Carnet Issy Wood, Study For No

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P. 4-5

Préface/Foreword par/by Rebecca Lamarche-Vadel

P. 6

Entretien Issy Wood et Rebecca Lamarche-Vadel

P. 14

Interview Issy Wood and Rebecca Lamarche-Vadel

P. 22

Sélection d’œuvres/ Selected works P. 45

Paroles/ Song Lyrics P. 46-47

Liste d’œuvres/ List of works P. 50

Colophon LAFAYETTE ANTICIPATIONS FONDATION GALERIES LAFAYETTE


Première exposition d’Issy Wood en France, Study For No (Étude Du Non) se déploie comme un journal intime. Empruntant son titre à une peinture de 2019, elle explore ce qui sommeille dans un refus, dans les tentatives de résistance et de contestation face aux ordres et violences qui trament notre quotidien. Usant de la séduction, de l’humour et du cynisme, son œuvre réaliste est marquée par la répétition de sujets déclinés en séries : vestes en cuir glossy hypersexualisées, rutilants intérieurs de voiture, services en porcelaine immaculés, portraits d’animaux et de femmes, supplices d’examens dentaires, autoportraits en myriade etc. – qui sont autant d’endroits où se jouent nos manières d’être. Cette exposition, guidée par les mots de l’artiste, est une plongée dans un univers incroyablement prolifique qui se nourrit des paradoxes, des impasses, et des perspectives de notre temps. Observatrice du monde contemporain, son œuvre — qui prend forme par la peinture, l’écriture et la musique — révèle un regard aussi amusé que déconcerté par les jeux de pouvoir qui s’y jouent.

Issy Wood’s first exhibition in France, Study For No unfolds like a diary. Borrowing its title from a 2019 painting, it explores the potential of refusal, discussing and resisting orders which secretly weave their way into our daily lives. Building through seduction, humour, and cynicism, her work is marked by the recurrence of serialized motifs: hypersexualised shiny leather jackets, gleaming car interiors, immaculate porcelain sets, representations of animals, female figures, and self-portraits—all counting as sites where our ways of being are played out. This exhibition, led by the words of Issy Wood, dives into the practice and worldview of an artist whose incredibly prolific work feeds on the paradoxes, perspectives, and stalemates of our contemporary condition. An observer of the contemporary world, Wood’s work—which takes shape through painting, writing, and music—is that of a gaze at once amused and disconcerted by the power structures that govern it. Excerpts from Rebecca Lamarche-Vadel’s interview with Issy Wood and previously unpublished notes by the artist accompany the book’s plates. The full text of the conversation can be found on p. 14.

Des extraits de l’entretien de Rebecca Lamarche-Vadel avec Issy Wood ainsi que des notes inédites de l’artiste accompagnent l’iconographie de l’ouvrage. Le texte de l’entretien est à retrouver p. 6.

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PRÉFACE

FOREWORD

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Issy Wood

L’exposition à Lafayette Anticipations s’intitule Study For No, d’après l’une de tes œuvres. Que signifie ce titre ?

R. L.-V.

C’est un travail qui date de 2019, c’est-à-dire relativement « vieux » selon mes critères. Je me souviens que je commençais tout juste à apprivoiser l’usage du mot « non » et la puissance qui s’en dégage. Nous apprenons à l’utiliser enfant et, une fois adulte, nous devons réapprendre à l’utiliser — surtout, me semble-t-il, en tant que femme. J’ai pensé qu’il serait amusant de décorer les lettres du mot « non » dans ce tableau, comme si les fleurs et les ornements pouvaient contrebalancer son impertinence.

I. W.

La fatigue, l’épuisement, etc. sont des questions affectives mais aussi temporelles. Les réveils sont omniprésents dans tes tableaux, où l’on trouve des évocations récurrentes du temps : le temps du quartz, celui des figures antiques, des strates matérialisées de l’histoire, le temps qui s’impose à nos corps et nos existences. Tu as aussi une pratique intense et quotidienne de la peinture. La considères-tu comme une sorte de journal intime, une manière de garder une trace, un processus de guérison ou cathartique ?

R. L.-V.

Entretien Rebecca LamarcheVadel

Tout ça à la fois ! Garder une trace de soi a quelque chose de fondamentalement cathartique. Je travaille beaucoup et souvent mais je me rends compte que, comme toute compulsion, ce n’est pas parce que cela m’apaise que ça n’est pas physiquement éprouvant. Le temps recouvre tellement de choses — c’est une question immense et une mesure arbitraire. C’est l’ennemi de la personne dépressive

I. W.

ENTRETIEN

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pour qui les journées et les nuits sont toujours trop longues. C’est arriver en retard, faire chier les gens, ou être en avance et attendre ; vieillir, le décalage horaire, l’école, le sport ; les montres de luxe comme symbole de masculinité. Le temps a produit des situations détraquées pendant la pandémie, il était « élastique », comme le dit Fiona Apple dans une de ses chansons. 2020 est l’année où les réveils ont commencé à orner les coins d’un grand nombre de mes tableaux. Il fallait que je fasse un effort pour me rappeler que le temps existait. Aujourd’hui, je regarde des tableaux que je peins et je me dis : « Cette allégorie a besoin d’un foutu réveil ». J’adore que mes proches puissent reconnaître mes différentes humeurs et mes obsessions dans le contenu récent des tableaux. Ils les repèrent souvent avant moi. Les nombreux autoportraits de cette exposition réalisés à partir de selfies pris avec ton téléphone constituent une autre forme de journal intime visuel. On pourrait les voir comme un moyen de contester les archétypes féminins, de « tourner en rond autour de soi », mais aussi comme des horloges de l’existence ; une tentative pour réfléchir à l’identité et à l’impossibilité de la saisir.

R. L.-V.

Nous en avons discuté, tu sais que je n’aime pas être photographiée ou physiquement enregistrée de quelque manière que ce soit. À moins que ce ne soit inévitable, je suis une vraie connasse quand il s’agit de me prendre en photo. Les autoportraits relèvent d’une décision pragmatique pour que je puisse envoyer un « portrait de moi » à un magazine ou un catalogue sans impliquer un·e photographe.

I. W.

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Ils sont aussi le fruit de tout ce temps que je passe avec moi-même. C’est une série qui en est encore à ses débuts. Certes je n’aime ni mon visage ni me regarder dans le miroir, mais haïr autant son visage devient une forme de vanité. La chorégraphie rigide et le protocole qu’implique la manipulation de la porcelaine ; la pression du désir imposé aux corps féminins à travers les vêtements et les vestes glamours ; l’objectification des non-humains dans tes portraits d’animaux en céramique, etc. — tes tableaux semblent habités par une forme de violence muette, un contrôle social qui s’impose aux corps et aux êtres à travers les objets.

R. L.-V.

Les choses fragiles ou « de valeur » sont celles qui contrôlent le plus les gens ; elles exigent un niveau de comportement presque militaire. Nous avons un peu évoqué le contrôle que peut exercer un service de porcelaine — pas seulement parce qu’il est susceptible de se briser à tout moment, mais parce que nous avons hérité de conventions sociales qui dictent l’emplacement des couverts, quelle vaisselle utiliser pour quelle nourriture, comment mettre la table. Vu la façon dont certains membres de ma famille traitent ces règles, on pourrait penser que les enfreindre est passible de la peine de mort. Les formes de violences sont si nombreuses : le gore de Quentin Tarantino, l’abus d’un cerveau par un autre, et le pouvoir immense des règles non-dites. Les figurines animales expriment plusieurs choses, mais elles témoignent surtout de la coupure que nous avons instaurée avec la nature — nous avons domestiqué les animaux au

I. W.

ENTRETIEN

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point de les réduire au statut de bibelot. Comme la mode en général, les vestes représentent l’évaluation superficielle des mœurs d’une personne ou de son importance selon ce qu’elle porte. C’est à la fois stupide et violent. Je me suis toujours méfiée, et je me méfie encore des soi-disant attributs de la beauté féminine. Il m’a fallu beaucoup de temps pour devenir une femme et encore plus pour devenir féminine, en assimilant des signaux datant de mon enfance selon lesquels ces deux choses symbolisaient la faiblesse. Les ongles longs, les espaces domestiques immaculés, les bijoux et les vêtements : la question se pose toujours de savoir s’il y a de la force dans le fait de se s’approprier ces choses, ou si l’on cède finalement à une tradition toxique. Je me demande souvent : « C’est ça que je veux ? Je veux ce manteau, ces ongles, ce service en porcelaine, un homme avec une grosse voiture ? Merde, de quoi j’ai hérité ? Où est ma responsabilité ? » Le « non » s’avère ici très utile.

de mon enfance ; j’ai grandi en regardant d’horribles éruptions cutanées au petit déjeuner. Il s’avère que j’ai aussi trouvé de très belles illustrations anatomiques, des images de corps malades et des modèles médicaux. Mon enfance m’a appris que les docteurs ne sont pas parfaits. Je n’arrive toujours pas à croire que mes deux parents, avec tous leurs défauts, aient pu exercer un tel contrôle sur la vie humaine. Le détachement nécessaire à l’exercice de la médecine a inévitablement fait partie de la façon dont j’ai été éduquée. Leur domaine de connaissance (scientifique) exigeait d’en sacrifier un autre (émotionnel). Il y a très peu d’avantages à traiter tout le monde comme un ensemble d’organes et de signes vitaux. La médecine a beau être fantastique, mais elle ne propose qu’une partie de ce qui est nécessaire pour prendre soin des gens. Quiconque a entendu parler de la crise de l’OxyContin sait à quel point la frontière entre aider et blesser est mince. Considères-tu que ton travail accorde une place spéciale aux projections humaines ? À la façon dont nos pensées, nos rêves, nos peurs, nos angoisses et nos émotions façonnent le monde dans lequel nous vivons et la manière dont nous l’habitons ?

R. L.-V.

Tu t’intéresses également aux dessins des anatomistes français du dix-neuvième siècle, notamment aux illustrations à l’aquarelle d’extractions de dents. On voit aussi revenir à plusieurs reprises dans ton travail la question de la blessure et de la guérison, une remise en question de la suprématie de la science et de la médecine face à la vulnérabilité et la sensibilité des patient·es. Tes parents sont docteurs et tu connais bien le monde hospitalier. Y vois-tu un rapport avec ton éducation et ton expérience de l’environnement médical ?

R. L.-V.

C’est sans doute dû à l’omniprésence des journaux médicaux sur la table de la salle à manger

Comment pourraient-ils ne pas le façonner ? Récemment une de mes amies a essayé de s’excuser auprès de quelqu’un·e qu’elle avait tué·e dans un rêve la nuit précédente. Il existe autant de réalités que de personnes. J’essaye seulement de donner un aperçu de mon propre monde en espérant qu’il coïncide, même brièvement, avec celui de quelqu’un·e d’autre.

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ENTRETIEN

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L’humour, y compris l’autodérision, jouent un rôle central dans tes œuvres. Certaines références ou acteur·ices t’inspirent-iels particulièrement ? Je pense à Joan Rivers mais aussi aux figures tragicomiques comme Rodney Dangerfield et à ses références quotidiennes/existentielles qui rappellent ton intérêt pour l’absurdité du banal.

R. L.-V.

Dans la série télévisée Louie, créée et interprétée par Louis C.K., il y a une scène dans un hôtel à Vegas où il rencontre Joan Rivers, qui était encore en vie à l’époque. Il lui demande conseil en la traitant comme une aînée dotée d’une certaine autorité. Elle insiste sur l’importance de l’humilité, de ne négliger aucun boulot ou spectacle au début. Elle rappelle à quel point il est difficile de percer dans la comédie et lui demande : « Tu sais combien de pipes j’ai dû tailler pour en arriver là où je suis aujourd’hui ? », attendant qu’il devine jusqu’à ce qu’il finisse par risquer un : « 40 » ? Elle le gifle et lui dit : « COMMENT OSES-TU ! JE N’AI PAS TAILLÉ UNE SEULE PIPE ! SENS MON HALEINE ! »

I. W.

Cela me fait penser à l’une de tes chansons, sortie en 2020, et qui s’intitule Soup. Toutes tes pratiques — la peinture, l’écriture et la musique — sont étroitement liées et il s’en dégage presque une impression de Gesamtkunstwerk (œuvre d’art totale). Comment travailles-tu avec ces différents médiums et que t’apportent-ils ?

R. L.-V.

*intéressante*. Cela conduit parfois un·e peintre à se lancer précipitamment dans la sculpture ou à accrocher ses tableaux de manière insolite. En règle générale, cela ne fonctionne pas. J’ai essayé tout ça et finalement j’ai décidé d’étirer un tissu de rideau en velours de la mère d’une amie sur un cadre et de le peindre. J’avais l’impression d’être vraiment radicale. Des mois plus tard, je me suis rendue compte que la peinture sur velours existait depuis des décennies. Je n’ai pas réussi à me défaire de cette habitude, et la moitié des tableaux que je peins sont sur velours. Comme j’ai la chance de vivre de ma peinture, je suis toujours à la recherche de nouveaux loisirs. Avec la musique j’ai appris qu’une fois qu’un loisir devient un métier, il est impossible d’inverser ce processus. Je ne sais pas vraiment comment m’occuper si je ne fais pas des choses. Comme je l’ai dit, je n’aime pas être photographiée ou physiquement enregistrée, de quelque manière que ce soit. En revanche je veux être vue, au sens le plus profond du terme. Chaque pratique montre une part de moi que les autres n’atteignent pas tout à fait, comme un « peep-show » où l’on voit un acte cru de débauche à travers un petit trou ou un objectif. Je veux sortir tout ce que j’ai en moi, mais pas à travers un seul médium.

À un moment, quand j’étais encore à l’école, j’ai connu un épisode de ce que j’appelle maintenant la « paranoïa du·de la peintre », quand tout à coup la peinture sur toile ne semble plus assez

I. W.

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ENTRETIEN

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Issy Wood

The show at Lafayette Anticipations is named after a piece entitled Study For No. What does this title mean to you?

R. L.-V.

That work is from 2019, which counts as “old” by my standards. I remember I was just starting to learn the power of using the word “no”. We learn to use it as a child, and as an adult—especially, I think, as a woman—we have to learn to use it all over again. In the painting, I thought it would be funny to decorate the “no”, as though flowers and ornaments could balance out its defiance.

I. W.

Tiredness, exhaustion, etc. are affective but also temporal issues. Clocks are ubiquitous in your paintings, and one can find other recurrent evocations of time in them—as in the time of quartz, the time of ancient figures, of materialised layers of history, and the time that imposes itself on our bodies and existences. You also have a very intense, daily practice of painting. Do you see it is a sort of diary, a way of keeping track, or as a healing or cathartic process?

R. L.-V.

Interview

All of them at once! Also, there is something innately cathartic about keeping track of oneself. I work hard and often but I am learning that, like any compulsion, just because something is soothing for my mind, doesn’t mean it won’t be hard on my body. Time is so many things—it’s this huge deal and arbitrary measure. It is the enemy of the depressed person, for whom the days and nights are always too long. It is lateness and pissing people off, earliness and waiting. Ageing, jet lag, school, sport. Expensive watches as some masculine signifier. Time did some fucked up things during the pandemic, it was, as Fiona Apple once sang, “elastic”. 2020 is when the clocks

I. W.

Rebecca LamarcheVadel

INTERVIEW

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began to adorn the corners of a lot of my paintings. I had to keep reminding myself that time exists. Now I look at paintings I’m making and say to myself, “this allegory needs a goddamn clock”. I love that the people closest to me can recognise my various moods and obsessions in the recent content of the paintings. They often see it before I do. Another form of visual diary can be found in the many self-portraits included in this show, which are based on selfies taken with your phone camera. One could understand them as a way of challenging feminine archetypes, of “running around the self”, but also as clocks of existence; an attempt to reflect on identity and the impossibility of capturing it.

R. L.-V.

You know from our conversation that I do not like to be photographed or captured physically in any way. Unless it is unavoidable, I am a real asshole about having my photograph taken. The selfportraits were a practical decision so I could send in a “picture of me” for a magazine or a catalogue or whatever, without involving a photographer. They are also a product of how much time I spend with myself. It is a series in its very early stages. While I mostly do not like my face, or looking in the mirror, hating one’s face this much is its own kind of vanity.

I. W.

That tense choreography and protocol implied by the handling of porcelain; the pressure of desire imposed on female bodies through glamorous clothing and jackets; the objectification of nonhumans in your ceramic animal portraits etc.—it seems like your paintings are inhabited by a kind of

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unspoken violence, a social control that imposes itself on bodies through objects. Fragile or “valuable” things control people the most; they necessitate an almost military standard of behaviour. You and I have spoken a bit about how controlling a set of porcelain is—not only because it is so liable to breaking, but because we have inherited social customs which dictate where cutlery goes, which vessel is for which food, how a table is laid. The way some of my family treat these rules, you would think breaking them was punishable by death. There are so many types of violence: the Quentin Tarantino gore, the abuse of one brain by another, and the sinister power of unspoken rules. The animal figurines say many things, but mainly they are testament to how divorced we have become from nature—we have domesticated animals to the point of tchotchke-status. The jackets are, like all of fashion, a skin-deep assessment of someone’s morals or stature dictated by what they wear. This is both stupid and violent. I was/am always suspicious of the supposed hallmarks of feminine beauty. I feel I arrived very late to womanhood and even later to femininity, picking up signals from my childhood that those two things symbolised weakness. Long nails, immaculate domestic spaces, fine jewellery, and clothing: there is always a question about whether opting into these things is empowering or ceding to some toxic precedent. A lot of the time I ask myself, “Do I want this? Do I want this coat, these nails, this set of porcelain, a man with this expensive car? What the hell did I inherit? What are my duties?” The “no” comes in handy here.

I. W.

INTERVIEW

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You are also interested in the drawings of nineteenth-century French anatomists, in particular the watercolour illustrations of tooth extractions. The issues of injury and healing appear repeatedly in your work and you question the supremacy of science and medicine in relation to the subjectivity and sensitivity of patients. Your parents are doctors and you are no stranger to the world of hospitals and medical procedures. Do you see a connection with your upbringing and your experience in a medical environment?

R. L.-V.

Perhaps it’s the ubiquity of medical journals on my family’s dining table when I was growing up, looking at hideous rashes over breakfast, but I happen to find anatomical illustrations, disease imagery, and medical models very beautiful. I also know from my childhood that doctors aren’t perfect. I still can’t believe my two flawed parents had so much control over human life. The necessary coldness required to practise medicine was also inevitably a part of how I was parented. Their area of knowledge (scientific) implied the large sacrifice of another (emotional). There is very little upside in treating everybody like a set of organs and vital signs. Medicine is wonderful but I have learned it’s only half the work of this thing we call “care”. Anybody familiar with OxyContin and its story knows the razor thin line between helping and hurting.

I. W.

How can they not shape the world? A friend of mine recently tried to apologise to someone she dreamt she killed the previous night. There are as many realities as there are people. I can only try to outline my own world and hope it overlaps, even briefly, with somebody else’s.

I. W.

Humour, including self-mockery, also plays a central role in your works. Are there specific references or comedians who inspire you? Alongside Joan Rivers, I’m thinking about tragicomic figures like Rodney Dangerfield and his quotidian/existential references which recall your interest in the absurdity of the banal.

R. L.-V.

There is a scene in the TV show Louie, created and starred in by Louis C.K., where he meets Joan Rivers, who was still alive at the time, at a hotel in Vegas. He asks for advice, treating her as an elder with authority. She emphasises the importance of humility, of no job or gig being too small in the early days. She stresses how hard it is to succeed in comedy and asks him, “Do you know how many blowjobs I’ve had to give to get to where I am now?”, demanding a guess from Louie, until he finally relents and says “40?”. She slaps him in the face and says “HOW DARE YOU!! I HAVENT GIVEN ANY BLOWJOBS! SMELL MY BREATH!”

I. W.

This reminds me of a song you released in 2020, one entitled Soup. All of your practices—painting, writing, and music—are very closely interrelated and it almost feels like a Gesamtskunstwerk. How do you work with these different mediums and what do you get out of them?

Do you consider that your work gives a special place to human projections? To the way our thoughts, dreams, fears, anxieties, and emotions shape the world we live in and the way we inhabit it?

R. L.-V.

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While still in school, I had a moment of what I now call painter’s paranoia, where suddenly oil on canvas didn’t feel *interesting* enough. Sometimes this drives a painter to begin hurriedly making sculpture or hanging their paintings in an unorthodox fashion. Usually, it does not work. I tried all of those things and settled instead for stretching a friend’s mother’s spare velvet curtain material on a frame and painting it. I felt so radical. I realised months later that velvet painting had been a thing for decades. I haven’t been able to kick the habit, and about half of the paintings I make are on velvet. Also, because I am lucky to have painting as my job, I am constantly on the lookout for hobbies. As I learned with music: once a hobby becomes a job it is impossible to reverse that process. I don’t really know what to do with myself if I’m not making things. As I said, I do not like to be photographed or captured physically in any way. But ultimately, I do want to be seen in the deeper sense. Each practice shows a part of myself which the others don’t quite cover, like a “peep show” where you see some graphic act of debauchery through a tiny hole or lens. I want all of me out there, just not in one medium.

I. W.

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Sélection d’œuvres

Study for No, 2019 Huile sur lin/Oil on linen, 19,5 × 29,5 cm

C’est un travail qui date de 2019, c’est-à-dire relativement « vieux » selon mes critères. Je me souviens que je commençais tout juste à apprivoiser l’usage du mot « non » et la puissance qui s’en dégage. Nous apprenons à l’utiliser enfant et, une fois adulte, nous devons réapprendre à l’utiliser­surtout, me semble-t-il, en tant que femme. J’ai pensé qu’il serait amusant de décorer les lettres du mot « non » dans ce tableau, comme si les fleurs et les ornements pouvaient contrebalancer son impertinence.

Selected works

That work is from 2019, which counts as “old” by my standards. I remember I was just starting to learn the power of using the word “no”. We learn to use it as a child, and as an adult—especially, I think, as a woman—we have to learn to use it ail over again. ln the painting, I thought it would be funny to decorate the “no”, as though flowers and ornaments could balance out its defiance.

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Go, Daddy! (Lifechanging magic), 2023 Huile sur lin/Oil on linen, 140 × 100  cm

I won’t always do the right thing, 2021 Huile sur lin/Oil on linen, 84,5 × 119,5 cm

J’imagine que quiconque a assisté à la crise de la quarantaine de son père aurait du mal à com­prendre cette attirance des voitures pour les hommes, des hommes pour les voitures. Si cette crise coïncide avec un divorce, c’est encore mieux. Assister à un voyage tardif vers le célibat masculin implique souvent, si ce n’est toujours, une « belle voiture ». Une décapotable, ou un véhicule hors de prix — ce dernier choix s’apparentant à une danse autodestructrice sur la tombe des accords financiers et de la pension alimentaire. La belle voiture est l’anti-famille, parce que la belle voiture n’aura sans doute que deux sièges. La belle voiture dit : « Je ne peux pas aller chercher les enfants sauf s’ils veulent bien se contorsionner dans le coffre avec leurs cartables, comme des otages. » Ce n’est pas une coïncidence.

Comme la mode en général, les vestes représentent l’évaluation superficielle des mœurs d’une personne ou de son importance selon ce qu’elle porte. C’est à la fois stupide et violent. Je me suis toujours méfiée, et je me méfie encore des soi-disant attributs de la beauté féminine. Il m’a fallu beaucoup de temps pour devenir une femme et encore plus pour devenir féminine, en assimilant des signaux datant de mon enfance selon lesquels ces deux choses symbolisaient la faiblesse. Les ongles longs, les espaces domestiques immaculés, les bijoux et les vêtements: la question se pose toujours de savoir s’il y a de la force dans le fait de s’approprier ces choses, ou si l’on cède finalement à une tradition toxique. Je me demande souvent : « C’est ça que je veux ? Je veux ce manteau, ces ongles, ce service en porcelaine, un homme avec une grosse voiture ? Merde, de quoi j’ai hérité ? Où sont mes responsabilités ? » Le « non » s’avère ici très utile.

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I suspect anybody who bore witness to their father’s midlife crisis would struggle to see the seductive draw of cars to men, men to cars. If said crisis coincides with a divorce, all the better. Seeing a late voyage into bachelorhood play out will often, if not always, involve a “nice car”. Perhaps a convertible, perhaps something overpriced, the latter being a financially self-destructive dance on the grave of settlements and child support. The nice car is the anti-family, because the nice car might only have two seats. The nice car says, “I can’t collect the kids unless they’re happy contorting themselves and their school bags to fit in the trunk like hostages.” This isn’t a coincidence.

The jackets are, like all of fashion, a skin-deep assessment of someone’s morals or stature dictated by what they wear. This is both stupid and violent. I was/am always suspicious of the supposed hallmarks of feminine beauty. I feel I arrived very late to womanhood and even later to femininity, picking up signals from my childhood that those two things symbolised weakness. Long nails, immaculate domestic spaces, fine jewellery, and clothing: there is always a question about whether opting into these things is empowering or ceding to some toxic precedent. A lot of the time I ask myself, “Do I want this? Do I want this coat, these nails, this set of porcelain, a man with this expensive car? What the hell did I inherit? What are my duties?” The “no” comes in handy here.

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I told her so, 2022 Huile sur lin/Oil on linen, 40 × 30 cm

J’ai commencé à peindre des armures comme une variation de la série des vestes en remarquant leurs similitudes, la confusion entre la protection et l’ornement. Il y a une réplique amusante dans Les Soprano quand la maîtresse de Tony, originaire d’Europe de l’Est, confond les expressions « chevalier en satin blanc » et « chevalier étincelante ». Elle dit : « Où est mon chevalier en armure de satin blanc ? »

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Excuse me/your life is waiting, 2019 Huile sur lin/Oil on linen, 200 × 200 cm

I began painting armour as a twist on the jacket series—noticing their similarities, the confusion of protection and ornament. There is a funny line in The Sopranos where Tony’s Eastern European mistress confuses the phrases “night in white satin” and “knight in shining armour.” She says, “Where is my knight in white satin armour?”

J’essaie de peindre l’arrière-plan d’un tableau comme celui-ci en étant convaincue qu’il sera l’événement principal. Je prends l’arrière-plan au sérieux, même si c’est un mensonge et que je sais qu’il sera recouvert. Difficile à expliquer. Le fond et le premier plan sont aussi importants l’un que l’autre. La peinture sait comment obscurcir l’« événement principal ».

I try to paint a background for a painting like this in a state of conviction that it’ll be the main event. I take the background seriously, even though it’s a lie and I know it’ll be covered. Hard to explain. Background, foreground are as important as each other. Painting is good at obfuscating the “main event”.

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Opium over the holidays, 2021 Huile sur lin/Oil on linen, 77 × 58 cm

C’est un portrait du chien d’une amie qui s’appelle Opium. Vanessa le gardait pendant la période de Noël, quand personne ne pouvait se retrouver en intérieur à cause du Covid. Je me rends compte que j’ai tellement l’habitude de représenter des animaux que je suis incapable de dire si je connais intimement ou non mon sujet. Qu’est-ce que l’intimité avec un animal de toute façon ? Pour peindre ce vrai chien, je me suis servie de ce que j’ai appris en peignant des vestes doublées de fourrure.

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Study for a tureen 4, 2019 Huile sur lin/Oil on linen, 182 × 240 cm

This is a portrait of a friend’s dog called Opium. Vanessa was babysitting him during the Christmas where nobody could see each other indoors because of Covid. I realize I am so used to animal simulacra I can’t tell when I know my subject intimately or not. What even is intimacy with an animal? I used my skills painting furlined jackets to paint this real dog.

Ma grand-mère est la seule personne que je connaisse qui garde et utilise des soupières. Elle respecte la cuisine gastronomique et ses rituels qu’il est triste de perdre au fil des générations, même si c’est aussi un soulagement. Dans mon esprit, la soupière géante satisfait une partie de moi qui aimerait que la soupe ne soit jamais finie. Je me rends compte qu’elle est aussi liée à ma chanson « Soup » — une chanson pop triste qui raconte comment garder un homme en cuisinant.

My grandmother is the only person I know who keeps and uses tureens. She has a respect for fine dining and its rituals that is somehow both sad to lose over generations and also a relief. The giant tureen, in my mind, satisfies a part of me that wishes a soup would never end. It also relates, I’m realising, to my song Soup, a sad pop song about trying to cook your way into keeping a man.

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Study for Wednesday, 2022 Huile sur lin/Oil on linen, 72 × 64 cm C’est sans doute dû à l’omniprésence des journaux médicaux sur la table de la salle à manger de mon enfance ; j’ai grandi en regardant des éruptions cutanées horribles au petit déjeuner. Il s’avère que j’ai aussi trouvé de très belles illustrations anatomiques, des images de maladies et ces modèles médicaux. [...] Je peins généralement des dents qu’on répare un ensemble de dentiers, une couronne, un plombage, des bagues. La bouche est centrale pour toutes les personnes souffrant de trouble du comportement alimentaire, et plus particulièrement de boulimie nerveuse, puisque l’éro­sion que provoque l’acide gastrique met en péril les dents et la gorge. Les visites chez le dentiste deviennent tout à coup pesantes et difficiles. L’angoisse du cerveau a un effet direct sur les dents. [...] Il y a une expression anglaise qui vient des réparations de voiture mais qu’on utilise souvent pour décrire le fait de dévoiler un secret ou son intériorité : « voir ce qu’il y a sous le capot ». Ici, le capot de la voiture, c’est une sorte de protection ou de voile. On peut aussi l’employer pour parler de thérapie, pour décrire le désir d’explorer ce qui n’est pas visible en surface. Parfois une procédure invasive est la seule façon de réparer ce qui ne va pas. Qui a le droit de s’asseoir dans une Porsche, de regarder dans ma bouche, d’entrer dans ma chambre ou dans mon esprit ?

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Perhaps it’s the ubiquity of medical journals on my family’s dining table when I was growing up, looking at hideous rashes over breakfast, but I happen to find anatomical illustrations, disease imagery, and medical models very beautiful. […] I usually paint teeth which are undergoing repair in some way—a set of dentures, a crown, a filling, some braces. […]The mouth is central to anyone with an eating disorder, and especially bulimia nervosa where stomach acid erosion means the teeth and throat are in constant peril. Dentist visits are suddenly charged and heavy. The brain’s anguish has a direct effect on the teeth. [...] There is a phrase in English which originates from car repairs but is used colloquially to describe uncovering any secret or interiority: “to get under the hood”. The hood of the car in the phrase becomes any kind of covering or veil. lt can be used when talking about therapy too, describing a desire to investigate what is not seen on the surface. Sometimes an invasive procedure is the only way to fix what’s wrong. Who gets to sit in the Porsche, to look inside my mouth, to come into my bedroom or mind?

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What if you showed up, 2021 Système de canapé modulaire (Carlo Scarpa, v. 1930), huile sur velours, palissandre, laiton/Upholstered modular sofa system (Carlo Scarpa, c. 1930), oil on velvet, rosewood, brass Dimensions variables/Variable dimensions

Gift guide, 2023 Huile sur lin/Oil on linen, 76 × 83 cm

Recent Clocks, 2020 Huile sur lin/Oil on linen, 40 × 30 cm

Le meuble peint a beaucoup en commun avec les œuvres en porcelaine. Il trahit une tentative contrariée d’accueillir, de créer de l’intimité, un chez-soi. Quoi de plus désespéré qu’une chaise sur laquelle on ne peut pas s’asseoir ? Une assiette en porcelaine dans laquelle on ne peut pas manger ? Dans les musées et les demeures historiques du Royaume-Uni, on met souvent des pommes de pin sur les chaises pour indiquer qu’on ne peut pas s’asseoir dessus.

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The painted furniture has much in common with the porcelain works. They reveal a thwarted attempt at hosting, intimacy, home-making. What could be more hopeless than a chair you can’t sit on? A porcelain plate you can’t eat off? ln museums and stately homes in the UK, they often put pine cones on chairs to let you know you can’t sit on them.

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Palace/Curse, 2023 Service à thé en porcelaine, développé en collaboration avec la Manufacture nationale de Sèvres/Porcelain tea set, developed in collaboration with Manufacture nationale de Sèvres Exemplaire unique/Unique Dimensions variables/Variable dimensions Cette œuvre unique réalisée par la Manufacture de Sèvres à l’occasion de l’exposition reprend un savoirfaire ancestral réservé aux plus puissants depuis sa création par Louis XV et madame de Pompadour en 1740. Ici, Wood se réapproprie le service à thé, un objet qui rythme la vie des femmes bourgeoises dans leur intérieur et qui exerce un contrôle muet sur leurs corps, en imposant une totale maîtrise des gestes. Les horloges, les montres et les signes astrologiques peintes à la main évoquent la soumission des êtres au passage du temps. Les figures non humaines représentées — les asperges (hommage à la peinture de Manet) et un lapin — renvoient à des symboles de la nature morte, un genre artistique historique qui célèbre la vie des objets et des êtres inanimés.

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Produced on the occasion of the exhibition, this unique work reclaims an ancestral savoir-faire which was the preserve of the elite since the creation of the Manufacture de Sèvres on the initiative of Louis XV and Madame de Pompadour in 1740. Here, Wood reappropriates the tea service, an object that punctuates the lives of bourgeois women in their homes and exerts a silent control over their bodies by imposing a total mastery of one’s gestures. Hand-painted clocks, watches and astrological signs evoke the submission of beings to the passage of time. The nonhuman figures depicted— asparagus (a tribute to Manet’s painting) and a rabbit—refer to symbols of still life, a historical artistic genre that celebrates the life of inanimate objects and beings.

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Sphinx making the best of a seasonal depression, 2018 Huile sur velours/Oil on velvet, 180 × 140,5 cm

Le sphinx est devenu un thème récurrent parce que la coiffe me rappelle les cheveux très lisses de ma mère. C’est l’un des nombreux substituts que j’utilise pour réaliser un portrait d’elle sans vraiment faire son portrait. Il y a une certaine ironie à éviter de peindre ma mère parce que son image me semble trop sacrée, en la déplaçant vers quelque chose d’encore plus sacré. Le sphinx est à la fois bienveillant, mythique, ornemental et il n’est pas trop genré. C’est un message crypté aussi flexible que la mère.

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The sphinx became a recurring theme because the headdress reminded me of my mother’s very straight hair: decorative and protective. lt is one of many standins I use to make a portrait of my mother without actually making a portrait of my mother. lt is ironie, in some ways, that to avoid painting my mother because her image felt too sacred, outsourced to something even more sacred. The sphinx is benevolent, not overly gendered, mythical, ornamental ail at once. lt is as bendy a cipher as the mother.

Will he, 2019 Huile sur lin/Oil on linen, 225 × 150 cm

Je vole sans vergogne le sujet du tableau d’un grand maître vendu aux enchères. Après tant de siècles où les femmes ont été les sujets anonymes de nus, j’ai estimé que j’avais le droit de me réapproprier un nu. Je l’imagine en videuse, portière ou prisonnière. La façade gothique rappelle les façades historiques qu’il faut garder intactes en Angleterre, même si on construit un bordel ou un McDonald’s derrière.

Flagrantly stealing the subject of an old master painting sold at auction. After so many centuries of women being the anonymous subjects of nudes, I felt it was within my rights to take a nude back for myself. I imagine her as a bouncer or doorwoman or a prisoner. The gothic facade is reminiscent of historical facades in England that have to be kept intact, even if you’re building a brothel or a McDonald’s behind it.

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My first mortgage, 2019 Huile sur lin/Oil on linen, 24 × 30 cm

J’ai offert ce tableau à mon courtier quand j’ai acheté mon premier appartement. Par la suite, il a eu des difficultés financières et me l’a revendu.

Self portrait 26, 2022 Huile sur lin/Oil on linen, 30 × 40 cm

I gifted this to my mortgage broker when I bought my first apartment. He later ran out of cash and sold it back to me.

Carmela has the tea, 2022 Huile sur lin/Oil on linen, 140 × 270,5 cm

Carmela Soprano de la série Les Soprano. Ses ongles avaient toujours l’air d’être la seule chose encore intacte quand sa vie s’écroulait.

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Carmela Soprano from The Sopranos. Her nails always seemed to be the one intact thing when her life was falling apart.

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Je n’aime pas être photographiée ou physiquement enregistrée de quelque manière que ce soit. À moins que ce ne soit inévitable, je suis une vraie connasse quand il s’agit de me prendre en photo. Les autoportraits relèvent d’une décision pragmatique pour que je puisse envoyer un « portrait de moi » à un magazine ou un catalogue sans impliquer un·e photographe. Ils sont aussi le fruit de tout ce temps que je passe avec moi-même. Par exemple : j’ai cassé mes lunettes de soleil et comme je fais des autoportraits je peux maintenant transformer ma propre bêtise en tableau. C’est une série qui en est encore à ses débuts. Certes je n’aime ni mon visage ni me regarder dans le miroir, mais haïr autant son visage devient une forme de vanité.

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I do not like to be photographed or captured physically in any way. Unless the circumstances are unavoidable, I am a real asshole about having my photograph taken. The self-portraits were a practical decision so I could send a magazine or a catalogue or whatever a “picture of me”, without involving a photographer. They are also a product of how much time I spend with myself e.g. I broke my sunglasses and now that I make self-portraits, I can turn my own idiocy into a painting. It is a series in its very early stages. While I mostly do not like my face, or looking in the mirror, hating one’s face this much is its own kind of vanity.

Self portrait 3, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 20 cm

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Self portrait 1, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm

Self portrait 27, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 42 cm

Self portrait 22, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 177 × 152 cm

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Self portrait 24, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 24 cm

Ceiling

UNE CHANSON D’ISSY WOOD A SONG BY ISSY WOOD

[CHORUS]

Been learning how to walk on the ceiling Since you started to step on my feelings [VERSE 1]

Yeah, I’ve been tangled up before [?] on the bathroom floor I kicked that bad habit, grew some more Now I don’t know what I’m fighting for Just wish you’d give me a call [VERSE 2]

And I’m cutting all the corners now So don’t say I’m never around I’m sick of telling up from down I wrecked all the ceilings in your house Just wish this feeling stuck around [VERSE 3]

I’m making sure the walls are clean So that you can wipe the floor with me ’Cause I know I make it hard to breathe You’re dealing with the perfect [?] Just wish you’d save some air for me (Giving up) (Giving up) (Giving up) [CHORUS]

Been learning how to walk on the ceiling Since you started to step on my feelings Been trying hard to work on my breathing I’m learning how to cope when you leave me

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2E ÉTAGE/2ND FLOOR

1ER ÉTAGE/1ST FLOOR Study for No, 2019, Huile sur lin/Oil on linen 19.5 × 29,5 cm Go, Daddy! (Lifechanging magic), 2023 Huile sur lin/Oil on linen 140 × 100 cm I won't/always do the right thing, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 84.5 × 119,5 cm Speeding/losing my touch, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 141 × 100,5 cm Into that darkness, 2018 Huile sur lin/Oil on linen 100 × 50 cm Study for then again 2, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 175 × 215 cm House cooling study, 2023 Huile sur lin/Oil on linen 216 × 175 cm I told her so, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm

Excuse me/your life is waiting, 2019 Huile sur lin/Oil on linen 200 × 200 cm

Study for Wednesday, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 72 × 64 cm

Curators, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 200 × 200 cm

The invoice, 2019 Huile sur lin/Oil on linen 18 × 24 cm

Study for a tureen 4, 2019 Huile sur lin/Oil on linen 182 × 240 cm

Metal/diary, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 21 × 30 cm

Intervention study, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 100 × 140 cm

Study for a niece, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 89,5 × 245 cm

Study for showing you the door, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 100 × 140 cm

Gift guide, 2023 Huile sur lin/Oil on linen 76 × 83 cm

Ordering for the table, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 102 × 92 cm Crabtime, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 20 × 30 cm When problems overwhelm us!, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 40 cm

Steed energy, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 175 × 215 cm

Study for the mentor, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 24 cm

Trash 6, 2023 Huile sur lin/Oil on linen 215 × 175 cm

Flamingo study, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm

Help yourself (large), 2020 Huile sur lin/Oil on linen 181 × 180,5 cm

Study for the family way, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 40 cm

Help yourself (XXL), 2020 Huile sur lin/Oil on linen 240 × 182 cm

Opium over the holidays, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 77 × 58 cm

Study for me, sampling, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 192 × 202 cm

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What if you showed up, 2021 Système de canapé modulaire (Carlo Scarpa v. 1930), huile sur velours, palissandre, laiton/Upholstered modular sofa system (Carlo Scarpa c. 1930), oil on velvet, rosewood, brass Dimensions variables/ Variable dimensions Recent Clocks, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm Recent Clocks, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm Palace/Curse, 2023 Service à thé en porcelaine, développé en collaboration avec la Manufacture nationale de Sèvres/Porcelain tea set, developed in collaboration with Manufacture nationale de Sèvres Exemplaire unique/ Unique Dimensions variables/ Variable dimension Recent Clocks, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 20 × 30 cm

3E ÉTAGE/3RD FLOOR Recent Clocks, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 40 cm

Self portrait 1, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm

Sphinx making the best of a seasonal depression, 2018 Huile sur velours/ Oil on velvet 180 × 140,5 cm

Self portrait 3, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 20 cm

Will he, 2019 Huile sur lin/Oil on linen 225 × 150 cm Women laughing with birth control, 2019 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm Study for a girly sundial, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 24 cm My first mortgage, 2019 Huile sur lin/Oil on linen 24 × 30 cm Lena gets my show invite, 2023 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 21 cm The hold, 2020 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 24 cm Carmela has the tea, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 140 × 270,5 cm Samantha, learning to milk, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 40 cm

Self portrait 8, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm Self portrait 11, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 40 × 30 cm Self portrait 13, 2021 Huile sur lin/Oil on linen 42 × 30 cm Self portrait 21, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 42 × 30 cm Self portrait 22, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 177 × 152 cm Self portrait 23, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 132 × 177 cm Self portrait 24, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 24 cm Self portrait 26, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 40 cm Self portrait 27, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 30 × 42 cm Self portrait 28, 2022 Huile sur lin/Oil on linen 42 × 30 cm Floor 3, 2021 Huile sur carreaux de sol en céramique/Oil on ceramic floor tiles Dimensions variables/ Variable dimensions

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Rebecca Lamarche-Vadel Lafayette Anticipations tient à remercier Issy Wood, et Sévres-Manufacture et Musée nationaux./ Lafayette Anticipations would like to thank Issy Wood, and Sévres-Manufacture et Musée nationaux. Sont également ici remercié-e-s tou-te-s les prêteur-euse-s :/ We also thank all the lenders: Collection of Bianca and Christie Chu Hélène Nguyen-Ban AARTI LOHIA SP Lohia Foundation Collection of Jeremy Achkar London Dr Paul Ettlinger et/and Mr Raimund Berthold Jen-Huei Chang Collection, London, UK Robert Sheffield Scheinman Family Collection Zabludowicz Collection Collection of X Museum Collection of Sifang Art Museum, Nanjing Toutes les images sont © Issy Wood 2023, avec l'autorisation de l'artiste, Carlos/Ishikawa, Londres, et Michael Werner Gallery, New York. All Images are © Issy Wood 2023, courtesy the artist; Carlos/Ishikawa, London; and Michael Werner Gallery, New York. Crédits Photos/Photo credits © Damian Griffiths © Eva Herzog © Stephen James © Tom de Peyret

Rebecca Lamarche-Vadel est directrice de Lafayette Anticipations – Fondation d’entreprise des Galeries Lafayette depuis 2019. De 2011 à 2019, elle était curatrice au Palais de Tokyo. Elle collabore régulièrement avec des institutions, revues et catalogues français et internationaux. Elle intervient également dans de nombreux séminaires et jurys en France comme à l’étranger. — Since 2019, Rebecca Lamarche-Vadel has been the director of Lafayette Anticipations, a foundation established by the Galeries Lafayette Group. From 2011 to 2019, she was a curator at the Palais de Tokyo. She collaborates regularly with both French and international institutions, magazines, and catalogues and is a regular participant in conferences and juries in France and abroad. Issy Wood Issy Wood est une artiste basée à Londres. Son travail a été récemment présenté à l’limin Museum de Seoul (2023), à l’ICA. Miami (2022), à la Hayward Gallery à Londres (2021), au LACMA à Los Angeles (2021), au Goldsmiths Centre for Contemporary Art (CCA) à Londres (2019) et au Schinkel Pavillon & Berlin (2019), entre autres. — Issy Wood is an artist based in London. Wood’s work has recently been presented at the limin Museum, Seoul (2023); the ICA Miami (2022); the Hayward Gallery, London (2021); LACMA (2021); Goldsmiths Centre for Contemporary Art (CCA), London (2019); the Schinkel Pavillon, Berlin (2019); amongst others.

BIOGRAPHIES

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Créée par le Groupe Galeries Lafayette, Lafayette Anticipations est une fondation d’intérêt général structurée autour de son activité de production et de soutien à la création dans les domaines des arts visuels et vivants, du design et de la mode. Elle est un catalyseur qui offre aux artistes des moyens sur mesure uniques pour produire, expérimenter et exposer. Trois expositions et deux festivals (musique et danse) rythment sa programmation annuelle. L’équipe de Lafayette Anticipations Lisa Audureau, Elisa Argenziano, Étienne Blanchot, Camille Bouron, Géraldine Breuil, Amélie Coster, Elsa Coustou, Maxime Decouard, Clélia Dehon, Oksana Delaroff, Camille Drouet, Marine Ducroux-Gazio, Melissa Fernandez Sanchez, Annabelle Floriant, Cindy Georgel, Simone Greco, Coralie Goyard, Ladina Gubler, Guillaume Houzé, Selma Khallaf, Rebecca Lamarche-Vadel, Antoine Langrée, Célia Lebreton, Helena Lyon-Santamaria, Chloé Magdelaine, Olivier Magnier, Ksénia Mamay, Matthieu Maytraud, Aurélie Nahas, Elisa Normand, Judith Peluso, Madeleine Planeix-Crocker, Bettina Puchault, Raphaël Raynaud, Alexandre Rondeau, Catalina Rugeles Schoonewolff, Antonine Scali Ringwald, Sara Vieira Vasques, Émilie Vincent

Cet ouvrage paraît à l’occasion de l’exposition d’Issy Wood, Study For No à Lafayette Anticipations – Fondation Galeries Lafayette, du 18 octobre 2023 au 07 janvier 2024. Sous la direction de : Guillaume Houzé, président, et Rebecca Lamarche-Vadel, directrice Direction éditoriale : Rebecca Lamarche-Vadel assistée de Salomé Burstein, et Antonine Scali Ringwald Coordination éditoriale : Antonine Scali Ringwald et Matthieu Maytraud

Conception graphique : Studio Charles Villa Risographie : Oscar Ginter de Parseval Façonnage : Lauren Januhowski, Valentin Marande Impression Xerox : Olivier Magnier Papiers : Munken Print White 90g, Munken Polar Rough 120g, Riso papier master Typographie : Aperçu Pro Imprimé et façonné au 9, rue du Plâtre (Paris) en risographie (duplicopieur RISO MF9350) ISBN : 978-2-490862-35-1 Dépôt légal: octobre 2023

Traduction : Elsa Boyer Relecture : Claire Le Breton, Christophe François (français)/ Marc Feustel (anglais)

© 2023 Lafayette Anticipations – Fondation Galeries Lafayette

Created by the Galeries Lafayette Group, Lafayette Anticipations is a not-for-profit foundation structured around the production and support of the visual and performing arts, design, and fashion. The foundation is a catalyst that provides artists with unique, customised ways to produce, experiment, and exhibit. Three exhibitions and two festivals (music, dance) make up its annual programme.

This book was published on the occasion of Issy Wood’s exhibition, Study For No from 18 October 2023 to 07 January 2024 at Lafayette Anticipations – Fondation Galeries Lafayette.

Lafayette Anticipations team Lisa Audureau, Elisa Argenziano, Étienne Blanchot, Camille Bouron, Géraldine Breuil, Amélie Coster, Elsa Coustou, Maxime Decouard, Clélia Dehon, Oksana Delaroff, Camille Drouet, Marine Ducroux-Gazio, Melissa Fernandez Sanchez, Annabelle Floriant, Cindy Georgel, Simone Greco, Coralie Goyard, Ladina Gubler, Guillaume Houzé, Selma Khallaf, Rebecca Lamarche-Vadel, Antoine Langrée, Célia Lebreton, Helena Lyon-Santamaria, Chloé Magdelaine, Olivier Magnier, Ksénia Mamay, Matthieu Maytraud, Aurélie Nahas, Elisa Normand, Judith Peluso, Madeleine Planeix-Crocker, Bettina Puchault, Raphaël Raynaud, Alexandre Rondeau, Catalina Rugeles Schoonewolff, Antonine Scali Ringwald, Sara Vieira Vasques, Émilie Vincent

Edited by: Guillaume Houzé, President, and Rebecca Lamarche-Vadel, Director

Graphic design: Studio Charles Villa Risograph printing: Oscar Ginter de Parseval Sorting and binding: Lauren Januhowski, Valentin Marande Xerox Printing: Olivier Magnier

Editorial direction: Rebecca Lamarche-Vadel assisted by Salomé Burstein, and Antonine Scali Ringwald Editorial coordination: Antonine Scali Ringwald and Matthieu Maytraud Translation: Elsa Boyer Proofreading: Claire Le Breton, Christophe François (French) and Marc Feustel (English)

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COLOPHON

Papers: Munken Print White 90g, Munken Polar Rough 120g, Riso master paper Typography: Aperçu Pro Printed and bound at 9, rue du Plâtre (Paris) using Risograph printing (RISO duplicator MF9350). ISBN: 978-2-490862-35-1 Legal deposit: October 2023 © 2023 Lafayette Anticipations – Fondation Galeries Lafayette

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