Le Suricate magazine - Vingt-sixième numéro

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Le Suricate N° 26

mensuel

décembre 2013

Magazine À la une

Rencontre avec Arthur de Pins

Mais aussi...

Bruno Bittoun Adeline Blondieau Motorhead, le jeu

Fabian Le Castel L’imitateur belge revient avec nous sur son actualité mais aussi sur son parcours.



Sommaire

Ticketnet plante Fôte d’ortaugraf

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Scènes

p. 6 p. 7 p. 8 p. 9

Interview de Fabian Le Castel Rêve général Chronique d’une soirée festive Grève 60 Interview de Pierre Verjans Interview de Bruno Bittoun Interview d’Arthur de Pins

Cinéma Cartel Avant l’hiver Hunger Games La Marche Capitaine Phillips Je fais le mort Casse-tête chinois Free Birds Henri Belle et Sébastien En Solitaire / Eat sleep die A story of children / La Danza L’apprenti Père Noël/Touch of sin Lunchbox / Loulou Angélique / Like father like son Portrait Tom Hanks Actualités ciné Films sur l’espace

p. 10 p. 11 p. 12 p. 13 p. 14 p. 15 p. 16 p. 17 p. 18 p. 19 p. 20 p. 22 p. 23 p. 24

Musique Quand la gloire monte à la tête Bientôt un jeu Motorhead Scar the martyr Le nouveau Eminem Interview La maison Tellier Rencontre avec Tracer El Pistolero

p. 38 p. 40 p. 41 p. 42 p. 43 p. 44 p. 46

Littérature Interview d’Adeline Blondieau L’Ecosse de Peter May Y’a quoi dans le frigo ? Silo La haine des arbres... Agatha Christie, nouvelle édition Dans la nuit de Belfort 101 bières et whiskies L’avant-dernière chance/Sixtine Les fuyants/Le bois du rossignol Cédric / L’agent 212 Warm Up Gauguin

p. 50 p. 52 p. 53 p. 54 p. 55 p. 56 p. 57 p. 58 p. 59 p. 60 p. 61 p. 62 p. 63

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Suricate en novembre, Noël en décembre

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décembre 2013



Le terrier du Suricate Ticketnet plante, les réseaux sociaux chauffent Ce matin, la cohue et la débâcle sur le net pour obtenir des places pour le prochain concert de « The Reflektors » aux Halles de Schaerbeek, nom de code que le groupe canadien Arcade Fire a utilisé pour réaliser cette tournée de la manière la plus discrète possible. Ce qui était totalement prévisible avec un des groupes d’indie rock les plus en vue du moment, c’est que les 1500 places des Halles de Schaerbeek de même que l'unique date en Belgique n’allaient pas être suffisantes pour absorber tous les fans du Royaume. Malheureusement, la discrétion n’était plus de mise quand les réseaux sociaux se sont emparés de la nouvelle. En cause, l’une ou l’autre affiche déposée au hasard des salles de concert ( à l’AB par exemple). Les médias reprennent directement l’info sur leurs sites webs, tel est leur devoir après tout. Le service de billeterie en ligne ticketnet.be était chargé d’assurer les préventes à 10h. Comme des milliers d’internautes fans d’Arcade Fire, j’essaie de me frayer un chemin dès 9h55 et je rafraîchis constamment la page sur laquelle j’ai créé un compte pour l’occasion. 09h59: rien ne bouge 10h00: rien ne bouge 10h02: Premier lancement de la page d’attente; 16 minutes d’attente. Le temps de se faire un café en regardant fixement l’écran, je me demande s’il y aura encore des places dans 16 minutes.

Une publication du magazine

Le Suricate © http://www.lesuricate.org Directeur de la rédaction : Matthieu Matthys Rédacteur en chef : Loïc Smars Directeur section cinéma : Matthieu Matthys Directeur section littéraire : Loïc Smars Directeur section musicale : Christophe Pauly Directeur section théâtre : Baptiste Rol

10h18: Les 16 minutes d’attentes sont écoulées; le compteur à rebours affiche « moins de 5 minutes d’attente ». 10h22: La page se rafraîchit et… apparaît le message suivant Du fait d’un très grand nombre de connexions simultanées et afin de conserver la qualité de service sur les commandes en cours, nous ne pouvons malheureusement vous accueillir sur l’espace billetterie. Nous vous prions de vous connecter ultérieurement. Merci de votre compréhension. ticketnet.be est KO! Depuis 10h30 la page de ticketnet est en maintenance, on ne peut les appeler que via leur numéro 0900 40 850(0.50€ la minute) pour les plus persévérants et fortunés. La question serait de savoir s’ils ont réussi à vendre leurs billets, vu qu’il n’y a que des messages de protestation. Petit tour d’horizon sur Facebook et Twitter, les messages se multiplient. Plusieurs personnes sont arrivées jusqu’à la page de paiement avant de se voir exclues du site. Frustration et dégoût. Ticketnet a donc perdu beaucoup de crédit ce matin en ne mettant pas les moyens à disposition pour assurer une bonne gestion technique du réseau, une erreur majeure quand on travaille presque exclusivement sur le net.

Nicolas Bruwier

Edito Fôte d’ortograf Le plus difficile, à partir du moment où l’on maîtrise les techniques de mise en page, dans l’élaboration de notre magazine, ce sont les fautes d’orthographes. Un article rempli d’erreurs vulgaires ne sera que fort peu apprécié par le lecteur attentif. Dans Le Suricate Magazine, on essaye d’éviter au maximum d’en faire. Mais devant l’ampleur de notre tâche, on ne peut pas empêcher certains de se glisser dans nos pages ou sur le site web. Heureusement, vous êtes plusieurs à nous signaler les fautes présentes dans certains articles. J’aimerais aussi en profiter pour louer les performances et le travail harassant que produisent Pauline Vendola, Adeline Delabre et Maïté Dagnelie dans leurs relectures régulières. En général, les articles signalés comme comportant des erreurs, sont des articles qui, par manque de temps, ne sont pas passés par notre trio féminin. Certains journalistes se font relire par une tierce personne ou corrigent leurs collègues, on essaie en tout cas de toujours tout faire pour vous donner les copies les plus propres possibles. Mais l’erreur est humaine, surtout quand on produit autant d’articles chaque semaine. Si vous apercevez une faute, n’hésitez pas à nous contacter sur : webmaster@lesuricate.org !

Crédits Webmaster : Benjamin Mourlon Secrétaires de rédaction : Pauline Vendola, Maïté Dagnelie, Adeline Delabre Relation clientèle : redaction@lesuricate.org Régie publicitaire : pub@lesuricate.org

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L.S.

Ont collaboré à ce numéro : Marie-Laure Soetart, Shaheena Kassam, Quentin Geudens, Cynthia Tytgat, Inès Bourgeois, Margot Thibaut, Mathilde Schmit, Cécile Marx, Léopold Pasquier, Roxane de Quirini, Anaël Munsch, Olivier Eggermont, Laura Delbrassinne, Noelia Gonzalez, Maire-Ange Nunez

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Cinéma

Cartel, la déception signée Ridley Scott Avec Ridley Scott aux commandes et une pléthore de stars au casting, « Cartel » annonçait un grand film. Au final, c’est plutôt un sentiment d’incompréhension qui ressort de l’histoire.

©20th Century Fox

La critique

De foi de cinéphile, un film réalisé par Ridley Scott et mettant en scène Michael Fassbender, Javier Bardem, Brad Pitt, Pénélope Cruz et Cameron Diaz, cela a de quoi mettre l’eau à la bouche. Un casting de choc mené par un Michael Fassbender en pleine apogée de son art, le film idéal. Pourtant, la tâche s’avérait plus ardue qu’elle ne paraissait au départ pour Ridley Scott. Et pour cause, une histoire de trafic de drogue entre le Mexique et les Etats-Unis, on en voit à peu près toutes les deux semaines sur nos écrans, tous genres confondus. Dès lors, il fallait qu’il insuffle à son film une histoire de fond complexe et minutieusement travaillée afin de démarquer sa production d’une autre. Pour ce faire, il a fait appel à l’écrivain Cormac McCarthy pour en écrire le scénario. Un choix logique puisque l’octogénaire est l’auteur de romans à succès tels que No Country for Old Men (adapté en 2007 par les frères Coen) ou encore La Route (transposé à l’écran en 2009 par John Hillcoat). Deux histoires hors des sentiers battus

avec des personnages à la fois énigmatiques et charismatiques. Le décor était planté, nous nous attendions à devoir nous creuser les méninges. Le problème, c’est qu’à force de se creuser les méninges, nous avons fini par les enterrer. De fait, rien ne semble cohérent dans cette histoire. Plusieurs histoires s’entrecroisent nous installant une flopée de personnages tous très énigmatiques mais gravitant autour du sujet central peu attrayant : le trafic de drogue. Ce film choral où plusieurs destins s’entremêlent nous faisait plonger, par essence, dans un thriller psychologique. Pourtant, ce ne fût pas du tout le cas. Et pour cause, aucune théorie sous-jacente ne transpire de l’histoire et le parallélisme fait entre les différents protagonistes est pour le moins scabreux et poussif. Pour couronner le tout, on se surprend même à ne plus comprendre l’histoire, le comble de la vexation pour un cinéphile. Il ne faut pas se voiler la face, nous sommes ressortis de la salle avec un sentiment d’égarement. Notre frustration était d’autant plus grande qu’aucun message ne nous avait atteint, qu’aucune phrase ne nous avait heurté, qu’aucun instant ne nous avait charmé. L’impression gênante d’avoir assisté à une série de séquences sans lien entre elles et d’avoir subi une histoire insipide. Alors, bien entendu, une certaine intelligentsia cinématographique pourra y voir des plans réussis ou des missives voilées mais, de notre côté,

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nous n’y avons déploré qu’un désordre scénaristique et une légère pointe de nombrilisme dramaturgique. Même le casting censé nous faire rêver, nous a au final déçus. Michael Fassbender tire son épingle du jeu mais doit faire face à un duo Javier Bardem – Brad Pitt à la limite de la parodie et du pastiche. En résumé, Le Cartel est un film non abouti. Une coquille vide où l’on a voulu insérer de l’émotion et de la moralité, sans réel succès. Ridley Scott déçoit pour la troisième fois consécutive.

Matthieu Matthys Cartel

déjà à lʼaffiche

Le Cartel, ou The Counselor dans sa version originale, c’est l’histoire d’un avocat attiré par l’argent facile et le luxe qui va se voir entrainé dans une affaire de trafic de drogue entre le Mexique et les Etats-Unis. Mais voilà, alors que tout semblait bien se dérouler, la marchandise est détournée et l’homme sent que sa tête est mise à prix.

Thriller, Drame de Ridley Scott Avec Michael Fassbender, Cameron Diaz

La descente aux enfers d’un avocat pénal, attiré par l’excitation, le danger et l’argent facile du trafic de drogues à la frontière américanomexicaine. Il découvre qu’une décision trop vite prise peut le faire plonger dans une spirale infernale, aux conséquences fatales.


Avant l’hiver de Philippe Claudel Avec un casting des plus envieux, Philippe Claudel raconte la vie, ses amours, ses déboires et ses secrets. Juste avant l’hiver, quel bilan faire d’un passé aux multiples zones d’ombre ?

©Lumière

La critique

À partir du portrait d'un homme qui s’interroge sur son passé suite à un incident, Philippe Claudel (par ailleurs écrivain, Prix Renaudot pour Les Ames grises en 2003, et auteur de deux films) opère une étude de mœurs avec une grande maitrise émotionnelle et précision chirurgicale. En portraitiste avisé, ce cinéaste lorrain travaille les ambivalences et les dissonances, et se garde bien de laisser des zones d’ombre entre ses personnages. À la manière de Claude Sautet,. il dissèque avec acuité la complexité des sentiments, ausculte ses personnages à l’intime. Daniel Auteuil est choisi pour incarner celui qui va opérer un retour sur lui-même, juste avant l’hiver. Le comédien, très à l’aise dans le cinéma de l’implicite, incarne à merveille ce chirurgien frappé de mélancolie et aux prises avec ses doutes. Kristin Scott Thomas est également très convaincante en femme emprison-

née dans un malaise et dans une maison au confort feutré, malgré quelques passages un peu robotiques. Dans son univers bourgeois, il n’y a pas de place pour les éclats de voix et les passes d’armes. Beaucoup de silence, de nondits ; et jamais un mot de trop dans ce couple qui se liquéfie. Les spectateurs doivent eux-mêmes interpréter les nombreux dialogues elliptiques. Mais Avant l’hiver, c’est aussi l’histoire d’un trio. Gérard est inséparable du couple. Sans doute, le plus transparent de la bande. Son amitié indéfectible depuis 30 ans l’est – on le comprendra très vite - trop pour être honnête. La compagnie languissante et ambiguë de ce psychanalyste permet d’éclairer la complexité de Lucie et de dévoiler son secret. Leïla Bekhti, quant à elle, interprète tout en justesse le personnage énigmatique et troublant de Lou. La chanson Gentil coquelicot qu’elle chante à la fin du film est bouleversante. Mais la finesse psychologique des personnages n’enlève pas au film ses lenteurs. Le récit donne trop longtemps dans une histoire intimiste avant de frôler le thriller. Et le suspense sentimental qui s’en dégage nous échappe durant une bonne partie du film. Sans doute est-ce dû à la structure narrative qui évite une double narration pour nous mettre dans la peau de Paul et nous faire découvrir brutalement la vraie nature de sa relation avec Lou. Par ce procédé, nous sommes obligés

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de remonter tout le film dans notre tête. Avec un autre regard et une autre lumière, forcément. D’un automne solaire, on est passé à une baisse progressive de la luminosité avec des paysages brumeux étranges. Et même si, à la fin, Lucie et Paul se retrouvent en famille dans un semblant de happy end radieux, on dirait que l’hiver est tout proche et que quelque chose s’est gelé à jamais dans leurs rapports.

Marie-Laure Soetaert 27 novembre 2013

Voir à l’intérieur de la tête des gens, c’est le métier de Paul, neurologue. Passé maître en la matière, il a pourtant du mal à lire dans sa propre tête. Avec ses horaires de fous et la tension permanente inhérente à sa profession, Paul a traversé les années sans se poser de questions. Au seuil de la retraite, une jeune fille un peu intrusive, Lou, débarque dans sa vie en se faisant passer pour une ancienne patiente. Par une série de petits incidents, il va être contraint de s’arrêter et de reconsidérer le couple qu’il forme avec Lucie mais aussi son existence.

Avant lʼhiver Drame de Philippe Claudel Avec Daniel Auteuil, Kristin Scott Thomas, Leïla Bekhti

Paul est un neurochirurgien de soixante ans. Quand on est marié à Lucie, le bonheur ne connaît jamais d’ombre. Mais un jour, des bouquets de roses commencent à être livrés anonymement chez eux au moment même où Lou, une jeune fille de vingt ans, ne cesse de croiser le chemin de Paul.

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Hunger Games : L’embrasement Pour son deuxième volet, la saga Hunger Games a tenu ses promesses. Au menu, des décors somptueux, des costumes splendides et une histoire intéressante. Un show plus que bienvenu.

©BelgaFilms

La critique

Ce film est l’adaptation du deuxième tome de la trilogie littéraire du même nom. Il nous raconte le retour de Katniss et de son partenaire Peeta Mellark après leur victoire triomphante à l’édition des 74ème Hunger Games. Ayant remporté les jeux, la coutume veut qu’un an après leur retour, les vainqueurs soient à nouveau contraints de quitter leurs familles et leurs amis afin d’honorer la tournée célébrant leur victoire dans tous les districts. Mais au fil de leur périple à travers les différents districts, Katniss prend conscience de la colère qui emporte peu à peu le peuple. Malgré cette révolte sous-jacente, le Capitole, comparable à une grande organisation dictatoriale des temps modernes, détient toujours le pouvoir absolu sur l’ensemble des 12 districts, ce qui n'apaise en rien l’agitation des foules alors qu’au même moment, le Président Snow est en pleine préparation de la 75ème édition des Hunger Games qui elle, pourrait bien changer la vie à Panem à tout jamais... Il faut dire que la réussite de ce film repose en grande partie sur l’excellente

performance des acteurs et en particulier, celle de Jennifer Lawrence.

Gale Howthorne (Liam Hemsworth) qui ont aussi su nous émouvoir et nous bouleverser à travers leurs personnages. Une déception reste cependant. On aurait tendance à vouloir une fin plus explicite. Cette dernière peut, en effet, décevoir de par sa brièveté et sa simplicité. On ressent un arrêt brutal, un manque. On aurait souhaité en savoir plus. Mais malgré cette note négative, il n’en demeure pas moins que The Hunger Games reste une très belle réussite cinématographique qui mérite toute l’attention du public.

En effet, elle réussit à emporter le public tout au long du récit, tant par la force de caractère que par la sensibilité cachée du personnage qu’elle incarne à l’écran. Par ailleurs, on ne peut passer à côté de l’exploit du réalisateur de Hunger Games à pouvoir mêler le thème de la quête initiatique des adolescents au thème de la rébellion contre un pouvoir dictatorial établi et ce, d’une façon aussi poétique. Les effets spéciaux, quant à eux, sont à couper le souffle. Il faut dire que les créateurs du film n’ont pas lésiné sur les moyens ayant à leur disposition un budget de 130 millions de dollars. Mais ce sont les costumes somptueux on citera notamment la robe de mariée éblouissante de Katniss portée lors du show télévisé - qui sans conteste, sont les plus impressionnants et offrent un réel plaisir visuel aux spectateurs. Les décors, eux, participent à la magie du film et arrivent à faire oublier au spectateur qu’il se trouve dans une salle de cinéma en le faisant voyager à travers différents univers, tantôt dans celui de la misère et de la peur, tantôt dans celui du faste, de la luxure et de la grandeur. On retiendra également les rôles de Peeta Mellark (Josh Hutcherson), d’Effie Trinket (Elizabeth Banks) et de

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Shaheena Kassam 27 novembre 2013

Le deuxième chapitre de la saga Hunger Games, l’Embrasement, nous transporte à travers l’histoire émouvante de Katniss Everdeen, joué par la magnifique Jennifer Lawrence.

Hunger Games Lʼembrasement Drame, Action de Francis Lawrence Avec Jennifer Lawrence

Katniss est rentrée chez elle saine et sauve après avoir remporté les Hunger Games avec son partenaire Peeta Mellark. Puisqu’ils ont gagné, ils sont obligés de laisser une fois de plus leurs familles et leurs amis pour partir faire la Tournée de la victoire dans tous les districts. Au fil de son voyage, Katniss sent que la révolte gronde, mais le Capitole exerce toujours un contrôle absolu sur les districts tandis que le Président Snow prépare la 75e édition des Hunger Games.


La Marche de Nabil Ben Yadir Inspiré dans son intégralité d’une histoire vraie, La Marche relate l’initiative citoyenne d’un grand nombre d’individus défavorables à la politique raciste menée jusque-là en France.

©BelgaFilms

La critique

À leur arrivée, ils uniront plus de 100.000 personnes venues de tous horizons, iront à la rencontre du Président de la République, François Mitterand, et parviendront à mettre en place les ébauches d’une carte de séjour et de travail valable pour dix ans. Exactement trente ans après cette « Marche pour l'égalité et contre le racisme », surnommée très injustement et de manière très stigmatisante par les médias « Marche des beurs », Nabil Ben Yadir nous propose sa vision de cet événement notable avec son second long métrage intitulé très logiquement et sobrement, La Marche. Inspiré librement des événements de 1983, le réalisateur belge nous fait (re) vivre cette marche de l’intérieur, au travers de quelques personnages clefs, incarnés par un casting aussi éclectique que percutant à l’image de l’impeccable Olivier Gourmet (formule qui va finir par devenir un pléonasme) et de cet imperturbable tru-

blion qu’est Jamel Debbouze. Aux côtés de ces deux monstres de notoriété, marche une panoplie de jeunes comédiens d’horizons différents mais à l’avenir certain tels que Tewfik Jallab, Vincent Rottiers, Nader Boussandel (déjà présent dans le premier long métrage du réalisateur, Les Barons), Hafsia Herzi, M’Barek Belkouk ou encore Charlotte Le Bon. Il faut noter une certaine adresse dans la mise en récit, jonglant judicieusement entre instants de pure rigolade et événements plus sérieux, exercice nécessaire à rendre les choses moins dramatiques et assurer une réception plus digeste. Une réalisation assumée en pellicule, bercée par la mélodieuse bande son du compositeur Stephen Warbeck (Shakespeare in Love, Billy Elliot), et un engagement non dissimulé contre toute forme de racisme font de La Marche un film à l’atmosphère bien particulière comme on en voit plus, ou peu. Si les dialogues tombent toujours juste et ne plongent pas dans la facilité du pathos, il demeure cependant quelques dérapages qui auraient pu être évités comme certains excès ponctuels de « Debouzzeries », qui ont parfois tendances à exaspérer même si elles sont a priori intrinsèques à la nature du personnage interprété. La Marche, road movie au pied de la lettre, au-delà de ses quelques petites imperfections, nous enseigne une in-

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contestable leçon d’Histoire (et dans une moindre mesure, de cinéma) malheureusement toujours d’actualité en France … et ailleurs ! On lui souhaite, en tous les cas, une bonne route !

Quentin Geudens

27 novembre 2013

En 1983, dans une France en proie à l’intolérance et aux actes de violence raciale, trois jeunes adolescents et le curé des Minguettes lancent une grande Marche pacifique pour l’égalité et contre le racisme, de plus de 1000 km entre Marseille et Paris. Malgré les difficultés et les résistances rencontrées, leur mouvement va faire naître un véritable élan d’espoir à la manière de Gandhi et Martin Luther King.

La Marche Drame de Nabil Ben Yadir Avec Tewfik Jallab, Olivier Gourmet, Hefsia Herzi

En 1983, dans une France en proie à l’intolérance et aux actes de violence raciale, trois jeunes adolescents et le curé des Minguettes lancent une grande Marche pacifique pour l’égalité et contre le racisme, de plus de 1000 km entre Marseille et Paris. Malgré les difficultés et les résistances rencontrées, leur mouvement va faire naître un véritable élan d’espoir à la manière de Gandhi et Martin Luther King.

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Capitaine Phillips de Paul Greengrass La piraterie au large des côtes somaliennes secoua l’actualité pendant de nombreux mois. Mais qu’en était-il vraiment sur place ? Que se passait-il sur ces bateaux abordés illégalement ?

©Sony Pictures

La critique

Encore un énième film basé sur une histoire vraie me direz-vous. Un bateau, des rebelles armés, une prise d’otages et forcément des Américains… Quoi de plus classique ! Dé-

trompez-vous. Une fois de plus, Paul Greengrass a su nous surprendre et nous faire plonger la tête la première dans son nouveau long métrage. Il analyse avec intelligence les différents niveaux de la prise d’assaut de 2009. On découvre un film tendu où l’on ne respire pas une seule seconde. Pas de flottement, pas de blanc, pas un seul moment de répit. Bref, tout ce que l’on aime retrouver au cinéma ! Rares sont les films qui peuvent apporter une telle intensité sans discontinuité. Le spectateur est complètement happé par l’histoire. Avec son souci de réalisme, on reconnaît bien là la marque de fabrique du réalisateur au style nerveux. Ce n’est pas simplement un film d’action, mais aussi une véritable aventure humaine. La relation complexe entre le Capitaine Phillips et les Somaliens, notamment Muse, est brillamment présentée. Il n’y pas vraiment de bons ni de méchants, pas de héros non plus; mais des hommes pris dans une toile tissée par les multiples effets de la mondialisation. Le réalisateur a confié le rôle du Capitaine à Tom Hanks. Un choix très judicieux ! L’acteur américain est tout simplement au sommet de son art. Il se glisse si bien dans la peau du personnage qu’il s’efface totalement derrière le Capitaine Phillips. Celui-ci s’avère courageux, persévérant, astucieux mais surtout humain. Les dernières minutes du film sont d’ailleurs à souligner par leur authenticité. Entre tristesse et soulagement, le Capitaine nous serre le cœur et nous arrache des lar-

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mes par sa vulnérabilité révélée sans pudeur. En résumé, Captain Phillips est un nouveau thriller sous haute tension qui fait la part belle au côté humain. Le casting est réussi. Le film nous prouve une fois de plus le talent de caméléon de Tom Hanks et nous offre également une belle découverte avec Barkahd Abdi et Faysal Ahmed (Najee), les principaux acteurs somaliens. Intelligent et puissant, ce long métrage fait réfléchir en nous faisant passer par une palette de sentiments. Le genre de réalisation que l’on aimerait retrouver plus souvent dans les salles obscures.

Cynthia Tytgat 4 décembre 2013

Après avoir réalisé le thriller Green Zone et dirigé deux épisodes de la saga Jason Bourne, Paul Greengrass nous présente Captain Phillips. Une histoire vraie de piraterie qui ne laisse personne indemne, pas même le spectateur… Incarné par Tom Hanks (Cloud Atlas), Richard Phillips est capitaine d’un navire de la marine marchande américaine chargé d’une mission de transport au large des côtes africaines. Celui-ci est alors pris en otage avec son équipage par des pirates somaliens. Cette adaptation cinématographique des faits survenus en 2009, nous plonge dans l’histoire tragique de l’attaque subie par l’équipage du Maersk Alabama au large des côtes somaliennes. Au cours de cette course poursuite, on suit étroitement la relation entre le Capitaine Phillips et Muse (Barkhad Abdi), chef des pirates somaliens. Ils sont à la fois victimes et protagonistes dans un monde où les forces économiques et les enjeux internationaux règnent en maître. Face à une série d’épreuves, chaque personnage dépassera ses limites dans le seul but de survivre… Un film intense basé sur le livre A Captain’s Duty : Somali Pirates, Navy SEALs and Dangerous Days at Sea de Richard Phillips luimême et Stephan Talty.

Capitaine Phillips Thriller, Drame de Paul Greengrass Avec Tom Hanks

Capitaine Phillips retrace l’histoire vraie de la prise d’otages du navire de marine marchande américain Maersk Alabama, menée en 2009 par des pirates somaliens. La relation qui s’instaure entre le capitaine Richard Phillips, commandant du bateau, et Muse, le chef des pirates somaliens qui le prend en otage, est au cœur du récit. Les deux hommes sont inévitablement amenés à s’affronter lorsque Muse et son équipe s’attaquent au navire désarmé de Phillips.


Je fais le mort de Jean-Paul Salomé Après vingt années de carrière, Jean-Paul Salomé continue sur sa lancée après « Les femmes de l’ombre » et « Le caméléon ». Pour cette fois, comédie légère mais efficace au programme.

©Lumière

La critique

Jean-Paul Salomé (les Femmes de l’ombre, Arsène Lupin) s’est inspiré d’une histoire similaire lue dans le journal pour construire les fondations de sa comédie romantico-policière. Celle-ci reprend bien le cahier des charges du genre et se consomme évidemment au second degré. C’est dans la très huppée station de ski de Megève que le réalisateur a décidé de camper son intrigue, dans une ambiance décalée d’avant-saison. François Damiens, monstre de drôlerie, incarne à merveille l’anti-héros qui

ne peut que remonter la pente. Il y fait montre de toute sa puissance comique et confirme son talent de film en film. Le duo qu’il forme avec la juge d’instruction inexpérimentée (Géraldine Nakache) détonne. En mettant le doigt sur les vices de procédure et les erreurs dans l’enquête, le protagoniste comédien ne se contente pas de jouer le macchabée. Ses intuitions incessantes et son expérience d’acteur de seconde zone dans des séries policières ont vite fait de porter sur les nerfs de la jeune juge en charge de l’affaire. Entre les deux, la relation est survoltée mais, comme souvent ce qui est électrique s’attire, la romance finira par se pointer. Les seconds rôles (notamment Lucien Jean-Baptiste en policier et Anne Le Ny en hôtelière) sont également pertinents. L’humour pratiqué ici est proche du burlesque Slapstick (comique de gestes). Pourtant, la force du versant comique réside surtout dans la parodie des manies et prétentions collées à la profession de comédien. Jean Renault, en perdant magnifique et naïf, cherche désespérément des « personnages à défendre » et des rôles avec texte. Avant de faire le figurant comme cadavre à la piscine, il s’enquiert, avec une pointe d’inquiétude, auprès de l’inspecteur (Lucien Jean-Baptiste) « au fait, au niveau HMC, quelque chose est prévu ? » Le flic ne comprend pas et demande des éclaircissements. « Ben oui, au niveau Habillement, Maquillage, Coiffure… ».

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Salomé distille également quelques clins d’œil cinématographiques ironiques (entre autres Basic Instinct et Gotham city). Je fais le mort slalome habilement entre les genres. Les réparties corrosives fusent comme des boules de neige. Sans atteindre des sommets, le film est, néanmoins, drôle et inventif. Il explore à un bon rythme les pistes de l’enquête au second degré. Une comédie vive et divertissante pour se mettre en condition avant la saison neige.

Marie-Laure Soetaert 11 décembre 2013

Depuis l’obtention du César jeune talent pour le fils du garagiste en 1988, on ne peut pas dire que la carrière du comédien Jean Renault ait un jour vraiment décollé. Contrairement à son confrère homophone, Jean Reno, acteur auquel il lui est pénible d’être sans cesse comparé, il court le cachet. C’est qu’avec ses idées bien carrées, cet emmerdeur de première catégorie a fini par se mettre tout le monde à dos lors des tournages. Résultat : il tourne en rond, voire à vide. Encore plus grave : il ne tourne plus du tout ! Divorcé, la quarantaine, il s’est même vu contraint de faire une pub pour un médicament anti-constipation afin de boucler ses fins de mois difficiles. Au pôle Emploi, on constate qu’il lui manque sept cachets pour renouveler ses indemnités. Sa conseillère finit donc par lui proposer un job un peu particulier : jouer le mort dans des reconstitutions de scènes de crime pour la justice.

Je fais le mort Policier, Comédie de Jean-Paul Salomé Avec François Damiens, Géraldine Nakache

À 40 ans, Jean, comédien, est dans le creux de la vague… Il court le cachet sans succès. Au pôle Emploi Spectacle, sa conseillère lui propose un job un peu particulier : prendre la place du mort pour permettre à la justice de reconstituer les scènes de crime. Son obsession du détail bluffe les enquêteurs et va permettre à Jean de revenir sur le devant de la scène dans une affaire délicate à Megève, hors saison, suite à une série de meurtres…

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Casse-tête chinois de Cédric Klapisch Onze années se sont écoulées depuis le succès populaire de « L’Auberge Espagnole ». Après «Les Poupées Russes », le cinéaste ferme la boucle avec un troisième et dernier volet.

©Cinéart

La critique

Divorcé de Wendy, Xavier débarque à New York pour continuer à partager la vie de ses enfants ayant quittés la France avec leur mère. Dans cette grande métropole, il cherche sa place en tant qu’homme mais aussi en tant que père. On y retrouve également Isabelle qui vit avec sa nouvelle « girlfriend » new yorkaise. Isabelle est enceinte et le père biologique n'est autre que... Xavier ! C’est ensuite Martine qui va débarquer sur le continent américain pour un rendez-vous professionnel important. Une fois de plus ça va partir dans tous les sens ! Xavier devra résoudre le véritable casse-tête chinois qu’est sa vie… Comme l’expression le dit si bien, on prend les mêmes et on recommence ! Pourquoi changer une formule ga-

gnante ? Dans Casse-tête Chinois, on retrouve tous les éléments pimentés des deux premiers volets. Situations improbables, destins entrecroisés, narration folle et imagée, ce cocktail est toujours présent pour notre plus grand plaisir. Mais, c’est une lame à double tranchant ! Pour ceux qui ont vu les deux premiers films de la trilogie, certains passages provoquent un sentiment de déjà vu. On a nettement l’impression que le réalisateur ne parvient plus à réinventer ou du moins innover ses personnages. Il exploite, ou plutôt surexploite, les acquis de cette formule gagnante. Il semble d’ailleurs qu’il soit tombé à court d’idées en deuxième partie de film, riche en longueurs... Malgré ce point négatif, le film garde un ton original fidèle aux deux précédents. On adore les différentes interventions aussi loufoques que drôles dans le récit. Des philosophes du passé, notamment, surgissent pour aider et conseiller Xavier dans ses moments de solitude et de doutes. Question images, on est loin des stéréotypes classiques de cartes postales ! La façon de filmer la Grosse Pomme est pertinente. On sort complètement des clichés cinématographiques new yorkais. Il est clair que Klapisch connaît bien cette grande ville dont il en montre les coins et recoins moins connus. Le jeu des acteurs séduit immédiatement, chacun s’efface derrière son personnage. Une nouvelle fois, ils se glissent à merveille dans la peau des

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protagonistes ! Energiques, touchants, vulnérables mais surtout humains, on est heureux de retrouver cette bande de dingues joués avec justesse par des comédiens remarquables. Voyages, divorce, famille recomposée, homoparentalité́, immigration, travail clandestin, bref le nouveau long métrage de Cédric Kalpisch nous embarque sans hésitation dans une nouvelle histoire compliquée. Mais on adore ça et on en redemande ! Entre humour et sentiments, cette fresque nous prouve que la sagesse ne vient pas toujours avec l’âge…

Cynthia Tytgat 11 décembre 2013

Onze ans après L'Auberge Espagnole et huit ans après Les Poupées Russes, Cédric Klapisch nous offre le dernier volet de la trilogie avec Casse-tête Chinois. Un regard indulgent et amusé sur la génération des quadras où illusions perdues, erreurs en tout genre et recherche du bonheur sont mis en avant. Cette fois-ci, c'est à New York que se retrouve la joyeuse bande d’amis de l’Auberge Espagnole ! Xavier (Romain Duris), Wendy (Kelly Reilly), Isabelle (Cécile de France) et Martine (Audrey Tautou), quasi quarantenaires, rempilent pour ce troisième épisode. Ils nous entrainent encore une fois dans leurs histoires pour le moins compliquées.

Casse-tête chinois Romance, Comédie de Cédric Klapisch Avec Romain Duris

Xavier a maintenant 40 ans. On le retrouve avec Wendy, Isabelle et Martine quinze ans après L’Auberge Espagnole et dix ans après Les Poupées russes. La vie de Xavier ne s’est pas forcément rangée et tout semble même devenir de plus en plus compliqué. Désormais père de deux enfants, son virus du voyage l’entraîne cette fois à New York, au beau milieu de Chinatown.


Free Birds de Jimmy Hayward Rôdé à l’animation sur des films tels que « Toy Story » ou « Monstres et Cie », Jimmy Hayward se tente à nouveau à la réalisation après l’échec cuisant de « Jonah Hex ». Et c’est une réussite.

©A-Film

La critique

Reggie (Owen Wilson) est une dinde différente des autres. Il est plus intelligent et détient une information importante : les dindes sont élevées par les humains pour être mangées. Rejeté par les siens, il se voit gracié par le président des États-Unis dans le cadre des cérémonies de Thanksgiving. Transporté à Camp David, il mène une existence paisible à regarder la télé et à manger de la pizza. Sauf qu’un soir, il croise le chemin de Jake (Woody Harrelson), membre du Front de libération des dindes. D’après Jake, le grand dindon leur aurait confié une mission des plus importantes. Ils doivent remonter dans le temps jusqu’à la célébration du premier Thanksgiving et empêcher que l’on serve de la dinde comme repas. Arrivés au 17e siècle, les deux héros font la connaissance d’un clan de dindes dont fait partie la belle Jenny (Amy Poehler). Quand on voit l’affiche, on s’attend à un énième film d’animation rimant le plus souvent avec comédie et caricatures. Normal, après Shrek, Up et autres Despicable Me ou Madagascar, on s’attend à un moment de rigolade

rempli de gags. Et c’est le cas ! Sauf qu’ici l’histoire est plutôt originale voire complètement décalée. Mais c’est ce qui fait la particularité du film. Free Birds s’inscrit clairement sur la longue liste des comédies familiales mais, c’est son originalité qui marque en premier. L’humour n’en est pas moins présent, bien au contraire ! Le taux de blagues à la minute est plus élevé que dans la plupart des films d’animation ! Les adultes s'amusent presque autant que les plus jeunes, même si l’humour reste la plupart du temps du premier degré. L'humour étant son point fort, il devient son point faible dans la deuxième partie du film, accumulant les blagues maladroites et les répétitions complètement superflues. Dommage que ce film présente également quelques longueurs dans cette deuxième moitié d’histoire. Se distinguant par son originalité, Free Birds marque aussi par le message qu’il véhicule. Comme dans le film d’animation Rio de Carlos Saldanha, l’histoire met en avant certaines dérives de l’être humain vis-à-vis du monde animal. Dans Free Birds, le scénario se permet de traiter en surface l'élevage abusif de volaille. Il tente également d'éduquer sur cet aspect de la consommation dans notre société, ce qui est remarquable. Certains spectateurs, jeunes ou moins jeunes, viendront peut-être à se poser des questions sur le sort des pauvres dindons et

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autres volailles et n’auront plus la même vision de la dinde... Pour résumé, Free Birds est une comédie familiale efficace sortant des sentiers battus. Les personnages, drôles parfois caricaturaux mais attachants, vous feront passer un agréable moment. Le film ne deviendra probablement pas un classique des films d’animation comme Shrek, mais il mérite sa place sur la liste des bons films à voir.

Cynthia Tytgat 11 décembre 2013

Deux dindes qui tentent d’épargner à leur espèce de devenir le plat principal de Thanksgiving, en voyageant dans le temps dans une machine futuriste appelée S.T.E.V.E, c'est plutôt extravagant et pourtant… génial ! Réalisé par Jimmy Hayward, Free Birds va vous entrainer dans une folle aventure originale.

Free Birds Animation de Jimmy Hayward

Deux dindes de milieux opposés doivent faire équipe pour remonter le temps et changer le cours de l'histoire : enlever la dinde des menus pour de bon !

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Henri de Yolande Moreau Présenté lors de la Quinzaine des réalisateurs au dernier festival de Cannes, Henri est le nouveau long métrage de la réalisatrice belge Yolande Moreau. Un film attendu par tous.

©Arnaud Borrel

La critique

Rosette est résidente d’un centre où cohabitent d’autres personnes handicapées, parfois plus lourdement qu’elle : les « Papillons blancs ». Elle rêve de normalité relationnelle et de bébé dans son monde bien à elle, teinté de naïveté. Pour noyer son désarroi, Henri, quant à lui, ne songe qu’à boire ses bières en compagnie de ses amis Bibi et René, des piliers de comptoir. Il s’occupe aussi de ses pigeons voyageurs dont il prend soin avec amour. Ce colombophile, autrefois coureur cycliste, va s’attacher à cette jeune fille hors du commun. Ils vont parcourir un bout de chemin ensemble pour reprendre ensuite le cours de leurs vies, enrichis et redynamisés par leur rencontre. Yolande Moreau signe ici son deuxième long métrage ; présenté à Cannes pour clôturer le festival, il fût accueilli avec ovation par le public. Ce qui frappe le plus, c’est le réalisme de ce long métrage. On se retrouve

baigné dans une ambiance assez accablante où se mélangent l’alcool, la solitude, la tristesse, le handicap. On s’y sent parfois mal à l’aise dans certaines scènes, peut-être trop réalistes justement.

interprétés par les comédiens de la Compagnie de l'Oiseau-Mouche, un Centre d'Aide par le Travail artistique situé à Roubaix dont on peut saluer la prestation. Si la réalisatrice belge estime que son film est plutôt "tragi-comique", on ne voit pas vraiment où se trouve le comique dans ce long métrage aux couleurs plutôt sombres, saturé d’humanité et de justesse : c’est l’histoire de deux estropiés de la vie qui trouvent leur alter ego. Un film qui plaira beaucoup à certains et pas du tout à d’autres. Pas de milieu ici. Inès Bourgeois

Ce n’est pas un film « qui fait rêver » mais plutôt un film « sincère » : celui d’une fresque sociale qui dépeint avec authenticité des gens de conditions modestes vivant dans le Borinage. Le décor du film fait véritablement corps, au sens propre et figuré, avec le scénario de ce long métrage. Film d’atmosphère, on se perd malgré tout parfois un peu : on y traite du veuvage ? Du handicap ? De la solitude ? De l’alcoolisme ? Tous ces sujets emplissent le film du début jusqu’à la fin. Dérangeant ? Oui, parfois. Le réalisme dont on a parlé plus haut ne fait que donner du poids au scénario imaginé par la réalisatrice. Henri est incarné par Pippo Delbono, comédien et metteur en scène de théâtre italien ; il tient son rôle de façon magistrale. Quant à la prestation de l’actrice Candy Ming alias Rosette, artiste souffrant d’autisme : rien à dire, elle est parfaite. Menés par Yolande Moreau, ces deux acteurs sont touchants et remplis d’une tendresse toute naturelle. Les pensionnaires de l'institution de personnes handicapées mentales sont

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11 décembre 2013

Henri nous raconte la rencontre entre deux solitudes : celle de Rosette, légèrement handicapée mentale et celle d’Henri, tenancier d’un petit café-restaurant à Charleroi et d’origine italienne. Récemment devenu veuf, Rosette vient l’aider à tenir son commerce. Ensemble, ils vont en quelque sorte s’apprivoiser et rompre l’isolement social dans lequel ils se trouvent tous les deux.

Henri Comédie dramatique de Yolande Moreau Avec Pippo Delbono, Miss Ming, Jackie Berroyer

Henri, la cinquantaine, d’origine italienne, tient avec sa femme Rita un petit restaurant près de Charleroi, "La Cantina". Une fois les clients partis, Henri retrouve ses copains, Bibi et René, des piliers de comptoirs ; ensemble ils tuent le temps devant quelques bières en partageant leur passion commune, les pigeons voyageurs. Rita meurt subitement, laissant Henri désemparé.


Belle et Sébastien de Nicolas Vanier Trois années après le décès de Cécile Aubry, auteure et réalisatrice de la série à succès de l’ORTF, Nicolas Vanier s’attaque à nouveau à l’histoire de « Belle et Sébastien ».

©BelgaFilms

La critique

Si l’histoire originelle se déroulait dans les années 60, le réalisateur Nicolas Vanier (Le Dernier Trappeur, Loup, L’Enfant des neiges) a explicitement requis que l’histoire soit transposée dans un contexte de Seconde Guerre mondiale, et plus précisément, en 1943. Une requête que l’explorateur français explique : "C’était un partipris esthétique car je ne voulais pas montrer la montagne telle qu’elle est devenue aujourd’hui (...) [Cela] m’a permis de renouer avec une dimension essentielle de la série : l’aventure, le voyage et la notion de passage. La guerre et la fuite des Juifs vers la Suisse s’inscrivaient parfaitement dans cette continuité." Les générations qui ont vécu les diffusions, les rediffusions et les rerediffusions du feuilleton et de ses suites (Sébastien parmi les hommes et Sébastien et la Mary-Morgane) trouveront sans nul doute une belle dose de nostalgie dans Belle et Sébastien. Notamment via les quelques clins

d’œil explicites tels que la présence au générique de Medhi El Glaoui, fils de Cécile Aubry, et surtout, interprète du Sébastien des premières heures, ou encore la réinterprétation sur la bande originale par Zaz des titres Belle et L’oiseau qui ont accompagné le succès de Belle et Sébastien à l’époque.

Margaux Chatelier, même empli de larmes superficielles, ne suffit pas à tromper le spectateur.

Malheureusement, l’explorateur et réalisateur français s’embourbe d’emblée dans un récit obsolète et arythmique, tentant malgré lui de ravir le spectateur à l’aide de multiples plans contemplatifs et artificiels. Les producteurs de Gaumont, qui ont explicitement demandé à Vanier de prendre le projet en main, ont probablement oublié de lui instruire la dichotomie évidente entre un film de fiction et un film documentaire.

Quentin Geudens

Se croyant en effet aux commandes d’un documentaire sur la faune et la flore montagnarde française, Nicolas Vanier se rend coupable d’une piètre direction d’acteurs et manque totalement de justesse au niveau de l’écriture du scénario et des dialogues, exécrables et improbables qui sonnent faux. Conséquence inéluctable : le pauvre Félix Bossuet, jeune interprète de Sébastien, pour sa première apparition à l’écran, ne parvient pas à fournir le panel d’émotions nécessaire malgré un talent intrinsèque évident mais mal exploité. Tchéky Karyo n’est d’ailleurs pas en reste non plus et le joli faciès de

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Bref, une adaptation qui manque de chien, tenue en laisse par un réalisateur en panne d’inspiration et de flair.

18 décembre 2013

Après les romans, les feuilletons télévisés, la série d’animation japonaise et des années de silence, Sébastien et sa Belle nous reviennent sur grand écran. Belle et Sébastien, cru 2013, est adapté directement de la série télévisée culte de 1965 réalisée par Cécile Aubry, déjà auteure des romans, et raconte l’histoire de l’amitié naissante entre Sébastien, un petit montagnard de 6 ans, et de la chienne abandonnée, Belle.

Belle et Sébastien Familial de Nicolas Vanier Avec Tcheky Karyo

Ça se passe là-haut, dans les Alpes. Ça se passe là où la neige est immaculée, là où les chamois coursent les marmottes, là où les sommets tutoient les nuages. Ça se passe dans un village paisible jusqu'à l'arrivée des Allemands. C'est la rencontre d'un enfant solitaire et d'un chien sauvage. C'est l'histoire de Sébastien qui apprivoise Belle. C'est l'aventure d'une amitié indéfectible.

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Yann Kermadec voit son rêve se réaliser lorsqu’il remplace au pied levé son ami Franck Drevil, au départ du Vendée Globe, le tour du monde à la voile en solitaire. Habité par une farouche volonté de gagner, alors qu’il est en pleine course, la découverte à son bord d’un jeune passager va tout remettre en cause…

En Solitaire de Christophe Offenstein déjà à lʼaffiche Drame (96ʼ) Avec François Cluzet, Samy Seghir, Virginie Efira, Guillaume Canet

Christophe Offenstein, surtout connu pour ses qualités de directeur de la photographie, notamment sous les directives de Guillaume Canet (entre autres pour Les Petits Mouchoirs et Ne le dis à personne) et Jean-Paul Rouve (pour Quand je serai petit et Sans Arme Ni Haine Ni Violence), se retrouve à la barre de ce voyage très atypique dans lequel nous immerge En Solitaire. Canet et Rouve font d’ailleurs partie de l’aventure, aux côtés de Virginie Efira (Dead Man Talking, Le Siffleur), François Cluzet (Intouchables, Ne le dis à personne) et du jeune Samy Seghir (Les Petits Princes, Neuilly sa mère !). Une distribution a priori de qualité sur papier mais qui ne tient jamais ses promesses, à l’image de la comédienne belge qui tente tant bien que mal de mettre en

« Je voulais faire un film sur ces personnes que j’ai toujours aimé mais dont j’avais honte de faire partie ». Pour son premier long métrage, Gabriela Pichler (née de parents bosniaques et australiens dans la banlieue de Stockholm avant de déménager en province) nous livre un très joli film sur l’espoir. L’espoir et la foi en la vie, même aux travers des coups durs.

Eat Sleep Die de Gabriela Pichler déjà à lʼaffiche Drame (104ʼ) Avec Nermina Lukac, Milan Dragisi, Jonathan Lampinen

Le film nous raconte l’histoire d’une jeune fille pleine de vie d’origine musulmane et suédoise, Raša, qui se retrouve à la porte de l’usine dans laquelle elle travaillait depuis toujours. Sans diplôme et sans permis de conduire, elle arpente dans ses bottes pleines de boue et sans jamais se décourager, les rues de la petite ville dans laquelle elle a grandi. Si le sujet – la précarité – n’est pas un sujet facile, Gabriela Pichler le traite ici d’une façon décomplexée, avec optimisme et humour. Une certaine absence de retenue est montrée dès les premières scènes du film : Raša dans une fête entre potes. Une fête où ils n’ont pas

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valeur des dialogues frisant le ridicule et le pathétique, énoncés par des personnages sans saveur et remplis de clichés. Outre les énormes soucis de continuité et un sens de la dramatisation inexistant (eh oui, poser une caméra sur la proue d’un bateau ne suffit pas à raconter une histoire), le récit s’avère au final sans queue ni tête, sans véritable diégèse pour ce qui aurait pu (dû ?) devenir une véritable histoire poignante entre deux personnages que tout oppose. Avec l’omniprésence à l’image de ses logos et autres acronymes (voire même l’adresse internet !), c’est finalement l’entreprise DCNS (spécialiste français de l’armement naval) qui ressort grand vainqueur de En Solitaire, véritable publicité audiovisuelle de 96 minutes. Un incontestable naufrage cinématographique.

Quentin Geudens peur de se dire des vacheries entre eux, sachant pertinemment que c’est amical. Même si tout le reste du film ne sera pas aussi joyeux que cette première scène et que quelques moments dramatiques surviennent, c’est l’optimisme qui prime dans ce premier long métrage. Les acteurs sont bien choisis, surtout le personnage de Raša campé par la jeune suédoise Nermina Lukac. Elle nous livre ici une interprétation d’autant plus impressionnante pour une actrice amateur, celle d’un personnage féminin qui a beaucoup à faire et à supporter dans sa recherche d’emploi dans un système qui ne lui convient pas : celui du chômage. On se retrouve au final confronté à un film qui nous montre que, même dans les moments difficiles, il faut savoir garder la foi. Ceci dit, la musique manque terriblement à ce film… Si elle est présente du début à la fin, on aurait aimé qu’elle soit toujours aussi adaptée et entrainante que lors de la première scène.

Margot Thibaut


L’enfance est un thème récurrent des films de Mark Cousins. Ce réalisateur irlandais signe avec A Story of Children and Film un documentaire intellectuel et poétique à voir et à revoir.

A story of children & film de Mark Cousins déjà à lʼaffiche Documentaire (101ʼ)

Les premières images montrent des visages d’enfants en gros plan. Qui sont-ils ? On le découvrira bientôt grâce aux commentaires en voix off du réalisateur. Le titre du film apparaît à l’écran, disparaît puis réapparaît, toujours dans une langue différente. Dès cet instant, tout est dit. Mark Cousins désire parler du cinéma, des enfants et du lien qui les unit à travers le monde entier. Le voyage commence avec ceux du générique : Laura et Ben, sa nièce et son neveu. Il les filme en caméra fixe pendant qu’ils jouent dans leur chambre. Ils sont d’abord timides, puis se disputent. Enfin, Laura et Ben commencent à se sentir à l’aise et se mettent à interpréter des personnages face à la caméra. Cette scène sera entrecoupée par des extraits de films internationaux, connus ou inconnus : E.T., The Night of the Hunter, The Red Balloon, etc. Chacun de ceux-ci illustrent un aspect de la vie enfantine comme ceux que La Danza de la realidad est l'autobiographie chimérique de son réalisateur, Alejandro Jodorowsky.

La danza de la Realidad dʼAlejandro Jodorowsky déjà à lʼaffiche Biopic (130ʼ) Avec Brontis Jodorowsky, Pamela Flores, Jeremias Herskovits

En 1929, dans le petit village de Tocopilla au Chili, c'est là qu'Alejandro grandit. Elevé par un père dont le mot tyrannique ne peut être qu'un euphémisme clément, et une mère sensible et dévastée par leur déracinement. Les Jodorowsky fuirent les pogroms de l'Ukraine au Chili, soumis alors à une dictature cruelle ; le père d'Alejandro promet d'assassiner le dirigeant du pays. Le film retrace l'enfance violente du petit garçon, bercé d'illusions et de métaphores poétiques. La Danza de la realidad n'est comparable à rien de ce que vous avez pu expérimenter au cinéma ainsi que dans la vie. Il ne répond à aucun code établi, aucune structure existante. C'est une réinvention du chaos. La beauté des plans efface les souvenirs des plus beaux couchers de soleil. La musique est d'un lyrisme à faire naître la foi aux plus athées d'entre nous.

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vivent Laura et Ben : la timidité, la peur, la colère, l’envie d’évasion,... Le choix des extraits est d’une justesse implacable. En combinant ceux-ci à la réalité de la chambre de Laura et Ben, Mark Cousins crée des associations cinématographiques personnelles pour illustrer son discours : « Movies are like children and children are like movies ». Les enfants, comme le cinéma, offrent un monde de possibilités où l’imagination est reine et les émotions variées. A Story of Children and Film est un portrait cyclique sur la complexité et la richesse des sensations enfantines mais est aussi une véritable leçon de cinéma grâce à l’analyse précise de la couleur, la lumière et le cadrage de chaque extrait. Un véritable bijou pour ceux qui s’intéressent au 7ème art.

Mathilde Schmit Le monde dans lequel nous emmène Jodorowsky est si nouveau et si immense qu'il provoque des émotions considérables au hasard de ses scènes et personnages improbables. Brontis Jodorowsky, le fils d'Alejandro, incarne à l'écran le père du cinéaste. L'acteur est bouleversant dans l'évolution de la colère furieuse à la rédemption douloureuse qui caractérise son personnage. Le rôle de la mère est intégralement chanté, interprété par la brillante soprano et comédienne Pamela Flores. Comment se libérer de ses rêves, de ses frustrations, de sa société, de sa famille ? Quelle place tient le passé dans le futur ? Voici quelques-unes des questions soulevées par diverses symboliques, et par le récit luimême. Le réalisateur dit de son œuvre : « Mon film est un être, il parle pour lui-même. » Et nous ne saurions le contredire. Il n'est d'aucune utilité de vous donner des informations supplémentaires, de vous faire part d'un point de vue quelconque. La Danza de la Realidad, est une vérité, un moment d'existence. Il faut simplement, aller le voir pour y croire.

Cécile Marx

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Vous avez peut-être déjà eu l’occasion de suivre les pérégrinations du petit Nicolas dans l’apprenti Père Noël, sorti il y a trois ans. Petit rappel pour ceux qui ont raté l’aventure : Nicolas, un australien de 7 ans, a été élu par le Père Noël pour le remplacer. Après 168 ans de loyaux services, tous les Pères Noël doivent prendre leur retraite et élire un jeune garçon orphelin au cœur pur pour assurer la relève.

Lʼapprenti Père Noël 2 de Luc Vinciguerra déjà à lʼaffiche Animation (85ʼ)

A touch of Sin de Jia Zhang Ke Sortie le 11 décembre 2013 Drame (130ʼ) Avec Wu Jiang, Wang Baoqiang, Zhao Tao

Avec ce nouvel opus, signé Luc Vinciguerra tout comme le précédent, on chemine gentiment vers une passation de pouvoir qui patine un certain temps avant de trouver, comme par enchantement, ses marques dans la neige poudreuse.

cence, la fraîcheur et l’insouciance de son enfance pour sauver Noël . Si le graphisme est à son avantage grâce à des crayonnés aux couleurs chatoyantes et à la luminosité des décors, on ne peut, par contre, pas dire que le scénario brille par son originalité. Nous entrons sans surprise dans l’antre du Père Noël qui correspond bien aux stéréotypes du monde enchanteur. Les dialogues sont mièvres et naïfs. À part quelques saillies qui font sourire parfois, on trouve vraiment très peu de touches d’humour. Quant aux fondations de l’histoire, elles ne sont renforcées ni par une bande-son entrainante, ni par la présence de super vilains.

Tout commence à deux jours de la première tournée du petit Nicolas. Ce Père Noël en herbe doit affronter une crise : aux quatre coins du monde, la magie de Noël est en train de disparaitre à cause de lui. Car il a contracté la maladie des enfants qui veulent grandir trop vite : la grande-Personnelose. Le conseil des anciens Pères Noël est contraint de le démettre de ses fonctions de toute urgence. Nicolas va devoir retrouver l’inno-

Néanmoins, ce conte d’apprentissage à la guimauve se dégustera avec délice chez un jeune public (3 à 8 ans). Les petits se plongeront avec ravissement dans cette ambiance féerique tout en fermant les yeux sans scrupules sur les travers de cette production française.

Inquiété par plusieurs faits divers, Jia Zhang Ke interroge son cinéma sur un possible recours à la violence. Retour logique à la fiction après son récent crochet par le (semi) documentaire.

lade le client d'un coup de couteau. L'image, puissante et vulgaire - type Refn disons raconte moins la justice rendue aux plus faibles qu'un pays obnubilé par ses fantasmes minables de pognon et de violence. Un tel cynisme venant de l'auteur de Platform peut déconcerter.

Du documentaire, JZK conserve le portrait choral (A Touch Of Sin se compose de quatre segments, quatre variations sur un même sujet). Cette pluralité c'est la Chine d'aujourd'hui dont les contrastes grandissants obligent le cinéaste à élargir constamment son cadre. La caméra balaye ainsi la Chine du Nord au Sud, filmant ses protagonistes comme autant de nuances nécessaires. En ça, le cinéma de JZK ressemble de plus en plus à son programme : faire tenir la Chine entière dans un film. On appréhende le débordement. Pour en venir au sujet, on s'explique difficilement la brutalité aguicheuse qui traverse le film. Deux hypothèses : Ou bien A Touch Of Sin est un acte politique raté, ou alors il s'agit ici de contester une vulgarité - celle d'un développement économique fulgurant par une autre. Une scène illustre l'idée : une prostituée, giflée par une liasse de billets tail-

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Marie-Laure Soetaert

Mais c'est aussi parce que son cinéma épouse la morphologie changeante de son pays que Jia Zhang Ke en est le plus important cinéaste. Parce que lui mieux que quiconque parvient à sonder ce vaste chantier pour en dresser la topographie mouvante. Et si la violence tape à l’œil d' A Touch Of Sin est à déplorer, c'est d’abord sur ce qu'elle révèle de la Chine actuelle : ce qu'il reste d'horizon pour de nombreux Chinois blessés dans leur dignité.

Léopold Pasquier


Une erreur dans le service pourtant très efficace de livraison de lunch boxes (service de plateaux repas à Bombay) met en relation une belle jeune femme délaissée et un homme veuf proche de la retraite. Par le biais de ces boîtes, ils entament une correspondance et se mettent à rêver à une autre vie.

The Lunchbox de Ritesh Batra Sortie le 11 décembre 2013 Drame (104ʼ) Avec Irrfan Khan, Nimrat Kaur, Nawazuddin Siddiqui

Premier long-métrage de Ritesh Batra, The lunchbox est une comédie romantique savoureuse qui respecte bien les ingrédients du genre : le hasard comme liant, un mélange de deux personnes en apparence opposées et quelques pincées d’humour. De prime abord, une fable savamment dosée aux contours bien convenus. Et pourtant, loin des clichés du misérabilisme et du bling-bling bollywoodien, le film nous offre avant tout une formidable plongée dans le quotidien indien, celui de la working class de Bombay et du système des dabbawallahs, phénomène unique en son genre. Contraints de quitter leur domicile très tôt pour éviter le trafic monstre de la ville, les travailleurs optent en masse pour le train. Ayant une aversion pour la restauration rapide et les plats Loulou est un loup. Tom est un lapin. Étonnamment, Loulou et Tom sont inséparables depuis leur tendre enfance. Aujourd’hui adolescents, ils se la coulent douce au Pays des Lapins. Mais Loulou qui se croyait orphelin apprend d’une bohémienne que sa mère est vivante. Les deux amis partent alors à sa recherche dans la principauté de Wolfenberg, le Pays des Loups. Ils arrivent en plein Festival de Carne, rendez-vous annuel des plus grands carnassiers du monde…

Loulou, lʼincroyable secret dʼEric Omond Sortie le 18 décembre 2013 Animation (80ʼ)

Loulou, l'incroyable secret tire ses personnages animaliers du livre Loulou de Grégoire Solotareff, un classique de la littérature pour enfants. Publié pour la première fois en 1991, le livre nous (ra)conte l'histoire d'un jeune loup et d'un jeune lapin - qui n'ont respectivement jamais vu de leur vie de loups et de lapins - qui deviennent amis ne sachant pas qu'ils sont des ennemis naturels. L’ouvrage de l’écrivain français avait déjà été l’objet d’une adaptation cinématographique en 2003 (Loulou et autres loups) mais sous forme d’un ensemble de courts métrages. Cette fois-ci, avec l’aide du réalisateur Eric Omond, Solotareff, nous propose un vérita-

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qui ne sont pas faits maison, ces employés reçoivent leurs repas - préparés au cours de la matinée par leur épouse - par l’intermédiaire des dabbawallahs, des livreurs de repas. Grâce à une série de belles images, le film montre à merveille comment ces derniers maitrisent à la perfection leur secteur, notamment via le réseau ferroviaire. Le duo romantique est servi admirablement par Irrfan Khan et Nimrat Kaur qui sont tous deux très attachants et crédibles dans leur rôle respectif. S’il n’est pas question ici de triangle amoureux, forme très prisée à Bollywood, le triangle est tout de même de mise. Un assistant collant (Nawazuddin Siddiqui) se frotte à l’employé revêche et va l’humaniser. Si, au départ, ce personnage donne surtout dans la balourdise, il s’avère plus complexe qu’il n’y parait et gagne petit à petit en épaisseur grâce à ses délicieuses réparties. On reprochera à Ritesh Batra un rythme un peu lent et répétitif, notamment par le jeu de la correspondance et une fin avec des évolutions douteuses pour éviter le fameux happy end de rigueur, en général, dans toutes les comédies romantiques.

Marie-Laure Soetaert ble long métrage avec des personnages désormais au stade de l’adolescence. Mais si les personnages se veulent en effet en pleine puberté, le film tend malencontreusement trop vers un ton exclusivement enfantin qui manquera de séduire un public adolescent ou adulte. Visuellement, le trait bien particulier de Solotareff, à la fois simple et imprégné de caligarisme, est évidemment omniprésent et nous projette dans un univers indescriptible, impalpable. Mais l’abstrait règne en maître et préfère une certaine infantilisation à toute poésie, qui aurait probablement gagné à être développée. Cependant, si le film délaisse les plus de 10 ans, force est de constater que les plus peureux n’apprécieront pas du tout le ton très sombre de ce dessin animé… et les plus courageux en feront sans nul doute de beaux cauchemars. Peut-être aurait-il mieux fallu laisser Loulou couché sur le papier, là où Solotareff maîtrise sans conteste son art du conte, plutôt que de se jeter dans la gueule du loup qu’est le cinéma d’animation.

Quentin Geudens

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Pour pouvoir apprécier un remake, l’idéal est peut-être de ne pas connaître l’original. C’est bien le cas ici. C’est donc une critique 100% garantie sans comparaison avec la version des années 60 avec Michèle Mercier. Est-ce finalement une réussite ou le désastre prédit en commentaires sur toutes les tribunes publiques des médias ?

Angélique dʼAriel Zeitoun Sortie le 18 décembre 2013 Aventure, Historique (113ʼ) Avec Nora Arnezeder, Gérard Lanvin, Tomer Sisley

Angélique vit au 17ème siècle. Son père l’a vendu en mariage à Joffrey de Peyrac, comte plus vieux qu’elle, boiteux et défiguré. Après avoir finalement refusé de partir avec Nicolas, son ami d’enfance, elle part vivre chez de Peyrac. Malgré sa disgrâce physique et son âge, Angélique est de plus en plus charmée par cet homme intelligent. Ils finiront enfin par être heureux et avoir des enfants. Jusqu’à ce que les conjurés d’un complot qu'Angélique avait compromis étant jeune, ne prennent peur de ces révélations et que le roi jaloux, décide d’arrêter Joffrey pour sorcellerie. Au regard de la carrière de réalisateur Ariel Zeitoun, qui a tout de même fait des « chefsd’œuvre » comme Bimboland ou Yamakasi, la confiance n’était pas au beau fixe. De plus,

Ryota a tout pour être heureux, une famille parfaite, un job qui lui plait et un appartement avec une vue imprenable. Ryota avait tout pour plaire, tout, jusqu’à ce que l’on lui annonce que son fils n’est pas le sien, que son enfant biologique a été échangé à la naissance et que cela fait 6 ans qu’il élève la descendance d’un autre. Avec un scénario qui fait vague-ment penser à La Vie est Un Long Fleuve Tranquille, le film de Kore-Heda est bouleversant de beauté, tant dans la mise en scène que dans la photographie, le jeu des acteurs ou encore la bande originale. Tel père, Tel fils dʼHirokazu Kore-Eda Sortie le 18 décembre 2013 Drame (120ʼ) Avec Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Yoko Maki

L’opposition de ces deux familles différentes de par leur milieu social, leur philosophie de vie et leur éducation est riche et emporte le spectateur dans le calvaire de ces gens sans histoire. Relaté avec une certaine poésie, l’histoire permet un attachement voire une identification aux personnages. L’émotion est donc omniprésente au sein de ce drame complexe dont l’interprétation est individuelle et personnelle. Le rôle de la femme est central et exploité de façon recherchée et intéressante tandis que le questionnement sur

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le principe du remake est souvent foireux. Et pourtant, si on met de côté le casting comportant Tomer Sisley et Simon Akbarian qui dénotent un peu dans la reconstitution de la renaissance, Angélique est une bonne surprise. Loin d’être un film exceptionnel, c’est un divertissement sympathique, basé sur un roman d’aventure populaire. Le duo Gérard Lanvin et Nora Arnezeder y est sûrement pour quelque chose. Lanvin montre qu’il est un acteur de charisme et Arnezeder nous montre tout autre chose que la potiche de Faubourg 36 : une femme rebelle contre le système et terriblement sexy. Le livre d’Anne et Serge Golon est adapté de manière fidèle et serait, de l’avis de la romancière, réussi. Sans afficher son enthousiasme, on se prend au jeu de cette aventure sensuelle et romanesque. Par contre, quand on laisse une fin ouverte avec la mention « Fin de la première partie », l’honnêteté serait de prévenir le public à l’avance.

Loïc Smars la figure paternelle au sein d’une famille est transfigurant de vérité. Toute l’attention du spectateur est menée par le fait qu’il n’y ait aucune « bonne » solution pour résoudre le problème des protagonistes. Comment terminer un film dont chaque fin possible décevra l’une ou l’autre partie ? Et bien, Kore-Heda a, semble-t-il, trouvé la recette parfaite.

Roxane de Quirini



Portrait

Tom Hanks, acteur talentueux

©Sony Pictures Releasing

L’article À l'occasion de la sortie du film Capitaine Phillips, nous avons décidé de revenir sur la carrière de l'un des acteurs principaux de ce film: Tom Hanks. Fort d'une filmographie de plus de 60 films, il est sans aucun doute l'un des acteurs les plus talentueux de ces dernières décennies. Retour sur quelques-uns des succès de ce grand nom du cinéma américain. Né le 9 juillet 1956 à Concord, en Californie, Tom J. Hanks a trouvé sa vocation d'acteur grâce au théâtre. C'est en 1978 qu'il décide de partir pour New-York afin de tenter sa chance au cinéma. Ses débuts en tant qu'acteur sont assez timides. On le voit pour la première fois dans le film Noces sanglantes, un film d'horreur sorti en 1980. Il fait ensuite plusieurs apparitions dans diverses séries télévisées telles que La croisière s'amuse et Happy Days. Si la comédie romantique de Ron Howard Splash le révèle au grand public en 1984, c'est surtout le film Big en 1988 qui fait décoller sa carrière. Reconnu pour ses rôles dans des comédies, il change de registre dans les années nonante et s'essaie au genre dramatique. Philadelphia est, à ce titre, son premier grand succès pour lequel il recevra même l'oscar du meilleur acteur en 1993. Ce film poignant raconte le combat d'un brillant avocat homosexuel (Tom Hanks) contre son ancien employeur qui l'a licencié après avoir appris qu'il était atteint du sida. Si

vous ne l'avez vu, nous vous le conseillons vivement. Après ce succès, il enchaîne en 1994 avec un autre grand succès: Forrest Gump, pour lequel il rafle également l'oscar du meilleur acteur. L'acteur continue de surfer sur la vague du succès avec Apollo 13. Ce film signé par Ron Howard et basé sur des faits réels relate l'histoire d'un groupe d'astronautes qui se retrouvent contraints de survivre dans l'espace pendant plusieurs jours suite à l'explosion d'un réacteur d'oxygène de leur vaisseau. L'acteur collabore ensuite avec Steven Spielberg dans le film Il faut sauver le soldat Ryan. Avant de passer le cap de l'an 2000, il prête sa voix dans le film d'animation Toy Story en 1999 et interprète un maton qui se prend d'amitié avec un prisonier accusé de meutres d'enfants et doté de pouvoirs particuliers dans le très touchant La ligne verte. Il démarre le nouveau millénaire en beauté avec les films Seul au monde et Arrête-moi si tu peux, aux côtés de Léonardo Di Caprio . Entre temps, il produit la série télévisée Frères d'armes qui nous plonge dans le quotidien d'une bande de soldat américain pendant le Seconde Guerre mondiale. En 2006, il retrouve Ron Howard dans Da vinci code puis Anges et Démons trois ans plus tard. Si les critiques sont partagées, ces films, adaptés des romans éponymes de Dan Brown, rencontrent un très beau succès com-

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mercial. Dernièrement, Tom Hanks a tenu l'un des rôles principaux de Cloud Atlas, un brillant film de science fiction réalisé par Andy et Lana Washowski. Pour conclure, l'on peut dire que Tom Hanks est un acteur avec un immense talent. Reconnu pour sa faculté à incarner des rôles diversifiés et lauréats de multiples récompenses, nous n'avons pas fini de le voir sur grand écran. À quelques jours de la sortie de son dernier film, Capitaine Phillips, l'on sait déjà qu'il jouera dans Saving Mr. Banks et Inferno dans les années à venir. Et nul doute que les succès seront au rendez-vous.

Anaël Munsch


l’actu cinéma

©UGC

Colin Firth fera renaitre Michel Gerfaut

Dans le répertoire classique du cinéma français, les plus âgés d’entre nous (ou les plus cinéphiles) se souviennent irrémédiablement du film de Jacques Deray, Trois Hommes à abattre, sorti en 1980. Dans ce polar, Alain Delon tenait le premier rôle. Ce film, tiré d’un roman de Jean-Patrick Manchette intitulé Le Petit Bleu de la côte Ouest, va connaître une seconde jeunesse. De fait, Christopher McQuarrie (Jack Reacher) va réaliser un remake américain qui devrait s’appeler très logiquement Three to kill. Pour remplacer Alain Delon, ce n’est autre que Colin Firth qui a été choisi pour prêter son talent au personnage de Michel Gerfaut. Pour rappel, cette histoire sombre nous emmenait dans la vie d’un bon père de famille qui, en sauvant un homme victime d’un accident de voiture, va se retrouver au coeur d’une affaire sordide et va voir sa tête mise à prix. Le tournage commencera après celui de Mission Impossible 5, lui aussi dirigé par Christopher McQuarrie et prévu pour 2015. M.M.

Box office Belgique

Georges Lautner est décédé

Du 13 au 17 novembre 2013

©Olivier Strecker

1. Marina 2. Gravity 3. Cartel 4. Evasion 5. Thor 2 6. Het Vonnis 7. Turbo 8. Il était temps 9. Insidious 2 10. Planes Source : Box Office Mojo

DVD - Blu ray

Vendredi 22 novembre, Georges Lautner est décédé à l’âge de 87 ans à Paris. Le cinéaste de talent finit ainsi une vie qui l’a amené vers les sommets. Lui qui a côtoyé les plus grands acteurs du cinéma français.

Né à Nice en 1926, Georges Lautner avait révolutionné le cinéma hexagonal avec des films d’une qualité indiscutable comme Les Tontons flingueurs, Les Barbouzes, Flic ou Voyou ou encore Le Professionnel. Pourtant, l’homme n’était pas des plus compris à son époque, certains n’hésitant pas à le qualifier de réalisateur peu divertissant. Pourtant, son oeuvre est aujourd’hui d’une richesse incroyable et ce, en grande partie grâce à sa collaboration sans faille avec le dialoguiste et auteur Michel Audiard. M.M.

Le film dont vous êtes le héros Pour les plus jeunes d’entre nous, le livre-jeu, plus communément appelé «Livre dont tu es le héros», vous est irrémédiablement tombé un jour entre les mains. Qui n’a pas un jour feuilleté, même de manière très distraite, ces bouquins assez distrayants vous plaçant au coeur de l’histoire ? Souvent, le lecteur y incarnait un chevalier ou un mage qui suivait une quête non définie. C’est à dire que vos choix contextuels influençaient la suite des histoires de votre personnage. Ce genre est un peu tombé en désuétude ces dernières années, il est vrai. Pourtant, Le Monde a relayé l’expérience unique de David Dufresne, Fort McMoney. Dans ce documentaire interactif, vous vous retrouvez au milieu d’une ville canadienne (Fort McMurray) qui exploite le sol bitumineux afin d’en extraire du pétrole. Un eldorado réel qui amène ses richesses mais surtout ses désastres. Via ce documentaire, vous allez pouvoir vous installer dans la peau d’un nouvel arrivant qui va pouvoir rencontrer plusieurs acteurs de cette nouvelle quête de l’or noir. En récoltant des informations auprès des différents personnages, le joueur gagne des points qui lui permettent de peser dans les décisions futures de la communauté. Une carte représente alors la ville vue par les internautes joueurs/spectateurs. Un choix pour le moins original. Rendez-vous sur le site du Monde. M.M.

Marius - Fanny de Daniel Auteuil

L’histoire de MARIUS se déroule sur le Vieux-Port de Marseille, dans le Bar de la Marine tenu par César et son fils Marius. Marius ne rêve que d’embarquer sur un des bateaux qui passent devant le bar et prendre le large vers les pays lointains. Fanny, jeune et jolie marchande de

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coquillages sur le devant du bar, aime secrètement Marius depuis l’enfance ; Marius, sans l’avouer, a toujours aimé Fanny.

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Panorama

Le cinéma dans les étoiles... rétro cosmique

Gravity ©Warner Bros Pictures

L’article Qui n’a pas entendu parler ou vu les images promotionnelles de Gravity, le dernier film d’Alfonso Cuarón ? Impossible de passer à côté. Actuellement à l’affiche dans tous les cinémas, ce nouveau long métrage connaît un franc succès et bat tous les records. Ce huis clos spatial a conquis les spectateurs d’outre-Atlantique et s’impose très bien sur le territoire européen. En France, par exemple, le film a attiré plus d'un million de spectateurs dans les salles obscures en seulement cinq jours. Gravity vient s’ajouter à la liste des nombreux films traitant des voyages spatiaux et autres missions extrêmes, mettant en avant la performance d’astronaute ou cosmonautes. À l’occasion de la sortie de ce nouveau thriller cosmique, voici une petite rétrospective des films qui nous ont fait voyager en orbite terrestre, sur la lune et parfois plus loin…

2001 l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick À l'aube de l'Humanité, une tribu de primates subit les assauts répétés d'une bande rivale, qui lui dispute un point

d'eau. La découverte d'un monolithe noir inspire au chef des assiégés un geste inédit et décisif. Brandissant un os, il passe à l'attaque et massacre ses adversaires. En 2001, quatre millions d'années plus tard, un vaisseau spatial évolue en orbite lunaire. À son bord, le Dr. Heywood Floyd (William Sylvester) enquête sur la découverte d'un monolithe noir qui émet d'étranges signaux vers Jupiter. 18 mois plus tard, les astronautes David Bowman (Keir Dullea) et Frank Poole (Gary Lockwood) font route vers Jupiter. Comment ne pas citer ce monument du cinéma ! Il s’agit d’un des plus gros succès de Kubrick. À l’époque désignée comme film de science-fiction, cette œuvre avait suscité beaucoup de réactions et avait été qualifiée de vision pessimiste sur l'avenir de l'humanité. Que l’on aime ou que l’on n’aime pas, 2001 l'odyssée de l'espace reste un des plus grands classiques du cinéma. Un incontournable pour les cinéphiles !

Apollo 13 de Ron Howard Treizième mission Apollo, le départ d’Apollo 13 vers la lune est une réus-

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site malgré une coupure de réacteur. Mais le 13 avril, à 21 h 07, James Lovell (Tom Hanks) alerte la NASA. Une explosion à bord de l'engin a détruit un réservoir d'oxygène et a endommagé l'autre réservoir ainsi que plusieurs piles à combustible. Le réacteur du module de commande a peutêtre été abîmé également, ce qui rend impossible la mission lunaire. La perte d'alimentation provoquée par l'explosion va obliger les astronautes à couper tous les appareils consommateurs d'électricité à bord, les laissant ainsi sans guidage. Retrouvez le célèbre « Houston, we have a problem » dans ce film inspiré de la vraie mission Apollo 13, retraçant assez fidèlement l'histoire du voyage. Ce long métrage rassemble une brochette d’excellents acteurs comme Tom Hanks, kevin Bacon et Gary Sinise. Une histoire qui fait la part belle au côté humain plutôt qu’aux effets spéciaux. Et ce choix s’avère payant ! L’ambiance confinée du film vous tient en alerte du début à la fin. Réaliste, fort et sobre, Apollo 13 est une belle réussite.


Armageddon de Michael Bay

Mission to mars de Brian De Palma

Moon de Duncan Jones

Un astéroïde se dirige vers la Terre à la vitesse de 35.000 kilomètres à l'heure. Harry S. Stamper (Bruce Willis), grand spécialiste du forage pétrolier, est recruté par le directeur de la NASA pour tenter de le détruire. Lui et son équipe devront se poser sur l'astéroïde et y placer une charge nucléaire. Débute alors l'entraînement indispensable des astronautes et l'apprentissage des outils spatiaux.

En 2020, La NASA envoie pour la première fois une équipe d'astronautes sur Mars. Mais peu de temps après leur arrivée, ils sont confrontés à un phénomène d'une puissance terrifiante et toutes les communications sont coupées. Une deuxième mission est envoyée à leur recherche...

Sam Bell (Sam Rockwell) vit depuis plus de trois ans dans la station lunaire de Selene, où il gère l'extraction de l'hélium 3. Souffrant en silence de son isolement et de la distance le séparant de sa femme et de sa fille, il passe sont temps à imaginer leurs retrouvailles. Mais quelques semaines avant la fin de son contrat et son retour sur terre, Sam se met à voir et à entendre des choses étranges... Ce film, boudé par beaucoup de distributeurs, est pourtant un petit bijou. Dommage, car le scénario est bon et sort des sentiers battus. Le rythme est peut-être lent mais l'atmosphère instaurée par Duncan Jones est envoutante. L'interprétation de Sam Rockwell est tout simplement énorme. Il porte à lui seul le film, sachant qu’il est l’unique (ou presque) personnage de l’histoire.

Un film où l’on en prend plein les yeux ! En même temps c’est signé Michael Bay… Patriotique à souhait, c’est le genre de réalisation où les USA sortent la grosse artillerie pour devenir les valeureux sauveurs du monde. Entre suspense, explosions, clichés et émotions, on ne s’ennuie pas, malgré une fin plus que prévisible. Un gros blockbuster comme on les aime pour se détendre sans réfléchir calé au fond du canapé.

On retrouve ici le scénario classique de la mission sauvetage. Mais, ce manque d’originalité est vite oublié face aux très belles images spatiales. La planète Mars, peu représentée au cinéma, est joliment mise en valeur. Une fois de plus, c’est le côté humain qui prime. Les émotions sont fortes et brillamment exploitées. Le suspense est savamment dosé et vous laisse comme en apesanteur… entre lenteur et vive tension. Dommage que la fin soit quelque peu bâclée et bien trop vite expédiée.

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Musique

Quand la gloire monte à la tête

La chronique Mais qu’est-ce qu’il lui a pris? Voilà la question que bien des fans de Justin Bieber et moi avons dû nous poser lorsque celui-ci a fait les gros titres de la presse la semaine passée. Mais que lisait-on au juste? Que Justin (oups, pardon), que le garde du corps de Justin aurait frappé un photographe argentin car l’adolescent le lui aurait demandé. Bieber aurait été vexé que ce vilain papparazzi veuille le photographier à la sortie d’une discothèque à Buenos Aires. La justice argentine aurait alors décidé de saisir le matériel de la tournée de la « star ». Une décision qui peut paraître radicale à première vue. Mais lorsque l’on s’y penche d’un peu plus près, on comprend pourquoi les argentins en ont après le boutonneux! En effet, au delà de cet incident qui démontre la lâcheté du jeune homme, celui-ci aurait par ailleurs piétiné le drapeau argentin lors d’une représentation, ils aurait écourté un concert après 45 minutes en prétextant ne pas se sentir bien. Il y a aussi et surtout cette fâcheuse habitude qu’à pris le vilain Justin à ne pas payer ses notes (hôtel, discothèques ou autres) et à ramener des prostituées avec lui à l'hôtel.

qu’il a vécu tellement de choses à son âge, si vous saviez!), son film, Justin nous sers à présent ce qui pourrait sans doute être le début de sa descente aux enfers. Et oui, quand on se prend pour Dieu, on se doit d’être omniprésent, de se croire supérieur aux autres et de donner des leçon de vie à ceux qui n’en ont pas besoin et qui ne lui ont rien demandé. Mais il faut un jour revenir sur terre et cesser de se conduire comme un petit génie à qui tout réussi. Car au fond, quand on se penche sur sa carrière, que peut-on y trouver de si génial? Musicalement, c’est la même soupe que les Backstreet Boys qu’on nous servait il y a vingt ans. Scéniquement, forcément c’est énorme, mais en même temps, les grand show ne font pas les meilleurs souvenirs. Comme beaucoup de stars, il vaut mieux ne pas lire ou entendre ses interviews tant leur contenu est insipide et décevant. Et pour ce qui est de la personnalité, on ne peut pas vraiment en décerner une.

Bref, trop is te veel et là, il fallait bien agir pour calmer un peu les ardeurs du petit merdeux. Visiblement, Bieber est devenu, comme beaucoup d’autres stars de la chanson, bien plus connu pour ses frasques et ses caprices que pour sa musique.

Bref, le chanteur à succès ferait bien de se tenir un peu tranquille car il n’est pas le premier à s’être brûlé les ailes à force de se faire remarquer par ses caprices de star. On se souvient très bien de Prince qui, autrefois, faisait tout pour se faire remarquer par la presse. Il avait des tonnes d’exigences absurdes (dont celle qu’on le surnomme tantôt Prince, puis Love Symbol, puis juste le sigle de ce symbole, puis The Artist. Tout cela pour en revenir à … Prince!

Après nous avoir servi ses disques surproduits, sa biographie (c’est vrai

Bref, plus personne ne s’y retrouvait, les fans et les journalistes ont com-

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mencé à se désintéresser de lui. Et la star incontestée est devenue celui dont plus grand monde se soucie. D’autant que ses disques étaient de plus en plus médiocres et que le monde avait changé. Désormais, tout ne tournait plus autour de la planète Prince. Mais visiblement, Prince a du mal à retenir la leçon et continue son cirque inlassablement. Dernièrement, il aurait exigé des loges aux dimensions bien spécifiques que l’on a donc dû lui faire sur mesure. Il aurait aussi exigé une limousine pour le conduire de la loge à la scène (soit une distance de 25 mètres!) On comprend ainsi pourquoi ce genre de personnage n’a plus toute sa notoriété. A force de dépenser leur énergie et leur temps à provoquer plutôt qu’à créer, certains ont perdu ce goût pour la musique et ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes. Espérons que le Petit Poucet canadien s’en rende vite compte. Sans quoi son public pourrait changer rapidement de cible. Un public, qui telle une girouette, s’enflamme pour la moindre niaiserie commerciale que lui matraqueront les radios. Certains trouveront des excuses pour qualifier le comportement de ce Professeur Violet version guimauve. Mais soyons honnêtes, tout le monde a le choix du libre arbitre. Et rien n’oblige un chanteur à se conduire comme un con.

Christophe Pauly


Bientôt un nouveau jeu de

La chronique Rock Science, la marque spécialisée dans les jeux de société thématiques sur le rock vient d’annoncer la sortie prochaine d’un tout nouveau jeu basé sur le groupe de rock mythique: Motörhead! Pour ceux qui ne les connaissent pas encore, Motörhead est un trio mené par Lemmy Kilmister. Ce bassiste a su imposer son style particulier dans le milieu du rock avec un son unique et une voix immédiatement reconnaissable. Les fans du trio infernal pourront ainsi s’essayer à un jeu de questionsréponses basé sur l’histoire du groupe. Plus de 1600 questions sont ainsi disponibles dans ce superbe coffret. Comme vous pouvez le constater, Rock Science a apporté beaucoup de soin à l’esthétique de ce joyaux. Ainsi on retrouve le fameux logo du groupe sur la boîte. Mais également des reproductions des amplis Marshall dédié à Lemmy et au guitariste Phil Campbell. Un must pour tout fan qui permettra aussi à chacun de se défier sur ses connaissances du groupe. Rock Science s’était déjà distingué auparavant avec un jeu semblable sur les amplis Marshall. Ils signent ici un coup d’éclat en proposant une fois de plus un superbe jeu digne d’intérêt. Un très beau cadeau pour les fêtes!

Christophe Pauly

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts Rock Hard Rock

Hard Rock

3 avril 2013

Scar The Martyr

Roadrunner

Si il assure qu'il n'y aura pas d'albums supplémentaires pour Slipknot et que Murderdolls et lui c'est finis, Joey Jordison n'en a pas pour autant chômé. En avril dernier, celui qui est souvent considéré comme le meilleur batteur du monde a surpris son monde en annonçant un nouveau projet : Scar The Martyr. D'emblée il s'associa avec Jed Simon (guitare – ex Strapping Young Lad) et Kris Norris (guitare – ex Darkest Hour). En juin il annonce la collaboration pour l'album à venir de Chris Vrenna (clavier – ex Nine Inch Nails) et du relativement inconnu Henry Derek (chant). Joey, quant à lui, se charge de la batterie, des percussions, de la guitare rythmique et de la basse. Pas mal. Avec un line-up pareil nos attentes étaient donc très élevées. Dès la première écoute, ce qui frappe le plus est la diversité des influences du groupe. On reconnaît tout de suite la touche d'un groupe qui a très fort inspiré Joey : Ministry, principalement dans la structure des morceaux. On reconnaît aussi des touches de Static X, Slayer, Rob Zombie, Coal Chamber, Machine Head ou encore Godsmack. Après une introduction qui donne le ton, on tombe sur un premier morceau qui nous interpelle :

Retribution. Avec des couplets au chant traînant, un pont dans lequel le chant de Derek nous fait penser à celui de Layne Staley (Alice In Chains) et des backs vocaux très « Murderdolls », une très bonne surprise. La suite de l'album n'en est pas moins bon. Naviguant entre le trash, le heavy et le metal alternatif avec des touches de metalcore (dans la batterie) et même d'EBM, Joey a donné tout ce qu'il avait. Bien que certains morceaux soient plus insignifiants, comme Blood Host et son chant qui nous fait parfois penser à du Soulfly ou bien Anatomy of Erinyes, le tout est très bon. Le groupe innove avec Cruel Ocean et son intro EBM qui fait place à un morceau très entrainant. Au rayon des surprises on notera aussi le planant White Nights In A Day Room. Mais les perles de l'album sont ailleurs, à commencer par Prayer for Prey. Un début qui fait penser à du Slayer, un couplet qui laisse monter la pression pour faire place à un refrain qui alterne parfaitement chant clair et guttural. Que dire alors de l'excellent Soul Disintegration ? Un couplet au tempo rapide, un refrain hyper catchy et un solo parfaitement placé. Imparable. En cloture de l'album on retrouve

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aussi l'excellent Last Night on Earth, un morceau très lourd dans lequel on aura même droit à un break metalcore. Du très bon. On oubliera pas non plus l'excellent Mind's Eye. Un album qui, globalement, nous fait prendre notre pied à chaque nouvelle écoute. Dans les points positifs on ajoutera aussi un usage très intelligent du clavier : sans jamais être trop présent, comme pour d'autres groupes, celui-ci reste en toile de fond et fait des apparitions judicieuses. Petit bémol cependant : la longueur de l'album (près de 80'!). On a parfois l'impression que Joey a eu tellement d'idées qu'il a décidé d'en mettre le plus possible pour ce premier album, alors qu'on aurait pu aisément faire un album et demi avec le contenu de celui-ci. Mais qui pourra l'en blâmer ? Scar The Martyr fait partie de ces albums pour lesquels il faut au moins deux ou trois écoutes afin d'en saisir la qualité. Mais faites attention, une dizaine d'autres risquent de suivre.

Olivier Eggermont


Rap Hard Rock

Hard Rock

3 avril 2013

Eminem «The Marshall Mathers LP2»

Interscope

Cela faisait trois ans qu'on l'attendait. L'un des meilleurs rappeurs de notre génération effectue un retour aux sources annoncé avec The Marshall Mathers LP 2. C'est aussi au niveau de son attitude qu'Eminem fait un retour en arrière. En effet, Slim Shady, l'alter ego maléfique de Marshall Mather, nous revient enfin. Le Dr. Jekyll et Mr. Hyde sont enfin réunis. Autopsie en quatre temps d'un des albums les plus attendus de l'année. Dès le premier titre on perçoit un retour à l'essentiel pour le rappeur de Detroit. Malgré quelques montées comme dans la fin de Bad Guy, on reste dans un tempo assez lent. On est donc loin de la puissance du début d'un Eminem Show par exemple. Rhyme or Reason assure une transition parfaite vers la prochaine étape. Ensuite ça se corse, on sent la pression arriver. La voix se fait plus puissante, le beat rapide et le verbe puissant. So Much Better est une introspection dans le passé de Slim Shady. Celui dans lequel il règle ses comptes et auquel il nous avait habitué dans ses premières productions. S'ensuit le très bon Survival qu'on

avait déjà pu découvrir avant la sortie de l'album. Avec une ambiance plus rock et des refrains très catchy on tient sûrement un morceau qui cartonnera en live. Legacy, une incursion dans l'enfance de l'artiste, fait un peu retomber la pression avant que tout n'explose. Pas le temps de souffler, Asshole arrive pour réveiller tout le monde. Des coups de canons pour donner le tempo, un flow ultra rapide et un refrain à la voix féminine font de ce titre une joie pure pour tous. Et on enchaîne directement avec le premier single de l'album : Berzerk. Tout le chaos et l'énergie des chansons d'Eminem se trouve représenté dans ce morceau. Une claque. 101 mots en 16 secondes. C'est la performance inimaginable que l'artiste réussit sur le chef d'oeuvre de l'album : Rap God. Tant au niveau de l'écriture, de la célérité des paroles ou de la production, cette chanson est un bijou. Kanye West prétendait il y a peu dans une de ses chansons : « I am a God ». Il n'arrive même pas à la cheville de l'originel. Et si vous en voulez encore, Brainless devra contenter tous les fans de la première heure par son côté plus old school.

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On prend ensuite le temps de souffler avec Stronger Than I Was. Sans doute un des morceaux les plus beaux du disque. Une ballade rap émouvante et très forte. The Monster est sans doute le titre le plus commercial de l'album, Rihanna oblige. Mais la fin surprend tout le monde. On navigue entre la pop-rock de Headlight avec la superbe voix de Nate Ruess et de la pop des années '90 dans Love Game, morceau composé avec Kendrick Lamar. Dans So Far... on passe même du reggae à une guitare typée AC/DC. Sans être exceptionnels ces morceaux sont tout de même très bon et prouvent que le meilleur rappeur blanc de l'histoire sait sortir de sa bulle de confort. Enfin, Evil Twin rend hommage à son double maléfique, une parfaite conclusion pour un disque qui fera du bruit. Celui qui voudra égaler ce que Marshall Mathers vient de faire devra se lever tôt. La force d'Eminem est qu'il ne sacrifie jamais la qualité à la mode. Il intègre la nouveauté dans un processus de perfectionnement de son style. Le rideau tombe, merci l'artiste.

Olivier Eggermont

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Les Telliers, pionniers d’un nouveau genre C’est l’histoire de cinq frères, qui décident de s’unir pour créer un projet musical unique. Un groupe qui chante en français mais joue de la musique située entre le folk et la country. Ils viennent de sortir Beauté pour tous, un album magnifique qui nous fait voyager et nous plonge dans une atmosphère unique. Nous sommes allés à la rencontre de Raoul Tellier, l’un des fondateurs du groupe

La rencontre Bonjour, Raoul! Merci de m'accorder cet entretien. Beauté pour tous, votre dernier album est sorti chez AT(h)OME, On a la sensation d'une très grande maturité sur ce disque. Il est très différent de Second Souffle. (On sent plus de mélancolie dans celuici.) Pouvez-vous nous parler de votre démarche pour ce disque? On a appris de nos erreurs. Pour notre album précédent (L'Art de La Fugue), on avait voulu créer un patchwork, un ensemble très décousu, comme

certains albums de la fin des années 60, où l'on pouvait sauter d'une ambiance à l'autre sans transition. Au final, ça a donné un album bordélique. C'était ce qu'on voulait, mais ce n'était pas forcément un disque très facile à appréhender pour les auditeurs. Là du coup, on voulait un album plus cohérent, plus compact, plus urgent également. On a donc un peu changé de façon de travailler, tant au niveau de la composition que de l'enregistrement. D'abord, c'est la première fois qu'on compose vraiment à deux, Helmut et moi, ce qu'on avait pas trop fait auparavant. Ça

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modifie forcément la forme et le fond des chansons. On a également délibérément choisi de ne chanter qu'en français, ce qui a conditionné la composition des mélodies et des arrangements. Et puis, concernant l'enregistrement, pour la première fois, également, nous avons choisi un vrai studio, en ville, plutôt que de ramener le studio à la campagne, comme on l'avait fait sur les albums précédents. On a enregistré très vite, en deux sessions, une de trois jours et l'autre de cinq. C'est ce qui donne le sentiment d'unité à l'album, et c'est sans doute ce qui manquait aux précédents.


C'est votre premier disque chez AT(h)OME. Comment s'est passée votre collaboration et pourquoi avoir choisi ce label? On a choisi ce label parce que c'est eux qui semblaient les plus intéressés et les plus motivés. On avait déjà quasiment terminé l'album, mixes, mastering et visuels compris, avant de faire le tour des labels, du coup notre proposition relevait plutôt du « à prendre ou à laisser », ou du « clés en main », si on veut voir les choses plus positivement. C'est plus facile pour faire le tri dans ces cas là! On voulait que ça se fasse vite, ça faisait quand même 3 ans qu'on avait rien sorti. La plupart des autres maisons de disques n'avaient pas l'air si pressées, alors on n'a pas insisté. Et on ne regrette pas. L'eau vaguement tiède, ça va 5 minutes. AT(h)OME se veut un label indépendant, votre groupe a lui aussi une démarche artistique très différente de ce que l'on est habitué d'entendre sur les ondes FM. Pensez-vous qu'aujourd'hui plus qu'au-

paravant, il est nécessaire d'afficher son indépendance pour être reconnu du public? Je ne sais pas trop. On ne réfléchit pas en ces termes là. On a fait l'album qu'on voulait faire. Effectivement, on ne fait pas la musique qu'on entend le plus souvent sur les ondes françaises. Mais ça part d'abord de nos envies musicales, pas d'un désir de démarcation à tout prix. Par contre, pour compléter la réponse précédente, c'est sûr que c'est plus confortable de travailler avec un label indépendant qu'avec une grosse usine, on se sent plus suivi et plus soutenu. La country est fort présente dans votre musique, avez-vous déjà pensé à collaborer avec d'autres artistes américains ? Oui, bien sûr, mais ce n'est pas si simple! Ceci dit, on a déjà accompagné Ramsay Midwood, un chanteur blues texan, ainsi que Dufus, le collectif folk baré de New York, lors

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de leur passage respectif sur Rouen. En voyant la pochette de l'album et le titre de celui-ci, on a l'impression que vous faites-là une critique de la société de consommation avec ces affiches identiques déchirées... Estce une façon de donner un coup dans la ruche et de réveiller le public sur ce qui se passe dans l'industrie musicale ? A priori, non. Nous, on voulait quelque chose de simple et à l'esthétique plus urbaine que ce qu'on a pu proposer par le passé.. Ainsi qu'un titre qu'on puisse s'approprier facilement et qu'on puisse interpréter selon sa propre sensibilité. Quelque chose d'universel et de parlant. Et puis de positif également, le discours «Allez tous vous faire foutre» n'étant pas trop notre truc. Un slogan, donc, mais pas forcément au sens politique du terme. Du coup, et c'est ça qui est plutôt bien, on peut le voir de plein de façons différentes, par exemple comme tu le décris dans ta question, même si ce n'était pas notre intention de départ.

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Votre musique est un savoureux mélange de musique traditionnelle américaine et de textes touchants. D'où vous est venue l'inspiration pour cet album? Ça dépend des chansons. Comme je le disais plus haut, on voulait un album cohérent, plus urbain, plus tourné vers l'Europe et la Méditerranée que vers l'ouest américain. Pour la partie musicale, on peut dire qu'on a pioché du côté de nos influences anglaises plutôt que du côté de nos influences country. Pour ma part, j'ai beaucoup pensé au travail des guitaristes Bert Jansch et John Renbourn, de Nick Drake, de Pink Floyd peut être et du Led Zeppelin des débuts des années 70, quand ils se sont pris de passion pour les musiques orientales. Et bien sûr, toujours Neil Young, mais ça, c'est une constante chez moi. En ce qui concerne, les textes, jusqu'à présent, Helmut écrivait beaucoup

d'histoires, ou de mini scénarios, avec un début, un milieu, et une chute. Pour Beauté pour Tous, il a voulu passer à autre chose, des textes plus autobiographiques peut être, et plus contemplatifs, plus oniriques aussi. Avez-vous travaillé certaines chansons sur une longue période? Revenez-vous de temps à autres sur un texte ou une mélodie à retravailler ? Ou composez-vous tout d'une traite? Oui. Oui. Rarement. Plus sérieusement, on n'est pas ce qu'on appelle des compositeurs rapides. Parfois, nous avons de la chance et la chanson arrive tout de suite, texte et musique, comme si elle existait avant qu'on l'écrive. On a juste à se pencher pour la cueillir. C'est le cas par exemple pour l'Exposition Universelle. Mais souvent, c'est un chemin long et pavé d'embûches diverses avant d'arriver au produit fini. Il faut que les idées de départ passent

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l'épreuve du temps pour devenir une chanson valable. Ce n'est pas toujours le cas, nos tiroirs sont pleins d'ébauches de chansons qui n'ont rien donné. Enfin, pas encore, en tout cas. La Maison Tellier porte bien son nom et une empreinte musicale particulière. Comment se passe cette collaboration entre frères ? Est-ce que cela a renforcé vos liens? Ou est-ce que cela apporte parfois des tensions au sein du groupe ? Héhé. Joker. Vous allez promouvoir cet album au travers de votre prochaine tournée. Est-ce que le public doit s'attendre à des surprises durant ces spectacles ? Sans doute, enfin y'aura vraisemblablement pas de feux d'artifice, ni de requins en liberté, mais les chansons de Beauté pour Tous sont toutes passées par la case concert avant de finir sur l'album.


Elles ont donc une existence propre sur scène, parfois assez éloignée de celle de l'album. Passerez-vous par la Belgique ? Avec grand plaisir! On espère, en tout cas. Avis aux programmateurs… Merci d'avoir répondu à ces questions et encore bravo pour ce superbe album, il m'a très agréablement surpris. Merci beaucoup!

Propos recueillis par Christophe Pauly Le nouvel album de La Maison Tellier est disponible chez At(h)ome. Notre chronique se trouve dans le numéro précédent du magazine.

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Rencontre avec Originaires d’Australie, les Tracer se sont forgés une solide réputation en Europe grâce à leurs show énergique et leur style très orienté vers le stoner. Ils étaient de passage à Anvers fin octobre en première partie de The Answer pour présenter leur nouvel album, El Pistolero. Nous avons donc rencontré le chanteur et guitariste Mike Brown pour qu’il nous parle de ce nouveau disque.

La rencontre Merci pour cette interview, Mike ! Y a pas de quoi. Tout d’abord, pourrais-tu m’expliquer comment cette aventure a débuté? Est-ce que tu connaissais chacun des membres avant, ou est-ce que tu les a rencontré au fur et à mesure lorsque tu as eu besoin de musiciens pour former un groupe? Au départ, j’ai commencé par jouer de la guitare à l’âge de 6 ans. Mon frère, lui, jouait du clavier. Nous jouions surtout du blues. Puis, à 11 ans, on a créé un groupe avec deux autres musiciens à la batterie et à la basse qui s’appelait les Brown Brothers. Ce groupe est devenu très populaire en Australie parce qu’il s’agissait de gamins jouant du blues, ce qui n’était pas courant. Ensuite, nous sommes allés au collège et là, nous nous sommes tout simplement dit que le blues n’était plus vraiment notre tasse de thé et nous avons alors commencé à jouer des choses plus rock n’ roll. C’est alors que nous avons fait la connaissance d’Andre à l’école. Il est rapidement devenu notre batteur. Nous avons alors commencé à écrire nos propres chansons tout en laissant mon frère expérimenter divers instruments comme le piano. Et donc voilà comment Tracer est né au départ ! Trois ans plus tard, nous avons décidé de faire une tournée européenne ainsi

qu’aux States pour nous faire connaître davantage. Nous avons épargné de l’argent grâce à cette tournée et avons décollé petit à petit jusqu’à ce qu’un label hollandais (Mascot Records) s’intéresse à nous. Nous avons alors essayé de percer en Angleterre et de faire de meilleurs disques tout en jouant dans des salles plus importantes. Puis mon frère a fini par quitter le groupe l’an passé. Et Jett est alors apparu dans le groupe car c’est un ami de longue date. Nous avons donc immédiatement pensé à lui pour succéder à mon frère à la place de bassiste du groupe. Maintenant, nous avons une formation solide, qui tient la route, nous jouons bien et nos shows sont encore meilleurs qu’auparavant. Oui, en effet, quand on vous voit ainsi en live, on ne remarque pas ce changement de musicien. Vous sonnez de façon très pro et semblez bien préparés. Oui, je pense que cela est dû au fait que Jett a les mêmes bagages que nous et le même univers musical. Il jouait dans un trio également et savait déjà comment faire sonner son instrument parfaitement. De plus, c’est un très bon bassiste et sa présence sur scène est fantastique ! J’ai été très surpris en vous découvrant car en voyant la pochette de El Pistolero, votre nouvel album, cela fait plus penser à un disque des ZZ Top qu’à celui d’un groupe de jeunes australiens trentenaires. Cela

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est sans doute dû au look viellot et au thème mexicain… Tu es l’auteur de cette magnifique pochette. Alors, d’où t’es venue l’idée de créer une telle pochette ? Cette idée trottait dans ma tête depuis un bon moment en fait. Nous sommes de grands fans de cinéma (Jett vient d’ailleurs d’une famille d’acteurs) et on continue d’aller les uns chez les autres pour regarder des films et nous saouler. (Nous regardons beaucoup de documentaires musicaux et des films d’action). On adore tous le film Desperado de Robert Rodrigez avec Antonio Banderas et Salma Hayek. Et on trouvait que la musique du film était vraiment géniale. Et justement, le moment était venu pour nous d’écrire un nouvel album. Et depuis toujours, je me dis que ce serait cool de faire une musique inspirée de ce film avec cette ambiance du désert et cette atmosphère mexicaine. On voulait incorporer certains éléments du films dans ce projet et c’est de là qu’est donc venue l’idée de cette pochette. Par exemple, El Pistolero, est le premier titre issu du film Desperado. C’est une chouette idée car c’est très visuel tout comme cette pochette. Oui, comme je viens du millieu du graphisme, j’ai tout de suite pensé que ce serait une très bonne idée de faire ce packaging.


Et on sent que tout y est: l’ambiance, cette histoire d’un type qui rentre dans un bar et qui dit avoir été témoin d’une fusillade,… Et il y a d’autres chansons sur l’album qui sont aussi inspirées du film. C’est une chouette idée car c’est très visuel tout comme cette pochette. Oui, comme je viens du milieu du graphisme, j’ai tout de suite pensé que ce serait une très bonne idée de faire ce packaging. Les photos à l’intérieur du livret sont aussi très intéressantes. Il y a notamment cet effet de miroir. Peux-tu nous en parler? Oui, ces portraits peuvent être perçus de plusieurs manières. Il y a par exemple l’opposition entre la vie et la mort comme dans le film Desperado. Et on peut également trouver un lien avec la musique. Certaines chansons

ne comportent pas de réverbération et son assez « rentre dedans». D’autres, au contraire, on beaucoup de réverbe et amènent plus de distance et de profondeur. C’est aussi deux faces opposées. Comment avez-vous composé et enregistré l’album? Était-ce une étape facile pour vous? Oui, ce fut une expérience très intéressante. Parce que Jett n’était pas encore là au début. Donc c’est moi et Andre qui avons écrit l’entièreté de l’album. Nous avions déjà pensé à quelques idées auparavant. Comme par exemple dans Little Dirty Secret et Scream In Silence qui sont issus de jams que nous avions faites bien avant. Tout est venu de cette façon. Nous sommes entrés en studio avec Kevin Shirley pour faire quelque chose ensemble..

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Oui, j’ai d’ailleurs été agréablement étonné de voir son nom sur la pochette du disque… C’est clair! En fait, on a reçu un email vers la fin de l’année dernière qui disait: «Venez en studio, faisons des trucs ensemble, car c’est le bon moment!» Et on s’est dit «Merde, il faut qu’on y aille absolument!» On ne pouvait pas refuser une telle opportunité. Et donc tout s’est mis en place. Il y a deux ou trois chansons qui sont issue du processus d’écriture. Comme par exemple Until The War Is Won, Hangman ou encore Wolf In Cheap Clothes. Par contre, Dirty Little Secret, Manic For Ya et Now I Ride sont des chansons que l’on avait travaillé autrefois mais qui étaient inachevées. On a donc décidé de s’y mettre une bonne fois pour toutes et de les finir.

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Est-ce qu’il y a des chansons que vous avez travaillé sur une longue période? Oui, par exemple, l’écriture de Scream In Silence a commencé bien avant le dernier album. On est constamment en train d’écrire car c’est un processus naturel pour nous. Avant d'entamer ce tour, nous nous sommes rendu chez Jett. Il a une maison située au milieu de nul part où il peut jouer à trois heures du matin si ça le chante sans que personne ne se plaigne! Donc on est allé là pendant deux jours et avons essayé d’écrire quelques nouvelles choses. Et on y a fait des jams vraiment chouettes! Nous les avons enregistré et maintenant on a de la matière pour faire un nouvel album l’an prochain. Avez-vous déjà essayé de nouvelles chansons en live?

Oui, bien sûr, mais comme Jett est nouveau dans le groupe, on a dû le tester et répéter beaucoup. Il y avait beaucoup de chansons à apprendre. Celles de l’album précédent plus toutes celles que nous avions faites précédemment divers EP. Ce fut un voyage assez rude pour Jett donc nous devons prendre le temps à présent pour écrire de nouvelles choses avec lui. Comment se passe cette tournée? Très bien! Les gars de The Answer sont vraiment sympas, ce qui est très important lorsque vous partagez l’affiche avec un groupe durant toute une tournée. Ils ont une très grande renommée en Angleterre donc le public là-bas était vraiment dingue. A Londres, on a joué devant des milliers de personnes, ce qui est vraiment spectaculaire.

C’est notre deuxième concert en Belgique, notre premier concert ici était au Graspop. On aime bien venir ici, d’autant qu’on aime boire de la bière, donc c’est un endroit idéal pour nous. (rires) On aime explorer de nouveaux territoires. Par exemple, on va bientôt jouer pour la première fois en Italie. Prévoyez-vous de revenir prochainement? Oui, nous préparons une autre tournée qui commencera en avril je pense. Puis nous reviendrons pour la saison des festivals. Nous viendrons probablement au Graspop, Bospop (en Hollande), Pinkpop... tous les Pop quoi! (rires) Merci! Et à bientôt sur la route!

Propos recueillis par Christophe Pauly

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Rock Hard Rock

Hard Rock

3 avril 2013

Tracer «El Pistolero»

Mascot Records

Comme le disait Mike dans l’interview, les Tracer ont mit beaucoup de références dans ce superbe disque. Une ambiance tex-mex très présente aussi bien sur la pochette que dans les chansons. Tracer a osé donner une couleur particulière à ce travail et cela est plutôt payant au final. L’album est très varié et dès les premières notes, on identifie le groupe avec un son particulier et une énergie très présente tout au long de l’album. Cela commence avec le premier titre éponyme qui donne le ton avec cette guitare qui introduit le morceau. Suivie de la batterie et la basse. Le trio sonne superbement et l’énergie dégagée est incroyable. La guitare a ce son bien gras et Brown sait comment en jouer avec des riffs très bas et efficaces. Sa voix se pose parfaitement dès ce premier morceau et on sait déjà que cet album promet d’être fameux.

tellement avec si peu de moyen. Comme quoi, rien ne sert d’avoir un matériel couteux et encombrant pour faire de la bonne musique. Dirty Little Secret arrive avec son rythme syncopé et ses riffs pleins de nuances. Les phrasés entre les refrains et couplets sont très bien ficelés. On sent que le groupe a beaucoup travaillé et que le bagage de ce trio est très bien chargé. Brown fait des solos incroyables. Sans charger en technicité, celui-ci arrive a toucher et à produire un résultat cohérent.

La suite ne laisse aucun doute, car voici que début Lady Killer. Un morceau où le trio se déchaîne. Brown chante superbement et le break au milieu de la chanson est digne des plus grands stoners.

Dead Garden est assez particulier dans son genre. Il est très clairement le résultat d’une des influences majeures du groupe. En effet, au delà du titre, on reconnait sans difficulté la référence à l’un des plus célèbre groupe de grunge de Seattle. Brown pousse même la ressemblance jusque dans sa voix qui ferait pâlir Chris Cornell lui même. Le son est ici plus puissant et le jeu du batteur est aussi remarquable. Brown s’est aussi surpassé dans les effets lors du break, on croirait vraiment entendre Kim Thayil exécuter l’un de ses phrasé fétiche.

Là aussi, on est surpris du jeu de Brown et de ses acolytes qui dégagent

S’en suit une ballade aux sonorités très mexicaines. Ballad Of El Pis-

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tolero est douce et touchante. Elle se durcit peu à peu avec l’arrivée en fond d’un feedback lancinant. Puis c’est l’explosion avec l’enchaînement de Santa Cecilia! Un superbe morceau construit sur un riff qui se fait et se défait inlassablement. On a une sensation d’une valse morbide et Brown rajoute au coté dramatique avec sa guitare acoustique en fond. Là aussi la puissance est au rendez-vous et cela continue tout au long du disque avec des morceaux plus surprenants les uns que les autres. Ainsi Hangman et ses sonorités arabesque est un vrai voyage à lui tout seul. Il y a aussi des titres très rentre dedans comme Manic For Ya qui décoiffe! Et des morceaux plus travaillés comme Until The War Is Won qui superbe de par son ambiance tex-mex et touchante. Un superbe album produit par Kevin Shirley! Tracer a su délivrer le meilleur d’eux-même en produisant un son simple mais direct.

Christophe Pauly

décembre 2013


Interview

Fabian Le Castel, imitateur de talent

©Fabian Le Castel

La rencontre D’un point de vue artistique, la Belgique n’a rien à envier à son grand voisin français. Fabian Le Castel, né à la frontière entre les deux pays, représente certainement bien les talents qui se découvrent dans notre plat pays. Imitateur bluffant, humoriste confirmé, Fabian Le Castel est l’homme incontournable du moment. Entre ses succès scéniques et ses divers projets, le jeune belge est arrivé récemment en finale de l’émission télévisée Belgium Got Talent. Rencontre avec cet artiste, jovial et éminemment sympathique au demeurant.

Concernant la chanson, je n’ai jamais pris de cours de chant. D’ailleurs, les professionnels du métier me font régulièrement des remarques sur les aspects que je pourrais améliorer. Par contre, j’ai pris des cours de diction et de déclamation, ce qui m’a permis de pouvoir bien m’exprimer, enfin du moins je pense. Car, il fallait que je perde mon accent ch’ti, avant je porlais com’ cha et ça l’faisait po (sic).

On le voit dans votre biographie, vous avez démarré votre carrière d’imitateur à Mouscron, votre ville natale. Est-ce que l’imitation était pour vous une évidence dès le départ ou vous êtes-vous essayé d’abord à la chanson ? Comment cela s’est-il passé ?

C’est une question qui revient souvent : comment un imitateur fait pour s’accaparer un personnage ?

En fait, je suis heureux d’avoir le talent, si je puis dire, d’être imitateur. Cela me permet d’allier deux choses que j’ai toujours aimées : l’humour et le chant. Pour l’histoire, ma carrière a démarré très tôt, c’est-à-dire en classe où je faisais rigoler mes petits camarades en imitant mes professeurs à leur grande joie. Plus sérieusement, je me suis toujours amusé à imiter les gens sans pour autant croire que j’allais en faire mon métier.

« Le travail d’imitateur, c’est beaucoup d’écoute avant tout »

Tout d’abord, il faut choisir une personne qui est dans l’actualité. Ensuite, tu lui inventes un personnage. Cela ne doit pas être spécialement fidèle à l’original mais on doit le reconnaitre. Par exemple, André Lamy imite régulièrement Joëlle Milquet. Pour beaucoup de gens, Joëlle Milquet a cette voix-là. Il a réussi à imposer un personnage. Pour les chanteurs, c’est différent. Là, tu dois t’exercer beaucoup plus afin d’être le plus juste possible, sinon les gens ne reconnaissent pas l’artiste. Parfois, c’est en cherchant une voix, en t’exerçant, que tu trouves une autre

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voix par hasard. Pour ma part, c’est en essayant d’imiter Maurane que je suis tombé sur Michel Jonasz. Autrement, tu entends une voix à la radio et tu te dis : « tiens, celle-là est dans mes cordes, je vais la tenter ». Au niveau du travail, c’est énormément d’écoute. Il faut sans cesse réécouter l’artiste afin de se familiariser à sa voix. Le premier sens qui travaille lorsque l’on est imitateur, c’est l’oreille. Par la suite, c’est très difficile de se réécouter soi-même. Dès lors, il faut les faire écouter à des gens de confiance pour avoir leurs avis. Personnellement, je demande cela à mon père car il connait très bien ma véritable voix. Il est l’un des rares à savoir me dire si on entend ma voix derrière l’imitation. Si ce n’est pas le cas, alors je sais que l’imitation est réussie. On vous a vu l’année dernière aux Galeries lors de La Revue où vous avez signé une prestation remarquable. Mais cette année a marqué également le lancement du quatuor francophone des 4 sans voix. Pouvez-vous nous parler de ce concept et comment est-il né ? C’est un superbe projet. C’est également un show d’imitation mais nous sommes quatre à partager la scène : un Québécois, un Français, un Suisse et moi-même. Je me sens vraiment bien dans cette troupe car aucun de mes collègues n’a un égo surdimensionné. Si l’un d’entre nous fait mieux une


certaine voix qu’un autre, cela ne pose pas de problème.

Parfois, je ne fais pas ce qu’il dit mais il faut avouer qu’il a souvent raison.

Alors, ce spectacle est parti de Rochefort qui avait commandé un show avec un Belge, un Français et un Suisse. Ils ont demandé un imitateur belge qui n’était pas moi au départ mais le premier choisi n’a pas trop joué le jeu. Bref, le Suisse de la bande a voulu en faire un vrai spectacle et créer un quatuor avec un Canadien en plus et un autre Belge. C’est alors que je suis arrivé dans l’aventure par l’intermédiaire de Jérôme de Warzée.

Concernant le spectacle, c’est un sketch puisqu’il y a un fil rouge. Des personnages sortent de moi mais entretemps, il y a des passages de mise en situation. Pour résumer, il y a un peu de tout dans ce spectacle : des sketchs, des parodies mais aussi des imitations pures. De plus, il y a également des passages anglo-saxons avec Elvis Presley, Ray Charles, Placebo, Mika et Gorillaz, entre autres. Bref, il y en a pour tous les goûts.

Depuis, tout va pour le mieux. On rejouera le spectacle à Rochefort et on est actuellement en tournée. On a joué en Bretagne au début du mois puis maintenant, on joue en Suisse pour 23 dates. En Suisse, le spectacle cartonne surtout parce que l’imitateur suisse est très connu dans son pays.

Je ne voulais pas choisir entre l’humour et la chanson, j’ai donc décidé d’allier les deux.

Enfin, outre vos chroniques radios, vous prêtez votre voix à Gabin, le perroquet de la nouvelle capsule de la RTBF Luchien. Cela ne fait pas drôle de doubler un personnage qui ne parle pas ? Tout à fait. C’est une nouvelle expérience pour moi de donner ma voix à quelqu’un qui ne parle pas. Je dois pouvoir me faire comprendre en utilisant uniquement des onomatopées. C’est une très belle expérience. En plus, incarner un perroquet pour un imitateur, que rêver de mieux ? À part cela, je suis fier de faire partie de ce projet que je trouve beau techniquement parlant. Puis, Bruno Taloche incarne le chien et c’est un réel plaisir que de travailler avec lui. Il est aussi mon manager mais c’est un manager attentif qui a de très bons conseils à donner. Bruno est une très chouette personne qui est plus qu’un manager car il a été - et est toujours - avant toute chose un artiste.

Votre actualité chaude du moment, c’est Belgium’s Got Talent. À l’heure actuelle, vous êtes toujours en course pour remporter l’émission. Avezvous hésité avant de vous lancer dans cette aventure télévisée ? Appréhendiez-vous le moment ?

Plus d’infos sur Fabian Le Castel et sur ses dates de tournée sur son site internet : www.fabianlecastel.com

Je n’ai pas vraiment hésité car j’avais déjà fait l’expérience de La France a un incroyable talent. À cette époquelà, je n’avais vraiment rien à perdre et finalement, j’ai pu constater des retombées très positives en seulement deux minutes de passage.

Propos recueillis par Matthieu Matthys

Dès lors, je me suis dit : « pourquoi ne pas retenter le coup en Belgique et conquérir un plus large public ? ». Je n’appréhendais pas le moment et finalement, le meilleur m’arrive puisque je suis en finale de l’émission.

Question peut-être un peu banale mais quels sont vos personnages fétiches, ceux que vous adorez interpréter ?

Venons-en à votre futur spectacle, Fabian Le Castel : Maboul à facettes. Vu que vous avez co-écrit le spectacle avec Jérôme de Warzée, pouvons-nous nous attendre à avoir un spectacle qui mixe textes humoristiques et chant ?

Celui que j’ai le plus facilement dans la gorge et qui fait mouche à chaque fois, c’est Johnny Halliday. C’est un personnage qui a traversé les âges et que tout le monde connait. En outre, je pense avoir le coffre suffisant pour pouvoir faire du Johnny.

Jérôme a beaucoup apporté au spectacle de par sa position de coscénariste mais aussi de par son expérience. Jérôme est un consultant artistique pour moi. Je lui demande régulièrement son avis et il me le donne.

Sinon, j’aime beaucoup imiter Arno. Des voix suaves en fait… Oui, c’est vrai. D’ailleurs, j’allais justement venir à Garou. (rires)

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Évènement

RÊVE GÉNÉRAL

Durant plus de trois semaines, la compagnie Arsenic2 ravive la mémoire industrielle de la Wallonie, le tout dans un cadre industriel et festif.

© Florelle Naneix

Le projet La compagnie Arsenic2 (Théâtre populaire itinérant) s’est lancée dans un projet artistique plus qu’ambitieux : RÊVE GÉNÉRAL. Cette ambition est d’embarquer les spectateurs dans un voyage à travers l’histoire industrielle de la Wallonie. Qui dit histoire industrielle dit également histoire sociale et culturelle et qui dit Wallonie dit également Belgique mais dit aussi réflexion sur la crise et la situation ouvrière en Europe.

Concrètement, le projet engage une centaine d’artiste, répartis sur trois spectacles, auxquels s’ajoutent diverses activités en parallèle, comme des Croisières sur la Meuse à la découverte du bassin industriel liégeois en lien avec le spectacle du soir, des soirées musicales allant de la fanfare au piano-bar-karaoké, des projections de film, ou encore l’investissement du

L’idée du projet est celle d’un théâtre populaire, résistant, ancré dans le territoire et festif. Le point de départ de ce projet, qui est aussi le lieu de création et de fabrication de la compagnie, est un terrain sur la commune de Tille à proximité de Liège et appartenant à ArcelorMittal.

« Résister, c’est sans doute avant tout refuser d’être sans mémoire » Mais rien de tel que les mots de la compagnie : « Résister, c’est sans doute avant tout refuser d’être sans mémoire. C’est se ré-approprier l’histoire pour en faire une arme massive. Une telle mémoire est essentielle, une telle transmission indispensable. Elle est l’héritage qui permet aux luttes de se renouveler, à l’espoir de rester vivant, aux peuples d’être les acteurs de leur propre histoire. »

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lieu par un sculpteur et un scénographe. Au-delà de ces trois semaine à Liège, la compagnie entend bien investir d’autres lieux industriels de Belgique, en faisant participer les habitants de chaque lieux, afin que chacun puisse avoir une part de ce Rêve Général.


La chronique d’une soirée festive Dès l’arrivée dans le lieu, l’ambiance est posée. Une fois sorti du parking, il n’y a qu’à suivre les fumées des braseros, le bruit des gens qui boivent, et s’engouffrer dans la chaleur du premier chapiteau venu. Une zone industrielle de laquelle sort un grand chapiteau. À ses pieds, on y trouve des caravanes et d’autres chapiteaux. Ponctuant la marche d’un endroit à l’autre, des brasero géants contre lesquels on se réchauffe, ou encore des ombres de système mécaniques sur lesquels il ne manque plus que Charlot.

bien entendu quelques bières ou quelques softs pour les plus sages.

Inutile de préciser que la soirée passé dans ce lieu a été un moment génial, convivial, touchant et festif durant laquelle on a entendu massacré avec bonheur de nombreux standards de la chanson française, où l’on a vu dix personnes rassembler leurs savoirs et boire des bières dans le froid en se demandant comment ils allaient pouvoir dégager cette voiture juchée sur une pierre, où l’on a vu ces mêmes personnes réussir à redonner à cette voiture le loisir de rouler et retourner boire des bières pour fêter cela, et bien d’autres choses encore.

L’ambiance y est conviviale, c’est un rassemblement de gens très divers, et je ne dis pas cela histoire de le dire. Du fait même que les participants aux projets, notamment les membres du choeur du spectacle Grève 60, sont eux-même issus de milieux socioprofessionnels et de générations très variées, la composition des publics s’en trouve forcément influencée. ©Arnaud Timmermans

Une fois le spectacle terminé, les spectateurs sont invités à rester dans le chapiteau afin de partager la soupe populaire tout en descendant quelques

musicien, qui non-content d’avoir enchaîné deux spectacles, était resté derrière son piano pour une soirée karakoé durant laquelle comédiens, membres du choeurs, spectateurs ou toute personne passant dans les parages chantaient tour à tour les grands classiques de la chanson francophone.

Y étant allé un vendredi soir, j’ai eu droit à une soirée Piano-Bar animée par Alberto Di Lena, compositeur et

C’est cela qu’il me manquait, à moi, Français débarqué à Bruxelles depuis un an, une vraie soirée wallonne.

©Lou Hérion

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décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

GRÈVE 60 « Ce n’est parce qu’on n’a plus de beurre qu’on en a oublié le goût»

© Véronique Vercheval

La critique Parmi les trois spectacles présentés dans le cadre de RÊVE GÉNÉRAL, nous avons vu GRÈVE 60 - « Ce n’est parce qu’on n’a plus de beurre qu’on en a oublié le goût». Ce spectacle de théâtredocumentaire est une création collective, autour de la Grande Grève de 1960. Ce spectacle est a l’initiative de son metteur en scène Patrick Bebi, qui lance l’idée à ses camarades de l’ESACT (l’École Supérieure d’Acteur de Liège) à la sortie du diplôme. Viennent ensuite de longues recherches documentaires, dans les livres, les conférences, la recherche de discours et de coupures de presse dans les archives, et des entretiens auprès des acteurs même de la grève.

On notera au passage une imitation parfaite des divers accents wallons (dixit un Liégeois), soulignant l’énorme travail des comédiens belges et français. Le spectacle commence par un rappel des évènements historiques permettant à ceux qui ignorent tout des faits (comme moi par exemple) de s’y retrouver. Certains entretiens et coupures de presse sont projetés tels quels sur un écran, et certains discours sont rejoués par les comédiens.

La scénographie de Fred Op de Beeck est intelligente et efficace. Par un jeu de lumière, la surface de projection laisse parfois apparaitre un décors en fond de scène dans lequel se tiennent les réunion du gouvernement. Ces distinctions scéniques qui s’effectuent alors entre gouvernement, médias, meneurs de la Grève et choeur ouvrier, prennent tous leur sens et apportent différents points de vue sur ce moment historique tout en prenant à mon avis le parti du peuple, car c’est là que le public se situe. Tous les éléments précédemment cités, le contenus, les recherches en amonts, le travail des comédiens et leurs qualités de jeu indéniables, ainsi que la forme finale font de ce spectacle un objet, instructif, artistique et émotionnel. On ne s’y ennuie pas une seule minute, on n’y croise un grand nombre de personnages plus intéressants les uns que les autres, tantôt répugnants, tantôt révoltants dans le bon sens du terme, et tantôt hilarant.

La richesse du spectacle vient justement du fait que le travail de recherche reste apparents dans la forme finale, tout en s’intégrant dans une fictionnalisation des évènements. C’est à partir de l’ensemble de ces documents, que les comédiens se sont réappropriés les personnages de cette Grande Grève afin d’en rendre une représentation juste sur scène. C’est ainsi que de nombreux personnages se croisent sur scène, alternant scène drôles et scène triste. De France Truffaut, enseignante engagée dans le conflit qui en deviendra une des meneuses, à Robert Dussart ou au Premier ministre Gaston Eyskens. En passant par les vendeuses de l’ «innovation» improvisant une réunion de crise ou le Cardinal Van Roey, hostile à la grève, qui se met à dos des milliers de fidèles.

dans le spectacle et qui y apporte évidemment une puissance unique.

Tout cela joué sur un des lieux même d’où le mouvement est parti, que demande le peuple!

© Véronique Vercheval

À cela s’ajoute la présence d’un choeur populaire d’une soixantaine de personnes, qui arrive de manière surprenante

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Vous l’aurez compris, je vous recommande vivement de bloquer une de vos soirée, de motiver quelques personnes de votre entourage et de vous rendre tous ensemble à RÊVE GÉNÉRAL d’ici le 7 décembre.


La rencontre À l’occasion de la création du spectacle Grève 60, Arsenic2 voulait en profiter pour ancrer localement son spectacle. Une des traductions de cette envie a été la constitution dans la région d’un choeur populaire d’une soixantaine de personnes. Nous avons rencontré l’un des membres du choeur Pierre Verjans, professeur en sciences politiques à l’Université de Liège et en République du Congo.

un terrain même qui appartenait à Cockerill-Sambre auparavant et donc maintenant à Arcelormittal. C’est un des directeurs, d’origine liégeoise, d’ArcellorMittal, qui a laissé la compagnie Arsenic s’installer, installer son chapiteau, et présenter leur spectacle en trouvant que c’était bien d’avoir raconté les histoires du lieu, même si d’une certaine manière il se trouvait de l’autre côté de la barrière.

Comment êtes vous arrivé dans ce projet? J’ai entendu que des jeunes cherchaient des personnes pour chanter dans une pièce qui racontaient les grèves de 1960-1961.

Quelle a été votre implication dans le projet? Les jeunes comédiens, qui ont 23 ans maintenant, n’ont pas eu de cours de sciences politiques sur l’évolution de la Belgique et donc on a eu une longue discussion sur ce que c’est l’histoire du fédéralisme en Belgique, en quoi cette grève représente une charnière importante. Sinon l’essentiel de mon travail est un travail de choeur ici, donc un travail discret. Que pouvez-vous nous dire du lieu sur lequel nous nous trouvons? C’est un lieu symptomatique, puisqu’il est au coeur industriel de la Meuse, sur

Ce lieu et cette soirée ont l’air emblématiques de Liège, en ce qu’ils rassemblent l’industrie et la culture savante... Liège est en effet une ville qui a une histoire culturelle importante, certains liégeois se vantent même du fait qu’au XVIIème siècle on disait que Liège était l'Athènes du nord, mais je pense que toutes les villes au-delà du 40ème parallèles se targuent d’avoir été à un moment donné les Athènes du Nord. Cependant, il est vrai qu’à Liège il y avait une tradition intellectuelle. Et quand, pendant la période hollandaise, donc pour nous juste après la défaite napoléonienne, il y a eu la création des universités par l’État hollandais, il y a eu une université automatiquement à Liège, qui jumelait deux aspects.

Nous en avons profité pour revenir avec lieu sur le lieu de fabrication de la compagnie, mais sur la Grande Grève de 1960 et sur la ville de Liège.

Comme politologue j’ai travaillé sur des histoires de syndicats en wallonie, et le moment de la grève de 1960-61 est un moment important pour tout le monde, c’est un point de repère dans l’histoire sociale en Belgique.

C’est important pour les congolais de savoir par exemple qu’en 1885, au moment où le roi de Belgique prend possession du Congo et bien il n’y a à ce moment là qu’un pour cent de la population qui a le droit de vote en Belgique et donc le peuple belge à subit cette décision.

© Véronique Vercheval

Vous qui connaissez les deux histoires, pouvez-vous nous dire quel est le lien, évoqué dans le spectacle, entre la Grande Grève de 1960 et l’indépendance du Congo? Le prétexte donné par le gouvernement belge de l’époque pour prendre toute une série de mesure d'assainissement budgétaire était la perte du Congo et la perte disait-il de revenus liée à la perte du Congo et en réalité la perte de revenu a été très minime. Et donc le Congo a été le prétexte, d’une certaine manière.

C’est à dire à la fois l’aspect culturel traditionnel, centré sur le droit, les sciences humaines, la philologie, enfin tout ce qui faisaient ce que l’on appelle maintenant les sciences humaines. Et puis de l’autre côté c’était une université faite pour le savoir capitaliste, avec les sciences de l’ingénieur très importantes et médecine à côté. Et ces trois facultés ont fait que maintenant à Liège, il y a à la fois une histoire industrielle et des produits industriels de très haut niveau même si maintenant pour l’essentiel de la masse des travailleurs on n’est plus dans la sidérurgie comme dans les années 1960 mais dans des instruments beaucoup plus perfectionnés, et en même temps il y a une histoire culturelle profonde.

Et c’est vraiment intéressant de faire une histoire parallèle du Congo et de la Belgique parce que d’une certaine manière, les deux sont inséparables.

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décembre 2013


Interview

Bruno Bittoun, le plaisir du stand up

©Bruno Bittoun

La rencontre Plus qu’un talent, l’humoriste Bruno Bittoun est un personnage unique de la scène. Par son côté naturel mais aussi grâce à son expérience dans le stand up, il a réussi à enchanter le public du Made In Brussels Show début novembre. C’est pourquoi, nous avons voulu en savoir un peu plus sur cet humoriste à l’accent flamand mais aussi sur l’homme qui se cache derrière le rideau. Bruno Bittoun, nous vous avons découvert récemment au Made In Brussels Show. Une très belle prestation convaincante. Oui, c’est le but du Made In Brussels Show, faire la promotion d’artistes et faire découvrir des talents qui ont déjà une expérience derrière eux sans pour autant avoir un spectacle complet. C’est un endroit qui permet à un artiste de se montrer dans des conditions de jeu professionnelles. Comment vous êtes-vous lancé dans l’humour et depuis combien de temps ? J’ai toujours aimé l’humour, sous toutes ses formes. Maintenant, concernant le stand up, que je pratique, je l’ai découvert un peu par hasard il y a maintenant cinq années de cela. C’était à Anvers où se déroulait une scène ouverte où les artistes pouvaient faire leurs preuves en 15 ou 20 minutes. Ce

jour-là, il y avait des grands noms comme Nigel Williams par exemple. C’est un anglais qui vit depuis trente ans à Anvers et qui fait un one man show en néerlandais mais avec un accent anglais, ce qui donne une tonalité plus savoureuse à son texte. Cet homme travaille vraiment à l’anglosaxonne, c’est-à-dire qu’il doit provoquer quatre à six rires par minute. Après cette prestation, cet humoriste est devenu en quelque sorte mon idole. Ce show a été un véritable choc. Avant, je n’avais fait que du théâtre amateur avec ma femme, sans plus. Mais à ce moment-là, je me suis dit : « Pourquoi pas moi ? ». De plus, je trouvais que le stand up allait me permettre d’avoir une interaction avec le public, ce que le théâtre ne permet pas, ou moins.

Je trouve qu’il y a un plus grand respect de l’artiste qu’en Flandre. En Flandre, c’est plus à l’anglo-saxonne, les gens réagissent très fortement à ce qu’il se passe sur scène : ils crient, ils se barrent, etc. Et puis me voilà aujourd’hui. Récemment, j’ai gagné le tremplin du rire au Festival de Bierges et maintenant je joue un peu partout. Sarah Vanel est d’ailleurs un peu mon ange gardien puisqu’elle m’a permis de jouer au Koek’s théâtre il y a quelques semaines. Un évènement marquant puisque, en sortant de scène, la programmatrice du théâtre m’a donné des dates pour venir jouer un spectacle complet… Dès lors, vous allez créer un spectacle complet ?

Quelques mois plus tard, je démarrais mes sketchs à gauche et à droite en Flandre.

Oui. Alors, pour l’instant, j’ai déjà un spectacle de 45 minutes qui tient la route et qui fonctionne bien. Maintenant, lorsque l’on m’a demandé de faire un spectacle complet, je dois avouer que ce n’était pas dans mes projets immédiats mais je me suis dit que c’était une offre que je ne pouvais pas refuser. C’est pourquoi, je jouerai l’année prochaine au Koek’s théâtre mon premier spectacle intitulé N’ayez pas peur ! Le Flamand vous aime !.

Depuis deux ans maintenant, comme je suis bilingue, j’ai tenté l’aventure de faire du stand up en français. Et là, il faut dire que j’ai été agréablement surpris par l’accueil des francophones.

Vous jouez énormément sur des sujets d’actualités très récentes. Vous devez donc vous renouveler sans cesse. N’est-ce pas fastidieux ?

Alors, pour me lancer, j’ai été un peu me renseigner sur internet et je suis tombé sur un workshop animé par Nigel Williams dans une maison de jeunes. Je me suis inscrit et quinze jours plus tard, je m’entrainais à faire du stand up avec des jeunes.

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En fait, je ne suis pas humoriste à temps plein. La journée, je travaille comme indépendant. Cela ne me laisse pas beaucoup de temps pour m’asseoir à une table et écrire des sketchs. Pour pallier à ce manque de temps, je prends à droite et à gauche des idées dans ma voiture ou devant ma télévision. J’ai toujours un petit calepin sur moi et lorsque je vois ou j’entends un sujet d’actualité qui m’intéresse pour mon spectacle, je le note brièvement pour le retravailler par après. Traiter l’actualité est un choix personnel car il y a beaucoup d’autres domaines qui peuvent être traités. Chacun a son style. Pour ma part, je pioche dans la vie de tous les jours ou dans mon expérience personnelle. Vous êtes encore peu connu mais avez-vous déjà pu faire des spectacles avec d’autres humoristes ? Je partage souvent la scène avec d'autres humoristes, c'est ce que l'on appelle des "plateaux". C'est là que j'ai rencontré un garçon qui vient de Liège et qui joue sous le nom de Raf. Depuis, c’est devenu un copain. Par la suite, ma femme a émis l’idée que l’on pourrait faire un spectacle ensemble. Nous avons donc réfléchi à cela et nous sommes actuellement occupés à monter ce fameux spectacle. Nous proposerons d’ailleurs un extrait de celui-ci le 2 décembre au Made In Brussels Show. Que pourra-t-on voir dans ce futur spectacle ? Un Flamand et un Wallon qui essayent de travailler ensemble pour monter un spectacle.Tous les clichés et caricatures de nos deux communautés y passent. C'est également notre façon de faire un pied de nez à ceux qui disent que l'on ne peut pas vivre ensemble. Ce sera un mélange entre des sketchs classiques et du stand up. On a déjà testé l’un ou l’autre extrait et cela a bien fonctionné, les retours sont bons mais nous avons encore un long chemin à parcourir. Êtes-vous fier du parcours déjà accompli ?

Oui bien entendu, je m’éclate sur scène et je suis heureux que cela continue. Vous savez, je pense que chacun a en soi ce que j’appelle personnellement une « boule noire », un stress ou une frustration quelconque. Pour ma part, l’humour et le stand up me permettent d’évacuer cette boule noire. C’est le premier objectif que je me suis fixé : m’amuser sur scène autant que le public. Puis, ce qui me conforte aussi dans l’idée que je suis à ma place, ce sont les gens qui viennent après la représentation pour vous remercier d’avoir passé un bon moment. Non pas pour vous féliciter, mais pour vous remercier. À ce moment-là, je suis aux anges. Est-il difficile de combiner votre métier et votre passion ? Oui et non. En fait, j’essaie de rentabiliser mes parcours. Par exemple, si je joue à Bruxelles, je vais m’arranger pour aller voir des clients avant dans la même ville. Cela me fait gagner beaucoup de temps. D’un autre côté, il est vrai que c’est quelques fois éprouvant. Mais l’adrénaline apporte beaucoup de bonnes choses. Evidemment, il ne faut pas faire cela tous les soirs mais je ne me suis jamais senti dépassé pour autant. Lors de votre passage début novembre au Made In Brussels Show, nous avons senti une aisance et une décontraction déroutante chez vous. Avez-vous travaillé cette présence scénique ? Non. C’est plutôt avec le temps que c’est venu. Petit à petit, et à force de faire des représentations, on arrive à gérer son stress. Je pense être aussi stressé que les autres mais j’arrive à canaliser cela et a le transformer en créativité. Est-ce difficile de devoir convaincre un public, qui ne vous connait parfois pas, en une dizaine de minutes ? Oui, vraiment. Maintenant, il existe des techniques dans le stand up. D’expérience, je peux dire que la première minute, vous devez convaincre

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le public que vous êtes drôle. Il vaut donc mieux commencer avec une blague de bonne qualité. Cela vous permet de vous attirer l’attention et le respect des spectateurs. Ensuite, terminer avec une vanne qu’ils n’oublieront pas. Maintenant, il faut savoir aussi prendre des risques. Que pourriez-vous dire aux jeunes gens qui souhaiteraient se lancer dans ce métier ? Le mieux, c’est de commencer comme MC, c’est-à-dire comme maître de cérémonie. C’est un rôle qui permet de développer le contact que l’on a avec le public mais aussi de tester quelques blagues. C’est un rôle discret mais qui permet de développer également son aisance sur scène, sa gestion du stress, etc. Pour le reste, il faut tenter sa chance et surtout, beaucoup jouer. Revenons à votre carrière. Vous avez joué en Flandre, en Hollande puis à Bruxelles et en Wallonie, pourrait-on vous voir en France prochainement ? J’ai déjà joué en France quelques fois. Lors d’un spectacle au Made In Brussels Show, des personnes qui étaient dans la salle m’ont invité à venir jouer dans un festival, Les Guillaumades, à Rouen. C’était un tremplin du rire où cinq humoristes « s’affrontent ». L’humoriste qui a remporté cette édition s’appelait Bastien, un énorme talent qui joue son spectacle à Paris. Il nous a littéralement balayé. Mais les échos sur mon passage ont été positifs. De plus, j’ai fait quelques scènes ouvertes au Spotlight à Lille. Finalement, votre carrière commence sérieusement à décoller. Vous attendiez-vous à un tel succès ? Un succès, il faut relativiser. Si je joue beaucoup, c’est parce que je démarche énormément afin de me produire dans des scènes ouvertes. Mais, même s’il est vrai que cela fonctionne plutôt bien, je ne me prends pas la tête pour autant.

Propos recueillis par Matthieu Matthys décembre 2013


Interview

Interview d’Arthur de Pins

© Thesupermat - Wikipédia

La rencontre Quel est votre parcours ? Comment en êtes-vous arrivé à la bande dessinée ? Je faisais de la BD quand j’étais ado. Ensuite j’ai fait mes études aux Arts Déco, une école un peu généraliste où il y avait toutes les matières, sauf la BD. Les profs y étaient un peu antiBD, dans la mesure où ils disaient que cela formatait beaucoup les styles. Je ne suis pas tout à fait en désaccord avec eux. Il se trouve que j’ai délaissé la BD pendant tout ce temps là pour me consacrer à l’animation. Je suis parti de cette école en sachant faire du dessin-animé et c’est ce que j’ai fait dans un premier temps. J’ai réalisé que ce n’était pas évident de faire ses propres histoires : soit on travaillait sur une grosse production pour quelqu’un d’autre, soit on pouvait faire des courts-métrages d’animation mais ça prend un temps fou, en fait, à développer (trouver les financements, etc.). Je me suis alors finalement orienté vers l’illustration et la BD, car c’était le moyen le plus simple pour concrétiser mes idées. Je vous avais découvert avec, justement, votre travail d’animation sur La Révolution des crabes. Il y a eu pas mal de projets tout autour (long-métrage, suites, BD, etc.), y at-il encore d’autres projets autour de ce concept ? http://www.youtube.com/watch? v=S6xncXA3rGM

Oui, même si, pour le moment, c’est en stand-by. J’avais pour projet de faire des suites au court-métrage, ensuite un projet de long qui, finalement, n’a pas trouvé les financements nécessaires et, finalement, j’en ai fait une BD. Cela ne veut pas dire que le projet de long est enterré, mais, je suis déjà très content d’avoir pu raconter mon historie en BD. La trilogie est, maintenant pour moi, bouclée. Mais, j’ai, tout de même, le projet d’un livre conceptuel et interactif, où l’on a la possibilité de voir l’histoire de plusieurs manières, en le retournant, avec des surprises cachées, etc. Ce serait le même univers, mais plus un livre pour enfants qu’une BD.

« Pour refaire un tome de Péchés Mignons, il faudrait vraiment une inspiration particulière » Vous avez commencé en BD avec Péchés Mignons, orienté plutôt vers l’érotisme et, maintenant, vous développez des concepts plus large public. Est-ce arrivé par opportunités ou d’une volonté de changer régulièrement de thématiques ? A la base, l’univers de Zombillénium est un univers qui m’est plus familier, qui ressemblait aux BD que je faisais

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ado, qui étaient plutôt fantastiques, avec des monstres, etc. Dans les années 90, il n’y avait pas beaucoup de fantastique en cinéma ou en littérature, et moi, mon but à l’époque était d’écrire des histoires fantastiques, mais avec un pont vers le quotidien, la vie de tous les jours, comme si je voulais un peu intéresser mon entourage qui s’en fichait éperdument. Je voulais les intéresser à l’univers fantastique ou, à l’époque, plutôt heroic-fantasy. C’était, à la base, mon souhait numéro 1, et c’est plutôt Péchés Mignons qui est arrivé comme un cheveu sur la soupe. Je faisais des dessins érotiques, des petites nanas, etc. Puis, le rédacteur en chef du magazine où je les publiais, m’a demandé d’en faire une BD mensuelle, ensuite le Tome 1, qui a été édité chez Fluide Glacial, et après, le 2, le 3 et le 4. Donc voilà, j’ai adoré faire ça, mais c’était vraiment une opportunité. En tout cas, je suis très content, car cela m’a permis de mettre un pied dans la BD. Il n’y a plus d’avenir pour Péchés Mignons ? Je n’ai pas fermé totalement la porte et en ferait peut-être un dernier. Et si j’en refais un, il faudrait que j’ai vraiment une inspiration particulière, car je ne veux pas en faire un dernier juste pour encore en faire un. Je n’ai pas, pour le moment, d’inspiration particulière, et avec tous mes projets actuels, je ne suis pas vraiment dedans.


Ce qui peut déranger dans votre travail, c’est le dessin créé par Illustrator. Pourquoi choisir cette méthode de travail ? Et que dire à ceux qui vous reprochent de ne pas utiliser des techniques plus traditionnelles ? Pour l’instant, personne ne me l’a jamais vraiment dit. (rires) Maintenant c’est vrai qu’il y en a qui ont du mal à s’y faire. Personnellement je n’ai jamais beaucoup aimé dessiner avec un trait, avec de l’encre de chine, même avant de connaître Illustrator. S'il n’y avait pas eu Illustrator, j’aurais probablement dessiné le tout à l’aquarelle. J’ai toujours eu du mal à me conformer à l’encre de chine, au trait noir (ce qui est en vigueur en BD). Mes influences, en terme de BD, vont plus vers les illustrateurs comme Kiraz, Labanda ou Monsieur Z, qui ne font pas de traits autour des personnages. J’avais envie d’emmener ce style vers la BD.

de mes collègues, une curiosité, mais aussi une réticence. Mais j’ai arrêté de me poser des questions ; le monde la BD est un peu traditionaliste, il y a une certaine méfiance par rapport aux nouveautés. C’est un peu comme la musique, qui pendant des années se conformait à : vous faites un groupe de rock, vous devez avoir guitare, basse, batterie, chant. Et, quand l’électro est apparue ,les gens se sont dit : « Mais qu’est-ce que c’est que ce truc, avec un ordinateur ? », etc. Ce mois-ci est sorti le troisième tome de Zombillénium : le concept du parc monstrueux vient-il de votre amour des monstres ou l’idée estelle venue de quelqu’un d’autre ?

Ce qui est aussi intéressant, c’est que beaucoup sont intrigués par cette technique. Certains pensent que c’est fait en 3D. C’est pour cela qu’en festival, quand j’en ai l’occasion, je multiplie les démonstrations, pour montrer cette technique. C’est marrant, car j’en ai fait à Angoulême et dans pas mal d'autres festivals, et il y a très peu de collègues qui viennent. Ils peuvent me dire que mon style est bizarre, mais moi, je leur dis : « Venez ! » Je dessine et mets un an à faire un album comme eux. On sent, de la part

Justement, je trouve que, dans les deux premiers tomes, il y a beaucoup plus d’humour et que ça devient au fur et à mesure, de plus en plus noir. Est-ce que cela va continuer sur cette lancée ? Oui. Ce qui arrive à ces personnages n’est pas forcément marrant ; même dans le tome 2, on voit un bébé dans une poubelle, une mère qui frappe son enfant, etc.

Peut-être que les gens pensent qu’avec Illustrator, on peut devenir plus fainéant, en réutilisant des décors tout faits, que ça s’apparente plus à du graphisme, contrairement au dessin sur papier où l’on doit peut-être tout créer ? Tout d’abord, moi je décide à la main, pas avec mes pieds (rires). Mais c’est vrai qu’avec Illustrator, il y a la tentation de faire des banques d’images. Moi personnellement je ne le fais pas. Tout d’abord, parce que j’avais essayé sur Péchés Mignons et j’ai remarqué que je passais plus de temps à réadapter l’image, que ça ne sert à rien et en plus, ça appauvrit le dessin qui n’évolue plus. D’ailleurs, je varie aussi les angles et ça me force à faire bouger les personnages.

impôts ? ». La réponse était oui, car tout le monde paye ses impôts ! (rires) Ensuite, je me suis demandé quels genres de travail ils pourraient faire et dans quels emplois ils seraient à visage découvert. J’avais donc les monstres, la thématique du parc, la vie en entreprise, etc. Au début, j’étais plutôt parti sur de petites chroniques au sujet de la vie de bureau. Mais très vite, l’envie d’en faire plus a pris le dessus, car je savais déjà que j’allais faire plusieurs albums. Avec surtout de l’aventure, du drame et des petites touches d’humour par-ci, par-là.

Mais ça n’arrive pas aux héros !

A la base, je faisais déjà des BD avec des monstres quand j’étais ado, dont une avec un squelette, une momie, un vampire, etc. mais dans un univers médiéval. Mais, parfois, on a besoin d’une petite étincelle, d’un petit coup de pouce qui nous refait prendre goût aux choses que l’on avait abandonnées. C’est arrivé avec Spirou. Je connaissais déjà Frédéric Niffle (rédacteur en Chef de Spirou, ndlr) et il m’a commandé une couverture d’un Spécial Halloween de Spirou. Je lui ai fait une couverture où l’on voit une galerie de monstres et, en voyant que ça me plaisait beaucoup, il m’a demandé si je voulais faire une série avec les monstres de la couverture. C’était le formidable point de départ d'une histoire dans laquelle je voulais créer une inversion : les monstres sont les gentils et les humains, les méchants. Pour le Parc d’attraction, c’est venu d’une réflexion, peut-être un peu débile, sur « si les monstres était parmi nous, est-ce qu’ils payeraient des

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Oui, effectivement, pour les héros, ça commence à chauffer, car, dans le tome 3, ils perdent tous à un moment donné le contrôle : Francis n’arrive plus à gérer son entreprise ; Aurélien fait un burn-out ; Gretchen craque et lui avoue pourquoi il est là, etc. Les personnages commencent à se faire bouffer par un système qui, jusqu’ici, marchait bien et, c’est pour cela qu’à partir du tome 3 et jusqu’au tome 6, on rentre vraiment dans le vif du sujet ; c’est à partir de maintenant que tout va s’enchaîner, pour aboutir à la conclusion. Donc, il y en aura 6 ! Et si ça fonctionne, vous continuez ? Il y en a au moins 6 qui s’appelleront Zombillénium. Après, c’est sûr que j’aurais envie de faire quelque chose avec les personnages dans un spin off, un deuxième cycle. Vous avez choisi le Nord de la France pour y installer le parc. Estce que c’est par rapport au contexte socio-économique difficile ? Parce que vous venez du Nord ? Alors, je ne viens pas du Nord, mais, par contre, je connais un peu, car décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts j’avais une copine qui venait de la région de Valenciennes. Mais effectivement, la première raison est le contexte socio-économique qui se prête bien aux drames sociaux. J’aurais eu moins d’intérêt à le situer en Corse, par exemple. L’autre raison, c’est pour le fait que ce soit plat. Ça aurait pu être en Belgique, d’ailleurs ! Les gens me parlent d’ailleurs de Charleroi, mais je leur laisse la paternité de cette réflexion. (rires) C’est le côté plat et le climat qui renforce la silhouette du parc. Ça lui donne un côté inquiétant et aussi un côté « mirage », fantomatique. A se demander s'il existe vraiment. Y a-t-il aussi la volonté d’inscrire l’histoire dans le réel en la situant géographiquement ? Bien sûr, c’était d’ailleurs hyper important de situer l’histoire dans un endroit précis, pour je puisse mélanger le réel et l’imaginaire.

pouvoir, mais leur force est d’être tous ensemble. Même si, suite à la fin tragique du tome 3, le rapport de force revient aux cadres. Pourquoi y a-t-il dans le comité d’administration des humains ? Parce qu’il y a des actionnaires : Zombillénium a ouvert son capital aux humains et donc c’est à la fois le diable qui possède les âmes et les humains qui possèdent les infrastructures. Les humains se comportent finalement comme des monstres. On réalise qu’ayant un pouvoir dans le parc, ils pourraient avoir des décisions plus humaines que le diable, mais, finalement, ils sont encore pires : ils veulent juste que le parc fonctionne et ramène de l’argent. Tout ça, dans le but de se poser la question : « mais qui sont les vrais monstres ? »

Quand je faisais mes repérages sur Google Earth, dans le Nord, j’ai pris un endroit avec beaucoup de champs où il n’y avait pas beaucoup de villes, pas loin de Douchy-les-mines. Mais là où je me suis un peu planté, c’est qu’en allant y faire des repérages photos, j’ai remarqué qu’en fait, ce n’était pas si plat que ça. Je suis même allé à l’endroit précis de Zombillénium et c’est un petit peu vallonné. C’est tout de même un Nord un peu fantasmé, un Nord tel que l’on se l’imagine.

J’en ai profité pour essayer des cadres plutôt cinématographiques, où on voit tout la ligne d’horizon, puis un gros plan sur la main, ensuite une vue d’en haut, etc. On pense au début que le héros sera Aton, puis Aurélien et on se rend vite compte que Gretchen prend une place très importante, qu’elle est le centre de beaucoup de sousintrigues,… Elle est un peu passée au second plan dans le tome 2 car il se centre un peu plus sur Francis et Sirius. Mais on la retrouve avec Aurélien dans le tome 3 et l’on comprend pourquoi ils sont là. C’est bien de faire mystères, mais, à un moment, il faut aussi commencer à révéler des trucs. Je suis fan de Lost, où on cultive les mystères sans pour autant donner toutes les réponses, mais cette lacune m’a poussé à me dire que, chez moi, tout devait être carré, que rien ne devait être laissé au hasard. Combien de temps faut-il pour concevoir un tome de la série ?

Pour en revenir à l’histoire même, j’ai l’impression que les monstres ayant une place importantes sont les zombies ; est-ce un monstre qui vous plaît particulièrement ou c’est par la force des choses qu’il est fort présent ?

En revenant sur la fin tragique du 3, et le personnage de la momie, est-ce que le premier tome avait été écrit avant d’imaginer des suites ? Car le running gag où elle veut partir dans le sud n’est pas exploité par la suite.

En fait, j’avais imaginé plusieurs catégories de monstres, et pour les implanter dans l’entreprise, j’ai imaginé que chaque catégorie correspondait à une catégorie professionnelle. C’est-à-dire les ouvriers étaient les zombies ; ensuite, les cadres sont plutôt des loupsgarous ; les dirigeants sont des vampires et le PDG, le diable. Les zombies étant la main-d’œuvre, les emplois précaires, ils sont donc plus nombreux. Seuls, ils ont moins de

J’ai trouvé ce dont je voulais parler en finissant le premier tiers du 1er tome. Les cinq ou six premières planches sont parues dans Spirou sans que je sache vraiment où je voulais aller. La première scène est importante pour planter le décor, mais, au niveau du récit, elle ne révèle rien de ce qu’il va se passer. C’était un peu un galop d’essai, car la seule expérience de BD que j’avais, c’était Péchés Mignons. Pour la première fois, je pouvais enfin faire une BD avec des longues cases.

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Pour le premier, il m’a fallu 9 mois ; 11 pour le deuxième et le troisième. Ce dernier m’a demandé pas mal de boulot, car tout se passe au sein du parc. Les scènes se passant dans la campagne ou dans une voiture, sont moins galères à dessiner. Il y a ici pas mal de cases où il faut à chaque fois créer des bâtiments, des attractions. Pour la page 10, j’ai dû créer, pour la moindre case, un décor du parc d’attraction et une foule. Je pense aussi à toute la scène dans le roller coaster, qui va de la page 19 à la page 25 (Aurélien devient fou et est prêt à tuer tous les passagers d’un wagon, ndlr). La difficulté, ce sont les 16 passagers du wagon. J’ai trouvé des têtes, un peu au hasard, sur internet, et puis, je me suis imprimé une feuille avec les 16 têtes pour être sûr, à chaque fois, de les redessiner correctement. Il y a un côté un peu comédie à ce moment-là. Je voulais que les passagers ne soient pas seulement des victimes, mais prennent aussi part à l’action. Il y a une espèce de mini-théâtre au sein de ce roller coaster où ils commencent tous à discuter, s’engueuler, etc. Ce qui fait qu’Aurélien garde finalement son côté humain et décide de ne pas les tuer.


Un peu comme dans un film qui se passe dans un lieu clos, n’y a-t-il pas des difficultés de garder toujours en tête la géographie du lieu ? Que l’auteur sache où il en est, mais aussi fasse attention à ce que le lecteur ne se perde pas. Je n’ai jamais fait de carte de Zombillénium, malgré quelques repères, comme les trois tours ou les attractions récurrentes. A la page 43, on peut voir que le parc a une forme de pentacle, qu’il a des allées, etc. Mais je n’ai jamais fait de carte détaillée, car j’ai envie d’avoir la liberté de faire ce que je veux comme décor, que le parc soit un peu comme un mirage. Même s’il est situé géographiquement ; à l’intérieur, c’est comme s’il était dix fois plus grand et qu’il puisse continuer jusqu’à l’infini. Est-ce que le quatrième tome est déjà planifié ? Non, pas encore, car je vais justement commencer à travailler sur le film. Le

développement est fini et je travaille depuis deux mois sur le pilote. Ce sera un clip pour un groupe qui s’appelle Skip the use, pour leur prochain album. On les avait contacté pour qu’ils fassent la BO du futur film, on s’est bien entendus, et, pour les 4 minutes destinées à vendre le projet du film, on a créé un clip pour leur prochain album. Ce sera dans le style de la BD, mais en mettant aussi en scène le chanteur et le guitariste dans un road movie dans le Nord de la France où ils croiseront des monstres.

Editions Dupuis, 48 p.

Facebook : http://www.facebook.com/pages/ Arthur-de-Pins-ArtWork-BanDEssin %C3%A9es/129583080392279

En BD, je continue Zombillénium et, à part le livre sur les crabes chez Soleil, je n’ai pas encore trop de projets. Il va tout de même y avoir l’intégrale de La Révolution des crabes qui va sortir, l’intégrale de Péchés Mignons aussi. D’ailleurs, quand on réédite l’intégrale, ça veut souvent dire que c’est fini. (sortie prévue cette fin d’année)

Le point de départ est l’existence, dans le Nord de la France, d’un parc appelé Zombillénium. Il a la particularité de n’avoir comme travailleurs, que de véritables monstres : zombies, vampires, loups-garous, momies, etc. Aurélien atterrit dans ce monde après avoir été renversé par la voiture de Francis Van Bloodt, le directeur du parc qui, pour le sauver, va le mordre et l’intégrer dans l’équipe. Aurélien, devenu une créature imposante, va se révéler un coup de boost pour le parc. Il rencontre tout ce petit monde et en pince pour Gretchen, la mystérieuse stagiaire aux pouvoirs de sorcière.

d’Arthur De Pins

Site web : http://www.arthurdepins.com/

Malgré un agenda déjà bien chargé, y a-t-il d’autres projets dont vous voudriez nous parler ?

Nous découvrons depuis peu le monde créé par Arthur De Pins : Zombillénium, nouvelle saga monstrueuse.

Zombillénium : Control Freaks - Tome 3

Là, je suis totalement à fond sur l’adaptation film de Zombillénium.

Dans ce troisième tome, on découvre un parc en pleine effervescence car Behemoth luimême envoie Bohémond Jaggar de Rochambeau pour seconder Francis et redynamiser le parc tombé dans le classement. Sa réputation est celle d’un tueur et en dehors du parc de loisirs, il est surtout là pour fournir un quota d’âmes à Behemoth. Au même moment, Aurélien est en burn-out et risque de faire des dégâts. Heureusement, il est sauvé par Gretchen qui a un projet pour lui… Arthur De Pins a commencé avec Péchés mignons, ouvrage erotico-humoristique chez Fluide Glacial. Il change diamétralement de sujet et explore un monde fantastique. Déjà le

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dessin est moderne et les courbes rondes. Il réutilisera ce style pour Zombillénium, en donnant par contre plus de réalisme aux personnages. Ce style, justement, pourra décontenancer beaucoup d’amateurs de BD pour son modernisme très informatisé, le dessin paraissant tout droit sorti d’Illustrator. Il n’est malgré tout pas désagréable à regarder et les personnages sont très bien caractérisés. Mais le plus passionnant, c’est bien sûr l’histoire et le concept. Développer dans un monde réaliste, un parc surréaliste composé de monstres et de morts-vivants est original et intriguant. L’histoire, proche des déboires de la vie réelle et l’évolution des personnages, souvent plus mystérieux qu’ils en ont l’air, donnent chaque fois l’envie de passer au tome suivant. On peut dire aussi que le succès est au rendez-vous, après son passage dans le célèbre magazine Spirou, son propre site web interactif et dans l’attente d’un nouveau tome, on tombe par hasard sur une fiche Allociné… et oui, une adaptation est en projet avec De Pins aux commandes. Finalement, Zombillénium peut décontenancer un public de puristes par son dessin très informatisé mais l’histoire, passionnante, originale et pleine de mystères, devrait les convaincre de prendre le train en marche pour cette saga Dupuis.

Loïc Smars

décembre 2013


Interview

Interview d’Adeline Blondiau

© Frantogian - Wikipédia

La rencontre Aujourd’hui talentueuse actrice, scénariste et mère de deux enfants, l’héroïne de la série « Sous le soleil » nous confie son ressenti face à deux passions qu’elle conjugue au quotidien : être maman et pratiquer le yoga.

corps mais c’est également un moment agréable avec notre petit. Le yoga permet en effet de créer un lien beaucoup plus fort avec son enfant que celui que l’on peut ressentir lors de l’allaitement ou de la prise dans les bras. La fusion est différente.

également proposé de faire une préface. On avait dans l’idée de lancer un autre processus de suivi de la femme, après l’accouchement.

La sortie de son nouveau livre « Yoga Grossesse » nous a donné l’envie d’en savoir un petit peu plus sur cette maman pleine d’énergie et de projets.

Le yoga permet également de pouvoir avoir des activités Maman-bébé ou Papa-bébé.

Oui je le pense, car il y a une gestion de l’énergie qui n’est pas du tout la même. Dans le yoga, il y a le travail physique mais il y aussi ce respect du corps où on lui donne le temps de récupération. La séance de relaxation est très importante. Comme en méditation, par exemple.

Votre nouveau livre « Yoga grossesse » vient tout juste de sortir en librairie. Pouvez-vous nous en parler ? Pourquoi avoir abordé le lien entre le Yoga et la femme enceinte ? Je pratique le Yoga depuis que j’ai 13 ans. Je l’ai toujours pratiqué, enceinte ou non. Lorsque je suis tombée enceinte pour la première fois, il n’existait pas encore beaucoup de livres sur le Yoga à pratiquer enceinte et sur le suivi de la femme. Il y a beaucoup d’ouvrages qui s’adressent à la femme enceinte et puis, qui après l’accouchement, la laisse tomber. De plus, la plupart d’entre eux étaient en anglais. Je voulais proposer un ouvrage intéressant, qui regroupe les trois stades de la grossesse, reprenant aussi les termes compliqués avec leurs explications. En outre, je souhaitais aussi parler de la période postnatale où l’on se retrouve avec son bébé. Il faut reconstruire son

C’est un livre très didactique, même pour une femme qui n’a jamais fait de yoga de sa vie. Le yoga « prénatal » et « postnatal », sont-ils tous les deux adaptés à tous les types de grossesses ?

« Je pratique le yoga depuis que j’ai 13 ans et je l’ai toujours pratiqué, enceinte ou non » Le yoga est accessible à tout le monde, exceptés les grossesses à risques. Ces femmes-là devront aller voir leur médecin pour avoir un avis médical sur la question. Pour l’écriture du livre, je me suis faite soutenir par un obstétricien travaillant sur Paris qui est assez connu. Il m’a suivit tout au long de mes deux grossesses. Il a trouvé que l’idée du bouquin était très bonne et m’a

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Est-ce que le yoga change notre récupération physique post-natale ?

Les premiers mois avec bébé sont souvent difficiles. On ne dort pas beaucoup et l’épuisement se fait vite sentir. C’est une période très fatigante pour les parents. Le yoga nous apprend à faire une initiation à la respiration, à la préméditation et à la relaxation consciente. Grâce à cela, j’arrivais à bien tenir le coup quand j’accumulais des nuits blanches. Ce qui me sauvait était de pouvoir me relaxer complètement, d’être en quelque sorte dans le même état que lorsqu’on fait de l’hypnose. Lorsque je suis sur les tournages, je manque souvent de sommeil. Dans ces cas-là, je pratique également mon yoga. Et ça marche !


Il ne faut pas oublier que le sommeil est la seule dette que vous devez obligatoirement à votre corps. Il est très important et les marques de fatigue se voient assez vite.

le désirent, retourner vers cet outil et dans ce cas-là, l’utiliser à bon escient.

Rien que le fait de jongler avec la relaxation, vous êtes déjà gagnant.

Wilona aime m’imiter quand je pratique mes séances. C’est une discipline qui l’amuse beaucoup. Et puis, c’est également un moment qui n’appartient qu’à nous.

Mariana Roth et Carla Truchot sont toutes deux professeur de yoga. Elles vous ont aidées durant l’écriture de votre livre. Vous ont-elles également suivies durant votre grossesse ?

J’ai juste été obligée de réadapter certaines postures parce qu’elle se met sur moi. En fonction de l’exercice que je fais, j’essaye de le modifier pour que son poids puisse me servir dans ma posture.

Mariana Roth était mon professeur de yoga à la base. Même si je le pratique seule, j’aime bien retourner dans les cours pour approfondir mes connaissances et pour évoluer. Dans les cours de yoga pour femmes enceintes, on se retrouve chacune à un stade différent. Cela a un côté magique et très mignon.

Je trouve cela formidable car on a vraiment la main sur son corps. On tisse un lien très profond avec son enfant.

Vous avez énormément pratiqué le yoga avec vos deux enfants, Aïtor et Wilona. Est-ce que la discipline ne devient pas un peu plus difficile à pratiquer quand les enfants grandissent ? J’ai effectivement pratiqué le yoga avec mes deux enfants. Je leur ai proposé cet outil dès leur plus jeune âge. Aïtor n’est pas sportif, en revanche il est très souple ! Après, on ne peut pas forcer quelqu’un à utiliser un outil, on peut juste se contenter de lui mettre entre les mains. Je pars du principe qu’en fonction de la vie qu’ils auront, ils pourront, si ils

Il y a aussi une pièce que l’on a terminée récemment et que l’on aimerait bien mettre en place. De plus, les tournages de « Sous le soleil » viennent tout juste de s’achever ! Hier, on était déjà en réunion pour écrire les prochains textes, refaire les personnages. L’émission est repartie depuis un an et cela fonctionne bien. Je suis assez touchée et émue de voir à quel point les gens nous ont attendus et sont contents de nous retrouver. On a l’impression de retrouver des vieux potes d’enfance, cela a un côté rassurant. Il y a une énergie incroyable sur ce tournage. J’ai également mon émission à la RTBF qui me prend une journée par semaine en Belgique. J’en suis super contente !

Certaines grossesses sont prématurées ou prennent du retard. Dans ce cas-là, le yoga est capable de ralentir ou d’accélérer les choses grâce à des postures ou à la respiration.

Le yoga c’est un respect du corps et à chaque fin de séance, on est remercié d’avoir « honoré notre corps ». Cette discipline possède une grâce incroyable.

Oui ! Je vais certainement revenir sur les planches au mois de décembre, accompagné de mon dessinateur, avec des lectures de contes pour enfants.

C’est votre premier bouquin sur la grossesse mais ce n’est, par contre, pas votre premier livre qui s’adresse au monde des enfants… Oui effectivement ! D’ailleurs, je viens de sortir une bande dessinée pour les enfants. Le titre est « Les Pochitos », il est sorti en juin 2013. C’est un conte sur la tolérance que j’ai créé avec mon dessinateur et co-éditeur Fabien Rypert.

C’est beaucoup de boulot mais c’est génial et super intéressant. Il y a une vrai énergie positive et je suis passionnée par tout ce que je fais. Je suis quelqu’un qui s’intéresse beaucoup. Je suis en train de signer chez un nouvel éditeur pour un nouveau livre. C’est encore une nouvelle aventure qui commence. Et puis, je viens de devenir éditrice moi-même en livres pour enfants. Tout est assez cohérent. C’est toujours raconter des histoires d’une manière ou d’une autre !

Propos receuillis par Laura Delbrassinne

J’ai donc fais le scénario. J’ai proposé une histoire sur la tolérance et la différence de couleur, de culture. On a pris du temps pour le faire, mais il est joli et il plait beaucoup ! On peut le trouver sur internet, essentiellement sur Amazon. En plus de vos deux nouveaux livres « Yoga Grossesse » et « Les Pochitos », avez-vous d’autres projets ?

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décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts !

L’écosse et Peter May de Peter May Editions Rouergue

La critique 1) « L’Ile des chasseurs d’oiseaux » (Roman n°1) Avec ce premier thriller, extrait d’une trilogie des plus obscures, Peter May nous transporte, au fil des pages, dans un univers qu’il connaît bien : l’Écosse. On y apprend le gaélique, langue magnifique et prête à se faire oublier, mais aussi les rites et coutumes d’un peuple dont les traits ont été taillés dans la pierre, au fil du temps. Le titre interpelle et correspond parfaitement à ce roman, tourné vers une spécialité de l’île qui en laissera froid plus d’un ou d’une. L’auteur nous prend par la main pour nous faire découvrir un territoire hostile et glacial, trop souvent secoué par une nature dure et téméraire. Mais Peter May ne nous parle pas que de vent ; il nous secoue face à nos propres tempêtes internes. Derrière son écriture, la force sauvage de l’île de Lewis se mêle aux destins tragiques d’hommes torturés par leurs démons. Il mêle la fureur et le crime à sa stigmatisation de l’amour et de l’honneur. La description glauque d’un geste inhumain se cogne contre cette plume qui reste si fine et si impressionnante. De mystères en oppositions, notre héros principal, Fin Macleod, nous donne une belle leçon de vie en nous infligeant une vérité : « Derrière chaque homme se cache son ombre, et derrière chaque ombre se cache nos plus grandes peurs ». « L’île des chasseurs d’oiseaux » est un roman prenant, fort et qui nous maintient en haleine. L’auteur signe une nouvelle fois un talentueux travail. 2) « L’homme de Lewis » (Roman n°2) Dans ce deuxième tome, notre connaissance de l’Écosse ne fait que s’agrandir.

L’auteur ne joue pourtant plus sur le même tableau. Le crime y est cette fois encore plus tordu, les personnages sont d’autant plus complexes qu'ils sont difficiles. L’énigme est bien faite, élaborée sur le schéma typique de la peur de mourir seul, délaissé. La philosophie de l’auteur face à la mort est brusque et tendre en même temps. Notre voyage continue, dans le vent et le froid ; mais cette fois-ci, Peter May nous fait goûter à l’amnésie de l’âme et à la solitude. Nos émotions sont décuplées par des propos rudes et amers. Le mensonge est prôné, le masque est devenu inutile et l’homme, ce terrible animal, nous dit enfin la vérité. Une vérité sur ce qu’il est, sur ce qu’il aurait dû ou aurait voulu être. L’œuvre tourne le dos à la bonté, s’ouvre sur l’enfer de l’homme : lui-même, ses gestes et ses pensées. Bondé d’émotions et de sentiments que nous ne connaissons que trop bien, les attitudes des personnages nous renvoient à nos propres erreurs. L’esprit rupestre de « L’homme de Lewis » se conjugue parfaitement avec « L’île des chasseurs d’oiseaux », donnant une suite, non sans surprise, à ce thriller en trois tomes. Après avoir lu le premier livre, on en veut encore plus. On a comme un arrière-goût en bouche : c’était agréable de voyager si près et si loin en même temps qu’on voudrait déjà y retourner. En reprenant la course de Fin Macleod à ses côtés, on se sent vivant. On aimerait, secrètement, que le roman ne s’arrête plus.

3) « L’Ecosse de Peter May » Livre Photo Comment ne pas se laisser séduire par une description imagée de notre aventure en Ecosse ? Ce livre-album nous procure un dépaysement des plus total. Au fil de la trilogie, Peter May nous offre la possibilité de nous situer dans notre propre imagination. Notre ressenti est amélioré, on n'est pas déçu. Il se confie en nous montrant ses propres photographies du pays qui le passionne tant. Les explications des lieux, des mots et du peuple écossais nous sautent enfin aux yeux. Le livre nous corrige notre vision des Highlands, des falaises, des blackhouses, des ports, des pêcheurs et de leurs bateaux ou encore de cette mer, si sombre mais qui réussit tout de même à nous donner des envies d’ailleurs. « L’Ecosse de Peter May » c’est aussi une Écosse qui se donne une image plus neuve, plus vraie et plus directe. On se sent concerné, on marche dorénavant sur les traces de Fin Macleod grâce à des paysages à couper le souffle. La Nature dans sa plus belle robe. Il s’en dégage un charme inégalé, une approche assez séduisante pour un homme aussi difficile dans sa vision de l’être humain. L’auteur nous ouvre les yeux. Il y a autre chose à voir, et ça commence déjà sur le pas de notre porte. Prochaine destination ? On attend le futur choix de Peter May avec impatience !

Laura Delbrassinne

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Y a quoi dans mon frigo ? de Marie Borrel et Sylvie Kitchen Editions La Martinière

La critique Le livre de cuisine « Y’a quoi dans mon frigo » est écrit par deux femmes, l'une journaliste et l’autre animatrice d'un blog de recettes simples et rapides. Avant de voir les recettes, dans la première partie du livre, on passe en revue les aliments que l’on pourrait trouver dans le placard, le congélateur et le frigo. Pour chaque catégorie, un petit conseil ou une petite astuce sont donnés. Ensuite, le livre propose 80 recettes à partir de 20 produits seulement. Et finalement, les annexes sont réservées aux conseils d’achat : Quand acheter ? Comment congeler ? Comment associer ? Ces annexes ne sont pas longues et illisibles, au contraire !! Pour ce qui est de quand acheter, au lieu d’un long texte fleuve, les auteures présentent un calendrier où l’on peut trouver les légumes, les fruits et les produits de la mer de saison pour chaque mois. Un petit aide mémoire pratique pour manger les produits au moment où ils sont les plus abondants et les moins chers !! Les explications sur la manière de congeler et d’associer les différents produits sont données en deux feuilles claires et précises de façon à pouvoir y jeter un coup d’œil rapidement

et facilement avant de cuisiner. Quant au contenu, la présentation des recettes est dynamique : une page de recette avec, en face, la photo correspondante. Le petit plus : on trouve un petit paragraphe pour remplacer certains ingrédients qu’on n’aurait pas et des astuces pour gagner du temps ou pour accompagner la recette. De plus, du point de vue pratique, les recettes ont l’air appétissantes. Le Suricate a d’ailleurs décidé de tester une recette pour vous : le fondant chocolat betterave. La recette est facile et rapide à réaliser, mais nous avons dû faire face à un doute : pour la recette, il fallait 200g de betteraves, mais on ne précisait pas laquelle. Nous avions un pot de betterave vinaigré, qui est la forme la plus courante et celle qui se retrouve le plus souvent dans le frigo. Cependant, nous avons trouvé le goût du gâteau un peu trop fort en betterave. Il semblerait dès lors que la betterave nature eût donné un meilleur résultat.

ingrédients « types » que l’on pourrait avoir facilement dans son frigo (magret de canard, lentilles corails, …). Ceci dit, il faut quand même souligner que beaucoup de recettes semblent très savoureuses. Du carpaccio de saumon et de courgette au gâteau à la banane et au chocolat en passant par des bouchées de poisson au jambon cru, on peut tout préparer ! De l’entrée au dessert, en passant par le plat principal, avec trois fois rien, ou presque, en associant des ingrédients auxquels on ne penserait pas, on découvre et prépare des trésors gustatifs.

Noelia Gonzalez

Le petit bémol du livre est le suivant : certains ingrédients présents dans les recettes ne sont pas vraiment des

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Silo de Hugues Howey Editions Actes Sud

La critique L’histoire se situe dans un futur post-apocalyptique non défini. L’humanité, plusieurs milliers de personnes, vivent dans un énorme Silo souterrain de 144 étages, nommé le Silo 18. Les habitants, vivant dans ce silo, savent que dehors, l’air est irrespirable. Et la seule chose qu’ils peuvent voir ce sont les images d’un paysage désolé et aride retransmises par des caméras. La société est stratifiée, ultra réglée et ultrahiérarchisée. Ainsi au sommet, il y a le maire et le shérif qui font respecter la loi ; au milieu, on retrouve les techniciens qui contrôlent les communications et, tout en bas, il y a les mécaniciens, les « graisseux », ceux qui alimentent le silo en énergie et les porteurs qui montent et descendent constamment l’escalier central métallique. Mais certains se demandent ce que signifie cette vie confinée sous la terre et ils veulent savoir ce qu’il y a par-delà les collines que l’on entrevoit à travers le hublot du dernier étage. Pourtant, enfreindre la loi du silence à propos du monde extérieur, c’est se condamner, car la punition, c’est l’exclusion, et donc la mort certaine. Pourtant, en suivant les personnages tels que Holston, Jahns, Marnes et Juliette, que l’on choisit comme nouveau shérif, suite à la disparition de Hoslton, on verra que le mystère du Silo sera graduellement révélé et que le monde n’est pas exactement comme on l’avait décrit. Silo remporte déjà un grand succès et le livre a été choisi par Actes Sud pour

inaugurer sa nouvelle collection qu’il a baptisée Exofictions. Cette collection se composera des littératures qui regroupent la science-fiction, la fantaisie et le fantastique. Le livre a déjà été traduit en 20 langues et les droits ont été rachetés par 24 maisons d’édition. Une adaptation cinématographique est en cours et c’est Ridley Scott (réalisateur entre autre de Hannibal, Mensonges d’Etat et Prometheus) qui en a racheté les droits. L’auteur de Silo, Hugh Howey, est né en Caroline du Sud, il y a 37 ans. Bien que son premier roman n’ait pas eu de succès, l’aventure de ce jeune écrivain a commencé en juillet 2011 par l’autopublication, sur Amazon, d’une nouvelle intitulée « Holston », qu’il vendait au prix de 99 cents. En principe, il ne devait pas y avoir de suite mais, selon Howey, l’engouement des internautes fut tel qu’ils lui demandent une suite. Finalement, l’auteur continuera d’écrire, et ce seront cinq parties qu’il réunira en un volume intitulé SILO. Ensuite, deux autres volumes complèteront la trilogie. Le livre est donc constitué de cinq parties ou nouvelles : « Holston », « Le bon calibre », « Le bannissement », « Le déliement » et « Les naufragés ». Les descriptions sont telles qu’elles permettent de se plonger dans l’histoire sans pour autant être lourdes et agaçantes. Les personnages sont intéressants et attachants, surtout quand on sait que l’auteur s’est inspiré de toutes les

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femmes qu’ils admirent (sa mère, sa sœur, sa femme) pour créer l’héroïne Juliette. L’action est bien ficelée et le lecteur est toujours avide d’en savoir plus. Si le concept de futur dévasté et apocalyptique n’est pas innovant, l’écriture et la façon de tourner l’histoire sont tout à fait fascinantes. Ce livre s’adresse à tous les publics et même aux lecteurs qui, à priori, ne sont pas attirés par ce genre de littérature à la fois futuriste et fantastique. Personnellement, j’ai perçu une double lecture, la littérale et la symbolique. Car la peur de sortir du silo peut être aussi mise en parallèle avec le sentiment d’insécurité que l’on vit aujourd’hui, car tout ce que l’on raconte du monde extérieur, que ce soit dans les médias ou à la télé, est tellement horrible et terrifiant. En définitive, ce livre ne se lit pas, il se dévore et les quelques 560 pages, qui le composent, ont le pouvoir d’arrêter le temps.

Marie-Ange Nunez


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La Haine de l’arbre n’est pas une fatalité d’Alain Baraton Editions Actes Sud

La critique Ce qui révolte Alain Baraton, qui aime passionnément les arbres, ce sont les multiples outrages que les hommes font subir à ces végétaux exceptionnels. Dans cet ouvrage en forme de pamphlet, il plaide, avec la véhémence et l’humour qu’on lui connaît, pour qu’enfin les arbres soient respectés et protégés. Pour qu’enfin on les considère non pas comme des morceaux de bois inertes, mais comme des êtres vivants dont le rôle est primordial pour la beauté et la préservation de notre environnement, pour notre santé et pour notre équilibre.

coupe quelques arbres centenaires pour agrandir un parking ; et ailleurs encore c’est un arbre de plus de 600 ans qui est abattu car il gênait la rénovation d’une église. Il a aussi recueilli de nombreux témoignages, par le biais de ses auditeurs mais aussi en lisant la presse. Ces témoignages viennent brillamment renforcer la cause de l’auteur.

Alain Baraton est, depuis 10 ans, le jardinier en chef du Domaine national de Trianon et du Grand Parc de Versailles. Il est connu pour ses ouvrages au ton humoristique sur le jardin et ses chroniques sur France Inter. Cette fois, il change de registre. Dans cette œuvre, il hausse le ton et adopte plutôt une approche moralisatrice et édifiante pour prendre la défense des arbres.

Difficile avec ces exemples simples et concrets de ne pas être convaincus par le plaidoyer de Baraton. Sérieusement documenté, le texte est bien écrit, sans détour ni fioriture, après tout on n’est pas là pour faire du style. A travers ses lignes, on ressent l’énergie que l’auteur a voulu mettre dans ses recherches et ses travaux dans son combat pour les grands végétaux. Sa colère en devient presque notre colère. Du début à la fin, il explique clairement pourquoi c’est un non-sens d’abattre à tout va les arbres. Les dernières pages sont d’ailleurs une mine d’informations sur l’utilité, le fonctionnement et la richesse de ses géants du règne végétal.

Au fil de cet ouvrage, les exemples de non-respect défilent pour convaincre le lecteur : à Paris on abat un arbre pour faire gagner quelques secondes à un bus ; dans une autre région de France, on

Ce livre n’est bien sûr pas un roman mais une vraie prise de position. Il fait réfléchir et nous sort du cadre habituel de nos modes de vies où nous sommes totalement, ou presque, coupés de notre

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environnement. Une lecture intéressante et utile destinée à tout public ! Malgré tout, un point ou un détail dérangeant reste à souligner. Il est regrettable que ce livre soit imprimé sur du papier non recyclé et ne soit même pas disponible en format E-book. Un comble pour un auteur ardent défenseur des arbres…

Cynthia Tytgat

décembre 2013


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Bibliothèque idéale d’Agatha Christie d’Agatha Christie et photos de Martin Parr Editions Le Masque

La critique Voici une collection très particulière que nous propose Le Masque en cette fin d’année. Est-ce un nouvel auteur, un nouveau genre littéraire à la mode ? Et bien non ! Il s’agit tout simplement de la réédition des dix romans préférés d’Agatha Christie. En quoi est-ce particulier ? La réponse ne se trouve pas dans le contenu des livres, bien sûr. Le texte, bien que retraduit, est assez semblable à l’original. On pourrait d’ailleurs penser qu’une réédition de ce genre ne réserve pas de surprise. En effet, comment renouveler une collection de romans qui font partie des classiques de la littérature policière ? Pour cela, il ne faut pas chercher dans les livres, mais autour de ceux-ci. Au lieu de la célèbre couverture jaune et noire des Editions du Masque, on retrouve ici des photos illustrant les couvertures. Et pour ceux qui sont amateurs de photographie, l’origine de ces clichés ne fera aucun doute. Il s’agit bien entendu de photos prises par le célèbre photographe de l’agence Magnum, Martin Parr. Voilà un pari osé mais au final très payant. Car oui, Parr est connu dans le monde entier pour sa photographie au style provocateur. Ses couleurs vives, ses photos prises au flash sans artifice et dénuées d’esthétique. Sa manière de

dépeindre la société en montrant ses travers. Au départ, cela parait bizarre de lier ces deux univers. Et pourtant, à y regarder de plus près, ces deux personnes ont bien des choses en commun. Le plus évident est leur sens aigu de l’observation. Martin Parr tout comme Agatha Christie sont des témoins clefs de la société. Ils l’observent et la décrivent dans ses moindres détails. Ils mettent en lumière ce que la plupart des gens essaient de cacher. Aucun vice ou imperfection n’échappe à leur regard et les couleurs vives et contrastées de Martin Parr mettent davantage les défauts de ses sujets en avant. A l’heure des photos retouchées par ordinateur et des critères de beauté standardisés, on a ici un travail qui met en avant tout le contraire de ce que l’on attend d’un photographe. Il photographie ainsi de belles assiettes à dessert pour la couverture de Témoin indésirable, un vieil homme portant une casquette et fumant la pipe pour Le meurtre de Roger Ackroyd, un homme observant une ile avec ses jumelles pour Les Dix petits nègres ou encore de vieilles dames en train de discuter en prenant le thé. Christie aimait dépeindre ainsi les habitudes des gens qui paraissaient innocentes et qui traduisaient parfois bien des noirceurs refoulées.

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Parr nous offre sa vision de la bourgeoisie anglaise et nous permet également d’avoir un autre regard sur ces romans que l’on prendra beaucoup de plaisir à redécouvrir. De plus, l’ensemble des dix romans en question forme une suite cohérente et l’on observe avec joie ces clichés plein d’humour. Veuillez remarquer qu’il ne s’agit ici nullement d’un ensemble de romans lié à l’un de ses personnages fétiches (Poirot, Marple). Pour cela, des éditions intégrales sont déjà disponibles depuis un certain temps également chez Le Masque.

Christophe Pauly


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Dans la nuit de Belfort et Je suis/tu es/Calamity Jane de Nadia Xerri-L. Editions Actes Sud

La critique C’est un livre en deux parties indépendantes et, pourtant, interdépendantes. Ce qui les unit, c’est le tréfonds du western. La première partie est intitulée « Dans la nuit de Belfort ». Il est 5h57, Elisa vient de se jeter du balcon de l’hôtel et ses 4 amis sont en émoi. Pour comprendre l’histoire, il faut revenir en arrière, au début de cette soirée. Les 5 protagonistes : Franck, Tino, Elisa, Youri et David sont 5 directeurs commerciaux. Comme tous les trois mois, ils se retrouvent à la fin d’un séminaire de deux jours pour faire la fête et décompresser. Ils décident d’aller d’abord au karaoké et en fin de soirée, il mettent en scène un film, comme ils le font à chacune de leurs rencontres. Ce soir, ce sera Rio Bravo, un western. Ils font la fête et ils boivent beaucoup trop. Au cours de la soirée, l’alcool et le jeu des personnages de western qu’ils incarnent permettent aux langues de se délier et tous les non-dits vont s’exposer… Je suis/Tu es/Calamity Jane. L’histoire commence de nuit. Une jeune fille attend sous la pluie au milieu d’une route désertique. Une voiture arrive et freine pour l’éviter. C’est Calamity Jane qui la conduit. L’adolescente monte et commence à lui raconter, avec ardeur et fascination, comment dès l’âge de six ans, elle a senti que ses parents n’étaient pas ses parents. Elle lui raconte comment à l’âge de dix ans, elle a choisi sa mère : elle, Calamity Jane. Elle lui explique qu’à partir de ce moment, elle a voulu tout savoir sur sa vie et, qu’à 16 ans, elle a décidé de partir à sa recherche. Et voilà qu’elle la rencontre sur cette route qui

mène à Deadwood ! Mais le temps a passé et Calamity a changé. Elle est devenue raisonnable, elle a vieilli et, en plus, elle reconnaît que de tout ce qui a été écrit, de sa légende, une grande part a été inventée. La jeune adolescente se révolte et veut partir. Alors, Calamity décide de lui raconter sa vraie vie mais ce n’est pas de cette vie-là qu’elle veut. Elle veut la Calamity qui fait peur à tout le monde. Elle s’exaspère de plus en plus. Pour calmer le jeu, Calamity décide de lui apprendre à jouer au poker. Calamity, sentant que la jeune fille est toujours en colère, lui demande « T’as toujours eu du poids dans le cœur comme ça ? ». Pour l’aider dans son besoin d’identité, Calamity lui donne un prénom : Plume. Ce qui, dans la langue de Calamity, se traduit par Feathers. L’auteure française de cette œuvre Nadia Xarri-L., est née en 1971. Elle a commencé sa carrière au théâtre en 2004 avec la création de Viriginia vers le Phare, un spectacle inspiré de textes de Virginia Woolf. En 2006, elle a publié, un triptyque constitué de trois courtes pièces qu’elle a mis en scène: Solo d’Ava/L’une et l’autre/Boîtes et Solitude. Depuis, elle n’arrête plus et Actes Sud Papiers présente aujourd’hui sa nouvelle création qui est un diptyque qui nous plonge dans l’univers du western. Quand on lit les textes, on se représente immédiatement la scène tant l’écriture est proche de la scénographie. L’idée du décor vient naturellement à l’esprit et on éprouve un véritable plaisir à lire ces deux pièces. Les détails sont précis et on sent que tout réside dans les propos qui

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sont chargés de sens, empreints de tristesse et de recherche de soi. La Nuit de Belfort met en scène cinq personnages :quatre hommes et une femme. Ceux-ci sont à la fois pathétiques dans leurs délires et enclins à une violence déguisée sous les rôles des personnages de Rio Grande. La femme est particulièrement déchirée, on sent en elle la tristesse. Dans Je suis/Tu es/Calamity Jane, la jeune fille est une écorchée vive qui montre une violence tant dans ses propos que dans ses réactions. Cette fille se raccroche à un idéal incarné par son idole Calamity Jane. Ses discours sont agressifs et le langage qu’elle utilise est grossier. Il reflète le mode western sans pour autant tomber dans le cliché. Son personnage est dans la rébellion d’une adolescente en recherche d’identité. Les deux pièces ont en toile de fond le western qui permet de mêler révolte et violence dans les répliques. Original dans la façon d’exposer les écorchures de l’âme sans en avoir l’air. Magnifique à lire, on a envie d’aller le voir au théâtre, dommage que la mise en scène ne se circonscrive qu’à la France pour l’instant. A lire par les amoureux de la mise en scène et du théâtre mais aussi par tous ceux qui ont aimé les westerns et ceux qui pourraient les découvrir après cette lecture.

Noelia Gonzalez

décembre 2013


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101 bières à découvrir de Gilbert Delos Editions Dunod

101 whiskies à découvrir de Ian Buxton Editions Dunod

La critique Le jeu des tops ou des 101 meilleurs trucs choses est toujours un sport apprécié par le professionnel et souvent redouté par le lecteur qui a tendance à reprocher un classement effectué en dépit du bon sens ou ne prenant pas en compte le goût du public mais simplement l’avis d’une intelligentsia déconnectée ou d’une spécialiste dépassée. Dunod édite pour cette fin d’année deux livres dans ce style, permettant de goûter, apprécier, redécouvrir, etc. pas moins de 202 liquides alcoolisés d’exceptions, originaux ou simplement uniques. Qu’il soit consacré à la bière ou au whisky, 101 … à découvrir tente une approche différente des livres habituels en proposant non pas un top ni un classement de valeur ou des indispensables mais bien un répertoire de divers produits de différents pays essayés par son auteur. Le choix est fait en fonction du cœur, de l’originalité ou de l’implication des ouvriers repérés par les spécialistes. La mise en page est assez similaire des deux côtés : une introduction ou humeur sur leur spécialité, des fiches numérotées de 1 à 101 (ou 102 ?) et on termine avec des conseils de dégustation et l’adresse de spécialistes et cavistes où trouver la perle rare. Les fiches sont sympathiques mais parfois trop peu exhaustives : une anecdote, un peu de texte, les informations techniques et les différents goûts que l’on y retrouve. C’est peu, mais le

but est de nous renvoyer à la course à l’information. Plongeons-nous maintenant dans chacun des deux ouvrages : Le premier que j’ai lu était l’opus de Delos sur la bière. Avant même de commencer la lecture, il faut préciser que l’ouvrage est fait par un spécialiste français qui veut nous faire découvrir les bières de son pays, en pleine recrudescence de bières artisanales. C’est donc, à la découverte de beaucoup de bières françaises que nous partons au fil des pages. Mais attention, Gilbert Delos n’en fait pas un livre exclusivement français ! On retrouve évidemment les traditionnelles boissons belges et allemandes mais aussi des surprenants breuvages de partout dans le monde. Au fur et à mesure des pages, on ne peut nier la culture et le bon goût de Delos. Malgré tout on est parfois surpris par des choix étonnants. Quel besoin, à part le plaisir d’avoir des chiffres dans son classement alphabétique de parler d’une bière de la gamme 1664? Il évite tout de même le jugement de valeur. L’autre moment où l’on est déconnecté de l’avis de l’auteur est son parti pris à encenser certaines bières pourtant peu appréciées. On peut citer en exemple, son plaisir à boire de la Meteor, bière alsacienne qui a juste le mérite de ne pas appartenir à un géant de la production.

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La découverte des whiskies est assez similaire au premier ouvrage, seul la boisson change. Ian Buxton a par contre changé le style de classement, privilégiant un tri par pays. Ce qui met encore plus en exergue la volonté de faire découvrir des breuvages d’un peu partout. Et hormis les traditionnels et impérissables whiskies écossais, on se plaît à découvrir des curiosités venant de pays parfois inattendus ! (Afrique du Sud, Belgique, Espagne, etc.) Une partie intéressante, même si trop courte, est l’introduction de Buxton qui explique le pourquoi de l’augmentation des bouteilles, devenant plus un investissement financier qu’un plaisir de dégustation. Il privilégie les whiskies abordables et trouvables par n’importe quel quidam. Il laissera juste ces à priori de côté pour un bonus placé à la 102ème place en parlant d’un Johnny Walker très spécial dont il a pu goûter un échantillon. Plaisir coupable du spécialiste. Pour conclure, si on est amateur de bières ou de whiskies, on ne peut qu’apprécier ces ouvrages sympathiques. Malgré parfois trop peu d’informations ou de goûts étranges, les deux auteurs vont vraiment vous donner l’envie de découvrir leurs coups de cœur !

Loïc Smars


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts Il y a des moments où l’on se rend compte que les découvertes font partie des joies du critique littéraire. Le premier livre de Caroline Vermalle est ce genre d’ouvrage qu’on a pas découvert à sa sortie mais où l’on se rattrape avec le Poche jeunesse qui permettra de (re)découvrir ce road-movie original. On suit les trépidantes aventures de deux vieux amis et voisins : Charles et Georges, respectivement 76 et 83 balais qui élaborent le projet fou de partir en voiture à travers toute la France, dans les villes et régions qui sont généralement traversées par le fameux tour cycliste. L’Avant-dernière chance de Caroline Vermalle Editions Livre de Poche jeunesse, 560 p.

Sixtine de Caroline Vermalle Editions Hachette Black Moon, 286 p.

Mais avant de commencer ce road-movie fait de rencontres amicales ou même un peu amoureuses, Georges doit échapper à l’emprise de sa fille qui le couve plus que de raison. Profitant de son départ pour le Pérou, il se lance dans cette folle équipée. Il sera vite découvert par sa petite fille, Adèle, stagiaire pour la BBC. Après sa promesse de ne pas en parler, elle va redécouvrir une complicité perdue depuis des années grâce à une correspondance par SMS avec son grandpère.

Cette histoire est un petit bijou de simplicité. On voyage aussi au gré des rencontres des deux aïeux tout en étant touché par la correspondance entre un homme et sa petitefille. Correspondance au départ obligatoire mais finalement naturelle jusqu’à être de multiples cartes postales du voyage. Le parti prit de défendre le langage SMS parfois aussi difficile à comprendre pour Georges que pour le lecteur, est certes étonnant mais très cohérent avec le récit. Pour les plus difficiles ou les incultes de cette mode, la traduction en bon français est chaque fois présente en-dessous du texto original. Pour notre part, on préfère apprendre et jouer avec le langage curieux des deux vieux : le louchébem. Du rire jusqu’à l’émotion d’un final tragique nécessaire, on se laisse bercer par la simplicité de ce livre. En plus, c’est maintenant en Poche, pourquoi se priver ?

Loïc Smars

La pyramide de Khéops est le lieu d’une macabre découverte, deux personnes ont été emmurées. Une jeune femme de 22 ans délirante avec la peau sur les os hurle à côté de son défunt mari dans une chambre de la pyramide dont tous les scientifiques ignoraient jusqu’à l’existence. Qui sont-ils ? Comment sont-ils entrés ? Pourquoi sont-ils tous les deux nus avec pour seul ornement un collier de pierres précieuses ? Et, surtout, pourquoi le masque de Toutankhamon, le plus grand des rois d’Egypte, est retrouvé dans cet endroit ignoré de tous ? Le seul souvenir de la survivante : elle s’appelle Sixtine. C’est le début d’une intrigue palpitante qui vous baladera dans un monde où tout individu semble suspect et où l’Egypte touristique laisse place à l’Egypte historique sur fond de guerre actuelle.

« Sixtine », premier tome d’une saga, est son premier roman.

Caroline Vermalle, l’auteure de « Sixtine », est une voyageuse férue d’aventure et de cinéma. Française d’origine, elle s’exile à Londres à 21 ans où elle est engagée par la BBC. Après avoir réalisé son rêve en faisant carrière dans la production audiovisuelle et en étant productrice associée à la BBC, elle démissionne et revient dans sa France natale.

Emilie Lessire

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Voilà un roman palpitant comme on les aime ! Excessivement bien écrit, il se dévore d’une traite et nous transporte dans l’Egypte et ses dédales mystérieux. Les personnages sont tout aussi impénétrables que l’univers dans lequel ils évoluent. On se laisse délicieusement envoûter par les ambiances, les odeurs et les paysages tantôt ensorcelants, tantôt oppressants. L’auteure nous emmène dans une intrigue pleine de rebondissements en semant, ça et là, de fausses pistes que le lecteur suit avec plaisir. A lire n’importe où en s’assurant, tout de même, d’avoir quelques heures devant soi avant la prochaine réunion !

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts Veuve depuis peu, Viola Wither se voit obligée de rejoindre la famille de son défunt mari dans leur grise demeure de l’Essex. Laissant derrière elle les joies de la vie londonienne, elle s’y ennuie à mourir. Sa nouvelle vie à la campagne est terne et sinistre, à l’image des membres de la famille Wither : le père, Mr Wither, est un homme avare et austère.

Le Bois du Rossignol de Stella Gibbons Editions Heloïse d’Ormesson, 560 p.

Les Fuyants de Robin Wells Editions Le Masque, 286 p.

Rien ne l’intéresse, si ce n’est lire les rubriques financières du journal. Ce qu’il fait chaque jour avec acharnement. Ses deux filles, Madge et Tina, sont toujours célibataires au grand désespoir de leur mère. Celle-ci n’apprécie pas beaucoup sa bellefille qu’elle considère comme une femme de petite vertu qui n’aurait épousé son fils, Théodore, que pour son argent.

alors un tourbillon de bals clinquants, de promenades bucoliques et de sentiments déraisonnables. L’auteure, Stella Gibbons, écrit cette histoire dans les années 1930. C’est avec brio, qu’elle illustre les mœurs de l’époque. Au fil des pages, le lecteur découvre des personnages de plus en plus complexes, tiraillés entre ce qu’ils se doivent d’être et ce qu’ils voudraient être ; entre ceux qu’ils peuvent aimer et ceux qu’ils voudraient aimer ; entre leur éducation et leurs désirs. Le Bois du Rossignol est un roman agréable à lire et plein d’esprit, au travers duquel l’auteure soulève des thèmes importants – classes sociales très hiérarchisées et sévérité des rapports sociaux - qui peuvent sembler révolus. Pourtant, sont-ils si désuets dans notre société actuelle ?

Pourtant, Mrs Wither préfère encore l’accueillir à ses côtés, plutôt que de bousculer les convenances. Viola, quant à elle, en fera fi, poussée par ses aspirations sentimentales Elle entraîne dans sa révolte d’autres personnages : Tina, le beau Victor Spring, les servantes et le jeune chauffeur qui, tous, ont soif de passions et de liberté. Commence

Mathilde Schmit

Benson et Becky pensaient en avoir fini avec la Maxfield Academy, en parvenant à sortir du lycée et en trouvant refuge dans un village jouxtant l’établissement… Mais peuvent-ils faire confiance à ses habitants ou sont-ils, eux aussi, à la solde des dirigeants de l’école ? La plupart d’entre eux sont d’anciens élèves de Maxfield que l’on croyait disparus. Benson doit à nouveau trouver un moyen de s'évader pour pouvoir révéler les agissements de cette terrifiante organisation...

pas ses lecteurs et se lâche un peu plus. De quoi nourrir cette atmosphère angoissante et obscure. Un choix qui ne plaira peut-être pas à tous les fans du premier livre.

Voici la suite des Variants ! Un livre fort attendu par les lecteurs du premier tome. On reste dans le même univers tout en suivant le parcours de Benson. Toujours sous tension, la course poursuite continue. Mais les règles ont changé. La structure du village refuge est bien différente de celle du lycée. L’histoire évolue comme la relation entre Becky et Benson. Leur relation grandit et prend de l’ampleur. Plus sombre que le premier volet, Les Fuyants est également un peu plus sanguinolent. Meurtres à la pelle, blessures sanglantes, violence,… L’auteur n’épargne

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Malgré une ambiance envoutante et un sujet maitrisé, l’écriture du second tome manque de structure et de profondeur. Les dialogues, parfois trop présents, ne laissent pas la place à la mise en place de certains décors. Planter le décor est parfois nécessaire pour se plonger dans un chapitre ou tout simplement l’histoire. Certains passages auraient gagné en intensité et en crédibilité s' ils avaient connus une meilleure mise en place ou mise en contexte. Bref, Les Fuyant c’est la continuité un peu plus sombre des Variants. Une suite où la tension est toujours bien présente. Un roman qui ravira les amateurs sans être pour autant exceptionnel.

Cynthia Tytgat


Cinéma / Musique / Scène / BD / Arts Qui ne connait pas la frimousse de notre petit blondinet de 8 ans? Depuis le premier tome sorti en 1989, Cédric n'a pas pris une ride si l'on peut dire, car après 27 albums inédits, nous voilà déjà face au sixième best off. Cédric est né en 1986 suite à la rencontre de Raoul Cauvin, déjà connu pour Les Tuniques Bleues, et du dessinateur Laudec.

Cédric, Best of, Tome 6 : Quelle famille ! de Cauvin et Laudec Editions Dupuis, 48 p.

Depuis lors, les aventures de notre jeune garçon ont su conquérir le cœur des petits comme des grands en nous narrant les péripéties d'une famille attachante et si proche de la réalité. Un mauvais bulletin à ramener à la maison, une dispute entre un beau-père et son gendre, une petite copine d'école qui fait chavirer le cœur de notre héros... Quoi de plus commun, et c'est pour cette raison, que cela parle à tout un chacun. En cette fin d'année, période de fêtes et de réunions familiales, quoi de plus normal que de sortir un recueil des gags en famille. Au fil des 48 pages de cet album nous retrouvons Cédric, bien évidemment, entouré de ses parents et de son pépé. Ces seuls quatre personnages seront évoqués dans l'intégralité des planches, Chen, Christian et les autres ayant fait l'objet des best off précédents. Ici, On le sait tous, la Belgique est une terre fertile en matière de dessinateurs et scénaristes de bandes dessinées. De Bob de Moor à Hergé en passant par Edgar P. Jacobs, les grands noms ne manquent pas à alimenter le vivier de ce microcosme qui arrive à enchanter les petits et les grands.

Agent 212, La compil’, Tome 3 : Best of Special fêtes de Cauvin et Kox Editions Dupuis, 48 p.

Le wallon Raoul Cauvin et le bruxellois Daniel Kox ont, eux, créé l’un des personnages les plus emblématiques du très réputé Journal de Spirou, l’agent 212. Ce policier un peu débonnaire et très naïf qui se retrouve, souvent malgré lui, dans des situations burlesques ou grotesques. Lorsqu’il l’a créé en 1975, Raoul Cauvin était connu principalement pour une oeuvre : Les Tuniques bleues. Et oui, il faut croire que l’uniforme aura passionné l’auteur qui créera par la suite Les femmes en blanc ou encore C.R.S. = Détresse. Mais revenons à notre cher agent 212. Celuici a traversé les âges et les générations pour encore épater aujourd’hui. Cette force est en grande partie due à l’intemporalité de la série d’albums qui perdure maintenant depuis plus de trente ans. C’est pourquoi, en cette fin d’année, et à l’approche des fêtes, Dupuis a décidé de nous

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rien qu'un vase clos à l'intérieur de la maison familiale pour un condensé de rires. Revenons tout d'abord sur cette couverture originale. En effet nous voilà à l'heure hivernale et la neige s'est parée de paillettes et de volume pour rendre un cachet féerique et très "fêtes de fin d'année" à cette bande dessinée qui trouvera une petite place sous vos sapins de Noël. Original, intrigant et tape à l'œil, ça marche ! Les planches se lisent avec facilité et plaisir comme à l'accoutumée, certaines nous font rire, d'autres sourire et certaines même nous rendent nostalgiques. Un pari dénué de nouveauté mais qui est, cependant, toujours gagnant. Cédric nous donne le sourire et la bonne humeur que l'on attend en ouvrant ce genre de recueil. Quelle vie on mène quand on a huit ans... Si je puis dire.

Maïté Dagnelie

proposer un best-of spécial fêtes. Au menu de cet album de 47 pages, un florilège des meilleures planches liées à l’hiver ou aux fêtes de fin d’année. Bien évidemment, les fans de la saga n’y verront qu’une redite des 28 albums dessinés de la main de Daniel Kox. Il y a donc peu d’intérêt pour eux d’acquérir ce précieux hors-série, si ce n’est pour le plaisir de compléter sa collection. Pour les autres, et en particulier pour les plus jeunes d’entre nous, ce sera l’occasion de rencontrer Arthur Delfouille alias l’agent 212. Homme droit dans ses bottes, convaincu de défendre la veuve et l’orphelin mais surtout, vouant un culte à son métier, il est néanmoins régulièrement embourbés dans des situations cocasses qui l’amènent, la plupart du temps, à devoir déroger aux règles établies. Cet agent de police est sympathique même s’il est intransigeant, un trait de caractère qui donne à cette bande dessinée un aspect jovial. Bref, point de palabres pour cet album qui est avant tout un best-of. Mais il est toujours aussi agréable, vingt ans après, de découvrir ou redécouvrir celui qui a donné son nom à la Rue Marché aux Poulets, à Bruxelles.

Matthieu Matthys

décembre 2013


Cinéma / Musique / Scène / BD / Arts !

Warm Up de Renaud Garreta Editions Dust

La critique Renaud Garreta n’est pas un néophyte dans le monde du graphisme. De notre côté, nous connaissions déjà le dessinateur breton pour ses planches destinées au cinéma. De fait, c’est grâce à son travail remarquable de roughman que les story-board de Immortel ou Arthur et les Minimoys ont vu le jour. Côté bande dessinée, l’homme nous était plus méconnu, hormis la série à succès Insiders dont le scénario était écrit de la main de Jean-Claude Bartoll. Son parcours nous était un peu étranger. Malgré notre ignorance face à sa carrière, Renaud Garreta a tout de même travaillé sur plusieurs projets et sagas de grande envergure (comme Fox One) pour le compte de la maison d’édition Dargaud. Aujourd’hui, Renaud Garreta a décidé d’allier ses deux passions : le dessin et la moto. Pour ce faire, il a créé sa propre maison d’édition, Dust Editions, et a sorti le premier tome d’une série qui devrait en contenir six, intitulée Warm Up. D.O.A. (titre de l’album) nous emmène dans le monde méconnu et très spécialisé de la moto de vitesse, que ce soit en course ou sur route. L’histoire nous raconte les destins croisés de deux frères. l’un, Nathan, est un grand champion droit dans ses bottes mais qui doit régulièrement accepter des défis plus périlleux afin de gagner davantage d’argent. L’autre, Chad, est également doté d’un talent hors normes mais l’utilise à d’autres fins : servir de mule

afin de faire passer de la drogue à grande vitesse et de semer la police. Mais voilà, l’amour fraternel est plus fort que tout dans la famille Neves et Nathan n’hésitera pas un instant à tenter de sauver la peau de son frère, quitte à mettre la sienne en péril. Avec Warm Up, force est de constater que le lectorat ciblé ne sera autre que les amateurs de deux roues eux-mêmes. De surcroit, il est difficile d’entrer pleinement dans le sujet si on n’est pas intéressé par ce milieu autarcique. Passé cet écueil naturel, le profane pourra alors y voir une histoire sous-jacente bien plus intrigante que ne le sont les successions de courses motorisées. Une histoire alliant le drame au suspense de bien belle manière. Néanmoins, le propos mérite d’être nuancé. Et pour cause, même si l’histoire est intelligible et intéressante, les dialogues sont un peu plats et peinent à garder l’attention du lecteur. Ceux-ci sont souvent trop simplistes et trop concis pour nous faire entrer de plain-pied dans l’histoire. Outre cela, les sauts spatiotemporels et les raccourcis pris par l’auteur ont tôt fait de nous faire perdre le fil de la narration. Qui est qui ? Où sommes-nous réellement ? Voici certainement les deux questions qui vous transperceront l’esprit à la lecture de l’album, en particulier dans sa première moitié.

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Cependant, si les textes laissent quelques fois dubitatifs, l’image et les traits sont époustouflants de réalisme. Avec une finesse rare, Renaud Garreta nous propose des planches dignes à être encadrées et exposées. Si les personnages sont un peu moins nets, les véhicules, et donc les motos, sont travaillés au détail près. Tout cela offrant un rendu des plus époustouflants. En résumé, le premier tome de Warm Up, D.O.A., nous a séduit malgré des phylactères un peu pauvres en consistance. Toutefois, nous avons été charmé par la trame de fond de l’histoire mais aussi et surtout, par le travail graphique impeccable réalisé par Renaud Garreta. La mise en couleur des planches l’est par ailleurs tout autant.

Matthieu Matthys


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Gauguin : loin de la route de Gaultier et Leroy Editions Le Lombard

La critique La Bande Dessinée raconte l’histoire du peintre postimpressionniste Paul Gauguin. Maximilien le Roy signe le scénario, Christophe Gaultier en est le dessinateur et Marie Galopin y met les couleurs. Le livre commence par une vente aux enchères qui a lieu le 2 septembre 1903 à Tahiti, Gauguin est mort depuis peu. Retour en arrière, deux ans plus tôt : arrivée de Gauguin à Hiva Oa, une île située en Polynésie française où il décide de s’installer. On le voit libre, dépourvu, révolté contre la France, contre les institutions, contre l’Eglise, contre la gendarmerie, contre l’enseignement de la métropole, contre le colonialisme, contre l’ordre établi, contre les idées reçues et contre l’éducation donnée par les représentants d’une métropole qu’ils ne connaissent même pas et qu’ils ne remettent pas en question. Il incite d’ailleurs à la désobéissance et à la remise en question. Cependant, il mène une vie où il boit, mais aussi où il écrit et, surtout, où il peint. Il est obsédé par son œuvre. De sa famille restée en France, de ses cinq enfants, il dit à sa maîtresse : « Ils se débrouillent très bien. J’ai mon œuvre à mener, moi ! ». En fait, l’exil qui coïncide avec la fin de sa vie est aussi la

période la plus sombre, la plus révoltée et la plus prolifique au niveau de son art. Les couleurs choisies pour les dessins sont assez sombres, il n’y a pratiquement pas de place pour les couleurs et la lumière et quand elles sont présentes, elles sont ternes. Cela contraste avec les couleurs vives des peintures de Gauguin mais cela reflète parfaitement la noirceur de cette partie de la vie du peintre. Les dessins sont durs et le visage de Gauguin est triste et anguleux, il reflète les meurtrissures et la colère. Les discours, qui ne sont pourtant pas nombreux, sont très parlants. Ils s’allient et complètent parfaitement les dessins. Ils font la synthèse de sa vie là-bas, de sa soif de liberté, de ses obsessions et de son refus d’une société conventionnelle. Tout est là, en quelques mots distillés. Les discours sont vivants et donnent vie aux personnages. L’histoire relate deux passés : celui de Gauguin au moment de sa vie en Polynésie et celui où un homme intéressé par Gauguin et son œuvre, décide de se rendre sur l’île de Hiva Oa pour mieux connaître le personnage en voyant où il a vécu et en observant les gens qu’il a côtoyés. Cependant, à certains moments, la transition entre les

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deux moments n’est pas évidente, même si cela donne un certain rythme à l’histoire. Les personnages sont représentés dans un style très réaliste. Gauguin est souvent à peine vêtu et jamais soigné ni dans son apparence, ni dans ses mouvements. On voit sa déchéance et sa révolte dans chacune de ses représentations, ce qui donne un plus au côté biographique de la BD. L’histoire se lit très vite. Néanmoins, il serait intéressant de s’informer d’abord sur la vie du peintre pour mieux apprécier cette superbe BD. Un détail intéressant et génial : les photos des personnages mis en scène - que l’on retrouve à la fin de la BD - nous permettent de leur donner plus de relief et une véritable consistance.

Noelia Gonzalez

décembre 2013



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