphyto » à partir de 2014 (formation qualifiante).

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Par ailleurs, différents axes liés aux choix opérés par les collectivités ont déterminé l’évolution de ce métier : - le développement d’une gestion territorialisée conduit à une réorganisation des services et à une nouvelle répartition des compétences techniques qui requiert plus d’autonomie, de réactivité et de polyvalence pour les agents ; - l’arbitrage entre des services espaces verts intégrant les missions d’aménagement en amont ou le positionnement des aspects de conception hors services espaces verts impacte l’exigence de professionnalisation des collectivités vis-àvis de ces agents. Si, pour l’instant, les collectivités semblent privilégier un mode de gestion en régie, l’externalisation de plus en plus fréquente des travaux de maintenance et d’entretien pose la question de leur évolution à terme. * Les chiffres nationaux ont été complétés par des recensements régionaux faits par le CNFPT ces dernières années. Les données chiffrées de cette fiche métier gardent toute leur pertinence, tout au plus faut-il compter avec un vieillissement de la population au travail, ce qui n’est pas sans incidence sur les problèmes de santé et d’usure professionnelle.

Une forte culture professionnelle et des voies d’accès variées Les espaces verts, au sein de la filière technique de la Fonction Publique Territoriale qui compte le plus d’effectifs, arrivent en troisième position en termes d’effectifs après les services bâtiments et voirie sur l’ensemble des métiers techniques. Un directeur de service espaces verts souligne toutefois la différence avec les autres services techniques territoriaux : « On a la chance d’avoir un métier qui est facilement valorisant pour les équipes, ce n’est pas comme d’autres métiers techniques territoriaux qui sont souvent ingrats, comme la propreté. Quand on fait du fleurissement, on a tout de suite la reconnaissance de la population. » Au sein de la collectivité et des services techniques, les services espaces verts ont une culture forte et différenciante, comme en témoigne le responsable prévention d’une grande collectivité : « Avant d’être responsable des risques aux espaces verts, j’étais à la Direction de la propreté et de l’eau (DPE) où j’exerçais les mêmes fonctions. Je ne pensais pas que dans une même collectivité, il pouvait y avoir de telles différences culturelles. La DPE a une organisation de type militaire avec une information descendante et des agents qui finissent par exécuter ce qu’on leur demande. Autant le métier d’éboueur peut parfois être dévalorisé, ici on a avec les jardiniers un métier noble mais qui présente une organisation très peu monolithique, et la façon de recevoir la prévention est très différente selon les agents d’encadrement. » « Des cadres aux jardiniers, au sein des services espaces verts, les gens sont passionnés », résume Gaëlle Aggéri, responsable du pôle de compétences paysages-espaces verts du CNFPT basé à l’INSET de Montpellier. Elle constate que « les jeunes sont aujourd’hui recrutés avec des formations pointues alors qu’auparavant, les agents arrivaient aux espaces verts par défaut ». Aujourd’hui, on ne vient pas aux espaces verts par hasard :

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« Cette orientation relève généralement d’un vrai choix, elle est l’expression d’une passion », souligne la responsable de service d’une petite ville dont la propre carrière s’est toujours déroulée dans ce champ de compétences. Autrefois, beaucoup d’agents intégraient les services espaces verts alors qu’ils travaillaient déjà dans la collectivité. Le directeur des espaces verts d’une grande ville du Centre-Ouest témoigne : « Pendant très longtemps, on a embauché des gens qui n’avaient pas de formation initiale de jardinier, on mettait au vert des agents qui avaient des problèmes sur leur poste. C’était même parfois vicieux, en cas de manque de personnel, on nous fournissait des remplaçants, peintres ou tôliers, on les avait pendant trois à six mois et on les a gardés. On a ainsi une cohorte de gens qui ne sont pas des jardiniers, on a récupéré des agents par hasard et ça nous arrangeait bien, la plupart apprenaient le métier et s’adaptaient. Nous héritions aussi régulièrement de gens qui étaient peu compétents et qui avaient du mal à effectuer leur carrière car ils étaient peu intéressés. Depuis la nouvelle mandature, la DRH a changé la donne. Autrefois, il y avait les agents d’entretien, les agents techniques qualifiés 1 et 2, avec peu ou pas de diplômes de niveau 5, cela cloisonnait beaucoup. Aujourd’hui, on ne recrute que des agents qui ont un diplôme et une formation initiale en espaces verts. C’est dommage socialement parce qu’il y a des gens qui ne seront pas recrutés alors qu’ils seraient bien adaptés, et puis on aura à terme du personnel qui coûtera plus cher. Mais finalement, je me dis qu’il vaut mieux avoir du personnel compétent capable de comprendre les enjeux et les problèmes de sécurité. » Dans une ville du Nord, une directrice adjointe reconnaît que les autres services municipaux continuent à solliciter le service espaces verts pour des reclassements : « On nous demande “Vous n’auriez pas une place aux serres ?” parce qu’on s’imagine que les serres ne demandent pas un travail physique, que ce sont les petites fleurs. Certes, c’est un travail différent mais il sollicite notamment le dos. » Désormais, la règle dans les recrutements, c’est une formation initiale professionnelle sanctionnée par un diplôme, même si dans le cadre de sa vocation sociale, cette collectivité continue à recruter des agents qui ont fait leurs preuves dans le cadre de contrats aidés. Même s’ils sont devenus jardiniers par hasard, peu d’agents des espaces verts voudraient changer de métier. Ils ont conscience de participer à une mission importante dans la vie de leurs concitoyens. Le travail est souvent jugé gratifiant et les jardiniers interrogés dans le cadre de cette enquête témoignent tous qu’ils jouissent d’une certaine capacité d’initiative et d’organisation qui fait défaut dans d’autres métiers territoriaux. L’inclination pour la nature associée au goût du travail au grand air ainsi que le plaisir d’une mission visible et appréciable par tous y sont certainement pour beaucoup. Mais la variété des tâches (désherbage, débroussaillage, taille des haies, tonte, arrosage, culture d’espèces florales, plantation, élagage pour ceux disposant du certificat de spécialisation…) fait aussi l’attachement au métier, surtout quand l’organisation du travail repose sur la polyvalence : « Je fais ce que j’aime, à l’extérieur d’un bureau et au sein d’une équipe soudée. Après tant d’années ma motivation reste intacte et je ne changerais pour rien au monde mon râteau d’épaule ! » résume un jardinier.

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Le périmètre d’intervention des agents des services espaces verts peut varier. Production et fleurissement des espaces publics, entretien des abords de la voirie, gestion de parcs et jardins, voire de forêts communales ou d’aires de jeu, les situations sont diverses. Souvent les cimetières sont rattachés aux services espaces verts et parfois l’entretien des équipements sportifs, surtout pour les surfaces engazonnées. Dans certaines grandes villes, des zoos et des jardins botaniques peuvent aussi être rattachés aux espaces verts.

Un métier en mutation : nouvelle approche de la nature en ville et politique de sécurité et de la santé au travail Depuis quelques décennies, le métier de jardinier connaît une mutation importante. D’abord, la culture du fleurissement et de l’embellissement des espaces publics a beaucoup progressé en France. Le concours national des villes et villages fleuris avait contribué dans un premier temps à renforcer l’action des jardiniers même dans de petites communes. En 50 ans, le label Villes et Villages Fleuris est devenu porteur d’un véritable phénomène de société, tant auprès des élus qu’auprès du grand public. Année après année, ce phénomène s’est amplifié et ce sont aujourd’hui 12 000 villes et villages, près d’un tiers du total des communes, qui présentent leur réalisation aux jurys des Villes et Villages Fleuris qui viennent apprécier et évaluer le travail des communes. Ensuite est venu le temps de la gestion écologique ou différenciée1, la reconnaissance et la reconquête de la nature en ville. Aujourd’hui, de plus en plus de services espaces verts sont en pointe dans les agendas 21 de leurs collectivités2, les agents participent à l’inventaire de la biodiversité, mettent en œuvre des pratiques innovantes avec les habitants, et cette évolution est loin d’être achevée. Plus encore que celles des domaines d’intervention (gestion notamment plus environnementale qu’horticole des espaces), ce sont les évolutions techniques, réglementaires et sociétales qui semblent impacter le plus lourdement le quotidien professionnel. Ainsi, il faut régulièrement s’acclimater à de nouveaux usages, parfois au prix de nouvelles compétences pour répondre aux problématiques modernes : protection de l’environnement, adaptation des traitements et produits aux besoins liés à l’usage comme la gestion différenciée et l’utilisation d’espèces à faible consommation hydrique… Ces adaptations nécessitent des formations régulières (entretien du matériel, élagage, sécurité, danger du gaz et de l’électricité…), pas toujours faciles à suivre car géographiquement éloignées et à l’intérêt variablement perçu par les agents concernés. Ces nouvelles pratiques peuvent également avoir de lourdes conséquences sur les tâches professionnelles, comme l’interdiction progressive des produits phytosanitaires3. 1 2 3

lire la 2e partie de l’étude, paragraphe B, de nouvelles missions sur la nature en ville document fixant les objectifs dans tous les versants de la politique de développement durable lire encadré dans la partie risques chimiques

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Les avancées de la sécurité au travail sont largement saluées, même si elles déstabilisent certains agents. Élaboration d’outils de prévention et de procédures, documents uniques de prévention des risques, intervention de professionnels de la sécurité et d’assistants de prévention (ex-ACMO). Cette nouvelle conscience partagée crée même parfois quelques angoisses « quand on repense à ce qu’on a pu faire ou inhaler hier et ailleurs, par exemple lorsqu’on travaillait en serre, dans des atmosphères confinées, sans tenue adaptée, ni gant, ni masque », comme le confiait un jardinier en fin de carrière. Notons enfin que cette évolution se produit dans un contexte de vieillissement des agents, et de plus en plus de non remplacement des agents. « En vingt ans, le métier a beaucoup changé et ce n’est plus du tout le même travail », reconnaît un jardinier qui précise qu’il ne voudrait « pour rien au monde changer de métier ».

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1re partie : Les jardiniers face à une multiplicité de risques A. Des risques d’accident de service parfois spectaculaires 1. L’utilisation de matériels tranchants et coupants « Quoi qu’on fasse dans notre métier, on commence par couper quelque chose, l’herbe, des arbustes, des branches. Il y a des risques partout, même dans les serres », explique le directeur des espaces verts d’une grande ville. L’utilisation de matériels dangereux (tronçonneuses, rotofils, broyeurs de branches…) constitue le cœur du métier. Un agent de maîtrise reconnaît que « le risque machine va de la petite coupure jusqu’à la mort, coupure des doigts, broyage. Quand un collègue a été victime d’un accident, on fait attention, mais ça ne dure qu’un temps. Il faut surtout travailler en amont avec les équipements de protection individuelle. » Formation des agents, protection avec les équipements de protection individuelle (EPI) tels que gants de sécurité et pantalons anti-coupures, renforcement des normes de sécurité des machines : la gestion de ces risques spectaculaires progresse régulièrement, car les accidents de service frappent les esprits et sont bien identifiés. Pour diminuer ce type de risques, les agents mettent en jeu leur savoirfaire et jouent la carte du professionnalisme dans la gestion des espaces verts au quotidien.

2. Travailler sur la voie publique Les agents rencontrent aussi des risques liés aux chantiers sur le domaine public : l’organisation et les problèmes liés à la circulation sur les chantiers. L’organisation de chantier mobile est souvent facteur de stress pour les agents. Olivier, agent de maîtrise, responsable d’une équipe qui intervient dans le centre-ville de sa collectivité estime qu’« il faut toujours rester vigilant, être conscient que même si on est absorbé par son travail, nous sommes dans un contexte environnant qu’il faut prendre en compte. » Un agent de maîtrise d’une ville du Nord estime ne pas être à l’abri d’un accident : « On a fait une formation à la sécurité routière, même si comme je l’ai dit au formateur, il y a des trucs impossibles à faire. Sur une avenue où il n’y a pas de trottoirs, on a une bande gazon et on débroussaille. On devrait avoir un camion devant et un derrière, mais ce n’est pas possible. Mettre des cônes et des panneaux, c’est pas mieux parce qu’on avance en permanence, alors on se contente de mettre le feu de détresse sur le véhicule et de porter nos gilets. » Dans la même collectivité, une responsable du service reconnaît : « On a essayé de former les agents, ils ont tous joué le jeu parce qu’on a des secteurs où il y a une forte circulation avec des automobilistes qui roulent vite ; mais pour les chantiers qui avancent sur des voies importantes de circulation, la formation dispensée par des intervenants extérieurs

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n’était pas du tout adaptée à notre métier et à nos contraintes. Je ne peux pas dire que cela n’a servi à rien, mais il faudrait des formations mieux adaptées. » Outre des formations internes mieux adaptées, certaines collectivités mettent en place des guides de procédures3. De plus en plus de collectivités se posent la question de la localisation de sites de fleurissement, massifs et parterres, « car certains sites n’ont pas de nécessité esthétique et engendrent des conditions d’interventions pour les équipes qui ne sont pas facilement maîtrisables », explique un technicien. « Il faut essayer de trouver les bonnes solutions pour les sites qui sont trop dangereux à fleurir. » La gestion des risques pour les interventions sur la voirie doit s’anticiper le plus possible, dès la conception, comme témoigne le directeur des espaces verts d’une communauté d’agglomération : « Nous avons eu un important travail de prévention, notamment dans le cadre de l’aménagement qui est une des premières compétences de l’agglo. Ce qui se conçoit bien, s’entretient bien. Il faut qu’on puisse travailler le plus en amont possible. Ainsi sur l’aménagement d’un boulevard, le concepteur qui était un paysagiste a été soumis aux questions des équipes de gestion. Il a présenté son projet dans les régies pour qu’elles puissent critiquer de façon très concrète et pratique. Cela a permis de mettre en place des passe-pieds, de manière à ce que les agents aient un espace de sécurité lorsqu’ils interviennent sur le terre-plein central pour planter des massifs. Il a fallu convaincre le concepteur. »

3. Les accidents de la circulation et les risques routiers Les agents se déplacent avec leur matériel sur le territoire de la collectivité : conduite de véhicule léger pour lequel il faut être en possession des permis adéquats (véhicule avec remorque), conduite de poids-lourds (avec remorque), de tracteurs avec remorque type poids-lourds. Parfois, quand ils se rendent sur un chantier, les agents circulent avec leurs matériels en mini-convois et cela augmente le risque routier qui est toujours accidentogène. Il faut s’assurer que les agents possèdent bien les permis de conduire exigés, qu’ils n’ont pas fait l’objet de retrait provisoire ou définitif. Les pratiques diffèrent selon les collectivités pour s’en assurer : « Dans notre service, les agents de maîtrise doivent demander la présentation des permis de conduire tous les lundis, explique un technicien, mais le font-ils systématiquement ? Il y a une relation de confiance entre collègues. » Dans une autre ville, on insiste sur ce point au moment du recrutement et les agents s’engagent en signant la promesse de signaler toute modification concernant leur permis. Entre impératif de sécurité et contrôles qui pourraient paraître trop intrusifs, les responsables sont souvent gênés. Beaucoup de collectivités ont fait de la sécurité routière une priorité pour l’ensemble des services, comme en témoigne un responsable : « Chez nous, la sécurité routière a été très tôt un axe de travail avec une personne dédiée à la sécurité routière et le lancement d’un challenge de la sécurité routière avec les étudiants. 3

lire en 3e partie de l’étude, l’expérience de la Ville de Paris

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Dans les équipes techniques, cette notion a été assez rapidement prise en compte. On a eu la chance d’avoir un jeune ingénieur mobilisé sur le sujet. Le fait qu’il soit jeune et qu’il appartienne aux services techniques a permis de faire passer plus facilement les messages que s’il avait été en position hiérarchique dans un rôle de censeur. » Les agents des services espaces verts doivent faire face à des particularités qu’ignorent leurs collègues d’autres services municipaux. Ils transportent avec leurs véhicules des matières diverses qui peuvent avoir des densités très différentes pour un même volume, déchets verts ou tonne d’eau pour l’arrosage. Parfois, le poids de charge utile autorisé pour le véhicule est dépassé et la sécurité n’est plus assurée4. Il faut aussi penser à bien arrimer les charges à l’arrière des véhicules, certains véhicules n’ont pas de grille de sécurité entre la cabine où sont les agents et le plateau où sont les charges qui peuvent être projetées en cas de freinage brutal. Les risques sont importants pour les agents, « d’autant que les agents n’en sont pas toujours conscients, ayant l’impression de se contenter de petits trajets urbains », ajoute un préventeur.

4. La conduite d’engins de chantier et de nacelles Pendant très longtemps, la conduite d’engins spéciaux tels que tondeuses autoportées, tracteurs, minipelles, motobasculeurs, tombereaux à moteur, s’est faite de façon anarchique. « Dans notre ville, on s’est longtemps débrouillé, on conduisait les tracteurs sans permis spécial parce qu’on avait soi-disant un agrément forestier. Il a fallu remettre cela à plat et changer les habitudes », rapporte un préventeur. Aujourd’hui, des certificats d’aptitude à la conduite en sécurité (CACES) sont exigés pour la conduite des engins de chantier de type tracteur, chariot élévateur et nacelle élévatrice de personnel. Le CACES participe au renforcement de la sécurité. Il prouve la maîtrise par son possesseur des questions de sécurité, tant théoriques que pratiques. Le CACES est délivré par un organisme qualifié « organisme testeur ». Ces certificats ne sont pas délivrés par le CNFPT sauf partenariat local. Généralement, cela se passe dans les lycées agricoles ou dans les Centres de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole (CFPPA). Le CACES est délivré après un contrôle des connaissances pratiques et théoriques. Il est valable cinq ans, sauf pour les engins de chantier où la durée est de dix ans.

5. Travailler en hauteur Sans être élagueur, beaucoup de jardiniers sont conduits au quotidien à travailler en hauteur. Ils sont donc soumis au risque de chute. Comme l’indique un responsable de sécurité, « vous êtes à l’aplomb d’un vide si vous intervenez par exemple sur une jardinière à 4 ou 5 m de haut, pour planter, arracher ou entretenir. 4

lire le projet de la Ville de Paris en 3e partie

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Le plus souvent, cela se passe sur des installations anciennes qui n’ont pas été conçues avec des critères de sécurité. » Les collectivités font d’importants efforts pour limiter ces risques : équipements de protection collective comme les nacelles, les plateformes individuelles roulantes (PIR), les échelles avec plateforme. Dans les travaux en hauteur, il faut aussi signaler le risque électrique, notamment quand on taille à proximité de lignes électriques. Les travaux sur talus présentent des risques proches des travaux en hauteur. Dans les pentes raides, les agents seront parfois conduits à travailler encordés.

B. Des risques à effets différés plus sournois Si les agents sont bien conscients des risques d’accidents de service spectaculaires, tels que ceux liés à l’utilisation de matériels coupants, la prise de conscience est moins forte pour les risques à effets différés.

1. Le bruit Les agents utilisent des engins bruyants tels que les matériels à moteur thermique ou travaillent sur la voie publique où le bruit de la circulation est très élevé. Un adjoint technique de 56 ans témoigne : « Autrefois, plus la tondeuse faisait du bruit, plus on avait l’impression d’être efficace. » Un préventeur constate que « les agents n’ont pas conscience de la destruction violente de leur capacité auditive. Ils en sont conscients pour des bruits très forts, mais ne savent pas que quand on est au-dessus de 120 décibels pendant plus de 40 secondes, il y a un début de perte auditive, même s’il n’y a aucune perception d’avoir mal aux oreilles. Il faut leur mettre les chiffres sous les yeux avec des exemples parlants. » Il envisage d’améliorer l’information des agents avec une fiche pédagogique : « Il faut mettre en place des échelles de comparaison, 120 Db, c’est le bruit d’une tondeuse professionnelle. » Les médecins reconnaissent qu’en matière de bruit, identifier le risque professionnel est assez complexe. Si on parvient à détecter des presbyacousies (pertes auditives dues à l’âge) physiologiques parce que ce ne sont pas les mêmes fréquences hertziennes que les surdités professionnelles, ce n’est malheureusement pas le cas pour les surdités des jeunes qui peuvent aussi être causées par l’utilisation à plein volume de baladeur ou de mauvaises pratiques (balltrap sans protection auditive…). Les pertes auditives sont irrémédiables. Pourtant, explique un responsable de sécurité, « il est plus difficile de sensibiliser les agents aux risques liés au bruit plutôt qu’à la chute d’un arbre. Depuis 2006, dans notre ville, tous les agents ont été équipés d’audiofiltres, dont le confort est supérieur au casque antibruit et surtout mieux adapté puisque personnalisés à l’oreille de chacun ; les agents qui travaillent avec les machines utilisent les audiofiltres, mais leurs collègues qui travaillent à proximité immédiate et sont eux aussi victimes des nuisances sonores ne pensent pas à l’utiliser. On est là face à un risque insidieux. »

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Plus confortable que le casque anti-bruit ou les simples bouchons d’oreille, les filtres auditifs réalisés sur mesure sont plébiscités par les agents. Un chef d’équipe témoigne : « Quand on travaille sur le terre-plein central d’une quatre voies, il faut aussi se protéger des bruits extérieurs, trois camions qui passent et c’est plus de 80 Db, les agents n’en sont pas toujours conscients. Moi, j’ai compris, je porte mon audiofiltre toute la journée quand je travaille sur le boulevard et je suis moins fatigué le soir. » Il ne faut pas oublier non plus que le bruit est une nuisance pour les agents, mais aussi pour les usagers : « Cela n’a pas de sens de démarrer la tondeuse à 8h du matin sous les fenêtres de gens qui ont peut-être travaillé toute la nuit », déclare un directeur d’espaces verts. L’abandon d’engins à moteur thermique au profit de moteur électrique (débroussailleuses, souffleurs de feuilles, tronçonneuses) permet aussi de lutter contre les nuisances sonores.

2. L’utilisation de matériels vibrants L’utilisation de matériels vibrants tels que tronçonneuses ou débroussailleuses entraîne parfois un syndrome vibratoire main-bras. Le syndrome vibratoire mainbras regroupe l’ensemble des atteintes causées aux mains et aux bras par des vibrations : atteintes vasculaires (doigts blancs), neurologiques (engourdissements et troubles neurosensoriels) et musculo-squelettiques (douleurs, raideurs, faiblesse musculaire, etc.). Contre ces risques, les professionnels de santé recommandent des utilisations limitées dans le temps des matériels vibrants. « C’est l’avantage du travail en équipe, explique un agent de maîtrise, chef d’équipe dans une ville moyenne, on peut organiser des rotations entre les jardiniers pour que ce ne soient pas toujours les mêmes qui fassent les tâches difficiles trop longtemps. » Dans une autre collectivité, un chef d’équipe rapporte qu’« il a fallu imposer la polyvalence, certains agents s’étaient approprié certains matériels, et ne voulaient faire que cela, tondre ou débroussailler. Ce n’est bon pour personne. Je veux que les agents comprennent qu’ils ne vivent pas en autarcie et qu’il y a à terme des risques vasculaires ou cardiaques avec la débroussailleuse qui vibre. »

3. Les risques chimiques L’utilisation des produits phytosanitaires est au centre des risques chimiques des agents des espaces verts. Les produits phytosanitaires, les « phyto » font partie de la famille des pesticides, elle-même englobée dans la famille des biocides. Aujourd’hui, leur utilisation est de plus en plus encadrée. À partir de 2014, tout utilisateur de phyto devra être formé, pour un usage raisonné, y compris les particuliers. La prise de conscience sur ce type de risque a été largement médiatisée dans le monde agricole, et les jardiniers territoriaux ne sont pas en retard, d’autant que de plus en plus de collectivités territoriales se sont engagées dans des démarches limitant l’utilisation des phyto, et même de plus en plus souvent avec un objectif

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« zéro phyto ». Pour un directeur d’espaces verts, « c’est un scandale aussi grave que l’amiante ». Un jardinier en fin de carrière témoigne : « Depuis dix ans, dans notre ville, on n’utilise plus de produits phytosanitaires, mais le mal est fait, j’en ai bouffé en pagaille durant les quinze premières années de ma vie professionnelle, c’était limite si je n’avais pas un pulvérisateur greffé dans le dos. Je ne sais pas si je l’ai éliminé aujourd’hui. L’avenir le dira. » Selon le Dr Errieau, médecin conseil de la MNT, le risque cancérigène (ou mutagénèse, mutation génétique introduite par des produits chimiques) est difficile à apprécier dans certaines situations sur un plan méthodologique, pour plusieurs raisons. En effet, l’exposition répétée à de faibles doses de produits toxiques sur le long terme comporte un risque possible voire probable de cancérogénèse. De plus, les interactions toxiques qui résultent des expositions à plusieurs produits utilisés dans le champ phytosanitaire restent mal connues mais néanmoins très probables. On peut aisément affirmer que les jardiniers sont concernés par ce type de risque mutagène que, faute d’épidémiologie suffisante, il est impossible de caractériser.

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Toxicité et impact des produits phytosanitaires (extrait du dossier « Objectif Zéro phyto », CNFPT Plante & Cité, avril 2010)

Les substances biocides ont toutes des profils écotoxicologiques nécessitant de prendre en compte les risques d’intoxication auxquels sont confrontés les applicateurs professionnels et le public. Chaque produit phytosanitaire est caractérisé par un classement toxicologique (T : Toxique, T+ : Très toxique, Xi : Irritant, Xn : Nocif…) et des phrases de risques (ex. : R36/39 : Irritant pour les yeux et la peau ; R65 : Peut provoquer une atteinte des poumons en cas d’ingestion ; R41 : Risque de lésions oculaires graves…) qui doivent conduire, lors de leur utilisation, à une prudence et une vigilance particulières. Certains produits biocides homologués pour un usage en espaces verts sont particulièrement dangereux pour l’homme (taupicides, fourmicides, débroussaillants, anti-mousses…). La préparation, l’application de la bouillie et le nettoyage des fonds de cuve sont des étapes au cours desquelles des accidents peuvent se produire en cas de mauvaise manipulation. En outre, l’exposition aux produits phytosanitaires peut survenir, en dehors de tout accident, par inhalation dans 52 % des cas (MSA, 2006), par contacts avec les yeux, le nez et la peau dans 48 % des cas et par ingestion (vêtements et nourritures contaminés portées à la bouche) dans 6,8 % des cas. L’origine des contaminations, qui peuvent être multiples, met en exergue l’importance des bonnes pratiques à respecter pour les réduire. Il convient de distinguer deux niveaux d’intoxication liée à l’usage des produits phytosanitaires : - La toxicité à court terme ou soudaine dite « aiguë » qui se produit à l’issue d’une surexposition à des produits chimiques et qui peut entraîner des symptômes plus ou moins graves dans les minutes et les heures qui suivent l’exposition : irritation de la peau et des muqueuses, nausées… Ce type de toxicité se manifeste généralement après un accident ou une manipulation incorrecte des produits comme le renversement d’un fond de cuve ou d’une bouillie en préparation. En cas d’intoxication, les secours d’urgence et le centre anti-poisons doivent être prévenus et les références des produits phytosanitaires en cause présentées.

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- La toxicité répétée sur une longue période dite « chronique » qui se manifeste après plusieurs années d’exposition répétée aux produits phytosanitaires, même en plus faible quantité. Ce type de toxicité peut se manifester par l’occurrence de cancers, mais aussi avoir des effets sur la reproduction et le développement chez l’homme ou encore des effets neurologiques et neuro-comportementaux. Les études de l’impact des produits phytosanitaires sur la santé humaine considèrent les effets suivants : - Cancérogénèse Les études épidémiologiques sur le rôle d’une exposition aux produits phytosanitaires et la cancérogénèse ne sont pas simples à conduire en raison des nombreux facteurs croisés qui peuvent intervenir. Certains travaux de corrélation géographique ont suggéré des associations possibles entre exposition environnementale et risque de cancer, mais ne peuvent fournir à eux seuls les preuves de liens entre ces expositions et la mortalité par cancer. Chez les enfants exposés à des pesticides avant la naissance ou pendant leur enfance, un accroissement du risque de cancer a été observé mais il n’y a pas encore de réel consensus en raison des incertitudes liées à la détermination des expositions aux pesticides et au manque de données expérimentales sur les mécanismes biologiques sous-jacents. - Effets sur la reproduction et le développement Les pesticides ont été identifiés en tant qu’agents susceptibles de porter atteinte au processus de fertilité masculine. D’autres effets sont souvent évoqués pour leur lien potentiel avec les pesticides mais les difficultés méthodologiques pour leur mise en corrélation demeurent une limite aux analyses. - Effets neurologiques et neuro-comportementaux La neurotoxicité de certains pesticides est le principe même de leur action, notamment chez certains insecticides. Les effets aigus, dans le cas d’expositions à haute dose, sont désormais connus en raison des intoxications accidentelles ou volontaires (tentatives de suicide). Toutefois, il n’existe pas de consensus dégagé des nombreuses études épidémiologiques ayant porté sur la toxicité chronique dans l’occurrence de troubles dégénératifs tels que la maladie de Parkinson. Les études qui tendent à mettre en évidence le rôle potentiel des produits phytosanitaires dans l’occurrence de plusieurs pathologies se heurtent à des problématiques méthodologiques pour faire émerger des consensus. D’autre part, les études toxicologiques conduites en laboratoires ne sont réalisées pour la plupart que sur chaque substance active séparément. Or, il semble que les adjuvants, qui sont des substances rajoutées aux produits pour en optimiser l’efficacité, peuvent également faire l’objet d’effets croisés et augmenter les risques.

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a. Le « zéro phyto », une priorité nationale de formation pour le CNFPT Le CNFPT a un rôle moteur dans la réalisation de cet objectif « zéro phyto », dont il a fait une priorité nationale de formation. Pour Gaëlle Aggéri, responsable du pôle de compétences paysages – espaces verts du CNFPT « la diminution de l’utilisation des phytos concerne les métiers et les compétences de plus de 26 000 cadres techniques et d’environ 350 000 agents d’entretien des services généraux, environnement, infrastructures et réseaux, espaces verts, patrimoine bâti, propreté et déchets, eau potable et assainissement, laboratoire, funéraire et sport. » Les services espaces verts ne sont pas les seuls concernés. Aujourd’hui, les points de résistance culturelle et technique des politique zéro phyto sont fréquents dans les services voirie, propreté, cimetières et sport en raison d’une démarche « propreté sans mauvaise herbe » ancrée depuis longtemps. En décembre 2010, le CNFPT a organisé un important colloque de dimension européenne à Versailles, ville zéro phyto, qui a connu un grand succès. La même année, le CNFPT proposait environ 900 actions de formation en espaces verts dont 80 actions portant sur l’actualité de la réglementation phytosanitaire et sur l’utilisation de techniques alternatives respectueuses de la biodiversité et de la santé. Signe des temps, le CNFPT ne forme plus à la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, il forme désormais au zéro phyto. Aujourd’hui, il propose des itinéraires de formation pour atteindre l’objectif. Depuis 2012, le CNFPT a mis en place un offre nationale harmonisée dans toutes les régions sur les espaces publics zéro phyto : pour les cadres décideurs transversaux des pôles techniques ou des cadres spécialisés en gestion de voiries, espaces publics, espaces verts, cimetières, et pour les agents de terrain des espaces verts orientés vers les techniques alternatives aux produits phytosanitaires. Ce sont les formations prioritaires durables pour le CNFPT. Pendant la période transitoire de réduction ou d’arrêt de l’usage des produits phyto sanitaires, le CNFPT accompagne les collectivités en proposant aussi une certification obligatoire payante (Certiphyto territorial) pour les agents qu’elles désigneront comme applicateurs. Le cahier des charges du ministère de l’Agriculture porte sur les risques santé des agents et usagers, et sur les risques eau et biodiversité. Une étude produite avec Plante & Cité, structure rattachée au pôle de compétitivité Végépolys, pôle végétal spécialisé Anjou-Loire, révèle que les grandes collectivités ont plus d’avance que les petites dans le passage au zéro phyto. Très rares sont les collectivités qui sont entièrement zéro phyto. Aujourd’hui le zéro phyto concerne les espaces verts, mais souvent on continue à pulvériser dans les cimetières, sur la voirie et dans les équipements sportifs. L’action du CNFPT se déroule dans le contexte post-Grenelle de l’environnement qui a imposé à tous les professionnels utilisant les phyto d’avoir une certification certiphyto en 2014 pour épandre les produits. La France s’est dotée du plan d’actions Ecophyto 2018. La Direction générale de l’alimentation du ministère de l’Agriculture pilote et coordonne ce plan visant une réduction, si possible, de 50 % d’ici 2018 de l’utilisation de phyto. Des mesures d’observation et de suivi des

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résidus de pesticides sur les produits végétaux et les nappes phréatiques, jusqu’à la mise en place d’un nouveau dispositif d’épidémiosurveillance, en passant par la révision du système d’agrément et de formation pour les professionnels (Certiphyto), ce plan comprend une centaine de fiches actions. La loi oblige aussi les collectivités à ne pas traiter les espaces publics utilisés par les personnes vulnérables, abords d’école, d’hôpital, d’aires de jeu. Les enfants, les personnes âgées, les malades sont des personnes vulnérables mais, par extension, on peut considérer que tout l’espace public est concerné.

b. Les limites liées aux exigences de la population Le CNFPT va mettre en œuvre des formations au certificat Certiphyto. Gaëlle Aggéri remarque toutefois que « le niveau est assez élevé et les QCM s’adressent plutôt à des cadres, alors que l’enquête que nous avons faite dans les collectivités territoriales révèle que c’est souvent l’agent le moins renseigné qui accepte de faire les pulvérisations. » La responsable du pôle de compétences paysages–espaces verts du CNFPT redouble ses efforts. Un module de formation a aussi été rajouté pour 2013 sur les cimetières zéro phyto. On constate que dans beaucoup de villes qui sont engagées dans la démarche zéro phyto, une exception est faite sous la pression conjuguée des élus et de la population. « Les familles ne tolèrent aucune mauvaise herbe dans les cimetières », indique une ingénieure dont la ville est pourtant engagée dans cette démarche depuis plusieurs années. Cette collectivité commence à mettre en œuvre des solutions alternatives au traitement chimique : traitement thermique et désherbage à la binette. Ce qui n’est pas forcément du goût des agents qui trouvent ce travail fastidieux : « Le binage, c’est la principale difficulté du métier, quand il y en a trop, c’est lassant, confie un adjoint technique découragé, faire ce métier jusqu’à la retraite, je ne sais pas, pas s’il y a trop de binage. » Dans la lutte contre l’utilisation des produits phytosanitaires, les collectivités peuvent aussi s’appuyer sur les différents outils développés par les conseils régionaux, généraux, agences de l’Eau ou syndicats de bassin versant qui ont multiplié les chartes et apportent parfois un accompagnement financier des collectivités signataires (achat de matériel de désherbage alternatif, plan de formation, plan de désherbage…).

4. Les risques biologiques Parmi les risques différés, il faut citer les risques infectieux regroupant les risques biologiques et les « zoonoses ». Les risques biologiques sont dus au contact avec des objets souillés dans les jardins publics : préservatifs usagés, seringues, tessons de bouteille… De plus, le contact avec les animaux notamment avec les animaux morts, peut entraîner des maladies transmissibles de l’animal à l’homme : les zoonoses. La vaccination anti-tétanos est obligatoire et il ne faut pas oublier le rappel de vaccination décennale auquel doivent se soumettre les adultes. De même, des mesures de prévention élémentaires sont toujours recommandées : il faut souvent se laver

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les mains. Les jardiniers sont en contact avec la terre qu’ils touchent, avec des produits de toute nature et des essences végétales potentiellement allergisantes, voire toxiques. Les médecins observent des micro-traumatismes d’effractions cutanées, petites plaies qui sont facteurs de risques d’infection. Les infections bactériennes peuvent être facilement combattues par une bonne hygiène des mains avec des lavages fréquents. Le travail en milieu naturel est exposé aux risques émergents, liés au contact avec les animaux, notamment les insectes, comme le risque de Chikungunya. Ainsi, les jardiniers sont en première ligne de nouveaux virus véhiculés par l’acclimatation récente de vecteurs animaux (notamment de moustiques) qui vont disséminer l’épidémie. Plus généralement, ces agents sont plus exposés que le reste de la population aux zoonoses ou infections d’origine animale transmissibles à l’homme, comme la maladie de Lyme transmise par les tiques. Dans toutes les situations, des procédures sont prévues pour ne pas mettre en danger la santé des agents. « Tout est prévu, on ne prend jamais les objets à mains nues, explique un chef d’équipe. Les procédures sont bien intégrées, nous avons nos petits caissons jaunes pour confiner les objets souillés. » Lors de la grippe H5N1, les professionnels se sont interrogés pour savoir ce qu’ils devaient faire des oiseaux morts, et la prise de conscience s’est accélérée. Dans le parc d’une grande ville où les agents ramassaient régulièrement des seringues usagées, « on a aéré entre les arbustes, pour que les gens ne se cachent pas et il n’y a plus de seringues », témoigne un adjoint technique. Globalement, les agents jugent ces risques minimes et, surtout, bien maîtrisés. Il va de soi que les agents doivent avoir une parfaite couverture vaccinale, en particulier anti-tétanique.

5. Les allergies respiratoires Comme l’ensemble de la population française, les agents des espaces verts sont sensibles aux allergies dues au pollen ou à des plantes allergènes, mais globalement ils gèrent le problème en se faisant désensibiliser et en évitant les contacts avec certaines plantes dont ils connaissent les risques, comme en témoigne un adjoint technique : « Un collègue de 55 ans réagit fortement à la taille des euphorbes, une plante qui secrète une substance. On le sait maintenant et on évite de lui faire tailler ce genre de plante et il se protège. »

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La toxicité des euphorbes Les plantes du genre Euphorbia produisent une sève laiteuse (latex) très irritante pour les yeux, la peau et les muqueuses. Il est conseillé de porter des gants et des lunettes pour la taille ou le rempotage des euphorbes. Se laver soigneusement les mains à l’eau et au savon après tout contact avec la sève. Symptômes d’intoxication Ingestion : Le contact avec la bouche d’une partie de la plante ou des doigts souillés de latex provoque une douloureuse sensation de brûlure et une hypersalivation, parfois un gonflement des lèvres et/ou un œdème laryngé. Si le latex est avalé, il peut entraîner nausées, vomissements et diarrhée. Contact avec la peau : Une rougeur se développe après un délai de deux à huit heures. Des cloques peuvent se former huit à douze heures plus tard. La gravité des symptômes dépend de l’importance et de la durée du contact. Projection dans les yeux : La projection de latex dans l’œil ou le contact de l’œil avec des doigts souillés peuvent entraîner une conjonctivite sévère, une atteinte de la cornée, un gonflement des paupières. Des cas de cécité temporaire ont été décrits. Les lésions s’accompagnent de douleurs intenses, de larmoiement et de photophobie. (source Centre anti-poisons, Fondation d’utilité publique, Hôpital militaire Reine Astrid, Bruxelles)

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6. L’exposition aux intempéries et aux fortes variations de température Comme beaucoup de métiers d’extérieur, le métier de jardinier connaît les contraintes climatiques, avec de fortes variations selon les saisons. La plupart des agents sont résignés : « Ça fait partie du métier, si on n’accepte pas cela, il vaut mieux changer tout de suite », indique un adjoint technique. Le problème peut se poser de façon plus aiguë pour les agents de production dans les serres. Quand les installations sont petites, les agents sont obligés de passer fréquemment de l’intérieur à l’extérieur avec de fortes variations de température. Une floricultrice témoigne : « Avec les anciennes serres, on était obligé de sortir souvent, mais maintenant, nous avons de grandes serres et nous ne sommes plus obligés d’avoir ces allers et venues, le problème, c’est plus la chaleur l’été dans les serres, alors on essaie de s’arranger avec les toiles d’ombrage, en faisant des courants d’air et en travaillant dans le box à terreau où il fait plus frais. »

C. Des risques plus généraux 1. Les TMS et les risques de posture Le Professeur Patrick Choutet, médecin national de la Caisse centrale de la MSA (Mutualité sociale agricole) résume : « Le métier de jardinier est reconnu comme un métier qui casse le bonhomme. » Son confrère, le Docteur Yves Cosset, responsable à l’échelon national de santé sécurité au travail à la Caisse centrale de la MSA, confirme que dans le secteur privé des métiers des espaces verts, « toutes filières confondues, les TMS sont la première cause de risque professionnel et représente 91 % des maladies professionnelles. Beaucoup sont liés à des efforts et des gestes répétitifs, mais aussi à l’utilisation des machines, on les retrouve dans le secteur paysagiste avec les tronçonneuses, les taille-haies, les souffleurs, les tondeuses portées, tractées ou autoportées. » Le constat est assurément valable dans le secteur public territorial. Le Docteur Cosset remarque qu’« autrefois, on rencontrait des gens dans le milieu agricole qui avaient des douleurs ou avaient l’habitude d’être cassés et nous disaient “c’est naturel”, les mentalités ont changé ; l’intégrité physique et mentale est aujourd’hui partagée dans ce milieu comme dans l’ensemble de la société alors qu’autrefois, on souffrait en silence. » Le praticien a observé que « ce sont des métiers qui musclent, et ces gens musclés dépassent le seuil de la douleur. Quand on leur dit que va commencer la saison du bêchage en février, ils savent qu’ils vont avoir mal au dos, à bêcher les plates-bandes, mais au bout d’une semaine, la musculature s’est adaptée et ils vont pouvoir faire leurs deux mois de bêchage. » Bien sûr cette absence de sensation de douleur ne supprime pas le risque sanitaire. Comme l’indique un adjoint technique qui a été opéré d’une hernie discale : « Le dos, c’est vache parce que quand tu es chaud, tu ne sens plus la douleur, et puis le lendemain, tu ne peux plus bouger. »

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La MSA a fait une étude il y a quelques années sur la perception du corps en milieu rural. Cette perception a beaucoup évolué. Le corps, autrefois, était perçu comme un outil et c’était un honneur d’avoir mal. Dans les collectivités territoriales, beaucoup d’agents venaient du milieu agricole et partageaient cette culture. Aujourd’hui, les mentalités ont évolué, même si trop de jardiniers hésitent encore à parler de leurs problèmes pour ne pas paraître vulnérables. Globalement, quel que soit leur âge, tous les agents interrogés au cours de notre enquête ont évoqué le mal de dos. « Le désespoir du jardinier, c’est le dos », résume un directeur de service espaces verts. Son adjoint ajoute : « La sélection parle tout de suite, les conditions de travail sont éprouvantes. Physiologiquement, il faut que le corps tienne le coup et ne restent que des gens très costauds dans ces métiers-là. » Pourtant, ces problèmes sont souvent négligés : « Un jardinier qui travaille avec une tronçonneuse va faire attention et bien se protéger, en revanche, pour son dos il ne fera rien jusqu’au moment où il a mal et c’est déjà trop tard », observe un préventeur. Âgée de 45 ans, cette floricultrice d’une ville du Nord témoigne : « Quand j’étais jeune je passais mes étés pliée pour préparer les chrysanthèmes et je pense que je le ressens maintenant ; aujourd’hui dès que je sens un petit pincement, je fais attention, je me fais manipuler environ deux fois par an par le kiné, ça m’aide et j’espère bien pouvoir continuer mon métier. » Pour le travail en serre, les conditions de travail s’améliorent dans beaucoup de collectivités : « On a des appareils et des tables à rempoter à bonne hauteur », montre l’ingénieure en charge du service. « La manière de produire a beaucoup évolué au cours des dernières années, en termes d’organisation, pour rendre le travail plus confortable, mais en prenant en compte la contrainte budgétaire que cela pouvait engendrer. Auparavant, les plantes étaient produites en godets, au sol directement, et si les agents devaient les changer de place, ils devaient le faire godet par godet. On a fait installer des allées en béton pour faire circuler des rolls danois, des chariots à plateau. Les godets sont placés dans des plaques de “distançage” et ainsi on peut en prendre dix à vingt à la fois. Ainsi on passe beaucoup moins de temps penché sur les pots. Le dos reste sollicité mais pas de la même façon. » Autre amélioration : il y a aussi une machine pour mélanger le terreau à la terre, avant il fallait le faire à la pelle. Dans une autre ville, les agents sont en train de tester des tabourets de travail à leur hauteur pour pouvoir travailler devant les tables à rempoter. Le responsable de la prévention remarque que les tables ne sont pas la solution miracle, car tous les agents n’ont pas la même taille. La mécanisation est une des solutions contre les TMS. De plus en plus, on évite le port de charges trop lourdes grâce à des chariots élévateurs ou des rampes d’accès. L’utilisation de taille-haies, débroussailleuses et autres appareils électriques est plébiscitée par les agents : moins bruyants, moins polluants, ils sont surtout moins lourds et répartissent la charge différemment. Les batteries sont dans le dos, la charge est mieux équilibrée, et à bout de bras, la machine paraît légère. « La différence entre un taille-haie électrique et thermique, c’est dix fois moins pénible qu’avant », constate un agent de maîtrise. « Quand on utilisait un taille-haie thermique toute une journée, on savait pourquoi on avait mal au crâne le soir : gaz

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d’échappement, poids. On ne pourrait plus revenir en arrière. Les gars refuseraient tout net. » L’organisation du travail peut aussi améliorer grandement le confort, comme l’indique un agent de maîtrise d’une ville du Nord, 46 ans : « On parle des problèmes de santé avec les collègues, du mal de dos, des problèmes musculaires quand on utiliser le taille-haie thermique, à force, les avant-bras souffrent, ces sont aussi des problèmes de dos. Du coup on pivote. Par exemple, on taille pendant deux heures et on se fait remplacer. Le problème, c’est qu’il n’est pas donné à tout le monde de tailler droit. » L’organisation du travail en équipe permet de varier les activités entre les agents. Le rôle du chef d’équipe, manager de proximité, est déterminant, comme l’indique un agent de maîtrise : « Certains collègues en parlent et d’autres non, alors je veille au grain, qu’ils ne se retrouvent pas en arrêt maladie. Je les fais souvent changer de tâches, surtout si elles sont répétitives. On s’organise pour alterner sur des périodes pas trop longues. Là, on va commencer les tailles de haies, il est hors de question que les agents fassent cela tous les jours pendant deux semaines. Je préfère prolonger la période de façon à les préserver physiquement, si je ne le fais pas, ils tomberont en arrêt maladie et sur ce type d’arrêt c’est au mieux quinze jours et au pire trois mois. »

2. Les précarités sociales et psychologiques Même si la plupart des jardiniers aiment leur métier et en retirent un certain nombre de gratifications symboliques (sentiment de participer à une mission importante pour la collectivité, soutien des élus et de la population…), ils ne sont pas à l’abri des risques psycho-sociaux (RPS). Des personnels anciens recrutés sur des critères sociaux cumulent des précarités sociales et psychologiques et importent parfois dans leur milieu de travail leurs difficultés personnelles. Tous les responsables de services constatent qu’il y a moins de problèmes d’alcoolisme. « C’était essentiellement un problème de génération », remarque un directeur d’espaces verts. Souvent, à l’intérieur de la collectivité, des formations de prévention ont été dispensées. Les problèmes liés aux addictions restent très marginaux. Avec le recrutement d’agents mieux formés, l’illettrisme a aussi fortement reculé. « Aujourd’hui on n’embauche que des gens qui ont des diplômes, observe un cadre. On n’a plus les moyens de ne pas avoir des gens formés et compétents. » Dans une autre collectivité, on reconnaît que certains agents, intégrés par la voie de l’insertion, doivent être accompagnés et on souligne l’autonomie acquise par certains collègues à l’issue de formations dispensées par le CNFPT. Le contact avec la population peut fragiliser les agents quand ils se font agresser ou insulter. Ces confrontations peuvent entraîner un sentiment d’insécurité et/ou de stress. Ce risque relationnel peut perturber les agents, les amenant parfois à exercer leur droit de retrait pour ne plus se retrouver face à des habitants violents. Au sein d’un OPH qui externalise l’entretien des espaces verts, on constate que les réalisa-

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tions sont parfois vandalisées, « mais c’est rare, il semble que les riverains apprécient les efforts faits pour améliorer leur cadre de vie et de ce fait, les respectent. En bref, les incidents à déplorer sont donc rares, car les entreprises s’adaptent (ne pas laisser d’engins ou de matériel sur place, aménager les horaires en fonction des sites d’interventions, communication avec les riverains...) ». Plus généralement, les jardiniers ont un rôle de médiateur et de pédagogue avec la population à assumer, en plus de leurs compétences techniques mais qui peut générer des difficultés psychologiques. Un autre risque vient du travail en équipe qui s’est généralisé dans les collectivités. « On travaille en équipe, mais notre formation ne nous y prépare pas, constate un technicien. Quand ça ne marche pas, il faut sortir la personne de l’équipe et même si la plupart du temps, c’est à la demande de l’agent, il faut le recaser. Il y a aussi la difficulté de reconnaître un risque psychologique, il y a une sorte d’omerta vis-à-vis de certains agents qui sont dangereux vis-à-vis d’eux-mêmes, de leurs collègues et du public. Les agents de maîtrise ne sont pas formés à cela. » Une jeune femme, agent de production en serre, témoigne des difficultés qu’elle a rencontrées : « Les relations avec les collègues peuvent être difficiles, j’ai vécu de très durs moments, je pensais même arrêter ; les collègues étaient tous contre moi, j’ai pris mon mal en patience, c’était difficile et ça s’est tassé, c’était des jalousies. » Un agent d’encadrement précise : « Le problème des serres, c’est que c’est une petite équipe dans un lieu clos et parfois il suffit d’un agent pour mettre une mauvaise ambiance. »

3. De nouvelles organisations de travail qui déstabilisent Certains agents sont déstabilisés par l’évolution du métier et le passage à la gestion différenciée qui leur a fait perdre leurs anciens repères. « C’était plus tranquille avant, témoigne un agent technique. On travaillait sur des secteurs qui étaient bien définis, maintenant, ça s’agrandit, il y a plus de travail et on n’est pas plus nombreux. » D’autres agents constatent que, pour eux, la relation avec les habitants s’est dégradée. Même si ce sentiment reste marginal, il témoigne de certaines souffrances exprimées par des agents. La gestion différenciée a ses partisans qui ont trouvé dans ce mode de gestion des motifs de satisfaction. Inversement, d’autres agents se sont sentis dépossédés de leur savoir-faire horticole et ils vivent ce changement douloureusement. Ils rencontrent alors des difficultés à expliquer aux habitants qu’on tonde moins souvent les espaces de proximité et qu’on laisse proliférer des espaces végétales qu’ils jugent peu nobles. Certains jardiniers font remarquer que la charge de travail ne cesse d’augmenter dans leur collectivité, les surfaces à entretenir sont plus vastes mais les effectifs sont restés constants.

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D. Synthèse des causes de pathologies En conclusion de l’ensemble des témoignages recueillis, les principaux facteurs de risques, individuels et collectifs, pour la santé des jardiniers dans l’exercice de leur métier, se résume ainsi :

Risques d’accident de service : - Coupures ou broyages à la suite de l’utilisation de matériels tranchants et coupants. - Accidents survenant lors de chantiers sur la voie publique. - Accidents de la circulation. - Chutes à l’occasion de travaux en hauteur.

Risques à effets différés : - Troubles musculo-squelettiques (TMS) dus aux matériels vibrants, aux gestes répétitifs, au port de charges. - Risques chimiques (produits phytosanitaires, pollution due aux engins à moteur thermique). - Infections dues aux risques biologiques. - Allergies respiratoires dues au pollen ou à des plantes allergènes. - Surdité et pertes auditives dues au bruit excessif. - Troubles psycho-sociaux (TPS) dus à l’organisation du travail et aux précarités psychologiques et sociales.

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2e partie : Émergence d’une nouvelle culture professionnelle A. Le tournant de la prévention et de la sécurité au travail Depuis les débuts de la décentralisation, la culture de la prévention et de la sécurité au travail a beaucoup progressé dans les collectivités territoriales. Les lois créant la Fonction publique territoriale intégraient déjà cet impératif de sécurité : - « Des conditions d’hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. » (Article 23 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) - « Les autorités territoriales sont chargées de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. » (Article 2-1 du Décret n°85-603 du 10 juin 1985 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale) Un tournant décisif a été pris avec l’instauration du Document unique d’évaluation des risques (DU) en 2001 et par la création des agents chargés de la mise en œuvre des règles d’hygiène et de sécurité (ACMO) devenus assistants et conseillers de prévention, qui ont largement contribué au développement d’une culture de la sécurité au travail dans les collectivités territoriales. « Pendant très longtemps, la sécurité était quelque chose d’annexe dont on parlait quand on avait le temps », remarque un préventeur qui mesure le chemin parcouru : « Ça s’améliore quand les absences et l’accidentologie diminuent. » L’émergence de cette culture de la sécurité a parfois été longue et complexe, comme l’explique le responsable prévention d’une grande ville : « On a du mal à installer une culture du risque. Il faut faire les choses et on se pose seulement ensuite la question de savoir comment on les fait. Quand vous parlez sécurité avec les agents, vous vous apercevez qu’ils perçoivent cela souvent comme une contrainte, le port des EPI, par exemple. Quand il fait chaud, vous mettez un masque qui provoque de la buée. C’est souvent la lutte entre les agents et le vilain responsable qui veut les protéger malgré eux parce que la perception du risque n’est pas la même entre les agents d’encadrement et les agents d’exécution. C’est le fait routinier, l’agent qui tronçonne depuis 30 ans n’a pas l’impression de risquer quoi que ce soit, il fait cela tous les jours et il ne fait plus appel à des connaissances qu’il a acquises il y a 20 ou 30 ans, il les a mises de côté et il les a oubliées. »

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1. Le DU Définition : Le DU (document unique) Le document unique, ou document unique d’évaluation des risques (DU ou DUER), a été créé par le décret n° 2001-1016 du 5 novembre 2001, transposition en droit interne de la directive européenne sur la prévention des risques professionnels. Le DU est obligatoire pour toutes les entreprises, administrations et associations de plus d’un salarié. Il doit être révisé régulièrement, au minimum chaque année et à chaque fois qu’une unité de travail a été modifiée et après chaque accident du travail. Le DU fait l’inventaire des risques et préconise des actions visant à les réduire, voire les supprimer. Le DU permet aussi de définir un programme d’actions de prévention découlant directement des analyses et évaluations qui auront été effectuées. Toutes les collectivités n’ont pas avancé au même rythme dans la mise en œuvre du document unique. Ainsi, le responsable du service prévention d’une grande communauté d’agglomération d’Île-de-France témoigne : « Il a fallu attendre 2005 pour que la communauté d’agglo engage une politique d’hygiène et sécurité volontariste. Cela a commencé avec un DU référencé par une entreprise extérieure, spécialisée. Plus de 6 000 risques ont été recensés sur 80 métiers exercés par l’EPCI. Beaucoup de ces risques n’étaient pas que latents et apparaissaient sans solutions immédiates. On a priorisé sur une échelle de 2 à 9 le seuil de technicité et dès la première année on a apporté des solutions en priorité aux risques mortels. Le nouveau recensement effectué en juin 2011 a identifié 780 risques restants, avec pour tous une solution au moins provisoire. Par exemple, pour prévenir un risque de chute, s’il manque un garde-corps, quelque chose de provisoire a été installé en attendant la mise en place du garde-corps. Des actions ont été menées sur les gestes répétitifs, car des études de poste révélaient la multiplication des TMS. » Une autre collectivité s’est dotée de son document unique en 2008. Cela a donné lieu à un plan d’action voté en CHS, plan pluriannuel 2008-2013. Ce document ambitieux fait une cinquantaine de pages. Mais comme le reconnaît le responsable du bureau des risques professionnels, « le document était tellement magnifique que la principale difficulté des chefs de service a été de se l’approprier, aujourd’hui 80 % des actions, et souvent les plus structurantes et les plus difficiles à mettre en œuvre ne sont même pas engagées. J’ai donc essayé de valoriser ce qui a déjà été engagé, de reconnaître qu’on n’a pas avancé au rythme prévu et donc qu’il faut maintenant fixer des priorités. » Cette grande ville a donc changé de méthode et progresse désormais dans un cycle de programmation qui est celui du code du travail. En avril 2012, un programme annuel de prévention a été voté, resserré autour d’un nombre restreint d’objectifs et on est en train de mettre en œuvre ces objectifs.

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La directrice du service espaces verts d’un ville moyenne reconnaît que « le DU, on ne l’ouvre pas souvent et on n’a pas le temps de le mettre à jour, en fonction du matériel nouveau. Le mérite du DU, c’est de faire l’inventaire des risques, mais il faudrait l’actualiser en permanence. C’est un boulot énorme. Notre document date de 2003 et il se présente sous forme de classeur. Tout cela devrait être informatisé, avec un moteur de recherche. » Risques et moyens de prévention (modèle de fiche adoptée par une grande ville dans le cadre de la préparation de son DU) Risques inhérents aux ambiances et contraintes physiques : - Privilégier les moyens mécaniques de port des charges. - Présence de rampes d’accès sur les remorques. - Sensibilisation des intervenants aux gestes et postures et au port de charges, au port d’EPI, aux procédures de travail. - Utilisation de scies à chaînes adaptées à la nature du bois et au diamètre des branches à couper ; veiller à leur entretien et à leur affûtage, vérifier l’état des silent-blocs, les utiliser à deux mains. - Utiliser des outils de coupe légers, des croissants et sécateurs bien affûtés, des manches flexibles bons absorbeurs d’énergie. - Vérification de l’aptitude médicale par le médecin du travail. - Nécessité d’avoir une bonne hygiène de vie et de s’alimenter correctement. - Port des protections individuelles adaptées à la tâche réalisée : par exemple pour le bruit. - Choix de matériels moins bruyants. - Chaleur et intempéries : se vêtir en fonction de la météo, porter les équipements de protection individuelle fournis par l’employeur (vestes de pluies, blousons…), s’hydrater correctement. - Sièges des engins en bon état. Exposition à des agents biologiques : - Tétanos : suivi des vaccinations par le médecin du travail lors des visites médicales annuelles. - Leptospirose : port de gants de protection et de bottes dans les zones à risques. - Rage : ne pas toucher les cadavres d’animaux, consulter un médecin en cas de morsure. - Tiques : signaler toute piqûre constatée, consulter un médecin en présence d’une rougeur. - Allergies au pollen : consulter un médecin en cas de persistance des symptômes (éternuements, irritations, démangeaisons…). - Dans tous les cas : hygiène cutanée et désinfection des plaies. - Présence d’une trousse de secours et de personnel formé aux gestes de secours.

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Exposition aux insectes : - Apporter une attention particulière aux nids d’insectes rencontrés sur les chantiers : une procédure contraignante s’impose notamment pour intervenir sur un arbre comprenant un nid de chenilles urticantes, en raison du fort pouvoir allergène des poils ; sans formation ni équipement de protection spécifique, aucune action n’est envisageable. Reporter les travaux en période favorable (migration des chenilles). - Prévoir une trousse de premiers secours dans les véhicules. - Formation d’intervenants aux gestes de secours. - Consultation d’un médecin en cas d’indisposition. Exposition à des agents chimiques : Produits phytosanitaires : - Ne traiter que si aucune solution alternative n’est possible (ex. désherbage thermique…). - Remplacer les produits dangereux par des produits moins dangereux pour la santé humaine. - Respect des règles de stockage, de transport et d’utilisation des produits phytosanitaires. - Détention d’un agrément obligatoire pour toute prestation de service en la matière. - Formation des intervenants annuelle obligatoire. - Entretien du matériel de pulvérisation. - Port et entretien des équipements de protection individuelle : bottes, gants, combinaisons, masques de protection respiratoire, en fonction des préconisations des fiches de données de sécurité. - Surveillance médicale des intervenants et fiche d’exposition professionnelle à renseigner. - Respect des délais de rentrée dans les cultures traitées (6 à 24h ou 48h après le traitement). - Lavage des mains et prise de douche en fin de traitement. Huiles, carburants, gaz d’échappements : - Respecter les règles de stockage et de transport du carburant pour éviter les renversements. - Bidons avec bec verseurs ou entonnoirs. - Port de gants de protection. - Bon réglage des tronçonneuses. - Choix de l’huile moteur. - Filtre à air entretenu sur les engins, pot d’échappement en bon état, sortie des gaz non dirigée vers l’opérateur. Risques routiers : - Bon entretien des véhicules et des engins. - Respect de règles du code de la route, des gabarits, des PTAC (poids total autorisé en charge). - Séparation des hommes et du matériel transporté, arrimage du matériel dans les véhicules.

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- Signalisation des chantiers. - Gilets fluorescents et triangle de présignalisation obligatoires. Risques de chutes : - Veiller à ne pas courir sur les chantiers. - Porter des chaussures de sécurité ou des bottes antidérapantes. - Port du casque de sécurité bûcheron pour les opérations d’élagage. - Ranger le matériel sur le chantier, dans le véhicule et au dépôt. - Arrimer le matériel correctement dans les véhicules. - Utiliser des rampes de déchargements des engins. - Dégager et entretenir les marchepieds d’accès aux véhicules et aux engins utilisés (marchepieds larges, profonds, avec arrêts latéraux et butée arrière, antidérapants). - Balisage des trous ouverts de jour comme de nuit. - Utilisation de moyens adaptés d’accès en hauteur : échafaudages munis de stabilisateurs, nacelles… - Travaux d’élagage : port et entretien du harnais de sécurité et de ses accessoires ; formation adéquate aux techniques dans les arbres (grimper, travail à l’aide de cordes, secours). Risques liés aux contraintes environnementales : - Examen préalable des chantiers, consultation des plans (exemple : implantation des lignes électriques enterrées…). - Respect des règles spécifiques applicables. - Formation des intervenants. Risques liés à l’utilisation d’équipements de travail : - Choix et achat de matériels conformes aux normes établies par le Code du travail. - Maintien en bon état des dispositifs de protection des machines. - Respect des critères de réglage, d’utilisation, d’entretien, de débourrage et de maintenance de chaque catégorie de matériels : exemple du débourrage de la tondeuse, intervenir sur le matériel arrêté et débrancher le différentiel pour éviter un redémarrage intempestif. - Port des équipements de protection individuelle pour l’utilisation d’une scie à chaîne : pantalon anti-coupures, veste de sécurité, chaussures renforcées pour travaux forestiers, casque de sécurité bûcheron, gants. - Présence de structures contre la chute d’objets et contre le renversement sur les engins (tracteurs, engins de terrassement et de levage). - Respect des consignes d’utilisation des engins (pente maximale). - Présence d’une ceinture de sécurité sur les engins de levage. - Formations à la conduite et autorisations de conduite des engins. - Balisage du chantier. - Signal sonore de recul sur engins. - Protéger la cabine du tracteur des projections (épareuses). - Porter les équipements de protection individuelle requis pour le débroussaillage manuel (casque, visière, gants…).

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2. Les EPI et des outils mieux adaptés Les améliorations qui ont porté sur les outils, la mécanisation de certaines tâches, et les équipements de protection des agents ont considérablement fait reculer les risques sanitaires et l’accidentologie. Pour les EPI (équipements de protection individuelle), c’est un champ très vaste : bruit, protection oculaire, protection des mains, des membres et des pieds, combinaisons pour les traitements phytosanitaires. « Maintenant, je suis tellement habitué à mon EPI, que quand je ne l’ai pas je me sens nu », déclare un adjoint technique. Au fur et à mesure que progresse la culture de la prévention et de la sécurité dans une collectivité, l’utilisation des EPI se généralise. « Les jeunes qui ont été formés aux consignes de sécurité dès le lycée utilisent leurs EPI systématiquement, ce qui n’est pas le cas des plus anciens », remarque un responsable de sécurité. « Il y a un certain respect des consignes, mais il faut veiller au grain, conseille un chef d’équipe. Les gars peuvent se contenter d’utiliser le broyeur avec des lunettes de sécurité et un casque. Alors qu’on a des casques forestiers qui possèdent une visière de protection oculaire et une protection auditive, c’est mieux. » Le port des vêtements à haute visibilité est parfois problématique. Certains jardiniers ne veulent pas les porter l’été quand il fait chaud, ils prétextent que la couleur jaune attire les insectes. D’autres jugent les pantalons anti-coupures lourds et peu souples. Un responsable de sécurité remarque qu’il faut que les EPI soient bien adaptés à ceux qui vont les utiliser. « Les filles qui travaillent dans les serres ont des gants de sécurité quand elles utilisent des cutters, mais il fallait acheter des gants de taille 7 parce que s’il n’y a que des gants de taille 10, elles ne les mettront pas. » De plus en plus souvent, les agents participent au choix des EPI : « Un groupe est constitué avec un agent représentant chaque équipe pour le choix des vêtements, explique un préventeur. Ce groupe donne un avis par rapport aux vêtements sélectionnés dans le cadre des marchés publics, on essaie aussi de tenir compte des goûts et des couleurs ; une fois que le choix est arrêté, tout le monde obtempère. » Ainsi dans cette collectivité, les agents ont le choix entre plusieurs modèles de chaussures de sécurité, les femmes qui travaillent dans les serres portent leurs chaussures de sécurité, mais en ce début d’été c’est un modèle ouvert et féminin. La mécanisation des tâches facilite aussi le travail des agents et permet de faire face au vieillissement des agents. « Pour la manutention et le port des charges, tout peut être mécanisé, chariots élévateurs et rampes d’accès », constate une directrice d’espaces verts. On a évoqué plus haut la différence entre un taille-haie électrique et thermique, et le confort apporté par ces nouveaux équipements. Dans les serres, l’ergonomie des installations avec des tables de travail et la possibilité de travailler à hauteur d’homme sans être systématiquement penché ou à genou constitue un réel progrès.

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3. Des partenaires acteurs de la sécurité Certification, contrôle qualité, souvent les DU ont été construits avec des intervenants extérieurs, mais les plus grandes collectivités se sont aujourd’hui dotées de compétences internes avec un responsable sécurité au sein des services. Cette diffusion d’une culture de la sécurité et de la santé au travail a été rendue possible par l’intervention de nouveaux acteurs professionnels : préventeurs, ergonomes, médecins de prévention… Dans cette petite ville, l’agent chargé de la mise en œuvre des règles d’hygiène et de sécurité, assistant de prévention, ex-ACMO de la collectivité, exerce elle-même au service des espaces verts de la ville. « Cet agent a révolutionné les pratiques » et, une fois les premières réserves dissipées, dues le plus souvent à de simples freins aux changements d’habitudes de travail (« mes conseils étaient souvent ressentis comme des critiques, certains voyaient en moi l’IGS, la police des polices », confie-t-elle), chacun se sent aujourd’hui plus serein : « Au début, j’ai trouvé tout ça un peu bizarre mais aujourd’hui, je me sens protégé. Elle nous a apporté beaucoup plus de sécurité, en matière d’équipement de protection individuelle et de signalisation. » La fonction d’agent chargé de la mise en œuvre des règles d’hygiène et de sécurité (ACMO) est devenue la fonction d’assistant et de conseiller de prévention à la suite de la réforme du décret du 3 février 2012, pris sur les bases de l’accord sur la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique du 20 novembre 2009. Elle doit être mise en place dans toute collectivité territoriale et tous leurs établissements publics quelle que soit sa taille. Selon l’importance de ses effectifs, la nature de ses risques et l’implantation de ses différents services, chaque collectivité ou établissement doit mettre en place une organisation adaptée. Celle-ci peut aller de la désignation d’un seul agent à temps partiel pour les petites collectivités, jusqu’à la création d’un service de prévention des risques professionnels aux compétences spécialisées et diversifiées, en liaison avec un réseau d’agents locaux chargés de prévention dans tous les services et dans toutes les unités de travail pour les plus grandes. L’action des préventeurs a été déterminante. L’un d’entre eux se définit comme un aiguillon : « Avant, j’étais celui qui embêtait, maintenant je suis bien identifié comme l’homme de la sécurité, je suis un partenaire qui est là pour les aider. Nous sommes dans le dialogue. Je respecte le savoir-faire des jardiniers, je ne cherche pas à les prendre en défaut. Je vais d’abord leur poser la question “pourquoi vous faites comme cela ?” et si la réponse est valable mais pose des problèmes en termes d’ergonomie, je vais les inciter à réfléchir sur la meilleure façon de progresser. » Dans une autre collectivité, un préventeur témoigne de l’évolution de ses pratiques professionnelles : « Même sur les gestes et postures, on ne fait plus des formations comme autrefois, j’accompagne les agents sur le terrain, ça prend du temps et une fois qu’on leur a donné des bases d’anatomie et des outils qu’ils peuvent utiliser à leur niveau, on dialogue régulièrement sur leurs pratiques. »

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Le médecin de prévention ou médecin du travail est aussi un acteur majeur de cette politique de prévention. Depuis 2001, dans cette grande ville du Nord, Marie, médecin territorial titulaire, s’occupe à temps complet des 1 700 agents municipaux. Elle rencontre tout le monde en visite d’embauche, y compris les contrats aidés. Après cela, la visite réglementaire a lieu tous les deux ans. Avant, à l’époque où les agents des espaces verts utilisaient des produits phytosanitaires, le médecin les avaient placés en surveillance médicale renforcée, comme cela est prévu pour des salariés exposés à des risques particuliers. Le cadre réglementaire a été toiletté début 2012 et beaucoup de fonctions ont disparu des contrôles renforcés, comme la manutention ou les vibrations. Le suivi médical se fait aussi lors des visites de reprise suite à un arrêt maladie de 21 jours (de 30 jours depuis le 1er juillet 2012) ou un accident de service de huit jours (de 30 jours également depuis le 1er juillet 2012). Quelques visites sont spontanées. Actuellement, le manque de médecins du travail se fait cruellement sentir. Beaucoup de collectivités territoriales peinent à recruter et trop de postes sont vacants. « C’est un véritable cauchemar, estime la directrice d’un centre de gestion, au moment où la réglementation renforce les obligations de prévention, nous ne trouvons pas les professionnels pour assurer ces missions, d’autant que la pénurie est générale et que les services de médecine interprofessionnelle se sont donné pour consigne de ne plus prendre en compte les demandes des collectivités locales. »

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B. De nouvelles missions sur la nature en ville 1. L’influence de la gestion différenciée et écologique des espaces verts Définition : la gestion différenciée La gestion différenciée fait évoluer le modèle horticole standard en intégrant à la gestion des espaces verts un souci écologique. Elle permet de gérer au mieux le patrimoine vert d’une ville avec des objectifs précis et en tenant compte des moyens humains. Elle crée de nouveaux types d’espaces plus libres correspondant à une utilisation contemporaine aux fonctions plus variées. Dans l’optique de la gestion différenciée, le concepteur paysagiste crée un espace adapté à son milieu (sol, climat, environnement urbain...). Il limite l’entretien et les traitements phytosanitaires, favorise le développement d’une diversité faunistique et floristique, tout en respectant le cahier des charges. Cette gestion diffère selon l’usage du lieu, elle se veut plus proche de la nature et plus respectueuse de l’environnement. (Source www.gestiondifferenciee.org)

Comme l’explique un directeur des espaces verts d’une communauté d’agglomération qui pratique la gestion différenciée de ses espaces, « la réflexion sur la gestion différenciée des espaces verts, c’est la prise de conscience à partir de certaines pratiques : pourquoi tond-on aussi ras ? On a une pseudo-tradition du jardin à la française mais autrefois, il n’y avait pas de tondeuse et à l’époque de Louis XIV à Versailles, les pelouses n’étaient pas tondues, elles étaient fauchées et il y avait des moutons. Il faut donc retrouver du sens, savoir pourquoi on fait les choses et dans quel but on les fait. C’est un gros travail qu’on mène à l’intérieur du service, on fait de l’écopâturage, du débardage à cheval, on communique davantage sur ce qu’on fait, sur la façon dont on le fait. Cela permet de remotiver les équipes. » Certaines régions sont plus avancées dans la prise de conscience de cette gestion écologique. C’est le cas des Pays de la Loire et de la Bretagne, quelle que soit la taille des collectivités. Ailleurs, les agents doivent convaincre leurs élus qui veulent des massifs tirés au cordeau, des pelouses partout tondues à ras, des roses et des géraniums sans moisissure. De sa propre initiative, le service espaces verts de cet autre établissement public s’est lancé depuis huit ans dans une gestion environnementale des espaces verts, incluant ainsi aux cahiers des charges des entreprises prestataires les enjeux de l’écologie urbaine. Cette politique a conduit à d’importants changements de pratiques : recyclage des tontes, taille douce des arbres et arbustes, limitation drastique des produits phytosanitaires, expérimentation de prairies fleuries, utilisation de plantes peu exigeantes en eau et de bulbes pérennes (narcisses, jonquilles…). Afin de poursuivre encore dans cette direction, des formations sont annuellement suivies (gestion durable des espaces verts, taille des arbres…).

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2. Un métier choisi et aimé qui s’est renouvelé La mise en œuvre des agendas 21 au sein des collectivités a souvent renforcé le rôle des services espaces verts et de leurs agents. Ils ne sont pas là uniquement pour embellir le cadre de vie par le fleurissement mais pour être acteurs du développement durable de la collectivité, engagés notamment au service de la biodiversité. Parfois, les jardiniers sont en avance sur le reste de l’administration municipale et c’est un motif de fierté, comme l’explique un directeur d’espaces verts : « L’agenda 21 reprend les objectifs du service, nous avions anticipé, on est bien dans cette dynamique et cela a permis aux autres services de se rendre compte de ce que nous avions déjà fait : gestion de l’eau, diminution des consommations énergétiques. Parfois, on nous prend pour des extra-terrestres. On commence à faire du foin, on récolte des graines locales pour réensemencer des massifs avec des fleurs locales. » Le tournant du développement durable, la prise en compte de la biodiversité, de la nature en ville constituent des éléments valorisants pour les jardiniers, ils sont alors formés en écologie. Ils reviennent à des pratiques manuelles proches des méthodes agricoles anciennes, ils participent aux inventaires scientifiques. Dans certaines villes comme Caen, on les appelle même les éco-jardiniers. Ce sont de nouveaux défis pour les jardiniers, comme a pu l’être le concours national des villes et villages fleuris. Un technicien observe cette évolution : « Notre ville a trois fleurs, ce concours était notre cheval de bataille, maintenant, on y accorde moins d’intérêt, on est toujours content, on sait que c’est bien pour la population. Mais le concours a lui aussi évolué. Autrefois, il fallait que tout soit tiré au cordeau avec des parterres bien alignés. Avant, le concours était le seul moyen de stimuler les agents. On en a d’autres maintenant. Et on gère mieux globalement. » Les jardiniers de plus de 40 ans et les cadres des espaces verts ont reçu une formation très horticole. Les jeunes qui sortent aujourd’hui de formation initiale sont formés à la gestion écologique, à la gestion différenciée. Les lycées agricoles ont pris le tournant.

3. Des rapports différents avec les habitants Dans les communes petites ou grandes qui sont engagées dans la démarche écologique, le jardinier devient ambassadeur du message développement durable, à son niveau. Mais c’est plus que cela. Le Grenelle de l’environnement a prévu des inventaires de la biodiversité urbaine, mais les villes n’ont pas les moyens de recourir à des écologues pour l’ensemble des espaces verts. La tendance est aujourd’hui de former quelques jardiniers à la reconnaissance de la flore et la faune indigène, et le jardinier s’appuie sur les habitants pour cette reconnaissance dans une démarche participative. Ainsi quelques collectivités pilotes sont très engagées dans les 24 heures naturalistes. On se donne un quartier pour objectif et on réalise l’inventaire de jour et de nuit. À terme, on peut imaginer que le jardinier va devenir un médiateur de la nature et un formateur des habitants. Il sera lui-même relayé par des bénévoles dans les

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quartiers. Nantes a recruté une sociologue au sein de ses espaces verts dont la mission est orientée sur la régulation sociale. Le métier a vraiment changé. « Quand j’ai commencé dans les parcs, j’avais un sifflet, il ne fallait pas marcher sur la pelouse, et au coup de sifflet, les gens obtempéraient », se souvient un adjoint technique dans une ville du Nord. « Aujourd’hui, si on demandait aux gens de ne pas marcher sur les pelouses, on se ferait agresser. Que ce soit les adultes ou des adolescents de 13 ans. Aujourd’hui, il y a des gamins qui n’ont peur de rien, pas même des policiers, alors un agent communal qui fait son travail, ça ne compte pas pour eux. » La Ville de Strasbourg, comme d’autres collectivités, a mis en œuvre une charte de la participation citoyenne dans l’espace public et a créé de nombreux jardins partagés, essentiellement des potagers ou jardins mixtes, dont les régulateurs sont des jardiniers de la collectivité. Généralement, ce sont des agents de maîtrise ; ils doivent accompagner des associations, former les gens, mettre à disposition des outils et s’il y a des conflits, il a un rôle de médiateur. On observe aussi des initiatives de micro-fleurissement qui sont confiées à des comités de quartier. Un risque de dessaisissement n’est pas à exclure pour les professionnels. Le jardinier aura peut-être demain une autre fonction, il formera et il régulera, que ce soit dans le cadre de démarche citoyenne participative ou pour la gestion déléguée à des entreprises privées, dans un contexte où les collectivités n’auront plus les moyens humains et financiers de tout faire.

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3e partie : Les pratiques territoriales et la parole de professionnels Pratiques territoriales Faire face au vieillissement des agents et aux problèmes de reclassement Comment continuer à exercer un métier qu’on aime quand le vieillissement ou les accidents de service diminuent les capacités physiques ? Dans cette ville de RhôneAlpes, la directrice des espaces verts ne s’est pas résignée et a fait du reclassement au sein du service un axe de management. Serge, 49 ans, est paysagiste jardinier, il a 30 ans d’ancienneté. Après cinq ans d’activité, à l’âge de 25 ans, il a été victime d’un accident du travail. Mal tombé d’un arbre en faisant de l’élagage, sur une bordure de trottoir, il a eu la cheville broyée. Opéré plusieurs fois, une incapacité de 30 % lui a été reconnue et il souffre d’arthrose. Il a pu rester dans le service. Maintenant, il est agent de maîtrise, il fait de la tonte l’été. Mais désormais, ses problèmes de cheville empirent, une arthrodèse qui consiste à bloquer l’articulation de la cheville, est envisagée. Il ne souhaite pas changer de service. Muriel aussi a 30 ans d’ancienneté, dont 20 ans en serre, six ans en espaces verts. À la suite d’un problème de dos il y a deux ans, elle a été arrêtée 15 mois, puis a repris le travail en mi-temps thérapeutique. Les médecins ont diagnostiqué une discopathie dégénérative (rigidification et tassement des disques vertébraux). « Cela a commencé par des lumbagos avec des arrêts maladie qui se rapprochent, raconte-t-elle. Et un jour, sur un chantier, je me suis retrouvée paralysée. Je me disais que c’était normal, arrivant vers 50 ans aux espaces verts. J’espérais qu’on aurait trouvé une solution en douceur. Je n’ai pas eu le temps d’anticiper, ça a été très vite ; en deux mois, tout s’est accéléré avec une douleur permanente. J’avais pourtant eu des radios auparavant. J’étais très fière de mon métier et je ne voulais rien laisser voir. J’avais très mal pris un message de la DRH qui venait d’une observation du médecin du travail ; contre vents et marées, je luttais, c’est ma fierté qui m’a perdue. Mes collègues me soutenaient bien dans l’équipe, mais j’étais à bout physiquement. » Et de conclure : « Le plus dur pour quelqu’un qui aime son métier, qui aime l’équipe dans laquelle on travaille, c’est d’accepter qu’on n’a plus la plénitude de ses moyens. » Elle a pu rester dans le service, mais passe aujourd’hui l’essentiel de son temps de travail derrière un bureau pour de nouvelles tâches qu’elle a appris à aimer. Son collègue François, 57 ans, a été opéré d’une hernie discale à l’âge de 27 ans. Il avait eu des problèmes dus à des manutentions et au port de charges lourdes. Il estime qu’on l’a opéré trop tôt. Mais il a pu lui aussi rester dans le service. Aujourd’hui, il travaille à la coordination des travaux : « Ce qui a tout changé, c’est quand on a commencé à travailler par secteur, il y a une émulation entre les équipes, on est responsable de son secteur alors qu’avant tout le monde intervenait avec sa méthode. »

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André, 59 ans, a connu une expérience de reclassement plus difficile. En 1985, il a eu un problème de cervicales. Opéré d’une hernie discale en 1995, à partir de 2005 il n’a plus pu travailler dans les équipes de terrain, il était souvent en arrêt maladie. « Mon reclassement a été un désastre, un jour on m’a dit, tu n’es plus dans l’équipe. On m’a mis au cimetière sans explication et je ne l’ai toujours pas digéré. Enfin, je me dis que dans le privé on m’aurait viré. J’avais demandé à rester aux jardins et c’était presque le cas. » Aujourd’hui, il est webmestre et les pages Internet du service espaces verts sont un modèle du genre. Le service a aussi amélioré ses relations avec les usagers : « Dès qu’il y a une réclamation, on y répond. On prend le nom de la personne, ses coordonnées et aucune question ou demande reste sans réponse suivie. » La directrice des espaces verts, en poste depuis quatre ans, reconnaît que les reclassements étaient très mal vécus autrefois, mais pour garder les agents à l’intérieur du service, il faut avoir des postes à proposer : « Quand on a des jardiniers qui ont la capacité intellectuelle, c’est plus facile. » Pour elle, il faut aussi parler avec les agents pour anticiper les problèmes de santé, accepter que les agents soient moins forts physiquement : « Ce sont des problèmes pour les encadrants, il y a des reproches venus parfois des autres agents : n’est-ce pas un tire-au-flanc ? Il faut de la confiance avec le chef de service. » Comment permettre aux agents de vieillir en restant dans le service, quand ils aiment leur métier et leur environnement professionnel et vivraient une mutation dans un autre service municipal comme un déclassement ou une punition ? On peut d’abord commencer par adapter l’organisation du travail. « L’idéal, ce sont des équipes pas trop petites avec un second pour animer, explique François. Le mieux, c’est une équipe de six à huit personnes maximum avec une entraide possible. Dans des équipes de deux ou trois personnes, on ne peut pas se rendre service. On ne peut pas pallier les absences. Il faut aussi des équipes qui se connaissent bien, maintenant on prend les sacs à deux, autrefois le sac on le prenait tout seul, et qui connaissent bien leur territoire. Dans un quartier qu’on connaît bien, on peut améliorer les aménagements pour que le travail soit moins pénible. » L’acquisition de matériel mieux adapté et la mécanisation constituent aussi une solution pour Serge : « Ça s’est bien amélioré, on ne creuse plus à la pioche et à la pelle aujourd’hui, et les tondeuses autoportées ont des sièges plus confortables. » La directrice des espaces verts confirme que toutes ses demandes de matériels qui améliorent la sécurité et contribuent à la prévention santé sont toujours acceptées par la municipalité. Elle peut aussi compter sur le soutien du coordonnateur de sécurité qui a su diffuser une nouvelle culture de la santé au travail à toute l’administration municipale et aux élus. Ici, on gère le vieillissement des agents et les problèmes de santé au sein du service espaces verts chaque fois que c’est possible. Pour Muriel, le plus important, c’est le management du service et la confiance entre les agents, quels que soient les niveaux hiérarchiques : « Pour que ça marche, il faut un service bien soudé. » Isabelle, la directrice du service, estime que le plus important est de se parler et d’anticiper les problèmes qui peuvent survenir : « Il va falloir habituer les jeunes à

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la mobilité dans leur carrière. Je n’hésite pas à leur en parler au cours de l’entretien annuel d’évaluation. » Muriel acquiesce, elle n’avait rien dit et est allée au-delà de ses forces. Ce qui lui est arrivé doit servir d’exemple aux plus jeunes pour que cela ne se reproduise pas.

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Pratiques territoriales Un service « vitrine de la ville » qui doit être public par excellence Située aux portes sud de la Bourgogne, cette commune de 6 000 habitants qui allie patrimoine historique et industriel arbore avec fierté les deux fleurs délivrées depuis 2007 par le Conseil national des Villes et Villages fleuris, espérant chaque année décrocher la 3e qui consacrera le travail réalisé. « Plus que tout autre service, les espaces verts sont la vitrine d’une commune, la première impression qu’elle livre d’elle lorsqu’on arrive, ou que tout simplement on la traverse », affirme ainsi l’adjoint au maire en charge des bâtiments, de l’urbanisme et de la voirie à laquelle sont rattachés les espaces verts. Pas question donc d’imaginer déléguer ou externaliser cette fonction, même si cela devait être financièrement plus intéressant. « C’est un “non” éthique », tranche l’élu pour lequel seul un service municipal est à même de travailler ainsi quotidiennement au renforcement de l’image de la commune et à sa personnalisation. Cette notion forte de service au public est partagée par les agents qui ont une image très valorisée de leurs missions, avec « le sentiment de faire quelque chose d’important pour la ville et ses habitants ». Ce sentiment est encore renforcé par la reconnaissance patente que leur accordent en retour les élus ainsi que les administrés eux-mêmes, lesquels « nous parlent régulièrement dans la rue, nous critiquent ou nous félicitent, et nous demandent souvent des conseils pour leurs propres jardins. »

« Un petit monde à part » Doté d’un responsable attitré, le service des espaces verts fait partie du pôle voirie de la collectivité qui, avec le pôle bâtiments et le pôle manifestations (logistique), constituent le triptyque des services techniques municipaux. « Cette organisation associe espaces verts et voirie, car leurs interventions sur les espaces publics relèvent sensiblement des mêmes contraintes et que ces deux services les conduisent parfois de manière mutualisée sur certains chantiers, comme le déneigement par exemple », explicite l’élu en charge du secteur. Les espaces verts de la ville sont eux-mêmes divisés en deux sections : celle des brigades vertes constituée de trois personnes (deux titulaires et un contractuel, tous trois à 27 heures) dédiées à l’entretien des sentiers, berges, etc., et celle des espaces verts proprement dits, chargée de l’aménagement des espaces et de leur fleurissement où exercent dix personnes (dont un apprenti pour deux ans et un lycéen de « bac pro » en stage). La responsable de service est une ancienne adjointe technique aujourd’hui technicienne territoriale. Sous sa responsabilité sont rassemblés : un agent de maîtrise, trois adjoints techniques principaux de 1re classe, trois adjoints techniques principaux de 2e classe et un adjoint technique de 2e classe auxquels s’ajoutent un contractuel, un apprenti et un stagiaire.

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Les agents affichent tous une forte ancienneté et, pour la plupart, prennent plaisir à transmettre leur savoir. Ainsi, à 42 ans, cet agent d’entretien des espaces verts, titulaire d’un CAP horticulture/floriculture et adjoint technique principal de 1re classe, a-t-il choisi d’être depuis trois ans maître d’apprentissage, « pour le plaisir de transmettre à un jeune ». La proximité d’un lycée de l’Horticulture et du Paysage sur le territoire communal « encourage chaque année des projets partenariaux avec l’établissement et c’est un véritable rapport gagnant/gagnant à condition de le faire dans une mesure raisonnable et cadrée », précise la responsable de service. Accroupis, courbés, penchés… L’âge venant, les agents des espaces verts font partie des principales victimes des troubles musculo-squelettiques : « J’ai déjà deux hernies discales avec bec-de-perroquet reconnues comme atteintes professionnelles », explique un agent. À ses maux de dos s’ajoute aussi, comme pour nombre de collègues, un syndrome du canal carpien dû aux vibrations des engins mécaniques régulièrement employés (tailleuses…). Sans oublier les affections que connaissent tous les travailleurs d’extérieur : « Maux de gorge, bronchites, gastro… Même bien couverts, on est plus souvent fatigués que les autres. » L’usure physique est plus sensible encore pour les (rares) femmes de la filière présentes sur le terrain : « Il faut une bonne mutuelle pour couvrir toutes les séances chez le kiné et l’ostéo ! », confie l’une d’entre elles. « On tait généralement ses douleurs et quand on rentre chez soi, on est vidé, on ne pense plus qu’à aller dormir. »

Une carrière et un reclassement difficiles Du coup, difficile d’imaginer exercer le même métier jusqu’à la retraite, même avec l’évolution continue des matériels qui tend à les rendre toujours plus légers, plus maniables, plus efficaces. Aussi le management doit-il régulièrement « adapter les tâches aux personnes en fonction de leur âge et de leur condition physique », souligne la responsable du service : « Il faut jongler avec les difficultés physiques. » À terme, peut néanmoins se poser la question plus lourde d’un reclassement. Mais lequel ? « Je ne me vois pas faire autre chose, et encore moins entre quatre murs ! », déclare un agent. La reconversion n’est pas donnée à tous et dépend aussi de la « mobilité intellectuelle » de chacun. Pour celle-ci, venue aux espaces verts publics après avoir passé un CAP de paysagiste, évoluer est « une question de survie » : adjointe technique principale de 1re classe, elle prépare le concours d’agent de maîtrise et a choisi de se former pour assumer depuis deux ans et demi le rôle d’ACMO de la collectivité en plus de ses fonctions. « Néanmoins, dérouler une carrière aux espaces verts n’offre pas de multiples solutions », reconnaît la responsable des ressources humaines qui détaille : « Soit gravir les échelons pour devenir encadrant avec un rapide plafond lorsque la commune est de dimension modeste, soit changer de collectivité pour découvrir de nouvelles méthodes et, si l’organisation le permet, espérer élargir ses champs de compétences (agent et responsable de production végétale, gestion des espaces verts, etc.). » En attendant, l’absentéisme sévit, « plus marqué que dans les autres services », pointe la responsable des ressources humaines qui nuance néanmoins : « Les agents attendent généralement le dernier moment, la limite du supportable, pour s’arrêter, d’où des arrêts pas si fréquents mais généralement très longs. »

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Pratiques territoriales Conserver une expertise publique malgré l’externalisation Dans cette grande communauté d’agglomération francilienne, on a choisi depuis longtemps d’externaliser certaines tâches. « Tout ce qui n’a pas de valeur ajoutée est confié à des entreprises par marchés publics, de même que les actions pour lesquelles nous n’avons pas les compétences », explique le responsable des opérations d’entretien. Ici, on externalise par exemple la tonte, les chantiers de mise en arrosage automatique. Un prestataire privé s’occupe aussi de la maintenance et du nettoyage des aires de jeu et un autre de l’élagage des grands arbres. Dans cette communauté d’agglomération, les effectifs du service espaces verts sont donc restreints. Sur 600 agents permanents (et 900 avec les collaborateurs temporaires), une centaine est employée dans les services techniques (dont les huit piscines gérées par l’agglo), mais seule une quinzaine d’agents est affectée à la création et l’entretien des espaces verts à la régie espaces verts. Trois à quatre agents travaillent au centre horticole. Ils s’occupent tout au long de l’année de la production des fleurs qui seront plantées sur les massifs. Trois agents chargés d’exploitation sont chargés de veiller à la bonne exécution des prestations faites par les entreprises, en temps et en heure et en application la réglementation. La communauté externalise beaucoup de prestations. Les communes ont leurs propres services techniques avec des espaces verts. La communauté gère les espaces supérieurs à 6 hectares et tous les espaces verts d’accompagnement d’infrastructures de voirie notamment. L’agglomération, ancien syndicat d’agglomération nouvelle, a été conçue comme une ville parc. Conséquence : 250 ha d’accompagnement de voirie sont à entretenir sans compter les espaces naturels, les espaces boisés notamment. Les responsables de l’agglomération ont voulu redonner de la valeur au travail du jardinier agent de la collectivité. Si la communauté externalise tout ce qui ne revêt pas un intérêt particulier en interne, comme tous les travaux de tonte, en revanche le fleurissement est fait en régie. « On estime qu’il y a une plus grande technicité, un savoir-faire à ne pas perdre », explique un des cadres du service. Les travaux d’élagage sont faits en interne pour les petites interventions, mais pour les élagages en rideau, ils sont effectués par une entreprise qui a le matériel spécifique (matériel cher) et la technicité des équipes (risques accrus du fait de la hauteur, matériel tranchant…). « En matière de gestion des risques, le problème vient souvent des faits routiniers, explique le responsable de la sécurité de l’agglo. L’agent qui tronçonne depuis 30 ans n’a pas l’impression de risquer quoi que ce soit, il fait cela tous les jours, mais il ne fait plus appel à des connaissances qu’il a acquises il y a 20 ou 30 ans, il les a mises de côté et il les a oubliées. Ainsi un élagueur qui intervient sur des chantiers simples a été obligé un jour d’intervenir sur un chantier compliqué avec un arbre qui est pris dans un autre. L’agent qui n’a pas été confronté à ce problème depuis des années n’a pas forcément les bons réflexes techniques. » Fort de ce constat, la collectivité a préféré externaliser aussi les

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tâches complexes qui nécessitent une forte technicité dont on ne dispose plus en interne. Pour autant, cela n’exonère pas la responsabilité de la collectivité comme maître d’ouvrage. Les prestations extérieures se font dans le cadre de marchés publics. Dans ce cadre, les impératifs de prévention et sécurité ne sont pas négligés : « On n’est plus dans la gestion du personnel en terme de risque mais dans la gestion du prestataire. Nous avons trois agents territoriaux qui chacun pour leur partie suivent les entreprises pour veiller à ce que les prestations soient bien effectuées, en appliquant la réglementation, avec du matériel qui ne soit pas défectueux », explique un agent d’encadrement.

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Pratiques territoriales Au sein d’un office public de l’habitat : un bureau d’études espaces verts Les collectivités territoriales ne sont pas seules à gérer en direct des espaces verts publics, comme le prouve cet office départemental de l’habitat d’un département francilien. Mais, alors qu’il existe depuis 1970, cet office public départemental n’accueille un service dédié aux espaces verts que depuis le début des années 2000. À l’entretien des espaces que le service Bâtiments gère en externe depuis trois décennies, la Direction a ajouté un volet « création » afin d’améliorer le cadre de vie des habitants. Elle a souhaité aussi s’adjoindre l’expertise de « pro » (une personne d’abord, puis une seconde recrutée en 2004) pour mieux suivre la qualité des travaux engagés : « On ne transige pas avec les espaces verts, ils requièrent la réponse de spécialistes », résume une responsable. En revanche, et pour des raisons de gestion simplifiée des personnels, l’office public de l’habitat, qui emploie déjà environ 600 personnes, reconduit le choix de l’externalisation pour ce qui concerne l’exécution de ce champ d’activité. Ainsi est né le nouveau service, intitulé « Secteur Espaces Extérieurs », auquel revient donc la mission de penser, aménager et entretenir les 69 hectares d’espaces publics qui accompagnent les quelque 23 000 logements inscrits au patrimoine de l’organisme. Lesdits espaces sont composés d’espaces verts à proprement parler (pelouses stabilisées, massifs arbustifs et de vivaces, jardinières…), mais aussi de parkings, d’aires de jeux et de terrains arborés (plus de 8 000 arbres). Au total, ce sont ainsi 114 sites (cité entière ou par tranche) qu’il faut entretenir, améliorer, réaménager ou créer, et ce à raison d’environ 6 chantiers de création ou gros réaménagement par an pour des enveloppes allant de 50 000 à 200 000 euros selon les cas. Budget total du service : 1,1 million d’euros annuels pour l’entretien, 900 000 euros pour l’aménagement. Pour ce faire, le service est aujourd’hui composé de deux personnes, toutes deux architectes paysagistes recrutées en CDI sous le titre de « chargés d’opérations ». Placée sous la responsabilité de la direction technique, au même titre que les services Bâtiment, Chauffage et Ascenseurs, cette entité intervient comme un véritable bureau d’étude interne, depuis la conception des espaces extérieurs (analyse paysagère) jusqu’à la gestion de leur entretien, en passant par la constitution des dossiers d’appel d’offres, le choix des entreprises et le suivi des travaux (maîtrise d’œuvre). Dans le cas des opérations de réhabilitation lourdes (programmations de l’Agence nationale de rénovation urbaine notamment), le Secteur Espaces extérieurs est aussi sollicité en qualité d’expert interne pour valider les choix conceptuels et techniques de la maîtrise d’œuvre externe, auprès de cabinets extérieurs pluridisciplinaires (paysagistes, urbanistes, architectes...).

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L’objectif principal du service – obtenir le meilleur résultat fleuri avec le moins d’entretien possible – est à lui seul un défi professionnel et une gageure intellectuelle qui font les joies de l’exercice. « Par exemple, à l’exception des quelques jardinières existantes, aucune plantation ne doit exiger d’arrosage… Ce défi permanent associé à la richesse des missions procurent un grand plaisir, tout comme le fait de pouvoir très rapidement, en seulement quelques mois, constater le résultat du travail mené », explique la chargée d’opérations. Facilitée par l’organigramme, une collaboration est de mise chaque fois que c’est possible avec les délégations, la direction de la maîtrise d’ouvrage et les services bâtiments et chauffage, afin de « travailler en bonne intelligence lorsque des travaux sont menés sur tel ou tel site : tranchées de chauffage, etc. » Chaque projet de création ou de réaménagement est l’occasion d’un appel d’offre, tandis que les travaux réguliers d’entretien sont confiés à six entreprises principales (trois pour les espaces verts, deux pour l’élagage, une pour les aires de jeux) ayant elles aussi, en leur temps, satisfait le cahier des charges présenté par le donneur d’ordre. Moins directement concernée par les questions de sécurité que si les travaux d’exécution étaient réalisés en régie, la chargée d’opération ne reconnaît pas moins « la forte responsabilité psychologique du donneur d’ordre en ce domaine »… Et ne manque jamais de vérifier que les consignes élémentaires sont bien suivies lorsqu’elle visite un chantier. Mais, et même si aucun accident n’est à déplorer à ce jour, elle n’en évoque pas moins la nécessité « d’une plus grande vigilance encore ».

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Pratiques territoriales Ville de Paris : une solide culture de la prévention et des documents très pédagogiques La Direction des Espaces Verts et de l’Environnement (DEVE) de la Ville de Paris constitue le plus grand service territorial d’espaces verts de France. Cette direction parisienne compte environ 4 000 agents répartis en 70 métiers, dont environ 1 200 jardiniers, 700 agents d’accueil, 200 bûcherons élagueurs, 150 agents de serre pour la production et 100 fossoyeurs dans les cimetières. La DEVE est organisée en quatre grands services : Le service d’exploitation des jardins (SEJ) est en charge de tout l’entretien des parcs et jardins de la Ville de Paris, avec des jardiniers, des cantonniers et des agents d’accueil et de surveillance chargés de l’application du règlement et de la lutte contre les incivilités.  Le service de l’arbre et du bois est divisé en trois unités : Bois de Vincennes, Bois de Boulogne, et les divisions intra-muros qui s’occupent des arbres d’alignement, plantations, taille, démontage.  Le service des cimetières est intégré à la DEVE. Il emploie une centaine de fossoyeurs exposés aux TMS notamment à cause des creusements.  Un service support, le service des sciences et techniques du végétal (SSTV) regroupe les trois centres de production horticole (fleurs et arbres : 200 000 arbres par an) dont le plus important est basé à Rungis. 

Grégoire Merrheim, chef de bureau de prévention des risques professionnels à la Direction des Espaces Verts et de l’Environnement, est en poste depuis la fin 2011. Il était auparavant à la DPE (Direction de la propreté et de l’eau) où il exerçait les mêmes fonctions. Il a remplacé un collègue qui a passé plus de six ans sur le poste. Le bureau de prévention des risques professionnels compte 18 agents. Rattaché au service des ressources humaines, il est positionné dans une fonction d’assistance et conseil auprès des chefs d’établissement. La DEVE dispose d’un document unique depuis 2008 qui a donné lieu à un plan d’action voté en CHS, plan pluriannuel 2009-2013. Ce document ambitieux fait une cinquantaine de pages. Grégoire Merrheim reconnaît que l’application est plus longue que prévu. « On se fixe donc maintenant des priorités, explique le chef de bureau. On avance dans le cadre d’un cycle de programmation. En avril 2012, un programme annuel de prévention a été voté, resserré autour d’un nombre restreint d’objectifs et on est en train de mettre en œuvre ces objectifs. » La Ville de Paris a une longue et solide expérience en matière de gestion et de prévention des risques professionnels. Ainsi, la démarche sur les produits phytosanitaires a été engagée en 1991 et la collectivité a donc aujourd’hui 20 ans de recul pour en mesurer les effets positifs. Depuis 2002, une certification ISO 14001 a été mise en œuvre. Les volumes utilisés ont été réduits de façon drastique.

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Ils restent toutefois utilisés dans deux services : les cimetières et le SSTV (centre de production horticole). Dans ces services, l’utilisation des produits phytosanitaires est réservé à un pool d’applicateurs ayant bénéficié d’une formation. Au SSTV, les autres agents ont aussi eu une formation pour prendre conscience des risques et notamment de ce que sont les délais de rémanence. Sur les autres risques, des doctrines existent ou sont en cours de constitution. C’est notamment le cas des travaux en hauteur où de nombreux travaux ont été accomplis pour sécuriser les situations de travail à l’aplomb d’un vide ou sur talus. Parmi les autres dossiers traités actuellement, la DEVE a engagé une réflexion sur le véhicule utilitaire de demain. Un jardinier déplace et porte des gros équipements comme des tondeuses, charrie des déchets verts. Traditionnellement, on évacuait les déchets, alors qu’aujourd’hui on les broie et on les utilise sur place, partant du principe que ce que produit l’écosystème doit rester dans l’écosystème. Cela a aussi l’avantage de diminuer les manutentions. La collectivité a constaté qu’elle utilisait des véhicules perfectibles pour certaines charges, c’est le cas quand on charge des tonnes à eau plus lourdes que la charge utile autorisée. Les jardiniers transportent des matières qui ont des densités très diverses selon qu’elles sont sèches ou mouillées. La collectivité prépare également un guide illustré pour montrer ce qu’on a le droit de transporter et réfléchit à un véhicule utilitaire polyvalent pouvant porter de plus lourdes charges, avec un indicateur de charges, des rampes d’accès pour pousser le matériel à charger plutôt que de le porter, et avec un seuil de chargement rabaissé. Aujourd’hui, les seuils de chargement sont souvent de 1 m ou 1,10 m. Les abaisser à 60 cm permettrait de limiter la pénibilité des situations de travail du jardinier. Dernièrement, une campagne de prévention des risques routiers a été menée auprès de 260 agents en partenariat avec le service technique des transports automobiles municipaux et la GMF. Dans la continuité de cet évènement, un guide très complet et pédagogique a été produit concernant les interventions sur voirie. Tout y est détaillé dans une série de fiches illustrées reprenant tout ce qu’il faut savoir : la réglementation, la préparation des interventions, le recensement des véhicules et matériels nécessaires, les zones d’intervention soumises à une autorisation, les consignes en cas d’incident ou d’accident, l’organisation des chantiers fixes ou mobiles, les principes de la signalisation temporaire, la signalisation des chantiers temporaires côté trottoir. Ces fiches pratiques détaillent aussi les risques liés à la nature des interventions. Elles permettent aux agents de mieux organiser leurs interventions sur la voie publique, quelles que soient les conditions de travail : chantiers mobiles à vitesse constante ou arrêts fréquents de faible durée, chantiers temporaires progressant par bonds, chantiers temporaires sur rond-point. Forte de son savoir-faire en matière de prévention des risques professionnels, la DEVE constitue un centre de ressources dont les documents et productions seraient utiles et profitables pour tous les responsables territoriaux, quelle que soit la taille de leur collectivité.

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Pratiques territoriales Gilles Clément : le jardinier devient un enseignant Gilles Clément, ingénieur horticole, paysagiste, écrivain, jardinier, enseigne à l’École Nationale Supérieure du Paysage à Versailles (ENSP). Lauréat du Grand Prix du paysage (1998), il est l’auteur de réalisations contemporaines tels que le Parc André-Citroën à Paris (en collaboration avec Allain Provost, et Patrick Berger pour les serres), le Jardin du Musée du quai Branly à Paris avec Jean Nouvel. Parmi ses réalisations, on peut aussi citer le Jardin de l’École normale supérieure de Lyon ou le Parc Matisse à Euralille en collaboration avec Éric Berlin et Sylvain Flipo. En dehors de son activité de créateur de parcs, jardins, espaces publics et privés, il poursuit des travaux théoriques et pratiques à partir de trois axes de recherche : le Jardin en Mouvement, concept issu d’une pratique sur son propre jardin, appliqué à l’espace public en France et à l’étranger ; le Jardin planétaire, projet politique d’écologie humaniste, et le Tiers-Paysage, concept élaboré à l’occasion d’une analyse paysagère. Il plaide pour des jardiniers territoriaux réconciliés avec la nature. « Pendant trop longtemps, on a considéré les jardiniers comme des exécutants d’une tâche mécanique, des techniciens de surface, constate-t-il. Il faut que les jardiniers aient une formation sur la connaissance du monde vivant et de son développement dans le temps. Ils ne demandent que cela et ont toutes les compétences pour y accéder. On peut ensuite leur laisser les mains libres et prendre des initiatives pour la gestion, car tout se fait par la gestion, y compris le maintien de la biodiversité, y compris son augmentation, y compris son réglage esthétique et la scénographie. » Gilles Clément déplore des pratiques qui perdurent dans certaines collectivités : « Trop de jardiniers dans les villes n’ont que des tâches à exécuter sans avoir la possibilité pour eux de prendre une initiative ou d’avoir une intervention quelconque sur le domaine de la création, c’est-à-dire qu’ils sont dans la frustration dans une obligation de travail qui les rend “décérébrés”. Dans ce cadre, il ne reste qu’un seul domaine d’excellence où ils peuvent s’exprimer, c’est celui du fleurissement, à certaines périodes de l’année et dans certaines circonstances. Cela n’aboutit pas à des résultats esthétiques forcément réussis, mais ce n’est pas le plus important car humainement c’est là qu’ils peuvent exprimer leur sensibilité et leur créativité. Tout cela est très réduit dans l’ensemble des tâches qui leur sont assignées, essentiellement des tâches de nettoyage totalement décalées par rapport à ce qu’on pourrait voir aujourd’hui à partir des méthodes de gestion écologiques. La mutation que j’accompagne est plutôt celle de la gestion écologique où là, au contraire, on sollicite de façon claire et importante l’initiative de l’individu. » Gilles Clément promeut le jardin en mouvement, « mode de gestion, donc de conception », une gestion écologique et différenciée. Son travail se fonde sur des acquis de l’écologie, des interactions entre les êtres vivants et leur biotope, et il se poursuit par une réflexion centrée sur le rôle du jardinier par rapport à la bio-

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diversité. Il pense que le jardinier a un rôle social inédit : « Pendant deux ans, j’ai accompagné la Ville de Grenoble dans sa mutation vers une gestion écologique des espaces verts. Très conscient de l’action en cours, le service a pris la précaution de communications suffisamment nombreuses venant de la direction et des jardiniers sur le terrain auprès des populations dans leur diversité. Les résultats sont très positifs : dès qu’on explique aux gens, ils comprennent et ils acceptent. Le jardinier devient un enseignant, il apprend aux autres beaucoup de choses sur leur environnement, un environnement qu’ils méconnaissent. » Selon lui, « il faut revaloriser le rôle des jardiniers et même les payer plus correctement, car ils sont dans la communication, dans de nouvelles fonctions liées à la mutation des espaces naturels de nos territoires. » Pour le créateur du concept de Jardin planétaire, « la place des espaces verts est aussi liée à des évolutions majeures qui affectent l’environnement urbain, comme les changements de modèles économiques et la relocalisation des échanges. Ce qu’Alberto Magnaghi appelle le projet local, faire une production, ça change tout économiquement et aussi du point de vue du paysage, ça apporte des éléments de nature travaillés au sein de la ville. C’est équilibrant, dans l’urbanisme d’aujourd’hui, on arrive à intégrer l’agriculture péri-urbaine, ou même urbaine à l’intérieur du tissu urbain. Ce sont des choses dans l’air du temps depuis une vingtaine d’années et qui prennent leur dimension d’exécution seulement maintenant. » Le jardinier devient un passeur. Concernant l’exercice du métier au quotidien, Gilles Clément se montre très critique par rapport à l’externalisation : « L’externalisation de la gestion des espaces verts est une catastrophe. Je le vois sur mes propres chantiers. Les entreprises arrivent et repartent le plus vite possible parce qu’il faut être rentable. Ce sont des techniciens de surface, des nettoyeurs dangereux, ils utilisent des produits qui donnent un résultat de propreté rapide qui tue tout. Ce n’est pas cela le jardinage, il faut savoir s’attacher aux lieux. »

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Pratiques territoriales Colette Clamens, directrice du CDG 31 : un nouveau référentiel métier intégrant les problématiques de santé Le centre de gestion de Haute-Garonne est actuellement mobilisé par la préparation d’un nouveau référentiel sur les métiers territoriaux, réalisé en partenariat avec le CNFPT et quatre centres de gestion et trois villes. Ce travail est mené avec le soutien du Fonds national de prévention de la CNRACL. Dans le cadre d’une nouvelle mise à jour du Répertoire des métiers du CNFPT, Philippe Mouton, directeur de l’Observation prospective du CNFPT, a souhaité intégrer la dimension prévention dans les futures fiches métiers. Une quarantaine de métiers a été identifiée pour cet éclairage prévention et conditions de travail. Colette Clamens, directrice du centre de gestion de Haute-Garonne, a défendu ce dossier devant la commission métiers du CNO du CNFPT, avec l’ingénieur prévention du centre de gestion qui travaille sur ce thème. Une première présentation des fiches était prévue en septembre 2012. Les problématiques de santé et sécurité au travail font partie des missions optionnelles des centres de gestion, beaucoup d’entre eux ont développé des actions dans ce domaine. Le CDG 31 a déjà eu un rôle moteur dans le travail sur le Registre Unique Santé Sécurité au Travail (RUSST), initié par le Fonds national de prévention de la CNRACL. Conçu pour apporter aux collectivités territoriales de toute taille un outil de gestion centralisée de la santé et sécurité au travail, le RUSST regroupe et unifie les documents relatifs à la réglementation en matière d’hygiène, de sécurité et d’amélioration des conditions de travail. Pédagogique et pratique, il peut être utilisé par tous les acteurs de la prévention. La constitution d’un réseau de sept centres de gestion (Corrèze, Gers, Haute-Garonne, Haute-Vienne, Lot, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques) et de trois communes du Sud-Ouest (Limoges, Talence, La Teste-de-Buch) a permis de mutualiser, dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité, les compétences, les expertises ainsi que les expériences de différents CDG et villes afin de développer et d’actualiser le Registre Unique Santé et Sécurité au Travail. Le centre de gestion de Haute-Garonne a donc une expertise reconnue en matière de prévention et de sécurité. Il a mis ce service en place en 2003 avec un préventeur au moment de cette création. Aujourd’hui, le CDG 31 compte un ingénieur et quatre conseillers en prévention. Ils s’occupent de la formation des ACMO devenus assistants et conseillers de prévention, travaillent avec le CNFPT pour ces formations, et mettent en œuvre les missions de prévention et des visites de terrain conjointes entre médecins et préventeurs. Chaque conseiller en prévention est spécialisé dans un domaine (ergonomie, risques chimiques…). Le centre de gestion emploie 15 médecins, il intervient aussi dans la mise en œuvre des documents de prévention des risques professionnels, comme le DU, directement à l’échelon communal ou intercommunal.

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L’action volontariste du centre de gestion de Haute-Garonne dans le domaine de la prévention et de la santé au travail a permis d’irriguer la culture de la sécurité dans l’ensemble des collectivités territoriales, grandes et petites. Rappelons que la moitié des jardiniers travaille dans des collectivités de moins de 10 000 habitants. Dans les petites communes où les agents sont polyvalents, le centre de gestion de Haute-Garonne, qui compte 850 communes et EPCI affiliés, a donné la priorité à la maîtrise des produits phytosanitaires. Il s’appuie pour cela sur la médiatisation des problèmes sanitaires dus à ces produits dans le secteur agricole, avec les professionnels de médecine agricole. « La prise de conscience est réelle maintenant pour les élus locaux et les directions générales, mais il faut prendre garde à la complexité excessive de la réglementation », estime Colette Clamens. La Directrice rappelle aussi le rôle de l’Association des directeurs de centres de gestion, qui constitue un réseau professionnel très actif. « Nous avons depuis longtemps capitalisé le travail en matière de santé, d’autant que la vice-présidente de l’association, Pascale Cornu, directrice du centre de gestion du Bas-Rhin, est présidente de la commission santé », explique Colette Clamens, secrétaire générale adjointe de l’Association, pour qui « la promotion de cette culture de la prévention est une priorité pour les directeurs de centres de gestion. »

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4e partie : Pistes d’actions et recommandations Approfondir la culture de la sécurité et de la prévention - Arrêter l’usage des produits phytosanitaires en valorisant la démarche auprès du public

Si tous les effets des phytos sur la santé sont encore difficiles à établir clairement, ils sont cependant considérés comme sous-évalués. De nombreuses études encouragent à appliquer le principe de précaution car elles convergent vers une forte nocivité de ces produits utilisés de façon régulière et répétée, au-delà d’un contact direct lors d’un accident de manipulation par exemple. Vis-à-vis des habitants, il s’agit d’expliquer que cette démarche consiste à agir contre la pollution, en faveur de la santé des jardiniers et des usagers eux-mêmes fréquentant ces espaces. Ainsi, ce choix doit être expliqué pour faire accepter un aspect moins maîtrisé des espaces verts et des espaces urbains habituellement très minéraux (rues, routes, terrains de sport, cimetière).

- Nécessité de mutualisation pour les petites collectivités

Plus de 90 % des communes ont moins de 5 000 habitants : les petites collectivités doivent avoir la priorité pour une meilleure diffusion des politiques de prévention. Les agents sont nécessairement polyvalents et ne peuvent pas s’appuyer sur l’expertise de leur collectivité, le renforcement de la mutualisation et la création de centres ressources doivent être recherchés, à l’exemple de ce que font certains centres de gestion.

- Intégrer la dimension sécurité dès la conception des aménagements

« Il faut arrêter de faire des choses qu’on ne sait pas gérer de manière responsable du point de vue environnemental. » Cela se fait déjà dans le secteur du bâtiment, avec le dossier ultérieur d’utilisation qui oblige les concepteurs à réfléchir à l’entretien d’une façade par exemple. Cela pourrait être transposé facilement dans les procédures internes, même en l’absence de réglementation nationale : prévoir sur un vaste rond-point un petit accès pour le camion de l’équipe d’entretien, au moins pour décharger la tondeuse. « Il y a le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre, il faudrait penser au maître d’usage. »

- Disposer d’une norme de mesure sur le matériel (bruit, vibrations…)

Penser au confort d’usage : bruit, poids sont faciles à mesurer, c’est moins facile sur les vibrations mais c’est possible. Les informations sont fournies par les fabricants mais elles ne sont pas harmonisées. La mesure du bruit, par exemple, peut être faite avec le moteur au ralenti et pas à pleine puissance. Selon les fabricants, le bruit est souvent mesuré en puissance acoustique et pas en pression acoustique, le premier étant le bruit émis par la machine, le second le bruit qui parvient à l’oreille de l’opérateur. Cela dépend du temps d’exposition, mais il n’y a pas de proportionnalité. « On aurait besoin d’un laboratoire qui fasse les mesures toujours de la même façon. »

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- Laisser le choix des équipements de protection individuelle aux agents

« On n’a pas tous les mêmes pieds, les mêmes mains, il faut éviter le modèle unique. Fournir le bon matériel et donner la possibilité du choix dans une gamme de matériels. »

- Disposer d’un DU, outil informatique dynamique, facilement accessible par tous

« Le DU, on ne l’ouvre pas souvent et on n’a pas le temps de le mettre à jour, en fonction du matériel nouveau. »

- Mutualiser la documentation éparse dans un centre ressources collaboratif

« Certaines collectivités produisent des documents intéressants que nous ne connaissons pas. »

Diminuer la pénibilité de certaines tâches - Mécaniser les tâches chaque fois que possible pour éviter le port de charges

« On a acheté un élévateur, on a changé le camion pour livrer avec un hayon et cela nous a changé la vie. »

- Mieux sélectionner le matériel en intégrant des critères sanitaires

« Le matériel électrique est moins lourd, c’est aussi moins de risques chimiques, de risques d’incendie, d’exposition au bruit. »

- Créer des indicateurs de suivi sanitaire

Il serait souhaitable de disposer d’études épidémiologiques approfondies relatives à la pratique des métiers des espaces verts et des risques encourus, pouvant déboucher sur la définition d’indicateurs de gestion de ces risques.

Agir dans la gestion des ressources humaines - Valoriser la visite médicale d’aptitude comme opportunité de prévention Comme tous les agents de la FPT, les jardiniers bénéficient d’une visite médicale d’aptitude lors de leur prise de fonction. Ces visites médicales d’aptitude semblent insuffisamment différenciées selon le métier qui sera exercé par l’agent. Elles pourraient tenir compte des contraintes indiquées dans les fiches de poste pour donner des conseils de prévention. Dans le cadre de la médecine du travail, il serait souhaitable de renouveler ces visites médicales auprès des médecins de prévention pour réévaluer l’aptitude et renouveler les conseils voire les mesures de prévention, tout au long de la carrière. - Pratiquer la gestion prévisionnelle des effectifs pour orienter les seniors vers des tâches moins pénibles « Il faut parler des problèmes de santé lors des entretiens annuels d’évaluation pour anticiper. »

- Mieux former les agents à la prévention des TMS

« La formation aux gestes et postures dans notre mairie est surtout adaptée aux agents de la direction des ressources humaines. »

- Former les chefs d’équipe, manager de proximité, à la gestion des risques psychosociaux.

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- Assurer les reclassements dans le service

« J’ai toujours travaillé dehors, j’ai toujours fait un métier manuel, je ne me vois pas derrière un ordinateur à un bureau. »

- Recruter des médecins du travail car aujourd’hui trop de postes sont vacants « On a la chance d’avoir un médecin du travail qui connaît bien le personnel. On a des réunions de coordination tous les deux mois où on aborde tous les sujets et cela nous permet d’être réactifs. » « Le poste de médecin est vacant depuis huit mois et la DRH n’arrive pas à recruter. »

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Synthèse de l’étude Le service médical de la MNT a noté une forte représentation des jardiniers parmi ses bénéficiaires du régime de prévoyance ayant plus de 90 jours d’arrêts de travail sur les douze derniers mois. Aussi, l’Observatoire Social Territorial a lancé une étude qualitative sur les facteurs de risques pour la santé des jardiniers, agents de production et d’entretien des espaces verts. Elle révèle l’impressionnante mutation de leurs missions et conditions de travail. Ils sont passés d’une tâche d’embellissement du cadre de vie à l’introduction de la nature en ville.

50 000 jardiniers et une pluralité de métiers

Les jardiniers sont principalement des agents communaux et intercommunaux, auxquels s’ajoutent des agents de services techniques des conseils généraux ou d’établissements publics gérant des parcs. Le Répertoire des métiers du CNFPT classe les différents métiers de jardiniers dans la famille « Espaces verts et paysage » ainsi : responsables de production végétale, décorateurs fleuristes, jardiniers des espaces horticoles et naturels, agents de maîtrise et adjoints techniques. Ils sont près de 50 000 agents, soit 3 % des effectifs territoriaux dont très peu de femmes. 80 % sont des agents titulaires.

Une forte culture professionnelle

Jardiniers par choix et même par passion, la plupart des agents sont très attachés à leur métier, même quand ils y sont venus par hasard, au gré des mutations internes. Aujourd’hui, les agents sont généralement recrutés après une formation initiale qualifiante. Ils apprécient une certaine capacité d’initiative et d’organisation. Le travail en extérieur, le rapport à la nature et une mission gratifiante au service du cadre de vie de leurs concitoyens constituent des motifs de satisfaction. Une mutation notable est en cours dans cette culture professionnelle longtemps dominée par le fleurissement des villes et villages. Avec l’émergence de la gestion écologique ou différenciée qui autorise un entretien plus « naturel », et sous l’influence du Grenelle de l’environnement ou des agendas 21, les jardiniers deviennent des agents au service de la nature en ville, respectueux de la biodiversité. Simultanément, la profession est très attentive à la prévention et la sécurité au travail.

Une multiplicité de risques 1. Des risques d’accident de service parfois spectaculaires L’utilisation de matériels dangereux (tondeuses, tronçonneuses, rotofils, broyeurs de branches…) peut conduire à des accidents graves. La formation des agents a été orientée sur la prévention de ce type de risques, et priorité est donnée à leur protection avec les équipements de protection individuelle (EPI), vêtements et accessoires de sécurité. Les agents travaillent souvent sur la voie publique lors de chantiers, facteurs de stress et de risques. Le signalement du chantier et la visibilité des agents sont primordiaux. Des formations sont dispensées aux agents et les collectivités inter-

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viennent pour limiter les risques dès la conception des espaces verts. Les agents se déplacent avec leur matériel sur le territoire de la collectivité et sont soumis au risque d’accidents de la circulation. Beaucoup de collectivités ont fait de la sécurité routière une priorité. Les agents des services espaces verts doivent aussi veiller au poids de charge utile autorisé pour leurs véhicules, car ils transportent des matières aux densités très variables. Bien arrimer les charges doit éviter les projections sur les personnes en cas de freinage brutal. La conduite d’engins spéciaux tels que tondeuses autoportées, tracteurs, minipelles, motobasculeurs, tombereaux à moteur, nécessite aujourd’hui des certificats d’aptitude à la conduite en sécurité (CACES). Sans être élagueur, beaucoup de jardiniers sont conduits à travailler en hauteur (jardinières en hauteur, taille de haies…) et sont soumis au risque de chute ou au risque électrique, notamment lors de tailles à proximité de lignes électriques.

2. Des risques à effets différés Les jardiniers sont soumis à une série de risques à effets différés pour lesquels la prise de conscience est moins immédiate que pour les risques spectaculaires. • Le bruit. Les agents utilisant des engins bruyants ou travaillant dans le bruit de la circulation peuvent être victimes de destruction irréversible de leur capacité auditive. L’utilisation de casques anti-bruit, bouchons et filtres individuels constituent des moyens de prévention. • L’utilisation de matériels vibrants. Des outils tels que les tronçonneuses, les débroussailleuses, les souffleuses entraînent parfois un syndrome vibratoire main-bras avec des atteintes vasculaires (doigts blancs), neurologiques (engourdissements et troubles neurosensoriels) et musculo-squelettiques (douleurs, raideurs, faiblesse musculaire, etc.). Des utilisations limitées dans le temps sont recommandées pour ces matériels vibrants. • Les risques chimiques. Il s’agit essentiellement de l’utilisation des produits phytosanitaires, pesticides et produits de la famille des biocides, de plus en plus réglementée et limitée. Ces produits ont été très utilisés pour le désherbage et le bilan sanitaire des méfaits des phyto (abréviation commune pour les produits phytosanitaires) est loin d’être achevé. Un grand nombre de collectivités se sont engagées dans des démarches zéro phyto. Le CNFPT en a fait un objectif national de formation, mais les collectivités entièrement zéro phyto restent très rares. On pratique encore trop de traitements des mauvaises herbes par pulvérisation dans les cimetières, abords de voirie et équipements sportifs. Les petites collectivités sont plus en retard que les grandes. • Les risques biologiques. Les risques dus au contact avec des objets souillés (préservatifs usagés, seringues, tessons de bouteille…) ou au contact avec les animaux malades ou morts sont généralement bien circonscrits : port de gants, procédures en vue de la destruction des objets souillés, parfaite couverture vaccinale, en particulier anti-tétanique.

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• Les allergies respiratoires. Les agents des espaces verts sont sensibles aux allergies dues au pollen ou à des plantes allergènes mais globalement ils gèrent le problème en se faisant désensibiliser et en évitant les contacts avec les plantes dont ils connaissent les risques. • L’exposition aux intempéries et aux fortes variations de température. Le métier de jardinier est soumis aux contraintes climatiques, les fortes variations peuvent être préjudiciables aux agents de production dans les serres, quand les installations obligent à sortir et rentrer avec des changements de température importants.

3. Des risques plus généraux • Les TMS et les risques de posture. Les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont la première cause de risque professionnel et représente 91 % des maladies professionnelles dans les métiers des espaces verts publics et privés. Ils sont principalement dus aux efforts physiques et aux gestes répétitifs, mais aussi à l’utilisation des machines. Les TMS sont souvent négligés par les agents avant qu’ils les ressentent très douloureusement. L’ergonomie des équipements, l’apprentissage de bons gestes et postures, la rotation des tâches durant la journée de travail, l’utilisation d’outils moins lourds (remplacement des machines à moteur thermique par des machines à moteur électrique avec batterie à porter dans le dos) participent à la prévention des TMS. • Les précarités sociales et psychologiques. Les jardiniers ne sont pas à l’abri des risques psycho-sociaux (RPS). Les agents recrutés sur des critères sociaux peuvent cumuler précarités sociales et psychologiques et importent dans leur milieu de travail leurs difficultés personnelles. Illettrisme et alcoolisme n’étaient pas rares chez les anciens mais ont fortement régressé avec le recrutement d’agents motivés et bien formés. Certains agents peuvent aussi être déstabilisés par l’évolution du métier et le passage à la gestion différenciée qui leur a fait perdre leurs anciens repères. Dans certaines collectivités, la charge de travail augmente fortement avec des surfaces à entretenir plus vastes mais des effectifs constants.

L’émergence d’une nouvelle culture professionnelle 1. Le tournant de la prévention et de la sécurité au travail Le Document unique (DU). La culture de la prévention et de la sécurité au travail a beaucoup progressé depuis le début de décentralisation. Un tournant décisif a été pris en 2001 avec l’instauration du Document unique d’évaluation des risques (DU) et avec la création des agents chargés de la mise en œuvre des règles d’hygiène et de sécurité (ACMO) devenus assistants et conseiller de prévention. Le DU fait l’inventaire des risques et préconise des actions visant à les réduire, voire à les supprimer. Il conduit à mettre en œuvre un programme d’actions de prévention. Mais toutes les collectivités n’avancent pas au même rythme. Il convient de faire du DU un outil managérial pour la sécurité et la santé des agents.

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Les EPI et des outils mieux adaptés. La meilleure ergonomie des outils, la mécanisation de certaines tâches, et les équipements de protection individuels (EPI) des agents ont considérablement fait reculer les risques sanitaires et l’accidentologie. Il faut pour cela que les agents aient le réflexe d’utiliser leur EPI (vêtements de sécurité, lunettes de protection, filtres auditifs…). Les jeunes agents formés aux consignes de sécurité dès le lycée le font plus systématiquement que les plus âgés qui ont des difficultés à changer d’habitudes. Des partenaires acteurs de la sécurité. Le rôle des préventeurs et ACMO (devenus assistants et conseillers de prévention), des médecins du travail ou des ergonomes a été déterminant pour diffuser cette nouvelle culture de la prévention et de la sécurité au travail. Toutefois, actuellement, le manque de médecins du travail se fait cruellement sentir. Beaucoup de collectivités territoriales peinent à recruter et trop de postes sont vacants.

2. De nouvelles missions sur la nature en ville La gestion différenciée et écologique des espaces verts les fait passer d’un modèle horticole standard à des techniques d’entretien plus variées et respectueuses de la biodiversité et de la nature. Cela fait évoluer en profondeur le métier de jardinier dans les collectivités territoriales et conduit à d’importants changements de pratiques : recyclage des tontes, taille douce des arbres et arbustes, limitation drastique des produits phytosanitaires, expérimentation de prairies fleuries, utilisation de plantes vivaces plus robustes. Un métier choisi et aimé qui s’est renouvelé. La mise en œuvre des agendas 21 au sein des collectivités a renforcé le rôle des services espaces verts et de leurs agents, reconnus comme acteurs du développement durable de la collectivité, engagés notamment au service de la biodiversité, participant aux inventaires et au développement des trames vertes à la suite du Grenelle de l’environnement. Des rapports différents avec les habitants. Les jardiniers deviennent ambassadeurs du message de développement durable et de la nature en ville. Ils doivent expliquer l’évolution des modes de gestion. Ils peuvent aussi devenir médiateurs de la nature et formateurs des habitants dans le cadre de projets de quartier avec les habitants ou de création de jardins participatifs.

Pistes d’action et recommandations En conclusion, les pistes d’actions s’articulent autour de trois axes : - Approfondir la culture de la sécurité : en particulier dans les petites communes avec des centres ressources mutualisés, plus généralement avec un document unique facile d’accès, une prise en compte dès de la conception des espaces verts et arrêter l’usage des produits phytosanitaires. - Diminuer la pénibilité de certaines tâches grâce à un matériel adapté. - Agir dans la gestion des ressources humaines pour sensibiliser les agents aux TMS dès le recrutement et tout au long de leur carrière, former l’encadrement à la gestion des risques psycho-sociaux, et pour anticiper les fins de carrière en collaboration avec les médecins du travail.

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5e partie : Atelier de l’Observatoire Social Territorial A. Participants à l’atelier du 16 octobre 2012 Alain ANANOS, Ville de Pantin Jeanne BALLOT, MNT Thibaut BEAUTÉ, Communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise, Président de l’Association française des directeurs de jardins et espaces verts publics Pierre BERNARD, MNT Hervé BOEUF, Conseil général du Val-de-Marne Laurent BRANCHU, UNSA Territoriaux Éric BURIE, Paysage actualités François COIFFIER, Conseil général du Val-de-Marne Bruno COLLIGNON, FA-FPT Yves COSSET, MSA Marine DASSE-HARTAUT, OPH 93 Jean DUMONTEIL, Directeur Axe Image Claire EDEY-GAMASSOU, Université Paris Est Créteil Gilles ERRIEAU, MNT Laurent ESTÈVE, Ville de Paris Michel GOMEZ, Paris Habitat, association ResPECT Ange HELMRICH, UNSA Territoriaux Jean-Marc JOUSSEN, MNT Pascal KESSLER, FA-FPT Nicolas LE BOULAIRE, Meucon Jean Philippe LEFIER, Conseil général du Val-de-Marne Jean-René MOREAU, DGS SAN Ouest Provence, président de l’Observatoire Social Territorial Laëtitia PAOLAGGI, MNT Michel PASTOR Céline THIEBAULT, MNT Christine THOMAS, CSFPT Jacqueline VALENSI, MNT

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B. Débat 1. Introduction de l’atelier par Jean-René MOREAU Bienvenue à la MNT. Je suis le président de l’Observatoire Social Territorial. Je vous présente rapidement cette structure : créée dans le cadre de la MNT, elle se veut un espace de production et de connaissance sur la Fonction publique territoriale. L’Observatoire a déjà produit plusieurs études, publiées sous la forme de cahiers, mis à votre disposition. Nous avons notamment analysé la lutte contre les précarités et la gestion des fins de carrière dans la Fonction publique territoriale. Notre travail consiste donc à observer, à évaluer et à donner des pistes d’action à l’échelle territoriale, dans le domaine social et sanitaire. La santé constitue en effet le cœur de métier de la MNT qui propose une offre de complémentaire santé et prévoyance. Nous avons ainsi estimé intéressant de nous attacher aux métiers de la Fonction publique territoriale, sous le double aspect du social et de la santé. À ce titre, nous avons engagé la publication de plusieurs cahiers, déclinés en trois collections, sur les perspectives territoriales, la santé des territoriaux et les aspects managériaux. Notre but est d’assurer avec nos partenaires de l’action publique territoriale, une réflexion de qualité. Nous avons à cet effet mis en place un Conseil scientifique dont la fonction principale est l’élaboration d’orientations et de discussions, fondant les études de l’Observatoire. La MNT souhaite favoriser les échanges et la mise en réseau des acteurs de la Fonction publique territoriale autour de ces études. Voilà, en quelques mots, l’objet de l’Observatoire Social Territorial. La Mutuelle est composée de bénévoles territoriaux. Je suis moi-même directeur général d’une petite collectivité en Provence et responsable d’un Master 2 universitaire. Aujourd’hui, je suis présent au titre de la MNT et de l’Observatoire, car il m’a semblé important, en tant qu’administrateur territorial, d’engager ce type d’étude. Cette étude a été initiée par le service médical de la MNT mais a été réalisée par Jean Dumonteil qui la présentera. Auparavant, laissez-moi vous expliquer pour quelles raisons nous avons engagé ce travail. Il nous a paru important d’évoquer les risques pour la santé des jardiniers territoriaux. Cette étude cible une vaste population, puisqu’elle concerne entre 48 000 et 50 000 personnes, soit 3 % des effectifs de la Fonction publique territoriale. Les employés des services espaces verts effectuent un travail mal connu, engendrant effectivement certains risques que nous aborderons (biologiques, chimiques, musculo-squelettiques). Nous avons réalisé, dans ce cadre, une enquête qualitative auprès des personnels territoriaux.

2. Échange avec la salle Jean-René MOREAU Nous allons mener un débat et un échange qui permettront d’ajouter des éléments. Pour ma part, ayant l’expérience de la gestion d’une collectivité, j’ai quelques remarques à formuler.

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J’encourage tout d’abord vivement à la réalisation d’un document unique. Cet outil managérial, d’une part, renforce la sécurité des agents et d’autre part, permet une prise de conscience des risques par les bénéficiaires. Ce document doit être simple, lisible et accessible. Il doit être mis à la portée des agents et ne doit pas être considéré comme une procédure technocratique supplémentaire, rangée dans un classeur. Bien entendu, le DU intégral de référence doit être stocké à un endroit, mais il faut le décliner pour que les agents l’utilisent. Par ailleurs, je souhaite rappeler le rôle important que peuvent jouer les CHSCT dans le domaine de la prévention. Les représentants du personnel sont des relais et il faut savoir travailler avec eux. Je n’insiste pas sur le rôle capital du médecin du travail dans les collectivités. J’ai la chance de bénéficier de la présence d’un médecin et de plusieurs ACMO. Certes, ces postes représentent un certain coût financier. Pourtant, dans le contexte de raréfaction des ressources publiques, la mise en place d’un médecin de prévention, d’ACMO, d’assistants ou de conseillers de prévention permet un véritable gain dans le bien-être des agents. De plus, ils permettent d’éviter des inconvénients : accidents de travail, maladies professionnelles, maladies circonstancielles ou « diplomatiques ». Cette dimension est fondamentale dans le management d’une collectivité. Il existe un autre aspect très motivant dans les services espaces verts. Je prends l’exemple de Caen où les agents pratiquent l’élevage de coccinelles, mises à disposition des habitants dans une démarche écologique. Les agents deviennent éco-jardiniers. J’ai aussi mis en place des initiatives similaires et j’ai créé un poste d’agent écologique dans ma collectivité. Nous avons choisi une culture particulière, propice au climat sec de la région. Afin de conserver l’humidité dans les jardins et d’aérer les terrains, nous avons entrepris d’élever des lombrics. Nous disposons également de nombreux hectares de forêt et de pinède. Nous y avons planté des graines et créé des espaces florifères. Nous avons, de plus, installé des ruches, avec des abeilles qui produisent du miel sur le territoire. Ce fonctionnement permet de préserver et de développer des espaces naturels et il est également très motivant pour les agents. Nous avons justement employé des personnels reclassés qui ne pouvaient plus continuer à exercer certaines tâches trop physiques. Voilà quelques pistes simples que je livre à votre réflexion. J’ai d’ailleurs envie de reprendre et de compléter la formule de Candide : il faut savoir cultiver son jardin, avec une vision globale de la connaissance du vivant, animal et humain, mais aussi végétal. Jean DUMONTEIL Le but de l’atelier est vraiment d’échanger et de débattre. Nous vous avons livré notre étude et nos retours du terrain, à la rencontre des professionnels et des personnes ressources. Au-delà des recommandations que nous proposons, nous pouvons progresser ensemble, en mettant en lumière les points qui vous intéressent. Hervé BOEUF Je travaille à la direction des espaces verts et du paysage du Conseil général du Val-

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de-Marne. Votre exposé m’a semblé intéressant. J’ai répondu à votre invitation car j’ai apprécié votre initiative qui explore notre cœur de métier, celui des jardiniers. Je vous remercie de cette étude qui nous correspond réellement. Vous avez choisi de montrer que le métier de jardinier est en mutation. À mon avis, pour accompagner cette évolution, il est essentiel de rester proche du terrain, de sensibiliser les personnes, de prendre le temps d’expliquer. Par exemple, il est possible d’organiser des formations adaptées pour connaître les plantes indigènes et invasives, savoir lorsqu’il faut désherber ou non. À raison d’une formation par an, il faut accepter de prendre le temps nécessaire. En revanche, je repère des points d’amélioration. En ce qui concerne la santé des agents et la visite médicale d’aptitude, nous rencontrons un véritable problème. Ces visites sont effectuées chez nous par des médecins assermentés. Les agents nous indiquent que les questions restent peu approfondies. Or, eu égard à la précarité sur le marché du travail, les candidats ne révèlent pas forcément leurs troubles ou pathologies pour ne pas risquer de perdre une opportunité d’emploi. Par exemple, nous avons recruté une jardinière dotée d’une prothèse mammaire. Au bout de six mois, cette personne a dû être reclassée. Certes, elle a trouvé sa place au sein de la collectivité, mais j’estime qu’elle a mis sa santé en danger. En outre, les mutations d’agents liées à une invalidité, d’une collectivité à l’autre sont examinées par des comités médicaux, mais nous ne disposons pas du passé médical des personnes. Ces éléments ne sont pas tellement importants pour le choix d’un agent, mais afin de mieux gérer nos personnels, nous avons besoin de connaître leurs difficultés potentielles. Nous n’avons pas forcément envie de prendre en charge des problèmes supplémentaires. Lorsque nous ignorons certains éléments, nous nous retrouvons malheureusement exposés à des complications majeures. Ainsi, nous avons recruté depuis trois ans un agent qui n’a passé que deux semaines à son poste. Il venait d’une autre collectivité. J’ai bien conscience que ces situations sont compliquées et je ne sais pas s’il est possible d’apporter une réponse. Dr Gilles ERRIEAU Je suis médecin au service médical de la MNT. Nous partageons parfaitement cette préoccupation, d’autant plus que nous disposons de parcours professionnels variés et que nous avons été régulièrement confrontés à la question de l’aptitude. Vous êtes familiers du statut de la Fonction publique, vous savez donc que la visite médicale d’aptitude est une étape plus juridique que médicale. À tort, certainement, puisqu’il s’agit d’un moment privilégié pour effectuer des bilans médicaux approfondis. Il est également nécessaire que le médecin qui conduit la visite dispose de la fiche de poste de l’agent. Or ce n’est en général pas le cas. La visite médicale d’aptitude constitue donc certainement un temps utile de recherche des facteurs de fragilité, qui ne sont pas rédhibitoires pour l’exercice de cette catégorie de métiers. De plus, elle peut permettre de définir des éléments de prévention individuels qui s’articuleront dans le temps.

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L’année dernière, lorsque nous avons réalisé l’étude sur les auxiliaires de puériculture, j’avais lancé de façon originale l’idée suivante : inscrire dans le « contrat de travail » le droit à trois fois une demi-heure de piscine par semaine. Cela constituait une mesure de prévention pour la santé. Dr Laëtitia PAOLAGGI J’adhère totalement à tes propos sur le rôle de la médecine de prévention. J’estime qu’il est fondamental que les médecins disposent de fiches de postes très descriptives, voire qu’ils puissent se déplacer. À la MNT, nous aidons beaucoup les personnes à reprendre leur travail dans de bonnes conditions. Nous avons des procédures très précises à suivre. Malheureusement, bien souvent les descriptions de postes ne sont pas faites et les médecins ne se déplacent pas. Parfois, les ressources humaines ne sont même pas au courant du travail qu’effectuent les agents. Cette situation n’est pas normale. Dr Jacqueline VALENSI Je participe à vos travaux depuis plusieurs années et je suis médecin du travail. J’ai exercé dans une collectivité, laquelle a fonctionné pendant deux ans sans médecin du travail, faute de candidat à ce poste. En l’absence de médecin du travail, nous demandions un certificat d’un médecin assermenté. Sur place, j’avais déjà du mal à obtenir une fiche de poste. Pour les médecins assermentés, c’est encore plus complexe. Lorsque j’étais généraliste, je ne pouvais pas connaître tous les détails d’un poste pour lequel je devais déclarer une personne apte. Jean DUMONTEIL Je constate qu’il faut progresser sur la visite médicale d’aptitude. Peut-être à cet égard convient-il d’impliquer davantage les responsables des ressources humaines. Dr Jacqueline VALENSI Il existe une autre difficulté. Lorsque des personnes ont connu le chômage sur une longue durée, elles ont tellement peur de ne pas décrocher un poste qu’elles dissimulent des informations. Pour ma part, pendant une visite d’aptitude, je fais déshabiller complètement la personne, pour l’examiner de la tête aux pieds. Je regarde son dossier et en cas de problème, je réalise un interrogatoire détaillé. En général, mes interlocuteurs minimisent les incidents. Ce n’est pas parce qu’elle est dotée d’une histoire médicale que je déclarerai une personne forcément inapte, mais il faut être attentif aux conditions de travail. Globalement, je trouve que votre étude est très complète et tout à fait remarquable, mais je ne suis pas d’accord avec quelques points. Depuis seize ans que je travaille à la MNT, j’ai examiné de nombreux dossiers de jardiniers. Fréquemment, ces agents avaient un niveau d’études peu élevé. J’ai relevé une citation de Gaëlle Aggéri : « Faire du beau est gratifiant et valorisant. » C’est particulièrement vrai pour ces personnels, dont certains sont marqués par une véritable fragilité psychologique. Ces missions constituent une véritable rédemption. Il en est de même avec les jardins thérapeutiques dans certains hôpitaux de jour. De plus, l’insertion professionnelle des handicapés est aujourd’hui devenue une cause nationale. Je ne suis donc pas favorable à la déclaration lue en page 16 :

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« On n’embauche plus que des gens qui ont des diplômes. » Ce positionnement me semble très discutable. Je n’affirme pas qu’il ne faut pas recruter avec un haut niveau de qualification, mais j’estime qu’il faut laisser la possibilité à des personnes moins diplômées, voire rejetées par le marché du travail, d’exercer une activité épanouissante car produisant du beau. Jean DUMONTEIL Nous avons rencontré des collectivités avec des cultures de l’insertion professionnelle et de la responsabilité sociale assez hétérogènes. Aujourd’hui, il est plus difficile d’embaucher. Ainsi, certains responsables de services préfèrent recruter avec un plus haut niveau de compétences, avec moins d’effectifs et davantage d’efficacité. D’autres élus préfèrent fixer des objectifs de recrutements sociaux et diversifier les modes d’insertion. Par ailleurs, je n’ai pas précisé dans l’étude un élément qui ne concerne pas directement les jardiniers : certaines collectivités confient certaines tâches à des ESAT (établissements et services d’aide par le travail) ou à des associations du monde du handicap, notamment pour répondre à des critères de quotas. Cette démarche est très positive pour chacune des parties. Dr Jacqueline VALENSI C’est capital, car les personnes employées sont particulièrement épanouies dans leur activité. Jean-René MOREAU Il est possible de créer des associations d’insertion. Nous recrutons, sur mon territoire par exemple, des personnes sur des critères particuliers. Les collectivités ont également la possibilité, dans le cadre des marchés publics, d’introduire des clauses obligatoires d’insertion pour recruter certains profils dans des domaines définis. Or cette recommandation n’est pas assez suivie, alors qu’elle est souvent obligatoire dans les cahiers des charges. Par ailleurs, je reviens sur le développement d’espaces florifères que nous avons entrepris dans ma collectivité. Nous avons reconverti et qualifié nos agents, marqués par des difficultés psychologiques ou physiques, pour l’élevage d’abeilles. Ce sont deux personnes, bientôt trois, que nous avons ainsi reclassées. Œuvrant dans une activité simple mais très visible, elles se sentent extrêmement gratifiées. Qui plus est, cette initiative n’engendre pas un coût supplémentaire pour la collectivité, puisque ces agents sont déjà employés chez nous. Ainsi, il est tout à fait possible d’employer les agents avec un handicap à des tâches utiles et qui leur permettront de révéler leur potentiel. Je répète que nous pouvons progresser avec des initiatives simples. En plus, dans le milieu des espaces verts, il est possible d’étudier des adaptations. Dr Yves COSSET Je suis médecin du travail à la Caisse centrale de la MSA. Je n’interviens plus sur le terrain. Je vous remercie de votre invitation et de la qualité de votre travail. Comme l’ont déjà souligné les intervenants précédents, nous nous retrouvons vraiment dans cette étude.

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J’ai néanmoins quelques critiques à apporter. Tout d’abord, vous n’avez pas assez approfondi le risque d’agression. Depuis quelques années, nous constatons une recrudescence de comportements hostiles envers nos personnels et nos jardiniers, notamment dans les quartiers difficiles des grandes agglomérations. Ces situations entraînent des risques psychosociaux délétères, par exemple lorsque les agents trouvent au retour de leur pause leur travail dégradé ou leur cabane de chantier taguée par les riverains. Ce risque est en train de monter en puissance. Je me permets de souligner que vous n’avez pas développé un aspect relatif à l’hygiène de vie au travail. Les jardiniers manipulent la terre qui contient un certain nombre d’éléments souillés que vous avez présentés. Ils ne disposent pas toujours d’un point d’eau à disposition pour se rincer les mains. Normalement, ils embarquent dans leur camionnette un bidon d’eau claire à cet effet. En termes d’hygiène, l’hydratation au poste de travail constitue également un élément essentiel. En ce qui concerne vos préconisations, j’apprécie beaucoup que vous ayez abordé les formations. Il faut absolument développer la collaboration avec les ESAT et les travailleurs handicapés. D’un côté, je suis favorable à la prévention, mais de l’autre, soyons attentifs à ne pas créer de nouveaux risques. Par exemple, vous recommandez l’utilisation d’outils électriques qui comportent un danger d’électrocution. À cet égard, le document unique est capital. Jean DUMONTEIL Je donne la parole à Thibault BEAUTÉ, et je remercie vivement les administrateurs de son association, qui nous ont consacré du temps et grâce à qui nous avons pu rencontrer des agents de catégories C. Thibault BEAUTÉ Je suis en effet président de l’association des responsables d’espaces verts. Je précise que notre association vient de changer de nom pour « Hortis », à la suite du colloque de Strasbourg. Votre présentation est très intéressante et nous nous retrouvons parfaitement dans vos observations et vos conclusions. Je remercie l’Observatoire de la MNT et Jean Dumonteil de cet excellent travail. Je vous apporte mon témoignage. Le métier de jardinier est en pleine mutation et doit faire face à des évolutions de société. Ainsi ai-je beaucoup apprécié la mention des problématiques relationnelles avec la population locale. Certes, vous avez pointé certains aspects négatifs, mais il existe aussi des côtés très positifs dans cette évolution, et notamment la demande participative. Nous avons justement ciblé notre colloque sur les initiatives éco-citoyennes liées à la pratique du jardinage. Aujourd’hui, cette activité n’est plus du tout le domaine réservé des jardiniers. Comme l’a souligné Jean-René Moreau, le jardinage est devenu un facteur de lien social et d’intégration, mais aussi de santé, via par exemple les jardins thérapeutiques dans les hôpitaux psychiatriques. Il est avéré par plusieurs études nord-américaines que le travail du végétal constitue un élément important pour la santé. Par exemple, les malades placés dans des chambres donnant sur un parc se rétablissent plus rapidement que ceux dont les chambres ouvrent sur une cour intérieure. Il existe donc un lien primordial entre la nature, le paysage et la santé.

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Facteur de santé, le jardinage est également caractérisé par une demande participative croissante, auxquels les jardiniers sont équipés pour répondre. Jadis, les rôles étaient bien séparés entre les sachants et les bénéficiaires. Les uns donnaient à voir aux autres. Aujourd’hui, les espaces verts sont considérés comme des lieux à vivre. Les habitants veulent participer à la vie des espaces publics. Des initiatives se développent, en France comme à l’étranger : jardins partagés dans les cours d’immeubles, insertion sociale, etc. Par exemple, une commune en difficulté a créé une régie de production légumière pour la Banque alimentaire, avec des emplois d’insertion. La profession doit faire face à cette évolution. Nous demandons également à nos entreprises partenaires d’associer la population à ce travail de proximité. Dans les quartiers, les jeunes au chômage proposent souvent d’effectuer certaines missions à la place de prestataires extérieurs. Les jardiniers sont dorénavant dotés d’une mission pédagogique. En ce qui concerne la santé au travail, notre association travaille avec la chaire de psychologie au travail du Conservatoire national des arts et métiers, sur la relation avec la qualité du travail. Jardinier, c’est une profession de passionnés. Les dégradations ou les mauvaises conditions de travail sont source de stress intense. Eu égard à la période de crise actuelle, les collectivités ont aussi tendance à réduire les moyens et l’attention apportés à ces missions. Nos jardiniers vivent de plus en plus mal cette situation. Jeanne BALLOT Je suis l’animatrice de l’Observatoire Social Territorial. J’ai suivi le travail de Jean Dumonteil au cours des derniers mois. Il me semble que la mise en place du zéro phyto est bénéfique pour la santé puisqu’elle diminue notamment le risque de cancer, mais peut-être fait-elle resurgir la pénibilité des tâches. Pour compenser la baisse d’utilisation de produits chimiques, il faut travailler de façon plus physique. Un équipement adapté peut permettre de diminuer cette pénibilité physique, de même qu’un travail sur les postures. J’interroge donc Jean Dumonteil et les professionnels présents dans la salle : les jardiniers sont-ils réceptifs à cette prévention sur les gestes et postures ? Au cours de l’étude sur les auxiliaires de puériculture, nous avons constaté que les maux étaient pris en compte alors qu’ils étaient déjà installés et pas forcément dans la pratique quotidienne. Cette forme de prévention à base de gestes et postures estelle bien intégrée ou doit-elle encore être approfondie ? Dr Yves COSSET Avant de vous répondre, je réagis à vos propos sur le phytosanitaire. Tous les produits ne sont heureusement pas cancérigènes. Leurs effets sont différés et il faut faire très attention aux déclarations sur ce sujet. Par ailleurs, l’abandon des produits phytosanitaires dépend réellement d’un phénomène de société. Acceptez-vous des brins d’herbe au pied des arbres, dans les chemins goudronnés ou dans les allées ? Nous sommes habitués à un environnement net, mais une évolution s’est amorcée. Par exemple, certains jardins com-

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prennent des espaces d’herbes folles, avec des insectes, ce qui n’était pas acceptable voilà quelques années. En ce qui concerne les troubles musculo-squelettiques et les positions de travail, des formations sont nécessaires. Nous intervenons dès la formation initiale pour habituer les jeunes aux bons gestes et postures. Il faut ensuite répéter ces formations en permanence et fournir des outils adaptés. J’insiste : l’outil doit être adapté à l’homme et non l’inverse pour résoudre le problème des TMS, première source de maladies professionnelles dans le régime agricole. La prévention commence dès l’école. Qui plus est, l’échauffement avant la prise de poste et les étirements postérieurs devraient devenir un réflexe systématique. Nous travaillons sur ce sujet avec les élagueurs. La Ministre de la Santé souhaite que les entreprises mettent à disposition de leurs employés des salles consacrées à la gymnastique et au repos musculaire. Les ouvriers et les jardiniers exercent pour la plupart une activité sportive de haut niveau. Par exemple, il est impératif de s’échauffer avant de manipuler une lourde charge, comme une série de tondeuses de 50 kilogrammes, sous peine de blessures physiques. Cette prévention s’effectue au quotidien, sur le long terme, avec les employeurs, avec les collectivités et nécessite des moyens. Michel GOMEZ Je suis ergonome et administrateur de l’association des ergonomes et préventeurs territoriaux. À la suite du questionnement de Jeanne Ballot, je souhaite savoir si vous classez la fonction de jardinier parmi les métiers pénibles, et selon quels critères. Nous avons également évoqué l’importance des médecins du travail. Pourquoi observons-nous une raréfaction de ces postes ? Les collectivités, notamment les petites, n’ont-elles plus les moyens de les embaucher ? Enfin, vous n’avez pas beaucoup développé le rôle des ergonomes, qui ont pourtant un véritable rôle à jouer pour les métiers considérés comme pénibles. Pourquoi cette dimension n’a-t-elle pas été abordée ? Jean DUMONTEIL Le rôle des ergonomes et des préventeurs est abordé dans l’étude. Nous avons recueilli des témoignages de collectivités qui sont vraiment enrichissants. Jean-René MOREAU En ce qui concerne nos métiers, nous ne disposons pas de notions reconnues évaluant la pénibilité au travail. Le terme est employé mais n’est pas assez encadré. Nous avons des difficultés à déterminer ce qui est pénible et ce qui ne l’est pas. Cela paraît aberrant, mais c’est le cas. Nous devons donc fournir un gros travail sur ce sujet. Je précise par ailleurs qu’il existe des risques à spécificité territoriale, par exemple liés à l’épidémiologie. Je donne un exemple concret. Une partie du territoire de

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mon intercommunalité est située en Camargue. Depuis une période récente, nous connaissons une prolifération de moustiques-tigres. Les traitements biologiques, pour détruire les œufs, coûtent 1,2 million d’euros par an aux collectivités territoriales. Les agents qui travaillent dans ces zones sont exposés à des risques particuliers et nous les protégeons grâce à des mesures prophylactiques. Ainsi, nous sommes exposés dans le Midi à des évolutions épidémiologiques problématiques. Nous avons longuement évoqué les plantes. Aux États-Unis et au Canada, des jardiniers en retraite interviennent bénévolement dans les écoles ou dans les collectivités sur la phytothérapie. Le but n’est pas seulement le soin par les plantes, efficace dans certains cas, mais le contact avec les éléments végétaux. Des publications à destination des enfants sont produites avec ces jardiniers, avec des professionnels, pour réapprendre le contact avec le monde végétal. Ce rôle peut être important pour les seniors dans nos collectivités. Qui plus est, dans certains cas, nos agents accompagnent, à titre de conseil, les personnes qui travaillent dans les jardins ouvriers. Thibault BEAUTÉ est certainement familier de ce sujet. Il existe ainsi plusieurs activités, hors de notre sphère professionnelle habituelle, qui font connaître le métier de jardinier et apportent à nos personnels de la reconnaissance, dimension essentielle dans le bien-être au travail. Jean DUMONTEIL Nous n’avons pas répondu à la question sur les méthodes de désherbage alternatives à l’emploi de produits phytosanitaires. Thibault BEAUTÉ Je souhaite revenir sur la pénibilité. Pour citer un proverbe terrien : « Qui veut aller loin ménage sa monture. » Un élagueur grimpeur est un sportif de haut niveau, comme l’a souligné un intervenant précédent. Or les sportifs ont en général des carrières courtes. C’est pourquoi il faut penser à l’adaptation des postes tout au long de la vie professionnelle. Certaines tâches ne peuvent plus être assurées après 50 ans, car elles deviennent très pénibles. La pénibilité est relative. Elle est surtout liée au bien-être mental. Je connais l’exemple d’une régie de collecte des ordures ménagères. À 40 ou 45 ans, les employés sont « cassés », pour reprendre un terme déjà cité. La majorité des personnels a demandé une mutation aux espaces verts, où les tâches sont pourtant perçues comme pénibles. C’est que nos métiers possèdent une relation particulière avec le paysage et avec le vivant. Par ailleurs, je remercie Jean Dumonteil d’avoir cité mon propos sur le sens de l’action publique. Je vais répondre à la question au sujet de la démarche éco-phyto. Je rappelle que le plan éco-phyto 2018 avait pour objectif la réduction de moitié de l’utilisation des produits phytosanitaires en France, sur 10 ans, jusqu’à 2018. Cet objectif ne sera pas atteint, d’autant plus que nous avons augmenté cette consommation de 3 % l’année dernière. Les acteurs publics et les particuliers ont réduit leur part, tandis que les professionnels l’ont accrue.

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Nous avons été scientistes par le passé et avons fait confiance aveuglément aux produits phytosanitaires, parce que nous avons perdu le sens de l’action publique. Nous avons poursuivi la tendance hygiéniste du XIXe siècle, où les espaces publics devaient être propres. C’est pourquoi, par exemple, les jardiniers tondaient le gazon à ras en toute saison, mais ils avaient perdu le sens, la finalité de leur action. À cet égard, la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires n’a pas provoqué selon moi davantage de difficultés dans nos métiers. En réalité, c’est notre manière d’agir et de concevoir nos espaces publics qui a changé. Pour reprendre les propos d’un autre intervenant, il faut adapter les moyens à l’homme, et non l’inverse. Ainsi, nous pourrons améliorer la situation de nos jardiniers. Il convient donc de reconcevoir un espace si nous ne savons pas l’entretenir. Je suis tout à fait défenseur du maître d’usage. Les paysagistes devraient présenter leurs projets devant nos régies, devant ceux qui les géreront par la suite. Les personnels de terrain connaissent les risques et les écueils à signaler. Il ne faut pas hésiter à leur donner la parole, afin de co-construire l’espace public, dans l’intérêt de l’ensemble des usages. Nicolas LE BOULAIRE Je suis jardinier dans une petite collectivité. Je souhaite intervenir à propos de la démarche zéro phyto. De nombreuses communes sont aujourd’hui fières de détenir ce trophée. Pourtant, les produits phytosanitaires ne comprennent pas seulement les désherbants mais aussi les fongicides. Beaucoup de communes récompensées utilisent encore des fongicides, notamment pour préserver les plantes annuelles. Nous avons grandement diminué notre consommation de désherbants, par exemple pour les terrains de football, grâce à des méthodes alternatives, comme l’aération des surfaces. Il me semble que pour soutenir cette démarche, les solutions sont simples et souvent peu onéreuses pour les communes. Par exemple, il faut utiliser dans les massifs des plantes vivaces, ne nécessitant pas un désherbage constant. En ce qui concerne les EPI, cet investissement dépend d’une volonté des élus de sécuriser les agents. Nous sommes trois agents dans les services techniques de ma collectivité et je suis seul aux espaces verts. Nous sommes tous équipés de bouchons auditifs individuels. Cette initiative représente un coût de 100 euros, mais j’estime que la sécurité n’a pas de prix. La commune va aussi s’équiper d’un souffleur à feuilles électrique, avec une batterie au lithium. En termes de confort de travail, cet appareil est incomparable, que ce soit au niveau du bruit ou de la charge dans le dos. Ainsi, même étant une petite commune, nous arrivons à nous équiper en matériel performant et sécurisant. Jean DUMONTEIL Merci de ce témoignage. Vous nous avez expliqué au cours de l’enquête que vos élus étaient toujours réceptifs lorsqu’il s’agissait de contribuer à la sécurité des agents. Les élus sont bien conscients de leur responsabilité, bien que je ne les aie pas beaucoup cités dans cette étude sur les mutations de la culture de la sécurité.

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Nicolas LE BOULAIRE Effectivement, il est important que les élus nous écoutent. Parfois, ils ne sont pas assez sensibles aux problématiques de sécurité. Nous devons leur expliquer que tel matériel permettra d’éviter tel problème, d’où l’importance d’une bonne évaluation des risques, dans le document unique notamment. Dans ma commune, le préventeur est le centre de gestion et nous disposons aussi d’un ACMO, le secrétaire de Mairie. Jean DUMONTEIL Le rôle des centres de gestion pour les petites communes est essentiel. Nicolas LE BOULAIRE Tout à fait. C’est moi-même qui ai initié la demande de bouchons auditifs, car j’avais mal aux oreilles au bout de deux heures avec un casque. Le travail devenait réellement pénible. Nous avons porté le projet devant le secrétaire de Mairie, puis devant les préventeurs et le médecin du travail qui nous ont appuyés. Les élus ont accepté notre requête, car ils ont compris la gêne ressentie dans le déroulement de mon travail. Laurent ESTÈVE J’appartiens au bureau de prévention des risques professionnels de la direction des espaces verts et de l’environnement à la Ville de Paris. Je souhaite apporter mon témoignage sur les évolutions du métier en matière de prévention. Du fait des mutations dans les techniques culturales, de la pression sociale, de la suppression des produits phytosanitaires, les services de prévention connaissent des évolutions permanentes. Nous nous attachons ainsi beaucoup aux gestes et postures. Autre exemple : avec la mise en place de toitures ou de murs végétalisés, nous constatons un retour du risque de travail en hauteur, avec des contraintes particulières. Grâce aux retours de terrain, nous adaptons nos actions de prévention afin que les nouvelles conditions de travail ne génèrent pas d’autres risques plus complexes. Michel GOMEZ Votre étude indique que les pratiques addictives sont en diminution dans la nouvelle génération. Or il s’agit d’un métier isolé et nous savons très bien que l’isolement peut facilement mener à des déviances. Peut-être votre conclusion est-elle le fait de quelques communes ayant embauché des jeunes dont le travail se passe bien. Il serait intéressant d’étudier ce phénomène dans le temps. Enfin, une remarque sémantique : les préventeurs sont plutôt des hygiénistes, tandis que les ergonomes sont qualifiés pour étudier la pénibilité des tâches. Les fonctions sont différentes. Jean DUMONTEIL Cette précision était effectivement utile. En ce qui concerne les addictions, nous avons relaté les témoignages recueillis sur le terrain. Apparemment, l’alcoolisme a beaucoup régressé en une génération. Quant à la toxicomanie, peut-être nos interlocuteurs n’ont-ils pas souhaité l’aborder, mais je n’ai eu l’impression ni d’une prévalence ni d’une omerta sur ce sujet.

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Dr Yves COSSET Je ne partage pas tout à fait votre conclusion en ce qui concerne l’alcool. Certes, nous avons constaté une diminution de la consommation dans le monde agricole au cours des décennies précédentes, mais la tendance remonte un peu. Quant aux addictions, n’oublions pas le tabac et les médicaments. Les jeunes consomment de plus en plus de psychotropes à cause du stress et des angoisses, ce qui peut poser des problèmes en raison des horaires de travail. Par exemple, il existe un risque d’accident si une personne a pris un cachet à deux heures du matin et se lève à cinq heures pour se rendre en deux roues sur son lieu de travail. Concernant les drogues, les élagueurs m’expliquaient auparavant qu’ils prenaient un « petit coup de gnôle » pour se donner du courage. Aujourd’hui, les jeunes adoptent la « fumette ». À mon avis, l’omerta existe. Voici un dernier exemple : un directeur d’établissement agricole m’a raconté qu’il avait découvert parmi ses plants de vigne des plants aux feuilles particulières, amoureusement entretenus par les étudiants. J’estime également qu’il serait intéressant d’étudier ce phénomène. Jean-René MOREAU En l’absence d’autres interventions, je conclus cet atelier. Je remercie Jean Dumonteil et toutes les personnes qui ont répondu à nos sollicitations au cours de cette étude. Merci à tous de votre présence et de la qualité des échanges que nous avons eus. Le dialogue et la convivialité sont certainement les meilleures drogues que nous puissions consommer. Il est essentiel de pouvoir débattre, sans ambages, sans tabou. Cette étude collective était importante. Pour notre Mutuelle, la solidarité n’est pas un vain mot. Travailler sur la prévention et l’accompagnement de nos agents, dans plusieurs domaines, est essentiel. Nous continuerons cette démarche. Merci encore de votre écoute et de votre participation. J’espère vous retrouver bientôt dans le cadre de nos activités.

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Annexe 1 : Bibliographie et documentation Statistiques et statut - Le Répertoire des métiers (Centre national de la fonction publique territoriale). Douze fiches sur les métiers de la famille Espaces verts et paysages www.cnfpt.fr - La prise en compte du développement durable dans les espaces verts. Dossier de la revue Territoriales éditée par le CNFPT (n° 204, décembre 2009)

Sécurité et prévention - Le Registre Unique Santé Sécurité au Travail (RUSST). Conçu pour apporter aux collectivités territoriales de toute taille un outil de gestion centralisée de la santé et sécurité au travail, le RUSST regroupe et unifie les documents relatifs à la réglementation en matière d’hygiène, de sécurité et d’amélioration des conditions de travail. Sept centres de gestion (Corrèze, Gers, Haute-Garonne, Haute-Vienne, Lot, Lot et Garonne, Pyrénées-Atlantiques) et trois communes du Sud-Ouest (Limoges, Talence, La-Teste-de-Buch) ont travaillé en réseau pour mutualiser dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité, les compétences, les expertises ainsi que les expériences de différents CDG et villes afin de développer et actualiser ce document. La réalisation de ce projet a été soutenue par le Fonds national de prévention (Caisse des dépôts). Version 2011 du RUSST. https://outils.cdc.retraites.fr/cnracl/fnp/russt/index.html - MSA Évaluation des Risques Professionnels : horticulture et pépinières Le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels est obligatoire pour toutes les entreprises employant du personnel, quel que soit son statut (CDI, CDD, saisonnier, intérimaire...). La MSA (Mutualité sociale agricole) Provence-Azur et Alpes-Vaucluse en partenariat avec la Fédération Nationale des Producteurs de l’Horticulture et des Pépinières ont conçu un document d’aide à la réalisation de l’évaluation des risques, propre aux entreprises horticoles et pépinières. La lecture peut en être utile aux responsables territoriaux. Dans la méthode présentée, il est proposé de découper l’entreprise en plusieurs unités de travail, c’est-à-dire des ensembles regroupant des salariés exposés à des risques similaires ou à des conditions homogènes d’exposition aux risques professionnels. Pour chacune de ces unités de travail, des situations dangereuses ont été identifiées, ainsi que leurs conséquences éventuelles et des pistes de solutions pour y remédier. Enfin, le document propose un exemple de grille pour la présentation du document unique d’évaluation des risques. Parmi les documents de la MSA destinés aux employeurs privés et à leurs salariés, mais dont la présentation très pédagogique ne manquera pas d’intéresser les responsables publics, signalons le Guide d’accueil du salarié, santé, sécurité au travail, destiné aux entreprises du paysage.

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Autres sources MSA avec des fiches documentaires : http://references-sante-securite.msa.fr/front/id/SST/S_Des-outils--sante-et--securite/S_ TRANSFORMATION-ET-SERVICE/S_Espaces-verts - Guide des interventions sur voirie. Mairie de Paris – Direction des Espaces Verts et de l’Environnement, Service des Ressources Humaines, Bureau de Prévention des Risques Professionnels. Onze fiches pratiques très pédagogiques sur les interventions des services espaces verts sur la voirie et l’organisation des chantiers. Document interne Mairie de Paris, février 2012.

Politiques territoriales zéro phyto - « Objectif Zéro phyto ». Dossier de veille scientifique, technique et des pratiques territoriales. Commanditaire : Pôle de compétences Espaces verts – Paysage du CNFPT / INSET de Montpellier, et Plante & Cité. Auteurs : Caroline GUTLEBEN, ingénieur chargée de mission, Sophie LEMAIRE, documentaliste, Damien PROVENDIER, ingénieur chargé de mission. Contributions et validation : groupe de travail écophyto du CNFPT composé de 25 conseillers formation des structures du CNFPT, avril 2010. - Synthèse bibliographique des politiques territoriales zéro phyto : articles, ouvrages, sites, DVD - CNFPT/INSET Montpellier, Centre de ressources documentaires et multimédia – 2010/2012 - « Les Villes-nature, vers le zéro pesticide : cohérences territoriales, paysagères et sociales » : actes numériques du colloque européen territorial, Versailles, AITF/ CNFPT, décembre 2010. http://www.inset-montpellier.cnfpt.fr/fr/poles_competence/ Ing%E9nierie_%E9cologique/Actes_de_colloques/430 - DVD « Villes-nature vers le zéro pesticide » : restitution de paroles d’experts, territoriaux et expériences à l’étranger. Educagri/CNFPT, janvier 2011 - Offre de formation nationale harmonisée « espaces publics zéro phyto » : http://www.cnfpt.fr - Plante & Cité, partenaire recherche du ministère de l’écologie, du Développement durable et de l’énergie, programme écophyto : http://www.plante-et-cite.fr ; http://www.ecophytozna-pro.fr - Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie : http://www.developpement-durable.gouv.fr/Les-zones-non-agricoles-dans-le.html - Le catalogue des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages des matières fertilisantes et des supports de culture homologués en France du ministère de l’Agriculture : http://www. e-phy.agriculture.gouv.fr - Agence de l’eau et accompagnement méthodologique et financier des collectivités : http://www.lesagencesdeleau.fr

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Gestion écologique et différenciée des espaces verts - Inventer les villes-natures de demain... Gestion différenciée, gestion durable des espaces verts, par Gaëlle Aggéri, préface de Pierre Donadieu. Cet ouvrage propose une bonne synthèse qui relie les différentes représentations de la gestion différenciée, philosophique, scientifique et technique, esthétique et culturelle, etc. Il remet en perspective l’aventure humaine des pionniers des collectivités locales et des réseaux professionnels qui ont inventé et diffusé le mouvement de la gestion différenciée et propose des réponses aux questions du développement durable. Les « villes-natures » visent à offrir aux usagers des parenthèses de verdure à la fois horticoles, champêtres et sauvages, mises en scène et orchestrées par les responsables territoriaux, aidés de scientifiques, agriculteurs et artistes. En filigrane, il est question aussi des nouvelles symboliques et images des paysages, d’une évolution des demandes sociales, qui interrogent les légitimités contemporaines de la nature publique dans la ville. Édité par Educagri, 2010. - Sélection de livres de Gilles Clément. Le Jardin planétaire (avec Claude Éveno), L’Aube/Château-Vallon, 1997 (rééd. 1999), Manifeste pour le Tiers-paysage, éd. Sujet Objet, mai 2004, La Sagesse du Jardinier, éd. L’Œil Neuf, mars 2004, Gilles Clément, Une écologie humaniste (avec Louisa Jones), Éditions Aubanel, septembre 2006. - Gestion différenciée des espaces verts : fertilisation, désherbage, lutte phytosanitaire. L’application des herbicides et des produits phytosanitaires pose problème aux gestionnaires d’espaces verts. Doivent-ils continuer à utiliser de tels moyens qui ne sont pas sans risque pour l’homme et son environnement ? Ce premier colloque réunissait les acteurs de terrain pour mettre en lumière les conditions d’utilisation des produits phytosanitaires dans l’espace urbain (CNFPT 1995, Actes du séminaire du CNFPT Bourgogne-Caen, 10-13 octobre 1995) - Site internet Nord Nature Chico Mendes – Portail sur la gestion différenciée. Ce site présente différentes initiatives et références techniques pour la mise en œuvre de la gestion différenciée et de pratiques d’entretien respectueuses de l’environnement. http://www.gestiondifferenciee.org

Toxicité des plantes - Plantes, un autre regard. Ce livre produit en partenariat entre le Centre anti-poisons de l’Hôpital militaire Reine Astrid, Bruxelles et le Jardin botanique national de Belgique traite de la toxicité des plantes rencontrées le plus fréquemment dans ce pays. 179 pages. http://www.poisoncentre.be/article.php?id_article=871

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Annexe 2 : Conseil scientifique de l’Observatoire Social Territorial Président du conseil scientifique : Laurent Régné, Conseiller de section MNT, DGA Ville d’Avignon, Chargé d’enseignement à l’Université de Nîmes.

Membres : Michel Borgetto, Professeur de droit de la protection sociale à l’Université de Paris 2, membre du Haut Conseil du financement de la protection sociale Jean Dumonteil, Directeur des Éditions du secteur public Claire Edey-Gamassou, maître de conférences en sciences de gestion à l’Université Paris Est Créteil Dr Gilles Errieau, Responsable du service médical de la MNT Michel Gomez, Membre de l’association ResPect, réseau des préventeurs et ergonomes, responsable de service ergonomie et prévention des risques professionnels à Paris Habitat Dominique Lagrange, Directeur-adjoint de l’INET, directeur des formations Fabien Tastet, Membre de l’AATF, DGA Administration et ressources au Conseil général de l’Essonne

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Annexe 3 : Conseil d’orientation de l’Observatoire Social Territorial Membres de la Commission « relations institutionnelles professionnelles » de la MNT : Jean-Pierre BERNARD, Dominique BLOT, Laurent BRANCHU, Christian BRIEL, Patrick DOS, François FIGUERAS, Jean-René MOREAU (président de la Commission), Louis OUDART, Laurent RÉGNÉ.

Membres extérieurs en tant que personnalités qualifiées : Alain ANANOS, Ufict-CGT des services publics, Directeur général adjoint du Département Citoyenneté et Développement de la personne, Ville de Pantin Karim DOUEDAR, DGA Ressources, Mairie d’Aulnay-sous-Bois, auteur de nombreux articles et ouvrages sur la Fonction publique territoriale Didier JEAN-PIERRE, Professeur agrégé de droit public à l’Université d’Aix-en-Provence, directeur scientifique de la Semaine juridique Administrations et collectivités territoriales, Nathalie MARTIN-PAPINEAU, Maître de conférences et directrice de l’Institut de droit social et sanitaire de l’Université de Poitiers Philippe MOUTON, Directeur de la direction de l’observation prospective de l’emploi, des métiers et des compétences de la Fonction publique territoriale, CNFPT Michel PASTOR, ancien chef de l’Inspection générale et ancien Conseiller spécial du Président du CNFPT

Membres extérieurs en tant que partenaires institutionnels de la MNT : Patrick ATLAS, Président de « Méditoriales », l’association nationale des médecins territoriaux Jean-Christophe BAUDOUIN, ancien Président de l’Association des Administrateurs Territoriaux de France, Directeur général de l’Assemblée des départements de France Vanik BERBERIAN, Président de l’Association des Maires Ruraux de France Patricia CADORÉ et Yann RICHARD, Co-présidents du Syndicat National des Secrétaires de Mairie Daniel DELAVEAU, Président de l’Association des Communautés de France Michel DESTOT, Président de l’Association des Maires des Grandes Villes de France Michel DINET, Président de l’Observatoire National de l’Action Sociale Décentralisée (ODAS) Pascal FORTOUL, Président de l’Association des Directeurs Généraux des Communautés de France Marie-Francine FRANÇOIS, Présidente de l’Association des Administrateurs Territoriaux de France Denis GUIHOMAT, Président de l’Association Nationale des Cadres Communaux d’Action Sociale

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Patrick KANNER, Président de l’Union Nationale des Centres Communaux d’Action Sociale Claudy LEBRETON, Président de l’Assemblée des Départements de France Martin MALVY, Président de l’Association des Petites Villes de France Élie MAROGLOU, Président de l’Association « ResPECT » (Réseau des Préventeurs et Ergonomes Territoriaux) Dominique MICHEL, Président de l’Association des Techniciens Territoriaux de France Christian PIERRET, Président de la Fédération des Villes Moyennes Stéphane PINTRE, Président du Syndicat National des Directeurs Généraux des Collectivités Territoriales Alain ROUSSET, Président de l’Association des Régions de France.

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 L’intercommunalité vécue par ceux qui y travaillent. Cahier n°1. Territorial Sondages pour la MNT en partenariat avec l’ADGCF, l’ADCF et l’AATF. Décembre 2010.  Les précarités dans la Fonction publique territoriale : quelles réponses managériales ? Cahier n°2. Élèves-administrateurs de l’INET, promotion Robert Schuman, pour la MNT en partenariat avec le CNFPT et l’AATF. Juin 2011.  Les risques sanitaires des métiers de la petite enfance : auxiliaires de puériculture, un groupe professionnel sous tension. Cahier n°3. Axe image pour la MNT. Novembre 2011.  Dans la peau des agents territoriaux. Cahier n°4. P. Guibert, J. Grolleau et A. Mergier pour la MNT, en partenariat avec l’AATF et l’INET. Janvier 2012.  Gérer et anticiper les fins de carrière. Les seniors dans la Fonction publique territoriale. Cahier n°5. Élèves-administrateurs de l’INET, promotion Salvador Allende, pour la MNT en partenariat avec le CNFPT-INET et l’AATF. Juin 2012.

Pour consulter l’ensemble des publications, rendez-vous sur : www.observatoire-social-territorial.fr Proche de vous, la MNT est présente sur votre lieu de travail grâce à ses correspondants mutualistes et à ses conseillers de section. Avec plus de 1,1 million de personnes protégées, la Mutuelle Nationale Territoriale est la 1re mutuelle de la Fonction publique territoriale, en santé comme en prévoyance. Depuis 1964, elle milite pour une protection sociale responsable, au plus près des besoins en santé et en prévoyance de tous les personnels des collectivités territoriales. La MNT est également LE partenaire Protection sociale de 16 000 collectivités territoriales qu’elle accompagne avec des conseils experts et des solutions durables pour la protection sociale complémentaire et la santé au travail des agents territoriaux.

www.mnt.fr

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Mentions légales : Mutuelle soumise aux dispositions du livre II du Code de la Mutualité - SIREN N° 775 678 584 - Document non contractuel - Références : novembre 2012

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