Guide Santé sexuelle et reproductive Médecins du Monde

Page 100

4B

BARRIÈRES À L’ACCÈS AUX SOINS

et leur interprétation) ; > le rôle clé de la société, du groupe,

de la famille dans l’itinéraire thérapeutique (rôle des maris, des pères, des mères, des accoucheuses traditionnelles, des leaders religieux…) ; > le pluralisme médical avec des offres de soins variées (médecines traditionnelle et biomédicale) ; > la relation soignant/soigné ; > les enjeux économiques, sociaux et politiques. Un diagnostic socioculturel en début de projet est préconisé afin de pouvoir identifier les personnes clés de la communauté, comprendre les barrières à l’accès aux soins, les itinéraires thérapeutiques et comprendre les représentations autour de la santé sexuelle et reproductive. Une collecte de données, par les méthodologies qualitatives (observation, entretien et focus groupe) ainsi que l’analyse des données par la triangulation de ces trois méthodes permettent la mise en lumière des déterminants socioculturels de l’accès aux soins. > ces méthodes sont expliquées dans le guide « Collecte de données qualitatives227 » de Médecins du Monde

Une fois ces informations obtenues, il est important de les intégrer lors de la programmation et la mise en œuvre du projet. En effet, d’un point de vue éthique, il est essentiel de prendre en considération de façon respectueuse mais aussi en les questionnant les DSC, ce qui permet d’améliorer la qualité, l’efficacité et la pérennité des projets. Il est également essentiel d’avoir une attention particulière et de se questionner sur les DSC tout au long du projet afin de réadapter notre approche si besoin. 227. Bouchon M., Collecte de données, Méthodologies qualitatives, MdM, 2e édition, 2012

FR 196

LAOS – Comprendre

FRANCE, CASO PARIS –

les traditions et s’adapter

Accompagnement d’une famille

« Lors de l’ouverture du projet, nous avons découvert une tradition laotienne, le youfay (qui signifie le feu) : après son accouchement, la femme est installée avec son nouveau-né près d’un feu alimenté par son mari et la communauté et laissée pendant plusieurs jours dans une chaleur intense et des fumées denses. Au premier abord, cette tradition nous avait paru difficile à supporter avec notre regard de femmes étrangères et dangereux de notre point de vue médical. Pourtant, une enquête qualitative nous a permis de mieux comprendre cette tradition, de savoir pourquoi elle était réalisée et d’adapter notre message d’éducation à la santé pour qu’il soit acceptable médicalement et culturellement. Notre message a donc été que le youfay devait être moins chaud et durer moins longtemps pour permettre à la femme de se reposer et de respecter la tradition sans prendre de risque pour sa santé ou pour celle de son enfant. Aujourd’hui, les messages de prévention sont bien compris et acceptés par la population. »

« L’histoire de Marc illustre assez bien les difficultés entre une famille rom et l’institution de l’hôpital. Il y a deux ans, sa mère s’est rendue aux urgences car, à 6 mois de grossesse, elle perdait les eaux ; elle ne pouvait pas expliquer en français qu’elle avait déjà accouché d’un bébé prématuré de 900 gr ni qu’elle avait déjà eu un bébé mort in utero. Elle n’a pas été hospitalisée et est retournée dans sa cabane. Une semaine plus tard, elle est revenue, et est restée à la maternité jusqu’à l’accouchement d’un nouvel enfant de près de 1 kg, Marc, qui depuis souffre de diverses complications liées à sa prématurité. À l’âge de 2 ans, Marc présentait des séquelles motrices nécessitant un bilan et une prise en charge adaptés. Les parents ne comprenant pas les dates de consultation, ils n’ont pu honorer les nombreux rendez-vous donnés par l’hôpital… jusqu’à ce que le médecin de l’hôpital fasse un signalement au procureur pour défaut de soins. MdM a alors accompagné cette famille dans les différentes consultations. Les parents assurent désormais tous les rendez-vous sans aucun problème. Dans cette situation, MdM n’a fait que faciliter la rencontre entre cette famille, avec sa langue, son rythme et ses repères, et le monde de l’hôpital et ses logiques administratives. »

Élise Lesieur - Coordinatrice médicale

La qualité des services de SSR n’est pas d’une grande utilité si par ailleurs les patients désertent ces services ou ne comprennent pas les soins ou les médicaments qu’on leur propose. L’adaptation socioculturelle des procédures, le langage, les normes (position d’accouchement, présence d’un ou de plusieurs accompagnants…), les valeurs, les pratiques relationnelles avec les soignants sont déterminantes dans l’accès aux soins.

et pratiques de la population sont essentielles pour améliorer les connaissances en SSR, pour renforcer les aptitudes et pour encourager l’adoption des pratiques saines.

3 / INDICATEURS Le choix d’indicateurs de suivi de projet spécifiques peut encourager la prise en compte des DSC. En effet, des indicateurs sur les DSC pourront pousser les équipes à être vigilantes à leur prise en compte tout au long de la mise en œuvre du projet. Par exemple : > taux d’accouchement assistés respectant la position d’accouchement souhaitée par la femme ; > taux de consultations prénatales pour lesquelles les moyens (interprète, médiateur, cryptogrammes…) sont mis en place pour que la communication orale soit efficace.

Dr Anne-Marie Dandres - Pédiatre

Les activités d’éducation pour la santé adaptées aux besoins, représentations 197 FR


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.