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Comment les enfants de La Tortue vivent-ils leurs droits ?

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Le témoignage de Jacquelin Louis, inspecteur principal pour l’Education à l’île de La Tortue.

Disposer d’une identité

La plupart des enfants tortugais naissent à la maison avec ou sans l’assistance d’une matrone. Avant l’arrivée de l’officier d’état civil, qui se déplace maintenant même dans les zones reculées, beaucoup d’enfants n’avaient pas d’acte de naissance. Depuis trois ans c’est devenu l’exception.

Avoir le droit à la santé

Les agents de santé effectuent des cliniques mobiles pour vacciner les enfants. Mais ceux qui habitent dans les zones les plus reculées ne se présentent pas. Des postes de rassemblement sont alors organisés pour réunir ces enfants. Il n’y a pas en Haïti de couverture pour la santé, les frais de santé sont une lourde charge pour les parents.

Avoir le droit à l’éducation

Dans les zones d’accès facile les enfants vont à l’école à l’âge de 3 ans. Mais s’il n’y a pas d’école à proximité, ils commencent beaucoup plus tard. C’est le grave problème des enfants surâgés dans presque toutes les écoles de l’ile. Aucune école n’est gratuite à 100%. La scolarité est trop souvent interrompue faute de moyens. Même dans les écoles nationales (trois seulement sur 55 écoles), l’État n’assume pas ses responsabilités pour nommer ou payer tous les professeurs. Les parrainages collectifs de L’Appel assurent le droit à la scolarité de 515 enfants. Aller à l’école le ventre vide… c’est le sort de trop d’enfants. Il a fallu attendre l’intervention de L’Appel avec le concours de l’Ambassade de France pour que soit distribué un plat chaud dans quelques écoles. Depuis cette année seulement, avec l’intervention du Bureau National de Distribution financé par la Banque Interaméricaine de Développement, seules cinq écoles n’ont pas reçu de nourriture.

Avoir le droit d’être protégé contre l’exploitation dans le travail

Même à l’ile de La Tortue, plusieurs enfants sont en domesticité*, leurs droits ne sont pas respectés.»

*En Haïti, il n’est pas rare que des enfants soient placés par leurs parents, trop pauvres, dans d’autres familles plus aisées. Dans ce cas le travail domestique de l’enfant « paie » sa nourriture et son habillement, souvent au détriment de sa scolarité et de sa santé.

Que signifie le droit à l’éducation pour une famille pauvre, près de Port au Prince ?

En Haïti, où l’Etat est totalement délité, c’est aux familles que revient la charge de l’éducation, celle de la santé et la protection de leurs enfants, des familles confrontées aux caprices du temps, aux catastrophes naturelles, à la famine et à l’insécurité croissante. Une situation que Jeanine, mère de trois enfants, connait très bien. Quand elle nous a sollicités pour l’aider à payer les frais de scolarité de ses plus jeunes enfants, elle savait que ses maigres ressources étaient insuffisantes, mais qu’elle leur donnait ainsi la possibilité de rester un à deux ans de plus à l’école. En Haïti, l’école donne la chance de prolonger « le temps de l’enfance », car sans elle, comme leurs parents, les enfants sont obligés de gagner leur vie, à travers de petits commerces ou, pour les petites filles surtout, comme domestiques. Et le cycle de la misère se perpétue ainsi. L’Appel soutient une PMI et une école à Fort Jacques, au-dessus de Port au Prince, en réponse aux besoins de ces familles. L’approche est globale -santé, protection, scolarisation- et vise à réduire l’inégalité sociale. Certes la réalité, la crise du covid, la terrible insécurité viennent percuter la notion de droit des enfants, mais c’est un horizon auquel il ne faut pas renoncer. Merci de nous aider à poursuivre nos projets malgré la crise.

Myrvine Marcelin L’APPEL Ile-de-France

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