Rapport marrakech

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MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

UNIVERSITE IBN KHALDOUN ECOLE SUPERIEURE D’ARCHITECTURE ET DES BEAUX-ARTS

L E C O U R S : H I ST O I R E E T THEORIES DE L’URBANI SME LE THEME : LA VILLE DE MARRAKECH Année universitaire : 2013 – 2014

ELABORE PAR : - ALLEGUE Sandra - ATHIMNI Meryem - SAHLI Sabrina

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SOMMAIRE

 Introduction  Développement du plan de travail :

1) Donner les caractéristiques principales du plan ancien de la ville 2) Evolution et déplacement spatial des fonctions urbaines 3) Mutations urbaines et changement architectural  Conclusion  Références  Table des matières

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INTRODUCTION La ville de Marrakech, surnommée la Perle du Sud ou Porte du Sud et la Ville rouge ou Ville ocre, est une ville « makhzen » (c’est-à-dire impériale), se trouvant au nord-ouest du Royaume du Maroc, qui est un pays du continent Africain, ayant pour frontières, au nord : la mer méditerranée, à l’est : l’Algérie et la Mauritanie, au sud : la Mauritanie et à l’ouest : l’océan atlantique. La ville de Marrakech située à 327 km au sud-ouest de la capitale Rabat, dans l'intérieur des terres, au pied des montagnes de l'Atlas.

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Habitée par les agriculteurs berbères de l'époque néolithique, la ville a été fondée en 1062 par le souverain et cousin du roi almoravide Youssef Ibn Tachfin, qui est le troisième imam et le premier sultan de la dynastie des Almoravides. (Né en 1009 il a régné de 1061 jusqu'à sa mort, en 1106.)

Il existe plusieurs légendes concernant la fondation et l’origine de Marrakech.  Le nom de Marrakech vient du tamazight « Mour » qui signifie « pays » et « Akouch » qui veut dire « Dieu », ce qui donne «La terre de Dieu ».  Une autre étymologie donne l'interprétation de « terre de parcours » ce qui rejoint l’idée que Marrakech était un camp où les caravaniers qui assuraient un commerce florissant avec l'Afrique noire, venaient y faire escale avant la traversée du Sahara.  Une troisième légende évoque, le « pays des Kouch », guerriers noirs venus d’Aoudaghost, grande ville caravanière de Mauritanie... Ces étymologies, postérieures à la fondation, évoqueraient plus directement les fondateurs.

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La fondation Rappelé en Mauritanie, Abu Bakr Ibn Omar confie le campement (Le premier campement, selon certaines sources, aurait été à Tasghimout, très beau plateau qui surplombe à 10 km à l'est de Ghemat, près du douar d'Iguerferouane.) à son cousin Youssef Ben Tachfine. La cohabitation difficile avec les Masmuda (tribus locales), l'exiguïté de Ghmat, pousse le nouveau sultan à choisir un site à l'écart. Le site retenu offre plusieurs avantages :  L'Atlas, au Sud et à l'Est, constitue une barrière naturelle.  La plaine, bien dégagée, empêche toute attaque surprise et permet le contrôle des riches vallées voisines.  La nappe phréatique, peu profonde, permet d'alimenter la ville en eau. C’est donc Youssef Ben Tachfine, vers 1062, qui fonde concrètement la ville de Marrakech. Il fit édifier en premier lieu la mosquée « Ibn Youssef », puis « Dar al Hajar ». La ville lui sert de base de départ, de camp retranché, pour la conquête de Fès, du nord du Maroc, puis le sud de l'Espagne. Il étendra son emprise jusqu’aux limites de la Castille, de la Navarre, au comté de Barcelone pour le nord, jusqu’à Alger pour la partie ouest, et sera bordé par l’empire du Mali, l’empire de Ghana, pour la partie sud. Les Almoravides sont alors en pleine expansion ; leur ville deviendra vite un grand centre commercial, situé sur la route de l'or, et équidistant de la Navarre et du Mali. Le rayonnement de Marrakech sera tel, qu’elle donnera son nom à tout le royaume (Maroc venant de la prononciation espagnole « Marruecos »). Comprendre et reconnaître l’origine saharienne voire sub-saharienne de Marrakech, tant par le peuple qui l’a fondé, que par son organisation propre (khéttaras et palmeraie), mesurer son importance commerciale (quand Fès avait été un grand centre intellectuel), sont essentiels pour intégrer l’identité originale de la ville ocre.

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LES CARACTERISTIQUES PRINCIPALES DU PLAN ANCIEN DE LA VILLE Jaillissant au pied des sommets enneigés de l'Atlas, dressée entre ses remparts rouges à l'ombre de sa palmeraie millénaire, somptueuse, exubérante et fantasque, Marrakech résonne comme un sortilège. La médina de Marrakech, caractérisée par un tissu urbain traditionnel très dense, s’articule autour d’un noyau symbolique qui est la mosquée « Ibn Youssef » ayant pour fonctions : la fonction cultuelle, culturelle, juridique, académique, politique, sociale …

C’est autour de ce noyau que se concentrent les fonctions urbaines commerciales et économiques telles que les souks puis les habitations … Les voiries, à l’intérieur de la médina, sont étroites et sinueuses, l’architecture, quant à elle, se caractérise par son horizontalité. La cité fut ensuite fortifiée par le fils de Youssef Ibn Tachfin, Ali Ben Youssef, lequel fit édifier vers 1122-1123 des remparts encore visibles.

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PLAN DE LA MEDINA DE MARRAKECH EN 1830

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PLAN DE LA MEDINA DE MARRAKECH EN 1844

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PLAN DE LA VILLE DE MARRAKECH EN 1913 Ce plan ne comprend que la Médina, car le Guéliz n'existait pas encore comme quartier, seulement comme camp militaire avec ses tentes et quelques baraquements.

Pour faciliter la lecture, le plan a été scindé en quatre parties. Dans la première partie, nous remarquons le Palais Dar Beida à gauche, transformé en hôpital, tout près du Parc d'artillerie et du camp des Zouaves, dit aussi camp de l'Aguedal. La poste et le Trésor y sont installés de même que le télégraphe et l'administration de l'Intendance militaire. Les prisons du sultan sont situées à l'intérieur de la Kasba. Les abattoirs du sud se trouvent à Bab Rob, porte au sud-ouest qui ouvre le passage des militaires vers le Guéliz.

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Dans la deuxième partie se trouve le Mellah séparé de Riad Zitoun par un mur élevé. A l'est du Mellah à cette époque se trouvait un monticule d'ordures de 10 à 15 mètres de hauteur. Avant le protectorat les juifs n'avaient pas l'autorisation de sortir leurs ordures de la ville. Ce monticule fut au début une curiosité touristique, puis supprimé pour des raisons d'hygiène et remplacé par un terrain de foot. Non loin se trouve le Consulat de France adossé à La Bahia, où le Général Lyautey avait instalé la Résidence générale. La politique de Lyautey était de sauver le patrimoine des palais et monuments de Marrakech. Pour cette raison il y installa les administrations et les fonctionnaires. C'est ainsi que Dar Beida fut transformé en hôpital, ce qui facilita son entretien et permit de sauver non seulement sa beauté artistique, mais encore les savoir-faire de nombreux métiers d'art.

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La lecture se poursuit avec la partie nord: Bab Doukkala, Sidi bel Abbes, Sidi ben Slimane, Bab Khemis, Bag Debbagh, ... Du côté de Bab Doukkala apparait le Hara, quartier et cimetière des lépreux, encore assez nombreux à l'époque car la seule mesure sanitaire utilisée était de les isoler. Le palais du Pacha occupe une place importante entourré de ses jardins. La couleur verte figure les jardins à l'intérieur des remparts, mais à l'extérieur jusqu'à l'oued Tensift s'étendaient la palmeraie et d'autres vergers. Peu de présence europénne ou militaire dans la partie nord de la Médina où se trouvent plutôt des mosquées, marabouts et zaouias. Notons cependant près de Bab Khemis le premier cimetière européen de Marrakech, situé en face de ce qui est aujourd'hui l'hôpital El Antaki. Les tombes des espagnols et des britanniques étaient à l'époque bien plus nombreuses que celles des français.

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Les européens en arrivant à Marrakech en 1913 se sont établis sur une zone relativement réduite entre la Koutoubia et le Palais de la Bahia, autour de la Place Djemaa Elfna et dans les deux quartiers de Riad Zitoun jusqu'au Mellah, la place des ferblantiers et l'Arset Elmaach (un cercle d'environ 300 mètres de rayon comprenait la presque totalité des lieux recommandés). La présence européenne était peu sensible au nord de la Place Djemaa ElFna. La distribution de ce plan fut probablement très vite interrompue, car une erreur importante y figurait qui pouvait égarer les nouveaux arrivants: le nom de 'Riad Zitoun el Djedid' avait été donné au 'Riad Zitoun el Kedim' et inversement. C'est probablement l'explication de la rareté de ce plan, un grand nombre d'exemplaires a très bien pu être détruit.

Les principales adresses des commerces européens étaient concentrées sur un petit espace au centre de la médina.

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PLAN DE LA VILLE DE MARRAKECH EN 1935

PLAN DE LA VILLE DE MARRAKECH EN 1954

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PLAN DE L’ACTUELLE VILLE DE MARRAKEC

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La médina de Marrakech constitue le centre névralgique et le cœur historique de la ville de Marrakech. S'étendant sur une superficie globale de 600 hectares, elle est une des plus vastes médinas du Maroc et la plus peuplée d'Afrique du Nord. Son raffinement et sa spécificité urbanistique découlent directement de la virginité totale du terrain sur lequel elle fut érigée au XIE siècle. Articulée autour d'un campement militaire, le Qsar El Hajar, et d'un marché, elle fut augmentée d'une kasbah au XIIE siècle afin de la protéger des assauts répétés des tribus berbères de la plaine du Haouz, contribuant ainsi à asseoir durablement l'hégémonie Almoravide. Les célèbres remparts de la vieille ville de Marrakech subirent d'importantes modifications au gré des dynasties. Ainsi, ils furent à de maintes reprises percés de nouvelles portes (Bâb en arabe). Aujourd'hui, la hauteur des murailles oscille entre 8 et 10 mètres et elles s'étendent sur une distance totale dépassant les 19 kilomètres.

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LES SOUKS DE LA MEDINA DE MARRAKECH Marrakech est un haut-lieu historique du commerce et des échanges commerciaux par caravane au Maroc. Les souks de la médina de Marrakech sont de véritables labyrinthes d'échoppes et d'ateliers artisanaux, organisés par quartiers et par métiers et regroupent plus de 2600 artisans marocains pour une vingtaine de corporations. Le souk principal s’étend au centre de la médina, du nord de la célèbre place Jemaa el-Fna à la Medersa Ben Youssef. Les allées centrales qui traversent les souks sont réservées aux échoppes de ventes alimentées à l’origine par les artisans qui travaillent dans les ruelles adjacentes. Parmi ces souks : Souk Ahiak : marché de tissus et vêtements. Souk Attatine : marché de la dinanderie et des épiciers. Souk Cherratines : marché des selliers et du cuir. Souk Chouari : marché des vanniers et tourneur sur bois. Souk Dhabia : marché des bijoutiers ... Souk Dlala : marché aux enchères de djellabas. Souk El Kebir : marché des maroquiniers. Souk Eloustat : marché des tissus, laine, couverts en bois ... Souk Fekharines : marché des potiers. Souk Haddaddines : marché des forgerons et ferronnerie. Souk Kassabines : marché des vanniers et des épices. Souk Les Tamis : marché des lustres et des lampes en fer forgé. Souk Moulay Ali : divers ateliers. Souk Nejjarines : marché des menuisiers. Souk Rabia : marché des tapis. Souk Sabbaghines : marché des teinturiers. Souk Smata : marché des babouches. Souk Zrabia : marché de la maroquinerie, caftans et tapis.

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PRINCIPALES CARACTERISTIQUES DES HABITATIONS TRADITIONNELLES Les maisons sont fermées sur la rue et ouvertes sur leurs jardins ou cours intérieures, garantissant le respect intégral de l’intimité de la vie familiale. L’accès des terrasses était traditionnellement réservé aux femmes. Les riyads et les maisons traditionnelles sont constituées de pièces organisées symétriquement autour du wast ed dar. Dans les axes des façades : galeries de colonnes ou d’arcades, portes, b’hou ou sekaïa. Dans les pièces : fenêtres encadrant les portes et alcôves latérales. Les espaces de service (cuisine, salles d’eau, circulations) occupent de préférence les angles. Un certain nomadisme existait dans l’usage traditionnel des maisons en fonction des saisons. Les escaliers tournent sur eux-mêmes en s’appuyant sur des maçonneries. Habituellement, les constructions ne dépassent pas le niveau R+1.

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MORPHOLOGIE D’UN LOGEMENT TYPE D’UNE MAISON A PATIO

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Avant l'avènement du protectorat, Marrakech possédait tous les éléments d'une ville-jardin. Bien que bénéficiant d'un climat semi-aride très sec, la ville étonne par sa végétation luxuriante, avec sa vaste palmeraie et ses immenses jardins. Au début du XXe siècle, la ville se limitait à sa médina. Marrakech, contrairement aux autres villes marocaines, disposait de nombreuses et vastes étendues de jardins à l'intérieur même de ses remparts. Les plus importantes sont les jardins de l'Aguedal qui s'étendent au sud de la médina, sur quatre cent quarante hectares - soit pratiquement la superficie de la médina qui occupe environ six cents hectares. Entouré d'une enceinte, l'Aguedal représente le prototype parfait du jardin almohade du XIIe siècle, avec ses grands bassins réservoirs, ses carrés de plantations d'oliviers et de fruitiers et, surtout, le magnifique panorama qui s'offre au visiteur, avec à l'horizon la silhouette du Haut Atlas. À l'intérieur des remparts, en bordure du tissu urbain, se trouvaient également d'anciens jardins princiers nommés Arsa, datant du XVIIIe siècle, dont Arsat Moulay Abdeslam et Arsat Mamounia qui existent encore aujourd'hui.

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À ces jardins s'ajoutent les jardins de palais, également situés à l'intérieur de l'enceinte de la médina : le Riad du palais Al-Badi réalisé sous la dynastie Saadienne au XVIe siècle, et le palais de la Bahia et son Aguedal créés au tout début du XXe siècle par l'ancien vizir Ba Hmed.

POURQUOI SURNOMMER LA VILLE DE MARRAKECH «LA VILLE ROUGE » ? Cela est dû à la couleur des matériaux locaux de construction. C’est en fait du grès rouge, qui est une roche détritique, issue de l’agrégation et la cimentation (ou diagenèse) de grains de sable. Il peut s'agir d'une roche cohérente et dure. Le grès rouge est un sédiment de couleur rouge d'origine continentale, à faciès lacustre, déposé sous climat aride, en bordure d'un continent septentrional au cours du dévonien (vieux grès rouge), puis du permien (nouveau grès rouge).

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EVOLUTION ET DEPLACEMENT SPATIAL DES FONCTIONS URBAINES

Très vite, à Marrakech, sous l'impulsion des Almoravides, pieux guerriers et austères savants venus de l'actuel désert mauritanien, de nombreuses mosquées et médersas (écoles de théologie coranique) furent construites, ainsi qu'un centre commercial drainant le trafic entre Maghreb et l’Afrique subsaharienne.

Marrakech grandit rapidement et s'imposa comme une métropole culturelle et religieuse influent, supplantant Aghmat et Sijilmassa.

Des palais furent édifiés également et ornés avec le concours d'artisans andalous venus de Cordoue et de Séville, qui apportèrent le style omeyyade caractérisé par des coupoles ciselées et des arcs polylobés.

Cette influence andalouse fusionna avec les éléments sahariens voire ouestafricains et fut synthétisée dans une architecture originale totalement adaptée à l'environnement spécifique de Marrakech.

La ville devint la capitale de l'Émirat almoravide qui s'étendait des rives du Sénégal jusqu'au centre de l'Espagne et du littoral atlantique jusqu'à Alger. Ce qui fait de Marrakech une ville exceptionnelle, c’est sans doute le fait qu’il y ait des espaces libres, c’est-à-dire des places, des placettes, des parcs et des jardins à l’intérieur même des remparts de la médina.

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En termes de développement périurbain, Marrakech est un cas bien particulier. La capitale culturelle du Maroc, classée en 1985 patrimoine universel de l’humanité, évolue à un rythme effréné et son patrimoine millénaire est en train d’être dilapidé rapidement. En l’espace d’une vingtaine d’année, la ville à l’image des cités jardin d’Europe a été victime d’une dilapidation de son patrimoine foncier et culturel. Selon le paysagiste français Jean-Nicolas Le Forestier, ce patrimoine était l’une des plus grandes qualités de cette ville et une saine gestion aurait pu permettre une expansion judicieuse des parcs et des espaces verts de façon à soutenir et aérer la ville nouvelle.

Comme pour tout développement, certains acteurs viennent orienter les règles du jeu. Selon Mohammed El Faïz, le vandalisme patrimonial de La ville de Marrakech semble être orchestré par une concertation entre les lobbies politiques et privés. Le résultat est tel que pendant la période de 1989 à 1992, la superficie de la ville est passée de 3200 Ha à 18 000Ha.

L’augmentation exponentielle du territoire urbain de la ville sonne l’alarme. Les territoires et paysages environnants, comme la palmeraie, sont grandement affectés par ce fléau moderne.

Il semble que, comme dans la plupart des pays en voie de développement, cet étalement est principalement dû à l’annexion à la ville de ces bidonvilles (douars) périphériques. Cette tendance est accentuée à l’intérieure même de la palmeraie par la prolifération des complexes touristiques et des villas de luxe (Riads). Ce sont ces trois vecteurs qui ont été étudiés dans le but d’orienter le choix des études de cas suivantes.

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LES DOUARS PÉRIPHÉRIQUES DE MARRAKECH À Marrakech, le phénomène est sans précédents; en une dizaine d’années les douars périphériques ont triplé en nombre et sont passés de 55 à 156 et leur population a doublé passant de 74 000 à 150 000, soit 22% de la population urbaine de Marrakech. Il en résulte un dépassement total des instances publiques, qui ne savent plus comment gérer ce problème criant. Il semble que cette croissance phénoménale soit attribuable à l’application de politiques urbanistiques qui ont débuté sous le Protectorat Français. Les douars et les autres développements sont donc venus prendre naissance au tour de Marrakech et dans sa palmeraie. Ils ont évolué si rapidement qu’on à peine à comprendre leur fonctionnement et leur sens. À Marrakech, On parle aujourd’hui des douars périphériques comme d’ « un phénomène étrange et incompréhensible »1. Si bien que les douars sont devenus la honte de la ville ce qui est paradoxale, puisque Marrakech est selon les historiens, elle-même issue d’un immense douar.

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À l’origine le douar est l’habitat extra muros de la ville, il évolue à partir d’un assemblage de tentes jusqu'à un complexe de maisons en pisé avec des cours intérieures et des enclos à bestiaux. Aujourd’hui, le douar est constitué d’un entassement d’habitats insalubres. Pour bien comprendre la relation des habitants de la ville avec ces développements d’auto construction il est essentiel de connaître l’évolution de leur forme et de leur fonction dans le temps.

Mohammed El Faiz, décrit trois phases des douars :

1) LA PÉRIODE PRÉCOLONIALE : Depuis sa naissance la ville de Marrakech a continuellement évolué avec ces douars. À partir du moyen âge lorsque Marrakech est devenue capitale de l’empire, il s’est créé au tour de la ville un anneau de verdure comparable aux ceintures vertes de l’Europe. Cet ensemble de jardins et de vergers était entretenu par les habitants des douars ruraux. A cette époque les douars avaient donc une fonction nourricière pour la ville et leurs habitants étaient d’habiles agriculteurs et jardiniers. Les douars étaient donc une unité productive qui soutenait le développement de la ville.

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2) LA PÉRIODE COLONIALE : La colonisation et le protectorat français apporta un changement de fonction marqué pour les douars. Les douars ont commencé à être mal perçus par la population au moment où les urbanistes français leur ont donné une fonction de dortoirs d’ouvriers. Les douars ouvriers étaient à partir de cette époque localisés près des grands chantiers colonialistes et avaient comme seule fonction de fournir de la main d’œuvre. On leur donna le nom de douars prolétaires. Les jardins et terres en périphérie de Marrakech commencèrent à dépérir sans l’entretien de leurs jardiniers.

3) LA PÉRIODE POST COLONIALE : Après le départ des Français, les douars se sont artificialisés. Ils sont aujourd’hui devenus la seule terre d’accueil pour les paysans pauvres qui migrent de la campagne vers la ville. Sans les infrastructures publiques urbaines, ces douars sont affectés par des problèmes de croissance anarchique et d’insalubrité grandissante. Les services d’urbanisme sont incapables de faire face à la crise et de répondre aux besoins économiques et sociaux de ces espaces changeants. Les douars bidonvilles se rapprochent de l’image des autres bidonvilles des grandes métropoles du monde.

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LE DÉVELOPPEMENT TOURISTIQUE DE LA PALMERAIE Comme bon nombre d’endroits exotiques sur terre, la palmeraie de Marrakech attire des étrangers désireux de vivre une expérience de dépaysement. Depuis près d’une trentaine d’années, la palmeraie est victime de ce qu’on pourrait appeler une « Dysneyfication » et d’une déstructuration de ces paysages typiques3. Le phénomène d’expansion des installations touristiques, est visible un peu partout à Marrakech, mais c’est à l’intérieur de la palmeraie que durant les 10 dernières années on a vu l’augmentation la plus haute d’offre hôtelière. Pendant cette période la palmeraie a gagnée ~3000 lits hôteliers. Les équipements qui les accompagnent prennent des proportions phénoménales, ils incorporent des complexes sportifs, des centres de congrès luxueux, des jardins, golfs et piscines. Les complexes hôteliers, comme les « Jardins de Palmeraie », sont souvent bâti à quelques pas des douars et s’isolent par des remparts. Cette situation marque une forte tendance à la ségrégation et l’isolement des communautés.

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LES VILLAS ET LES RIADS Les villas et les Riads sont en nombre moins important dans les palmeraies. Elles sont pourtant les premières à avoir eu accès à ce territoire. Elles sont jugées peu nuisibles, mais il semble que leurs croissances doivent être surveillées parce qu’elles occupent de grandes superficies et qu’elles tendent à privatiser la palmeraie. La moyenne de la superficie des villas dans les années quatre-vingt-dix, étaient de 3 Ha. Il faut marquer une tendance à l’augmentation de leur superficie puisque « les 10 permis de lotissement accordés pour des villas en 1986 couvraient une superficie de 300Ha ». La palmeraie qui servait de jardin d’agrément et de promenade pour les habitants de Marrakech, tend donc à se privatiser. Son développement semble être orienté en fonction des besoins des touristes, plutôt qu’en fonction des habitants de la ville et de sa périphérie. La palmeraie perd donc son rôle identitaire local et dépérit rapidement, faute d’entretien adéquat.

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Jusqu’á l’avènement du protectorat, Marrakech est constituée en un tout complexe et hétérogène au sein de la médina selon une organisation typique des villes musulmanes. Les différentes classes sociales sont réunies à l’intérieure des remparts, même si elles sont localisées dans des quartiers différentes et, surtout, dans des maisons d’un confort très inégal. Mais cette population intra-muros est loin d’être un groupe clos. Marrakech est un pivot du commerce transsaharien, qui accueille les caravanes de marchands dans ses fondouks, mais aussi les paysans des environs venus approvisionner la vole et les serviteurs du pouvoir quand elle est aussi capitale sous les dynasties almoravide et almohade, puis à nouveau sous les Saadiens. Ces migrants, temporaires ou définitifs font croitre et décroître la population de la ville au gré de ses fortunes et de ses infortunes, mais les remparts restent une protection pour tous, une enveloppe qui suffit à contenir la croissance démographique et surtout un point de contact avec le monde extérieur.

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Cette évolution avec ses hauts et ses bas s’étend sur plus de huit siècles. En moins de cinquante ans, le protectorat va modifier radicalement ce modèle d’organisation et imprimer une marque que l’indépendance n’effacera á aucun moment. Il crée ainsi les conditions d’une croissance irréversible, qui se substitue aux oscillations du passé. Il bouleverse d’abord l’équilibre économique de la région en transformant une agriculture de la subsistance en une production essentiellement orientée vers l’exportation, moyennant le développement d’une industrie agro-alimentaire, qui reste cependant bien incapable d’absorber l’excédent de population active rurale induit par la mécanisation. Il introduit par ailleurs un système urbain dual qui fait sortir Marrakech de ses murs, en créant des quartiers réservés aux Européens et transforme le rempart en un instrument de ségrégation raciale et sociale. Le cadre est prêt pour les évolutions majeures qui vont marquer le Marrakech contemporain: le délaissement de la médina par la bourgeoisie et la classe moyenne, qui ne s’estompe qu’au hasard d’une évolution urbaine qui échappe largement aux autorités.

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MUTATIONS URBAINES ET CHANGEMENT ARCHITECTURAL

La ville de Marrakech a connu plusieurs transformations surtout au niveau de l’architecture postcoloniale, qu’on appellera la nouvelle ville, ou encore la ville moderne. Ce changement est visible à travers une architecture qui se caractérise essentiellement par sa verticalité, ses voiries larges et orthogonales, mais encore la création de places et placettes publiques, de jardins et de parcs … sans oublier la répartitions des fonctions urbaines et la spécialisation des nouveaux quartiers, selon les paramètres socio-économiques et socioprofessionnels.

GUELIZ Le quartier de Gueliz tire son nom du Jbel Gueliz, massif de grès de faible altitude situé au nord-ouest de l'ancienne médina au nom berbère. Ce fut le premier quartier situé à l'extérieur des remparts, autrefois réservés aux défunts. Articulé autour de l'actuelle Avenue Mohammed V joignant le Square Foucault et Bab Nkob au Jbel Gueliz, le quartier de Gueliz concentre la majorité des banques et des boutiques de Marrakech. La poste, située place du 16 novembre, est aussi un bâtiment datant de l'époque protectorale, au même titre que l'ancien marché de Guéliz qui fut récemment déplacé pour céder place au complexe Carré Eden (commerciale, résidentiel et hôtelier). L'ensemble du quartier de Gueliz ayant été classé par la wilaya zone immeuble R+ 5.

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Plan du quartier de Guéliz

Vue sur l’ensemble du quartier de Guéliz

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L'HIVERNAGE Situé au sud-ouest du quartier de Gueliz, le quartier de l'Hivernage abrite des villas cossues et de nombreux complexes hôteliers tels que la Mamounia (hôtel le plus luxueux d'Afrique et le sixième au monde, le Royal Mansour et Le Pearl, pour ne citer que les plus prestigieux. Le poumon de ce quartier est l'avenue Mohammed VI, anciennement avenue de France et récemment prolongée jusqu'au sud-est de la route de l'Ourika, le long des remparts du quartier de l'Agdal. Cette large et verte avenue abrite l'imposant Théâtre royal, le Palais des Congrès, ainsi que la nouvelle grande gare.

Plan du quartier de l’Hivernage

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Vue sur l’avenue Mohamed Vl

L'AVENUE MOHAMMED VI (EX AVENUE DE FRANCE) Bien que fraîchement inauguré en mai 2004, le tronçon de 5 kilomètres de l'avenue Mohammed VI reliant l'avenue de la Ménara à la route de l'Ourika voit se développer rapidement de nombreux complexes résidentiels et hôteliers de haut standing. Par ailleurs, c'est le long de l'avenue Mohammed VI que fut construite la plus grande discothèque du Maroc, Le Pacha de Marrakech, établissement ayant permis à Marrakech d'acquérir son nouveau statut de lieu de rendez-vous de la jeunesse branchée et des "clubbers". Enfin, c'est ici que fut construit le premier multiplex de Marrakech, succédant ainsi aux deux "grands" cinémas de Marrakech que furent Le Colisée à Gueliz, et le Cinéma Rif, à Daoudiate ainsi que le nouveau centre commercial Al Mazar.

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LES QUARTIERS HORS-REMPARTS Au cours des années 1980, la ville de Marrakech s'est considérablement étendue à l'ouest le long de plusieurs pénétrantes, en particulier les rues El Mouqaouama, la route d'Essaouira, et dans une moindre mesure la rue Mohammedia. Ce sont les quartiers de Massira 1, 2 et 3, Hay Azli et Hay Socoma. Parallèlement, au nord-ouest, le long de la route de la Targa (également appelée route de Souihla), ont été construits plusieurs quartiers résidentiels de standing globalement élevé. Ce sont les quartiers de Targa,d'Al Masmoudi, de Jawhar, de Hay Sofia, d'Inara, Borj Targa et Massira 3. Au sud-ouest, le long de la route de Guemassa, souvent appelée route de l'aéroport Marrakech - Ménara, se sont développés les quartiers de M'Hamid, Bouekkaz, Agdal. On notera également l'existence de douars importants comme douar Cherki et douar Berrada. Au nord, il y a des quartiers résidentiels comme Amerchich, Hay Firdaouss, Al Andalouss, Riad Salam, Cité Yasmine, Saada et la Palmeraie. À la sortie nord de Marrakech, se dresse Tamansourt qui est une ville nouvelle située à 10 km sur la route d'El Jadida. Cette ville a été créée en 2005, sous la houlette du roi Mohamed VI, dans le but de désengorger Marrakech. Elle est composée principalement de villas, appartements et riads. Une grande mosquée y a été construite ainsi que de nombreuses écoles. Sont en projet un immense parc sportif, une université, des hôtels et piscines. Cette ville nouvelle a la particularité d'être une ville écologique puisqu'elle déborde d'espaces verts et l'éclairage public est composé de lampes dites Led qui sont très respectueuses de l'environnement.

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SIDI YOUSSEF BEN ALI Sidi Youssef Ben Ali est l'une des deux communes urbaines de la préfecture de Sidi Youssef Ben Ali. En 1994, avec une densité de 508 habitants par kilomètre carré (196 396 habitants dans une superficie de 3,1 km²), c'était le quartier le plus dense de Marrakech. Le stade Sidi Youssef Ben Ali où s'entraine l'Olympique de Marrakech, les Universités Kadi Ayyad et Al- Kadissiya, l'échange de visites et des rencontres de réflexion périodiques, font de ce quartier un véritable espace de vie et d’échanges.

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LA MENARA À l'extérieur des remparts s'étend, à l'ouest de la médina, un autre grand Aguedal almohade : la Ménara.

En dehors de ce jardin clos extra-muros, la médina était entourée d'une vaste palmeraie qui s'étendait au nord et à l'ouest de la ville. Constituée de bosquets et de palmiers dattiers, la palmeraie était ponctuée de jardins nourriciers (jnan) ; citons, parmi ceux qui furent réhabilités, le Jnan El Harti. Contrairement aux autres villes marocaines il y a une nouvelle ville déjà tracée par les militaires français. Ces derniers avaient commencé à aménager un quartier européen (le quartier du Guéliz), au nord-ouest de la médina, entre les remparts et le camp militaire installé plus au nord, en contrebas de la colline du Guéliz (nom repris pour la nouvelle ville). Des mesures de protection avaient déjà été prises pour préserver la palmeraie et les jardins existants.

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Afin d'améliorer le réseau de voies tracé par les militaires, Forestier esquissa des profils de voies-promenades en bordure desquelles il proposa des passages couverts pour protéger du soleil et de la poussière. Par ailleurs, Forestier prescrivit d'éloigner les usines des habitations et de la palmeraie de façon à ne pas défigurer le paysage emblématique du Haut Atlas au sud.

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CONCLUSION Marrakech abrite un nombre impressionnant de chefs-d’œuvre de l’architecture et de l’art (remparts et portes monumentales, mosquée de la Koutoubia, tombeaux saâdiens, ruines du palais Badiâ, palais Bahia, bassin et pavillon de la Ménara) dont chacun pourrait justifier, à lui seul, une reconnaissance de la Valeur universelle exceptionnelle. La capitale des Almoravides et des Almohades a joué un rôle décisif dans le développement de l’urbanisme médiéval. La capitale des Mérinides, Fès Jedid (la Nouvelle), partie intégrante de la médina de Fès, inscrite en 1981 sur la Liste du patrimoine mondial, est une adaptation du modèle urbain antérieur de Marrakech. Marrakech, qui a donné son nom à l’empire marocain, est l’exemple achevé d’une grande capitale islamique de l’Occident méditerranéen. Dans les 700 hectares de la Médina, l’habitat ancien, devenu vulnérable du fait de l’évolution démographique, représente, avec son lacis de ruelles, ses maisons, ses souks, ses fondouks, ses activités artisanales et commerciales traditionnelles, un exemple éminent de ville historique vivante.

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REFERENCES

Livre : « Gens de Marrakech: géo-démographie de la ville rouge » -

MOHAMED SEBTI YOUSSEF COURBAGE PATRICK FESTY ANNE-CLAIR KURZAC-SOUALI Les éditions de l’Ined, Paris, 2009.

Sites internet : http://fr.wikipedia.org/wiki/Marrakech http://whc.unesco.org/fr/list/331/ http://fr.geneawiki.com/index.php/Maroc_-_Marrakech http://www.insecula.com/musee/M0290.html http://www.hello-marrakech.com/pages/plan_marrakech_carte_ville_marrakechpag.html http://mangin2marrakech.canalblog.com/archives/2012/08/17/25938277.html http://voyageurtic12.wordpress.com/2011/10/ http://www.zwinup.com/origine-de-marrakech-histoire-de-sa-fondation-709.html http://www.guidesdumaroc.com/index.php?option=com_content&view=article&id=87&Ite mid=87&lang=fr

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TABLE DES MATIERES Sommaire …………………………………………………………………………………………..………… 2 Introduction ………………………………………………………………………………………………….3 Les caractéristiques principales du plan ancien de la ville ………………………….....6 -

Le plan de la ville en 1830…………………………………………………………………… 7 Le plan de la ville en 1844 …………………………………………………………….……. 8 Le plan de la ville en 1913 ……………………………………………………………………9 Le plan de la ville en 1935 …………………………………………………………………14 Le plan de la ville en 1954…………………………………………………………………. 14 Le plan de la ville en 2014 ………………………………………………………………….15 Les souks …………………………………………………………………………………………..17 Les habitations ……………………………………………………………..……………………18

Evolution et déplacement spatial des fonctions urbaines …….……………………..22 -

Les douars ………………………………………………………………………………………… 24 La colonisation …………………………………………………………………………………..26 Le développement touristique de la palmeraie ………………………………….27 Villas et Riads …………………………………………………………………………………….28

Mutations urbaines et changement architectural ………………………………………..31 -

Le quartier de Guéliz ………………………………………………………………………….31 Le quartier de l’Hivernage ………………………………………………………………….33 L’avenue Mohamed Vl ……………………………………………………………………… 34 Les quartiers hors rempart ………………………………………………………………..35 Le quartier de Sidi Youssef Ben Ali …………………………………………………….36 Le quartier de La Menara ………………………………………………………………….37 Conclusion ………………………………………………………………………………………...39 Références ………………………………………………………………………………………. 40

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