Numéro 29 - Janvier/Mars 2006

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BALLET BIARRITZ THIERRY MALANDAIN

CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL

BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ / THIERRY MALANDAIN JANVIER – FÉVRIER – MARS 2006

Miguel Pla Boluda et Annalisa Cioffi dans Mozart à 2. © Olivier Houeix

ÉDITO

SOMMAIRE

Invité par Didier Deschamps et le Ballet de Lorraine, c’est avec émotion que Ballet Biarritz s’est produit fin décembre à Nancy. Car à quelques heures de l’année nouvelle, le calendrier rappelait que vingt ans plus tôt, nous quittions cette ville et le Ballet Théâtre Français pour créer la Compagnie Temps Présent. « Temps de galère, temps de misère, temps de bonheur grâce à la puissante solidarité qui soude le groupe » écrira Jacqueline Thuilleux de nos débuts*. Temps d’insouciance aussi, car en 1986, voir de jeunes danseurs d’air classique s’avancer sur la piste au moment où soufflaient d’autres courants chorégraphiques parut anachronique.

L’ÉVÉNEMENT LA DANSE À BIARRITZ N°24 COULISSES ACTIVITÉ DU BALLET BIARRITZ JUNIOR EN BREF CALENDRIER

De Nancy nous fîmes escale à Élancourt, puis à SaintÉtienne avant de découvrir Biarritz. À bord, les heures de vol servirent d’expérience, mais sans le soutien de ceux qui balisèrent d’encouragements notre plan de vol, nous serions probablement en train de nous grignoter comme des survivants andins. Alors qu’évitant le crash, vingt ans plus tard et la chair moins tendre, une bonne partie de l’équipe (Yves, Françoise, Richard, Adriana, Dominique, Oswald, Angélito et Jean-Claude) survole toujours la Cordillière des Ans. Certes, le long cours de cette liaison ne fut pas sans turbulences, maintes fois il fallut se serrer la ceinture et relever la tablette, mais en choisissant l’Amitié comme compagnie d’assurance considérons que nous respections une consigne lumineuse.

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Célébrer les anniversaires doit être bon pour la santé, puisque plus on les fête, plus on est vivant. Pour autant, l’actualité favorisant d’autres festivités, celui-ci ne fera pas l’objet de manifestations particulières hormis la parution d’un Numéro spécial. Quant à l’actualité, énumérons la création à Biarritz de Don Juan, les retrouvailles avec New York pour une série de représentations des Créatures, Boléro et La Mort du cygne entrant au répertoire du Singapore Dance Theater. Enfin, les répétitions d’Orphée et Eurydice, un opéra dont l’Esplanade Opéra Théâtre de Saint-Étienne m’a confié la mise en scène. Ce sera une première, comme celle de nous produire en mai dans un grand théâtre parisien. Mais avant, profitant d’un créneau favorable, les personnels au sol et naviguant de Ballet Biarritz, vous souhaitent une bonne et heureuse année. Rêvons à un ciel dégagé, même si la réalité est loin d’être une classe affaire. Thierry Malandain, janvier 2006. * Les Années Dupond au Ballet Français de Nancy – PUF – 1990


L’ÉVÉNEMENT

Les Petits Riens et Don Juan à Biarritz Samedi 25 février à 21h Dimanche 26 février à 17h Représentations scolaires des Petits Riens organisées par Biarritz Culture les jeudi 23 et vendredi 24 à 14h30

Musique Wolfgang Amadeus Mozart et Christoph Willibald Gluck Chorégraphie Thierry Malandain Décor et costumes Jorge Gallardo Directeur de la production – conception lumière Jean-Claude Asquié Maîtres de ballet Richard Coudray et Françoise Dubuc Régie générale Oswald Roose Réalisation costumes Véronique Murat Réalisation décors Chloé Breneur et Michel Pocholu Avec Véronique Aniorte, Camille Aublé, Giuseppe Chiavaro, Annalisa Cioffi, Frederik Deberdt, Gaël Domenger, Roberto Forléo, Cédric Godefroid, Mikel Irurzun del Castillo, Silvia Magalhaes, Arnaud Mahouy, Christopher Marney, Miguel Pla Boluda, Magali Praud, Rosa Royo, Nathalie Verspecht Coproduction Grand Théâtre de Reims, Esplanade Opéra Théâtre de Saint-Étienne – partenaire permanent, CCN Ballet Biarritz, Association Les Amis de Ballet Biarritz Avec le soutien de :

Nathalie Vespecht et Cédric Godefroid dans Mozart à 2. © Olivier Houeix

Après Les Petits Riens évoqués dans la précédente édition de Numéro, le moment est venu de retrouver Don Juan. Présenté avec succès au Burgtheater de Vienne le 17 Octobre 1761, ce ballet-pantomime en trois actes associait à sa création le chorégraphe Gasparo Angiolini au compositeur Christoph Willibald Gluck. Un témoin, le comte Carl von Zinzendorf commente la représentation en ces termes : « Au spectacle on dansa un ballet de pantomimes, Don Juan ou Le Festin de pierre. Le sujet est extrêmement triste, lugubre et effroyable. Don Juan porte une sérénade à sa maîtresse et entre chez elle, le Commandeur le trouve sur le fait, se bat avec lui en duel, est blessé mortellement, et tombe sur le théâtre. On l’emporte, Don Juan entre avec des dames et danse un ballet, puis on se met à souper ; sur ses entrefaites arrive le Commandeur en statue, tous les convives se sauvant. Don Juan s’en moque, et imite tous les mouvements du spectre. Le spectre s’en va et d’un coup l’enfer paraît, les furies dansent avec des torches allumées et tourmentent Don Juan. Dans le fond on voit un beau feu d’artifice, qui représente les feux de l’enfer. Enfin, les diables emportent Don Juan et se précipitent avec lui dans un gouffre de feu. Tout cela était très bien exécuté, la musique fort belle. » Passant pour être le premier ballet au sens moderne du terme, Don Juan exercera une grande influence sur l’avenir de la musique et de la

danse en Europe. Loin du pur divertissement, l’ambition de traduire une action dramatique par la pantomime et la danse, rapproche Don Juan des réformes exposées par Jean George Noverre dans ses Lettres sur la danse et les ballets publiées en 1760. À ce titre, un différent opposera les deux chorégraphes : Angiolini reprochant à Noverre de s’accorder le mérite des innovations en proposant le terme de ballet d’action contre celui de ballet-pantomime. Alors que l’initiative d’imiter les passions et les actions des hommes à travers une pantomime à caractère dansant De haut en bas, Angiolini (DR) et Gluck revient selon lui à son maître Franz Hilverding. Né à Florence en 1731, Angiolini débute sa carrière en se produisant dans plusieurs villes italiennes avant de rejoindre Hilverding à Vienne en 1754. Il lui succède trois ans plus tard, composant quelques ballets avant de partager avec Gluck la réussite de Don Juan. Un succès confirmé l’année suivante par la création de l’opéra Orphée et Eurydice dont il régla les danses. Gluck qui visait à une interprétation chantée d’un drame, se rapproche ici des théories mises en œuvre avec Don Juan et fait date dans l’histoire de la musique. De la sorte, la danse précéda l’art lyrique dans les innovations qui bouleversèrent les conven-

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Répétition Don Juan © Olivier Houeix

tions théâtrales de la fin du XVIIIe siècle. S’inspirant en partie de l’œuvre de Molière, Angiolini va rédiger en français le livret du ballet tout en exposant dans le programme ses principes chorégraphiques. Comme le rapporte le comte Zinzendorf : le sujet extrêmement triste, lugubre et effroyable, l’apparition surnaturelle de la statue du Commandeur ajoutée à la danse des furies, impressionna les spectateurs de l’époque. Ce caractère fantastique incitera par la suite nombre de chorégraphes à s’emparer du thème. Quant à Angiolini, toujours en collaboration avec Gluck, il montera une Sémiramis à partir de la tragédie de Voltaire en 1765. L’année suivante, on le voit quitter Vienne pour Saint-Petersbourg où il va diriger la reprise de ses œuvres tout en offrant de nouvelles créations dont il compose parfois la musique. Il retourne ensuite à Vienne, avant de travailler à Venise, Turin et Milan. Puis, à nouveau, il retrouve la Russie pour enseigner à l’école des Théâtres Impériaux. Sa carrière s’achèvera en Italie où il meurt en 1803.

Don Juan est né à Séville au siècle d’or. À l’origine, une légende médiévale présente un homme qui pour se rendre à ses noces doit traverser un cimetière. Déjà ivre, il donne un coup de pied dans une tête de mort avant de l’inviter au banquet. À cette invitation blasphématoire, le spectre du défunt répond en apparaissant au beau milieu de la fête pour donner rendez-vous à notre homme. Lorsque celui-ci se rend au cimetière, il découvre une table dressée sur une tombe, le spectre le saisit alors par la main et l'entraîne avec lui aux Enfers. C’est Tirso de Molina, qui le premier aborde cette légende avec son El Burlador de Sevilla y convidado de piedra publié en 1650. Dans ce drame, Don Juan est le type du sensualisme raffiné, il court d'un pays à l'autre, d'un duel à un rendez-vous amoureux, tout en unissant l'impiété à l'égoïsme. Depuis lors, Don Juan, pour qui toute femme est bonne à séduire, n’a cessé de conquérir le monde et de se métamorphoser : de Goldoni à Molière et Mozart, en passant par Byron, Baudelaire, Lenau et d’autres. Au gré des

Véronique Aniorte et Annalisa Cioffi Répétition Don Juan © Olivier Houeix BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ – NUMÉRO 29 PAGE 3


inspirations qu’il suscite, il change de physionomie. On le voit proche de la Commedia dell’arte, libre-penseur, coureur de jupons, mélancolique, assoiffé d’absolu, à peine épuisé par cette course littéraire tant il fascine. Pour Gluck et Angiolini, il est l’aristocrate libertin esquissé par Molière. Nous retenons ces traits convenus tout en lui attribuant d’autres expressions. Notamment l’idée d’un homme qui à travers les femmes cherche la femme. À moins qu’il ne se cherche lui-même ? La raison voudrait qu’il s’arrête un jour, tombant réellement amoureux. Mais Don Juan n’est pas raisonnable, ne respecte rien ni personne et, à défaut de connaître l’extase dans l’unique et l’immobilité, ce séducteur impénitent court avec avidité pour jouir du multiple. Jusqu’au moment fatal où la terre s’ouvre sous ses pieds pour l’engloutir.

Un dispositif triangulaire, fragilisé par l’apparition de la Mort, sans qui, jamais la figure légendaire de Don Juan n’aurait fait couler autant d’encre et de larmes. Thierry Malandain

Traiter de Don Juan, se lier avec le personnage c’est essayer de le retenir, ce qui est contraire à sa nature. Aussi, avons-nous préféré en saisir l’éclat, les éclats puisque ici le rôle bénéficie de trois interprètes, tandis que la figure d’Elvire reflète toutes les conquêtes du personnage. Ce processus de division la scénographie en rend compte par l’usage d’une table de banquet se scindant en triangles acérés pour à la fois énumérer et commenter les assauts de Don Juan, témoigner du désordre amoureux qui s’en suit ou figurer les mâchoires de l’enfer. Enfin, à l’exception de Sganarelle, personnage servant habituellement de fairevaloir au héros et souvent prétexte aux galéjades, seuls les protagonistes nécessaires au drame sont en scène : Don Juan, Elvire, le Commandeur.

Magali Praud et Frederik Deberdt Répétition Don Juan. © Olivier Houeix

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Billetterie Office du Tourisme de Biarritz Tél. 05 59 22 44 66 – Fnac www.fnac.com – Carrefour, France Billet Tél. 0 892 683 622 – www.ticketnet.fr 0892 69 70 73 – Virgin Bayonne – Centre Culturel Leclerc Anglet (RN 10) • Plein tarif 25 € • Tarif réduit 20 € Carte Biarritz Culture, Les Amis du Théâtre, Les Amis du Musée de Guéthary, Les Amis d’Arnaga, Scène nationale de Bayonne, Tournées Charles Barret, groupe de 10 personnes, parents d’élèves des écoles de danse, des scolaires sensibilisés par le CCN et du Conservatoire national de région de Bayonne, Carte Synergie 2000 • Tarif jeune 10 € moins de 18 ans, Carte étudiant, Carte jeune, demandeurs d’emploi, élèves écoles de danse, du Conservatoire national de région de Bayonne et scolaires sensibilisés par le CCN)

• Amis du Ballet Biarritz 16 €


La danse Plages à Biarritz # 24 d’histoires Yvette Chauviré

Inspirant les légendes et les rêves des poètes, le cygne, cet oiseau des eaux et des airs, est aussi le nom donné à une constellation. Sans doute parce qu’elle se présente sous la forme d’une croix rappelant un oiseau déployant ses ailes. Des ailes harmonieuses et fluides comme les bras des danseuses interprétant Le Cygne de Saint-Saëns et Fokine. Au coeur de cette constellation est une étoile : Yvette Chauviré, Prima Ballerina Assoluta, qui a fait du cygne son oiseau de compagnie et d’un trait de plume sa signature. C’est en 1927, à l’âge de dix ans, qu’Yvette Chauviré entre à l’école de danse de l’Opéra de Paris. Elle suit les classes de Laetitia Couat et de Carlotta Zambelli, un enseignement partagé à cette époque entre ce

qui subsiste du style français et le brio italien. « Plus italien que français » précise-t-elle dans l’ouvrage que lui a consacré Gérard Mannoni « Le style français, c’est Saint-Pétersbourg qui en avait hérité. Serge Lifar allait nous montrer toute la différence ». C’est donc auprès de lui, mais surtout de Boris Kniaseff qu’elle ajoute à son art l’expressivité et le lyrisme qui émaillent sa danse. Première danseuse à 20 ans en 1937, elle est choisie pour tourner La Mort du cygne, un film de Jean Benoît Lévy d’après la nouvelle de Paul Morand dont Serge Lifar règle la chorégraphie. La révélation de ses talents de comédienne lui ouvre les portes d’une carrière cinématographique américaine, mais ses aspirations profondes vont à la danse. Elle reviendra au cinéma plus tard, avec le film Le Carossello napolitano d’Ettore Gianini, chorégraphie de Leonide Massine, aux côtés de Sophia Loren. Yvette Chauviré est nommée Étoile le 31 décembre 1941 à la suite de son interprétation magnifique d’Istar, musique de Vincent d’Indy. Suivront Joan de Zarissa, Les Animaux Modèles, Suite en blanc de Serge Lifar. Après la libération, ce dernier contraint à l’exil, quitte Paris pour Monte-Carlo. En son absence, Yvette Chauviré danse Giselle, Le Lac des Cygnes et Coppélia. Le Palais Garnier est sa maison, mais les relations avec son administration seront parfois orageuses, c’est pourquoi à deux reprises elle s’en échappe : En 1946, elle rejoint Serge Lifar aux Ballets de Monte-Carlo et en 1949, à la fin de son contrat, elle part en tournées à l’étranger et en province. Entre temps elle y sera revenue pour créer le rôle de l’Ombre dans Les Mirages (1947), chorégraphie de Serge Lifar, musique d’Henri Sauguet, qu’elle marquera d’autorité et d’abandon poétique. En 1949, Victor Gsovsky règle pour elle et Wladimir Skouratoff le Grand pas classique sur une musique de Daniel François Esprit Auber ; un pas de deux composé à la gloire de l’art académique où les interprètes rivalisent d’élégance et de virtuosité. Le monde entier fait appel à son art, et les compagnies les plus renommées comme la Scala de Milan, Les Ballets Russes de Monte-Carlo ou le London Festival Ballet, l’invitent. En 1953, elle revient à l’Opéra avec un contrat plus souple qui lui permet de continuer sa carrière internationale. C’est alors la création de la Belle Hélène de John Cranko qui révèle une artiste piquante, pleine d’humour et de fantaisie. Elle retrouve également le catalogue lifarien et les grands rôles du répertoire, notamment Giselle qu’elle interprètera auprès de Rudolf Noureev en 1961. C’est dans cet ouvrage où elle sublime le souvenir des grandes ballerines romantiques qu’elle fait ses adieux à l’Opéra de Paris en 1972 avec Cyril Atanassoff pour partenaire. Suivront des représentations en France et à l’étranger avant qu’elle ne décide de transmettre le secret de son art aux futures étoiles. Ce sera le sujet d’un film de Dominique

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Ci-contre, Yvette Chauviré, Constantin Népo, Geneviève Lespagnol et Boris Traïline – Biarritz, 1950 Ci-dessous, Yvette Chauviré et Serge Perrault – Biarritz,1952

Delouche dans lequel Yvette Chauviré devient Une Étoile pour l’exemple car « elle a trouvé l’état de grâce auquel seulement trois ou quatre danseuses parviennent chaque siècle » dira un critique. Il faudrait également évoquer Yvette Chauviré chorégraphe, comédienne et artiste peintre, mais l’objet de cette page nous invite à retrouver Yvette Chauviré à Biarritz où elle est ovationnée en 1950 au Casino Bellevue entourée de Geneviève Lespagnol et Boris Traïline. Une photographie en compagnie de Serge Perrault témoigne également de sa présence en 1952, mais préférer une date plus proche permet de confier qu’elle fut pour nous une bonne étoile. En 1987, grâce à Claire Sombert dont la carrière internationale s’est illustrée auprès de Jean Babilée, Roland Petit, Gene Kelly… Yvette Chauviré découvrit notre travail. Par la suite, nous eûmes souvent le plaisir de l’accueillir à nos représentations. Ainsi, était-elle présente en septembre 1997, lorsque la compagnie présenta Carmen et Sextet dans le cadre du Temps d’Aimer. À l’issue du spectacle, elle vint sur scène féliciter les danseurs et nous amusa d’un pastiche chorégraphique témoignant qu’elle était très au fait de la création contemporaine. Le lendemain, nous apprenions que la ville de Biarritz nous destinait le tout nouveau Centre Chorégraphique National. Un an plus tard, Yvette Chauviré était présente à son inauguration. Depuis ce jour, au

respect et à l’admiration, s’est ajoutée l’idée romantique qu’elle était pour nous le « cygne » du destin, sinon « l’oiseau-lyre » qui en tourna la page. En hommage et avec son aimable autorisation, au sein du nouvel édifice construit à Biarritz pour le Conservatoire National de Région Bayonne-Côte Basque, une classe de danse portera son nom aux côtés du Marquis de Cuevas et de Sophie Puaux, jeune professeur de danse récemment disparu. À lire : Yvette Chauviré – Gérard Mannoni, Éditions Le Quai, 1997. Le corps glorieux – Dominique Delouche, Éditions La renaissance du livre, 2003. Le Cygne – Benjamin Rossé, Éditions Art Line, 2000. À voir : Une Etoile pour l’exemple – Dominique Delouche, Les Films du Prieuré, 1998 (en DVD chez Doriane Films, 2005).

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Françoise Dubuc : qui c’est celle-là ? par des Sœurs Dominicaines bienveillantes et attentives aux jeunes danseuses dont elles avaient la responsabilité. Je passai cinq années dans cet oasis tranquille, tenue à la discipline féroce de la danse dictée par la haute exigence et l’autorité de Marika. J’eus la chance de côtoyer des danseurs déjà illustres, tels Rudolf Noureev, Marcia Haydée, Richard Cragun, Antoinette Sibley, Stevlana Beriosova, Elisabeth Terrabust et d’autres encore. D’assister aux débuts d’une danseuse d’exception, Eva Evdokimova, artiste humble et douce, travailleuse acharnée qui fut un exemple pour toute l’école et qui par la suite fit une très grande carrière. Afin de nous familiariser avec la « scène », nous faisions de la figuration durant la saison annuelle d’opéras. De belles productions étaient données à la salle Garnier du Casino. Je garde un souvenir bouleversant de Margherita Wallman remontant Le Dialogue des Carmélites de Francis Poulenc. Jeune figurante parmi la « foule », je regardais, émue, ces « carmélites » monter une à une à l’échafaud, soutenue par la musique expressive de Poulenc. Dans Don Quichotte, je connus Gabriel Bacquier, qui outre sa bonhomie, imposant et fier sur sa belle Rossinante, projetait une magnifique voix au timbre chaud et généreux. Il nous semblait alors normal de croiser dans les coulisses, Régine Crespin, Jacques Chazot, Robert Manuel, Mady Mesplé, Suzanne Sarroca…

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apa, maman, danse » ou alors était-ce « Maman, danse, papa… » Je ne me souviens plus de l’ordre de mes premiers balbutiements. Dès que mes jambes le permirent, je me hissais sur la pointe de mes « charentaises ». J’ignorais tout de la danse, des pointes et des tutus, n’ayant jamais vu de spectacle de ballet de ma courte vie ! La seule richesse à la maison était un poste de radio au son duquel je devenais « Isadorable » sans le savoir pour la plus grande joie de mes parents, et celle plus partagée de ma grande soeur ! Dès l’âge de cinq ans, on m’inscrivit dans un cours de danse à Pau. J’y passai ma première heure en larmes, parmi d’autres débutantes, les jambes nues sous un justaucorps en coton dix fois trop grand et portant aux pieds d’horribles chaussons en feutre noir. Je restai près de dix ans dans cette école, ne gardant hélas aucun bon souvenir. Mais je dois rendre justice à son professeur qui m’a fait connaître celle qui me fera découvrir au détour d’un stage un autre visage de la danse : Marika Besobrasova. Professeur prestigieux, unique dans son approche de la danse, pionnière dans l’analyse du mouvement académique, Marika avait son école en Principauté de Monaco. J’y découvris une approche différente de la danse toute en raffinement, souci du détail, une danse inspirée. J’étais fascinée, admirative, idolâtrant ce professeur comme tant d’autres de mes camarades. N’ayant pas encore quinze ans, nous étions encadrées

Vint le temps redouté des auditions ! Je fus engagée au Het Nationale Ballet d’Amsterdam. Sous la direction de Rudi Van Dandzig, j’entamais ma vie professionnelle après avoir quitté le cocon monégasque et mes amis. Je découvrais l’Amsterdam des années 70, le néerlandais, la météo maussade, les hippies… Et quatre vingt-dix danseurs au ballet. Quelques Lac des Cygnes, Bayadère, Études et autres grands ballets du répertoire ainsi que des créations comblèrent deux saisons néerlandaises. Puis le mal du pays me ramena vers Paris. Je suivis là les fameuses classes de Raymond Franchetti. Après une audition, je fus engagée au Ballet Théâtre Français de Nancy dirigé par Jean-Albert Cartier et Hélène Traïline. Au début, le répertoire était surtout dominé par des chorégraphes américains tels John Butler, Louis Falco, Viola Farber, Lar Lubovitch, héritage du Ballet Théâtre Contemporain d’Angers, créé et dirigé par Françoise Adret et Jean-Albert Cartier en 1968. Puis vint un programme dédié aux « Ballets Russes » avec Rudolf Noureev comme « star » invitée. J’eus alors l’immense honneur d’être sa partenaire durant trois saisons et de connaître à ses côtés de mémorables ovations dans Le Spectre de la Rose, l’Après midi d’un faune ou Apollon Musagète. C’est également à Nancy que je rencontrai Thierry Malandain, Yves Kordian, Richard Coudray, Oswald Roose, Angélito Lozano danseurs comme moi et Jean-Claude Asquié, faisant partie de l’équipe technique. Enfin, l’année 1986 nous trouva prêts pour fonder notre propre compagnie, et c’est en juin 1986 que « Temps Présent » présenta son premier spectacle. Jamais je n’ai ressenti autant de bonheur aux saluts. Nous étions si fiers de présenter notre « bébé », nous Ü

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étions les meilleurs, avec le meilleur chorégraphe !!! Soit dit en passant, nous raflions tous les premiers prix lors des concours chorégraphiques…

resque qui fait sourire plus d’un, notamment lors des conférences de presse. Mais heureusement ! La Danse est un Art au langage universel !

Ma route bifurqua soudainement, puisque j’arrêtai ma carrière et devins professeur, créant à Pau ma propre école de danse. Riche expérience qui me sera utile par la suite. De ma province béarnaise je suivais le parcours de la Compagnie Temps Présent. En 1998, c’est elle qui vint à moi en devenant Ballet Biarritz, à quelques cent kilomètres de Pau. J’intégrai donc l’équipe, dans un premier temps chargée de la sensibilisation auprès du jeune public. Mais mon désir profond était de travailler avec les danseurs. Thierry me fit confiance, en me demandant d’aller remonter un de ses ballets à Singapour. J’avais un trac fou, mais après cinq semaines, le Singapore Dance Theater était fin prêt pour la « Première » et moi, plus que jamais enthousiaste de ce nouveau rôle. J’en remercie Thierry et Yves Kordian au soutien bienveillant. En 2003, je quittai définitivement mes responsabilités auprès du jeune public. Depuis lors, une part de mes activités me conduit aux quatre coins du globe pour transmettre dans d’autres compagnies les ballets de Thierry. Celui-ci me rejoint chaque fois et apporte alors maints détails, recherchant par des images à mieux faire comprendre ou ressentir les mouvements et ses intentions. Ce sont des moments privilégiés. Souvent, les danseurs restent médusés, puis reconnaissants devant la générosité d’un chorégraphe sachant allier simplicité et humour. À l’étranger, tous deux « bardés » d’un anglais très personnel, nous formons un duo pitto-

Aujourd’hui, je suis très heureuse de ce travail. Thierry, étant un des rares chorégraphes français à savoir mais aussi à vouloir utiliser le langage académique au service d’une inspiration personnelle. Naturellement, ses choix se tournent vers des danseurs ayant une excellente base académique, préférant ceux qui ne sont pas enfermés dans un style précis. Beaucoup de chorégraphes, durant la période où ils dansaient, ont été nourris par le travail de leurs prédécesseurs ; Thierry se situe dans cette lignée apportant depuis sa propre modernité, sa propre identité avec toujours le respect du passé. Dès lors, transmettre ses ballets à d’autres compagnies m’apparaît comme une évidence, d’autant qu’ils participent me semble-t-il à l’évolution de la danse, du danseur et du public. Outre cette activité, la saison me verra également présente auprès de nos danseurs, en répétitions à Biarritz et à l’occasion des nombreuses tournées. De ces artistes, je suis une fervente admiratrice, tout en restant dans l’exigence. Enfin, j’ai conscience de la chance qui m’est donnée de toujours baigner dans l’univers de la Danse et d’être entourée de mes amis. Situation que beaucoup d’autres collègues nous envient. Ce métier, aux multiples facettes, me remplit l’âme, le cœur… Et autre privilège, entretient le corps. Alors souhaitons que cette magnifique aventure dure encore très longtemps, pour le meilleur.

COULISSES

C’est quoi danseur ?

A

u son d’une musique captivante, l’enfant bouge, saute et tourne sur lui-même. Il danse dira-t-on. Rien d’alarmant en cela, puisqu’un tel comportement est courant depuis l’aube des temps. D’ailleurs, dès qu’il y eut des Hommes, il dut y avoir des danses, et certains n’hésiteront pas à en faire un métier. Ainsi, dès la Renaissance, époque où les cours italiennes inventent le Ballet, les danseurs faisant preuve de capacités sont particulièrement recherchés. Souvent musiciens, les deux professions allant de pair jusqu’à la fin du XVIIe siècle, ils se présentent comme maîtres à danser : danseurs, professeurs et ordonnateurs des bals et des spectacles auxquels participent les gens bien nés. Car avec l’équitation et la pratique des armes, la danse fait partie de l’éducation du gentilhomme. En France, c’est dans l’entourage de Catherine de Médicis que ces maestri di ballo émigrent et développent ce que les historiens nommeront le Ballet de Cour. Déjà, aux côtés des courtisans, on observe quelques professionnels, des baladins interprétant les rôles comiques, des hommes principalement. Car, si la présence des femmes est attestée, c’est à la fin du

règne de Louis XIV que les danseuses professionnelles sont reconnues. Elles interpréteront les rôles féminins qui jusque lors étaient tenus par des hommes travestis. Rappelons que Louis XIV, danseur émérite marqua son temps d’une politique en faveur des arts et des lettres. La danse y occupe une place privilégiée, ce qui pourrait donner raison à la maxime chinoise disant que : « L’on peut juger d’un souverain par l’éclat de la Danse durant son règne ». Ainsi, à l’instar de Richelieu fondant l’Académie Française pour réglementer l’usage de la langue française, Louis XIV crée l’Académie Royale de Danse en 1661. « Désirant rétablir ledit art dans sa perfection et l’augmenter autant que faire se pourra », il la charge de définir les règles d’un art dont les principes vont s’étendre à l’Europe avant d’être partout entendus en français. Bientôt, les spectacles à la cour atteindront une dimension inégalée employant toujours plus de professionnels payés à la représentation. Leur formation associe l’étude du violon à celle de la danse, et après l’obtention d’un diplôme, la règle est d’acheter une charge de maître à danser. On en compte une cinquantaine à cette époque. Aux alentours de 1669, lorsque le roi fait

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ses adieux à la scène, participer aux spectacles devient moins gratifiant pour les courtisans, certains même feront preuve de dilettante. Pour pallier à ce désagrément, Louis XIV crée une troupe professionnelle de vingt danseurs en 1681. Il y adjoint une école où les élèves sont instruits gratuitement. Sur scène, à l’image du roi, le danseur occupe la première place, ses appointements sont aussi plus élevés que ceux des danseuses. Le Siècle des Lumières rétablira le juste équilibre salarial et permettra l’engagement d’un grand nombre d’artistes femmes, parmi lesquelles des figurantes non rémunérées qui ne paraissent jamais en scène, leur fonction étant de trouver l’âme généreuse suppléant à ce manque d’honoraires. De fait, entretenir une danseuse deviendra un brevet de mondanité et d’élégance. Vers 1830, alors qu’une nouvelle élite se rend au spectacle pour se divertir autant que pour se soustraire à l’obscurantisme religieux, le statut social du danseur s’effondre. Lié à la cour par son appartenance à la Maison du Roi sous l’ancien régime, son rôle d’officier (il remplit un office) est ravalé au rang de saltimbanque chargé de divertir la Bourgeoisie. Dans ce contexte, les danseuses suscitent davantage d’intérêt que les danseurs. Et, l’apparition des pointes qui leur confèrent grâce et légèreté tout en leur permettant d’incarner « l’éternel féminin » chanté par les romantiques s’ajoute à cette préférence. Peu à peu délogé de son piédestal, le danseur va servir de faire valoir, de porteur avant de disparaître, remplacé par des femmes travesties aux abords de 1860. Entre temps, l’Académie est passée au régime privé, en conséquence, tout est mis en œuvre pour satisfaire la clientèle fortunée qui pourvoit à son fonctionnement. Fréquenter le foyer de la danse, lieu où s’exercent les danseuses avant d’entrer en scène, est l’un des privilèges accordé aux abonnés. S’y organise un commerce permettant aux «filles d’opéra » issues de milieux modestes de subsister. Les étoiles touchent un fixe, augmenté de représentations à bénéfice et de « feux » (indemnisation du bois chauffant la loge) En revanche « Vous avez les coulisses! » dira un directeur à une jeune recrue venue solliciter une augmentation. Un marché de dupes dont les conséquences vont être préjudiciables, puisque considérée comme l’antichambre du demimonde, la Danse peinera à prétendre au sérieux des autres arts. Il faut attendre les débuts du XXe siècle pour qu’au déclin et à la disgrâce succède une revalorisation sensible de la profession. Elle s'esquisse avec les Ballets Russes de Diaghilev dont l’un des mérites est de susciter un regain d’intérêt pour le ballet. En 1912, éclate la première grève des danseurs de l’Opéra. Ensuite, Serge Lifar, marque son temps de réformes nécessaires. On assistera notamment au retour du masculin au Palais Garnier. Puis, lorsque vient le temps de la libération du corps, Maurice Béjart est le conquérant d’un nouveau public avant que n’explosent d’autres conceptions chorégraphiques. Toutefois, malgré les efforts et l’évolution des mœurs, un siècle n’aura pas suffi à faire de la danse l’égale des autres arts. Nonobstant le passage d’un corps honteux à un corps réhabilité, le réflexe est toujours de privilégier le verbe et l’écrit. Sans compter que représentant une population réduite, les danseurs ont souvent moins préoccupé les pouvoirs publics. Ainsi selon une étude*, ils étaient 5 000 en 2001 contre 30 000 musiciens et 25 000 comédiens. Parmi eux, 500 danseurs permanents pour 4 500 intermittents du spectacle. Un secteur où comme chez les musiciens et les comédiens, les danseurs sont plus nombreux. Un artiste est permanent

lorsqu’il profite d’un contrat annuel. En revanche, il est intermittent à partir du moment où rémunéré à la représentation ou à la répétition, il est indemnisé par l’assurance chômage les jours où il n’est pas sous contrat. Quant aux revenus de la danse, l’absence de règles favorise une grande disparité entre les danseurs s’ajoutant à celle existant entre eux et les musiciens ou les comédiens. En moyenne, le salaire d’un danseur permanent se situera autour de 1 500 € brut par mois (2 000 € brut sur douze mois au Ballet Biarritz). Tandis que les appointements de base d’un musicien d’orchestre seront supérieurs d’un tiers voire davantage. Déjà au XVIIIe siècle, les musiciens étaient payés le double des danseurs à l’Opéra. Concernant la rémunération des intermittents, les danseurs apparaissent une nouvelle fois comme moins favorisés. Pourtant, en comparaison, la carrière d'un danseur est plus courte. Mais, dès son plus jeune âge, le danseur est préparé à ce qui l’attend. Il sait notamment qu’il peinera à trouver du travail et que plutôt qu’espérer un bon salaire, il doit simplement être satisfait de pouvoir exercer son métier. Traditionnellement, le danseur vivant de son art s’astreint à un entraînement journalier même après l’apprentissage de l’enfance. C’est l’une des rares discipline où quel que soit le rang le rapport quotidien maître-élève perdure jusqu’à la fin de la carrière. Devenir danseur, c’est apprendre une technique qu’il faudra toujours perfectionner pour mieux l’oublier. Car si la danse est un art, ses règles sont les limites que l’expression artistique doit dépasser. Enfin, être danseur, c’est passer des auditions, et pour ceux qui sont engagés dans une compagnie permanente, c’est débuter la journée par un cours pour ensuite répéter entre cinq et six heures. Partir en tournées, donner des spectacles, se réjouir de la lumière ou se satisfaire de l’ombre, être exposé aux traumatismes corporels et devoir souvent composer avec la douleur. Arrive le jour où au sommet d’une maturité artistique, le corps du danseur répond : merci ! Alors, se pose la question de l’avenir. Et à l’âge où les autres sont en pleine possession de leurs facultés professionnelles, avant la quarantaine vient le moment d’envisager une nouvelle vie. Mais, c’est quoi la reconversion ? est une autre question. Mozart à 2, Giuseppe Chiavaro et Magali Praud © Olivier Houeix

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ACTIVITÉ DU BALLET BIARRITZ JUNIOR

Gaël Domenger signe Zinta Dantza et La Nuit transfigurée

Ballet Biarritz Junior à Biarritz TXIMELETA La Nuit Transfigurée chorégraphie Gaël Domenger La Mort du Cygne et Boléro chorégraphie Thierry Malandain Samedi 4 et dimanche 5 février à 20h30 au Colisée de Biarritz Tarif adultes : 10 euros / Tarif Amis du Ballet, enfants jusqu'à 12 ans et demandeurs d'emploi : 5 euros Réservations : Office de tourisme de Biarritz Tél. 05 59 22 44 66 / Ballet Biarritz Tél. 05 59 24 67 19

À Louhossoa, les 4 et 5 novembre derniers, le BBJ participait à la création de Batekmila, un projet conduit par l’Institut Culturel Basque en collaboration avec l’Orchestre de Bayonne Côte Basque, la Scène Nationale de Bayonne et du Sud Aquitain, et la Compagnie Théâtre du Rivage dirigée par Pascale Daniel-Lacombe. La création de ce spectacle en langue basque, inspiré de légendes et contes du Pays Basque bénéficiait également du concours du chanteur Benat Achiary, tandis que Gaël Domenger signait la chorégraphie d’une Zinta Dantza composée par Laurent Martin. Formé à l’École de danse de l’Opéra de Paris, puis au Conservatoire National Supérieur de Paris, Gaël Domenger a débuté sa carrière de danseur à Euroballet au Luxembourg avant de rejoindre le Ballet de Leipzig. On le retrouve ensuite à l’Opéra Royal de Wallonie, au Scapino Ballet Rotterdam et au Ballet Biarritz dès 2003. Passionné par la chorégraphie, il a déjà réalisé une dizaine de ballets présentés à Liège, Leipzig, Rotterdam, Hanovre et Biarritz, mais cette Zinta Dantza intégrée au spectacle Batekmila est sa première création pour le BBJ. La Zinta Dantza remonte aux temps où on célébrait le printemps et le renouveau de la nature par la danse. À travers cette ronde rituelle, les hommes faisaient appel aux liens les unissant au Cosmos pour s’assurer de la fertilité de la terre, des animaux et des humains. Pour rappeler que le monde est vivant et honorer sa constante renaissance, cette danse réunit à présent un cercle de jeunes filles autour d’un mât symbolisant l’arbre de vie (aussi appelé l’arbre de mai dans certaines traditions). Les danseuses y sont reliées par un ruban, symbole du cordon ombilical, qu’elles entremêlent puis démêlent à l’image de la vie, célébrant ainsi le renouveau en toute chose. Argumentant son interprétation de la Zinta Dantza, Gaël Domenger confiait : « j’ai voulu observer nos rapports au sein d’un groupe, mettant l’accent sur les échanges d’énergies entre individus, comme entre la Terre et l’Humain. En ces temps de rupture, il m’a semblé essentiel de célébrer notre interdépendance avec la Nature, pour partir à la recherche d’une force émanant du passé et rayonnant encore de nos jours. Sur ce chemin, c’est avec évidence que quelques symboles de la culture basque se sont imposés à la structure

chorégraphique. Mais si j’ai occulté toute représentation symbolique du mât sur scène, c’est pour rappeler avec force, qu'en chacun d’entre nous demeure un arbre de vie. » Toujours en novembre, le BBJ présentait le 17 à Donostia/SanSebastián la première d’un spectacle intitulé Tximeleta (les papillons) composé de Boléro et de La Mort du cygne de Thierry Malandain et d’une création de Gaël Domenger, La Nuit transfigurée d’Arnold Schöenberg : poème symphonique écrit selon le principe de la composition à douze sons, à savoir l’enchaînement systématique de douze sons n’ayant entre eux d’autre rapport que celui existant d’un au suivant. La chorégraphie avait pour ambition de s’appuyer sur cette théorie musicale pour mettre en scène les douze danseuses du BBJ. « À travers les différentes personnalités des interprètes, il s’agissait de construire un ensemble cohérent dont l’identité était définie par la relation des danseuses entre elles. Au fil des répétitions La Nuit transfigurée est devenue le journal de bord d’une rencontre fortuite entre douze jeunes filles venant d’horizons différents. La structure chorégraphique a été définie lors des ateliers d’improvisation que propose la formation du BBJ. Des idées et des propositions faites à chaque séance, j’ai tiré une ligne directrice adaptée instantanément à l’évolution du groupe. » Le poème de Richard Dehmel qu’illustre Schöenberg, est un dialogue amoureux entre un homme et une jeune fille, mère de l’enfant d’un autre. La transfiguration dont il est question apporte la réconciliation entre les amoureux, en les réunissant autour de la naissance future de l’enfant, qui n’est plus l’enfant d’un autre, mais grâce à leur amour ; leur enfant. « Le sujet propose d’observer comment des émotions et des sentiments peuvent s’organiser ensemble pour restituer une harmonie, un apaisement, à une situation confuse et conflictuelle. Le but visé par la chorégraphie est de placer les sentiments et les émotions au centre de la recherche pour finalement évoquer la naissance d’un groupe à travers l’harmonisation progressive des parties qui le composent tout en suivant de près la nuance qu’il existe entre sentiment et émotion » indiquait Gaël Domenger.

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EN BREF

Cigale, © Jose Usoz

Cigale au Festival Massenet Dans le cadre de la 8e édition du Festival Massenet de SaintÉtienne, Ballet Biarritz présentait Cigale du 10 au 15 novembre en lever de rideau du Jongleur de Notre-Dame mis en scène par Jean-Louis Pichon. À cette occasion, le Nouvel Orchestre de Saint-Étienne était dirigé par Laurent Campellone. La Presse en parle « Cigale, bien oubliée de nos jours, est loin d’être une œuvre mineure. Librement inspirée de la célèbre fable de La Fontaine par le librettiste Henri Cain, elle fait éclater tout à la fois la verve mélodique de Massenet, sa science de l’orchestration, et son humour (les variations sur Au clair de la lune sont aussi amusantes qu’étourdissantes !). Hymne à la profonde humanité de Massenet, aussi. Car la légère cigale se tire d’affaire, au détriment de la triste fourmi. L’œuvre se termine très joliment

par un chœur d’enfant. Le chorégraphe Thierry Malandain a bien senti la générosité et la fraîcheur — sans mièvrerie aucune — se dégageant de l’œuvre et distille un ballet animé, vivant, joyeux, évitant le double piège de la variation douceâtre en tutu et du contemporain à tout prix : l’interprétation est dans la veine classique, et en même temps résolument moderne. Quant à la troupe du Ballet Biarritz, elle est tout simplement excellente. Une découverte de prix, et une excellente première partie de soirée. » Resmusica, Catherine Scholler « Délicieuse Cigale ! En choisissant le Ballet Biarritz pour la partie dansée, Jean-Louis Pichon, a choisi une valeur sûre : Thierry Malandain, qu’il connaît bien puisque le chorégraphe, avant d’être à la tête de ce CCN, a travaillé à l’Esplanade. Ce dernier abordait avec poésie

cette œuvre courte, dont la musique fluide et légère offrait un espace aérien que les danseurs occupaient avec une belle intensité. Très expressifs, se fondant avec rigueur dans une chorégraphie contemporaine bien dosée, ils offraient un ballet très frais. Sur fond de « temps des cerises » les délicates et fugaces cigales, au cœur pourpre et la belle grandeur d’âme palpitent face à une fourmi très noire et égoïste. Cette production se dégustait comme une gourmandise en prélude du Jongleur de Notre-Dame. » Le Progrès, Martine Goubatian Le Ballet Biarritz Junior passe à la télé Le 12 novembre, au Kursaal de Donostia/San-Sebastián devant 1 800 spectateurs invités au tournage d’une émission de divertissement pour les fêtes de noël, le BBJ a enregistré La Mort du cygne et Boléro pour ETB 1 Euskal Telebista, la chaîne

publique du Pays Basque espagnol. Quimper – Théâtre à tout âge Dans le cadre du festival Théâtre à tout âge proposé par Très Tôt Théâtre, Ballet Biarritz s’est produit au Théâtre de Cornouaille / Scène Nationale de Quimper du 8 au 10 décembre donnant cinq représentations de CasseNoisette devant près de 3 500 spectateurs. Parallèlement, en collaboration avec l’ADDM 29, Musiques et Danses en Finistère et Musiques et Danses en Bretagne, Richard Flahaut, historien de la danse anima un séminaire de culture chorégraphique, tandis que Dominique Cordemans conduisait une série d’ateliers chorégraphiques ouverts aux scolaires, aux écoles de danse et aux enseignants de primaires et collèges.

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Gare du Midi – 23, avenue Foch – F-64200 Biarritz Tél. : +33 5 59 24 67 19 – Fax : +33 5 59 24 75 40 ccn@balletbiarritz.com

Silvia Magalhaes et Roberto Forleo dans Les Petits Riens © Julien Palus

CALENDRIER / JANVIER-FÉVRIER-MARS 2006 REPRÉSENTATIONS EN FRANCE ME 25/01 Saint-Étienne SA 04/02 Biarritz DI 05/02 Biarritz JE 23/02 Biarritz VE 24/02 Biarritz SA 25/02 Biarritz DI 26/02 Biarritz MA 28/02 Saint-Raphaël REPRÉSENTATIONS TRANSFRONTALIÈRES Getxo SA 21/01 VE 17/02 Donostia/San-Sebastián REPRÉSENTATIONS 27/01 28/01 31/01 01/02 02/02 03/02 04/02 05/02 JE 02/03 SA 04/03 24/03

À L’ÉTRANGER Neuchâtel (Suisse) Neuchâtel (Suisse) New-York (USA) New-York (USA) New-York (USA) New-York (USA) New-York (USA) New-York (USA) Mestre (Italie) Vicenza (Italie) Los Angeles (USA)

Le Sang des Étoiles Tximeleta Ballet Biarritz Junior Tximeleta Ballet Biarritz Junior Les Petits Riens Jeune public Les Petits Riens Jeune public Les Petits Riens / Don Juan Les Petits Riens / Don Juan Les Petits Riens / Don Juan Tximeleta Ballet Biarritz Junior Répétition publique Ballet Biarritz

Les Créatures Les Créatures Les Créatures Les Créatures Les Créatures Les Créatures Les Créatures Les Créatures Les Petits Riens / Don Juan Les Petits Riens / Don Juan Les Petits Riens / Don Juan

www.balletbiarritz.com PAGE 12 NUMÉRO 29 – BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ

Président Pierre Durand Trésorier Marc Janet Secrétaire Paul Barrière THIERRY MALANDAIN BALLET BIARRITZ Artistique CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL Directeur / Chorégraphe Thierry Malandain Maîtres de ballet Richard Coudray, Françoise Dubuc Artistes chorégraphiques Véronique Aniorte, Camille Aublé, Giuseppe Chiavaro, Annalisa Cioffi, Frederik Deberdt, Gaël Domenger, Roberto Forléo, Cédric Godefroid, Mikel Irurzun del Castillo, Silvia Magalhaes, Arnaud Mahouy, Christopher Marney, Miguel Pla Boluda, Magali Praud, Rosa Royo, Nathalie Verspecht Professeur invité Angélito Lozano Pianistes Alberto Ribera, Miyuki Brickle, Corinne Vautrin Responsable sensibilisation Dominique Cordemans Administratif Administrateur Yves Kordian Assistante administrative / Chargée de diffusion Françoise Gisbert Chargée de communication Sabine Lamburu Comptable principale Rhania Ennassiri Accueil / Secrétariat Isabelle Larre Donostia/san-Sebastián Conseiller technique Filgi Claverie Coordinatrice artistique Adriana Pous Assistante administrative Sofia Alforja Chorégraphe invité / Ballet Biarritz Junior Gaël Domenger Artiste invité / Ballet Biarritz Junior Asier Zabaleta Danseuses / Ballet Biarritz Junior Ione Miren Aguirre, Judith Argomaniz, Victoria De La Fuente, Pauline Fabien, Noémie Garcia, Miren Gomez, Sara Hernandez, Irma Hoffrén, Séverine Lefèvre, Aurélie Luque, Anne-Sophie Placier, Gisela Riba Technique Directeur de production / Concepteur Lumière Jean-Claude Asquié Régisseur général Oswald Roose Régisseur Lumière Frédéric Béars Technicien Lumière Frédéric Eujol Technicien Plateau Chloé Bréneur Technicien Son Jacques Vicasiau Techniciens Chauffeurs Jean Gardera, Anthony Mota Costumière Véronique Murat Régie costumes / Couturière Habilleuse Karine Prins Responsable construction décors Michel Pocholu Techniciennes de surface Annie Alegria, Ghita Balouck Attaché de presse Yves Mousset / MY Communications Numéro Directeur de la publication Thierry Malandain Création graphique Jean-Charles Federico Imprimeur Imprimerie SAI (Biarritz) ISSN 1293-6693 - juillet 2002

Le Cercle des mécènes de Ballet Biarritz apporte son soutien aux nouvelles productions, aux tournées internationales de prestige, aux projets à caractère évènementiel.


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