Fondation Pierre Gianadda - Michel Darbellay

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FONDATION PIERRE GIANADD A SupplĂ©ment du 18 dĂ©cembre 2020. Ce cahier ne peut ĂȘtre vendu sĂ©parĂ©ment.
Photographe DU 5 DÉCEMBRE 2020 AU 13 JUIN 2021
MICHEL DARBELLAY
Retrouvez tous les bĂ©nĂ©ïŹciaires

SOMMAIRE

4 EXPOSITION MICHEL DARBELLAY, DANS L’OBJECTIF D’UN AMBASSADEUR DU VALAIS

15 SAM SZAFRAN ET LÉONARD GIANADDA, UNE HISTOIRE D’AMITIÉ

19 UNE COLLECTION, UNE HISTOIRE, UNE VIE. LÉONARD GIANADDA RACONTE SA PASSION DE L’ART ET DES ARTISTES

22 LE MUSÉE DE L’AUTOMOBILE SOUS UN NOUVEL ÉCLAIRAGE

23 LA NOUVELLE SCULPTURE «ÉPURÉE» DE PONCET, UNE QUÊTE D’ÉQUILIBRE

25 LE VALAIS À LA UNE. UN SIÈCLE VU PAR LES MÉDIAS

32 L’EXPOSITION DE L’ÉTÉ 2021: GUSTAVE CAILLEBOTTE, IMPRESSIONNISTE ET MODERNE

36 PRATIQUE: LES PLANS DE MARTIGNY-LA-ROMAINE ET DES JARDINS DE LA FONDATION

2020

ous voici au terme de cette annĂ©e de tous les bouleversements, inattendus, soudains, violents. Le vendredi 13 mars, le Covid-19 nous oblige Ă  fermer les portes de la Fondation. Des Ă©vĂ©nements sont annulĂ©s: deux concerts de Cecilia Bartoli en avril, «Caillebotte» en Ă©tĂ©, que nous avons eu la chance de pouvoir reporter Ă  l’annĂ©e prochaine. Et que dire de l’exposition «Chefsd’Ɠuvre suisses, Collection Christoph Blocher» que nous avons pu prolonger de plusieurs mois?

Christoph et Silvia Blocher nous avaient donnĂ© la possibilitĂ© de choisir dans leur collection tout ce que nous souhaitions exposer. Nous avons notamment dĂ©crochĂ© des toiles majeures dans leur salle Ă  manger, leur salon, leur chambre Ă  coucher. Christoph Blocher a fĂȘtĂ© ses 80 ans le 11 octobre sans ses plus beaux chefsd’Ɠuvre
 absents plus d’une annĂ©e.

En collaboration avec le Centre Pompidou, nous avions programmĂ© le vernissage de l’exposition «Dubuffet» le 3 dĂ©cembre. ConfrontĂ©s Ă  de trop grandes difficultĂ©s, nous avons obtenu que cet Ă©vĂ©nement soit reportĂ© Ă  l’hiver 2021 / printemps 2022.

Pour accompagner l’exposition «Dubuffet», il Ă©tait

prĂ©vu dans les salles du Foyer de rendre hommage Ă  Michel Darbellay, photographe de talent dĂ©cĂ©dĂ© pendant la pandĂ©mie. Au pied levĂ©, Sophia Cantinotti et JeanHenry Papilloud, commissaires, ont acceptĂ© d’élargir cette exposition. Ils prĂ©sentent un vaste panorama d’un auteur qui a su rendre les couleurs des saisons ainsi que la vie des hommes en utilisant le langage universel de l’image. Quant Ă  l’hommage Ă  Sam Szafran, agendĂ© durant l’exposition «Caillebotte», il accompagnera l’exposition «Michel Darbellay» jusqu’en juin prochain. Que de bouleversements, inattendus, soudains, violents. Mais quelle gĂ©nĂ©rositĂ©, quelle solidaritĂ© et quelle amitiĂ© tĂ©moignĂ©es par tant d’acteurs.

Le 23 aoĂ»t, jour de mes 85 ans, Cecilia Bartoli a donnĂ© son concert Ă  la Fondation et chantĂ© «Joyeux anniversaire »

D’une mĂȘme voix, mes collaborateurs ont accompli des miracles pour pallier l’adversitĂ©. MERCI Ă  chacun.


 Et que le spectacle continue.

Léonard Gianadda

CI-DESSUS: Concert du 85e anniversaire de Léonard Gianadda, 23 août 2020.

COUVERTURE:

Michel Darbellay, Douves-Blanches, 1970. © Michel Darbellay, MédiathÚque Valais - Martigny

IMPRESSUM

Editeur Editions Le Nouvelliste

S.A., rue de l’Industrie 13, 1950 Sion

Responsable des magazines

Didier Chammartin

Rédacteurs Sophia Cantinotti, Charles Delaloye, Léonard Gianadda, Jean-Henry Papilloud, Antoinette de Wolff-Simonetta

Réalisation Sonia Pitot

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Impression Swissprinters AG

Tirage 73 500 exemplaires

Diffusion Encarté dans «Le Nouvelliste», et distribué à la Fondation Pierre Gianadda.

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MICHEL DARBELLAY, vrai

En cinquante ans de carriĂšre dans l’image, Michel Darbellay a arpentĂ© le Valais de toutes les maniĂšres imaginables: Ă  pied, Ă  ski, en moto, en voiture, en hĂ©licoptĂšre et en avion.

A la suite de son pĂšre Oscar, photographe, cinĂ©aste et Ă©diteur de cartes postales, il a poursuivi un but premier: faire dĂ©couvrir le Valais dans sa diversitĂ© et, plus encore, le faire apprĂ©cier autant qu’il l’aimait. Le rĂ©sultat de ces nombreuses annĂ©es de travail est un fonds d’archives exceptionnel – 600 000 photographies et une septantaine de films documentaires – confiĂ© Ă  la MĂ©diathĂšque Valais - Martigny en 2010.

Hommage Ă  un photographe

A l’approche de ses 80 ans, Michel Darbellay a choisi de dĂ©poser tous ses appareils qui l’avaient fidĂšlement

accompagnĂ© et de vider son atelier de la rue des Alpes. Une Ă©tape Ă  n’en pas douter difficile, mais qui permettait de sauvegarder un ensemble essentiel pour le patrimoine audiovisuel du canton.

Personne ne pouvait alors imaginer que quelques annĂ©es plus tard, en pleine pandĂ©mie de coronavirus, Michel s’en irait rejoindre les sommets Ă©ternels, nous laissant en hĂ©ritage l’Ɠuvre de toute une vie.

Le photographe Ă©tait un ami fidĂšle de la Fondation Pierre Gianadda. Il nous a paru Ă©vident de lui rendre hommage Ă  travers une exposition rĂ©trospective. Celle-ci, initialement prĂ©vue dans les galeries du Foyer, en parallĂšle Ă  l’exposition «Dubuffet», a

Ă©tĂ© modifiĂ©e en octobre en raison du retour en force du coronavirus. Tout l’espace principal de la Fondation lui est finalement dĂ©diĂ©: un cadeau bienvenu pour mettre davantage en valeur les photographies, en dĂ©pit du temps trĂšs restreint pour l’organiser.

Face Ă  la multitude des sujets traitĂ©s, tant en noir et blanc qu’en couleur, nous avons essentiellement travaillĂ© Ă  partir des 22 000 photographies numĂ©risĂ©es par la MĂ©diathĂšque Valais - Martigny. ComparĂ© Ă  la totalitĂ© des prises de vue, ce choix peut paraĂźtre restreint. Il est cependant suffisamment diversifiĂ© pour nous permettre d’essayer de transmettre un reflet du regard de

Michel Darbellay sur le monde qui l’entourait et qui n’a jamais cessĂ© de le surprendre.

Les quatre saisons du Valais

Homme de terrain, attentif aux changements de lumiĂšre dans la nature, Michel Ă©tait sensible au passage du temps, aux rituels saisonniers, aux variations de couleurs et d’atmosphĂšre. Tout naturellement donc, comme pour le livre et l’exposition «Sculptures en lumiĂšre» en 2014, l’idĂ©e des quatre saisons s’est imposĂ©e. Un fil rouge d’ailleurs plusieurs fois suivi par le photographe lui-mĂȘme dans ses publications, mais Ă©galement un clin d’Ɠil au maestro Claudio Scimone et au chef-d’Ɠuvre de Vivaldi
 Exposer les Ɠuvres de Michel Darbellay, c’est parler du Valais, de ses paysages, des hommes et

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1. Loup, 1962. 2. La BĂątiaz, Martigny, octobre 1967. 3. Arolla, 6 septembre 1986.
MICHEL DARBELLAY, PHOTOGRAPHE - EXPOSITION DU 5 DÉCEMBRE 2020 AU 13 JUIN 2021 23 4 1 PAGE 4

ambassadeur du Valais

des femmes qui l’ont construit et qui le font vivre. C’est surtout entraĂźner le public dans des univers et des rencontres d’une longue carriĂšre passĂ©e sur les sentiers et dans les airs. Comme il l’écrit, le Valais a toujours Ă©tĂ© son lieu de rĂ©flexion et d’émerveillement favori: «Mes crayons, Hasselblad, Leica, pellicule couleur et noir-blanc, mais avant tout une Ă©motion et une admiration toujours renouvelĂ©es pour ce grand dĂ©cor dans lequel j’évolue depuis l’enfance.»

En novembre 2010, lors de l’entretien que nous avons rĂ©alisĂ© avec lui pour les «Portraits de Valaisan-ne-s» et «Martigny se souvient», le photographe nous confiait travailler sur une derniĂšre maquette, un livre consacrĂ© aux mayens. Modestes habitations perchĂ©es dans les pĂąturages intermĂ©diaires de printemps et d’automne, elles symbolisaient

pour Michel la derniĂšre Ă©tape de sa carriĂšre qu’il dĂ©coupait en phases de travail: 20 ans, les itinĂ©raires prĂ©somptueux; 30 ans, le temps des arĂȘtes effilĂ©es; 40 ans, le temps des sommets plus aimables; 50 ans, le temps de l’hĂ©licoptĂšre; 60 ans, le temps des pĂąturages et des mayens.

Sur les pas de Michel

Nous aurions bien sûr aimé réaliser cette exposition en sa compagnie, pour nous guider dans la sélection, nous aider à reconnaßtre les sommets et les points de vue, les histoires des reportages et des

rencontres
 Heureusement, nous avons pu compter sur l’aide et la collaboration si prĂ©cieuse de sa famille: son Ă©pouse Caty et leurs deux fils Laurent et HervĂ©, les compagnons d’une quĂȘte inlassable d’images uniques et saisissantes, et surtout authentiques.

Au total, plus de 200 photographies sont prĂ©sentĂ©es Ă  la Fondation, mĂȘlant paysages et reportages. Elles sont accompagnĂ©es d’extraits de films qui permettent Ă  chaque visiteur de rencontrer plus intimement cet artiste pluridisciplinaire.

Enfin, Michel Darbellay ayant aussi parcouru d’autres pays, quelques images de ses pĂ©riples

au Canada (1962) en Asie (1971) ou en Bretagne (1975) sont présentées pour la premiÚre fois.

A l’heure du fast-food, de l’hyperconnexion et du tout numĂ©rique, les photographies de Michel Darbellay nous posent une question essentielle: savons-nous encore nous laisser Ă©merveiller en toute simplicitĂ© par la beautĂ© qui nous entoure?

En 1983, au moment de fermer son commerce pour se consacrer entiĂšrement Ă  la prise de vue, le photographe dĂ©voilait son objectif: «Je veux rester, Ă  travers la photo, trĂšs proche du pays, trĂšs proche de la terre. [
] Je travaillerai pour ceux qui voudront bien m’écouter.»

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et Jean-Henry Papilloud, commissaires de l’exposition 4. Emosson, 26 juin 1989. 5. Cervin, mai 1966. 6. Suffragette, Martigny, 22 mai 1970. Photos © Michel Darbellay, MĂ©diathĂšque Valais - Martigny
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Une formation

marquée par les Alpes

Comment dĂ©finir la photographie de Michel Darbellay? Comment dĂ©finir l’homme lui-mĂȘme? Photographe mais aussi cinĂ©aste, guide de montagne, professeur de ski, pilote d’avion, commerçant: une personne aux multiples facettes
 Epris de libertĂ©, amoureux de la nature et passionnĂ© de montagne, Michel choisit dĂšs son adolescence une profession qui peut rĂ©pondre Ă  ses aspirations. Comme il le racontait lui-mĂȘme: «J’ai dĂ©cidĂ© de rester Ă  Martigny et de faire un apprentissage de photographe, si possible chez mon pĂšre, parce que j’étais tout prĂšs des montagnes, donc je pouvais continuer Ă  faire du ski et de la montagne, voire de la varappe. C’était le dĂ©but d’une carriĂšre mi-photo, mi-cinĂ©ma, mi-montagne.»

Pùre et fils unis dans l’image

NĂ© en 1936, Michel Darbellay est le fils aĂźnĂ© d’Oscar Darbellay et de Jeannette Mettan. Son pĂšre, originaire de MartignyBourg, diplĂŽmĂ© des Beaux-Arts de BĂąle, gagne d’abord sa vie comme peintre et surtout photographe saisonnier dans les petites stations de Salvan et de Champex. Il ouvre ensuite un magasin et un studio de photographe Ă  Martigny. Avec son frĂšre et sa sƓur, Michel se contente tout d’abord de poser sans bouger devant l’objectif

paternel, puis il accompagne son pĂšre dans ses balades en montagne, sur des chantiers, Ă  travers le Valais, portant parfois «des appareils de grand format sur le dos». Pendant son apprentissage, le jeune homme aide son pĂšre Ă  mettre sur pied, Ă  inventer mĂȘme, un systĂšme artisanal de production de cartes postales noir et blanc: un commerce qui va se dĂ©velopper en mĂȘme temps que le tourisme. Aux cĂŽtĂ©s d’Oscar, Michel apprend donc Ă  choisir les bons points de vue, dĂ©couvrir le

Valais dans son unicitĂ© et sa diversitĂ©, aimer grimper Ă  l’assaut des sommets puis redescendre en slalomant dans la poudreuse. En 1979, Ă  l’heure de remettre Ă  Oscar et Michel Darbellay le Prix de la Ville de Martigny, le prĂ©sident, Jean Bollin, reprendra des paroles de Ramuz pour les appliquer aux deux photographes: «Ils ont su retenir tout le charme fuyant des heures qui ne reviennent plus.» Mis bout Ă  bout, c’est en effet prĂšs d’un siĂšcle de vie valaisanne qui a Ă©tĂ© enregistrĂ© par le pĂšre et le fils, tĂ©moignages prĂ©cieux qui nous permettent aujourd’hui de mieux cerner les changements des paysages et de la vie quotidienne des habitants de ce coin de pays.

MICHEL DARBELLAY, PHOTOGRAPHE - EXPOSITION DU 5 DÉCEMBRE 2020 AU 13 JUIN 2021
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Rarogne, 13 avril 1979. Photo © Michel Darbellay, MédiathÚque Valais - Martigny
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«J’ai dĂ©cidĂ© de rester Ă  Martigny [...], parce que j’étais tout prĂšs des montagnes.»

Photographe, guide, pilote


DĂ©sireux de voler de ses propres ailes, Michel quitte sa ville natale pour travailler Ă  Gstaad, puis Ă  Lausanne. De retour Ă  Martigny Ă  24 ans, il reprend, mĂȘme s’il ne se trouve pas l’ñme d’un commerçant, le magasin et laboratoire d’un collĂšgue d’apprentissage, Paul Ducrey. TrĂšs exigeant en matiĂšre de qualitĂ©, il gagne la confiance des gens, mettant son expĂ©rience Ă  leur service. Il soutient les amateurs du photo-club de la rĂ©gion, publie des images dans la cĂ©lĂšbre revue valaisanne «Treize Etoiles» et participe au dĂ©veloppement de l’économie locale Ă  travers la rĂ©alisation de plaquettes publicitaires et touristiques. Ses compĂ©tences de guide, professeur de ski et pilote d’avion lui permettent aussi de proposer des services qui sortent des sentiers battus. Ainsi les photographies aĂ©riennes, rĂ©alisĂ©es Ă  bord

d’un Piper, constituent quelquesuns de ses plus beaux souvenirs professionnels.

Les divers mandats qu’il dĂ©croche sont un vĂ©ritable stimulant, car ils l’obligent Ă  sortir de sa zone de confort et Ă  s’adapter Ă  toutes sortes de situations, parfois sans grands moyens techniques ni financiers: «Pour finir, j’ai appris le mĂ©tier beaucoup plus sur le tas que dans les Ă©coles.»


 et cinéaste

Au fil des ans, Michel Darbellay étoffe son équipement, tant photographique que cinématographique: studio pour les prises de vue, éclairages, objectifs, caméras, salle de

montage, projecteurs
 Dans sa jeunesse, la participation Ă  plusieurs films de son pĂšre, dont «Eternel printemps», a aussi donnĂ© Ă  Michel le goĂ»t du cinĂ©ma. Il rĂ©alise «SortilĂšges du Canada» et «VichĂšre-Bavon, le village qui ne voulait pas mourir» en 1962, «Une ascension nouvelle» en 1964. Leur succĂšs l’encourage Ă  persĂ©vĂ©rer. Pour roder pratique et thĂ©orie, il s’inscrit Ă  un cours de l’UniversitĂ© populaire. Peu aprĂšs, un accident de cheval le cloue au lit pendant huit semaines. L’arrĂȘt physique forcĂ© lui donne l’occasion de mener une large rĂ©flexion sur le chemin parcouru et sur ses projets d’avenir: «J’ai repensĂ© mon activitĂ©,

je me suis remis en question; j’ai rĂ©alisĂ© que j’étais un photographe mĂ©diocre et que je devais travailler la matiĂšre au lieu de me laisser travailler par elle. [
] J’ai recommencĂ© comme si j’étais un nĂ©ophyte Ă  aborder aussi bien la photo que le cinĂ©ma. [
] J’ai appris Ă  mieux me connaĂźtre, Ă  mieux me dĂ©finir tout en restant accessible.»

Cette activitĂ© dĂ©bouche sur une nouvelle sĂ©rie de documentaires remarquĂ©s et primĂ©s dans plusieurs festivals. RĂ©sultat d’un investissement personnel important, tous ont un lien direct avec la nature, la haute montagne, les traditions ou le tourisme, qu’il s’agisse de la candidature de Sion aux Jeux olympiques de 1976, des voitures anciennes, du ski, de la vigne et du vin, du patrimoine ou de la vie des bergers dans les alpages.

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Levron, aoĂ»t 1978. Photo © Michel Darbellay, MĂ©diathĂšque Valais – Martigny
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«J’ai appris le mĂ©tier beaucoup plus sur le tas que dans les Ă©coles.»
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MICHEL DARBELLAY, PHOTOGRAPHE - EXPOSITION DU 5 DÉCEMBRE 2020 AU 13 JUIN 2021

Deuxnouveauxdéparts

La carriĂšre cinĂ©matographique de Michel prend fin au milieu des annĂ©es 1980, peu aprĂšs qu’il ait dĂ©cidĂ© de remettre son commerce de la place Centrale. Un choix raisonnable mais difficile.

C’est aussi Ă  cette Ă©poque qu’il devient prĂ©sident de la nouvelle Association valaisanne des photographes et participe Ă  l’exposition «Le Valais en images» qui a lieu au MusĂ©e suisse de l’appareil photographique de Vevey au printemps 1983.

En 1985, son pĂšre, ĂągĂ© et malade, doit cesser son activitĂ© Ă  la tĂȘte de Photo Edition Darbellay SA, qui Ă©dite des cartes postales. Michel prend sa succession un peu Ă  contrecƓur, car cette activitĂ© lui prendra tout son temps et l’obligera Ă  dĂ©velopper une esthĂ©tique plus commerciale. Sa rĂ©flexion sur l’importance de la lumiĂšre dans la crĂ©ation d’une image devient toutefois encore plus

prĂ©sente. Il s’investit corps et Ăąme dans ce travail, mĂȘme s’il l’éloigne inexorablement des photographies et reportages plus surprenants qu’il affectionnait. Cette nouvelle orientation lui permet de publier, en collaboration avec les frĂšres Klopfenstein, «Valais, berceau du RhĂŽne» en 2003.

Lelangagedel’image

L’activitĂ© intense et diversifiĂ©e de Michel Darbellay lui a permis de rassembler une vaste collection de documents sur le Valais: vues aĂ©riennes, haute montagne, ski, villages et villes, vie quotidienne, agriculture, vigne, nature, coutumes
 Des centaines de milliers de clichĂ©s nous disent sa passion de l’image et du Valais. Poser un regard attentif

sur l’ensemble de ses publications et de ses expositions personnelles nous permet d’approcher encore plus intimement son Ɠuvre.

En 1980, une exposition personnelle organisĂ©e au ChĂąteau de Villa, Ă  Sierre, cĂ©lĂšbre vingt ans d’activitĂ©s professionnelles. Le visuel Ă©purĂ© choisi pour l’affiche – un cygne glissant sur un lac blanc – Ă©voque un monde poĂ©tique et de rĂȘve, de lenteur et de contemplation. Michel rĂ©sume alors: «Le plus important pour faire de la photo, c’est d’avoir un cƓur et une sensibilitĂ©. De pouvoir se laisser atteindre par le sujet qui est toujours prĂ©sent mais que, souvent, le rythme de vie nous empĂȘche de voir. Saint-ExupĂ©ry, s’il Ă©tait vivant, pourrait Ă©crire magnifiquement et longuement sur cette

passion que devrait avoir le photographe de se laisser apprivoiser par le sujet. A l’image du Petit Prince » Deux ans plus tĂŽt, le photographe signait «Haute Route», pour cĂ©lĂ©brer les 75 ans de la premiĂšre randonnĂ©e Ă  skis reliant Chamonix Ă  Zermatt. Les 160 photos, accompagnĂ©es de textes de guides de toutes les vallĂ©es traversĂ©es, racontent pour lui «une merveilleuse aventure», une de celles qu’on se plaĂźt Ă  partager parce qu’elle nous a transformĂ©s: «Gamin, Michel Darbellay assistait au retour de la Haute Route de son pĂšre et de ses amis, tous hĂąlĂ©s par le soleil et les yeux rayonnants. Pour lui alors, la Haute Route Ă©tait une porte ouverte sur le paradis et ces hommes basanĂ©s, des hĂ©ros qu’il n’osait pas approcher.»

Percevoirleconcret

Lorsqu’il signe la prĂ©face de «Valais jours d’Ɠuvre» qui paraĂźt en

1. Verbier, septembre 1996.
MICHELDARBELLAY,PHOTOGRAPHE-EXPOSITIONDU5DÉCEMBRE2020AU13JUIN2021 13 2 >> PAGE 10
2. Vers la Dent Blanche, 5 décembre 1984.

1981, le photographe rappelle une rĂ©flexion du peintre Klee: «La photo ne peut certes pas montrer ce qui est abstrait, mais elle peut faire voir du concret plus de choses que nous n’en percevrions sans elle.» Il ajoute: «La photo est pour moi un langage. Le seul dont je puisse me servir pour dĂ©crire mon pays.» Au cƓur de son travail a surgi le souhait de rĂ©unir enfin un aperçu personnel du canton, loin de certains clichĂ©s de guides touristiques et plus proche de la vie qu’il cĂŽtoie chaque jour. Ses photographies, accompagnĂ©es des textes de l’écrivain Germain Clavien, nous emmĂšnent dans un univers authentique, qui vibre d’une musique diffĂ©rente Ă  chaque saison. C’est le regard d’un homme qui aime son pays. Ce dĂ©vouement pour le canton est reconnu officiellement Ă  plusieurs reprises. D’abord en 1979 avec le Prix de la Ville de Martigny, ensuite

en 1982, avec le Prix Orsat qui félicite «celui qui a su si bien chanter la vigne et le vin, Octodure et le Valais»

Sur cette lancée enthousiasmante, Michel Darbellay accepte la proposition de concrétiser un ouvrage sur Martigny. «Le chuchotement des platanes» est couronné en 1983 au Grand Prix mondial des guides touristiques à Paris: une récompense qui le convainc de continuer à raconter la vie avec des images et de les montrer dans un fameux diaporama sur un triple écran à la Fondation Pierre Gianadda.

Enfin, pour clore une dĂ©cennie prolifique et commĂ©morer le bimillĂ©naire de la route mythique, Michel Darbellay publie en 1989, avec l’écrivain Jacques Darbellay,

«Printemps du Grand-SaintBernard». Le photographe ne retient ici «que les images inspirĂ©es par un coup de cƓur», pour nous faire suivre le chemin qu’il avait plaisir Ă  parcourir lui-mĂȘme d’Aoste Ă  Martigny, avec un arrĂȘt dans l’hospice dont il apprĂ©ciait le calme, loin de tout.

La diversité du Valais

Dans sa longue et prolifique carriĂšre au service de l’image et de sa terre d’origine, Michel Darbellay a toujours cherchĂ© Ă  rester vrai, proche de la rĂ©alitĂ©, des gens, de la nature. La simplicitĂ© apparente de ses images est le fruit d’une observation attentive et rĂ©pĂ©tĂ©e, mĂȘme s’il se qualifiait lui-mĂȘme de mauvais peintre, car trop impatient.

Chaque jour il remettait l’ouvrage sur le mĂ©tier, cherchant un meilleur angle de vue pour mieux saisir la lumiĂšre ou cerner les contours d’une montagne, d’un village, du RhĂŽne pourtant dĂ©jĂ  maintes fois contemplĂ©s. Se pencher sur les photographies de Michel Darbellay, c’est donc surtout cela: suivre les pas d’un homme qui voulait nous raconter sa ville, son canton, et par-dessus tout nous rappeler la magie de la photographie, celle qui nous permet de voir la beautĂ© du monde dans lequel nous vivons.

Sophia Cantinotti et Jean-Henry Papilloud, commissaires de l’exposition 3. Cave Orsat, Martigny, 18 octobre 1983. 4. Les Granges, Salvan, 4 fĂ©vrier 1989.
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Photos © Michel Darbellay, MĂ©diathĂšque Valais – Martigny

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Biographie

MICHEL DARBELLAY au fil du temps

1963

«Une ascension nouvelle», qui relate l’ascension du Petit Clocher du Portalet, est couronnĂ© en Italie et Ă  New York.

1936

Fils d’Oscar Darbellay et de Jeannette Mettan, Michel naüt le 28 juillet à Martigny.

1952-1956

Michel Darbellay effectue un apprentissage de photographe auprĂšs de son pĂšre. DiplĂŽmĂ©, il l’assiste dans le lancement d’une production artisanale de cartes postales noir et blanc.

1959

AprÚs une année de travail à Gstaad puis à Lausanne, il reprend un commerce de photographie à Martigny.

1962

Son premier film documentaire, «SortilÚges du Canada», obtient le premier prix au Festival du film documentaire de Cannes.

1964-1967

Aprùs le brevet de pilote d’avion, il passe ceux de professeur de ski et de guide de montagne.

1970

«Sion, ville candidate olympique 1976» est primé aux festivals des Diablerets, de Trente et de Huy.

1973

Michel Darbellay épouse Caty Robert, originaire de Neuchùtel. Ils

ont deux fils, Laurent (journaliste et reporter vidĂ©o) et HervĂ© (pilote d’hĂ©licoptĂšre).

1979

Le Prix de la Ville de Martigny est décerné à Oscar et à Michel Darbellay, pour leurs carriÚres respectives.

1981

Michel Darbellay se consacre à la photographie et à la production de films et de vidéos. Il préside la nouvelle Association valaisanne des photographes.

1982

Il reçoit le Prix Alphonse Orsat pour ses travaux sur la vigne et le vin.

1983

AprĂšs «Haute Route» (1978) et «Valais jours d’Ɠuvre» (1981), il publie «Le chuchotement des platanes», primĂ© au Grand Prix mondial des guides touristiques Ă  Paris.

1984-1985

Au concours Europhot réunissant mille participants, Michel Darbellay obtient le 4e prix avec ses images sur Vaison-la-Romaine.

Il reprend les rĂȘnes de la sociĂ©tĂ© de son pĂšre Photo Edition Darbellay

SA Martigny (carte postale, photo publicitaire, etc.).

1989

«Printemps du Grand-Saint-Bernard» reçoit le premier prix du Comité national suisse des guides touristiques.

1999

L’exposition «Les Alpes en photographies par Oscar et Michel Darbellay» est organisĂ©e Ă  la Fondation Pierre Gianadda.

2010-2014

Michel Darbellay dĂ©pose toutes ses archives photographiques et cinĂ©matographiques Ă  la MĂ©diathĂšque Valais - Martigny, qui met sur pied en 2014 une exposition accompagnĂ©e d’un livre.

2014

La Fondation Pierre Gianadda prĂ©sente l’exposition, accompagnĂ©e d’un catalogue, «Sculptures en lumiĂšre», sur les sculptures du Parc de la Fondation et des ronds-points de Martigny.

2020

Le 20 avril, à 84 ans, Michel Darbellay décÚde à Martigny.

Parc de la Fondation, 2014. © Hervé Darbellay
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Photos © Archives famille Michel Darbellay et MédiathÚque Valais - Martigny

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SZAFRAN et LÉONARD L’HISTOIRE D’UNE AMITIÉ

HOMMAGE - FOYER DE LA FONDATION – DU 5 DÉCEMBRE 2020 AU 13 JUIN 2021

Grand ami de la Fondation

Pierre Gianadda, Sam Szafran nous a quittĂ©s le 14 septembre 2019. Il avait 85 ans. La Fondation lui rend hommage en prĂ©sentant des Ɠuvres conservĂ©es dans ses collections.

Tout a commencĂ© en 1994 avec l’exposition «De Matisse Ă  Picasso, la collection Jacques et Natasha Gelman» du Metropolitan Museum of Art (Met) de New York.

Sam Szafran fait partie, avec Francis Bacon, Balthus et François Rouan, du quatuor des peintres encore vivants dont les Ɠuvres ont traversĂ© l’Atlantique. L’artiste est prĂ©sent au vernissage et rencontre LĂ©onard Gianadda.

L’entente et la complicitĂ© sont immĂ©diates entre les deux hommes; elles se transforment en amitiĂ© qui se renforce au fil des annĂ©es et des Ă©changes. LĂ©onard et Sam, nĂ© comme Pierre Gianadda

un 19 novembre, ont des amis communs, au premier rang desquels Henri Cartier-Bresson, élÚve en dessin de Sam.

DĂšs lors, LĂ©onard suit attentivement les travaux du peintre. Lorsqu’il visite ses amis parisiens, l’atelier de Malakoff est une Ă©tape incontournable. AccompagnĂ© de Daniel Marchesseau, Jean-Louis Prat et Jean Clair, admirateurs comme lui de la production si singuliĂšre de Szafran, il dĂ©couvre les toiles en chantier, passe une commande, achĂšte une Ɠuvre ou en reçoit des mains mĂȘmes de l’artiste. C’est ainsi que la collection de LĂ©onard et de la Fondation Pierre Gianadda s’enrichit au cours des ans et des manifestations. La seule chronologie des expositions en dit l’importance:

1989: «Henri Cartier-Bresson, dessins et photographies» à la Fondation Pierre Gianadda.

1994: «De Matisse à Picasso, la collection Jacques et Natasha Gelman» du Met, avec deux peintures de Szafran.

1999: «Sam Szafran à la Fondation», commissaire Jean Clair.

2005: «Henri Cartier-Bresson. Collection Sam, Lilette et Sébastien Szafran», 225 photographies données à la Fondation.

2005-2006: RĂ©alisation des cĂ©ramiques monumentales – «Escalier» et «Philodendrons» – pour les façades du bĂątiment jouxtant la Fondation, qui devient le Pavillon Szafran.

2010: «De Renoir Ă  Sam Szafran, le parcours d’un collectionneur».

2013: «Sam Szafran, 50 ans de peinture».

Il rĂ©sulte de ces rencontres une trentaine d’Ɠuvres originales et deux importantes collections photographiques qui figurent toutes aujourd’hui dans le catalogue des collections appartenant Ă  la Fondation Pierre Gianadda. Elles disent Ă  leur maniĂšre les relations intenses, les rencontres enrichissantes, l’amitiĂ© tout simplement.

Les escaliers

Les thĂšmes chers Ă  Sam Szafran sont bien reprĂ©sentĂ©s dans les Ɠuvres appartenant Ă  la Fondation Pierre Gianadda. Celui de l’escalier, par exemple, occupe une place Ă  part dans la production du peintre. Il est Ă©troitement liĂ© Ă  des souvenirs d’enfance traumatisants. NĂ© Ă  Paris de parents juifs polonais Ă©migrĂ©s, Sam Berger (Szafran est le patronyme de sa mĂšre) Ă©chappe le 16 juillet 1942 par un miracle Ă  la rafle du VĂ©l’d’Hiv. ConfiĂ© Ă  un oncle

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Sam Szafran dans son atelier, 1974. © Henri Cartier-Bresson

brutal, il vit des situations Ă©prouvantes. Ainsi, pour l’obliger Ă  rĂ©pondre, l’oncle le fait passer par-dessus la rampe de l’escalier Ă  vis, au quatriĂšme Ă©tage de son immeuble, et le tient par les pieds, suspendu dans le vide, menaçant de le laisser tomber. L’image reste Ă  jamais gravĂ©e dans la mĂ©moire de Sam et, comme le relĂšve Jean Clair, l’artiste se forge des outils «pour Ă©chapper au vertige de cette Ă©preuve primitive».

En 1944, il est dĂ©portĂ© par les nazis, puis libĂ©rĂ© par les AmĂ©ricains. La Croix-Rouge l’envoie en Suisse, dans une famille Ă  Frauenfeld. A peine de retour en France, il la quitte pour l’Australie avec sa mĂšre et sa sƓur. Les expĂ©riences lĂ -bas s’apparentent Ă  un exercice perpĂ©tuel de survie, dont il ramĂšnera, Ă  Paris en 1951, un vĂ©lo qu’il a mĂ©ticuleusement peint.

Il s’initie alors au dessin Ă  l’AcadĂ©mie de la Grande ChaumiĂšre et rencontre de nombreux artistes, dont le sculpteur Alberto Giacometti.

Les pastels

En 1960, Sam Szafran dĂ©couvre le pastel, une vĂ©ritable rĂ©vĂ©lation. Il exploite dĂšs lors le plus grand nuancier de l’histoire de l’art, celui des sƓurs RochĂ© avec sa gamme de plus de 1500 tons. «J’ai choisi le pastel, Ă©crit-il, comme procĂ©dĂ© d’expression parce qu’il me paraissait un moyen d’une extrĂȘme rigueur pour me dĂ©battre avec mes fantasmes


Mais il faut savoir que la gamme des verts se compose de plus de trois

cent soixante-quinze nuances diffĂ©rentes » Puis il rĂ©alise ses premiĂšres grandes aquarelles et il combine bientĂŽt le pastel et l’aquarelle en travaillant sur papier ou sur soie. Son Ɠuvre se focalise sur quelques thĂšmes et sĂ©ries qui lui sont propres: les ateliers, l’imprimerie, baptisĂ©e Bellini en hommage au peintre italien, les escaliers, les serres et leur vĂ©gĂ©tation luxuriante, les escaliersvilles
 S’exprimant sur l’obsession des escaliers, Szafran dĂ©clare Ă  Jean Clair: «J’ai toujours abordĂ© la thĂ©matique dans la peinture comme un petit voyou, en m’octroyant des territoires. Personne avant moi n’avait fait des escaliers, et moi j’ai

toujours vĂ©cu dans les escaliers. C’est le cĂŽtĂ© territorial, physique, la survie »

Les Ɠuvres de la Fondation sont Ă©videmment prĂ©sentes dans les deux remarquables catalogues de 1999 et 2013, accompagnant les expositions de Sam Szafran Ă  Martigny, lĂ  oĂč il se sentait chez lui.

Henri

Cartier-Bresson et Martine Franck

Les relations entre les trois couples formĂ©s par Henri Cartier-Bresson et Martine Franck, Sam et Lilette Szafran, LĂ©onard et Annette Gianadda sont anciennes et Ă©troites. Elles trouvent leur plus forte expression lorsque, le 3 aoĂ»t 2004, au retour des obsĂšques d’Henri Cartier-Bresson, Sam, Lilette et

SĂ©bastien Szafran dĂ©cident d’offrir Ă  la Fondation Pierre Gianadda les 1. Sam Szafran, Escalier, 2004. Etude pour la cĂ©ramique monumentale du Pavillon Szafran. Aquarelle sur soie, 164 x 207 cm. © Archives FPG 2. Sam Szafran, Escalier-Ville, 2012. Aquarelle sur soie, 250 x 160 cm. Don de Daniel Marchesseau Ă  la Fondation en 2015 © Jean-Louis Losi, Paris
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SAM
SZAFRAN, HOMMAGE AU FOYER DE LA FONDATION – DU 5 DÉCEMBRE 2020 AU 13 JUIN 2021

225 photographies reçues de leur ami.

Depuis leur rencontre en 1972 Ă  Paris, lors de l’exposition «60-72. Douze ans d’art contemporain», une profonde amitiĂ© lie Henri Cartier-Bresson et Sam Szafran. FascinĂ© par le travail du peintre autodidacte, le photographe lui demande des cours particuliers de dessin, son jardin secret. Il en rĂ©sulte un extraordinaire Ă©change: Henri Cartier-Bresson puise dans ses archives et ses dossiers des tirages originaux pour son «ami intense», Sam. Presque toutes les photos sont accompagnĂ©es d’une dĂ©dicace, d’une rĂ©flexion, comme autant de clins d’Ɠil, d’échanges, Ă  l’image d’une correspondance codĂ©e dont seuls Henri et Sam dĂ©tiennent la vĂ©ritable clĂ©.

A cÎté des reportages et des portraits

d’artistes et d’écrivains qui sont au centre d’une commune admiration, la collection comporte de nombreuses photographies de Sam Szafran au travail dans ses ateliers successifs, en famille ou entre amis. Ces tĂ©moignages intimes, rĂ©alisĂ©s sur prĂšs de trente ans, sont prĂ©cieux.

De son cĂŽtĂ©, au dĂ©but des annĂ©es 2000, LĂ©onard Gianadda propose Ă  Sam Szafran un dĂ©fi surprenant: rĂ©aliser une Ɠuvre gĂ©ante en cĂ©ramique pour orner la façade du pavillon Le BelvĂ©dĂšre jouxtant la Fondation. D’abord hĂ©sitant, Sam Szafran, qui n’a jamais pratiquĂ©

cette technique, se lance dans l’aventure avec la complicitĂ© du cĂ©ramiste Artigas, un ami retrouvĂ©. «Les diffĂ©rentes Ă©tapes prĂ©paratoires sur papier et sur soie, relĂšve Daniel Marchesseau, tĂ©moignent des Ă©tudes longuement Ă©laborĂ©es – non sans risques – depuis la premiĂšre aquarelle mise au carreau jusqu’à l’agrandissement dĂ©finitif aux pigments purs dans les ateliers de Joan Gardy Artigas Ă  Gallifa en Catalogne.»

La «bande Ă  LĂ©onard» suit l’évolution du projet. Jean Clair, Daniel Marchesseau et Jean-Louis Prat, aprĂšs avoir accompagnĂ© LĂ©onard

dans l’atelier de Sam, le suivent Ă  Gallifa prĂšs de Barcelone pour assister aux opĂ©rations effectuĂ©es par l’artiste et le maĂźtre cĂ©ramiste. Sam Szafran y passe quinze jours pour «Escalier»; il lui en faut vingt pour «Philodendrons», l’Ɠuvre qui occupe la paroi du pavillon face au jardin . Celui-ci prend tout naturellement le nom de Pavillon Szafran.

Une autre personne, discrÚte, rend compte du processus créatif: Martine Franck. Son reportage complet fait aussi partie de la collection de la Fondation.

Sophia Cantinotti et Jean-Henry Papilloud, commissaires de l’exposition 3. SĂ©ance de travail dans l’atelier de Szafran Ă  Malakoff, avec Daniel Marchesseau, LĂ©onard Gianadda, Sam Szafran, Jean-Clair et Joanet Gardy Artigas, 2005. © Martine Franck
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4. Sam Szafran, Joan Gardy Artigas et Jean Clair devant «Philodendrons», 2016. © Georges-André Cretton

Eaux-de-vie et liqueurs aux fruits du Valais fitd www.morand.ch

UNE COLLECTION UNE HISTOIRE, UNE VIE

LÉONARD GIANADDA RACONTE SA PASSION POUR L’ART ET POUR LES ARTISTES

«J’ai 85 ans, l’heure des bilans. Aujourd’hui celui des Collections de la Fondation Pierre Gianadda.

D’aussi loin que remontent mes souvenirs, je retrouve la passion de la collection. A vrai dire, elle traverse toute ma vie: «Enfant, je collectionnais dĂ©jĂ  des timbres-poste avec acharnement. Et puis la passion de collectionneur d’Ɠuvres d’art s’est imposĂ©. A un moment donnĂ©, j’ai arrĂȘtĂ© de constituer une collection personnelle pour me lancer dans une collection de sculptures destinĂ©es au Parc de la Fondation. Je voulais qu’un plus grand nombre en profite, ait la possibilitĂ© de voir quelque chose d’unique» (MusĂ©e de l’automobile, 2004, p. 16).

Bien avant l’inauguration de la

Fondation en 1978, Annette et moi acquĂ©rions des Ɠuvres d’artistes, rĂ©gionaux d’abord. Puis notre champ s’est Ă©largi: en 1971 Erni; en 1973, Anker, BiĂ©ler, Corot, Daumier, Renoir, Signac
 Plus tard, nos achats ont subi une nouvelle orientation dictĂ©e par l’activitĂ© de la Fondation, ponctuant ses expositions. Ce qui faisait toujours un collectionneur de moins Ă  convaincre!

Notre grand problÚme était le fait que nous étions de perpétuels emprunteurs sans rien pouvoir offrir en retour.

Quoique


L’aspect certainement hĂ©tĂ©roclite de la Collection peut surprendre. Pourtant, en filigrane apparaĂźt un fil rouge: le parcours de la Fondation, son histoire.

* * *

Souvent, Annette n’était pas d’accord avec mes choix, voire n’aimait pas les Ɠuvres convoitĂ©es. Cependant, lorsque celles-ci avaient trouvĂ© leur place dans le Parc, sur un giratoire ou tout simplement Ă  la maison, elle les apprĂ©ciait systĂ©matiquement. Bien des annĂ©es plus tard, j’ai compris son raisonnement, ses prises de position: ce n’était pas l’Ɠuvre qui l’inquiĂ©tait,

mais son prix. Les investissements astronomiques que j’engageais Ă  coups de millions – le prix de certaines peintures, sculptures ou voitures – l’inquiĂ©taient au plus haut point. Pour elle, je courais Ă  la faillite. La frĂ©nĂ©sie compulsive d’achats de son LĂ©onard de collectionneur l’effrayait.

Elle n’avait pas tort.

En 1989, bien Ă©videmment en raison d’investissements immobiliers Ă©galement, mes dettes s’élevaient Ă  57 millions de francs – de l’époque! – alors que les taux hypothĂ©caires grimpaient Ă  7%! Aujourd’hui, un regard dans le rĂ©troviseur me rappelle que tout ne fut pas simple, de loin pas un long fleuve tranquille. Pourtant, ces acquisitions successives ont constituĂ© lentement mais sĂ»rement un fonds

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Nicolas de Staël, Les footballeurs, 1952. Huile sur toile, 65 x 81 cm. © Fondation Pierre Gianadda >>

intĂ©ressant, un dĂ©but de collection, permettant Ă  mon tour de consentir des prĂȘts, de faire connaĂźtre la Fondation, d’écrire son histoire.

Ainsi, au fil du temps, les Ɠuvres de notre Collection ont largement servi de monnaie d’échange. En tĂ©moigne la liste Ă©loquente de quelques prĂȘts:

- Boudin, «Deauville» (10 prĂȘts)

- Matisse, «Port de Collioure» (10)

- Vuillard, «Femme debout» (11)

- Rodin, «La Danaïde» (13), «Le baiser» (14), «La priÚre» (15), «Le Balzac» (18)

- Manguin, «La femme à la grappe» (14),

- Toulouse-Lautrec, «Autoportrait» (18)

- Giacometti, «Buste de Diane» (20)

- Picasso, «Arlequin –TĂȘte de fou» (35)

- Modigliani, «Portrait de Jean Alexandre / Nu assis» (29).

Ce dernier, revendu en 2015, fut la seule Ɠuvre cĂ©dĂ©e, mis Ă  part un Klee Ă  Ernst Beyeler pour permettre l’achat du «Grand coq» de Brancusi.

Si les acquisitions d’Ɠuvres s’effectuaient souvent en fonction des expositions programmĂ©es,

celles du Parc de sculptures le furent dans une autre optique. Avant tout, il s’agissait d’un coup de cƓur, d’une Ɠuvre ardemment dĂ©sirĂ©e, parfois pendant des annĂ©es, pour un emplacement prĂ©cis. Chaque Ɠuvre a son histoire, une histoire, son rĂŽle, au dĂ©tour d’un bosquet, appuyĂ©e sur une colline, prĂšs d’un Ă©tang
 On n’aperçoit que quelques sculptures d’un premier

coup d’Ɠil, pourtant il y en a une cinquantaine, chacune Ă  sa place. Comme on me l’a fait remarquer, c’est l’histoire de la sculpture mondiale du XXe siĂšcle, «l’un des plus beaux parcs d’Europe» («La Gazette Drouot», 25 juin 2016).

Lorsque je prĂȘtais mes Ɠuvres, je le faisais toujours au nom de la Fondation pour lui donner une certaine notoriĂ©tĂ©, mais surtout pour favoriser des prĂȘts pour nos propres expositions. Afin d’éviter toute confusion, lors de chaque sĂ©ance annuelle du Conseil de la Fondation, je prĂ©cisais que ces Ɠuvres n’appartenaient pas Ă  la Fondation, bien que prĂȘtĂ©es sous son

nom. Aujourd’hui, tout a changĂ©, 1. LĂ©onard Gianadda et CĂ©sar devant Le sein, 1994. © Georges-AndrĂ© Cretton 2. Paul Gauguin, La Bretonne vue de dos, 1886. Pastel sur papier. 3. Robert Indiana, Love, 1966-1998. Aluminium polychrome. 4. LĂ©onard Gianadda, Egypte, 1956. Photographie.
GIANADDA
5. Marcel Imsand, Luigi le berger, 1989. Photographie. 1 2 5 34 >> PAGE 20
UNE COLLECTION, UNE HISTOIRE, UNE VIE. LÉONARD
RACONTE
SA PASSION POUR L’ART ET LES ARTISTES

tout est propriété de la Fondation: tableaux, dessins, gravures, bibliothÚques, photographies, sculptures du Parc ou des giratoires, voitures anciennes, etc.

Quand j’ai demandĂ© Ă  mon fils François s’il souhaitait garder pour lui des Ɠuvres de notre Collection, il m’a rĂ©pondu qu’il prĂ©fĂ©rait que l’ensemble soit conservĂ© dans son intĂ©gralitĂ© et ne soit pas dispersĂ©, ce que j’ai apprĂ©ciĂ©.

Ainsi, la situation est claire. Restait Ă  la mettre en musique, c’est-Ă dire inventorier toutes les Ɠuvres de la Collection. C’est ce qu’ont rĂ©alisĂ© avec compĂ©tence et intelligence Jean-Henry Papilloud et Sophia Cantinotti, membres de notre conseil de fondation. Un travail

d’archivistes, de bĂ©nĂ©dictins. Certes, ils ont pu s’appuyer sur des archives initiĂ©es par Willy Joris, ami et collaborateur fidĂšle de ma famille pendant cinquante-cinq ans, poursuivies par Monique Zanfagna, Ă  mes cĂŽtĂ©s depuis quarante-cinq ans. Willy et Monique ont constituĂ© des dossiers (7,2 mĂštres linĂ©aires d’archives), documentĂ© chaque Ɠuvre, tenu Ă  jour les contrats d’assurance, gĂ©rĂ© les prĂȘts, assurĂ© la

conservation de chaque objet alors que l’achat des premiĂšres Ɠuvres remonte Ă  plus de soixante ans! Nos prĂȘts ont contribuĂ© au succĂšs de la Fondation.

Pendant quarante-deux ans. Jusqu’à ce vendredi 13 mars 2020 Ă  18 heures, ce vendredi noir oĂč tout a basculĂ©, tout s’est arrĂȘtĂ©. Pour la premiĂšre fois, la Fondation a fermĂ© ses portes, pour cause de pandĂ©mie liĂ©e au coronavirus.

Ce jour-lĂ , la Fondation avait accueilli son 10 240 045e visiteur! Pendant des dĂ©cennies, la forte affluence de visiteurs avait permis de couvrir pratiquement tous les frais d’animation de la Fondation, concerts et expositions et, ainsi, d’affecter Ă  l’enrichissement de notre patrimoine les dons des amis et sponsors.

Je suis conscient qu’il s’agit d’une collection modeste mais, comme dit le proverbe, «Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois.» Un jour peut-ĂȘtre, elle fera l’objet d’une exposition «Une collection, une histoire, une vie».

LĂ©onard Gianadda 6. Camille Claudel, L’implorante, 1905. Bronze. 7. Pablo Picasso, Arlequin – TĂȘte de fou, 1905. 8. Berthe Morisot, Devant la psychĂ©, 1890. Huile sur toile.
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9. Léonard Gianadda et François-Xavier Lalanne, Le mouton, Japon, 1992. Photos © Fondation Pierre Gianadda

Le MusĂ©e de l’automobile

SOUS UN

NOUVEL ÉCLAIRAGE, LES BELLES MÉCANIQUES SE LAISSENT ADMIRER

Au moment de la construction de la Fondation, en 1978, LĂ©onard Gianadda est embarrassĂ©: il ne sait comment occuper le parking construit prĂ©alablement pour l’immeuble, celui-ci Ă©tant abandonnĂ© au profit du centre culturel. Que faire de ce vaste espace souterrain situĂ© de l’autre cĂŽtĂ© de la rue du Forum?

En 1981, l’occasion se prĂ©sente d’accueillir les voitures anciennes du VĂ©tĂ©ran Car Club Suisse, puis, rapidement, le MusĂ©e de l’automobile devient une aventure Ă  elle toute seule.

Comme LĂ©onard Gianadda veut donner Ă  la Fondation créée Ă  la mĂ©moire de son frĂšre un Ă©lan dynamique, il pense que les voitures anciennes peuvent toucher un autre public que celui attirĂ© par les expositions culturelles. Clin d’Ɠil Ă©tonnant, Pierre Gianadda Ă©tait un excellent mĂ©canicien!

En compagnie d’un ami passionnĂ©, Fortunato Visentini, LĂ©onard constitue une collection originale, centrĂ©e sur les annĂ©es 1900-1930

et accordant une place importante aux modĂšles de construction suisse, rares et souvent uniques au monde.

Petit Ă  petit, les voitures de la Fondation remplacent celles mises en dĂ©pĂŽt. Aujourd’hui, tous les vĂ©hicules exposĂ©s, Ă  l’exception de trois, appartiennent Ă  la Fondation.

Ainsi, au fil des annĂ©es, le MusĂ©e attire sa clientĂšle de spĂ©cialistes ou de simples curieux vite subjuguĂ©s par la beautĂ© et la diversitĂ© des modĂšles. Ces derniers ne sont pas des exemplaires anonymes; tous ont leur histoire. Parcourir celle-ci, c’est cĂŽtoyer les pionniers, dĂ©couvrir l’invention du Valaisan Isaac de Rivaz – un char dotĂ© d’un moteur Ă  explosion qui a fait quelques mĂštres prĂšs de cent ans avant ses premiĂšres poursuivantes –, suivre

les pĂ©ripĂ©ties d’un modĂšle unique, la Stella, de sa trouvaille en Uruguay jusqu’à son arrivĂ©e Ă  Martigny aprĂšs sa restauration en Italie, admirer la voiture de Nicolas II, le dernier tsar de Russie
 GarĂ©es dans leur parking qui leur sert de musĂ©e, les automobiles, toutes en Ă©tat de marche, sortent

parfois. Pour de grandes occasions et pour transporter les hĂŽtes de marque de la Fondation.

Mais c’est encore Ă  leur place, bien rangĂ©es, qu’il faut admirer ces vieilles dames. Une conception toute nouvelle de l’éclairage permet de les observer sous tous les angles et de mieux comprendre l’évolution extraordinaire de cette invention, un des grands symboles du monde moderne.

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1. Le MusĂ©e de l’automobile, mai 2020. © JHP – FPG
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2. Cecilia Bartoli avec Fortunato Visentini et LĂ©onard Gianadda dans l’Isotta-Fraschini de 1931, aoĂ»t 2005. © G.-A. Cretton – FPG

Une quĂȘte d’équilibre et d’harmonie

LA NOUVELLE SCULPTURE «ÉPURÉE» DE PONCET IRRADIE LE CARREFOUR DE LA LOUVE

De l’art de tourner en rond
 avec des sculptures. C’est la chance unique de la ville de Martigny dont les dix-sept rondspoints, grĂące Ă  la gĂ©nĂ©rositĂ© de LĂ©onard Gianadda, sont agrĂ©mentĂ©s de sculptures rĂ©alisĂ©es par les meilleurs artistes suisses. Pour la premiĂšre fois dans l’histoire des giratoires, le mĂ©cĂšne octodurien a procĂ©dĂ© Ă  un changement sur l’un d’entre eux. Ornant le rond-point de la Louve, la sculpture en bronze de Rudolf BlĂ€ttler, «Trois Femmes» surgies de la terre et groupĂ©es comme des totems, devenait trop discrĂšte dans un environnement en pleine mutation avec des constructions considĂ©rables. Ces dĂ©esses mĂšres d’un autre temps, ont rejoint le panel exceptionnel de sculptures du Parc de la Fondation. LĂ©onard Gianadda a donc dĂ©cidĂ© de remplacer l’Ɠuvre de BlĂ€ttler par une sculpture plus imposante et visible, baptisĂ©e «EpurĂ©e» et rĂ©alisĂ©e sur commande en marbre blanc de Carrare par l’artiste Antoine Poncet.

HĂ©ritier d’une lignĂ©e

d’artistes

Petit-fils et fils de peintres, Antoine naĂźt Ă  Paris le 5 mai 1928. Sa mĂšre est la fille de Maurice Denis, un des protagonistes du mouvement nabi, et son pĂšre, le Vaudois Marcel Poncet, est un verrier et mosaĂŻste reconnu. Toute sa vie, cet hĂ©ritier d’une lignĂ©e d’artistes, restera attachĂ© Ă  ce double enracinement franco-suisse. En 1938, ses parents quittent Paris pour la Suisse et s’installent Ă  Vich. Dans l’atelier de son pĂšre, Antoine se familiarise avec la matiĂšre. Il «s’enthousiasme» pour la sculpture

auprĂšs de Germaine Richier Ă  Zurich et puis frĂ©quente l’Ecole cantonale de dessin d’art appliquĂ© de Lausanne.

Naissance d’un style oĂč l’harmonie rĂšgne

Etabli Ă  Paris dĂšs 1947, rencontrant Zadkine, Brancusi, Henri Laurens, il devient le praticien de Jean Arp dĂšs 1952. Influence dĂ©cisive: il dĂ©laisse l’art figuratif et s’oriente vers des formes pures, des volumes arrondis, des vides Ă©vocateurs et toujours un rythme oĂč l’harmonie rĂšgne. Poncet n’aime ni le drame ni la discordance.

La sculpture «EpurĂ©e» tĂ©moigne de cette quĂȘte d’équilibre et d’euphonie. Il capte l’essentiel, mais l’émotion reste palpable. ElĂ©gante, taillĂ©e dans le marbre de Carrare que Poncet affectionne particuliĂšrement, «EpurĂ©e» se dresse vers l’éternitĂ© avec un calme serein. Intemporelle dans sa blancheur immaculĂ©e et ses courbes admirables, elle irradie le rond-point de la Louve. «EpurĂ©e» respire le calme et impose grĂące Ă  la perfection de ses lignes l’archĂ©type d’un idĂ©al absolu.

Antoine Poncet, Epurée, 2012. Marbre blanc de Carrare, 312 x 70 x 93 cm. Xavier Moret © FPG

 Antoinette de Wolff-Simonetta
 PAGE 23

LE VALAIS À LA UNE

UN SIÈCLE VU PAR LES MÉDIAS

A l’occasion des 100 ans de l’Association de la presse valaisanne (APVs), une exposition met en lumiĂšre les enjeux et les dĂ©fis des mĂ©dias du canton. Le parcours dans les trois niveaux du

Vieil Arsenal est fondĂ© sur le travail des journalistes et des photographes, dans une dynamique oĂč le passĂ© Ă©claire et dialogue avec le prĂ©sent. Une focale originale qui n’en montrera pas moins, par le

biais des thĂšmes traitĂ©s, l’évolution et l’image d’un pays. Les mĂ©dias, avec tout ce qui gravite autour d’eux, ont jouĂ© et jouent toujours un rĂŽle central dans le dĂ©veloppement du canton. Aux premiĂšres loges des Ă©vĂ©nements, tĂ©moins des Ă©volutions, les femmes et les hommes de ce secteur exposĂ© ont pris le difficile parti d’informer et de rĂ©flĂ©chir sur ce qui se passe et affecte le destin des gens. «Le journaliste est tĂ©moin de son temps, confiait AndrĂ© Marcel Ă  François Dayer en 1974, et s’il ne peut pas toujours capter la vĂ©ritĂ© aux mille facettes, il doit ĂȘtre vrai vis-Ă -vis de lui-mĂȘme.»

Avec internet, les rĂ©seaux sociaux et l’information immĂ©diate, le monde de l’information est en recomposition. Il est important que les premiers concernĂ©s se penchent sur le passĂ©, le prĂ©sent et le futur du quatriĂšme pouvoir, si enviĂ© pour son influence. Tous ont besoin de prendre un peu de distance, de considĂ©rer les Ă©volutions de longue durĂ©e pour mieux comprendre ce qu’ils vivent au quotidien.

Cette exposition, Ă  travers la prĂ©sentation d’évĂ©nements, de personnes et de techniques, a pour ambition de donner Ă  voir ce qui est au cƓur du systĂšme. Bilingue, captivante et vivante, elle s’appuie sur tous les supports de la communication (textes,

dessins,

Quatre domaines principaux sont dĂ©veloppĂ©s: l’histoire de l’APVs et des mĂ©dias, les tĂ©moins sur la brĂšche, les thĂšmes rĂ©vĂ©lateurs, l’actualitĂ© des mĂ©dias.


photos, films, objets, etc.). DU 16 AVRIL AU 20 NOVEMBRE 2021, AU VIEIL ARSENAL 1. La fusion, 1960. «Treize Etoiles» © MédiathÚque Valais - Martigny 2. Sion, 1931. Raymond Schmid, Bourgeoisie de Sion © MédiathÚque Valais - Martigny
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3. Casal, Le Nouvelliste, 2003. © Casal >>

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L’Association de la presse valaisanne

Le Valais est riche d’une presse rĂ©gionale trĂšs diversifiĂ©e, oĂč tous les types de mĂ©dias sont reprĂ©sentĂ©s. Créée en 1921, l’APVs est une association professionnelle qui regroupe les membres des rĂ©dactions, les journalistes, les photographes, les reporters de radio-tĂ©lĂ©vision, les correspondants rĂ©guliers, qu’ils soient d’origine valaisanne, domiciliĂ©s en Valais ou qu’ils travaillent pour des organes valaisans. Actuellement, l’APVs compte 184 membres.

Avec la presse Ă©crite quotidienne ou pĂ©riodique, les Valaisannes et les Valaisans sont parmi les lecteurs les mieux servis du pays. Deux quotidiens, du Haut et du Bas, lui livrent l’actualitĂ©. Trois radios rĂ©gionales arrosent le territoire.

PionniĂšre en la matiĂšre, la tĂ©lĂ©vision sierroise – Canal9 – est devenue celle de tout le canton. L’histoire de l’APVs est riche de cette diversitĂ©.

Témoins sur la brÚche

L’exposition offre aussi l’occasion d’approcher des situations concrĂštes de travail Ă  partir d’une sĂ©lection de tĂ©moignages personnels forts: mineurs ensevelis Ă  Bieudron, avalanches de Mattmark et de Reckingen, incendie de LoĂšche, inondations de Brigue et de Gondo, accident de car Ă  Sierre
 On pourra suivre le rĂ©cit des journalistes, photographes ou camĂ©ramans, dĂ©pĂȘchĂ©s sur place pour rĂ©colter des informations et les transmettre aux rĂ©dactions. Le visiteur est immergĂ© dans une salle de rĂ©daction imaginaire et multisupport. Les nouvelles et les images arrivent, sont triĂ©es, traitĂ©es et redirigĂ©es vers des canaux de distribution Ă  destination des diffĂ©rents publics.

Les grands thÚmes révélateurs

Au premier Ă©tage du Vieil Arsenal, treize espaces mettent en valeur des thĂšmes essentiels. Il s’agit de

LES MÉDIAS VALAISANS EN PREMIÈRE LIGNE – DU 16 AVRIL AU 20 NOVEMBRE 2021, AU VIEIL ARSENAL >> >>
1. Comptoir de Martigny, 1963. Philippe Schmid © MédiathÚque Valais - Martigny 2. LoÚche, 2003. Sacha Bittel © Le Nouvelliste 3. Percement du tunnel du Loetschberg, 2005.
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© Olivier Maire, Keystone

montrer de quelle maniĂšre les mĂ©dias ont traitĂ© les informations et les Ă©vĂ©nements durant plus d’un siĂšcle. Le travail des journalistes est l’angle de mise en perspective d’un fait, d’une problĂ©matique. Des Ă©crans mettent en valeur des extraits d’archives sonores et audiovisuelles, ainsi que des entretiens. Des vitrines prĂ©sentent des Ă©lĂ©ments de l’histoire des mĂ©dias et de leur dĂ©veloppement matĂ©riel, en particulier par la prĂ©sentation d’objets tels que machines Ă  Ă©crire, camĂ©ras, appareils photo, systĂšmes de transmission et d’impression, etc.

L’éventail des thĂ©matiques est large. Il aborde, Ă  travers des parallĂšles passĂ©-prĂ©sent: l’économie, l’agriculture, les relations extĂ©rieures, l’épopĂ©e des barrages, les grandes «affaires», la politique, la religion, le sport, l’environnement, les catastrophes naturelles, la question des genres, la santĂ©, la culture


Une longue frise, constituĂ©e de 150 images d’hier et d’aujourd’hui, est installĂ©e en hauteur sur tout le pourtour du premier Ă©tage. Construite sur le thĂšme «Le quotidien au fil du temps», elle complĂšte les espaces thĂ©matiques en mettant l’accent sur la vie quotidienne dans sa diversitĂ© et ses changements. Cette vue Ă  360 degrĂ©s s’appuie sur les riches archives de la MĂ©diathĂšque ValaisMartigny et sur les travaux des photoreporters actuels, nombreux Ă  avoir relevĂ© ce challenge.

Un systĂšme de renvois par codes QR permet Ă©galement aux visiteurs d’en savoir plus sur un Ă©lĂ©ment ou de visualiser des documents complĂ©mentaires (textes, photos, dessins, films et sons).

L’actualitĂ© des mĂ©dias

Le dernier étage du Vieil Arsenal

est rĂ©servĂ© aux questions du prĂ©sent et du futur. Cette immersion dans les interrogations actuelles concerne la presse, la tĂ©lĂ©vision, la radio et les rĂ©seaux sociaux, car le rĂŽle de ces acteurs est crucial en ce moment charniĂšre de l’histoire des mĂ©dias, celui de la presse en ligne.

Des sujets brĂ»lants d’actualitĂ©, tels que la crise du coronavirus en 2020 et le confinement qu’il a entraĂźnĂ©, sont des exemples marquants pour Ă©voquer l’importance et la fragilitĂ© de la presse, ainsi que la forte implication des journalistes et des photoreporters pour apprĂ©hender une situation sur le terrain et la faire connaĂźtre au public.

Cet espace est aussi conçu comme un lieu de réflexion et de rencontres pour accueillir des débats, des

conférences et des discussions, mais aussi des ateliers pour les enfants et les écoles.

Plusieurs postes de consultation permettent au public d’accĂ©der aux archives des mĂ©dias numĂ©risĂ©s avec la collaboration de l’Association pour la sauvegarde du patrimoine des mĂ©dias valaisans. Des focus particuliers sont possibles, tels que la recherche du journal du jour de sa naissance ou, tout simplement, l’accĂšs en ligne aux mĂ©dias du jour.

L’exposition est le rĂ©sultat d’une collaboration active des diffĂ©rents mĂ©dias valaisans, des journalistes, des photographes et de l’APVs. Elle a reçu le soutien de la Loterie Romande, de la Fondation Pierre Gianadda et du Service de la culture de l’Etat du Valais.

Sophia Cantinotti et Jean-Henry Papilloud, commissaires de l’exposition
MÉDIAS VALAISANS EN PREMIÈRE LIGNE – DU 16 AVRIL AU 20 NOVEMBRE
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1. Conférence de presse avec les médias, 2013. © Olivier Maire
LES
2021, AU VIEIL

Mardi Ă© dFcem3re 2020 Ă  17 heures – CunCrddo4vu4arned nigeL SHORt, direction teneBRAe CHOiR

« Very Rn lish Christmas»

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

dimanche 20 dFcem3re 2020 Ă  17 heures BeRnARd HpRitieR, direction LpOnie RenAud, eLiSA VA Re, tRiStAn BLAnCHet, Stp8HAne ARLen

CH)uR nO AntipuA –s0e innneardviedr enSeMBLe BAROpue du LpMAn

HSndel, Charpentier et Bach

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

dimanche Q1 .anvier 2021 Ă  17 heures VACundO Agudin, direction eSteLLe Re Ax, violoncelle

ORCHeStRe de CHAMBRe de gen& e Vivaldi, Haydn, Holborne et elemann

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

dimanche 2Ă© JFvrier 2021 Ă  17 heures

Ben gLASSBeRg, direction neLSOn gOeRneR, iano

ORCHeStRe de CHAMBRe de LAuSAnne

Mozart, Chopin, BartóÀ et Tavel

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

Mercredi Q1 mars 2021 Ă  20 heures neLSOn VReiRe, iano Programme surprise

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

Caves Orsat RouvineƓ ins

Mercredi 2Ă© avril 2021 Ă  20 heures

eAn9guiHen puezRAS, violoncelle

ALeçAndRe tHARAud, iano «Complices»

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

Vondation Coromandel

Mardi 1er .uin 2021 Ă  20 heures

puAtuOR HAgen –s0e innneardviedr

gAutieR CA8u–On, violoncelle

Mozart et gch bert

Pxa ces rplies: CHF 30.– à 120.–

Faites partie des AMIS DE LA FONDATION PIERRE GIANADDA

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❏ d'organiser des concerts et des expositions de qualitĂ©

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❏ une colonne de bronze CHF 250.– 225 €

❏ une stùle d'argent CHF 500.– 450 €

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La Fondation Ă©tant reconnue «ƒuvre d’utilitĂ© publique» et «À but non lucratif», le montant de votre souscription peut ĂȘtre dĂ©duit de votre dĂ©claration fiscale.

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❏ un temple de platine CHF 5000.– 4200 €

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8ROCHAinS COnCeRtS
♩
Bulletin à détacher et à retourner
1920 Martigny - Suisse
Ă  la Fondation Pierre Gianadda,
1978 42 ans 2020
Mireille9Louise et Louis Morand eutheg j Cie Martiéng SA

1978 42 ans 2020

Pour se rendre Ă  la Fondation: Autobus Ă  partir de la gare CFF.

La Fondation est également accessible de la station ferroviaire de Martigny-Bourg, sur la ligne MartignyOrsiÚres/Le Chùble.

La Fondation est situĂ©e Ă  environ vingt minutes Ă  pied de la gare CFF. Le trajet est plus pittoresque en empruntant la Promenade archĂ©ologique, qui commence Ă  l’HĂŽtel de Ville, sur la Place Centrale, et mĂšne Ă  la Fondation, puis Ă  l’Amphithéùtre romain.

Forfait RailAway / CFF – EXPOSITIONS

20% de rĂ©duction sur l’entrĂ©e Ă  la Fondation Pierre Gianadda pour toutes nos expositions, la collection Stefanini, le Parc de Sculptures, le MusĂ©e de l’Automobile et le MusĂ©e gallo-romain.

Italie

Sur prĂ©sentation d’une quittance «simple course» du tunnel du Grand-Saint-Bernard et d’une entrĂ©e Ă  la Fondation, le retour en Italie dans les trois jours est gratuit.

CONCERTS

En raison de la situation sanitaire actuelle, le nombre de places aux concerts est limitĂ©. La participation Ă  ces Ă©vĂ©nements suit un protocole sanitaire prĂ©cis. Les informations sont communiquĂ©es rĂ©guliĂšrement dans nos «clins d’Ɠil» et figurent Ă©galement sur notre site www. gianadda.ch

VISITES COMMENTÉES EN SOIRÉE sans supplĂ©ment en principe, tous les mercredis Ă  20 h.

CLIN D’ƒIL

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Renseignements, souscriptions et réservations:

FONDATION PIERRE GIANADDA

1920 Martigny (Suisse)

Tél. +41 (0)27 722 39 78

Fax +41 (0)27 722 52 85 www.gianadda.ch –info@gianadda.ch

Vivez l'art et la culture dans des musées de toute la Suisse.

Les billets combinĂ©s RailAway sont disponibles avec 20% de rĂ©duction sur l’entrĂ©e Ă  la Fondation Pierre Gianadda. Vous obtiendrez plus d'informations dans votre gare, sur www.railaway.ch ou auprĂšs de Rail Service 0848 44 66 88 (CHF 0.08/min).

FONDATION PIERRE GIANADDA

MARTIGNY-LA-ROMAINE

EXPOSITIONS

Samedi 5 dĂ©cembre 2020 – dimanche 13 juin 2021

tous les jours de 10 h. Ă  18 h

MICHEL DARBELLAY

Photographe

Au foyer de la Fondation HOMMAGE À SAM SZAFRAN

Au Vieil Arsenal

D’avril au mercredi 24 novembre 2021 tous les jours de 10 h. à 18 h.

LE VALAIS À LA UNE

Un siÚcle vu par les médias

Mercredi 23 juin – mercredi 24 novembre 2021

tous les jours de 9 h. Ă  19 h.

GUSTAVE CAILLEBOTTE

Impressionniste et moderne

Vendredi 3 dĂ©cembre 2021 – dimanche 12 juin 2022

tous les jours de 10 h. Ă  18 h.

JEAN DUBUFFET Rétrospective
collaboration avec le Centre Pompidou,
En
Paris
CAILLEBOTTE Impressionniste et moderne Le Pont de l’Europe 1876, Huile sur toile, 125 x 180 cm, Association des Amis du Petit Palais, GenĂšve © Rheinisches Bildarchiv Köln, Michael Albe rs
Pierre Gianadda Martigny 23 juin – 24 novembre 2021 Tous les jours de 9 h à 19 h Suisse
Pierre Gianadda Au Foyer 5 dĂ©cembre 2020 - 13 juin 2021 Tous les jours de 10 h Ă  18 h HOMMAGE À SAM SZAFRAN Suisse Martigny Sam Szafran, Gallifa, printemps 2015 © Martine Franck, Collection Fondation Pierre Gianadda
Pierre Gianadda 3 dĂ©cembre 2021 – 12 juin 2022 Tous les jours de 10 h Ă  18 h JEAN DUBUFFET En collaboration avec le Centre Pompidou Suisse Martigny Jean Dubuffet, Site agitĂ©, 1973, Peinture sur rĂ©sine stratifiĂ©e, 241 x 372 3.2 cm. Collection Centre Pompidou, Paris. MusĂ©e ational d’art moderne Centre de crĂ©ation industrielle, AM 1975-DEP 40. © Centre Pompidou, MNAM-CCI Service de la documentation photographique du MNAM/Dist. RMN-GP © 2020, ProLitteris, Zurich
Pierre Gianadda 5 dĂ©cembre 2020 - 13 juin 2021 Tous les jours de 10 h Ă  18 h MICHEL DARBELLAY Photographe Suisse Martigny Douves-Blanches, ÉvolĂšne, 1970 © Michel Darbellay, MĂ©diathĂšque Valais Martigny
Fondation
Fondation
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GUSTAVE CAILLEBOTTE,

FONDATION PIERRE GIANADDA DU 23 JUIN AU 24 NOVEMBRE 2021
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Gustave Caillebotte, Le Pont de l’Europe, 1876. Huile sur toile, 125 x 181 cm. Association des Amis du Petit Palais, GenĂšve © Rheinisches Bildarchiv Köln, Michel Albers

impressionniste et moderne

Gustave Caillebotte naßt à Paris en 1848 dans un milieu aisé.

Peintre assurĂ©ment, il est animĂ© par mille passions: philatĂ©liste, horticulteur, grand amateur de sport nautique et aussi mĂ©cĂšne et collectionneur. C’est une personnalitĂ© originale, gĂ©nĂ©reuse, secourant et aidant les artistes en difficultĂ©, et surtout visionnaire. Il Ă©tait propriĂ©taire du cĂ©lĂšbre «Moulin de la Galette» de Renoir et de trois des «Gare Saint-Lazare» de Monet.

De quelques repĂšres biographiques

Martial Caillebotte, le pĂšre de Gustave, possĂšde un commerce familial de toiles en Normandie, qu’il quitte en 1830 pour s’installer Ă  Paris. Son affaire, Le lit militaire, contribue Ă  sa fortune grĂące Ă  un dĂ©bouchĂ© lucratif de vente de draps aux armĂ©es de NapolĂ©on III. En 1847, Martial Ă©pouse CĂ©leste Daufresne. Gustave est l’aĂźnĂ© des enfants issus de ce troisiĂšme mariage. AprĂšs d’excellentes Ă©tudes littĂ©raires au lycĂ©e Louis-le-Grand, il obtient en 1870 une licence en droit. EngagĂ© dans la garde mobile la mĂȘme annĂ©e, lors de la guerre franco-prussienne, il est dĂ©mobilisĂ© en 1871 et renonce Ă  une carriĂšre juridique. DĂ©sirant se prĂ©senter au concours de l’Ecole des beauxarts, il rejoint l’atelier du peintre acadĂ©mique LĂ©on Bonnat, oĂč il rencontre probablement Edgar Degas, ami de Bonnat. En 1872, il entreprend un voyage en Italie et sĂ©journe Ă  Naples, chez le peintre italien Giuseppe De Nittis. A 25 ans, Caillebotte rĂ©ussit l’examen d’entrĂ©e Ă  l’Ecole nationale des beaux-arts, mais sans avoir, semble-t-il, frĂ©quentĂ© les cours

d’une façon assidue. Dans le bel hĂŽtel particulier familial de la rue Miromesnil, on surĂ©lĂšve l’immeuble pour offrir un atelier Ă  Gustave. Au printemps 1874 se tient la premiĂšre exposition impressionniste chez le photographe Nadar. Degas tente de faire participer Caillebotte Ă  cet Ă©vĂ©nement, mais en vain.

Martial Caillebotte dĂ©cĂšde en dĂ©cembre de la mĂȘme annĂ©e et laisse Ă  sa femme et Ă  ses enfants une fortune considĂ©rable qui met le peintre Ă  l’abri du besoin.

Gustave Caillebotte passe ses Ă©tĂ©s dans la propriĂ©tĂ© dite Le Casin, acquise par son pĂšre en 1860 et situĂ©e Ă  Yerres en Seine-et-Oise, Ă  quelques kilomĂštres de Paris: un lieu enchanteur, source d’inspiration pour son Ɠuvre et oĂč il pratique le canotage avec bonheur. Caillebotte y observe dĂšs l’enfance un potager entretenu par un jardinier fleuriste, ce qui fera naĂźtre en lui une vĂ©ritable passion pour l’horticulture et le jardinage.

Le collectionneur de l’impressionnisme

En 1875 se dĂ©roule Ă  l’HĂŽtel Drouot une vente de peinture impressionniste. Caillebotte commence Ă  acquĂ©rir les toiles de ses amis, quelque 73 toiles; c’est le dĂ©but de sa cĂ©lĂšbre collection.

La navigation, le jardinage, la politique

Vers 1880, Caillebotte achùte une maison patricienne moderne le long du fleuve au Petit-Gennevilliers, proche d’Argenteuil, un endroit qu’il agrandit et embellit. Il pourra donner libre cours à sa passion physique du nautisme et de la pratique de la construction nauti-

que appliquĂ©e. Architecte naval trĂšs talentueux reconnu mondialement, il dessina les plans de 26 yachts Ă  la fois performants et Ă©lĂ©gants. Il y passe ses Ă©tĂ©s, alors que l’automne et l’hiver il s’installe Ă  Paris. En 1888, le Petit-Gennevilliers devient sa rĂ©sidence principale, mais il conserve un pied-Ă terre dans la capitale. Un jardin somptueux voit le jour grĂące Ă  son talent d’horticulteur et les fleurs deviennent pour lui une grande source d’inspiration. Caillebotte venait souvent, en voisin, visiter Monet Ă  Giverny. Tous deux apprĂ©ciaient de se promener au milieu des fleurs, d’évoquer soucis et bonheurs trouvĂ©s dans le jardinage. Ils s’échangeaient des conseils et des rĂ©fĂ©rences de plantes, comme l’atteste leur correspondance. TrĂšs vite, Caillebotte s’investit dans la politique communale et est Ă©lu conseiller municipal. Comme les peintres soutenus financiĂšrement, le village peut bĂ©nĂ©ficier des largesses de Caillebotte. Il reçoit ses amis au Petit-Gennevilliers: Renoir, Monet et bien d’autres encore. Son hospitalitĂ© ne sera jamais dĂ©mentie. A Paris, il rĂ©unit dans des dĂźners, principalement au cafĂ© Riche, tous ces artistes dissĂ©minĂ©s Ă  la campagne ou ailleurs. GrĂące Ă  cette initiative, le groupe des annĂ©es septante se retrouve autour de cet hĂŽte si attachant et agrĂ©able pour des conversations animĂ©es.

Disparition précoce

Malheureusement, un coup de froid contractĂ© dans le jardin est fatal Ă  Caillebotte, qui dĂ©cĂšde le 21 fĂ©vrier 1894 d’une congestion cĂ©rĂ©brale, Ă  seulement 46 ans. Une vue de son jardin, un sujet si cher au

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peintre, reste inachevĂ© sur son chevalet. De trĂšs nombreux proches assistent Ă  son enterrement, cĂ©lĂ©brĂ© par son demi-frĂšre, Alfred, en l’église Notre-Dame-de-Lorette. Gustave Caillebotte repose dans le caveau familial au cimetiĂšre du PĂšre-Lachaise. C’est une perte immense pour ses amis impressionnistes. Pissarro Ă©crit Ă  son fils: «Il a Ă©tĂ© bon et gĂ©nĂ©reux, un peintre de talent.» Monet tĂ©moignera quelques annĂ©es plus tard: «S’il avait vĂ©cu au lieu de mourir prĂ©maturĂ©ment, il aurait bĂ©nĂ©ficiĂ© du mĂȘme retour de fortune que nous autres, car il Ă©tait plein de talent »

Déchirement, dispute, querelle autour de ce legs exceptionnel

En mars 1894, Renoir, l’exĂ©cuteur testamentaire de Caillebotte, et Martial, le frĂšre du dĂ©funt, avisent Henri Roujon, le directeur des Beaux-Arts, du legs de l’artiste.

Toutes les querelles qui ont entourĂ© le mouvement impressionniste ressurgissent. Partisans de la modernitĂ© dudit mouvement et traditionalistes montent au front. Certains approuvent l’arrivĂ©e de ces toiles au MusĂ©e du Luxembourg, d’autres hurlent au scandale! Des propos tels que «antithĂšse de l’art français» ou «dĂ©fi au bon goĂ»t du public» fusent! AprĂšs deux ans de tractations, d’ñpres nĂ©gociations, de relations exacerbĂ©es, l’Etat n’accepte finalement que 40 tableaux sur les 69 lĂ©guĂ©s. En 1929, ces toiles et dessins de Monet, Renoir, Degas, Pissarro, Sisley, CĂ©zanne et Millet entrent au Louvre. Ils forment actuellement le noyau des Ɠuvres exposĂ©es au MusĂ©e d’Orsay.

Le peintre

Tous ces problĂšmes de legs ont occultĂ© la place de l’artiste et, pendant longtemps, Caillebotte rimera plus avec mĂ©cĂšne et collectionneur que peintre. Pour que les choses changent, il faut attendre les recherches de Marie Berhaut, conservatrice en chef du MusĂ©e des beaux-arts de Rennes et auteure du catalogue raisonnĂ© de 1978, et de Kirk Varnedoe, conservateur en chef du MoMA de New York qui consacre une monographie incontournable au peintre du PetitGennevilliers en 1987. Les expositions s’enchaĂźnent: en 1976 Ă  Houston, 1994 au Grand Palais Ă  Paris et 2005 Ă  l’Hermitage Ă  Lausanne, etc. Petit Ă  petit, la notoriĂ©tĂ© de Gustave Caillebotte grandit

pour atteindre enfin une célébrité méritée.

L’exposition du coude du Rhîne

Paysages urbains et campagnards, les bords de la Seine, natures mortes, scĂšnes d’intĂ©rieur, portraits et autoportraits: un panel de tableaux allant de 1870 Ă  1894 enchanteront les cimaises de la Fondation par leur originalitĂ© et leur chromatisme recherchĂ©. Lors de son sĂ©jour Ă  Naples en 1872, Caillebotte rĂ©alise un de ses premiers paysages: «La route prĂšs de Naples». On se rappelle sa formation chez Bonnat, oĂč il reçoit de bonnes notions de technique picturale. On remarque dĂ©jĂ  l’intĂ©rĂȘt du peintre pour la perspective, avec cette route qui guide le regard vers le VĂ©suve. L’attelage conduit par un cheval sombre semble figĂ©, Ă©crasĂ© par la chaleur. L’arbuste dĂ©charnĂ© tĂ©moigne de ce climat du Sud.

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1. Gustave Caillebotte, Raboteurs de parquet, 1875. Huile sur toile,102 x 146,5 cm. MusĂ©e d’Orsay, Paris © RMN-Grand Palais (MusĂ©e d’Orsay) / HervĂ© Lewandowski
GUSTAVE CAILLEBOTTE À LA FONDATION PIERRE GIANADDA

De la mĂȘme annĂ©e, un autoportrait dit «au chapeau d’été». Il est le premier des cinq peints entre 1872 et 1888. A environ 25 ans, son visage, fiĂšrement brossĂ© Ă  coups de pinceau assurĂ©s, le montre souriant. Le visage se dĂ©tache sur un fond neutre esquissĂ© en plein air. Caillebotte rĂ©alise de nombreux portraits d’amis, de personnalitĂ©s, de membres de la famille, retenons celui de sa mĂšre «Portrait de Mme Martial Caillebotte cousant», 1877, oĂč Gustave la reprĂ©sente en deuil de son mari, trĂšs concentrĂ©e sur un travail d’aiguille, dans le cadre surannĂ© de son petit salon bourgeois. L’éclairage latĂ©ral tamisĂ© d’une fenĂȘtre que l’on devine Ă  droite ajoute un contrepoint lumineux Ă  la sobriĂ©tĂ© intimiste du dĂ©cor.

En 1875, des travaux sont entrepris dans l’hĂŽtel particulier des Caillebotte et inspirent le peintre qui exĂ©cute plusieurs versions des «Raboteurs de parquet». Celle prĂ©sentĂ©e Ă 

2. Les roses, jardin du petit Gennevilliers, 1886. Huile sur toile, 97 × 116 cm. Collection particuliĂšre © Galerie Brame et Laurenceau, Paris

la Fondation est la cĂ©lĂšbre toile du MusĂ©e d’Orsay de 1875. PenchĂ©s sur le sol, leurs visages cachĂ©s, totalement absorbĂ©s, ces hommes peints d’une façon trĂšs rĂ©aliste, expriment la pĂ©nibilitĂ© de leur labeur. Ce tableau est absolument fondateur dans le gĂ©nie naturaliste attachĂ© au monde ouvrier et Ă  la rĂ©volution industrielle de la fin du XIXe s. Le pont de l’Europe fut l’un des premiers du genre dans l’architecture haussmannienne. Il fascine Caillebotte passionnĂ© de modernisme urbain, qui le peint Ă  plusieurs reprises. Parlons de la toile du MusĂ©e du Petit Palais de GenĂšve, datĂ©e de 1876, qui sera Ă  nos cimaises. Caillebotte s’est fait construire «un omnibus vitré» pour mieux obser-

ver ce pont «par tous les temps». Il se reprĂ©sente avec son chapeau hautde-forme, accompagnĂ© par une amie. L’homme accoudĂ©, dans sa tenue de peintre en bĂątiment, rappelle le monde du travail. Mais Caillebotte s’attache surtout Ă  rendre ces structures mĂ©talliques imposantes en X et leurs ombres portĂ©es. De nombreuses toiles rappellent Ă©galement l’attachement du peintre pour les fleurs. Jardinier fervent, il fait construire une imposante serre chaude dont il rĂ©serve une importante section Ă  la multiplication des orchidĂ©es qu’il croquera tels les chrysanthĂšmes trĂšs populaires en France avec leurs couleurs resplendissantes. Il s’attachera aussi Ă 

clairiĂšres

plantĂ©es pour assainir les talus et les berges. Et encore les marguerites, les tournesols, les capucines, tout un univers floral qu’il rend avec une touche vibrante et qui illuminera tel un feu de joie les cimaises de la Fondation l’étĂ© prochain.

Antoinette de Wolff-Simonetta

Sources:

‱ «Gustave Caillebotte. Impressionniste et moderne», catalogue, Ed. Fondation Pierre Gianadda, 2021

‱ «L’impressionnisme et le paysage français», Editions de la RĂ©union des musĂ©es nationaux, Paris, 1985

‱ «Gustave Caillebotte, la vie, la technique, l’Ɠuvre peint», Marie-JosĂšphe de Balanda, Edita SA, 1988

‱ «Caillebotte», Eric Darragon, Flammarion, 1994

‱ «Caillebotte Ă  Yerres, au temps de l’impressionnisme», Serge Lemoine, Flammarion, Paris 2014, Ville d’Yerres, 2014

‱ «Caillebotte peintre et jardinier», sous la direction de Marina Ferreti Bocquillon, MusĂ©e des impressionnismes, Giverny, 2016

DU 23 JUIN AU 24 NOVEMBRE 2021
traduire les lumineuses
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