Ivo van Hove - Mon bel animal • Feuille de salle

IVO VAN HOVE

Création

À PROPOS DU SPECTACLE

Le metteur en scène belge Ivo van Hove porte à la scène le roman de Lucas Rijneveld, Mon bel animal , récit déchirant entre un homme et une adolescente que la vie a abîmés.

Au cœur d’un été radieux, un vétérinaire visite une ferme et fait bientôt la connaissance de la fille du fermier. Entre l’homme de 49 ans et l’enfant de 14 ans, se noue bientôt une relation faite de confidences et de confiance, envisagée comme une échappatoire à leurs vies contrariées, leurs traumatismes et leurs impasses. Jusqu’à l’inacceptable. Porté par une écriture étourdissante, un flot de mots ininterrompu, le roman de Lucas Rijneveld épouse le point de vue de l’adulte, dans une approche à la fois nuancée et sans fard. C’est cet équilibre troublant que traduit ici Ivo van Hove, fidèle à son goût pour des mises en scène incandescentes, où la vidéo, la lumière et la musique ont une place importante. Sur une scène envahie par la paille, où différents espaces cohabitent, les interprètes livrent une prestation vibrante.

Jeu, ven 20h • Sam 18h • Durée 2h20 Spectacle en néerlandais, surtitré en français.

Avertissements

Ce spectacle est conseillé à partir de 16 ans seulement.

Il comporte des scènes de violence sexuelle sur mineure susceptibles de heurter la sensibilité de toutes et tous.

La création lumière repose sur un dispositif ponctuellement éblouissant et stroboscopique.

Espace écoute

Le spectacle abordant le thème des violences sexuelles, des représentantes du Planning Familial sont présentes sur place et à votre écoute avant et après le spectacle.

BRÈVE HISTOIRE RÉCENTE DES VIOLENCES SEXUELLES AU THÉÂTRE

Depuis toujours la scène, loin d’être le lieu du confort et de la tranquillité, est l’espace privilégié où se jouent les conflits les plus âpres de la nature humaine.

« Il est bien des choses monstrueuses, mais rien n’est plus monstrueux que l’homme », écrit Sophocle. Cela pose bien sûr la question de la violence et de comment l’aborder sur scène. À la fin des années 1990, la dramatuge et metteuse en scène britannique Sarah Kane avec des pièces comme Purifiés, Anéantis, Manque ou L’Amour de Phèdre a jeté un regard singulièrement fort et cruel sur la part d’ombre de l’humanité.

En 2016, le metteur en scène polonais Krzysztof Warlikowski s’est intéressé à l’écriture implacable de Sarah Kane en montant Phèdre(s). Dans ce spectacle dont l’héroïne était interprétée par Isabelle Huppert, la violence apparaissait de façon d’autant plus troublante qu’elle était associée à la sexualité. Aux textes de Sarah Kane, Krzysztof Warlikowski avait ajouté des extraits d’œuvres de Wajdi Mouawad et de J.M. Coetzee.

De ce dernier, Prix Nobel de Littérature, on a pu voir, une adaptation magistrale du roman Disgrâce par le metteur en scène Luk Perceval dont le personnage principal, David Lurie, un universitaire âgé de 52 ans, était mis en congé après avoir abusé sexuellement d’une étudiante.

La séquence où David Lurie, interprété par l’acteur Gijs Scholten van Aschat, se jette maladroitement sur la jeune femme était à la fois terrible et comique. En 2014, au Festival d’Avignon, le Hongrois Kornél Mundruczo présentera à son tour une adaptation autrement rude et dérangeante du roman.

La violence dans la tragédie grecque était évoquée plus que montrée. Comme s’il existait un seuil à ne pas franchir ; l’imagination faisant le reste. Aujourd’hui, peut-être sous l’influence du cinéma, mais aussi d’une écriture plus explicite dont témoignent notamment les pièces de Sarah Kane, la violence en général et les violences sexuelles en particulier sont régulièrement abordées sur les plateaux de théâtre avec le souci d’en analyser en profondeur les effets. Il y a à cela une raison évidente liée, d’une part, aux nombreux faitdivers recensés depuis une quarantaine d’années et, d’autre part, aux révélations en particulier de femmes ayant subi ces violences. Que de tels sujets soient traités au théâtre est évidemment salutaire. Même si d’une œuvre à l’autre, les approches et les esthétiques diffèrent radicalement. Dans Five Easy Pieces, le metteur en scène Milo Rau choisit pour parler de Marc Dutroux, assassin et pédophile dont les crimes ont traumatisé la Belgique, de diriger au plateau des enfants dans ce qui ressemble partiellement à une reconstitution. Le spectacle basé sur un solide travail d’enquête impressionne par sa justesse et sa capacité non seulement à confronter le public avec un contexte à la fois psychologique et

sociologique forcément perturbant, mais, au-delà, à interroger l’irréductible et inquiétante étrangeté de la nature humaine.

Tout aussi angoissant, quoique dans un registre différent, Purgatorio, deuxième volet de la trilogie consacrée à La Comédie de Dante par le metteur en scène Romeo Castellucci, confronte le spectateur à une relation d’une cruauté d’autant plus perverse entre un père, coiffé d’un chapeau de cow-boy, et son fils, que le viol y est perpétré dans un décor reproduisant l’apparence faussement calme d’un intérieur bourgeois. Suggéré plus que montré, l’acte sitôt accompli prend une résonance cosmique où le mal atteint une dimension métaphysique.

Il est aussi question d’inceste dans Le Voyage dans l’Est dirigé par Stanislas Nordey. En portant au théâtre le roman de Christine Angot, le metteur en scène a opté pour une distanciation d’autant plus efficace qu’elle est au service de l’écriture. Les scènes racontées par la romancière, qui renvoient comme on le sait à sa propre expérience, sont d’une précision souvent très crue et détaillée. Restituer ces moments vécus par une adolescente abusée par son père à travers les souvenirs de l’écrivaine, âgée aujourd’hui de 60 ans, n’avait rien d’évident. Stanislas Nordey y parvient avec tact sans pour autant faire l’économie des répercussions douloureuses d’une blessure qui est encore loin d’avoir cicatrisé.

À la différence de ce dernier exemple, Ivo van Hove en abordant le roman, Mon bel animal, de Lucas Rijneveld, sait qu’il travaille sur une œuvre de fiction. Transposant dans l’espace du plateau l’écriture dense et obsessionnelle de l’auteur, il réussit le tour de force de mettre en scène la collision entre deux imaginaires. Celui d’une adolescente, fille d’un éleveur de bétail, rêvant de devenir une star de rock comme Kurt Cobain et tourmentée par un fort sentiment de culpabilité. Et celui de Kurt, un vétérinaire pédophile chargé de soigner le troupeau de vaches de son père, qui s’immisce peu à peu dans son monde intérieur pour mieux la piéger et abuser d’elle. Le choc est d’autant plus percutant que les acteurs Eefje Paddenburg et Hans Kesting jouent à la perfection cette relation déséquilibrée et malsaine entre un adulte et une enfant.

Au fil d’une progression aussi inexorable que pernicieuse, la beauté de ce spectacle au réalisme cru tient à la façon dont il éclaire la question des violences sexuelles à travers le prisme non seulement du prédateur, mais de sa victime, rappelant au passage la remarque d’Herman Melville comme quoi « La vérité exprimée sans fards a toujours des bords déchiquetés ».

Hugues Le Tanneur pour La Villette, février 2024

IVO VAN HOVE

Figure majeure de la scène internationale, Ivo van Hove inscrit son œuvre à la croisée d’interrogations intimes et existentielles et des questions politiques. En trois décennies, son champ d’exploration embrasse le monde du théâtre, du cinéma et de l’opéra, ainsi qu’un vaste répertoire d’œuvres, de Sophocle (Antigone) à Shakespeare (Kings of War), Molière (Le Misanthrope), Tony Kushner (Angels in America), Arthur Miller ( Vu du pont), Ibsen ( Hedda Gabler), Louis Couperus ( The Hidden Force) ou Hanya Yanagihara (Een klein leven, d’après son roman Une vie comme les autres).

Il porte à la scène plusieurs pièces inspirées des scénarios de Cassavetes, Pasolini, Bergman, Antonioni ou encore Visconti, notamment Les Damnés avec la troupe de la Comédie-Française dans la Cour d’honneur du Palais des papes lors du Festival d’Avignon 2016. En 2019, il retrouve les Comédiens-Français pour Électre / Oreste d’après Euripide. Il met également en scène dernièrement Freud, d’après Le Scénario Freud de Jean-Paul Sartre à Amsterdam, et à l’Odéon-Théâtre de l’Europe, Vu du pont d’Arthur Miller et La Ménagerie de verre de Tennessee Williams. Pour l’opéra, il monte entre autres Salomé de Strauss au Dutch National Opera ; Don Giovanni de Mozart à l’Opéra national de Paris ; Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny de Kurt Weill au Festival d’Aix-enProvence 2019 ; Brokeback Moutain en création mondiale au Teatro Real Madrid. Sur Broadway, il met en scène West Side Story et Lazarus, dernier projet musical de David Bowie.

DISTRIBUTION ET MENTIONS DE PRODUCTION

D’après le livre de Lucas Rijneveld

Réalisation et adaptation Ivo van Hove

Avec Hans Kesting (Kurt), Eefje Paddenburg (Meisje, la jeune fille), Katelijne Damen (Camillia / mère de Kurt), Bart Slegers (père de Meisje / Freud / Hitler), Minne Koole (fils de Kurt)

Adaptation de l’accompagnement et conseils dramaturgiques

Bart Van den Eynde Scénographie et éclairage Jan Versweyveld

Costumes An D’Huys Paroles des chansons Lucas Rijneveld

Composition des chansons Wende Snijders et Koen van der Wardt Musique et conception sonore George Dhauw Conception vidéo Christopher Ash Musicien Roos van Tuil

Production privée Marcelle et Joost Kuiper, Hans Peter Sauerwein

Avec le soutien de Ammodo

Ce spectacle est soutenu par le Performing Arts Fund NL.

SAISON 2023-2024

VOUS ÊTES PLUTÔT THÉÂTRE ?

• CHRISTOPHE HONORÉ

Le Ciel de Nantes

5 7.04.2024

• COLLECTIF TRAVAUX PUBLICS

Le social brû(il)le • Création 2023

23 27.04.2024

• ARTHUR NAUZYCIEL

Le Malade imaginaire ou le silence de Molière

24 27.04.2024

• JULIE DELIQUET

Welfare d’après le film de Frederick Wiseman • Création 2023

3 5.05.2024

• PAULINE BUREAU

Féminines Dès 10 ans

14 17.05.2024

Projet labellisé Paris 2024 dans le cadre de l’Olympiade Culturelle

ABONNEZ-VOUS À

TOUT !

Obtenez votre billet à tarif réduit avec l’achat de 3 spectacles (ou +) et bénéficiez d’un accès prioritaire à la billetterie, des meilleures places en numéroté, des bons plans…

Et n’oubliez pas l’abonnement jeune (-26 ans) et le tarif enfant (-12 ans) !