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Interview de M. Pierre Oba

Entretien avec Pierre Oba, Ministre d’État, Ministre des Industries minières et de la Géologie. Depuis 2005, Pierre Oba met en œuvre les politiques de gestion et de valorisation du patrimoine minier et géologique de la République du Congo.

Quelles sont les initiatives prises pour optimiser la contribution du secteur minier au développement durable et à la diversification de l’économie ?

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La politique de développement durable et de la diversification de l’économie congolaise est avant tout une volonté politique du chef de l’Etat contenu dans son programme de société intitulé : « Ensemble, poursuivons la marche ». Pour optimiser la contribution du secteur des mines solides, le département des mines se déploie sur quelques axes majeurs qui sont : l’adoption d’un cadre législatif et réglementaire attractif ; la réalisation de la cartographie géologique et géophysique nationale ; l’organisation du secteur de l’artisanat minier ; le renforcement des capacités des structures et des agents du ministère des Industries minières et de la Géologie ; le suivi de tous les projets miniers arrivés à maturité afin qu’ils entrent en production et apportent de la valeur ajoutée à notre économie ; l’arrimage du ministère des Industries minières et de la Géologie à l’information à travers la direction des systèmes d’information et de la communication qui est une structure rattachée au cabinet.

Pouvez-vous parler des enjeux liés à l’exploitation du gigantesque gisement de fer Nabeba-Mbalam, situé à cheval entre le Congo et le Cameroun ?

Les enjeux liés à l’exploitation gigantesque gisement de fer Nabeba-Mbalam sont multiples et se déclinent en termes d’intégration sous régionale, de la réalisation des infrastructures de transport et d’énergie, et de l’impact socio-économique. En effet, ce projet est d’abord un symbole d’intégration sous régionale qui est un facteur sine qua non du développement. C’est pourquoi, nos présidents respectifs, du Cameroun et du Congo, leurs excellences Paul Biya et Denis Sassou N’Guesso, attachent du prix à sa réalisation comme témoignage la mission que j’avais effectuée en mai-juin 2021 au Cameroun, sur les instructions de Son Excellence Monsieur le Président de la République du Congo, suivie récemment d’une mission de travail de grande envergure effectuée à Brazzaville, du 20 au 25 septembre 2021, entre les experts des deux pays sous la supervision des deux ministres chargés des mines de ces pays respectifs pour la relance de ce gigantesque projet intégrateur. Ensuite, il a un impact colossal sur le développement infrastructurel parce qu’il induit la construction, à moyen terme, d’un chemin de fer de 570 km de Mbalam au port de Kribi, et à long terme, d’un chemin de fer de plus de 1000 km, du nord au sud du Congo, plus particulièrement jusqu’au port de Pointe-Noire. Ce, pour faciliter l’évacuation du minerai de fer sur le marché mondial. On ne peut pas, en effet, développer les mines sans infrastructures adéquates. Il s’agit de la mise en œuvre d’un engagement conventionnel pris par nos partenaires fédérés au sein d’un important consortium pour la réalisation de ce très grand projet. Enfin, ce méga projet a un impact positif et colossal en termes d’emplois, de retombées fiscales, et du développement des actions communautaires en faveur de nos peuples respectifs.

Fin 2020, le Congo a retiré à plusieurs compagnies minières leurs licences d’exploitation de minerai de fer pour non-respect de leurs obligations concernant le développement des concessions. Ne craignez-vous pas de décourager les futurs investisseurs ?

Non, nos investisseurs n’ont rien à craindre parce que le cadre juridique congolais leur est très favorable ainsi que les avantages fiscalo-douanières dont ils bénéficient.

En République du Congo, comme ailleurs, les activités économiques notamment celles relatives aux mines sont régies par les lois et règlement en vigueur. Or, à la lumière de l’article 91 du code minier, et de ses textes d’application, l’absence ou l’insuffisance prolongée d’exploitation manifestement contraire aux potentialités du gisement ou de l’intérêt des consommateurs et non justifiée par l’état de marché est un motif légitime de retrait de tout titre ou autorisation d’exploitation minière. C’est une mesure d’ordre public à laquelle aucune stipulation conventionnelle ne peut déroger. En l’espèce, nos anciens partenaires, titulaires des titres miniers depuis 2013, étant incapables de développer leurs projets miniers contrairement aux dispositions légales susévoquées et aux stipulations conventionnelles sont tombés sous le coup de la loi et des règlements qui président à l’exploitation des mines en République du Congo. En outre, il leur a été fait grief de n’avoir pas payé les redevances superficiaires requises, en vertu des dispositions de la loi du 30 décembre 2010 fixant les taux et les règles de perception des droits sur les titres miniers au Congo, nonobstant des mises en demeure infructueuses. Tous ces faits ont causé un très lourd préjudice à l’Etat congolais dont le peuple attend beaucoup des retombées relatives à l’exploitation des ressources minières. En conséquence, c’est à bon droit que la République du Congo, en tant qu’Etat souverain, a simplement et légitimement décidé d’appliquer les lois et règlements en vigueur à l’encontre de ses anciens partenaires. Ces derniers ont préféré spéculer en bourse sur les licences d’exploitation obtenues facilement pour se faire copieusement engraisser au préjudice de l’Etat congolais. Aucun pays au monde, soucieux de son développement, ne peut accepter cette indélicatesse incommensurable et méprisable. Cependant, nous avons tendu la main à nos anciens partenaires pour un règlement à l’amiable comme prévu aussi dans nos conventions. Et, par ailleurs, nous avons beaucoup de partenaires et aucun d’entre eux n’a manifesté d’inquiétude du fait de ces mesures. Nombreux autres investisseurs frappent toujours à nos portes, et il y a toujours de bonnes perspectives de coopération.

Quand devrait aboutir l’adoption du nouveau code minier ?

Le processus de révision du Code minier est en cours. D’ailleurs, Son Excellence Monsieur le Président de la République nous l’a rappelé à l’occasion du Conseil des ministres du 20 septembre 2021 ainsi que le premier ministre, chef du gouvernement. Le code minier congolais institué par la loi numéro 4-2005 du 11 avril 2005 est l’un des plus souple et généreux du monde. Au regard de l’évolution des activités minières, il doit être revisité afin de s’y adapter en conciliant les intérêts de nos partenaires avec ceux de la République du Congo. Ce, en exaltant le partenariat dit « gagnant-gagnant ». Commencé en 2013, grâce à l’assistance technique de la banque mondiale, le projet de révision du code minier n’avait pas pu atteindre son objectif, faute de moyens financiers. Mais, quelques avancées considérables ont été réalisées. Le ministère des Industries minières et de la Géologie est en train de tout mettre en œuvre pour le relancer et le faire aboutir, des dispositions financières étant désormais prévues au budget de l’Etat. Pour ce faire, j’ai instruit toutes les personnes ressources habilitées à se préparer en vue de la relance de la révision de ce Code minier et la finalisation de cet important travail d’ici au milieu de l’année 2022.

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