Le Suricate magazine - Vingt-sixième numéro

Page 48

Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts j’avais une copine qui venait de la région de Valenciennes. Mais effectivement, la première raison est le contexte socio-économique qui se prête bien aux drames sociaux. J’aurais eu moins d’intérêt à le situer en Corse, par exemple. L’autre raison, c’est pour le fait que ce soit plat. Ça aurait pu être en Belgique, d’ailleurs ! Les gens me parlent d’ailleurs de Charleroi, mais je leur laisse la paternité de cette réflexion. (rires) C’est le côté plat et le climat qui renforce la silhouette du parc. Ça lui donne un côté inquiétant et aussi un côté « mirage », fantomatique. A se demander s'il existe vraiment. Y a-t-il aussi la volonté d’inscrire l’histoire dans le réel en la situant géographiquement ? Bien sûr, c’était d’ailleurs hyper important de situer l’histoire dans un endroit précis, pour je puisse mélanger le réel et l’imaginaire.

pouvoir, mais leur force est d’être tous ensemble. Même si, suite à la fin tragique du tome 3, le rapport de force revient aux cadres. Pourquoi y a-t-il dans le comité d’administration des humains ? Parce qu’il y a des actionnaires : Zombillénium a ouvert son capital aux humains et donc c’est à la fois le diable qui possède les âmes et les humains qui possèdent les infrastructures. Les humains se comportent finalement comme des monstres. On réalise qu’ayant un pouvoir dans le parc, ils pourraient avoir des décisions plus humaines que le diable, mais, finalement, ils sont encore pires : ils veulent juste que le parc fonctionne et ramène de l’argent. Tout ça, dans le but de se poser la question : « mais qui sont les vrais monstres ? »

Quand je faisais mes repérages sur Google Earth, dans le Nord, j’ai pris un endroit avec beaucoup de champs où il n’y avait pas beaucoup de villes, pas loin de Douchy-les-mines. Mais là où je me suis un peu planté, c’est qu’en allant y faire des repérages photos, j’ai remarqué qu’en fait, ce n’était pas si plat que ça. Je suis même allé à l’endroit précis de Zombillénium et c’est un petit peu vallonné. C’est tout de même un Nord un peu fantasmé, un Nord tel que l’on se l’imagine.

J’en ai profité pour essayer des cadres plutôt cinématographiques, où on voit tout la ligne d’horizon, puis un gros plan sur la main, ensuite une vue d’en haut, etc. On pense au début que le héros sera Aton, puis Aurélien et on se rend vite compte que Gretchen prend une place très importante, qu’elle est le centre de beaucoup de sousintrigues,… Elle est un peu passée au second plan dans le tome 2 car il se centre un peu plus sur Francis et Sirius. Mais on la retrouve avec Aurélien dans le tome 3 et l’on comprend pourquoi ils sont là. C’est bien de faire mystères, mais, à un moment, il faut aussi commencer à révéler des trucs. Je suis fan de Lost, où on cultive les mystères sans pour autant donner toutes les réponses, mais cette lacune m’a poussé à me dire que, chez moi, tout devait être carré, que rien ne devait être laissé au hasard. Combien de temps faut-il pour concevoir un tome de la série ?

Pour en revenir à l’histoire même, j’ai l’impression que les monstres ayant une place importantes sont les zombies ; est-ce un monstre qui vous plaît particulièrement ou c’est par la force des choses qu’il est fort présent ?

En revenant sur la fin tragique du 3, et le personnage de la momie, est-ce que le premier tome avait été écrit avant d’imaginer des suites ? Car le running gag où elle veut partir dans le sud n’est pas exploité par la suite.

En fait, j’avais imaginé plusieurs catégories de monstres, et pour les implanter dans l’entreprise, j’ai imaginé que chaque catégorie correspondait à une catégorie professionnelle. C’est-à-dire les ouvriers étaient les zombies ; ensuite, les cadres sont plutôt des loupsgarous ; les dirigeants sont des vampires et le PDG, le diable. Les zombies étant la main-d’œuvre, les emplois précaires, ils sont donc plus nombreux. Seuls, ils ont moins de

J’ai trouvé ce dont je voulais parler en finissant le premier tiers du 1er tome. Les cinq ou six premières planches sont parues dans Spirou sans que je sache vraiment où je voulais aller. La première scène est importante pour planter le décor, mais, au niveau du récit, elle ne révèle rien de ce qu’il va se passer. C’était un peu un galop d’essai, car la seule expérience de BD que j’avais, c’était Péchés Mignons. Pour la première fois, je pouvais enfin faire une BD avec des longues cases.

48

Pour le premier, il m’a fallu 9 mois ; 11 pour le deuxième et le troisième. Ce dernier m’a demandé pas mal de boulot, car tout se passe au sein du parc. Les scènes se passant dans la campagne ou dans une voiture, sont moins galères à dessiner. Il y a ici pas mal de cases où il faut à chaque fois créer des bâtiments, des attractions. Pour la page 10, j’ai dû créer, pour la moindre case, un décor du parc d’attraction et une foule. Je pense aussi à toute la scène dans le roller coaster, qui va de la page 19 à la page 25 (Aurélien devient fou et est prêt à tuer tous les passagers d’un wagon, ndlr). La difficulté, ce sont les 16 passagers du wagon. J’ai trouvé des têtes, un peu au hasard, sur internet, et puis, je me suis imprimé une feuille avec les 16 têtes pour être sûr, à chaque fois, de les redessiner correctement. Il y a un côté un peu comédie à ce moment-là. Je voulais que les passagers ne soient pas seulement des victimes, mais prennent aussi part à l’action. Il y a une espèce de mini-théâtre au sein de ce roller coaster où ils commencent tous à discuter, s’engueuler, etc. Ce qui fait qu’Aurélien garde finalement son côté humain et décide de ne pas les tuer.


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.