INTERMED N°113 - octobre 2023

Page 1


Actu : L'Edito

L'édito •2•

En bref ...

Demandez le programme !

Sommaire

Un numéro un peu spécial d’Intermed en ce mois de novembre puisqu’il est consacré en grande partie au programme du colloque que le Club de la Presse Méditerranée 06, en association avec Université Côte d’Azur, organise le 16 novembre à Cannes autour de la problématique des images de guerre à l’heure du numérique. Rendons à César ce qui appartient à César, l’initiative de cette journée qui se tiendra au nouveau campus Georges-Méliès de CannesLa Bocca revient toute entière à Philippe Bellissent, représentant des communicants au conseil d’administration du Club, qui fait partie du Siclab, le laboratoire des sciences de l’information et de la

communication d'Université Côte d’Azur. Nous vous attendons tous très nombreux pour cette journée d’études ouverte au public qui rassemblera des invités prestigieux, universitaires et autres grands reporters, sur un sujet d’une actualité brûlante…

.

Vincent-Xavier Morvan Président du CPM 06

L'Édito / En Bref ..........................2 Actu vue par Kristian / Actu club...............3 Evénement : Colloque...........................4-7 Dossier : Terrorisme, Ukraine, ProcheOrient...............................................8-9 Culture.............................................10-11 L'oeil du psy......................................12-13 N°113 - Oct 2023

Directeur de la publication - Rédacteur en chef : Vincent-Xavier Morvan / Rédacteur en chef adjoint : Paul Barelli / Secrétaire de rédaction - Infographiste : Marion Guinochet Ont collaboré à ce numéro : Paul Barelli, Philippe Bellissent, Kristian, Nicole Laffont, Vincent-Xavier Morvan, Jean-Luc Vannier. Edition : Club de la Presse Méditerranée 06 / Maison des associations Garibaldi - 12 Ter Place Garibaldi 06300 Nice /Tél. : 06 60 45 23 45 / info@clubpresse06.com / www.clubpresse06.com / ISSN : 2107-7002

Un nouveau média à Nice : Radio06.com En septembre est née une nouvelle radio en ligne niçoise : Radio06. com. Naissance, ou plutôt renaissance puisqu'il s'agit de l’ancienne équipe de Radio Côte d'Azur, créée en 2012 et arrêtée il y a quelques années, qui remet le couvert. Multi-supports et sans publicité, cette radio principalement musicale diffuse également des chroniques toute la journée (flash info, flash sport, météo, horoscope…), ainsi que des émissions pratico-pratiques qui mettent en valeur des personnes qui travaillent et vivent dans le 06, tout en donnant aux auditeurs des astuces pour améliorer leur quotidien

.

https://radio06.com CPM06


L'actu

• 3 • L'actu vue...

vue par Kristian

Actu club

Pot du mois à La Trésorerie Un grand merci à Florence Forterre, la directrice de l’association Del’art, qui a accueilli le Club de la presse pour son pot de rentrée dans les murs de La Trésorerie. Ce tiers-lieu culturel, situé rue Trachel, au-

dessus de la gare de Nice, bénéficie du soutien des pouvoirs publics dans le cadre de l’opération de requalification urbaine menée dans ce quartier. L’objet de La Trésorerie, a expliqué Florence aux

membres du club présents ce soir du 6 octobre, est de proposer aux habitants du secteur de multiples activités artistiques, et ce dès le plus jeune âge puisque même les bébés sont accueillis ici. C’est bien simple, il se passe toujours quelque chose à La Trésorerie, avec des spectacles, des concerts, des conférences, des jeux collectifs… Outre cette adresse située au 13, rue Trachel, l’association gère également dans le quartier Le Narcissio, un espace d’expositions au 16, rue Parmentier, et Les Pépites, au 22, rue Vernier, un pop-up store qui diffuse des objets en série limitée d’artistes, d’éditeurs ou créés lors des ateliers de l’association V-X. Morvan

.


Evénement •4•

Evénement

JOURNÉE D’ÉTUDES Images de guerre : La couverture médiatique du conflit russo-ukrainien

Dispositifs, pratiques et productions de sens JOURNEE D’ETUDES

IMAGES 23 DE GUERRE La couverture médiatique du conflit russo-ukrainien Dispositifs, pratiques & productions de sens

16 nov 23

Amphi 38 Campus G. Méliès Cannes La Bocca https://url-r.fr/wSXsM


• 5 • Evénement

Depuis février 2022 et plus encore depuis le 7 octobre dernier, nous sommes chaque jour devant nos écrans de télévision confrontés aux tragédies qu'entraînent les deux conflits entre la Russie et l'Ukraine, le Hamas et Israël. Cette actualité renouvelée chaque jour par les événements qui se déroulent en continu, implique un travail de grande ampleur qui mobilise un nombre important de journalistes. Cette actualité est par nature extrêmement complexe car chacun des protagonistes utilise l' information comme une ressource dans sa stratégie. C'est pour mieux décrypter cette actualité, brouillée aussi par les réseaux sociaux, que le Club de la Presse Méditerranée 06 organise avec le SICLAB, laboratoire de recherche en communication de Université Côte d'Azur, une journée d'études consacrée aux images de guerre à l'heure du numérique. Cette journée qui se tiendra à Cannes sur le campus Méliès le 16 novembre verra la présence de nombreux intervenants, experts dans leurs domaines respectifs, universitaires comme journalistes, pour analyser, décrypter les images et témoigner de ce que sont ces conflits dans notre époque. Un programme de qualité qui permettra à chacun de mieux comprendre les enjeux des informations qui nous sont chaque jour données à voir. Contexte et enjeux De Thucydide en passant par Aron, toute une tradition de réflexion sur la stratégie a mis en évidence que les ressources militaires dans un conflit armé, aussi importantes soientelles, ne suffisent pas à elles seules à emporter la victoire. La guerre, affirmait Aron dans sa relecture de Clausewitz, est un alliage insécable de violence et de représentation de la violence. Dans le fil de cette interprétation, la puissance des États dépend de leur capacité

à contrôler l’élément moral de la guerre, à travers le sens et les justifications qui en sont donnés, et à susciter ainsi le consentement aux pertes, aux deuils et destructions matérielles. La production, le traitement médiatique et la réception des images font ainsi partie des variables stratégiques qui conditionnent le succès des armes sur le théâtre d’opérations. La guerre en Ukraine, depuis l’invasion du territoire par les armées russes en 2022, invite à repenser l’évolution des dispositifs de propagande et de contrôle des représentations,

à saisir dans quelle mesure la transformation des écosystèmes de l’information change les conditions de production de sens, modifie la circulation des représentations visuelles, et redéploie les imaginaires politiques du conflit. La journée qui se tiendra à Cannes le 16 novembre 2023 sur les images de guerre dans le conflit russo-ukrainien rassemble des chercheuses et des chercheurs de différents horizons disciplinaires. À partir d’études empiriques, elles et ils mettront en perspective les enjeux des images dans ce


Evénement •6•

Evénement

conflit, à l’heure du déploiement de la guerre et des récits journalistiques sur les réseaux sociaux numériques. Dans la première partie de la journée, il s’agira de comprendre comment, sur ces réseaux ou des plateformes dédiées, se construit l’autorité politique des belligérants, se déploie leur critique satirique au moyen de mèmes viraux, s’élabore

la mise en données visuelles de la guerre, et d’appréhender les défis que pose le contrôle militaire de la circulation des images en ligne. La seconde partie est plus directement consacrée à la production du sens de la guerre, à ses constructions symboliques et imaginaires, et à l’évolution de la couverture médiatique du conflit. La journée se terminera

Programme 9h00 – Accueil café

11h10 – Pause

9h30 – Ouverture de la journée d’études Jean-Paul AUBERT, Professeur à Université Côte d’Azur, Directeur de l’EUR Arts et Humanités Nicolas PELISSIER, Professeur à Université Côte d’Azur, Directeur du laboratoire SIC.Lab Méditerranée Vincent-Xavier MORVAN, Président Club de la Presse 06, Journaliste, Le Figaro

AXE 1 – CIRCULATION DES IMAGES DE GUERRE SUR LES RESEAUX Olivier KOCH, modérateur / Université Côte d’Azur, SIC. Lab Méditerranée

10h00 – Conférence-débat Arnaud MERCIER, Professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas, Laboratoire CARISM « Ce que les réseaux socionumériques changent dans ce qu’on peut voir d’une guerre : le cas de l’Ukraine » 10h45 – Contexte général de la guerre et historique Kristian FEIGELSON, Professeur à l’Université Paris III, Laboratoire IRCAV Au-delà des médias : la drôle de guerre Russie/Ukraine

11h25 – Évolution des images aéronautiques de guerre Thierry GOBERT, Université Perpignan Via Domitia, Laboratoire CRESEM

avec une table ronde dédiée aux professionnels de l’information, à des journalistes qui ont été amenés à couvrir la guerre en Ukraine

.

"

Philippe Bellissent

guerre en Ukraine : comment les mèmes humoristiques deviennent des objets politiques Oksana NEBOTLYCHKOVSKA, Université nationale d’Odessa d’I.I. Metchnikov (Ukraine), Département de Sociologie 13h05 – Pause déjeuner

11h50 - La chaîne Telegram du reporter de guerre russe Alexandre Sladkov : l’image de la guerre sous le prisme de l’image du reporter Vitaly BUDUCHEV, Université de Lille, Laboratoire GERiiCO

14h05 – Image affective du chef de groupe Wagner Evgueni Prigogine sur Telegram : une autre visibilité médiatique et politique au sein de l’espace public russe ? Alexander KONDRATOV, Université Clermont Auvergne, Laboratoire Communication et Sociétés

12h15 – De quelle médiation l’image est-elle le nom ? La mise en récit de la guerre dans les productions des data journalistes ukrainiens Valentyna DYMYTROVA, Université Lyon 2, Laboratoire ELICO

14h30 – Entre arme défensive et humour : une étude des « mèmes de guerre » publiés sur le compte Twitter « Ukrainian memes forces » Salomé PEIGNEY, Université Paris II Panthéon-Assas, Laboratoire CARISM

12h40 – Une nouvelle communication visuelle pendant la


• 7 • Evénement

AXE 2 – LE SENS DE LA GUERRE Nicolas PELISSIER, modérateur / Université Côte d’Azur, SIC.Lab Méditerranée 14h55 – La guerre en Ukraine sous le regard du photojournalisme des agences de presse Gisela CARDOSO TEIXEIRA, Aix-Marseille Université, Laboratoire IMSIC 15h20 – Réflexions sur le triangle : légitimité du locuteur-crédibilité du discoursadhésion du récepteur dans la médiatisation du conflit en Ukraine Philippe BELLISSENT, Université Côte d’Azur, Laboratoire SIC.Lab Méditerranée 15h45 – L’arme populaire de l’Ukraine : le Saint Javelin Cyrielle CUCCHI, Université de Corse, Laboratoire UMR 6240 LISA 16h10 – Le révisionnisme russe et les médias au MoyenOrient et en Afrique du Nord Thomas RICHARD, Université Paris I, Université Paris VIII, Université de Lille, ESPOL

16h35 – O, société civile et action démocratique en Ukraine Olivier ARIFON, Université Catholique de Lille, Université Côte d’Azur, Laboratoire SIC. Lab Méditerranée 17h00 – Pause 17h15 – Table-ronde Philippe BELLISSENT, modérateur Université Côte d’Azur, SIC.Lab Méditerranée Pierre BARBANCEY, Grand Reporter, L’Humanité Christophe DABITCH, Ecrivain et scénariste de BD Stéphanie PEREZ, Grand reporter, France Televisions Xavier TYTELMAN, Rédacteur en chef numérique, Air&Cosmos 19h15 – Buffet Responsables scientifiques Philippe BELLISSENT, Université Côte d’Azur, Laboratoire SIC.Lab Méditerranée Jeanne FERRARIGIOVANANGELI, Université

Infos pratiques Campus Georges Méliès 214 av Francis Tonner 06150 Cannes la Bocca Piste cyclable | Parking | Bus arrêt Saint Cassien Lignes Palm Express A-17 ou arrêt Palais des Victoires Ligne 1

Paris Nanterre, Laboratoire DICEN-IDF Olivier KOCH, Université Côte d’Azur, Laboratoire SIC.Lab Méditerranée Nicolas PELISSIER, Université Côte d’Azur, Laboratoire SIC. Lab Méditerranée


DOSSIER Terrorisme, Ukraine, Proche-

• 8 • DOSSIER

Orient : comment les journalistes luttent contre la désinformation

Au moment où le Club de la presse Méditerranée 06 organise un ambitieux colloque le 16 novembre à Cannes sur l’utilisation des images de guerre à l’ère du numérique, nous ouvrons le dossier du rôle crucial des journalistes pour faire le tri, sourcer et contextualiser l’avalanche d’informations ou de fake-news qui submergent les médias, amplifiée encore par les réseaux sociaux. « Le summum de l’art de la guerre c’est de soumettre l’ennemi sans verser une goutte de sang… Toute guerre est fondée sur une tromperie », écrivait six siècles avant JC le général chinois Sun Tzu dans son traité de stratégie militaire, « L’art de la guerre ». La vision de ce stratège s’inscrit dans l’actualité. Le mardi 10 octobre, le 20 heures de France 2 ouvre son édition par un sujet sur la tuerie perpétrée dans un kibboutz en bordure de Gaza. Anne-Sophie Lapix prend soin de préciser : « Plus d’une centaine d’habitants du kibboutz de Be’eri ont été massacrés par des terroristes qui se sont filmés. » La première séquence se compose d’images de vidéosurveillance sur lesquelles on aperçoit des hommes armés ouvrir une barrière de sécurité au petit matin, la deuxième, d’images produites par les assaillants. Le commentaire du journaliste précise : « Ils filment ensuite

leur progression, et passent méthodiquement de maison en maison. »

L’explosion d’un hôpital au cœur de violentes polémiques

Dans une dépêche AFP, la DRM fait cette mise au point : « Hôpital de Gaza : “rien ne permet” de désigner “une frappe israélienne” (renseignement militaire français) ». Trop tard, l’effet de souffle de la désinformation avait déjà eu lieu, avec des retombées immédiates auprès de l’opinion internationale, en France et ailleurs. À l’heure des réseaux sociaux et de la post-vérité, «la guerre entre Israël et le Hamas se déroule sur deux théâtres : le champ informationnel et celui des opérations militaires», rappelle David Colon, chercheur à Sciences-Po, historien, auteur de « La guerre de l'information : les États à la conquête de nos esprits » (Ed. Taillandier).

Ce reportage factuel ne fait pas l’objet de polémique contrairement à d’autres. Tel est le cas de l’explosion de l’hôpital Al-Ahli, à Gaza. Le vendredi 20 octobre, la Direction du Renseignement militaire française s’est livrée à un exercice peu habituel trois jours après la frappe de cet hôpital qui aurait fait « au moins 471 victimes », selon un bilan publié par le Hamas et relayé (trop) rapidement par certains médias. Les agents du renseignement français sont sortis de leur dis- « Mentir, mentir, crétion. À la demande de l’Elysée, ils ont mentir » tenté de corriger l’emballement médiatique provoqué par le bombardement. Ce spécialiste de la propagande et de


• 9 • DOSSIER

la communication politique en temps de guerre analyse, pour France 24, les enjeux communicationnels de la guerre en cours au Proche-Orient : « Le Hamas est rompu depuis belle lurette à la stratégie de la doctrine victimaire. Mentir, mentir, mentir : seul compte le récit auquel on croit. Aurait-on déjà oublié les leçons de la bataille de Jénine, en avril 2002 ? À l’époque, les Palestiniens avaient lancé une campagne médiatique accusant les Israéliens d’avoir commis un “massacre” dans le camp de réfugiés de Cisjordanie, entraînant la mort de centaines de Palestiniens. Emoi international, résolution de la commission des droits de l’homme de l'ONU condamnant les “tueries massives perpétrées par les autorités d’occupation israéliennes à l’encontre du peuple palestinien”… Il faudra attendre presque quatre mois avant qu’un rapport de l'ONU ne rétablisse les faits, expliquant qu’il n’y avait pas eu de massacre à Jénine».

Lutter contre la désinformation : Le Monde s’explique sur le traitement de l’explosion meurtrière survenue le 17 octobre à l’hôpital Al-Ahli, à Gaza Le public s’insurge souvent contre le manque d’auto-critique des journalistes. Notre profession a été longtemps dominée par la doctrine de la certitude. Sans donner des leçons, le Club de la presse Méditerranée 06 s’efforce de rendre compte des limites de l’exercice journalistique. Et le respect de la déontologie. Ainsi, faut-il mettre en exergue le communiqué de la direction de la rédaction du Monde publié le 24 octobre dont voici l’essentiel.

« Ce soir-là (le 17 octobre NDLR), Le Monde a repris, à 19h18, une dépêche de l’AFP faisant état du bombardement de l’hôpital Al-Ahli, à Gaza, imputé à l’armée israélienne, dont le premier bilan s’élevait à 200 morts. Le texte mentionnait le fait que les autorités israéliennes procédaient à des vérifications et doutaient de la véracité de cette information. Cette publication a fait l’objet d’un titre à la « une » de notre site et d’une alerte, à l’instar des principaux médias de la planète. À 21 h 57, nous avons fait état d’un démenti formel de l’armée israélienne qui attribuait cette explosion au tir d’une roquette réalisé par le Jihad islamique, une organisation alliée du Hamas. Au fil de la soirée, les doutes et les contradictions se sont accumulés au sujet de cette explosion. Nous les avons rapportés tout autant dans notre couverture en continu du conflit sur notre site qu’en « une » du quotidien du lendemain (daté du jeudi 19 octobre), qui revenait en titre, de manière plus générale, sur le « calvaire de la population » de Gaza et qui mentionnait « plusieurs centaines de civils morts dans l’explosion à l’hôpital – le bilan, invérifiable, est à ce jour estimé entre 100 et 300 victimes par les services de renseignement américains. Nous faisions également part des accusations du Hamas et du démenti israélien. Le jeudi 19 octobre, nous avons publié une enquête de notre service vidéo qui, faute d’apporter une preuve formelle, rassemble des images et des éléments de chronologie dont aucun n’étaye la thèse d’une responsabilité de l’armée israélienne. Ce travail s’ajoute à ceux d’autres rédactions et à de multiples avis d’experts qui tendent à montrer, à défaut de pouvoir le démontrer formellement, que l’explosion à l’hôpital Al-Ahli aurait été provoquée par la chute d’une roquette tirée de Gaza par un groupe armé palestinien.

Le Monde : « Nous avons manqué de prudence » Les investigations sur l’origine de ce drame continuent, mais ces éléments concordants nous conduisent aujourd’hui à considérer que nous avons manqué de prudence, le 17 octobre, en reprenant les informations sur cette explosion en provenance du Hamas. Les précautions s’imposent d’autant plus que nous ne disposons malheureusement pas de moyens de vérification sur place. L’accès à ce territoire est en effet interdit par l’armée israélienne, la presse internationale y est absente. La rédaction du Monde ne peut y recueillir de témoignages (…) Pour tenir compte de cette situation, que nous déplorons, nous serons amenés à rappeler régulièrement, dans nos publications, que certaines informations en provenance de la bande de Gaza, notamment les bilans des pertes humaines, ne peuvent être vérifiées. Pour être clairs sur l’origine de ces bilans, nous avons également décidé de faire évoluer la manière dont nous les présentons en indiquant désormais qu’ils émanent du ministère de la santé de la bande de Gaza «administrée par le Hamas ». » Ce mea culpa est diversement apprécié parmi les journalistes. Le Club de la presse Méditerranée 06 estime pour sa part que cette approche du Monde fait honneur à la profession et la crédibilise.

.

Dossier de la rédaction d’Intermed. Coordinateur Paul Barelli vice-président du CPM 06 et ex-correspondant du Monde à Nice


Culture • 10 •

Culture

Hauser & Wirth Monaco : époustouflant ! Un espace immaculé baigné par un puits de lumière entièrement investi par un artiste engagé. Mark Bradford a réalisé chez Hauser & Wirth, à Monaco, une

installation in situ qui laisse le visiteur sans voix. Inspiré par la série de tapisserie moyenâgeuses sur le thème de « La chasse à la licorne » où se bousculent espèces animales et végétales, prédateurs et proies, Mark Bradford s’appro-

prie ce thème inquiétant pour l’adapter au monde d’aujourd’hui. Oeuvre hélas d’une actualité brûlante qui trace un parallèle entre le monde contemporain et

« L’âge sombre » dont on pouvait espérer que l’obscurantisme serait derrière nous sous l’intitulé « Nobody Knows the Trouble I’ve Seen ». Mark Bradford recouvre entièrement les murs et reconstruit le paysage en

accumulant des couches de papier et de mastic qu’il façonne à l’aide de techniques caractéristiques de son œuvre telles le ponçage, la déchirure et l’oxydation. Les tableaux sont posés sur les murs couverts d’une œuvre en papier et des globes noirs représentant les différents continents sont suspendus au plafond . De tailles variées, ces globes font allusion aux innombrables circonstances sociales, politiques et économiques que chacun peut rencontrer dans le monde. « Mes tableaux dialoguent avec les tapisseries du Moyen-Age. De nos jours, les bandes dessinées disent les même choses. Je m’élève contre les étiquettes : une femme devrait faire tel type d’art, un noir tel autre…Quand j’arrive en Europe, je constate que la question tourne autour des nations. Aux Etats-Unis, c’est la couleur de la peau qui prime et qui détermine le destin… Il faut s’affirmer en tant qu’individu car c’est l’être qui prime ! » Cet artiste noir américain dont le pavillon m'avait enthousiasmée à la Biennale de Venise en 2017 était présent pour inaugurer cette exposition. Il revendique la non appartenance à la norme et veut crier là où souvent, comme il le dit, « les artistes parlent doucement car on leur inculque de rester à l’arrière scène ». Immergé dans son œuvre on comprend le message et on sort de la galerie stupéfait et tremblant. Un art fort, nécessaire, éblouissant. Nicole Laffont

.

Jusqu’au 10 février 2024 Hauser & Wirth Monaco . One Monte-Carlo Place du Casino


Culture

Culture • 11 •

Les gravures de Picasso au Centre d’Art de Mougins Un nouveau Centre d’Art vient de voir le jour au coeur du village de Mougins. Un espace dédié à la création moderne et contemporaine dans un bâtiment historique entièrement rénové afin d’accueillir artistes et visiteurs. Pour son inauguration et dans le cadre des 50 ans de la disparition du maître cubiste la première exposition met en scène les œuvres nées de la collaboration entre Picasso et le graveur de renom Aldo Crommelynck. Le recours à cette technique lors de ses dernières années mouginoises, est précisément l’une des caractéristiques du « dernier Picasso ». Des centaines de gravures ont été réalisées dont certaines réunies sur le thème de « La route du cuivre » titre de cette exposition. Plusieurs photographies témoignent également de ce travail à quatre mains , Aldo Crommelynck ayant côtoyé assidument Picasso durant les années 1963-1970 dans la propriété de « Notre-Dame de vie », dernière demeure de Picasso. Des images émouvantes qui s’inscrivent dans l’histoire de l’art. La complicité entre Picasso et les frères Crommelynck fut intense et fertile. De cette relation allait naître une amitié indé-

fectible. Une relation d’exception qui, pendant plus de dix ans, contribua à rendre les dernières années Picasso particulièrement fructueuses. On retrouve dans ces gravures les thèmes de prédilection de l’artiste. La femme en premier, omniprésente dans sa sensualité, l’atelier de l’artiste et une atmosphère onirique qui flirte avec le surréalisme. Un peu comme dans un bréviaire des derniers instants. Jusqu’au 7 janvier 2014

.

« La route du cuivre ». Pablo Picasso/Aldo Crommelynck. Centre d'Art : Place du Commandant Lamy, Mougins village

Le Club de la Presse 06 remercie ses partenaires 2023


• 12 • L'oeil du Psy

L'oeil du Psy

Jean-Luc Vannier, psychanalyste, chargé d’enseignements à Université Côte d’Azur, professeur à l’Edhec et à l’Ipag, nous livre ses dernières notes de lecture.

Commentaires d’un article du journal Le Point « Santé mentale des migrants, le grand tabou ». Dans son édition en ligne du 14 juin 20231 , un article du journal « Le Point » intitulé « Santé mentale des migrants, le grand tabou2 » évoque, à partir du drame d’Annecy, la question de la prise en charge psychique des migrants et, dans certains des cas, les liens possibles avec des passages à l’acte. A l’accoutumée, nous avons sélectionné, en les numérotant, des extraits de cet article que nous faisons suivre de nos commentaires (JLV en italique) -1- [Après avoir énuméré différents cas de passages à l’acte dont celui de Abdalmasih Hanoun qui a attaqué de très jeunes enfants et un couple de personnes âgées à Annecy le 8 juin 2023, le journaliste écrit] : « Là encore, pas de motivation apparente, mais beaucoup de questions sur la santé psychique de l’auteur des faits ». JLV : si elle n’est pas apparente – si elle l’était, le passage à l’acte n’aurait peutêtre pas eu lieu –, ce que le journaliste nomme « motivation » existe sans aucun doute. A condition de la discerner dans les formes revêtues par le délire3, lesquelles expriment souvent un lien, fût-il indirect, avec les racines de la psychose. Par ailleurs, ce qui caractérise le passage à l’acte du sujet psychotique réside le plus souvent dans son impulsivité, sa brutalité et son « apparente » immotivation. D’où le fait que des inconnus soient pris pour cibles. -2- « Pourtant, parmi les professionnels de santé, comme parmi les humanitaires, il y a consensus : la santé psychique des réfugiés et des demandeurs d’asile est

très souvent dégradée…Le seul fait de sortir de son cadre culturel augmente le risque de troubles du comportement ». JLV : le « cadre culturel » est susceptible d’alimenter la trame délirante où le religieux se confronte souvent au sexuel. Les thèmes délirants des patients internés à l’hôpital psychiatrique de Beyrouth Deir El Salib brassaient allègrement figures sacrées religieuses et orgies sexuelles4 . Lacan lui-même s’interroge dans sa thèse de médecine sur le fait de savoir si « les perceptions psychotiques se rapprochent de la perception dite animiste, dans laquelle le primitif charge de signification personnelle les phénomènes de la nature eux-mêmes5 ». -3- « Lorsqu’un migrant arrive en France par des voies légales, il passe une visite médicale menée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii). Depuis une loi de 2018, elle intègre un repérage des troubles psychiques, qui commence par un questionnaire autoadministré ». JLV : l’auto-administration du questionnaire soulève évidemment nombre de

questions. Il est permis de se demander si les appellations cliniques, nonobstant l’éventuelle explicitation des symptômes, sont de nature à faciliter l’obtention de réponses pertinentes. Sans parler des résistances les plus humaines – elles existent encore aujourd’hui sur le fait d’aller consulter un « psy » – à ne pas vouloir se définir ou être qualifié de « fou ». Il n’est que de citer les difficultés, au sein d’une entreprise soucieuse de repérer les défaillances psycho-sociales, à recueillir des « confessions » de mal-être tant de la part des cadres que de celle des employés6 . Le phénomène des suicides dans la police en constitue, certes dans un contexte multifactoriel, l’exemple paradigmatique. -4- « La psychiatrie, souvent décrite comme le parent pauvre de la médecine en France, n’existe pas dans beaucoup de pays d’émigration ». JLV : ce n’est sans doute pas pour les mêmes raisons, notamment budgétaires. Dans nombre de « pays d’émigration », la psychiatrie est souvent, voire exclusivement « asilaire » lorsqu’elle n’est


L'oeil du Psy• 13 •

pas associée à des pratiques politiques d’exclusion. Voire de « redressement » comme en témoignent les « condamnations à des soins psychiques » pour les femmes iraniennes refusant de porter le voile7. -5- « Les enquêteurs ont fait savoir qu’Abdalmasih Hanoun n’avait pas d’antécédents psychiatriques connus… Il existe un centre médico-psychologique (CMP) à Annecy. Si Abdalmasih Hanoun y est passé, il n’a pas laissé de traces ». JLV : c’est le passage à l’acte qui est aujourd’hui le révélateur le plus fréquent de la « psychose ordinaire » et non plus le délire ou l’hallucination. Et c’est ce passage à l’acte qui constitue « l’un des premiers comportements qui attirent l’attention chez des sujets n’ayant apparemment présenté aucun indice d’une quelconque pathologie8 ». -6- « Il était parano, il pensait que le gouvernement suédois organisait des complots contre lui, qu’il le surveillait », a raconté l’ex-épouse de l’assaillant d’Annecy dans une longue interview au Point ». JLV : le journaliste du « Point » mentionne des tentatives de cette épouse d’alerter différentes autorités – suédoises, suisses et françaises – sur les troubles d’Abdalmasih Hanoun. S’ils ont effectivement été tenus par l’intéressé, de tels propos signent une structure psychotique dont la prise en compte initiale aurait permis de définir le stade d’évolution. Et, éventuellement, de parer à tout passage à l’acte ultérieur. -7- « Illustration avec un cas concret. Un jeune Marocain est envoyé au CMP par une ONG. « Soi-disant mineur, on a fait semblant d’y croire. Il était en plein délire mystique. Avec des antipsychotiques, il a cessé de parler d’Allah, mais il continuait à délirer. » JLV : si le délire a persisté sous une autre

forme, c’est-à-dire par « déplacement », -----------------------------------------------------c’est probablement en raison d’une pos- https://www.lepoint.fr/politique/sante-mentale-des-migrantssible « systématisation » – au sens psy- le-grand-tabou-14-06-2023-2524486_20.php#11 chiatrique – de ce dernier. La médication Rien que l’emploi de ce mot mériterait une réflexion mais a en outre pour effet d’invisibiliser les celle-ci dépasserait le cadre analytique. effets les plus saillants de la psychose9. « Sa clarté significative est un premier trait caractéristique du D’où une augmentation d’autant plus délire…les thèmes délirants sont l’expression de tendances exponentielle de cette « psychose ordi- affectives méconnues par la conscience du sujet », J. Lacan, naire » que celle-ci devient une « clinique De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la perinvisible10 » confondue avec un mal-être sonnalité, Points Essais, n° 115, 1975, p. 293. généralisé où l’être humain noie dans la Des « présentations » de patients psychotiques avaient lieu masse une individualité devenue psychi- chaque semaine devant les étudiants en médecine sous la quement trop lourde à porter. direction du Pr. Charles Baddoura. 1

2

3

4

Lacan, Ibid., p. 292.

5

-8- « Conscients de ces réalités, les professionnels semblent très réservés sur l’idée de disperser les migrants en souffrance partout dans le pays, comme le prévoit le schéma national d’accueil 2021-2023 ». JLV : sans commentaire. -9- « Un sort identique attend probablement cet Érythréen, en France depuis quatre ans, arrêté par la police pour exhibitionnisme, complètement délirant. Pour le prendre en charge, il a fallu trouver un interprète parlant le tigrinya. « Il se disait vierge, raconte le psychiatre, et cherchait une femme sans vagin pour avoir des relations sexuelles sans risque d’enfanter… ». Après prescription d’un traitement, il a disparu dans la nature ». JLV : l’on discerne ici combien les thèmes délirants tels qu’ils sont précisément mentionnés par cet Erythréen éclairent la genèse probable de la psychose. La stabilisation provisoire par le traitement – si celui-ci est effectivement suivi – n’empêchera sans doute pas le retour d’effets paroxystiques chez le sujet qui tentera alors, par le passage à l’acte, une stratégie désespérée – et illusoire – de « libération de la maladie11 ».

Si ces difficultés répondent à des « verticales hiérarchiques »

6

opposées, elles reposent néanmoins sur des craintes liées à la perception des compétences. A la suite de plusieurs de ces condamnations, quatre prési-

7

dents d’associations iraniennes en santé mentale ont publié une lettre ouverte pour dénoncer le « détournement des soins psychiatriques » par les autorités. La lettre a été signée par : Dr Majid Sadeghi, Chef de l'Association scientifique des psychiatres d'Iran, Dr Ahmad Ali Nurbala Chef de l'Association scientifique de médecine psychosomatique d'Iran, Dr Behrouz Dolatshahi Chef de l'Association scientifique de psychothérapie d'Iran, Dr Hamid Poursharifi Président de l'Association iranienne de psychologie. Jean-Claude Maleval, Conversations psychanalytiques avec

8

des psychotiques ordinaires et extraordinaires, Erès, 2022, p. 17. Notamment en référence aux critères du DSM qui exigent

9

l’hallucination ou le délire pour catégoriser une psychose. Invisibilité qui nécessite de compléter le pourcentage officiel des troubles psychiatriques dans la population, tel qu’énoncé par les autorités françaises, par un « chiffre de l’ombre ». Jean-Claude Maleval, Ibid., p. 13.

10

P. Guiraud, Le meurtre immotivé, réaction libératrice de la

11

maladie, Annales médico-psychologiques, n°2, 1928, pp. 352-360. -----------------------------------------------------------------


PASSEZ EN MODE ÉCO

avec le Département !

Jusqu’à 5 400 € Pour acquérir un véhicule électrique neuf**

Jusqu’à 41 400 € pour améliorer le confort énergétique de votre logement

Des aides pour tous* sur *Toutes ces aides sont assujetties à des conditions spécifiques, sans exclusion de revenus. ** 5000 € pour le véhicule auquel s’ajoute 400 euros pour l’achat d’une borne si vous habitez en maison individuelle ou 400 € pour le raccordement à la borne de recharge si vous habitez en copropriété.

0800 037 016

Service et appel gratuits. Du lundi au vendredi, 9h-12h et 13h30-17h

Département 06 Annonceur du MédiasCom'06 2023


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.