Manon Bara, "Faces"

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MH Gallery Editions


Ce catalogue est édité dans le cadre de Faces, la première exposition personnelle de Manon Bara à la Mathilde Hatzenberger Gallery, située rue de Washington, 145 à 1050 Bruxelles. Un grand merci à Manu Blondiau, Kamal Eddine Regbi, Sabrina Grenon et Hans Theys. Merci Manon pour ta confiance.

Relecture texte Hans THEYS : Michèle Deghilage Graphisme : Neutre.be Crédits photographiques : Arturo Solis Di Miele sauf p. 40-41 et 52 : Jasmine Van Hevel pour « Mu in the City »

Dépôt légal : D/2018/13.374/1 2018 / MH Gallery Editions 2




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« FACES », UNE EXPOSITION PERSONNELLE DE MANON BARA C’est avec un plaisir non dissimulé que j’accrocherai puis ouvrirai prochainement cette première exposition personnelle à la galerie de Manon Bara. Manon, je la frôle et croise son œuvre depuis 2010. Tout m’a toujours plu et ému dans l’œuvre comme dans l’auteure de cet art engagé, vif, libre, épicurien, osé, sans retenu. C’est que Manon Bara ne respire pas, elle peint ; elle vit pour peindre. La dimension existentielle est telle – Manon est toujours elle-même tachetée de peinture de la tête aux pieds – qu’il est une gageure de vouloir embrasser de façon panoptique cette personnalité artistique aussi complexe que décomplexée. Aussi, la publication de ce catalogue, qui vise à accompagner cette exposition, mais aussi à la prolonger tant son fonds regorgent de merveilles que nous dévoilerons un brin dans les pages à suivre, et que la galerie, vaste de ses 40 et des mètres carrés ne saura contenir toutes en une seule fois, célèbre cette collaboration débutée à l’automne 2017. Il a donc fallu faire un choix, un véritable crève-cœur, choix finalement guidé par une ligne force qui me semble définir le plus justement la femme comme l’artiste : l’humanité comme un centre irradiant de tout. Aussi, le titre de l’exposition est d’abord évidemment à entendre dans la langue de Shakespeare et désigne le parti pris que j’ai choisi d’adopter pour faire cette première percée sur la planète Bara que l’on traversera au milieu d’un champs de portraits humains et animaliers, mais aussi d’autoportraits. Une véritable galerie de portraits où la caractéristique serait que tous sont « humains trop humains ». Nous laisserons de côté pour l’instant Natures mortes, sculpture-objets peints, gravures, ou presque, puisque nous ferons une exception en en montrant au moins une, une face de citron oseraije dire, tant l’agrume est singulièrement vivant. Hans Theys, lui


aussi un fidèle de la première heure, nous a fait le plaisir d’y revenir très précisément. dans un texte que vous découvrirez un peu plus loin. Nous trouverons au plus vite d’autres occasions pour montrer en chaire et en os en particulier le pan dirai-je spirituel de Bara, mais dont nous émaillerons ces pages de quelques beaux specimens : « Le souffle ou l’élan » et son pendant « Écorché » devraient à mon sens intégrer un musée au plus tôt. Au rayon des anglicismes, je songe encore ici au verbe « to face ». Effectivement, les sujets de Bara nous regardent avec beaucoup d’intensité. Leur regard nous fait face parfois jusqu’à l’affrontement. Malgré une frontalité certaine, à y regarder de plus près, la somme présente nombre de facettes : le monolithe Bara n’en est pas un, plutôt à regarder en fait comme une sorte de diamant qui brille de mille éclats, mais non homogènes. Il faut en revenir d’abord à ces yeux, à tous ces regards, tendres, vides, profonds, éternels, féroces, malicieux. C’est aussi dans le traitement des chaires, des pelages, des plumages, des écailles,.. de toute surface, que cette grande richesse d’émotions tangibles et palpables dans sa réalité matérielle. La peinture utilisée comme un fluide vital. Ici, point de réalité ou qu’importe, Manon va peindre tout de la même façon. Ne compte plus il semblerait que le rappel de l’urgence de la situation. Pour nous en convaincre, l’œuvre compte nombre de bambins et de vieillards. Le mystère de la vie flanqué sur la toile par ses extrémités. Rire et pleurer, pourquoi choisir ? La fugacité de la vie adossée à la vie éternelle, voilà une belle promesse pour qui aime l’art et la vie. Mathilde Hatzenberger, Octobre 2018

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LA PEINTURE BLONDE — QUELQUES PAROLES DE MANON BARA Manon Bara est née en France en 1985. Je l’ai rencontrée pour la première fois en 2010. Sa liberté dans le sujet et sa précision dans la forme m’ont saisi au premier coup d’œil. Bara est une artiste. Non pas parce qu’elle fait des beaux dessins et des magnifiques tableaux, mais parce que son rapport au monde est dense, direct, passionné et engagé. Son engagement est poétique et politique, au sens originel du mot : elle aime les gens, les animaux et les légumes. Quelle joie cette femme libre et engagée est également capable de peindre ! Ainsi, nous pouvons découvrir un art qui fait partie d’un tout, qui ne flotte pas dans l’air, qui n’est pas maniériste, ni vide ou pompeux. En plus, ils sont bien peints, ses tableaux. Bara a plusieurs approches et utilise des supports divers, mais elle peint toujours avec de la laque, en recherchant des effets de couleur et de matière imprévus. Son emploi de la couleur est étonnant. J’ai devant moi, dans mon bureau, un tableau superbe représentant un citron coupé en deux. Pour rendre le volume (le jeu de la lumière et de l’ombre) de la moitié qui se présente au spectateur avec sa pelure jaune, elle a utilisé un jaune chaud, du rouge et du vert. À gauche, une tache en jaune chaud représente la partie éclairée de la pelure. Au milieu et à droite, pour créer la zone d’ombre, elle a recouvert du rouge avec des fines couches de vert, en laissant transparaître plus de rouge au milieu. Et tout cela avec de la peinture qui nage, qui se mélange, qui se disperse de façon non contrôlée… Là où il représente l’intérieur du citron sectionné, le tableau est principalement blanc et rouge. Les deux couleurs se rencontrent de façon libre, créant de belles formes et une belle matière. On voit qu’il s’agit d’un tableau ici. C’est la facture et les couleurs qui le disent. Manon Bara : Ah, des tableaux évoquant des chevelures blondes ! J’aime bien la blondeur. C’est un peu mon personnage. C’est la perruque. On peut jouer des rôles. Ça marche bien aussi avec les masques africains, qui sont un peu angulaires. Mes tableaux actuels explorent le côté animal de l’homme et le côté humain de l’animal. Ce qui rend l’animal humain, c’est d’abord l’éclat de lumière dans l’œil. Ce qui rend l’homme ou la femme 8


animaux, c’est le pelage. Tu as vu mon tableau avec la femme couverte de poils ? Ce n’est pas la nature qui m’intéresse, mais la nature dans l’être humain, qui apparait dans sa vieillesse, à sa naissance… Même mon geste en peinture est un peu sauvage. J’aime l’émotion, il faut qu’il y ait de l’émotion. Quand je suis partie en Allemagne, j’étais déçue de la France, car elle célébrait une peinture à idées, à concepts. J’ai étudié dans le foyer de l’expressionnisme, à Dresde. Mon travail s’inspire d’une Afrique fantasmée, l’Afrique de l’art métissé que nous avons hérité de Picasso. Je tente de faire une peinture sanguine. J’adore Goya. Comme j’ai déjà dit : « Je suis romantique, mais je me soigne. » Je n’aime pas le contrôle. C’est important de lâcher prise, d’accepter que la matière puisse perdre ses contours. C’est difficile d’accepter que la couleur coule. Pourtant, le liquide est très présent. La peinture est quelque chose entre la vie et la mort. Ça coule, ça fait des coulures. Ma peinture vit sans moi. Elle fait son chemin. Je fais des formes d’aquarelles avec de la laque. J’aime les couleurs brillantes comme le vernis à ongles ou le rouge à lèvres. J’utilise aussi de la laque plus mate, selon les besoins. Avant j’utilisais beaucoup de couleurs primaires, maintenant j’ajoute des verts et des roses. Lorsque la laque sèche, elle se rétracte. Les contours précis s’estompent, ça s’embrouille un peu. Je ne sais jamais immédiatement ce que j’ai fait. Il faut attendre le lendemain. Parfois, il y a trop de liquide et ça fane. J’adore me lever le matin et aller voir ce qui s’est produit pendant la nuit, ce que ça a donné. C’est l’aventure. Un jour, j’ai peint ma famille en animaux. Ma maman était représentée en oie. Elle n’était pas contente. Elle avait pourtant un très joli cou, un magnifique pelage et des beaux petits points sur les plumes. Mon frère était représenté en lapin, ma sœur en girafe, mon père en chien et ma grand-mère en vieux singe. Je viens de finir le portrait d’un pigeon et de quelques natures mortes : un citron, un poisson mort… J’ai aussi fait le portrait d’un thon rouge. J’adore les thons. Je les vois devant moi, les grands thons et espadons, reposant sur des étals sous un soleil éclatant. Ils ont chaud. Ils suent, ils répandent une odeur très forte. 9


Je viens des Pays de la Loire, mais j’avais une grand-mère qui habitait près de Marseille. Je l’adorais… Elle est partout dans mes tableaux : le Sud, le goût, le soleil… les natures mortes sont des souvenirs de son potager. Mes deux grands-mères voulaient devenir peintres. Parfois, j’ai l’impression de peindre pour elles aussi. Cet été, j’ai peint des portraits de mes grands-parents. Ma grand-mère est morte récemment. Quand je descends dans le Midi, elle est très présente. Les absents peuvent être très présents. (Elle me montre une photo d’elle-même, enfant, avec sa grandmère, vêtue d’une robe fleurie des années soixante.) Elle aimait les robes fleuries. Moi aussi. Dessiner n’est pas peindre. En dessinant, on pense plus. Dessiner, c’est comme écrire. Faire les grandes gravures en bois, ça me calme. Je préfère exposer les matrices elles-mêmes au lieu des tirages. Ça dégage plus de force, de droiture. Ça calme, parce que tu enlèves de la matière. En peinture, tu en ajoutes. C’est différent. C’est également un travail épuisant, régulier, un exercice de méditation. Chez les Japonais, si une personne est trop fragile, on tatoue un tigre sur son dos ; si elle est trop agressive, on met quelque chose de très doux. Ils jouent avec le chaud et le froid. Je trouve les tatouages intéressants. Ce sont des histoires sur la peau. C’est également gai à peindre, parce qu’on peut peindre sur le tableau, on peut « peindre la peinture », comme si on ajoutait du maquillage sur le portrait peint d’une femme. La peinture de guerre, c’est aussi du maquillage. Dans ce tableau (elle me montre un portrait de femme, partiellement couvert de surfaces colorées), j’ai poussé cette idée pour arriver à quelque chose de nouveau. La peinture, c’est l’incarnation de la peau. J’aime beaucoup le travail de Lucian Freud, de Cecily Brown (dont j’ai récemment vu des tableaux chez Gagosian), de Jenny Saville. La peinture comme de la chair. C’est comme l’incarnation du corps du Christ dans la religion catholique. Il y a toujours une sacralisation dans la peinture. Plus on parle d’un sujet autobiographique, plus ça devient universel. Le pigeon, c’est un peu nous tous. J’aime bien l’ombre

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en dessous de sa patte. Si tu mets côte à côte le vieux portrait du lapin et le nouveau, tu vois qu’avant, mes tableaux étaient plus plats. Des coulures en sucre d’orge. C’était la pâtisserie qui m’intéressait, même si ça ressemblait à des plaies saignantes. C’est fini, ça, maintenant. Aujourd’hui, je recherche la lumière et le volume. Ce qui est important aussi, c’est l’échelle. Prends le portrait de cet ours. Il est devenu comme un membre de la famille, grâce à l’échelle. Je ne pense pas que ma peinture soit tellement féminine. J’aime bien la force : l’ours et le gorille. Les chats, c’est pour rire. J’ai copié en grand des affiches de chats perdus et je les ai exposées dans la rue. Ce que j’aime bien, c’est ce que les gens écrivent sur ces affiches au sujet de leur chat. J’aime bien ces traces de leur relation humaine. Hans Theys, Montagne de Miel, 3 septembre 2018

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LISTE DES ŒUVRES REPRODUITES « Le sourire du cochon », 2018, 82 x 68 cm

Première de couverture

« Autoportrait animal » (visage rouge), 2016, 50 x 40 cm

Quatrième de couverture

« Jeune lièvre », 2018, 82 x 116 cm

p. 2-3

« Face de citron », 2018, 70 x 50 cm

p. 11

« Grand-mère en surprise » 1,2 et 3, 2016, chaque 70 x 50 cm

p. 12-13

« Chien classique », 2018, 100 x 70 cm

p. 14

« Grand pigeon », 2018, 120 x 80 cm

p. 15

« Jeune maman », 2018, 60 x 60 cm

p. 16

« Cri du nourrisson », 2018, 60 x 60 cm

p. 17

« Tête de thon », 2018, 40 x 40 cm

p. 18

« Ecorché », 2016, 70 x 100 cm

p. 19

« L´élan ou le souffle », 2016, 70 x 100 cm

p. 20-21

« Famille de singe (mère et son petit) », 2018, 70 x 100 cm

p. 22

« Famille de singe (père en colère) », 2018, 70 x 100 cm

p. 23

« Jumeaux masqué 1 et 2 », 2016, 70 x 50 cm

p. 24-25

« Larmes de crocodile », 2018, 86 x 125 cm

p. 26-27

« Bébé bleu », 2016, 82 x 68 cm

p. 28

« Autoportrait noir » (fond bleu), 2018, 50 x 40 cm

p. 29

« Autoportrait animal », 2018, techniques mixtes sur papier, 42 x 29,7 cm

p. 31

« Grand-père 1,2,3 », 2016, 40 x 30 cm

p. 32-33

« Le sourire du cochon », 2018, 82 x 68 cm

p. 34

« Autoportrait animal » (visage rouge), 2016, 50 x 40 cm

p. 35

« Coq de foire », 2018, 120 x 80 cm

p. 37

« Ours homme masqué », 2017, 100 x 70 cm

p. 38

« Bouquet de roses », 2017, 40 x 30 cm

p. 42

"Tête de thon », 2018, 90 x 90 cm

p. 47

Sauf indication contraire, toutes les œuvres sont faites de peinture laquée sur toile.


HET BLONDE SCHILDEREN — MANON BARA AAN HET WOORD Manon Bara werd in 1985 geboren in Franrijk. Ik ontmoette haar voor het eerst in 2010 tijdens een jury waarvoor ze met haar schilderijen een marktkraam had gebouwd. Een mooie, vrijpostige ingreep, even gedurfd, vrij en potig als de schilderijen. De vrije onderwerpkeuze, de vormprecisie, de sensualiteit en de directheid van deze kunstenaar hebben mij meteen getroffen. Toch schuilt haar kunstenaarschap niet alleen in haar vermogen mooie tekeningen en prachtige schilderijen te maken, maar ook in haar levenshouding die intens is, hartstochtelijk en betrokken. Haar betrokkenheid is poëtisch en politiek, in de oorspronkelijke betekenis van het woord: ze houdt van mensen, dieren en groenten. Hoe vreugdevol dat deze vrije en betrokken vrouw ook kan schilderen! Zo ontdekken we hier kunstwerken die deel uitmaken van een geheel, die niet in het luchtledige hangt, niet gemaniëreerd is, leeg of pompeus. Bara gebruikt verschillende technieken en dragers, maar ze schildert altijd met lak, zoekend naar onvoorziene kleuren en facturen. Haar kleurgebruik is verbazingwekkend. Voor mij, boven mijn bureau, hangt het portret van een in twee gesneden citroen. Om het volume op te roepen (het spel van licht en ruimte) van de helft die zich met zijn gele rug aan de toeschouwer presenteert, heeft ze een groen, rood en een warm geel gebruikt. Helemaal links duidt een gele partij op het overbelichte gedeelte van de citroen, de rest van de ‘gele’ schil werd vervolgens rood geschilderd. Dit rood werd aan de rechterzijde gradueel overschilderd met doorzichtig groen, dat de schaduwzijde oproept. Zo’n kleurgebruik is radicaal, dansant én effectief. Waar het schilderij de sectie van de citroen voorstelt, zien we vooral rood en wit (voor de vliesjes die de partjes scheiden). En al die verf en zwemt door elkaar op een onvoorspelbare manier… Kleurgebruik en factuur vertellen ons dat we te maken hebben met een schilderij en niet met een afbeelding. Manon Bara: Ah, schilderijen die lange blonde haren voorstellen! Ik hou van het blonde. Mijn personage is blond. Haar haar doet denken aan een pruik. Ze speelt een rol. Je kan het blonde haar ook combineren met Afrikaanse maskers, die een beetje hoekig zijn. 46


Mijn huidige schilderijen verkennen het dierlijke in de mens en het menselijke in de dieren. Wat de dieren menselijk maakt, is in de eerste plaats de weerkaatsing van het licht in hun ogen. Wat de mensen dierlijk maakt, is de beharing. Heb je mijn schilderij gezien dat een volledig behaarde vrouw voorstelt? De natuur op zich interesseert mij hier niet, maar wel de natuur in de mens, die zich toont bij de geboorte en de ouderdom… Zelfs mijn geste tijdens het schilderen is een beetje wild (‘sauvage’). Ik hou van emotie, er moet emotie in zitten. Ik ben naar Duitsland vertrokken omdat ik teleurgesteld was door de Franse verafgoding van de conceptuele schilderkunst. Ik ben gaan studeren in de bakermat van het expressionisme: Dresden. Mijn werk draait rond een verzonnen Afrika, het Afrika van de bastaardkunst die we hebben geërfd van Picasso. Ik probeer warmbloedige schilderijen te maken. Ik ben dol op Goya. Zoals ik eerder al zei: ‘Ik ben een romantica, maar ik ben proper op mijzelf.’ Ik hou niet van controle. Het is belangrijk de dingen los te kunnen laten en te aanvaarden dat de factuur haar precieze contouren verliest. Je zou liever hebben dat verf niet vloeit, maar ze vloeit toch. Waarom het dan niet gebruiken? Verf is iets tussen leven en dood. Ze stroomt, ze druipt. Mijn schilderijen zoeken hun eigen weg, los van mij. Ik maak een soort van aquarel met lakverf. Ik hou van kleuren die glanzen zoals nagellak of lippenstift. Soms gebruik ik ook matte lak. Vroeger gebruikte ik veel primaire kleuren, vandaag voeg ik er groene en roze tinten aan toe. Drogende lakverf krimpt. Precieze contouren worden minder scherp, alles wordt minder precies. Ik weet nooit meteen wat ik heb gemaakt. Ik moet wachten tot de volgende ochtend. Soms is de factuur te vloeibaar en kwijnt het schilderij weg. Ik vind het super om ’s morgens op te staan en te gaan kijken wat er ’s nachts is gebeurd, wat het droogproces heeft opgeleverd. Het is een avontuur. Ik heb mijn familieleden eens afgebeeld als dier. Mijn mama heb ik afgebeeld als gans. Ze was daar niet blij om. Ze had nochtans een heel mooie hals en prachtige, gespikkelde veren. Mijn broer heb ik afgebeeld als konijn, mijn zus als giraf, mijn vader als hond en mijn oma als een ouwe aap. 47


Ik heb pas een portret van een duif en enkele stillevens afgewerkt: een citroen, een dode vis… Ik heb ook een portret geschilderd van een rode tonijn. Ik hou van tonijnen. Ik kan ze voor mij zien, grote tonijnen en zwaardvissen, rustend op schragen in de blakende zon. Ze hebben het warm. Ze zweten. Ze verspreiden een sterke geur. Ik kom uit de Pays de la Loire, maar ik had een oma die in de buurt van Marseille woonde. Ik was dol op haar… Ze is altijd aanwezig in mijn schilderijen: Zuid-Frankrijk, de smaak, de zon… Mijn stillevens zijn herinneringen aan haar moestuin. Mijn oma’s wilden allebei schilder worden. Soms heb ik de indruk dat ik ook voor hen schilder. De voorbije zomer heb ik portretten van mijn grootouders geschilderd. Mijn oma is onlangs overleden. Als ik naar ZuidFrankrijk trek, is ze heel aanwezig. De afwezigen kunnen soms heel aanwezig zijn. (Ze toont een foto van zichzelf als kind met haar grootmoeder, die een gebloemde jurk uit de jaren zestig draagt.) Ze hield van gebloemde jurken. Ik ook. Tekenen is niet hetzelfde als schilderen. Als je tekent, denk je meer. Tekenen is als schrijven. Ik maak graag grote houtsneden. Ik word er rustig van. Ik stel liever de drukplaten tentoon dan de afdrukken. Er spreekt meer kracht uit, ze zijn meer rechtuit. Graveren in hout kalmeert mij omdat je materie wegneemt. Schilderen is materie toevoegen. Dat is anders. Graveren is ook vermoeiend, herhalend, als een soort van mediteren. Als iemand een beetje broos is, zullen ze in Japan een tijger op zijn of haar rug tatoeëren. Als iemand te agressief is, plaatsen ze een afbeelding van iets zachts. Ze spelen met warm en koud. Ik vind tatoeages boeiend. Het zijn verhalen op een huid. Ze zijn ook leuk als onderwerp voor een schilderij, omdat je op je schilderij kan schilderen, je kan je schilderij beschilderen, zoals je make up kan aanbrengen op het geschilderde portret van een vrouw. Oorlogskleuren zijn ook een soort van make up. In dit schilderij (ze toont het

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portret van een vrouw, gedeeltelijk overschilderd met kleurvlakken), heb ik dit idee doorgedreven om tot iets nieuws te komen. Schilderijen incarneren de huid. Ik hou van het werk van Lucian Freud, Cecily Brown (van wie ik onlangs schilderijen zag bij Gagosian) en Jenny Saville. Het schilderij als incarnatie. Zoals de vleeswording van Christus in de katholieke godsdienst. Een schilderij heeft altijd iets sacraals. Hoe meer autobiografisch je onderwerp, hoe universeler. Een duif, dat zijn we zelf. Ik hou van de schaduw onder zijn poot. Als je het oude en het nieuwe portret van het konijn naast elkaar plaatst, zie je dat mijn schilderijen vroeger platter waren. Gemaakt met snoepkleuren. Toen was ik geboeid door patisserie, ook al deden de schilderijen denken aan bloedende wonden. Vandaag is dat gedaan en zoek ik naar volume en licht. De schaal is ook belangrijk. Het portret van de beer, bijvoorbeeld. Hij is deel van de familie geworden door de schaal. Ik denk niet dat mijn schilderijen iets specifieks vrouwelijks hebben. Ik hou van kracht: de beer en de gorilla. De portretten van de poezen zijn een grap. Ik heb affiches voor verloren poezen uitvergroot en op straat tentoongesteld. Ik hou van de zaken die de mensen over hun poes schrijven op zo’n affiches. Ik hou van die sporen van hun relatie als mens met zo’n diertje.

Hans Theys, Montagne de Miel, 3 september 2018

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MANON BARA Née en 1985 à Angers (FR). Vit à Bruxelles (BE).

FORMATION 2010 Diplôme de master en Arts plastiques visuels et de l’espace, option peinture, ENSAV La Cambre, Bruxelles (BE), avec distinction 2008 Diplôme national supérieur d’expression plastique avec félicitations du jury, Beaux-Arts d’Angers (FR) 2006/2007 Bourse de l’OFAJ, résidence à la Kunstakademie de Dresde (ALL), dans l’option peinture

EXPOSITIONS PERSONNELLES OU DUO 2018 « Grand Dandytisme » avec Degand et la Fondation Defustel, la Tentation, Bruxelles 2017 « Marcels et T-shirts dessinés main » Ping Pong, Bruxelles « Faux Jumeaux » avec Silio Durt, E2 Sterput, Bruxelles « Rouge à lèvres et rage de dents », Russiantearoom Gallery, Paris 2016 « Rouges à lèvres et rage dedans », galerie les Iles lointaines, Angers « Manon Bara », Maison Langbehn, Bruxelles 2015 « Manon Bara Candidat », ISELP, Bruxelles « Manon, malerei,skulptur » Finnoy Stravanger, Ottohuset, Norvège « Blue Jeans with Shirt» (avec Silio Durt), Ping Pong, Bruxelles 2014 « Après la fête », Vitrine Incise, Charleroi « Michael Ange », Dehors Contemporary Window, Bruxelles 2013 « Propaganda », Rossi Contemporary, Bruxelles « A Saudade e a alma da pintura », J. M. La Haye, Buktapaktop « Boxing icônes » (avec David Pirotte), Galerie Flux, Liège 2012 « Love Me Tender », Lambert Gallery, Bruxelles 2011 « La peinture, ce n’est pas du gâteau », Galerie de Créteil, Paris « A carreau » (avec Anne Bertinchamps), Lambert Gallery, Bruxelles 2010 « Mit dir in mir » (avec Piotr Baran), B2 Gallery, Leipzig, Allemagne 2009 « Trop d’amour », Galerie Natascha Melholp, Bruxelles

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EXPOSITIONS COLLECTIVES 2018 « Jouets et Fétiches », Mathilde Hatzenberger, Bruxelles « Mauvais Genres », Vitrine Fraiche, Tournai « La fille aux allumettes », le Lac, Bruxelles 2017 « AfriqueS », Mathilde Hatzenberger, Strasbourg « Glauqueland», Centre Culturel Jacques Franck, Bruxelles « Sous Pression », Russiantearoom Gallery, Paris « Laurent d’Ursel et alii », Centre Jacques Franck, Bruxelles « Sex in the city », Halles Saint-Géry, Bruxelles, Stéphanie Pécourt 2016 « De la part de Babouchka », Russiantearoom Gallery, Paris « Pand 1502 », Usine de Lembeek, Belgique « Knot Knot », Fluxus gallery, London (UK), curateur : Philomène Hoël « Out Africa », chez A.C Kenis, Bruxelles, curateur : Damien Delepeleire « Forever Young », Maison du peuple, Bruxelles, curateur : Pascal Bernier « La joie, parade des indésirables », Angers, curateur : Jean-Pierre Arnaud 2015 « Capital », Brussels Art Institute, curateur : Jan de Cock 2014 « Vive l’été », Bruxelles, curateur : Damien Delepeleire « Féminines ? », Abbaye de Saint-Florent le Viel, France, curateur : J.P Arnaud « Au quotidien », Rossi Contemporary Gallery, Bruxelles « Night shop », collectif IDIOM, Recyclart, Bruxelles 2013 « L’or », Église de la Trinité, Bruxelles « The Gunshot», Galerie M de Cannière, Antwerpen, curateur: Hans Theys « Boomerang », Van de Velde, curateurs : B.Dusart et X.Noiret-Thomé 2012 « Face to face », Transition Gallery, London 2011 « Le royaume et l’exil », Backslash, Paris, curateur : Christophe le Gac 2010 « Even in Paradise », Galerie Anton Weller, Paris « Figure de l’imposture », La Sorbonne, Paris « La Baraque à Bara », Atelier 340, Bruxelles « Rose », avec Bernard Villers, Galerie CO21, Bruxelles 2009 « Jeune Création », au 104, Aubervilliers, Paris « I don’t fucking know what to do », Galerie Anton Weller, Paris 2008 « Sécurité, quantité, précision, innovation, modernité », Abbaye de Ronseray, Angers, France, curateur: Guillaume Désanges

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EXPÉRIENCE PROFESSIONNELLE EN TANT QU’ENSEIGNANTE Depuis 2015 : Professeure de Décomposition image et mouvement à l’École Supérieure des arts visuels ARTS², Mons (BE)

WORKSHOPS 2018 Workshop à venir au BAM dans le cadre de l’exposition de Niki de St Phalle « Petit goûter de la poésie » avec Charlotte Hubert, maison du spectacle, Bruxelles Workshop « Pixellisation » à Mars, Arts en Scène avec les B1 Peinture d’Arts au carré 2016 Workshop de 5 semaines au BAM dans le cadre de l’exposition de Gérard Garouste avec les étudiants de peinture, gravure, IDM et dessin de l’ESA ARTS². Workshop de 5 jours au Nouveau Théâtre de Namur: « Quel trésor se cache dans nos poubelles?» Cité de Bommel, enfants de 4 à 11 ans 2015 « Salon Oasis », Projet participatif intergénérationnel pour la société immobilière de service public Assam & Sorelo (mobiliers «recyclés» dans la cité du Peterboss, Bruxelles)

ARTICLES DE PRESSE 2018 « Expo à 4 mains » Bruzz, Kurt Snoekx, (semaine du 9 décembre) 2018 « Faux Jumeaux », Le Vif l’Express, Focus, (17 novembre) 2017 Lino Polegato, « Manon Bara », Flux News (mars 2017) 2017 Pierre Vassart, « Le sexe s’expose aux Halles », Le Soir (20 janvier) 2016 Claude Lorent, « Les galeries à l’étranger », La Libre Belgique, p.09 (09 - 15 décembre) 2016 « Manon Bara femme étonnée, femme détonante », Artsixmix (18 novembre) 2015 Kurt Snoekx, « Agenda, Manon Bara» (rubrique Wunderkammer) Bruxelles, articles en anglais, p.6-7 (semaine du 7 mai 2015) 2015 Hans Theys, «Tekenen vandaag», OKV, Gent, p.31 2014 Hans Theys, «Manon Bara. De mooie gulzigheid»,Over Vorm.Het Vervolg, Editions, Bruxelles (21 mai) 2013 Claude Lorent, « De bons coups de pinceaux », La Libre Belgique, p.16 (29 mars) 2012 Claude Lorent, « C Comme…», La Libre Belgique (29 avril-05 mai)

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2012 Hans Theys, « Manon Bara. Een fontein», Focus: Een blik op 100 kunstenaars, Snoeck, Gent. 2009 Claude Lorent, « Je suis romantique mais je me soigne », Prix Art Libre, p.03 (19 - 25 mars) 2009 Claude Lorent, « L’expressivité exubérante », La Libre Belgique, p.05 (09 - 15 octobre)

CHRONIQUES RADIO 2017 Thierry Génicot, Le monde invisible, RTBF (26 janvier) 2015 Thierry Génicot, Le monde invisible, RTBF (20 mars)

CHRONIQUES TV 2018 https://bx1.be/…/expo-private-choices-collectionimpressio…/ 2018 https://bx1.be/…/faux-jumeaux-expo-haute-couleur-agalerie…/

ÉDITIONS, TEXTES POÉTIQUES 2018 « Faux Jumeaux" avec Silio Durt, édition rizo, 40 pages, 100 exemplaires 2016 « Queen Kong », recueil de 32 textes, 100 exemplaires numérotés, édités par les Iles Lointaines, Angers (FR) (mai) 2015 « Entre rouge à lèvres et rage de dents », recueil de textes, 100 exemplaires édités par l’ISELP - Institut Supérieur pour l’Étude du Langage Plastique, Bruxelles (BE)

RÉSIDENCE D’ARTISTE 2015 ISELP - Institut Supérieur pour l’Étude du Langage Plastique, Bruxelles (BE) (12 janvier - 14 février), iselp.be/fr/expositions/ manon_bara

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Contact: Mathilde Hatzenberger contact@mathildehatzenberger.eu + 32 (0)478 84 89 81 Rue Washington, 145 1050 Brussels – Belgium


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www.mathildehatzenberger.eu


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