5 minute read

Science

Next Article
Animaux

Animaux

Sur les traces des créatures de légende

La cryptozoologie est l’étude des animaux dont l’existence n’est pas attestée, comme le dahu ou le monstre du Loch Ness. Un musée vaudois en est un des centres mondiaux, un peu malgré lui. La discipline a pourtant permis de dénicher de nouvelles espèces.

Texte: Thomas Piffaretti

Aborder la cryptozoologie, c’est accepter de naviguer à la frontière de la science et de la mythologie, voire de la croyance. La branche s’intéresse aux espèces animales qui n’existent qu’au travers d’indices, qu’ils soient matériels – comme des empreintes ou des poils – ou qu’ils proviennent de la culture populaire. Parmi les exemples de cryptides les plus célèbres, on peut citer le Kraken, ce poulpe géant des profondeurs marines qui hante les légendes scandinaves.

Le Musée cantonal de zoologie de Lausanne héberge les archives – essentiellement des articles, coupures de presse et illustrations de monstres – de celui qui est considéré comme le plus grand spécialiste du domaine, le Belge Bernard Heuvelmans. Fort d’un doctorat en zoologie, c’est lui qui, au milieu du XXe siècle, a œuvré pour donner une légitimité à la cryptozoologie, en formalisant une méthode scientifique. Celle-ci s’articule autour de l’étude très minutieuse des indices existants. Cette étape permet de décrire le plus précisément possible l’espèce puis de partir à sa recherche. Et éventuellement de la trouver.

Les limites de la discipline «Cette pratique est en totale opposition avec la méthode traditionnelle de description des espèces», prévient Olivier Glaizot, l’un des conservateurs du musée lausannois. Habituellement, un spécimen est capturé, puis observé et décrit. Des échantillons sont ensuite déposés dans un musée et le résultat de ces études est publié dans un journal à la réputation reconnue. Dès lors, la nouvelle espèce est reconnue par la communauté scientifique.

Si l’expert concède une admiration certaine pour la rigueur de Bernard Heuvelmans, il pointe par contre les limites de l’approche cryptozoologique. «Les indices récoltés qui servent de base aux recherches des cryptozoologues créent toute une mythologie qui frise la croyance. On croit à l’existence du yéti, on croit à l’existence du monstre du Loch Ness. Ainsi, on se rapproche davantage de la religion que de la science», regrette Olivier Glaizot, luimême zoologue.

Photos: Getty Images / iStock, DR

La génétique en piste

Au milieu des années 2010, un généticien britannique, en collaboration avec un scientifique du musée, s’est donné pour mission de mettre un point final au mythe du yéti. Il a procédé à l’analyse ADN d’échantillons, poils et autres restes animaux, attribués au célèbre cryptide. Les résultats n’ont pas permis de mettre en lumière la trace d’une nouvelle espèce, les éléments testés appartenant essentiellement à des espèces locales. Mais «l’absence de preuve n’est pas une preuve d’absence», tempère Olivier Glaizot.

«L’absence de preuve n’est pas une preuve d’absence»

Olivier Glaizot, conservateur au Musée cantonal de zoologie de Lausanne

C’est d’autant plus vrai que, selon lui, certains cryptozoologues semblent davantage puiser leur passion pour la branche dans l’aventure que représente une mission de prospection en Afrique ou dans l’Himalaya que dans la découverte scientifique sur laquelle elle pourrait déboucher. «Elle attire une constellation de personnes qui n’ont pas de formation scientifique, qui n’ont pas de connaissances, qui n’ont pas de méthode ou qui ne l’appliquent pas comme il faut. Ce qui fait que l’on se rapproche, souvent, de l’esprit de l’ufologie (l’étude des ovnis, ndlr.).»

Pourtant, et malgré les limites évoquées, la cryptozoologie a permis de découvrir de nouvelles espèces. La plus fréquemment citée est l’okapi. Ce mammifère partiellement zébré de la famille des girafes, qui mesure environ 2 mètres et pèse 300 kilos, vit dans les forêts tropicales de la République démocratique du Congo. Connu de longue date des populations indigènes, il n’existait, pour les scientifiques occidentaux, qu’à travers les récits et les descriptions faits par ces dernières. Sur la base de ces éléments seuls, un explorateur britannique est parti à sa recherche au début du XXe siècle et a pu en faire l’observation.

Un fossé trop important Insuffisant, selon Olivier Glaizot, pour faire sortir la cryptozoologie de sa condition de

para-science. «Il n’existe pas de publication vraiment fiable dédiée à la branche, ce qui nuit à sa crédibilité. Et il n’y a pas de place dans la littérature scientifique pour publier ces découvertes. Elles sont finalement diffusées dans des journaux de non-relecture. Ça ouvre le chemin à toutes les fabulations et croyances.»

Ainsi, pour le Musée de zoologie, les archives de Bernard Heuvelmans revêtent une valeur davantage historique que scientifique. Elles ont été présentées au public au moment où le zoologue a légué ses milliers de fiches documentaires et représentations iconographiques de cryptides, au début des années 2000. Mais n’ayant aucune expertise en la matière, l’institution se borne depuis à ouvrir le fonds aux personnes intéressées. De temps en temps, des chercheurs passent des heures dans la remise du musée à l’étudier.

Pour l’heure, aucune percée n’est à mettre à leur crédit. «C’est un débat stérile, martèle Olivier Glaizot. Prenons l’exemple du yéti: ce qui importe, c’est de découvrir une nouvelle espèce dans l’Himalaya, pas de savoir si on l’a trouvée avec une méthode traditionnelle ou cryptozoologique.» Après le décès de Bernard Heuvelmans, le musée a observé un pic d’intérêt pour la discipline. Depuis, il s’est tassé.  MM

Les monstres de chez nous

Le dahu nourrit l’imaginaire collectif suisse depuis plusieurs siècles. Moitié chèvre, moitié chamois, l’animal alpin aurait les pattes gauches plus courtes que les droites pour lui faciliter la marche à flanc de coteau. Si beaucoup ont assuré l’avoir observé, aucune preuve scientifique de son existence n’a été présentée. «L’exemple montre bien le flou entre la tradition populaire et le sérieux de la chose», pour le spécialiste. Il en va de même pour le «tatzelwurm». Ce grand lézard à tête de chat se tapirait pourtant dans des grottes de montagne.

Publicité

Action

dès 2 pièces 20% sur toutes les Boules Lindt LINDOR et sur tous les Pralinés Lindt

dès 2 pièces 20%

sur les Boules Lindt LINDOR et tous les Pralinés Lindt

p.ex. Boules Lindt LINDOR Lait 200 g 7.60 au lieu de 9.50

Du chocolat extra-fin, créé par les Maîtres Chocolatiers Lindt, pour des moments magiques

Les articles bénéficiant déjà d’une réduction sont exclus de toutes les offres. Offres valables uniquement du 22.11 au 28.11.2022, jusqu’à épuisement du stock

This article is from: