Le Suricate Magazine - Dix-septième numéro

Page 56

Happy Birthay Mr. Suricate Kill bill

2003

©TFM Distribution

D’abord conçu comme un seul et unique long métrage, Kill Bill de Quentin Tarantino prend forme sur le tournage de Pulp Fiction, lorsque le réalisateur et Uma Thurman imaginent l’histoire de « La Mariée », tueuse à gages laissée pour morte devant l’autel, qui exerce sa vengeance, sanglante, à l’encontre de ses agresseurs, un groupe de mercenaires pour le moins pittoresques, dirigé par un certain « Bill ». Après avoir réalisé Jackie Brown, qu’il adapte d’un roman de Elmore Loenard, Tarantino ne revient pourtant pas vers la mariée. Il s’attèle à l’écriture d’un certain... Inglorious Basterds ! Mais le destin va jouer les trouble-fête en la personne de... Uma Thurman. Alors qu’il renoue avec cette dernière de façon tout à fait amicale, Tarantino repousse l’écriture de son film de guerre pour revenir sur l’histoire de « La Mariée ». Assez rapidement, les influences de ce nouveau long métrage font jour : les films de sabre japonais, les westerns spaghetti, les films de vengeance des années ’70 et les animés. Durant toute l’année 2000, Tarantino est chevillé à sa machine à écrire... Et dévore au quotidien des tas de films, qui alimentent peu à peu ce qui s’apparente déjà - alors qu’il ne s’agit que de son troisième long métrage -, comme un film exceptionnel. En mai 2001, alors que des décors sont déjà construits, Uma Thurman annonce au réalisateur qu’elle est

enceinte. Tarantino prend alors une décision rare dans un milieu où l’efficacité et le retour sur investissement a plus d’importance que les choix artistiques et humains : il repousse la date de début de tournage. Il y perd son acteur principal, « Bill », en la personne de Warren Beatty. Un Beatty qu’il replace, de façon pour le moins surprenante par... David Carradine. En juin 2002, le tournage peut enfin débuter, d’abord au Japon puis aux Etats-Unis. Pour les combats, nombreux, Tarantino fait appel à Yuen Woo Ping, dont la technique et les chorégraphies « câblées » ont fait des merveilles dans Matrix ou encore Tigre et Dragon. C’est en juillet 2003, après d’infructueuses tentatives pour réduire le montage de Kill Bill, que Tarantino propose à Harvey Weinstein de sortir le film en deux volets, l’un en novembre 2003, l’autre en mai 2004. Ce dytique permet non seulement à l’histoire de « La Mariée » de conserver toute sa splendeur, mais surtout à Tarantino d’offrir aux spectateurs une palette de mise en scène, de sentiments et d’ambiance d’une nuance inégalée. Le premier volet rend un hommage vibrant aux films de sabre, enchaîne les scènes d’actions, s’offre le luxe d’un long passage en animation (d’une réelle beauté formelle...) et flirte avec les limites du gore lors du combat final... Combat qui sera d’ailleurs proposé en noir et blanc

afin d’adoucir quelque peu sa violence. Le second opus ralentit lui la cadence, approfondit les personnages... Et revient sur les motivations des uns et des autres. Un changement de ton que renforce encore « la tactique Tarantino » : la présentation de l’histoire de façon non-chronologique. Peut-être moins « flamboyant », ce second volet ouvre déjà le cinéma de Tarantino, lui permet de quitter les rivages peut-être trop étroits du cinéma référentiel, pour s’avancer en « eaux profondes » dans un style plus mature, où les influences sont digérées et où l’émotion a droit de cité. Le succès est une fois encore au rendez-vous pour Kill BillI, même s’il s’accompagne des inévitables réflexions de tabloïd sur la soidisant fascination de Tarantino pour la violence... Ou la moralité plus que douteuse défendue par ses personnages. Quoi qu’il en soit, on rêve de voir, pour célébrer l’anniversaire du film, débarquer en Blu-Ray Kill Bill The Whole Bloody Affair, version présentée à Cannes en 2004, qui fusionne les deux films pour ne plus en faire qu’un seul, réinstaure quelques plans pas piqués des vers dans la séquence animée et propose le combat entre la Mariée et les 88 fous, en couleurs.

Christophe Corthouts

56


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.