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TOUT ce QUE JE SAIS DU tennis, JE LE dois À mon PÈRE.

propose les cuisines du restaurant. Allons-y. Carrelage monochrome et inox peigné, casseroles, couteaux et poêles à frire, le joueur continue sur sa lancée : il saisit les accessoires, hyper à l’aise, cheveux peignés en arrière, regard concerné, corps en mouvement. Le garçon est pressé, certes, mais on dirait bien que cet après-midi, il a envie de prendre le temps.

Depuis plusieurs années, Stéfanos Tsitsipás alimente une chaine YouTube de vidéos de voyage. On le voit, à travers le monde, sauter depuis des rochers, prendre l’hélicoptère, jouer de la raquette et marcher le long des sentiers. Il aime la photographie aussi et me dit avoir investi dans un matériel de très haute qualité, façon studio et touche professionnelle. L’image lui parle alors, et il parait absolument naturel qu’il se prête à une séance comme celle d’aujourd’hui. Quand on parle du tournoi à venir, le joueur grec semble légèrement soucieux. Peut-être est-ce cette pression particulière ? - celle du type qui a gagné deux fois de suite, qui sait que les statistiques s’escriment contre lui, tant il paraîtrait grandiose de s’imposer trois années de suite ici, au Rolex Monte-Carlo Masters.

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Depuis notre rencontre, Tséfanos a perdu en quart de nale 6-2 6-4 contre l’américain Taylor Fritz, lui-même battu par Andrey Rublev, vainqueur du tournoi le dimanche 16 avril contre Holger Rune.

Qu’importe, comme chaque année, la saison de la terrebattue ne fait que commencer. Comme il me l’expliquait, Tsitsipás aime particulièrement cette période de l’année. Le revêtement, le soleil, l’Europe, tout cela lui donne envie de jouer encore plus vite et encore plus fort. Il me dit se sentir d’attaque pour la saison, même s’il s’apprête à a ronter certains joueurs dont il admire le jeu, l’aisance et l’habileté.

Les dés n’ont pas l’air jetés, loin de là. La nouvelle génération des quinze meilleurs joueurs du monde se tourne autour depuis longtemps. Qui alors, va sortir du lot ? Tsitsipás n’a pas encore vingt-cinq ans, et déjà, il semble planer bien haut dans les classements. En 2017, il était le premier joueur grec à entrer dans le top 100. Depuis, il a joué la nale de RolandGarros en 2021, contre Novak Djokovic.

Je n’ai pas rencontré, ce jour-là, Apostolos, son père, son entraîneur surtout. Je sais qu’il n’est pas loin – il paraîtrait qu’il ne l’est jamais. A ce sujet, le joueur me lance une phrase qui tranche dé nitivement : « Tout ce que je sais du tennis, je le dois à mon père ». C’est peut-être aussi simple que cela alors : la liation comme une équipe qui mène à la victoire, un duo plus fort que tout le reste, et une obstination qui remonte à la plus tendre enfance.

Depuis quelques années, Stéfanos Tsitsipás vit ici, à Monaco. Il déclare rester attaché à sa Grèce natale, bien entendu, mais se sentir parfaitement à sa place ici, tant cette ville semble être tournée vers son sport.

La discussion s’achève bientôt. Avant de partir, le joueur tient à me parler de ses lectures. Les romans policiers et les manuels de développement personnel l’accompagnent sans cesse dans ses déplacements. Mais s’il y avait un roman à relire absolument et à garder toujours avec soi, pour Stéfanos, ce serait Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur – To Kill a Mockingbird en anglais, succès colossal et classique de genre. Paru en 1960, le bouquin met en scène un fait divers dans la Grande Dépression de l’Alabama ségrégationniste. C’est l’unique roman d’Harper Lee qui s’est ensuite retiré de la littérature. Espérons alors que Stéfanos Tsitsipás ne déclare pas forfait, lui aussi, après son ultime ascension. Il n’y a pas de raison, direz-vous. Oui, vous voyez juste, il n’y a pas de raison.

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