Numéro 40 - Octobre/Décembre 2008

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BALLET BIARRITZ THIERRY MALANDAIN

CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL

BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ / THIERRY MALANDAIN OCTOBRE – NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2008

ÉDITO Besoin d'absolu, appétit de nature, rêve de beauté, soif de liberté, mais aussi volonté d'exprimer les tourments du cœur et de l'âme, tout ce qui faisait le ciment du Romantisme n'est pas mort. Il semble même avoir de beaux jours devant lui face aux dérives du monde et à la fragilité de nos certitudes. En écho à ce « vague des passions » deux écrivains romantiques ayant fréquenté Biarritz seront à la Une des semaines à venir : Théophile Gautier avec la création d'un ballet tiré de Gemma destiné aux danseurs de l'Opéra national de Bordeaux, et Prosper Mérimée pour une reprise de Carmen avec ceux du Ballet Biarritz. Et, puisque ce sentiment d'inadaptation au monde s'oubliait dans la recherche de nouveaux paysages, ce Numéro revient sur les artistes qui crayon en main s'adonnèrent au Pyrénéisme, tout en jetant un coup d'œil du côté de la Danse. La Danse : l'éphémère est sa matière, mais la soirée anniversaire des dix ans de Ballet Biarritz, célébrée en ouverture du Temps d'Aimer, restera durablement inscrite en nos cœurs. Ce ne sont pas moins de 1 400 « bouquets de chocolats » qui furent offerts par l'un de nos mécènes : l'Atelier du chocolat de Bayonne aux spectateurs présents. Et Ballet Biarritz se souviendra longtemps qu'après de nombreux rappels, le public, désireux de prendre part à l'événement, entonna spontanément un touchant Happy Birthday. Sur scène, Pièce de circonstance se voulait un album de souvenirs rendant hommage aux danseurs. C'est pourquoi les pages chorégraphiques étaient reliées à leur entraînement quotidien, cet « Art de la barre » qu'ils transforment en « Art en barre ». Comme la nacre est la patiente concrétisation des rêves de l'huître, sous ses dehors un peu rude, ce spectacle témoignait ainsi du combat intérieur auquel la Danse se livre jour

SOMMAIRE

CRÉATION ÉVÉNEMENTS LA DANSE EN CÔTE BASQUE N°35 EN BREF CALENDRIER

© Olivier Houeix

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après jour pour être source d'émotions et de passions. Aspirations toutes romantiques qui n'excluent pas la maîtrise de la raison. Toujours dans le cadre du Temps d'Aimer, ce dixième anniversaire aura permis de voir exposées en divers endroits de la ville de larges photographies signées Olivier Houeix, José Usoz, Didier Fioramenti et Mikael Logvinov, choisies parmi les titres créés à Biarritz. Enfin, et je conclurai par cela, après une nouvelle résidence d'UPPAdanse au CCN, il offrit le spectacle d'étudiants universitaires interprétant des extraits de notre répertoire transmis par Dominique Cordemans. Travail d'immersion dans la Danse qui souleva un bel enthousiasme, en préambule de l'ouverture d'une Unité d'Enseignement Danse à la Fac de Bayonne-Anglet-Biarritz.

Thierry Malandain, septembre 2008.


CRÉATION

Valse(s) à Bordeaux À l'invitation de Charles Jude, directeur du Ballet de l'Opéra national de Bordeaux, Thierry Malandain a créé Valse(s) pour les danseurs de cette compagnie. Associé à In the middle somewhat elevated de William Forstythe, Les Indomptés de Claude Brumachon et Clic-Pause-Silence de Jirí Kylián, ce ballet sera présenté à l'Opéra national de Bordeaux dans le cadre du festival Novart les 31 octobre et 3, 4, 5, 6 novembre 2008 à 20h00. Renseignements au 05 56 00 85 95, du mardi au samedi de 13h00 à 18h30. Maurice Ravel aimait la danse et ne refusait pas d'orchestrer tel ou tel morceau pour la scène chorégraphique. C'est ainsi que Les Valses nobles et sentimentales pour piano, créées le 8 mai 1911 à la Salle Gaveau furent instrumentées pour servir Adélaïde ou le langage des fleurs présenté le 22 avril 1912 au Théâtre du Châtelet. Évoquant le rêve d’un poète abandonné par son amie et consolé par une muse, ce ballet, dont le compositeur écrit l'argument, sera chorégraphié par Ivan Clustine à l'intention de la danseuse Natacha Trouhanova. C'est également pour la danse, et avec le désir de rendre hommage à la dynastie des Strauss qu'il compose Wien en 1920. « Ravel, c'est un chef-d'œuvre, mais ce n'est pas un ballet. C'est la peinture d'un ballet » déclare Serge Diaghilev refusant d'inscrire l'œuvre au programme des Ballets russes. Jouée au concert le 12 décembre 1920, La Valse sera portée à la scène le 23 mai 1929 par la troupe d'Ida Rubinstein dans une chorégraphie de Bronislava Nijinska. « J'ai changé le titre, Wien, en La Valse, qui correspond mieux à la nature esthétique de la composition. C'est une extase dansante, tournoyante, presque hallucinante, un tourbillon de plus en plus passionné et épuisant de danseuses, qui se laissent déborder et emporter uniquement par la valse » déclare le compositeur*. Quant au programme, il note : « Une cour impériale vers 1855 : Des nuées tourbillonnantes laissent entrevoir par éclaircies des couples de valseurs. Elles se dissipent peu à peu ; on distingue une immense salle peuplée d’une foule tournoyante. La scène s’éclaire progressivement. La lumière des lustres éclate au plafond ». Réunir Les Valses nobles et sentimentales et La Valse de Maurice Ravel n'est pas une idée nouvelle, Georges Balanchine le fit en 1951. Cela permet d'étirer le temps d'exécution de la chorégraphie tout en suivant l'évolution musicale du compositeur : « du plaisir délicieux » des premières valses au « tournoiement fantastique et fatal » de la dernière. Ravel avouant de lui-même sa sensibilité romantique, je me suis rapproché de Théophile Gautier qui au temps où sévissait le « mal du siècle » composa des livrets de ballets : Giselle, La Péri, mais aussi Gemma représenté sur la scène de l'Académie Impériale de Musique, le 31 mai 1854 dans une chorégraphie de Fanny Cerrito. Ce ballet met en scène le marquis de Santa-Croce, un adepte du magnétisme dominant de ses pouvoirs la comtesse Gemma avec la volonté de l'épouser bien qu'elle soit amoureuse du peintre Massimo. Plongée dans un sommeil somnambulique, Gemma est enlevée, puis revêtue d'une robe de mariée, avant un bal donné en son honneur. À son réveil, tout ce qu'elle comprend, c'est qu'elle est aux mains du marquis. Une fenêtre est grande ouverte, elle y court et s’y jette, tombant dans les bras de celui qui l'emporte vers le bonheur. Valse(s) s'inspire et détourne ces épisodes en privilégiant la PAGE 2 NUMÉRO 40 – BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ

Musique Maurice Ravel Chorégraphie Thierry Malandain Décor et costumes Jorge Gallardo Conception lumière Jean-Claude Asquié

Costume Jorge Gallardo

forme abstraite. Ainsi, les pouvoirs surnaturels de Santa-Croce, personnage interprété par un soliste, puis par toute la distribution masculine, ne sont pas justifiés par des passes hypno-magnétiques, mais par des robes à la dangereuse beauté, que Gemma et l'ensemble féminin portent dès l'instant où le charme opère. Sous l'influence de ces robes noires corsetées, suivant un des revers de la sensibilité romantique, les femmes sont manœuvrées, idéalisées pour mieux être asservies. Certains romantiques, s’abîmant dans un désespoir morne, cherchaient à s'évader du réel à travers l'illusion et le morbide, Valse(s) renvoie à cela. D'autres prônaient un retour à la Nature, source inextinguible de félicité et de bonheur : « Liberté primitive, je te retrouve enfin ! » s'écrie Chateaubriand. Gemma ne dira rien de plus en retrouvant Massimo. Thierry Malandain, septembre 2008 * in De Telegraaf, 30 septembre 1922, repris par Orenstein (1989).


ÉVÉNEMENTS

Cédric Godefroid, Nathalie Verspecht et Mikel Irurzun dans Sextet. © Olivier Houeix

Sextet à Marseille À l'invitation de Frédéric Flamand, directeur du Ballet national de Marseille, Françoise Dubuc a remonté Sextet de Steve Reich dans la chorégraphie de Thierry Malandain pour les danseurs de cette compagnie. Associé à Té To Té de Yasuyuki Endo et Somewhere de Julien Lestel, Sextet sera également interprété par les musiciens de l'Ensemble Télémaque placés sous la direction de Raoul Lay. Représentations à l'Opéra de Marseille les 24 et 25 octobre 2008 à 20h00. Renseignements au 04 91 32 73 27.

Carmen et Don Juan à Biarritz C'est avec Carmen, le 17 septembre 1997 que notre équipe s'est produite pour la première fois à Biarritz. À l'occasion des dix ans du CCN, l'intrépide et sensuelle héroïne de Mérimée réapparaît dans une nouvelle production. Elle sera associée au Don Juan créé à la Gare du Midi en 2006. Deux figures que la littérature a fait naître en Andalousie et qui tenteront en vain de concilier amour et liberté. Carmen le pendant de Don Juan ? Représentations à la Gare du Midi les 21 à 17h00 et 22 décembre à 20h30. Au Teatro Victoria Eugenia de San Sebastián les 26 et 27 décembre à 19h30.

Le destin de Carmen, bien qu'il ne trouve pas son origine dans la mythologie, n'en est pas moins intemporel. Son affrontement avec Don José renvoie à bien des égards à la collision entre Eros et Thanatos : l'amour et la mort. Dotée d'une nature farouchement indépendante et irrévérencieuse, Carmen se précipite, à l'image des héroïnes de la tragédie classique, vers une issue qu'elle sait fatale. Dans la nouvelle de Prosper Mérimée, fil conducteur de cette version, elle cultive le paradoxe de « l'obscure clarté ». Femme solaire, femme lunaire, elle se régénère dans l'amour recherché partout sans concession. Elle le paiera de sa vie. Évitant d'utiliser la musique de l'opéra comique que composa Georges Bizet ou encore Carmen-Suite de Rodion Shedrin, j'ai choisi le quatuor pour cordes en Ré mineur D. 810 de Franz Schubert : La Jeune fille et la mort, dans la transcription pour orchestre à cordes qu’en fit Gustav Mahler. C'est en 1816, que Franz Schubert découvre ce titre de Mathias Claudius (1740-1815). Un poème où une jeune fille repousse la Mort qui doucement l'attire : « Ne crains rien, donne-moi ta main, je suis ton ami » lui dit la Mort (le mot est masculin en allemand). Mettant en relief le caractère éphémère de l'existence, ce texte où la Mort >> BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ – NUMÉRO 40 PAGE 3


Carmen Musique Franz Schubert Chorégraphie Thierry Malandain Décor et costumes Jorge Gallardo Conception lumière Jean-Claude Asquié Réalisation costumes Véronique Murat Avec Ione Miren Aguirre,Véronique Aniorte, Giuseppe Chiavaro, Frederik Deberdt, Cédric Godefroid, Aureline Guillot, Mikel Irurzun del Castillo, Miyuki Kanei, Fabio Lopez, Silvia Magalhaes, Arnaud Mahouy, Florent Mollet, Audrey Perrot, Magali Praud, Thibault Taniou, Nathalie Verspecht, Daniel Vizcayo. Ballet créé le 6 juin 1996 à l'Opéra Théâtre de Saint-Étienne par la Compagnie Temps Présent Coproduction Teatro de Sant-Cugat, Opéra Théâtre de Saint-Étienne, Grand Théâtre de Reims, L’Onde de Vélizy-Villacoublay et Teatro Victoria Eugenia de San Sebastián

Costume Jorge Gallardo

RÉSERVATIONS Office de Tourisme de Biarritz Javalquinto, Square d’Ixelles 64200 Biarritz (Accueil 10h-18h / dimanche 10h-17h). Réservations par téléphone tous les jours de 8h à 18h Tél. 05 59 22 44 66 www.biarritz.fr Rubrique accès direct : Billetterie en ligne Ticketnet / Virgin-Leclerc www.ticketnet.fr Tél. 0892 390 100 France Billet / Fnac-Carrefour-Géant (www.fnac.com) Tél. 0892 686 622 (0,34 €/min) INFORMATIONS Ballet Biarritz Tél. 05 59 24 67 19

>> devient l'ami qu'on appelle plus qu'on redoute, fait aussi le lien avec la sensualité de Carmen : la jouissance jusqu’à en mourir. Après l'attaque brutale du premier mouvement, cri angoissé de la jeune fille, l'émotion de l'Andante, et le bonheur du Scherzo, le quatuor se conclut sur une tarentelle obsessionnelle emportant la jeune fille. Une danse macabre comme une corrida avec mise à mort. Thierry Malandain Né à Elizondo, Don José a dû quitter le Pays Basque après y avoir commis un meurtre. Engagé chez les dragons, il surveille la manufacture de tabac de Séville où ne travaillent que des femmes. C'est là qu'il rencontre Carmen. Elle le séduit immédiatement et l'aguiche en lui lançant une fleur de cassie. Mais lorsqu'elle blesse une de ses collègues, il doit l'emmener au poste. Épris de sa prisonnière, il la laisse s'échapper avant d'être dégradé et envoyé en prison. À sa sortie, il est mis en faction devant le domicile d'un colonel où le soir d'un bal il revoit Carmen. En partant, celle-ci lui donne rendez-vous pour le lendemain. Se retrouvant, Carmen lui déclare sa flamme, n'évitant pas de se mettre en colère lorsque l'heure impose à Don José de retourner à ses quartiers. Quelques jours plus tard, Don José la voit accompagnée d'un autre homme. Dans la nouvelle, il s'agit d'un officier de son propre régiment, mais comme Carmen séduira ensuite un anglais pour le voler, c'est ce dernier qui est mis en scène. Jaloux, Don José le provoque et le tue. Devant fuir, Carmen lui propose de PAGE 4 NUMÉRO 40 – BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ

Plein tarif : 30 € • Tarif réduit : 25 € (Carte Biarritz Culture, Les Amis du Théâtre, Les Amis du Musée de Guéthary, Synergie 2000, Les Amis d’Arnaga, Scène nationale de Bayonne, Tournées Charles Barret, groupe de 10 personnes, parents d’élèves des écoles de danse, des scolaires sensibilisés par le CCN et du Conservatoire national de région de Bayonne) • Tarif jeune : 12 € (moins de 18 ans, Carte étudiant, Carte jeune, demandeurs d’emploi, élèves écoles de danse, du Conservatoire national de région de Bayonne et scolaires sensibilisés par le CCN) • Amis du Ballet Biarritz : 20 €

rejoindre une troupe de contrebandiers. C'est là qu'il apprend que Carmen est mariée à Garcia le Borgne. Après avoir collaboré avec lui à divers brigandages, il tue celui-là encore. Cet épisode n'est pas traité dans le ballet. Plus tard, Don José part à la recherche de Carmen et la retrouve à Cordoue au bras d'un toréador, nommé Lucas. Aveuglé par le chagrin et la colère, il la menace, l'implore, de l'aimer, mais rien n'y fait. Alors, il la poignarde, puis se constitue prisonnier. Don José sera condamné à mort par garrot. Comme le narrateur archéologue de Carmen, Prosper Mérimée se rend pour la première fois en Espagne en 1830. À cette occasion, il fera la connaissance du comte et de la comtesse de Montijo dont la plus jeune fille, Eugénie, est appelée à devenir Impératrice. C'est lors de ce séjour que la comtesse lui aurait raconté l'histoire d'un brigand de Malaga qui tua sa maîtresse par jalousie. Quinze ans plus tard, ce fait divers lui inspire Carmen publiée dans La Revue des Deux Mondes. S'imposant comme écrivain dès 1824, Prosper Mérimée fut aussi linguiste, traducteur, médiéviste et sa passion pour l'archéologie et son goût des voyages s'épanouirent après sa nomination comme inspecteur général des monuments historiques. Lorsqu'en 1853, Napoléon III épouse Eugénie de Montijo, Mérimée qui la vit grandir lui restera fidèlement attaché. À ce titre, il fera de fréquents séjours à Biarritz.


Plages d’histoires

La danse en Côte Basque

# 35

Panorama de Biarritz, E . Ciceri 1840.

Peintres romantiques des Pyrénées et de la Danse Au Second Empire parut un recueil de vues intitulé Souvenirs des Pyrénées incluant un panorama de la baie de Biarritz dessiné d’après nature et lithographié par Eugène Cicéri (1813.1890), fils de Pierre Cicéri (1782 .1868) peintre-décorateur, auprès duquel il débute, avant de se consacrer à la peinture de paysages sous l’influence de son oncle, Eugène Isabey. Sacrifiant à la mode des « artistes voyageurs » outre Souvenirs des Pyrénées, on lui doit quelques illustrations des Voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France du baron Taylor, ainsi qu’une participation aux Souvenirs d’Égypte d'Alexandre Bida. Plus tard, il éditera un guide pratique destiné aux aquarellistes amateurs et réalisera des décors de théâtre comme son père. Lequel, jeune ne songeant qu’à la musique, fréquenta le Conservatoire avant de diriger l’orchestre du théâtre d'ombres de François-Dominique Séraphin. Se délassant à fabriquer de petites décorations qu’ils exposaient à la devanture de la boutique de son père, marchand de lunettes sous les galeries du Palais Royal. Il arriva qu’un jour le surintendant des théâtres les remarque et l’invite à rejoindre les ateliers de l'Académie Impériale de Musique. Le chef en était JeanBaptiste Isabey: « peintre en miniature » comme il est gravé sur sa

tombe, mais aussi peintre dessinateur du cabinet de S.M. l'Empereur, des cérémonies et relations extérieures. Le premier décor remarqué de Pierre Cicéri sera le clair de lune de La Vestale de Spontini en 1807. À partir de ce moment, il ne cessera de produire les compositions les plus riches, les plus colorées, les plus naturelles. Un sentiment extraordinaire de la lumière était le caractère distinctif de ses œuvres. En 1810, il épouse la fille de Jean-Baptiste Isabey, auteur des costumes du sacre de Napoléon Bonaparte. Il concevra également ceux de Charles X tout en réglant la cérémonie à Reims. Parmi les contributions à la scène de ce spécialiste des effets panoramiques et du rendu en trois dimensions, figurent des décors pour des opéras de Rossini, Meyerbeer et Auber, mais aussi des ballets, tels que La Sylphide (1832) de Philippo Taglioni, La Tempête (1834), de Jean Coralli, Giselle (1841) de Jean Coralli et Jules Perrot ou encore La Jolie fille de Gand (1842) du bordelais François-Ferdinand Decombe dit Albert. Des titres qui profitent de l’éclairage au gaz dont Cicéri est le premier à faire usage en 1822 dans Aladin ou la lampe merveilleuse de Nicolas Isouard. À cette époque, les Pyrénées sont déjà au goût du jour, et crayon en main, outre Pierre Cicéri qui rapporte des esquisses de ses séjours à EauxBonnes, d’autres artistes associés à la danse contribuent à leur renom. Ainsi Guillaume-Sulpice Chevalier (1804.1866), dit Paul Gavarni >> BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ – NUMÉRO 40 PAGE 5


De gauche à droite et de haute en bas : Costume basque, Gavarni F. Elsser, A. Devéria Valse, Gavarni Danseuses, E. Giraud Danses de petites gitanes, G.Doré

>> éditera un album de costumes pyrénéens. C’est sous l’influence d’un oncle, acteur et caricaturiste qu’il prend goût au dessin. En apprentissage chez un architecte, il complète sa formation au Conservatoire des Arts et Métiers tout en produisant des sépias. En 1825, il est chargé de suivre la construction du pont de pierre à Bordeaux. Il y rencontre l'ingénieur en chef du cadastre de Tarbes qui l'embauche ; ce qui lui permet de parcourir les Pyrénées et d'y affirmer sa vocation d’illustrateur. De son passage à Biarritz subsiste une étude de mulet datant d’octobre 1827. Deux ans plus tard, ses contributions à la revue La Mode lui valent un début de célébrité. Il travaillera alors pour d’autres titres comme le Charivari où, d’un trait moqueur, il croque la société parisienne. En 1847, à la demande de Cellarius, célèbre professeur de danse, il contribue aux illustrations de La danse des salons. Un ouvrage qui fait date, puisqu’à travers lui s’organise une dissociation entre la danse de théâtre et la danse de société. En effet, jusque là, les publications n’abordaient principalement que l’univers du ballet. Pour la première fois on traite de la danse de société tout en s’adressant aux danseurs non professionnels. Par cet intermédiaire, Cellarius institutionnalisera la valse, la polka, la mazurka dans les salons bourgeois et inventera le métier de professeur de danse de salon. On connaît aussi Achille Devéria (1800.1857) représentant la danseuse Fanny Elssler dans Le Diable Boiteux (1836) de Jean Coralli. Élève d’Anne-Louis GirodetTrioson, Devéria, s'exerça dans divers genres et sera le premier à savoir appliquer la couleur à la lithographie. Son frère, Eugène, est également peintre et connaît la célébrité avec La Naissance d'Henri IV exposée au Salon de 1827. L’art et la vie lièrent intimement les deux frères jusqu’en 1841, date à laquelle Eugène s’établira à Pau. Sans abandonner ces ambitieux tableaux historiques, et son goût pour le théâtre romantique, PAGE 6 NUMÉRO 40 – BULLETIN D’INFORMATION DU CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL / BALLET BIARRITZ

il y peindra des scènes de genre au contact des populations béarnaises et basques comme cette vue de paysans dansant le branle d’Ossau. Il faut aussi évoquer, Eugène Lami (1800.1890) décorateur et peintre de la vie élégante sous la monarchie de juillet et le Second Empire. Suivrat-il la cour impériale à Biarritz ? Aucune vue des Pyrénées n'en témoigne, mais son catalogue compte une série de lithographies sur la cavalerie espagnole. Ces représentations militaires appelleront l’attention de Louis Philippe qui lui commandera des tableaux pour le musée de l’Histoire de France. À cette époque, fréquentant le foyer de la danse de l’Opéra Le Pelletier, il collabore en qualité de costumier à la création de ballets comme Manon Lescaut (1830) de Jean-Pierre Aumer, l’Orgie (1831) de Jean Coralli ou encore La Sylphide (1832) pour laquelle il conçoit un jupon de gaze blanche, appelé à devenir le tutu. Comme d'autres peintres, il contribue au renouvellement du costume de scène, s'attachant à retrouver la vérité historique et la couleur locale. Parmi ces artistes, citons Louis Boulanger (1812-1878) qui en 1846, lors du mariage du fils de Louis Philippe et de l'infante se rendra en Espagne avec une troupe d'amis, parmi lesquels figure le peintre Eugène Giraud (1806.1881). En route, ils s'attarderont quelques semaines à Bayonne et Saint-Jean-de-Luz. Eugène Giraud réalisera à cette occasion plusieurs illustrations de paysages et de danses locales, tandis qu'on lui attribue des esquisses de ballerines. Enfin, terminons avec Gustave Doré (1832.1883) autodidacte qui illustra plus de cent chefs-d'œuvre de la littérature universelle et collaborera au Voyage aux Pyrénées (1855) de Hippolyte Taine qui compte des vues de La roche percée et de la Villa Eugénie et au Voyage en Espagne (1862) du baron Charles Davillier avec des dessins inédits parmi lesquels on trouve plusieurs scènes de danse.


Annalisa Cioffi

Annalisa Cioffi dans Don juan © Olivier Houeix

Danser, c'est comme un premier amour, on a peine à imaginer qu'il puisse finir un jour. Pour Annalisa, c'est en Italie que tout commença. À Pesaro, cité balnéaire de la région des Marches où pour danser il n'y avait qu'à faire le premier pas. Annalisa le fit, puis étudia les suivants auprès de sa mère, Rosanna Gorgoli et de Marika Besobrasova à Monaco. En 1999, elle rejoint l’École de Danse de Genève dirigée par deux anciens du Ballet Biarritz : Patrice Delay et Sean Wood. Intégrant par la suite le Ballet Junior, tremplin vers la vie professionnelle, elle y interprètera entre autre un solo maison : Pierre de lune et la décrochera en entrant au Ballet Biarritz en 2001. Passeront sept saisons, chiffre de la plénitude et des jours nécessaires à la Création. Créer, justement parlons-en : Albert Camus disait que c'était vivre deux fois. S'agissant d'Annalisa on comptera jusqu'à trois, vu qu'il y aura la Danse à travers

les chorégraphies qu'elle interprètera au sein de la compagnie : Boléro, La Mort du cygne, Les Biches, Les Créatures, Cigale, Le Sang des Étoiles Les Petits Riens, Don Juan, Orphée et Eurydice, Le Portrait de l'infante et L'Amour Sorcier. Mais aussi le dessin et la photographie comme autres révélateurs d'elle-même. Sauf que les desseins de la Providence sont impénétrables. Un malaise cardiaque en tournée, estce grave ? Que faut-il faire ? Au retour, le diagnostic est formel : Annalisa doit impérativement mettre un terme à sa carrière. Mais ce qui finit est aussi le commencement d'autre chose. Ainsi Annalisa enseignera bientôt la danse à Pesaro, ville où naquit Rossini. « Sa musique donne de l'espérance aux cœurs les plus endormis » disait Balzac. Mais, c'est parfois difficile de dire au revoir et merci ! TM

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EN BREF

© Anthony Moreau

© Anthony Moreau

Nouveaux venus

Aureline Guillot, née à Versailles, elle étudie la danse à l'Académie de Danse de Rambouillet auprès de Monique Le Dily, puis à Paris avec Marc du Bouays et Wayne Byars. En 2005, elle est engagée en Allemagne au Anhaltisches Theater de Dessau où elle travaille avec le chorégraphe Gregor Seyffert jusqu'en 2008.

Daniel Vizcayo, né à Madrid, il étudie la danse au Real Conservatorio de Danza de Madrid. Premier prix en 2006 au concours de Torrelavaga, finaliste au concours de Lausanne en 2007, il entre la même année à Europa Danse sous la direction de Jean-Albert Cartier.

International Tanzmesse nrv Düsseldorf Du 27 au 30 août, Ballet Biarritz était présent à la 7e édition de l'Exposition Internationale de Danse de Düsseldorf. Disposant d'un stand où il accueillait également deux compagnies d'Aquitaine : Androphyne (Pierre Johan Suc) et Ariadone (Carlota Ikeda), le CCN a assuré la promotion de ses spectacles auprès de nombreux professionnels de la danse venus participer à cette biennale. C'est avec beaucoup de plaisir que nous avons pu constater que la renommée de Ballet Biarritz s'étendait bien au-delà de nos frontières, et nous espérons des retombées positives suite aux contacts qui ont été pris avec de nombreux partenaires étrangers.

Répétitions publiques Les prochaines répétitions publiques à Biarritz se dérouleront le vendredi 7

novembre, jeudi 27 novembre et mercredi 17 décembre à 19h00 dans le grand studio de la Gare du Midi. Réservation obligatoire au 05 59 24 67 19.

Gala de la Croix Rouge Biarritz Afin de collecter les fonds nécessaires au financement de ses actions locales, les délégations de Biarritz et de

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Bayonne de la Croix Rouge organisent une Soirée de Gala à laquelle participera Ballet Biarritz au Casino Municipal le 19 décembre 2008 à 19h30. Informations : Ballet Biarritz 05 59 24 67 19 Réservations : Office de Tourisme de Biarritz 05 59 22 44 66

Nathalie Verspecht et Mikel Irurzun.


SOIRÉE ANNIVERSAIRE DES 10 ANS

Ci-dessus : Nouvelle création de l’Atelier du Chocolat de Bayonne, mécène de Ballet Biarritz Ci-contre : De gauche à droite : Thierry Malandain, Didier Borotra, Jakes Abeberry, Pierre Durand, et Yves Kordian.

Arnaud Mahouy dans Ballet Mécanique Photos © Olivier Houeix

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Ballet Mécanique © Olivier Houeix

Gare du Midi 23, avenue Foch F-64200 Biarritz Tél. : +33 5 59 24 67 19 Fax : +33 5 59 24 75 40 ccn@balletbiarritz.com Président Pierre Durand Vice-Président Pierre Moutarde Trésorier Marc Janet Directeur / Chorégraphe Thierry Malandain Maîtres de ballet Richard Coudray, Françoise Dubuc Artistes chorégraphiques Ione Miren Aguirre, Véronique Aniorte, Giuseppe Chiavaro, Frederik Deberdt, Cédric Godefroid, Aureline Guillot, Mikel Irurzun del Castillo, Miyuki Kanei, Fabio Lopes, Silvia Magalhaes, Arnaud Mahouy, Florent Mollet, Audrey Perrot, Magali Praud, Thibault Taniou, Nathalie Verspecht, Daniel Viscayo Professeur invité Angélito Lozano Pianistes Alberto Ribera, Miyuki Brickle, Corinne Vautrin Sensibilisation et transmission du répertoire Dominique Cordemans Formation et accueil studio Gaël Domenger Directeur délégué Yves Kordian Comptable principale – chargée du mécénat Rhania Lacorre Chargée de communication Sabine Lamburu Secrétaire-comptable Arantxa Lagnet

CALENDRIER / OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2008 REPRÉSENTATIONS EN FRANCE 13 décembre Marseille 19 décembre Biarritz 21 et 22 décembre Biarritz REPRÉSENTATIONS 25 octobre 30 octobre 26 et 27 décembre

TRANSFRONTALIÈRES Gijon Coruña San Sebastián

REPRÉSENTATIONS 08 octobre 22 octobre 02 décembre (04 > 10 décembre

À L'ÉTRANGER Québec (Canada) Neuss (Allemagne) Friedrichshaffen (Allemagne) Suisse (Genève, Lausanne)

Chargée de l’accueil et de la logistique – secrétariat technique Lise Saint-Martin Directeur de production / Concepteur Lumière Jean-Claude Asquié

Casse Noisette Soirée de Ballets au profit de la Croix Rouge Don Juan, Carmen

Régisseur général Oswald Roose Régisseur lumière Frédéric Eujol Régisseuse plateau Chloé Bréneur Technicien lumière Christian Grossard Techniciens son Jacques Vicassiau, Éric Susperregui Techniciens chauffeurs Xavier Pedelucq, Thierry Renault

Le Portrait de l’infante, l’Amour sorcier Le Portrait de l’infante, l’Amour sorcier Don Juan, Carmen

Costumière Véronique Murat Régie costumes / Couturière habilleuse Karine Prins Techniciennes de surface Annie Alegria, Ghita Balouck Attaché de presse Yves Mousset / MY Communications

Le Portrait de l’infante, l’Amour sorcier Le Portrait de l’infante, l’Amour sorcier Le Portrait de l’infante, l’Amour sorcier Casse Noisette)

Consultant en communication Frédéric Néry Projet transfrontalier – Fonds européen Interreg IV Partenariat Teatro Victoria Eugenia, Ville de San Sebastián, CCN Ballet Biarritz/Thierry Malandain Responsable – Directeur délégué Yves Kordian Coordination ACG Productions Numéro Directeur de la publication Thierry Malandain Création graphique Jean-Charles Federico Imprimeur SAI (Biarritz) ISSN 1293-6693 - juillet 2002

Le Cercle des mécènes de Ballet Biarritz apporte son soutien aux nouvelles productions, aux tournées internationales de prestige, aux projets à caractère évènementiel.

www.balletbiarritz.com


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