FAIRE ET LAISSER FAIRE

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.1 FAIRE ET LAISSER FAIRE RICOMELou 2021/2022A2RES-2Master-d’étudefindeprojetdeNotice Une école du bois à Lac-Mégantic

Le projet de l’école du bois répond à un besoin et une volon té de générer des rencontres et des liens entre des espaces divisés à Lac-Mégantic. Aujourd’hui, la rivière Chaudière s’ef face de la ville par une mise à distance dans la perception physique de celle-ci. La valorisation de ce territoire passe par la rencontre avec la zone industrielle. Le projet s’inscrit dans une volonté de générer un tissu entre ces milieux en les traversants. En parallèle de ces volontés, le milieu dans lequel nous nous inscrivons questionne les espaces, leurs rapport au sol et à l’eau. En effet, le contexte canadien dans lequel nous nous inscrivons, implique de fortes variations de ces éléments. Le travail de la temporalité et de la mise en valeur de ces mouvements font parti des concept du pro jet. L’école en elle-même propose une revalorisation de la filière locale du bois. Cette démarche va donc permettre des rencontres entre acteurs locaux et extérieurs mais aussi une valorisation des déchets des industries locales. Les industries étant spécialisées principalement dans le placage, l’école va développer le travail du bois dans l’intégralité de son cyle. Cette démarche permet donc à l’école de travailler des bois de structure ou de construction, en complémentarité du tra vail des industries.

RÉSUMÉ

The wood school project responds to a need and a desire to generate encounters and links between divided spaces in Lac-Mégantic. Today, the Chaudière River disappears from the city by distancing the physical perception of it. The va lorization of this territory passes by the meeting with the in dustrial zone. The project is part of a desire to generate a fabric between these environments by crossing them. In pa rallel with these desires, the environment in which we are part questions the spaces, their relationship to the ground and to the water. Indeed, the Canadian context in which we ope rate involves strong variations in these elements. The work of temporality and the enhancement of these movements are part of the concept of the project. The school itself offers a revaluation of the local wood industry. This approach will the refore allow meetings between local and external actors but also a recovery of waste from local indus- tries. The industries being specialized mainly in veneer, the school will develop woodworking in its entire cycle. This approach therefore al lows the school to work with structural or construction wood, in addition to the work of industries.

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SUMMARY

MILIEU DE LA RIVIÈRE CHAUDIÈRE de la rivière NATUREL ET ARTEFACT - analyse du contexte Le franchissement rivière dans la ville La ressource du bois Les industries à Lac-Mégantic Un lien culturel et

B. ANALYSE DU PARC DE LA RIVIÈRE CHAUDIÈRE Temporalité du territoire a. Saisonnalités b. Crues et inondations Emprise de l’eau Rapports aux sols a. Composition b. Une végétation particulière

II. RENCONTRE DE L’ARTEFACT ET DU VIVANT - LES OUTILS A. MOUVEMENT ET STABILITÉ Étude du mouvement a. Représentation expérimentale de l’eau b. Retour sur expérience Le parcours La trame : outil d’analyse et de repère a. Un outil d’étude Des repères et des rencontres avec le milieu naturel

3.

1.

Histoire

sensible

1.

2.

b.

I.INTRODUCTIONANALYSEDU

A.

a.

3.

SOMMAIRE P. 39P. 39P. 31P. 27P. 21P. 17P. 15P. 45P. 41P. 35P. 25P. 21P. 13P. 11P. 7P. 17

2.

c.

b.

2. La

1.

.5 B. TISSER DU 3.2.1.ImplantationLIENLeprogrammeMatérialisation de la trame - le bois III. UN PROJET À LA RECHERCHE DU LAISSER FAIRE A. LE SITE1.Un site à travers les milieux 2. La pente et l’écoulement B. GÉOMÉTRIE ET FLUIDITÉ 1. Révéler l’intangible 2. Le corps et les usages CONCLUSION P. 63P. 59P. 57P. 55P. 61P. 49P. 47P. 47

Au cours de mes premières recherches, j’ai rapidement pris conscience de l’importance que l’eau portait dans la culture québécoise. En effet, dans la culture des autochtones des Premières Nations il n’y a pas d’appartenance individuelle de la terre, de l’eau ou des autres éléments; ce sont des biens collectifs qui demandent à être utilisés avec respect. « Notre patrimoine, ce n’est pas l’architecture, la littérature ou l’amé nagement territorial, mais plutôt l’héritage spirituel édifié sur le plus profond respect de notre environnement et de nos coutumes ancestrales ». L’eau est un vecteur économique mais porte aussi une symbolique sacré puisque l’eau a un pouvoir de vie, elle touche à l’agriculture, à la médecine et à la pêche. « Les cours d’eau sont les vaisseaux sanguins de notre mère la Terre. » (René Beaudet, 1999, Premières Nations et la ressource eau) . Nous comprenons ainsi pourquoi l’eau est un élément partagé par tous, son utilisation est gratuite et elle ne peut pas être privatisée. A Lac-Mégantic, l’eau fait partie intégrante de l’identité de la ville puisque celle-ci s’est développée le long du lac Mégan tic. La rivière Chaudière est aussi un élément structurant de la ville puisqu’elle ouvre le lac et délimite deux côtés de la ville. Cette rivière nait à Lac-Mégantic et permet la régulation du lac en fonction des saisons. Elle est aussi l’élément naturel qui relie la ville à celle de Québec.

INTRODUCTION

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.9 LADEMILIEUDUANALYSE CHAUDIÈRERIVIÈREI.

Fig.1 Évolution du lit de la rivière Chaudière (1950-2012)

La rivière Chaudière prend naissance au nord-est du lac Mé gantic et traverse environ 200 km jusqu’à Québec où elle se jette dans le fleuve du Saint-Laurent. La rivière traverse les pentes des Appalaches et rejoint de nombreuses rivières tel que celles du Loup et Famine, le bras Saint-Victor et la rivière LaBeaurivage.régionétait

fréquentée par les populations amérindiennes (bien avant que leurs présences aient été signalées au XVIIIe. Les peuples Abénaquis voyageaient le long des vallées de la Kennebec et de la Chaudière qui étaient une voie d’accès directe entre la Nouvelle-France et la Nouvelle-Angleterre. Le nom de Mégantic semble être d’origine abénaquise : Me gantik viendrait de Namesokanjik qui signifie « le lieu des poissons ». La Rivière Chaudière semblait aussi avoir été utili sée par les Etechemins qui se déplaçaient entre la côte atlan tique et Québec. A partir des années 1860, une attention spéciale est portée au potentiel forestier du bassin de la Chaudière. C’est en 1880 que le chemin de fer est mis en place et offre un tremplin économique pour la région en relançant l’exploitation de ses ressources forestières. On constate toujours aujourd’hui deux approches aux ressources naturelles importantes de la région. En effet, d’un côté nous avons l’intérêt pour l’industrie forestière ou la production agricole. De l’autre, nous avons ceux qui se soucient de la richesse faunique de Mégantic et porte une attention au potentiel du bassin hydrographique. Aujourd’hui la rivière Chaudière porte sa richesse davantage dans les produits dérivés de l’arbre roi (l’érable). Par ailleurs, la présence envahissante des industries sur ses rives et les crues saisonnières soulèvent des enjeux conséquents concernant la préservation de son écosystème et de ses terres. Elle de meure une destination touristique très fréquentée et qui doit donc nous apprendre à maitriser et à équilibrer notre implan tation et son influence sur son équilibre.

HISTOIRE DE LA RIVIÈRE

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A. NATUREL ET

L’écoulement des eaux, des ruisseaux, des rivières, des fleuves, des lacs, des mers et des océans séparent, séquencent et structurent les territoires. L’eau est une force naturelle que nous avons du mal à contrôler, à contenir. C’est aussi une des forces naturelles les plus puissantes. Il est quasiment im possible de construire dans des eaux qui gèlent tellement la force de la glace est importante. Pourtant, l’eau est néces saire à la vie. Les villes s’implantent et se développent autour de points d’eau. Les villes majeures sont principalement des villes côtières ou au bord des fleuves. Nous avons donc appris à les apprivoiser afin de cohabiter au mieux et de tirer profit de cette relation. Pour cela, le franchissement de l’eau est es sentiel et se fait principalement par des types et structures de ponts variés. Nous avons les ponts naturels tels que les bar rages de castors ou les emplacements de rochers au milieu du cours d’eau. D’autre part, nous avons les ponts issus de la construction humaine qui vont parfois se positionner fronta lement aux flux de l’eau. Le caractère mouvant et imprévisible de l’eau avec ses fortes crues ou sécheresses peut mettre en danger la fonction du pont, celui-ci ne pouvant pas s’adapter à des variations trop importantes. La maîtrise de cet élément naturel n’est donc pas réellement possible au vue de sa force, notamment au cours de la fonte des neiges où les débits augmentent. Cependant, dans notre cohabitation avec l’eau nous avons aussi appris à tirer de l’énergie dans la force de son déplacement. C’est d’ailleurs la source principale et ma jeure de production d’énergie au Canada. A Lac-Mégantic, les franchissements de la rivière sont assez rares (Fig.3 ) et les berges ne sont pas aménagées. L’activité de la ville et les habitations se tournent principalement vers le lac. L’interêt de la ville et de ses habitant ne semble donc pas se porter sur la rivière, ce qui est renforcé par le manque d’accessibilité. -ARTEFACTAnalyseducontexte

1. Le franchissement

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Fig.2 Photo aérienne des ponts et du barrage à la nais sance de la rivière Chaudière

Fig.3 Photo aérienne des ponts et zones d’habitation 1.12500e (page de gauche)

Fig.4 Plan des polarités de la ville - 1.10 000e Espace CentreQuartierjeunesseartisansportif Zone ParcoursindustriellesculpturesMicro-réseau Fig.5 Photos de deux types de rives rencontrées

Nous observons aussi une opacité de la ville et des habitants dans le manque de ces espaces de transition. Nous retrou vons peu d’espaces de campagne en tant que lieu rural habi té. A Lac-Mégantic, nous nous trouvons rapidement dans des forêts denses peu pratiquables ou dans des zones urbaines tel que des zones industrielles, pavillonaires ou commer ciales. Les rives de la rivière présentent ainsi des espaces non habités alors que celles-ci traversent la ville et rejoingnent le L’évolutionlac.

.15 2. La rivière dans la ville A Lac-Mégantic, nous remarquons rapidement une tension entre une maille orthonormée de la ville (rues, organisation pavillonaire) et les éléments naturels. L’organisation de la ville aujourd’hui est fragmentée et découpée en zones avec un manque de transitions et de liens entre celles-ci (Fig.4) .

du lit de la rivière traduit aussi cette question de l’emprise anthropique puisqu’il a été contraint d’évoluer avec l’implantation des industries et le besoin de contenir les flux. Une mise à distance des industries était étbali dès le départ afin d’éviter d’être confronté aux crues saisonnières de la ri vière. Il faut savoir que les industries qui se situaient sur les rives n’existent plus aujourd’hui, laissant place à des terrains pollués par les déchets de copeaux de bois mais offrant des potentialités d’implantation. Nous observons ainsi la zone qui longe principalement la rivière Chaudière et son parc et celle du parc industriel. Cependant, la voie ferrée vient dessiner une limite tangible entre ces deux espaces. C’est aussi cette partie de la ville qui repousse le point de franchissement suivant. Lors de mes visites sur site il était difficile de longer l’entièreté des rives puisque les distances entre les différents ponts étaient très importants. Le manque d’aménagements de la rivière et de ses rives lui permet cependant d’avoir développé aujourd’hui une ripisylve importante avec un écosystème qui semble au tonome. Les plages de galets que nous rencontrons sont di verses et offrent un certain accès à l’eau de la rivière (Fig.5).

J’ai été amené à me questionner sur les raisons et enjeux de mises à distance entre la zone industrielle et la rivière. Par ail leurs, la qualité de l’espace du parc naturel n’est pas négli geable dans le contexte de vie ouvrière. Comment est ce que celui-ci pourrait s’ouvrir au quotidien des industries? Com ment pouvons nous ouvrir le milieu de la rivière sans pour autant déséquilibrer entièrement l’écosystème en place?

Fig.7 Troncs de bois dans l’industrie de placage Mégantic Fig.6 Plan zones de la ville 1.10000e 1 2 3 4 5 6 7 4123 657PanoliteBestar Tafisa Geroby Cabinets Bois Sainte-Pierre Inc Multi-Pièce Lac-Mégantic Scierie Generations4123 657PanoliteBestar Tafisa Geroby Cabinets Bois Sainte-Pierre Inc Multi-Pièce Lac-Mégantic Scierie Generations

b. Un lien culturel et sensible

.17 3. La ressource du bois a. Les industries de Lac-Mégantic Les industries en question travaillent principalement le bois, puisque, comme nous l’avons évoqué précédemment, la ville s’est développée économiquement grâce à cette res source. En effet, après une décroissance dans l’après-guerre de la région, la reprise économique et le boom de l’industrie notamment dans le secteur de la construction domiciliaire stimulent la consommation des produits dérivés du bois. La ressource du bois, essentielle à la région, permet de déve lopper la confection, un nouveau type d’industrie. La diversi fication et la consolidation de la structure industrielle assurent un avenir prometteur pour la région. La présence d’industries est synonyme de bassin d’emplois permettant le maintien et le développement de la ville et des communautés rurales. Pratiquement toutes les municipalités de la MRC ont réservé une portion de territoires pour des usages industriels. Ces zones sont principalement situées à l’intérieur des périmètres urbains. Nous avons pu observer à Lac-Mégantic la proximi té des zones industrielles avec le centre ville ou des zones d’habitation (Fig.6). La ville de Lac-Mégantic est en capacité d’accueillir ces industries par leur localisation, leur proximi té au chemin ferroviaire, aux grands axes routiers et par les espaces disponibles. Au sein de la MRC, les démarches des villes tendent vers l’ouverture et l’accueil de ces industries qui semblent nécessaires à leurs développements et à leurs at tractivités. Nous avions aussi pu nous rendre compte, avec la rencontre du quartier artisans, qu’une autre volonté éco nomique mais aussi touristique se développe fortement à Lac-Mégantic.

Les essences d’arbres portent des caractéristiques différentes mais il faut savoir que, de façon générale, tous les bois sup portent la chaleur, l’humidité et les fortes variations de tem pératures. Lors de mes parcours le long de la rivière, j’avais été marquée par l’odeur agréable qui se dégageait des usines : une odeur de bois brulé ou de sciure flottait dans l’air hu mide et brumeux de la ripisylve. L’ambiance de ce moment m’avait évoqué le souvenir des saunas finlandais où nous étions immergé dans l’expérience du bois : par la chaleur, l’odeur, le toucher et par notre corps entièrement entouré de bois. Cela évoque donc les capacités que peut porter cette matière dans des expériences sensibles et variées.

Le merisierL’érableLe chêne

Par ailleurs, la chaleur du bois est particulièrement appréciée par les Canadiens. Celle-ci offre une chaleur qui va s’installer dans un espace et qui est souvent un point central dans la Lamaison.travail du bois à Lac-Mégantic, dans le domaine de l’in dustrie, porte principalement sur le chêne, l’érable et le meri sier (Fig.9), des essences locales.

Fig.8 Etapes dans l’industrie de placage de bois (gauche)

Fig.9 Dessins des trois essences d’arbres utilisées dans l’industrie à Lac-Mégantic - Franca Stagi et Cesare Leonardi

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Fig.10 Dimension temporelle de la morphologie de la rivière Chaudière Fig.11 Parc de la rivière Chaudière en hiver Fig.12 Évolution du débit d’eau et crues de la rivière

.21 B. ANALYSE DU PARC DE LA RIVIÈRE

L’évolution du temps, de la saisonnalité et des aléas météo rologiques ont une grande influence sur la rivière Chaudière dans son aspect et son comportement. Nous verrons un peu plus tard que les sols qui l’entourent sont sensibles aux va riations d’humidité et peuvent devenir inaccessibles. Lors de notre séjour à Lac-Mégantic nous n’avons pas eu l’opportuni té de vivre la saison hivernale mais nous pouvons facilement imaginer que les sols et la végétation se figent au cours de cette période. Les contraintes physiques évoluent : la quanti té de neige peut rendre certains lieux inaccessibles, la glace sur les rives crée des espaces instables et fragiles en fonc tion de son épaisseur. Dans le cas de la saison d’été, on ima gine que les niveaux d’eau sont plus bas, que de nouveaux terrains praticables apparaissent et que l’omniprésence de l’eau s’estompe. Les temps et saisonnalités d’une année per mettent de comprendre l’ampleur des mouvements de cette rivière qui ne peut se définir uniquement par son flux et son courant (Fig.10). b. Crues et inondations

Dans le Québec du XXe siècle, nous pouvons établir une cor rélation entre le débit d’un cours d’eau et l’indice industriel du bassin correspondant. Modeste dans son débit, la Chau dière a attiré peu d’industries et a perdu la chance d’être ré Lesgularisée.picsde

1. Temporalité du territoire a. Saisonnalités

crues élevées de la Chaudière ont commencé bien avant l’exploitation massive de la forêt au XIXe. Elle est au jourd’hui’hui connue pour ses crues causant des dommages considérables, notamment au printemps dans la région de la Bausse(Fig.12). Pendant ces périodes, le débit ainsi que le ni veau supérieur de la nappe d’eau s’élèvent fortement. Le dé bit régulier d’environ 100 mètres cube par seconde s’élève à 2000 mètres cube par seconde dans ces périodes de crues. Les crues sont plus souvent dangereuses par leur niveaux et leurs charges que par leurs masses d’eau. Les inondations

Fig.13 Plan prospectif des aléas et montées des eaux selon la t opographie - 1.2500e

.23 fréquentes semblent être principalement un phénomène na turel qui s’amplifie par l’impact anthropique. Les dispositions structurales sont des éléments passifs qui jouent fortement sur ces phénomènes de crue. La faible inclinaison de la ri vière ainsi que la prépondérance d’un même type de relief facilitent l’établissement d’une unité climatique et permet au bassin de réagir en bloc. Depuis longtemps, nous avons noté la présence de nombreux petits canaux de drainage qui augmentent le pourcentage d’écoulement. Retenons aussi que le déboisement des coteaux, ces versants de la vallée de la Chaudière moyenne, ont perdu, dans les municipalités les plus touchées, 60% de leurs couvertures végétales. II faut aussi signaler l’absence de grands lacs régularisateurs et celle d’une épaisse couche de dépôts meubles, deux facteurs qui favoriseraient la rétention. Mais les éléments les plus respon sables des crues sont la centralisation de l’embouchure des principaux affluents de la Chaudière moyenne (Chaudière supérieure, Famine, Du Loup) et le trop faible encaissement de la Chaudière dans les Fonds (plaine d’inondation). Ainsi, en dehors des phénomènes météorologiques, nous soule vons deux facteurs principaux dans les crues : les conditions structurales (et obstacles mobiles tel que des blocs de glace) et les facteurs climatiques. Les conditions d’écoulement et l’indice d’inondation entrent en jeu dans les capacités du ter ritoire à drainer ces eaux. L’étude du plan prospectif (Fig.13) nous permet de com prendre en partie le manque de proximité entre la rivière et les habitations. Nous savons aussi que le niveau du lac est régulé grâce au barrage mais que la rivière vit des consé quences décuplées de ces aléas saisonniers.

.25 2. Emprise de l’eau La compréhension du fonctionnement en réseaux des eaux et de leur l’emprise nous permet de voir la rivière comme un système complet, un ensemble. En effet, la rivière, les ruisseaux, les ruissellements, les eaux stagnantes, les eaux souterraines, l’humidité et la pluie font partie d’un seul et unique ensemble. Ce fonctionnement en réseaux démontre l’ampleur et l’emprise de l’eau sur ce territoire(Fig.14). Cela se remarque davantage aux inter-saisons et lors de la fonte des neiges puisque les sols deviennent saturés en eau et nous pouvons donc observer sa résurgence et sa force. Les maté rialités des sols m’ont donc permis de comprendre les flux souterrains présents et les points de résurgences en fonc tion d’alluvions sableux ou des till plus compacts et imper méables (Fig.20). Les fonctionnements des différents états de l’eau sont tous reliés dans le rapport au sol. Ces représentations permettent aussi de comprendre une certaine hiérarchisation des eaux face à l’emprise et au réseau qu’elles déploient. La rivière se positionne entre deux bassins versants et tous les ruisseaux et ruisselements (en surface ou souterrains) de la ville re joignent la rivière. Au Canada, la vie est rythmée par les changements d’états de l’eau. La neige recouvre le paysage pendant plusieurs mois, les lacs gèlent mais certaines rivières continuent à cou ler, dont la rivière Chaudière. Pendant la fonte des neiges et avant l’arrivée de l’hiver, l’eau est omniprésente et laisse des traces sur son passage (par la pluie, les fontes etc). Au coeur d’une forêt de conifères, j’ai pu observer davantage à travers la trace le phénomène d’écoulements, de ruissellements, dans un milieu de végétation haute et dense. L’eau était très peu présente et pourtant on observe l’ampleur de ce phé nomène puisqu’il est venu structurer le sol autour des arbres Un paysage vallonné se dessine par les petits monticules au pied des arbres. Le sol recouvert d’épines renforce le mouve ment imaginé du ruissellement de l’eau (Fig.15). Se trouver dans un milieu plus éloigné de points d’eau im portants m’a permis de comprendre comment l’eau venait structurer le paysage et traverser les sols et frontières. L’ache minement de l’eau se décompose de façon hiérarchique. Les fossés sur les côtés du chemin permettent d’acheminer l’écoulement irrégulier de l’eau dans une direction suivant pente vers des points ponctuels de tuyaux placés en sou terrain. Ces tuyaux, en métal ou plastique, permettent d’ac Fig.14 Plan des cours d’eau autour de la rivière Chaudière 1.75000e (haut)

Fig.15 Photo - Traces du pas sage de l’eau dans une forêt de conifères (bas, gauche)

Fig.16 Photo - Écoulement de l’eau à travers un tuyaux métal lique (bas, droite)

Les sources souterraines, les nappes phréatiques, les ruissel lements et les sols sont tous devenus saturés ce qui a pu en gendrer de forts débordements. Ces débordements portent un enjeu important pendant les intersaisons, notamment au Canada où la fonte des neiges printanière laisse derrière elle des sols saturés en eau. Nous cherchons souvent à maîtriser l’eau car son caractère imprévisible peut être dangeureux pour l’équilibre de la vie humaine en milieu urbain. Les infrastructures telle que les canalisations ou les bassins de rétention permettent une cohabitation grâce aux régulations des flux. Ce savoir-faire implique aussi que le ruisselement de l’eau n’est pas autant naturel. Nous concentrons les points d’écoulements afin de créer des ruisseaux permettant l’acheminement ponctuel de l’eau et non pas des inondations du bassin versant.

3. Rapports aux sols a. Composition La question des sols est ainsi étroitement liée au système de l’eau, à ses écoulements, ses rententions ou ses autres états que nous pouvons rencontrer. Les études des sols nous per mettent de comprendre que les principaux types rencontrés

.27 compagner l’écoulement des eaux sans contraindre ou em pêcher le passage de l’homme (Fig.16). Nous dévions donc sa trajectoire afin de contrôler et maîtriser ses changements d’état. Les ponts souterrains permettent donc à l’eau de tra verser et de continuer son ruissellement naturellement dans la pente jusqu’à atteindre le bassin de rétention d’eau. L’eau dans un même territoire se retrouve donc dans diffé rents états et différents milieux. La coupe schématique (Fig.18) représente ces différents états et leurs rapports sur les points étudiés à Lac-Mégantic (Fig.17). La dimension des nappes phréatiques met de nouveau en avant la notion de fonction nement en réseaux et de systèmes dans les différents types d’eaux. Ces nappes font parties intégrantes de la structure et de l’interaction entre les différents milieux. L’eau génére des phénomènes et changements de paysages importants. En effet, la saturation des sols et les fortes chutes d’eau ont généré des ruisselements torentiels dans des mi lieux inadaptés à la présence de l’eau. J’ai donc pu observer des glissements de terrains, des courants d’eau traverser les routes, des jets d’eau s’échapper d’ouvertures ponctuelles dans des murs de soutainement. Ces phénomènes m’ont fait prendre conscience de l’omniprésence de l’eau et de sa force dans un paysage où celle-ci n’est pas forcément visible.

ArgileSableLimonRocheAlluvionsArgileet sable Terre Fig.19 Maquette en coupe des matérialités du sol en bord de rivière

Écoulement RésurgenceAlluvions

.29 autour de la rivière Chaudière sont le till et des alluvions à base de sable, gravier et limon. Le till est une roche sédimen taire formée par compaction d’un dépôt fluvio-glaciaire an cien ou d’un dépôt morainique (accumulation de débris de roches qui sont entraînés puis abandonnés par les glaciers). Ceux présents autour de la rivière sont compacts, parfois meubles et très argileux. Directement dans le lit de la rivière ou sur les rives proches, on retrouve des alluvions, colluvions (boue caillouteuse oxydée, non calcaire) et du gravier de ter rasse fluviale (sable, limon, gravier) qui ouvrent la rivière au eaux et échanges souterrains comme expliqué sur le schéma Cetteci-dessous.dualité

dans la porosité de la rivière nous indique la présence d’échanges avec les nappes phréatiques souter raines mais aussi la perméabilité et l’instabilité du terrain au tour de son lit. La dimension argileuse rend les sols instables et hostiles puisque leur état varie fortement en fonction de la présence d’eau. Fig.20 Représentation schématique des flux des eaux souterraines per méables

Dépôtssableux)(dépôtsglacaires(Till)

Microclimat, absence de vent b. Une végétation particulière

Fig.22 Dessin bouleau - Franca Stagi et Cesare Leonardi (haut, droite)

Fig.21 Végétation dense et hostile en amont de la rivière (haut, gauche)

Fig.23 Omnisprésence de l’eau dans les sol - marécages et végétation affaissée par le poids de la neige (bas)

.31

Ripisylve : ensemble des formations boisées, buissonantes et herbacées présentes sur les rives d’un cours d’eau, d’une rivière ou d’un fleuve, la notion de rive désignant le bord du lit mineur (lit ordinaire hors crues) du cours d’eau non sub mergé à l’étiage. A la fin de l’été et avant les neiges hivernales, les rivières, ruis seaux ou autres courants faisant partie de ce grand réseau, ont des débits réduits. La sonorité de l’écoulement est moins présente, les flux sont moins remarquables et les liens entre les différents points d’eau peuvent être à sec. Ainsi, nous ressentons l’eau par la végétation spécifique, souvent assez basse ou composée d’arbres fins, notamment les bouleaux ou peupliers. Des démarcations sur le sol ou la roche, des lits à sec, des herbes couchées peuvent aussi être indicateurs du passage de l’eau. La végétation est donc aussi un élément révélateur du milieu dans lequel nous nous trouvons. Ces écosystèmes peuvent être hostiles par leur densité ou leur instabilité (des sols non praticables, humides ou marécageux). Au cours de mes vi sites j’ai pu rencontrer différents obstacles à mon chemine ment, notamment la densité de la végétation basse. La vé gétation n’était donc pas de grande invergure mais elle est présente et contraignante par sa densité et rigidité.

.33ETL’ARTEFACTDERENCONTRELA OUTILSLES-NATURELDUII.

La rive est la ligne de contact entre l’eau et la terre. Cette rive fait partie de l’écosystème particulier que génère le passage de l’eau. Nous avons appris à habiter ces lieux, à creuser des sols mouvants et à réguler les flux même si les crues demeurent capricieuses. Fig.24 Gèle matinal au sein d’une tourbière (haut)

Au cours de cette étude j’ai souhaité prendre le temps de ressentir la rive, d’écouter l’écoulement de l’eau, d’observer ses ondulations, de sentir la structure de son lit. L’écoulement de l’eau est un phénomène qui nous fascine, ce passage constant d’une même entité qui pourtant ne s’arrête jamais et n’est jamais la même. Cette sonorité est souvent le premier indicateur que nous captons de la présence de l’eau. Elle nous attire et nous lance dans une recherche de la source ou de la rive. L’envie de voir et de ressentir ce milieu nous mène à la rencontre de l’eau qui est pourtant un milieu que nous ne pouvons habiter. Nous pouvons la toucher, parfois la traverser mais nous ne pouvons pas y rester. Je pense que la fascination que je porte à ces courants vient de l’innacessi bilité, surtout dans la saison hivernale, où les bains sont peu Habiterfréquents.la rive permet d’être spectateur d’une danse en évo lution constante suivant le rythme des saisons. Les variations morphologiques des rives nous offrent différents rapports à l’eau puisque notre immersion dans le milieu est différent sur une plage, sur un à-pic ou sur une bande riveraine enrochée.

Fig.25 Représentation imaginaire des mouvements de l’eau selon des obstacles (bas)

1.STABILITÉÉtudedumouvementa.Représentationexpérimentale

.35 A. MOUVEMENT ET

L’écoulement nous fait entendre la fluidité du mouvement d’une eau baladeuse, il parle d’un cheminement, d’un lien vers l’ailleurs.

de l’eau

hydrophobePeintureLinogravureEncre

Fig.26 Catching Light, huile sur toile, représentation des lumières dans les mouvements de l’eau

.39 b. Retour sur expérience Les expérimentations de la représentation de l’eau ont été travaillées selon trois approches. Tout d’abord l’utilisation de l’encre, miscible avec l’eau, avait pour objectif de reproduire des écoulements sur papier. Des tests d’impression rapides sur la surface de l’eau ont créé un aspect poreux et nuageux. La deuxième approche, plus matérielle, était la linogravure. L’objectif était de redessiner les lignes de courant d’un flux liquide. En testant différentes peintures pour les impressions cela a offert des rendus plus ou moins figés de ces lignes. La dernière et troisème approche était l’utilisation d’une pein ture hydrophobe. J’ai pu réaliser des impressions à partir des mouvements de la peinture à la surface de l’eau. La viscosité de celle-ci n’ayant pas les mêmes propriétés que l’eau, suivait des mouvements amplifiés qui m’ont permis d’observer ses flux. Avec ces expériences j’ai essayé de comprendre comment nous pouvons figer et traduire un mouvement et un écoule ment. J’ai pu observer des points de résistance dans les flux ce qui engendrait des déplacements ou changements de di rection pour certaines lignes. «Une connaissance inventive et hasardeuse doit conser ver un élément de liberté, et ne peut être astreinte à systématiser toutes ses démarches.» -Gaston Bachelard c. Le parcours Etudier un site et se saisir de son essence nous demande de l’arpenter, de le parcourir et de l’éprouver. Par le chemine ment, le déplacement du corps, nous vivons les distances, nous ressentons la pente, nous observons les variations d’ambiance et de milieu. Notre corps et notre déambulation sont en mouvement constant. Dans un milieu tel que celui de la rivière, nos mouvements nous permettent d’être et de prendre place sur des éléments vivants. Un sol instable peut être contourné, des flux peuvent être traversés, des vents peuvent être appréciés etc. Ainsi, notre corps nous offre la possibilité de recevoir et de vivre avec ces mouvements natu rels. C’est dans cette approche que le parcours et le rapport à notre corps seront des éléments du projet architectural.

Fig.27 (Photos) Vues aériennes des différents tissus rencontrés (haut) Fig.28 Plan des rencontres des tissus urbains et naturels - 1.2000e (bas)

Un outil d’étude La trame est un outil très présent dans l’urbanisme nord-amé ricain. Nous avons fortement constaté cela à Montréal (on parle d’ailleurs de bloc et de corner pour se repérer dans la ville) et c’était aussi le cas à Lac-Mégantic (Fig.27 & 28).

La trame permet donc de définir un tissu et offre une régu larité d’organisation. C’est un outil qui nous permet d’appor ter des rapports d’échelle à des milieux inconnus. C’est donc aussi une façon de cartographier les espaces, notamment les espaces naturels (cartes IGN). Cette approche propre à l’humain nous permet de définir et d’analyser des espaces ou éléments non maitrisés. La trame est souvent en relation avec la grille qui est spécifique à l’analyse. C’est dans cette démarche que l’utilisation de la trame nous permet de com prendre et de faire avec le milieu naturel de la rivière. Dans un premier temps, j’ai pu réaliser une grille d’analyses pour répertorier les motifs et matériaux rencontrés dans ce milieu. Cette approche empirique permet de répertorier les éléments présents à des endroits spécifiques du parc de la rivière mais aussi de tracer du lien entre des éléments vi vants, que ce soit la temporalité des états de l’eau (glace et givre le matin) ou la végétation basse marquée par le pas sage ou le poids de l’eau. Nous pouvons aussi comparer des phénomènes : les rapports à la lumière : un bois peut avoir différentes capacités d’absorption de la lumière alors qu’une pierre va avoir tendance à la refléter. L’eau vient jouer sur les reflets et contrastes avec des matériaux plus ternes. Nous pouvons aussi nous pencher sur des phénomènes de différentes échelles : le froid permet de figer des mouve ments, créant des motifs particuliers (effets d’ondes dans les tourbières). Enfin, la mise en matrice des différents éléments permettent de créer un ensemble qui nous donne une ap proche plus complète du site en question. La matrice permet aussi de dessiner l’ambiance et l’imaginaire qui se dégage d’un milieu.

.41 2. La trame : outil d’analyse et de repèrea.

Lumière Reflet MouvementMatrice

.43Fig.29 Motifs et matériaux de la ripisylve

mouvementchangeant.solobstaclesla végétationlerelief

Fig.31 (Photo) Rencontre de la trame morcellée avec un morceau de bois (bas, gauche)

Fig.30 (Photos) Evolution en 4 étapes de la déconstruction et déstructuration d’une trame (gauche)

.45 b. Des repères et rencontres avec le mi lieu naturel La trame, comme nous l’avons vu avec la démarche urbanis tique nord-américaine, peut aussi être génératrice de formes et d’espaces. Ainsi, nous pouvons travailler les façons dont une trame anthropique orthonormée peut entrer en inte raction avec un milieu organique. C’est dans cette approche que nous avons émis des hypothèses de rencontres entre les différents éléments du milieu de la rivière et la trame. Nos différentes études (Fig.30 & 31) nous ont permis de com prendre que la trame peut disparaître, se décomposer ou se déformer pour laisser place au vivant. Nous pouvons aussi, grâce à la trame, hiérarchiser et faire évoluer nos rapports au site. En effet, tout en travaillant un seul et unique ensemble, nous pouvons développer des gradations et des rapports va riés aux sols, aux ruissellements, à la végétation, aux crues, au vent etc. Les repères que génèrent cette trame offrent une flexibilité et adaptabilité d’une démarche architecturale dans son milieu. Nous pouvons ainsi travailler des formes géomé triques et constantes dans un milieu irrégulier et

Fig.32 Schémas des différentes rencontres entre le milieu et la trame

déformationcréer des pleins

Fig.34 Organigramme

CHUTES DE BOIS ou petit bois

BOISTRITURATIONRESTRUCTURÉ

RECONSTRUCTIONBOISLAMELLÉBOISPÂTE(mobilier)PANNEAUXÀPAPIERD’ÉNERGIECOLLÉMASSIFDE Plan de l’implantation de la trame traversant les milieux - 1.5000e de l’utilisation des chutes de bois dans le milieu de l’industrie

Organigramme - utilisation des chutes de bois Fig.33

1. Implantation

2. Le programme Le programme de ce projet porte sur une École du bois qui aurait pour objectif de réunir des corps de métiers variés tout en utilisant le potentiel industriel et ouvrier de la ville. En effet, le Canada manque fortement de mains d’oeuvre et je souhai tais valoriser un apprentissage et enseignement transversal dans le supérieur. La rencontre d’ouvriers, d’artisans, d’ingé nieurs et d’étudiants permettrait de fonder ces enseigne

A travers ce projet, nous recherchons une cohérence dans la présence de l’humain sur un territoire naturel. Créer du lien entre la rivière et les industries par ce projet offrirait un discours nouveau, où la démarche anthropique ne se posi tionnerait pas en contraintes face aux éléments naturels. En effet, l’évolution du lit de la rivière suite à l’implantation des industries mais aussi le barrage à la naissance de celle-ci, démontrent d’une présence en contraintes ou en obstacles de l’homme face au mouvement de l’eau. L’intervention hu maine aurait donc pour objectif de nourrir le lien entre le tis su anthropique et sauvage. Afin de répondre avec cohérence aux enjeux et à la place de la rivière et de son écosystème à Lac-Mégantic, nous travaillerons avec le principe de trames développé précedemment. Par ailleurs, une intervention ponctuelle sur le territoire de la rivière permet de respecter les zones non accessibles de la rivière, de laisser la place à sa dimension sauvage et de la préserver. Nous pouvons ainsi offrir une ouverture sur le paysage de la rivière et un rapport à son écosystème sans pour autant le déséquilibrer. C’est pour ces raisons que le projet s’implante dans une zone du parc où la ripisylve n’est pas trop importante. Cela permet aus si d’avoir une proximité avec le milieu du parc industriel. La trame nous permet donc de définir la zone étudié afin de développer un projet cohérent et de faire évoluer le bâti en fonction des espaces et milieux.

.47 B. TISSER DU LIEN

.49 ments pluridisciplinaires. Par la rencontre, par le partage des savoir-faire et des connaissances, les étudiants seront ame nés à développer un statut intermédiaire entre ces différents corps de métiers. Ainsi, cette école s’ouvrirait sur le partage des savoirs, le faire et la pratique mais aussi questionnerait notre approche contemporaine à l’industrie. En effet, cette école développerait des pistes vers une écologie et une res ponsabilité économique de la production. L’utilisation circu laire du bois et des chutes (ou petit bois) serait favoriser afin d’éviter la perte et d’utiliser le matériau dans son entièreté. C’est dans cette démarche que le bois va être au coeur du projet. En effet, l’école proposerait donc de développer le cycle de vie du matériau. 3. Matérialisation de la trame - le bois D’autre part, le bois va venir créer du lien entre le milieu na turel, la pratique ouvrière et l’architecture proposée. En effet, dans ce projet, le bois permet de développer une structure tramée qui reprend l’adaptabilité et la flexibilité évoquées Laprécédemment.trameétudiée

peut devenir une trame construite. La structure en poteau-poutre est du lamellé-collé NordicLam, choisi pour ses performances environnementales et pour sa production québécoise. Cette structure permet d’offrir une flexibilité dans la taille des espaces et permet d’accueillir des façades rideaux vitrées ou ajourées. L’utilisation du lamel lé-collé est aussi intéressante puisqu’elle apporte une mise en oeuvre et un savoir-faire qui n’est pas propre aux indus tries de Lac-Mégantic. Ainsi, le projet offre la cohabitation du bois vivant avec le bois structurel. Il génère aussi, par le programme et l’architecture en elle-même, une opportunité pour les ouvriers d’être en contact direct avec le milieu et la matière qu’ils travaillent. Cela engendre un ensemble cohérent, où l’industrie pour rait reprendre conscience de ces ressources et du rapport humain que nous pouvons avoir à celles-ci. Enfin, nous savons que le bois a une importance dans la culture québécoise. Il est apprécié pour sa chaleur, son odeur et ses teintes qui génèrent des espaces de contemplation et d’apaisement.

C’est aussi un matériau chaud qui travailler bien avec la lumière froide du Canada. Nous chercherons donc à développer ces différents aspects au travers du projet. Fig.35 Utilisation du bois dans ses différents aspects - recherche d’une dimension massive

.51 Fig.36 Schéma des principes re cherchés dans le travail du projet suite aux analyses et à la mise en place des outils

.53 DURECHERCHELAÀPROJETUN FAIRELAISSERIII.

Coupe paysagère 1.2500e Rivière Ripislve

industrielleZone pavillonaireZone

.55

1. Un site à travers les milieux Comme nous avons pu le définir précédemment, l’implan tation du projet joue un rôle essentiel et stratégique dans la démarche de créer du lien entre deux milieux distincts. La rencontre entre la zone industrielle et le parc de la rivière Chaudière va se faire à travers un projet qui s’étire entre les milieux. Ainsi, la notion d’échelle prend une place impor tante dans l’inscription du bâti dans cet environnement. Une emprise au sol importante est nécessaire afin d’accueillir des espaces variés et de proposer un parcours. Le point d’entrée dans le projet se fait par les espaces de sociabilité avec une cantine et des grands ateliers. Ils se situent au sein du parc industriel et proposent un espace de restauration et de tra vail quotidien. Ils sont ainsi le premier point de rencontres entre les ouvriers, les étudiants et les autres corps de métiers autour du bois. Le projet pourra, par ses différentes interven tion, traverser la zone industrielle, le chemin de fer et la ri pisylve pour atteindre la rivière.

Fig.37 (Photo) Site, vue aérienne (haut) Fig.38 Coupe paysagèreà travers les milieux - 1.2500e

A. LE SITE

Fig.39 1.1000e-eauxdesécoulementsetflux-paysagèreCoupe Fig.40 projetdesitelesur180°Vue

.57 Ce point d’accroche permet de définir l’implantation du pro jet qui va s’étendre et s’ancrer dans l’environnement natu rel du parc de la rivière. L’implantation linéaire à travers une trame se positionne en un point du parcours pédestre ac tuel (Fig.40). Ainsi, nous respectons les zones non-accessibles de la rivière en laissant la place à la dimension sauvage et préservée de l’écosystème. L’approche du faire ensemble et du laisser faire entre l’artefact et la nature permet d’offrir des qualités d’espaces de vie dans le quotidien des ouvriers mais aussi d’ouvrir la rivière à l’expérience des méganticois. Ce tracé nous offre différentes rencontres à travers des milieux variés. Le sol, sa pente, sa composition et ses changements portent des enjeux pour le projet puisqu’ils vivent des varia tions importantes au cours des saisons. En effet, au Canada, le sol gèle en hiver et fond au printemps, il est aussi en géné ral très saturé à cette période de l’année ce qui engendre des instabilités et des mouvements de terrain. De plus, sachant que nous nous situons à proximité d’une rivière, les débits et crues peuvent fortement varier avec les saisons. Cela nous ramène bien aux variations et mouvements de sols, d’eau et du milieu avec lesquels nous travaillons pour ce projet. 2. La pente et l’écoulement Afin de s’implanter dans un terrain en mouvement où la pente et les écoulements d’eau sont présents, le projet va jouer dans ses rapport entre les eaux maitrisées et celles non maitrisées. Il réalise cela pour une mise en scène ou une mise à distance avec des états de l’eau. Tout d’abord, une suréléva tion du bâti sur pilotis permet de laisser une marge de liberté aux écoulements, ruissellements et flux d’eau. De ce fait, les eaux de pluie, les fontes de neige, les remontées de nappes et l’eau de la rivière peuvent circuler librement (Fig.39). Ce sont les toitures qui vont développer des mises en scène des eaux de pluie et de leurs ruissellements grâce à des plans inclinés, orientés vers des cours intérieures au bâti. Cela per met de créer des rideaux de pluie devant des façades vitrées.

La trame permet donc de définir les points d’accroche du bâti dans le milieu de la rivière. Traverser le sol et jouer sur la linéarité de l’architecture lui permettra de laisser place aux mouvements.

RECONSTRUCTIONBOISLAMELLÉBOISPÂTE(mobilier)PANNEAUXÀPAPIERD’ÉNERGIECOLLÉMASSIFDE pieux sur l’écoulement de l’eau Organigramme - utilisation des chutes de bois

CHUTES DE BOIS ou petit bois

BOISTRITURATIONRESTRUCTURÉ

.59 B. GÉOMÉTRIE ET

1.FLUIDITÉRévélerl’intangible

La structure en poteau poutre vient donc générer des trames dans plusieurs plans. Celles-ci vont interagir et rencontrer le vivant par différents phénomènes et éléments. C’est ainsi que nous trouvons à travers l’entièreté du projet des interstices. Ces espaces sont principalement les espaces de déambu lations extérieurs, les coursives et les cours intérieures. Nous avons dans ces espaces, notamment les cours, un rapport particulier à la nature et par une ouverture vers le ciel. Ces zones interstitielles permettent de recentrer le projet et le programme autour des zones de transitions qui sont aussi des zones de rencontres (des terrasses de travail, de restau rant, la cour intérieure d’une bibliothèque…). D’après Tadao Ando : « Ces zones cumulent une fonction sociale (réunir les gens, créer un lieu d’échange) et une fonction philo sophique (pousser l’homme à réfléchir sur la condition humaine). »

Fig.41 Schéma des écoulements en fonction de la forme des (haut)pieux

Fig.42 Représentation d’une première rencontre entre la trame construite et le milieu

La démarche architecturale de ce projet s’ancre dans la façon dont la géométrie architectonique peut venir révéler le non descriptible et l’intangible du naturel. L’outil de la trame et son utilisation dans un tel milieu, vont pouvoir être reques tionnés et redessinés par le naturel et le passage de l’eau. En référence à cette démarche nous nous appuyons sur le travail de Georges Descombes Laisser faire la rivière. Cet ouvrage nous apprend la façon dont une structure géométrique peut accompagner un élément naturel afin que celui-ci le module et le redessine constamment par son mouvement. L’artefact n’est donc plus figé, il accueille le mouvement, l’incertitude, la temporalité et devient une forme dynamique. Ainsi, la trame et la géométrie deviennent génératrices des possibles, elles révèlent, par la perturbation ce qui n’est plus visible. La mise en tension de l’organique par le géométrique fait réappa raitre une trace dissimulée dans un équilibre (Fig.41 & 42).

.61

« La cour est le noeud de toutes les activités existantes dans le projet; elle a pour fonction d’introduire dans le bâtiment les éléments naturels tels que la lumière, le vent et la pluie. Elle doit aussi permettre de sensibiliser les occupants à la nature ». Ainsi, la cour est un espace intermédiaire, à la limite entre intérieur et extérieur et où la porosité permet au projet de se définir comme élément ouvert au naturel. Les milieux, les rencontres, les enjeux structurels et les parcours vont ainsi dessiner des vides et interstices dans la trame du projet. Le plan (Fig.43) nous permet de comprendre comment cette trame va tendre à évoluer pour laisser place aux pleins et vides du projet. 2. Le corps et les usages Le mouvement est générateur de la rencontre entre l’artefact et le naturel. Il permet à l’un de révéler l’autre. Nous nous ancrons ainsi dans une démarche du faire et laisser faire. C’est de ce point de vue que le cheminement et la rencontre jouent une place essentielle dans le projet. Le corps, ses déplacements, ces rencontres avec autrui ou avec le milieu vont eux aussi interagir avec la trame initiale. En traversant des espaces nous tissons un ensemble, nous donnons une cohérence au projet en tant que programme unique. En sai sissant l’importance du cheminement et de la rencontre dans ce projet, il m’a ensuite semblé essentiel de traverser la rivière elle-même. Nous pouvons ainsi vivre l’experience de la rivière depuis son autre rive mais nous faisons aussi l’expérience du franchissement de cet élément naturel imposant. La proxi mité de la traversée nous permet aussi de nous familiariser avec la rivière. Cette approche reprend l’idée que le projet vient ouvrir la conscience des méganticois à l’espace de leur rivière. Par la visibilité et l’expérience, pouvons-nous dévelop per l’intérêt porté par les habitants à la Chaudière? Dans une évolution idéale, pouvons nous imaginer une appropriation ponctuelle des rives au cours des saisons? (La baignade, la pêche ou autres activités). Ce projet traverse donc deux éléments (de frontières) im portants dans la ville de Lac-Mégantic : les rails de train et la rivière. Les différents mouvments, le vivant et l’artefact per mettent de créer des franchissements qui ouvrent à la ren contre des milieux.

Fig.43 Plan d’une trame généra trice d’interstices et de parcours dans sa rencontre avec le milieu - 1.1000e

Ce projet se confronte et rencontre des éléments de Lac-Mé gantic qui peuvent aujourd’hui se positionner en tant que frontière dans la ville et dans le paysage. En développant des propositions de franchissement et de cohabitation le projet va introduire une approche nouvelle dans ses rapports au vi vant. La démarche de l’artefact vis-à-vis de la nature s’ancre dans une volonté de faire avec, faire ensemble et continuer ensemble. Les volontés contemporaines ne sont plus de s’écarter de la nature ou de la mettre à distance. Nous sou haitons la valoriser tout en lui laissant place. Comme nous l’avons évoquer au début de notre étude, le vivant, le sau vage, perdurent dans le temps et sont des repères fonda mentaux pour l’être humain. En requestionnant la pérénité de l’architecture, pouvons nous rechercher une continuité à travers ses rapports au vivant? Le projet d’une école du bois me semble d’autant plus intéressant dans le travail d’une ma tière dont nous pouvons vivre l’expérience. Cette conscience et relation au matériau permettrait à l’architecture de l’école d’évoluer avec le temps et les changements du milieu. Ap prendre à faire, à refaire, à reconstruire afin de ne pas cher cher à s’implanter intemporellement dans un site proposerait une nouvelle approche à la construction et à l’industrie. Ces idées nous ancre dans une volonté de cohabitation respec tueuse et harmonieuse du vivant et de l’artefact.

CONCLUSION

.63

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