24800(8)

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le magazine qui n’en est pas un

renaissance

24800

humain 2.0

deuxmilletreize

8 n°

néo

durable

upcycler

new deal

viral design


2013

Le B. change de formule et devient 24800. 24800 car il s’agit de notre code postal. Nouvelle formule, nouvelle maquette plus sobre, plus épurée comme pour marquer ce temps de crise et de renouveau à la fois. Scotchés sur nos touches et nos réseaux sociaux, happés par un besoin irrésistible de nouveautés et d’inutilités, on a déjà oublié Fukushima en même temps que les bonnes intentions électorales. On s’accroche à l’illusion d’une reprise économique avec des Goldman Sachs et consorts à l’affût jouant avec nos destinées sociales, culturelles et politiques. Face à cette logique implacable, déni de l’humain, certains se lèvent et lèvent le poing du bout de leurs claviers, offrent leurs torses nus et leurs rêves face au Mittal, aux machismes ordinaires et reprennent la parole. Ils savent qu’une autre voie est possible. Ils connaissent les conséquences de ce laisser-aller planétaire et revendiquent haut et fort le droit d’exister, de repenser nos sociétés malades de leur trop de tout. Beaucoup ne tenteront rien tétanisés par leurs peurs et perfusés à l’espoir. Certains défendront corps et âme leurs habitudes quand d’autres enchanteront le monde avec des idées folles ou des utopies qui ne demandent qu’à bouleverser les paradigmes en place. Renaissance, néo futurisme, new deal, humain 2.0, recyclage, avenir post apocalyptique? Laquelle ou lesquelles de ces idées émergeront demain. Nous essaierons d’en analyser les signes et vous en feront part à notre manière.

photo erwin olaf

marc jakobiec


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photo erwin olaf

GOD IS GUN

marc jakobiec

Littleton, Columbine High School, 20 avril 1999, 15 morts. Atlanta, 29 juillet 1999, 13 morts. Red Lake High School, 21 mars 2005, 10 morts. Omaha, 5 décembre 2007, 9 morts. Blacksburg Virginia Tech University, 16 avril 2007, 33 morts. Dekalb Nothern Illinois University, 14 février 2008, 7 morts. Los Angeles, 24 décembre 2008, 10 morts. Samson, 10 mars 2009, 11 morts. Appomatox, 20 janvier 2010, 8 morts. Binghamton, 3 avril 2010, 13 morts. Manchester, 3 août 2010, 9 morts. Ford Hood, 5 novembre 2010, 13 morts. Tucson, 8 janvier 2011, 6 morts. Oakland, 2 avril 2012, 7 morts. Aurora, 20 juillet 2012, 12 morts. Oak Creek, 5 août 2012, 7 morts. Milwaukee, 21 octobre 2012, 4 morts. Newtown, 14 décembre 2012, 26 morts. Les massacres perpétrés aux Etats-Unis depuis quelques années defrayent la chronique des faits de société avant de tomber en désuétude dans ceux des faits divers puis de l’oubli. Est-ce spécifique à ce pays qui manie avec tant d’aisance la Bible et le pistolet? Il est vrai qu’avec une moyenne de 9 armes pour 10 habitants le risque de tueries est bien plus important que si l’on se passe de ce genre de joujoux. Cette nouvelle fusillade, l’une des plus dramatiques des dernières années et l’une des plus graves ayant touchée un établissement scolaire, a relancé le débat sur les réglementations entourant le droit de posséder des armes, garanti par le deuxième amendement à la Constitution américaine. Depuis, les appels se sont multipliés pour durcir la législation. La sénatrice démocrate Dianne Feinstein a ainsi annoncé qu’elle allait proposer dès l’entrée en fonction du nouveau Congrès début janvier une loi pour interdire les fusils d’assaut. Une loi, signée par le président Bill Clinton en 1994, les avait interdits, mais elle a expiré en 2004, et n’a jamais été renouvelée depuis. Barack Obama avait prôné son rétablissement lors de la campagne présidentielle de 2008, mais n’en a pas fait une priorité depuis. Sur le site internet de la Maison Blanche, plus de 156 000 personnes avaient signé lundi 18 décembre, jour des funérailles de certaines victimes une pétition pour demander au Président d’œuvrer à un contrôle de la circulation des armes. On évoque souvent la grande puissance du stylo par rapport au fusil, de l’écrit par rapport aux règlements de comptes quels qu’ils soient. Espérons que les réseaux sociaux, que le 2.0 aient enfin raison du M16. Phénomène? En Chine le 14 décembre, un homme a poignardé 22 enfants. Aucun n’est décédé. Ouf!


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photo aorta

swedenéalisme

On pensait que le surréalisme était belge, il nous faut revoir nos classiques et nous tourner vers les pays du nord. Danemark, Suéde, Finlande où le décalage est de mise. Une forme de folie toute scandinave qui échappe aux carcans luthériens pour laisser sortir un désespoir comique. Une vision dépitée d’une société trop parfaite, trop consensuelle. Un humour cynique et une vision du monde sombre imbibée d’alcool, de suicides et d’idées noires. A l’image de ce réalisateur suédois, Roy Andersson, presqu’inconnu en France et primé de nombreuses fois dans tous les grands festivals qui au travers de personnages immuables, baignés d’une lumière froide quasi polaire, immobiles et impassibles narrent leur quotidien absurde. La photo n’est pas en reste et on retrouve ce décalage et cette lumière blanche et froide qu’utilise à profusion des artistes comme Aorta ou Julie Hetta dans la mise en scène de mode. marc jakobiec


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photo julia hetta

Utile ou inutile? Futile ou nécessaire? La mode a toujours fasciné, créé des noms célèbres, provoquer des mouvements insolites, des passions débordantes et tué pas mal de monde. Avec un flux financier de l’ordre de 437 milliards de dollars et une progression annuelle de l’ordre de 10%, la mode a ses exigences et engloutit au fur et à mesure de ses défilés, créateurs péteurs de plombs, mannequins anorexiques et photographes en mal de reconnaissance. Cette industrie florissante même en temps de crise a de beaux jours devant elle. Croissance phénoménale dans les pays émergents, palliatif efficace en temps de morosité, le monde des fashionatas et des blogs fashion pulullent sur la toile et quoi qu’en dise ses détracteurs reste l’univers qui attire le plus les rêveurs de gloire. La mode a au même titre que n’importe quelle industrie rentable ses exploiteurs et ses exploités. Et pourtant il est très étrange de constater la morosité des gardes robes en ville sans parler de nos campagnes profondes, comme si toute cette frénésie aboutissait à pas grand chose, sinon un jean délavé et un pull noir sans forme. Mais là réside peut-être la force de la mode et de la frénésie qu’elle marc jakobiec engendre. Le futile devient nécessaire.

my precious


photo aorta

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“Le lendemain du jour où Robert m’avait ainsi parlé de son oncle tout en l’attendant, vainement du reste, comme je passais seul devant le casino en rentrant à l’hôtel, j’eus la sensation d’être regardé par quelqu’un qui n’était pas loin de moi. Je tournai la tête et j’aperçus un homme d’une quarantaine d’années, très grand et assez gros, avec des moustaches très noires, et qui, tout en frappant nerveusement son pantalon avec une badine, fixait sur moi des yeux dilatés par l’attention. Par moments, ils étaient percés en tous sens par des regards d’une extrême activité comme en ont seuls devant une personne qu’ils ne connaissent pas des hommes à qui, pour un motif quelconque, elle inspire des pensées qui ne viendraient pas à tout autre, – par exemple des fous ou des espions. Il lança sur moi une suprême œillade à la fois hardie, prudente, rapide et profonde, comme un dernier coup que l’on tire au moment de prendre la fuite, et après avoir regardé tout autour de lui, prenant soudain un air distrait et hautain, par un brusque revirement de toute sa personne il se tourna vers une affiche dans la lecture de laquelle il s’absorba, en fredonnant un air et en arrangeant la rose mousseuse qui pendait à sa boutonnière. Il sortit de sa poche un calepin sur lequel il eut l’air de prendre en note le titre du spectacle annoncé, tira deux ou trois fois sa montre, abaissa sur ses yeux un canotier de paille noire dont il prolongea le rebord avec sa main mise en visière comme pour voir si quelqu’un n’arrivait pas, fit le geste de mécontentement par lequel on croit faire voir qu’on a assez d’attendre, mais qu’on ne fait jamais quand on attend réellement, puis rejetant en arrière son chapeau et laissant voir une brosse coupée ras qui admettait cependant de chaque côté d’assez longues ailes de pigeons ondulées, il exhala le souffle bruyant des personnes qui ont non pas trop chaud mais le désir de montrer qu’elles ont trop chaud. J’eus l’idée d’un escroc d’hôtel qui, nous ayant peut-être déjà remarqués les jours précédents ma grand-mère et moi, et préparant quelque mauvais coup, venait de s’apercevoir que je l’avais surpris pendant qu’il m’épiait ; pour me donner le change, peut-être cherchait-il seulement par sa nouvelle attitude à exprimer la distraction et le détachement, mais c’était avec une exagération si agressive que son but semblait au moins autant que de dissiper les soupçons que j’avais dû avoir, de venger une humiliation qu’à mon insu je lui eusse infligée, de me donner l’idée non pas tant qu’il ne m’avait pas vu, que celle que j’étais un objet de trop petite importance pour attirer l’attention. Il cambrait sa taille d’un air de bravade, pinçait les lèvres, relevait ses moustaches et dans son regard ajustait quelque chose d’indifférent, de dur, de presque insultant. Si bien que la singularité de son expression me le faisait prendre tantôt pour un voleur, et tantôt pour un aliéné. Pourtant sa mise extrêmement soignée était beaucoup plus grave et beaucoup plus simple que celles de tous les baigneurs que je voyais à Balbec, et rassurante pour mon veston si souvent humilié par la blancheur éclatante et banale de leurs costumes de plage. Mais ma grand-mère venait à ma rencontre, nous fîmes un tour ensemble et je l’attendais, une heure après, devant l’hôtel où elle était rentrée un instant, quand je vis sortir Mme de Villeparisis avec Robert de Saint-Loup et l’inconnu qui m’avait regardé si fixement devant le casino. Avec la rapidité d’un éclair son regard me traversa, ainsi qu’au moment où je l’avais aperçu, et revint, comme s’il ne m’avait pas vu se ranger, un peu bas, devant ses yeux, émoussé, comme le regard neutre qui feint de ne rien voir au dehors et n’est capable de rien dire au dedans, le regard qui exprime seulement la satisfaction de sentir autour de soi les cils qu’il écarte de sa rondeur béate, le regard dévot et confit qu’ont certains hypocrites, le regard fat qu’ont certains sots. Je vis qu’il avait changé de costume. Celui qu’il portait était encore plus sombre ; et sans doute c’est que la véritable élégance est moins loin de la simplicité que la fausse ; mais il y avait autre chose : d’un peu près on sentait que si la couleur était presque entièrement absente de ces vêtements, ce n’était pas parce que celui qui l’en avait bannie y était indifférent, mais plutôt parce que pour une raison quelconque il se l’interdisait. Et la sobriété qu’ils laissaient paraître semblait de celles qui viennent de l’obéissance à un régime, plutôt que du manque de gourmandise. Un filet de vert sombre s’harmonisait, dans le tissu du pantalon, à la rayure des chaussettes avec un raffinement qui décelait la vivacité d’un goût mâté partout ailleurs et à qui cette seule concession avait été faite par tolérance, tandis qu’une tache rouge sur la cravate était imperceptible comme une liberté qu’on n’ose prendre...“

dandy

marcel proust extrait a la recherche du temps perdu a l’ombre des jeunes filles en fleurs

photo julia hetta


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Il n’y a pas d’âge pour retrouver le chemin de la maison familiale. Et un “accident de la vie” est si vite arrivé. En mai dernier, Sébastien, 33 ans, vivait encore avec son compagnon dans un 40 m2 à Corbeil-Essonnes, en région parisienne. Quand survient la rupture, il décide de retourner vivre chez ses parents, à quelques kilomètres de là. D’autant qu’il a une idée en tête : quitter son CDI de vendeur en électronique pour reprendre l’entreprise de distribution automatique de son père, proche de la retraite. Il touchera une allocation chômage de 900 euros. Mais l’entreprise, mal en point, ne sera pas rentable tout de suite. “Il faudrait que je monte à 1 500 euros par mois pour prendre un appartement”, observe Sébastien. Le jeune entrepreneur l’admet volontiers sa qualité de vie a augmenté depuis quelques mois. En économisant sur le loyer et le coût de la vie quotidienne, Sébastien a pu faire réparer sa voiture et s’offrir un nouvel ordinateur. Avec le premier job vient normalement le temps de l’indépendance et du premier vrai “chez-soi”. Exit la chambre d’étudiant sous les toits, avec douche et WC sur le palier. Jeune actif recherche deux-pièces confortable, avec cuisine équipée et peut-être même un petit balcon. On ne connaît pas meilleur levier d’émancipation que le travail. Oui, mais si le job ne vient pas ? Et si le salaire n’est pas suffisant ? Entre la hausse des loyers, les frais d’entrée élevés (l’équivalent de trois mois de loyer) et l’exigence des propriétaires, 79 % des jeunes de 18 à 29 ans estiment qu’il est difficile pour eux de trouver un logement, d’après une récente enquête de l’institut CSA. Moins aidés par leur famille et par l’État, à la fois sur les plans pratiques et financiers, et ne bénéficiant pas d’un parc locatif dédié comme les étudiants, les jeunes actifs se heurtent à une concurrence féroce, notamment dans les grandes villes. Selon l’étude du CSA, 43 % des sondés ont déjà envisagé de retourner vivre chez leurs parents ; 13 % ont sauté le pas. Une solution de secours qui concerne d’abord les chômeurs. Mathilde et Jildaz, 25 et 26 ans, ont vécu une année à Bordeaux avant de se résoudre à regagner la Bretagne, leur région d’origine. En septembre dernier, le contrat en alternance de Jildaz se termine, laissant le couple sans ressource. “On s’est retrouvés tous les deux à chercher du boulot, raconte Mathilde. Avec ce constat : moi je ne trouverais pas sur Bordeaux, je cherchais depuis un an déjà dans la communication. Et Jildaz n’a pas trouvé non plus. On a décidé de chercher ailleurs, même si la région nous plaisait beaucoup… On voulait surtout éviter Paris.” En attendant, ils ne peuvent plus assumer le loyer de leur 36 m2, qui s’élève à 600 euros. Résignés, les jeunes amoureux font leurs cartons, disent adieu au nid douillet, dispersent leurs meubles chez les copains bordelais et posent les valises chez leurs mamans respectives. “C’est une petite séparation, mine de rien”, souligne Mathilde. La brunette sourit, avant de confier : “Ça faisait cinq ans que je n’étais plus chez moi. Le retour est sympathique : en période de chômage, c’est agréable de se faire un peu cocooner. Et en même temps, c’est la confirmation d’un échec côté recherche d’emploi. En couple dans un appartement, j’avais quand même cette réussite de vie personnelle. Là, tu retournes à zéro.” Souvent ravis de materner à nouveau, les parents ont parfois tendance à infantiliser leurs rejetons devenus adultes. “Ma mère m’appelle sans arrêt, alors qu’elle ne le faisait plus… ajoute Mathilde.

“Tu sors quand ? À quelle heure ?“ On retourne dans le schéma du lycée ou des premières années d’études. Ça devient pesant.” Elle reprend, songeuse : “En même temps, c’est rassurant. Ma mère ne me fout pas dehors. Ça reste une chance quand même, on n’est pas à la rue…” Même constat pour Aurore, 27 ans, qui a réintégré l’appartement maternelle trois semaines plus tôt. “Je ne vais pas me plaindre, j’aurais eu un gros problème de logement si maman n’avait pas pu me récupérer.” Installée à Marseille, où elle travaillait dans une association culturelle, la jeune femme a quitté la région quatre mois après la fin de son contrat. “J’avais fait le tour niveau recherche d’emploi, il n’y avait rien pour moi.” Difficile aussi de tenir avec 880 euros par mois, quand la moitié du budget part dans le loyer : prendre un appartement maintenant, “ce serait de l’argent foutu en l’air”. Elle aussi apprécie le confort du cocon parental : “On se pose dans un endroit où on se sent bien pour réfléchir, sans avoir le stress de la fin du mois. On est plus serein pour la recherche d’emploi.” Seule ombre au tableau : le manque d’intimité, qui commence à peser sérieusement sur le quotidien de Mathilde : “Moi, j’ai des murs en carton, lui c’est pareil. Ma mère est souvent absente le week-end, donc Jildaz vient chez moi, on est plus tranquilles…” Jildaz a finalement décroché un poste de chargé de patrimoine à la BNP. À Paris. Tant pis, un CDI, ça ne se refuse pas. Reste quand même “le sentiment que tout son salaire va passer dans un loyer”. Et l’angoisse de ne pas trouver de logement. Avec un RSA et un salaire de 1 800 euros, le dossier du couple risque de faire tiquer les propriétaires. Sans économies, Mathilde et Jildaz envisagent de souscrire un crédit pour couvrir les frais d’installation. Entre le premier mois de loyer, la caution et les frais d’agence, ne devient pas locataire qui veut. En région parisienne plus qu’ailleurs, dégoter un deux-pièces est devenu le graal du jeune actif, la gageure qui suit celle du premier emploi. Journaliste dans une société de production audiovisuelle, Claire aimerait, à 24 ans, quitter enfin la maison familiale. Elle cherche un appartement dans Paris depuis août mais se heurte aux exigences des propriétaires qui lui demandent de gagner trois fois le montant du loyer. Avec un salaire de 1 400 euros, elle ne peut pas viser de loyers supérieurs à 500 euros par mois. “À ce prix-là, on ne trouve que des chambres de bonne. Et je n’ai pas envie de partir pour un trou à rat.” Pour couronner le tout, Claire est désavantagée par son statut de pigiste salariée au mois. Pour l’heure, elle n’a pas pu visiter le moindre appartement. “Quand j’appelle, on me demande d’expliquer ma situation et ça bloque tout de suite.” En attendant, Claire passe des heures dans les transports, entre le VIIIe arrondissement, où elle travaille, et la maison de ses parents, située près d’Orly.


home sweet home

article photo anne julia royer hetta

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Pierre Siankowski

boum boum photo david stewart

Vendredi, 21 décembre 2012 c’était la fin du monde. Pour la prochaine date de fin du monde, voilà tout ce qu’il ne faudra absolument pas oublier pour survivre durant les cinquante prochaines années, cloitrés dans notre bunker d’apocalypse – doté d’un groupe électrogène pour recharger l’iPod. Bien entendu, l’homme (ou la femme) de qualité survivant à l’apocalypse aimerait le faire dans le plus simple appareil. Nu, dépenaillé face aux événements, le plexus solaire libéré face à ce nouveau néant et, surtout, protégé grâce à un abri antiatomique ou toute autre sorte de cabane, il souhaiterait se suffire à lui-même et ne se nourrir, par petites bouchées, que de quelques brochettes de questions existentielles. Malheureusement, et l’homme (ou la femme) de qualité le sait, il n’en est absolument rien. Pire, pour faire face au vide et à l’hypothétique attente, il prépare depuis des lustres des listes de choses à emmener sur une île déserte (hypothèse haute) ou dans un abri antiatomique (hypothèse méga basse). Souvent, par facilité, on commence par une liste de disques. Enfin, disons plutôt une sorte de gigaplaylist puisque l’apparition du baladeur numérique permet de partir un peu plus garni. On ne restera plus, donc, sur une sélection d’albums cultes (et tant mieux) et l’on s’orientera vers une espèce de dream-team composée d’artistes forts et de singles à la coule (exemple, un truc de Barry White n’importe lequel, parce qu’il y aura peut-être moyen de moyenner après l’apocalypse, on ne sait jamais). Pour ce qui est des artistes, nous conseillerons en priorité l’œuvre à la fois introspective, succincte et complète de Leonard Cohen : de la guitare espagnole au synthé pourri, le Montréalais a à peu près touché à tout ce

qui existait comme instruments, ça fera des souvenirs à certains (“tu te souviens quand j’ai reçu le Bontempi pour Noël ?”). On emmènera aussi un best of de Booba que l’on aura fait soi-même en n’oubliant pas d’y intégrer Kalash feat. Kaaris, où le Météore a cette phrase millénaire : “Moi et mes kheys on part sur la Lune, amuse-toi bien en Meurthe-et-Moselle” (il est peu probable qu’il reste des gens du 5-4 après l’apocalypse, donc ça sera une bonne occasion de rire). Incontournables aussi, Daft Punk, histoire de passer par toutes les couleurs des Dragibus, et La Boîte de jazz de Michel Jonasz, pour énerver tout le monde. Pour les films, il s’agira de partir sur des intégrales, elles aussi enregistrées sur des clés USB. Tout Truffaut bien sûr, car il sera impossible de survivre à quoi que ce soit sans avoir des nouvelles d’Antoine Doinel ; Rocky parce que la scène où il emmène Adrienne à la patinoire dans le 1 est au moins aussi belle que celle où il s’entraîne dans la neige avec des rondins en URSS (ça c’est dans le 4) ; tout João César Monteiro, parce qu’on se souviendra qu’il est possible de faire de la glace à la jeune fille (ou au jeune homme, pourquoi pas) ; et tous les films avec John Belushi parce que c’était un génie comique et qu’on aura besoin de rire un peu. Et puis une série, la meilleure, Dr House en cas de problème médicaux. On apportera aussi des livres, parce que les livres sont des souvenirs. On peut partir sur La Recherche… de Proust ou sur tout Faulkner pour revenir sans cesse à Jefferson, Mississippi – attendu mais efficace. Ou, dans le désordre, La Pornographie de Gombrowicz, La Salle de bain de Jean-Philippe Toussaint, La Conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole, l’autobiographie du joueur de football anglais Paul Gascoigne (rien que parce qu’il y raconte comment il s’était fait ajouter des dreadlocks blondes en Italie), Le Livre de l’intranquillité de Fernando Pessoa pour faire genre, La Moisson rouge de Dashiell Hammett (parce qu’il y a toujours un mec qui aime les polars), un livre de Paul-Loup Sulitzer n’importe lequel, toujours pour rigoler, et enfin un petit essai d’architecture publié en 1980 par un spécialiste des guerres chimiques et atomiques, l’Américain Jay Swayze, récemment traduit aux éditions B2 : Le Meilleur des (deux) mondes – Maisons et jardins souterrains. Une histoire des “bunker palaces” et autres sweet home souterrains. Ça peut servir. Et pour finir la collection complète de Rustica au cas où il faudrait replanter des choses. Voilà, s’il y en a qui aiment la danse ou le théâtre, ils prennent un masque et des collants. On est prêts, l’apocalypse, on t’attend.


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Le tweet est-il de gauche ou de droite? C’est désormais acté : les campagnes présidentielles David Doucet et Diane Lisarelli vont se jouer sur le web. Si le scrutin risque de basculer sur un DM fail de Nadine Morano, un tweetclash mal géré par Pierre Moscovici ou une Twitpic de salade niçoise non homologuée de Christian Estrosi, mesurons alors les forces en présence. Difficile d’établir si Twitter bande à gauche ou à droite. Les théoriciens du web 2.0 adeptes du personal branling vous le diront : ce sont les utilisateurs qui déterminent l’orientation politique d’un réseau social. Puisque la gauche est au pouvoir depuis la disparition de Nicolas Sarkozy dans les conférences internationales, les voix contestataires ont sans doute trouvé sur le web un moyen efficace d’appeler à l’insurrection qui vient (vaguement). Sur Twitter en particulier, il est clair que le profil des utilisateurs rejoint plutôt celui de l’électeur de gauche. A défaut d’être aussi précis que le Centre de recherches politiques de Sciences Po, on peut au moins se fier à l’analyse des trendings topics, l’indicateur Médiamétrie des twittos qui permet de signaler les sujets qui font le buzz et l’argent de Morandini. Sur Twitter, il se trouve que les militants socialistes les squattent aussi régulièrement que le perron de l’Elysée. Plus significatif pour un réseau entre la cour de récré et la cour de Versailles : il semblerait que la gauche ait aussi le monopole du LOL. Avec 95 000 followers, le collectif Humour de droite qui allie info et gros tacles bien envoyés effraie le moindre parlementaire de l’opposition aux prises de positions un peu trop droitières. La droite avait essayé de créer un pendant avec Drôle de gauche mais on rangera cette tentative dans la case des naufrages du précédent quinquennat. L’e-riposte peut malgré tout compter sur son armée de comptes institutionnels. @ Francediplo, @Place_Beauvau ou @Elysee sont sur les startings-blocks pour diffuser les dernières blagues de Jean-Marc Ayrault . La bataille est serrée et le retour en force d’un Jean François Copé multipliant les tweet-clashs pourrait bien offrir des surprises au moins lors de la prochaine réunion du R.U.M.P symbole fort de la diversité politique française.

#nadinemorano

photo anonymous


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Etre hype. Mais encore! C’est écrire pour un magazine alternatif et croire que vous êtes indépendant, alors que vous matez toutes les vidéos débiles de ce saligot de YouTube, ogre à peine masqué de Google. Vous déclarer journaliste Culture comme si vous étiez affranchis des contraintes du milieu alors que vous souffrez du syndrome du professeur de mathématique de collège à l’égard des chercheurs. Fréquenter à outrance les ventes privées, parce que le vrai chic, c’est de ne pas réfléchir au prix. Parce que vous n’êtes qu’un consommateur en fin de série, un peu comme les professionnels des réunions Tupperware. Dire que les autres n’ont rien compris, parce que vous êtes comme ce vieux pull-over obscur acheté en vacances, que vous n’osez mettre que dans des soirées que vous contrôlez, parce que c’est super bon de danser sur du Claude François avec Valentine surtout en version nipponne. Porter un béret, parce qu’au marché des Enfants Rouges, déguster du bio avec son Laguiole c’est trop nature, parce que ça vous donne un air de jeune crétin à la Flèche d’Or et un air de faux fuyant Porte de Bagnolet. Mettre son Leica autour du cou alors que vous déambulez dans le Marais, alors que vous ne jurer que par Instagram pour faire façon Polaroïd 70’s. Il faut arrêter de croire que la photographie est un accessoire.

sois hype et tais-toi !

photo david stewart

texte par marc jakobiec


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Le vintage est-il has been ? Pas un seul magazine féminin ne dégaine chaque semaine son accessoire vintage, sa boutique vintage, son style vintage, ou pour les plus pointus les inspirations vintage de tel ou tel designer. A croire que les créateurs n’en finissent plus de se perdre dans les modernités d’antan. Dans certaines régions du monde, le « vintage » est proche d’un style de vie, avec ses codes -pointus- et ses événements -festifs- dans une coolitude des plus absolues. Hum. Demandez aux peuples de l’est, s’ils aimeraient retrouver leurs costumes staliniens 50’s d’avant la chote du mur de Berlin. Alors d’abord, le vintage, c’est quoi au juste ? Pour le comprendre, il faut parfois demander à ceux qui en vivent. Pour Feal Mor, heureux propriétaire du label JP Plunier (qui a détecté entre autres Jack Johnson) : “Le vintage est ce qui continue à fonctionner une fois que la tendance est passée”. En clair, aller chercher une forme d’absolu à travers les modes et les inspirations d’autrefois. Cette année à L.A., c’était le grand retour des plumes des Peaux Rouges comme must-have.A Paris, c’est peut être la Long Board qui donne des impressions de surf le long de la rue du Chemin Vert. Pourtant, sans vouloir jouer les kapos d’une fashion brigade, plusieurs dérives du courant vintage touchent la gente féminine et masculine. La robe en rideau ? Vintage ou pas, ça craint. Le motif trop fleuri ? On va se le dire sincèrement : les Américains n’ont certes pas connu la famille Groseille (La vie est un long fleuve tranquille), on peut donc comprendre leur trip New Age / Flower Power. Sauf que vous êtes francophones si vous lisez cet article : vous n’avez plus aucune excuse à trouver « so cute » la robe de la créatice en bois dans une expo-vente près de Bastille. C’est dit. Le hipster à moustache en stage en agence de communication ? Oui, nous aussi on se déguise parfois quand la barbe se fait trop prenante : on sort sans lentille de la salle de bain avec une petite moustache pour faire une blague à ses amis présents. Oui, la moustache est une blague, sauf si vous êtes Johnny Depp. Penchons nous quand même sur les quelques cas où le retour vers le futur est stylé sans être superficiel. La montre ancienne ? Un parti pris vintage intéressant. Notamment quand vous choisissez une maison suisse pionnière dans son domaine, à savoir les mouvements à billes (d’où les 5 petits points du logo Eternamatic). La montre est un objet fascinant aujourd’hui pour les prouesses techniques sans cesse renouvelées par les maisons de luxe. Mais à défaut de pouvoir vous faire offrir une JaegerLecoultre datée, il y a pas mal de choix dans des budgets raisonnables. Et c’est dans la discrétion que vous revendiquerez une esthétique vintage. Valable pour les hommes comme pour les femmes. La pièce de créateur ? Quelque part, là où je trouve quelque peu gonflé de se faire refourguer un blouson des années 90 plus de quelques dizaines d’euros sur un stand du Marché, je préfère économiser en me disant qu’un jour je pourrai vraiment me payer des pièces de collection de créateurs. Qui n’a jamais rêvé d’une robe vintage Dior, ou de se projeter dans un véritable futur alternatif avec

photo david stewart

une combinaison Pierre Cardin? Alors oui, certains collectionnent des tableaux, des sculptures, des voitures, moi je collectionnerais bien des robes d’exception. Conclusions: le vintage a percé avec la crise et l’illusion de s’offrir davantage de qualité/durabilité pour un budget restreint, mais lorsque l’on observe les prix affichés par les vintageurs qui veulent à tout prix se différencier des « friperies » (avec souvent des justifications et une différence difficile à saisir), on pourrait se dire que c’est qu’une nouvelle niche opportune pour les commerçants. Des stocks à prix cassés, une mise en scène bordélique tolérée, et un prix de sortie hallucinant, bonjour la marge! Les coupes vintage des robes et des vestes sont charmantes, mais n’ont pas forcément la modernité suffisante pour justifier leur prix. Par contre, les domaines de l’accessoire, de la pièce d’exception et du mobilier peuvent avoir du sens. Mais comme d’habitude, quand on veut du bon, il faut y mettre le prix. Petites arnaques ou gros plaisirs, à vous de choisir!

texte par lilzeon

sois vintage et tais-toi !


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photo erwin olaf

sois fashion et tais-toi !

Pour lui: Pantalon de survêtement stoned Ralph Lauren pour adidas 650 euros€. Boots caramel Pataugas pour Colette 325 euros€. Pour elle: Pull laine Dior 320 euros. Jupe fleur gypsy Sonia Rykiel, 630 euros. Sandalettes cuir Jimmy Choo 360 euros. Boucles d’oreilles or Saint Laurent 350 euros. Table basse, fauteuil merisier création Goran Vladiskovitch, 500 euros et 4600 euros.


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photo david stewart

sois bio et tais-toi !

J’ai beau recycler, mettre mes emballages plastiques dans la poubelle jaune (en fait qui se trouve dans la cave de mon immeuble, car l’entrée est trop petite), accumuler mes déchets au compost (ce qui pose un sérieux problème dans mon studio de 8,25 m2 loi Carrez), poser des ampoules à basse consommation qui mettent plus de 30 secondes pour éclairer mon palier (pas facile quand je dois chercher mes clefs au fond de mon sac façon postier acheté au vide grenier de mon quartier), rouler en vélo pour réduire le taux de pollution (véritable galère quand il s’agit de revenir avec des barres à rideaux de 3m de long), d’éteindre systématiquement mon ordi pour éviter de le laisser en veille (pour le rallumer aussitôt car j’ai oublié de consulter ma page Facebook), pris mes 3 douches quotidiennes (à cause du vélo) au lieu d’un bain hebdomadaire pour économiser l’eau, oublier mon iPhone, mon iPad et autre iTrucs (car j’aime beaucoup ce qu’a fait Steve à part le fait d’exploiter des petits chinois et surtout les ressources rares pour la fabrication de batteries au lithium qui sont en obsolescence programmée et d’une durée de 2 heures maxi), faire mon marché bio avec des tarifs à faire pâlir ma carte bleue de couleur blanche (ça fait plus propre et que j’ai obtenue au Crédit Coopératif car la banque reverse une partie des taxes à une ONG de mon choix), déguster avec mes potes d’agences de pub (mais citoyennes, excusez du peu) le vin bio du Bas Quercy très tendance et disponible uniquement au resto cuisine danoise (à base de lichens et de mousse) de la Gaité Lyrique (faut ce qui faut), pris une participation à la construction d’un éco hameau en chanvre et rondins de châtaigniers en Périgord Vert avec récupérateur d’eau de pluie, éolienne, panneaux photovoltaïques faits mains, potager en buttes sandwich, toilettes sèches et meubles éco responsables à base de champignons et de carton séchés, lancer avec des amis et voisins de mon éco quartier, une association pour le maintien des bouchers charcutiers artisanaux dans tous les quartiers de Paris (faut bien faire ça pour le petit commerce qui se fait bouffer par le fisc, les impôts locaux et les nems ou les kébabs), choisi le covoiturage quand je vais voir mes parents (même si je dois me taper tout le trajet avec la collection de cassettes des Orgues de Barback ou des tambourins de Ménilmuch’ de l’heureux propriétaire de la Peugeot 504 break vieille de 30 ans), d’assister à toutes les conférences sur le réchauffement de la planète (dans une salle généralement surchauffée de l’immeuble du syndicat Sud de la RATP), de voir tous les films sur les dangers des pesticides, plastiques, gaz de schiste, OGM et manipulations de Goldman Sachs (vantés par les critiques cinéma de Libé ou des Inrocks et descendus plus tard par ses mêmes critiques sur leurs blogs ou celui de Rue 89), manifester un peu pour tout et rien en particulier (mais ça alimente bien ma page FB avec mes images Instagram), décider de boycotter les hypers (y’a même plus de caissières payées au 1/3 du smic) pour exploser mon budget bouffe au Monop à 22 heures , ne cuisiner que des produits de saison (pour éviter les transports aériens des produits d’exportation type tomates péruviennes ou radis de Corée du Nord) tout en sachant que mes prochaines vacances en Thaïlande pour faire de la randonnée sera un circuit Panda avec nourriture locale à base d’araignées et de citronnelle pour équilibrer tout ça. Et pourtant malgré tous ces efforts de décroissance, la situation ne s’améliore pas. A chaque instant les médias se font l’écho d’une situation alarmante qui nous conduit irrémédiablement à notre fin. Alors un conseil à nos successeurs (je pense aux insectes et autres blattes) surtout, ne changez pas, n’évoluez pas, restez vous-mêmes!

texte par marc jakobiec


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Guide de survie à l’usage du touriste embarqué dans une fiesta locale traditionnelle. Sonnez binious, résonnez bombardes ! Pour ne pas faire tapisserie lors de votre prochain passage en province, nos sept conseils à suivre. C’est un beau soir d’été, quelque part entre Guémené-surScorff et Lazblou sur l’Ile. Vous êtes parti en riboule avec des indigènes du cru, et là, traquenard, on vous emmène dans une fête locale. Un biniou vous asticote les oreilles, un chanteur enchaîne les « tralalaleno » dans le micro, et une rangée de danseurs s’agitent en se tenant par le petit doigt et balançant de l’avant baskets et tongs en plastiques. Votre premier réflexe est de trouver la buvette et de vous y réfugier pour observer de loin ce spectacle, qui fait désormais partie du patrimoine parce que ces fêtes sont réputées pour leur convivialité et parce qu’elles mêlent les générations et les milieux sociaux. Après un ou deux verres du cru du coin, vous êtes prêt à vous élancer, d’autant que le gaillard au bout de la chaîne vous fait des signes pour vous arracher au comptoir. C’est bien, mais avant de taper du pied, voilà quelques conseils précieux, recueillis auprès de spécialistes de l’exercice. 1) Vous avez le droit de danser (même si vous êtes nul). Même si ceux qui sont déjà en piste vous impressionnent par leur maîtrise technique, vous pouvez les rejoindre, et ça ne va pas gâcher leur soirée. « Le plaisir de partager notre culture remplace alors celui de danser avec de bons partenaires » lâche l’organisateur maison souvent maire du village ou président d’une association pour la défense du boudin. Attention quand même : si la majorité des danseurs vous feront bon accueil, ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi, n’importe comment, au risque de se faire sortir du cercle, poliment mais fermement. 2) Pas besoin d’enfiler un costume car à ce stade, vous l’avez sans doute déjà remarqué : un bal tradi, ce n’est pas un spectacle folklorique, plutôt un bal pop’ version « lou quetchose ». Ainsi, les danseurs et les musiciens ne portent pas de costume traditionnel. Si ça se passe en extérieur, prévoyez un pull (on est à la campagne) : vous ne passerez sans doute pas la soirée à danser et vous risquez d’attraper froid quand vous lèverez le pied. Si la fête est en intérieur, attendez-vous à finir en T-shirt ou en débardeur (et prévoir un rechange). Aux pieds, évitez les sandales ou les tongs, mais aussi les baskets vous allez rebondir et le pogo c’est pas le truc du coin . Certains aiment danser pieds nus, mais ça c’est pour les babs un peu allumés. Sauf à être vraiment très sensible aux couinements du biniou ou de la vielle, inutile de prévoir des bouchons d’oreille : le niveau sonore est moins élevé qu’un concert d’Amon Tobin. Pas de « dress code » particulier donc, mais un effort avec votre dernier tee shirt APC: de l’avis général, ça drague pas mal et beaucoup de couples s’y forment, sans compter les aventures d’un soir (Ah le terroir!). 3) Commencez par observer (et préparez-vous à imiter). Prenez d’abord le temps d’observer attentivement les danseurs qui évoluent devant vous, essayez de décomposer les mouvements qu’ils font avec leurs bras et leurs pieds. Dans toute les provinces, il existe des centaines de variantes, dont une vingtaine sont couramment pratiquées. On danse en ronde, en chaîne ou en couple ; bras dessus, bras dessous, en se tenant par les mains ou par le doigt, en bougeant à peine les pieds ou en se frappant les fesses du talon... Impossible (et inutile) de les apprendre toutes : la chorégraphie étant répétitive, un sens minimum de l’observation vous permettra de repérer les motifs : C’est l’intégration qui compte. D’ailleurs on observe plutôt un “nuage” de pas possibles pour une même danse (le cloud

sois tradi et tais-toi ! texte par Yann guygan photo aorta

est partout). 4) Soignez votre entrée (et choisissez bien votre place). Même si les danseurs se formalisent peu des erreurs commises par les débutants, il y a quand même quelques impairs à éviter au moment d’entrer dans la danse, privilégiez l’alternance homme-femme. Dans une chaîne, glissez-vous après le dernier maillon, et non avant le premier – sinon, les autres vont s’attendre à ce que vous meniez le groupe et là c’est la cata assurée. Dans certaines danses en couple, la cavalière doit se placer à droite de son cavalier. Attendez-vous à quelques froncements de sourcil si vous vous trompez, mais vous serez vite excusé . 5) Imitez vos voisins (en évitant de leur marcher sur les pieds). Une fois correctement intercalé, la priorité, c’est de se mettre dans le mouvement général, se rendre disponible pour permettre à la collectivité de faire sa danse. Si vos bras sont figés – c’est le cas si vous êtes bras dessus, bras dessous avec vos voisins –, alors vous pouvez vous concentrer sur vos pieds, repérer le bon mouvement et vous caler sur le rythme du groupe. Vous venez d’écraser le gros orteil du voisin ? Souriez si vous veillez à ne pas recommencer trop souvent. Mais si la danse inclut des mouvements des membres supérieurs, il va falloir être capable de les reproduire au plus vite. Gardez les bras souples, pour que vos voisins puissent vous guider, mais pas trop relâchés, pour qu’ils n’attrapent pas une tendinite à force de les soulever. Dans certaines danses, on se tient par le doigt, mais ce dernier n’est pas forcément l’auriculaire – bon à savoir si vous avez le petit doigt délicat. 6) C’est une question d’énergie (et c’est le groupe qui va vous la donner). Dans une ronde, il y a des regards, des sourires, une énergie. Le touriste de passage va la prendre et se sentir porté par les danseurs et il y a une forme d’auto-régulation collective : Si vous avez des tendances mystiques, ça pourrait même aller plus loin du type transe. 7) Sachez reconnaître un bal « trad’ ». L’ambiance d’un bal organisé en pleine saison dans une station balnéaire n’est pas forcément la même que celle d’un bal « trad’ » dans un village perdu au fin fond du centre-Bretagne l’hiver. Il est peu probable que vous atterrissiez dans ce genre de rassemblements, les touristes ne les trouvent pas et c’est ce qui attirent les puristes, capables de distinguer les multiples versions locales de la gavotte, du laridé à huit ou à six temps, de l’an-dro ou de l’avant-deux. Ici, pas d’accordéon, de flûte traversière ou de guitare comme dans des bals plus modernes, instruments traditionnels et des chanteurs. Un débutant peut-il alors s’élancer sur la piste ? Plutôt non! Car là on ne rigole plus et on vit à fond la tradition, la langue plutôt occitane ou bretonnante à fond et le touriste non pays n’a plus qu’à aller se rhabiller.


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chic & choc

2013 risque d’être une année encore plus difficile que les années précédentes. A ce jour aucun gouvernement n’a pris des mesures concrètes pour juguler la crise. Les banques continueront allégrement à se goinfrer, le travail deviendra une denrée de plus en plus rare s’il n’y a pas de changement dans nos habitudes, la pauvreté gagnera encore plus de terrain et les promesses liées à l’environnement resteront lettre morte sans compter sur la montée des intégrismes de tous poils. Il va falloir faire preuve de plus d’imagination et de créativité et si l’année s’annonce plutôt saignante et choc, le centre créatif du coin la souhaite étonnante et créative. Chic alors!


8 n°

24800 24800 est une publication du centre créatif du coin. Beaudouy 24800 St Jory de Chalais www.lecentrecreatifducoin.com / www.beaudouy.com marcjakobiec@gmail.com / mpthuaud@gmail.com + 33 (0)5 51 52 53 70


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