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La jeune fille qui tombe à pic
Championne du Freeride World Tour en 2022, la Valaisanne Sybille Blanjean fait partie des meilleures skieuses de sa génération. Cette année, elle prendra à nouveau le départ de l’Xtreme de Verbier.
#les débuts
«À 2 ans, j’étais déjà sur les lattes à Verbier (VS), où je suis née. Mon premier souvenir? Je dévalais la piste des débutants aux Esserts, j’allais toujours droit en bas: je n’ai pas réussi à freiner et je me suis éclatée sur un gros matelas orange. Mais ça ne m’a pas traumatisée! J’ai fait de l’alpin avec le ski club de Verbier jusqu’à 12 ans et, quand le club de freeride Powder Extreme s’est ouvert, je me suis tout de suite inscrite. J’ai dû attendre mes 14 ans pour faire mes premières compétitions. Et les résultats sont venus gentiment.»
#freeride
«Le freeride, c’est la liberté. On skie où on veut, comme on veut. Ce sport est entré dans la FIS, mais on n’est pas obligé de faire des compétitions. Il y a tellement d’autres possibilités comme les films ou les voyages. À mon âge, la compétition permet d’évoluer, d’apprendre, de rencontrer des gens, c’est hyper-bénéfique. Mon moteur? Sentir l’adrénaline. Le ski, c’est fait pour prendre du plaisir. Depuis toute petite, je ne fais que ce que j’aime.»
#même pas peur
«Ça reste un sport à risques bien sûr, mais on sait qu’on est capable de le faire, même sur une pente à 45 degrés. J’ai plusieurs techniques de respiration et de visualisation de ma ligne. Je regarde le tracé depuis en bas, vu qu’on n’a pas le droit de le faire avant la compétition, et je m’imagine en train de le skier. Je me le répète en boucle dans ma tête. Je choisis une musique énergétique à l’avance, genre Katy Perry ou Britney Spears, pour me donner la pêche. Juste avant de me lancer, je ne ressens plus rien. Dans ma tête, il n’y a plus ni peur ni stress, juste l’excitation du moment présent. Tant que j’ai les skis aux pieds, je n’ai pas le vertige!»
#entraînement
«En été, je fais du kite surf, beaucoup de vélo et de course à pied. Et en automne, je commence les entraînements en salle, une heure trente par jour, enchaîner les squats, soulever de la fonte. Il faut tout muscler, en particulier les jambes, pour tenir la longueur des pentes et les atterrissages de saut. Quand on atterrit, le poids est multiplié par dix suivant la hauteur des barres rocheuses! Ma coach mentale me donne des exercices de respiration diaphragmatique et des techniques de pleine conscience, qui m’aident à me déstresser en quelques secondes.»
#lieu mythique
«Le Bec-des-Rosses à Verbier, c’est la maison! Je le vois depuis toute petite. Je l’ai fait pour la première fois à 15 ans. Sans rien dire à personne, on est montés avec des copains. Je n’arrivais pas à attraper les prises parce que j’étais trop petite. Arrivés en haut, on a appelé nos parents, qui étaient fous de rage... Mais on était tellement euphoriques! Il faut dire qu’en haut, ça donne presque des haut-le-cœur tellement c’est raide. On sait qu’on n’a pas le droit à la chute. Mais c’est ça qu’on recherche, cette adrénaline, la dopamine, qui procure tellement de plaisir qu’on a juste envie d’y retourner. Même si on a les jambes en feu à l’arrivée!»
#instant présent
«Quand je fais un run, je suis dans l’instant présent. J’ai de la musique explosive dans les oreilles, genre Basshunter, mais je n’entends rien, ni l’hélico ni le bruit de mes skis sur la neige. Je n’ai même pas conscience de ce qui se passe, j’ai juste des petits flashs de lucidité pour me rappeler de respirer. Sinon je suis en pilote automatique. Un run, c’est un peu le black-out.»
Tant qu’elle a les skis aux pieds, Sybille Blanjean ne connaît pas le vertige.
Bio express
À 23 ans, Sybille Blanjean a deux passions: terminer ses études de physiothérapie, qu’elle poursuit à l’HES-SO de Loèche-les-Bains (VS), et le ski extrême. La jeune femme compte déjà plusieurs victoires à son actif: l’Xtreme junior en 2018 et l’Xtreme de Verbier en 2022
Perfectionniste, passionnée et joueuse, la skieuse est prête à tout miser sur un itinéraire au risque de tout perdre: cette saison, elle n’a pas passé le cut du Freeride World Tour après la troisième manche au Canada. Malgré ses points insuffisants, elle sera quand même au rendez-vous de la finale de Verbier, puisqu’elle a décroché la wild-card.
#encore un rêve
«J’aimerais gagner l’Xtreme de Verbier encore une fois. Je vais continuer à faire du freeride en compétition, mais un jour je pense réaliser des films de ski comme les frères Falquet ou Jérémie Heitz. J’adore son style, c’est un modèle inspirant. Mais, contrairement à lui, je n’ai pas de liste, juste quelques sommets qui donnent envie, comme le Grand-Chavalard ou l’Obergabelhorn. Il y a tellement de choses à faire en Suisse, pour autant que la planète ne se réchauffe pas trop…» MM
Informations: Xtreme Verbier, du 25 mars au 2 avril 2023. www.freerideworldtour.com