En quoi la vidéo peut-elle être un outil pertinent pour l'apprentissage

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Julien Morice Master 1 TEF

En quoi la vidéo peut-elle être un outil plus pertinent que l’écrit pour l’apprentissage ?

Enquête dans un collège suite à la réalisation d’une vidéo avec des élèves de sixième SEGPA

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Rapport de stage Introduction : Depuis l’utilisation de l’ancêtre du rétro projecteur à nos jours, les outils et techniques utilisés dans l’enseignement n’ont cessé d’évoluer et en particulier depuis que nous sommes entrés dans l’aire de l’information et de la communication. Si la manière de « faire la classe » en est toujours restée aux préceptes de Jean Baptiste de la Salles datant du 17ème siècle, et qu’à l’unanimité nous restons sur un modèle d’enseignement frontal, l’utilisation de nouveaux outils, tels que la vidéo, commence à émerger. On la retrouve beaucoup dans des disciplines telles que les sciences de la vie et de la terre et les sciences physiques. Depuis peu, on voit également la vidéo être utilisée en dehors du contexte d’enseignement au service de la citoyenneté et de la prévention. Cette effervescence quant à l’utilisation de cet outil à l’école m’a donné l’idée d’élaborer un film en collaboration avec des élèves, sur l’organisation du collège, afin d’aider ces derniers à gagner en autonomie et d’avoir une meilleur connaissance des différents acteurs de l’établissement. Dans un premier temps, je ferai le descriptif de ma situation de stage en présentant brièvement l’établissement d’accueil ainsi que ma mission et mes objectifs pédagogiques. C’est ensuite dans un second temps, que j’effectuerai le bilan du stage en faisant le lien avec les éléments réflexifs et théoriques issus de mon cursus en science de l’éducation. J’expliquerai afin en quoi ce stage et en rapport avec mes choix pédagogiques effectués en Master TEF et en quoi j’ai répondu où non à mes objectifs.

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Première partie Dans cette première partie je vais décrire rapidement mon stage en abordant notamment ma mission et mes objectifs finaux. Ensuite je m’intéresserai à l’établissement d’accueil en mettant l’accent sur ses principales caractéristiques et l’utilisation des TIC dans son enceinte. Enfin, j’établirai une description des activités que j’ai réalisé en stage en m’aidant de mon précieux carnet de bord.

A) Contenu et descriptif de la situation de stage et des objectifs de départ

Mission relative au stage Ce stage a pour but d’effectuer avec des élèves de 6ème Segpa, un film sur le collège Montbarrot. Ce film qui s’évertue à décrire l’ensemble des missions des différents agents en dehors de l’équipe enseignante, se présente sous la forme d’entretiens individuels et de mise en situation, qui ont pour but de faire les liens avec les interviews. Suite à la réalisation du film, il s’agira d’évaluer son efficacité auprès d’élève de 6ème. Pour ce travail je comparerai les réponses à un questionnaire auquel j’aurai soumis trois classes d’élèves. Le premier groupe n’aura consulté aucun document, le second aura au préalable lu un support écrit et le dernier aura vu le film.

Les objectifs pédagogiques Mon objectif sera de démontrer en quoi la vidéo peut s’avérer un outil pertinent pour l’apprentissage. Il s’agit donc d’évaluer les effets cognitifs de la vidéo sur les élèves en terme d’assimilation de l’information et de comparer ces effets à ceux du format plus traditionnel qu’est l’écrit. C’est ce point qui sera développé ultérieurement dans l’analyse de la problématique. Sur le long terme, l’optique de ce travail est de créer un nouvel outil de présentation du collège pour les nouveaux élèves afin de faciliter leur intégration au sein de l’établissement.

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Très concrètement, cet outil pourrait ce présenter sous la forme d’un DVD que l’on donnerait à l’élève le jour de son inscription et qu’il pourrait visionner à la rentrée des classes, ou éventuellement en classe le jour même de la rentrée. Les nouvelles possibilités d’Internet nous permettent d’imaginer la possibilité, pour les élèves inscris, de télécharger la vidéo de présentation via le site du collège.

B) Description et caractéristique de l’établissement J’ai choisi d’effectuer mon stage dans le collège Montbarrot qui est un établissement situé dans le quartier Villejean à Rennes. Ce terrain était particulièrement propice en particulier de par son caractère familier. En effet, étant assistant d’éducation à mi temps dans cet établissement, j’avais une connaissance des acteurs et des élèves et étais déjà pleinement intégré dans l’équipe éducative.

Nombre de classes et enseignants Comme tous les collèges de France, le collège Montbarrot comprend des classes sur 4 niveaux (6ème, 5ème, 4ème, 3ème) auxquelles il faut ajouter des classes de SEGPA1 sur les quatre niveaux également et une classe de CLA NSA.2 Ce collège de 290 élèves dont seul 47% sont demi pensionnaires du fait de sa proximité au quartier Villejean, compte 32 enseignants. Si l’on tient compte de l’ensemble des effectifs salariés (assistants d’éducation, infirmière, administration), le taux d’encadrement et de 18 %.

Catégorisation de l’établissement En terme de population, les élèves proviennent pour 57% d’entre eux d’un milieu défavorisé. C’est pourquoi, le collège est classé en zone d’éducation prioritaire

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Section d’enseignement général et professionnel adapté Classes d’accueil pour élèves non scolarisés antérieurement

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Spécificité du projet d’école Le projet de l’école est de mettre l’accent sur une politique de mixité sociale au sein des élèves, car si la majorité des élèves viennent des quartiers alentours et de milieux défavorisés, 25% viennent de Vezin le Coquet qui est un secteur plus favorisé. En terme de pourcentage, 54% des élèves sont issus de milieux défavorisés et 38 % sont issus des classes favorisées ce qui va de paire avec le projet d’établissement. Le collège s’oriente également vers des actions en liaison avec le quartier ainsi que dans la perspective de mener un projet Européen de type coménius3 afin d’accentuer la mise en valeur des productions des élèves. Le collège affirme de plus une volonté forte de partager et d’individualiser des projets pour intégrer les élèves. Cette politique et les moyens supplémentaires liés à son statut ZEP4 semblent avoir l’effet escompté puisque, si les évaluations données en sixième montrent des résultats inférieurs à la moyenne de l’académie, les résultats d’admission au brevet sont casi-identiques à ceux de cette dernière.

C) Utilisation des TICE au collège Montbarrot Les nouvelles technologies sont particulièrement utilisées au collège Montbarrot et ce, pour plusieurs raisons. D’une part, le collège participe pleinement à l’opération ordi 35 mise en place dans tous les collèges d’île et Vilaine. Ainsi, tous les élèves de troisième ont à leur disposition un ordinateur portable durant toute l’année scolaire. De plus, au sein du collège Montbarrot, il y a deux salles multimédia, l’une collée à la salle de technologie, et l’autre totalement indépendante et accessible à tous les professeurs. A ces 40 postes informatiques, il faut ajouter la présence d’ordinateurs individuels dans la salle des professeurs ou dans certaines salles de cours à l’instar de la salle d’art plastique.

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Basé sur le partenariat entre différents établissement de pays différents aux sein de la communauté Européenne Zone d’éducation prioritaire

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Enfin, le CDI5 met à disposition des élèves 6 postes informatiques équipés de programmes éducatifs et d’une connexion internet. Ainsi, les moyens de l’établissement en la matière sont très importants, c’est pourquoi d’ailleurs, pour gérer tous ce matériel et faire fonctionner un réseau, 2 postes d’assistant réseaux ont été créés.

Utilisation des Tice dans le cadre de l’enseignement La mise à disposition de tels moyens informatiques encourage donc fortement les professeurs à utiliser les TIC pour leurs enseignements. C’est surtout, comme dans la plupart des établissements dans les domaines des mathématiques et de la technologie mais également de l’art plastique qu’est utilisé l’outil informatique. A titre d’exemple, j’assiste dans mon rôle d’assistant d’éducation au collège, un professeur de mathématique qui utilise un programme d’enseignement des mathématiques en ligne appelé Mathenpoche et j’ai également assisté un professeur d’art plastique dans la conception de plaquettes de sécurité routière en collaboration avec les élèves. Mais l’outil informatique est également beaucoup utilisé par les professeurs des classes de CLA-NSA, qui utilise nombre de programmes d’initiation du français et des mathématiques. Cependant, l’utilisation des technologies autres, tel que l’image, s’applique également dans le cadre de l’enseignement de l’histoire géographie par exemple, voire, dans le cadre de l’enseignement des langues vivantes concernant les supports audio. Cependant, peu de nouveaux supports audio et vidéo sont consultables et empruntables au CDI.6

Utilisation des Tice dans le cadre de projet Le collège Montbarrot utilise également le matériel mis à sa disposition dans des cadres moins formels, tel que la participation d’élèves au club d’informatique, où la mise en place

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Centre de documentation et d’information 0.03% Audiocassettes, 0.7% de vidéocassettes et 0.03% de cd audio

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d’un atelier ciné histoire sur le temps du midi, voir aussi dans le cadre de l’entraînement pour l’ASRR7 . Mais c’est surtout dans des itinéraires de découvertes et de projet avec des élèves de SEGPA que des projets plus ambitieux ont été réalisés, en voici quelques exemples : -

Réalisation d’un cd room : « du sous –sol à l’œuvre »

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Réalisation par des élèves de SEGPA d’un film d’animation « la terreur du freezer » et présentation du film en Roumanie

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Réalisation en collaboration avec une classe de SEGPA d’un film « Make up Success », dans le cadre d’un projet sur le respect mutuel fille/garçon.

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Echange via Internet avec l’Allemagne et Cuba

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Enregistrement d’un compact disque audio 4 titres

La spécificité du collège Montbarrot et sa place en zone d’éducation prioritaire lui permettent de travailler sur des projets en collaboration avec la maison verte8, de plus, le foyer socio éducatif, l’association des parents d’élèves et de nombreux partenaires permettent de financer une certaine partie des actions qui restent très lourdes financièrement. A titre d’exemple, le film « make up success » a coûté plus de 3000 euros.

D) Déroulement du stage J’ai donc effectué mon stage dans l’établissement Montbarrot auprès d’une classe de Sixièmes SEGPA. Mon tuteur durant ce stage étant tout naturellement leur enseignant, Monsieur Le Roy qui a beaucoup facilité mon intégration.

La phase d’accroche et de présentation Le stage à commencé dans le courant du mois de Février. Dans un premier temps, il s’agissait de faire plus ample connaissance avec les élèves de la classe. J’ai donc participé à 4 heures de cours avec mon maître de stage. De cette manière, j’ai pu mieux m’imprégner de l’ambiance de cette classe de 14 élèves.

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Sécurité routière Association du quartier

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Précisons, que pour beaucoup, ces élèves de Segpa sont issus de milieux défavorisés et son souvent en situation d’échec scolaire. De ce fait, il s’agit notamment, lors de cet enseignement adapté, de leur redonner le goût pour l’école et l’envie d’apprendre ainsi que de leur fixer des objectifs afin de garder toute leur attention. J’ai profité de ma présence dans la classe pour expliquer au groupe l’objet de mon stage. Ensuite, j’ai pris soin de leur demander s’ils voulaient bien participer avec moi a l’élaboration d’un film sur le collège et devant leur enthousiasme je me suis empressé de leur présenter le projets en détail. En fait le projet se décomposait en deux phases en ce qui les concernaient : ▫ Élaboration des questionnaires ▫ Tournage des entretiens et de scènes d’introduction Pour ce faire, nous avons décidé de travailler en binôme qui me semblait la solution la plus adaptée, et notamment concernant le déroulement des entretiens.

L’élaboration des questionnaires Les binômes constitués, j’ai attribué un entretien, voir deux, à chaque groupe d’élève en me basant sur la liste du personnel et notamment du personnel de direction et de l’équipe de vie scolaire. Ainsi la liste des personnes à interroger était la suivante : -

Principal

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Principale adjointe

-

Conseillère principale d’éducation

-

Gestionnaire de l’établissement

-

Infirmière

-

Assistant social

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A cette liste est venu s’ajouter le professeur documentaliste, la conseillère d’orientation, l’agent d’accueil ainsi qu’une assistante d’éducation. Je leur ai demandé de présenter succinctement leurs activités mais cela en dehors de la participation des élèves. Ainsi, c’est dans une salle de réunion mise à ma disposition que j’ai aidé chaque groupe concevoir leur questionnaire. Charge ensuite à eux de bien répéter les questions afin d’être fin prêt le jour de l’entretien.

Elaboration des scènes d’introduction Suite à la création des questionnaires, j’ai demandé aux élèves d’imaginer une situation pour introduire les entretiens. Par exemple concernant l’introduction de l’entretien avec l’infirmière : trois enfants jouent au foot et l’un d’eux se blesse. Ses camarades l’amènent voir l’infirmière…

Prise de rendez vous avec le personnel De manière indépendante je me suis occupé de tout ce qui concernait la prise de rendez vous avec les différents interlocuteurs. Pour certain, et notamment pour la conseillère d’orientation, c’était assez délicat puisqu’elle ne travaillait au collège que le Jeudi, journée durant laquelle j’occupais mon poste d’assistant d éducation au collège. De plus, j’avais un créneau assez serré puisque les élèves n’étaient disponibles par rapport à mon maître de stage, que les lundi et mardi de 14 à 16 heures. Cependant, j’ai pu travailler avec eux sur d’autres créneaux horaires avec une collègue également enseignante en classe de SEGPA. Pour les entretiens je prévoyais environ 1 heure, ce qui était amplement suffisant.

Deux mots sur matériel Nous verrons dans la deuxième partie plus en détail l’aspect technique de la création du film en prenant en compte tout ce que comprend le montage.

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Concernant le tournage à proprement dit, je me suis équipé de deux caméscopes, d’une lampe allogène, et d’un enregistreur externe de mini disque.

Le cadre légal Avant de passer à la phase de tournage à proprement parler, je devais me protéger et protéger l’établissement de manière légale en faisant signer aux élèves une autorisation parentale9 concernant la diffusion de séquences enregistrées dans lesquelles apparaît leur enfant. Aucun refus n’a été formulé et j’ai pu récupérer l’ensemble des autorisations signées me permettant ainsi de passer à la phase suivante.

La phase de tournage En fait, devant m’adapter aux emplois du temps de chacun, les phases d’élaborations des questionnaires et des scénarios d’introduction ainsi que les phases de tournage se sont croisés. En effet, si la plupart des personnes interviewées tiennent un agenda, parfois elles doivent répondrent à des imprévus. Durant le tournage, lorsque la luminosité de la pièce était insuffisante, je faisais appel à un troisième élève pour l’éclairage qui avait pour rôle de maintenir le même niveau d’éclairage durant tout l’entretien. Les deux élèves dans le rôle des journalistes prenaient place en face de l’interlocuteur que je filmais de biais. Ensuite, ces derniers posaient successivement leurs questions.

La phase d’évaluation Avant de passer à la conclusion de cette première partie concernant la présentation du stage et le descriptif de ce dernier, j’aborderai rapidement la phase finale qui fut l’évaluation. En effet, nous le verrons dans notre travail concernant la problématique, afin de répondre à la question des atteintes du stage en terme d’objectifs, j’ai proposé aux élèves de 3 classes de sixième générale et à la classe des sixièmes SEGPA de participer à une évaluation basée sur une méthodologie expérimentale. 9

Voir annexe

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Cette évaluation consistait à tester les effets du film sur la mémoire et de les comparer aux effets mesurés grâce à l’utilisation de supports écris.10 Pour ce faire, parmi les 3 classes de sixième générale, j’ai constitué un groupe « témoin » qui à répondu au questionnaire sans aucuns supports, un groupe « écrit » qui après avoir lu la retranscription des entretiens à répondu au même questionnaire, et enfin un groupe « film » qui après avoir vu la vidéo a répondu aux questions. Nous verrons les résultats de cette expérience lors de l’analyse de la problématique. Enfin, comme nous l’aborderons plus en détail par la suite, j’ai effectué un entretien avec un professeur sous la forme semi directive. Pour terminer, afin de compléter mon étude j’ai mis en place une discussion avec le groupe de sixième SEGPA, afin d’avoir leurs avis sur le film et le déroulement de son tournage.

Conclusion de la première partie Nous venons de décrire succinctement mon lieu de stage ainsi que les objectifs, l’objet et le déroulement de la partie de mon stage. Les conditions initiales étaient donc très favorables puisque je disposais d’élèves motivés par le projet et de deux jours et demi par semaine pour mener celui ci à terme. Je disposais également de locaux agréables, notamment pour préparer les questionnaires avec les élèves, puisqu’une salle de réunion était mise à ma disposition dans le collège. Je pouvais enfin, si je le souhaitais, utiliser la salle informatique. De plus, je travaillais également avec du matériel personnel et/ou prêté d’excellente qualité pour filmer et enregistrer les entretiens. Mon objectif étant donc de créer un nouvel outil pour faciliter l’autonomie de l’élève.

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Voir travail sur l’analyse de la problématique

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Deuxième partie

Nous allons maintenant pouvoir aborder le bilan du stage. Pour ce faire nous verrons dans un premier temps dans quel cadre pédagogique se situait mon projet avant de le positionner par rapport à ma formation et l’enseignement qui m’a été dispensé en première année de Master. J’expliquerai ensuite en quoi mon projet a constitué avant tout un choix en rapport avec ma formation, mais aussi, mes convictions, et enfin, de manière plus générale, mes envies. Pour terminer, dans une troisième partie j’analyserai les points fort ainsi que les défaillances du projet, à la fois d’un point de vue objectif, mais ainsi, plus personnellement, d’un point de vue subjectif. Cette partie bilan sera agrémentée d’éléments réflexifs et théoriques qui se grefferont aux éléments descriptifs en cohérence avec les sciences de l’éducation.

I. La dimension théorique du projet et le lien avec la formation A) Le projet à la lumière des sciences de l’éducation

L’inspiration Freinet De grands pédagogues ou médecins jetterons les bases de l’éducation nouvelle à l’instar de Maria Montessori en Italie, John dewey aux états unis, Ovide Decroly en Belgique, Janus Korczak en Pologne et Celestin Freinet en France. L’idée qui relie les penseurs tourne autour de la motivation des enfants dans l’acte d’apprendre. Chaque pédagogue durant sa vie oeuvrera selon ses principes et ses convictions, et

Freinet travaillera surtout quant à lui sur l’instauration de nombreuses pratiques

pédagogiques innovantes basées dans un premier temps sur l’imprimerie. Les pédagogues de l’école moderne rejettent les contraintes selon lesquelles, seul l’adulte est en position d’apporter une nourriture à l’élève. Les productions de médias incitent l’élève à proposer, ce qui bouleverse les pratiques traditionnelles.

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D’une certaine manière, c’est bien dans ce cadre que s’inscrit mon projet, puisqu’il s’agit bien d’amener les élèves à produire, ou du moins, contribuer à la production d’un documentaire sur le fonctionnement du collège. Ainsi, les élèves qui ont participé à la production du film sont devenus maîtres de leurs apprentissages.

Dans la lignée du socioconstructivisme C’est grâce à l’apport des TICE que la possibilité m’a été offerte de faire un film avec les élèves, si traditionnellement les TICE sont, à juste titre, associés à l’informatique, on omet souvent d’aborder les films, et autres créations telles que les journaux, que permettent ces nouveaux outils. Si l’utilisation des nouvelles technologie dans l’éducation a su évoluer pour devenir entre autre un outil qui favorise l’autonomie de l’enfant, les premiers balbutiements de l’informatique ne fonctionnaient que sur le principe du stimulus / réponses chères aux béhavioristes à l’instar de Watson et de Skinner, ce dernier aillant notamment introduit la notion de renforcements positifs et négatifs.11 Il est intéressant de noter que ces nouvelles technologies ont évolué en parallèle avec les grands fondements de l’éducation que sont : le béhaviorisme, la constructivisme et le socioconstructivisme. Selon les didacticiens, on apprend toujours quelque chose à partir du moment au nous nous trouvons en interaction avec quelqu’un, il s’agit ici d’un courant interactionniste. A cette mouvance, s’associent de grand noms : Sigmeud Freud confirme le rôle fondamental de la médiation dans le désir d’apprendre quant à Vygotsky et Wallon. Ils placent la relation sociale et le langage au centre du modèle explicatif du développement de l’enfant : le discourt du professeur crée un conflit sociocognitif

nécessaire à la transformation des

préconceptions12. Dans notre cas précis, il y a bien eu interaction, d’une part avec moi lors de la création des questionnaires et de fait, interaction entre les élèves d’un même groupe, notamment dans la conception des scènes d’introduction, et enfin interaction avec les personnes interrogées.

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Alain Lieury – Motivation et réussite scolaire, 1997 Ponts-Lajus / Riché-Magnier à l’heure d’Internet, 1998 p.29

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Sur les traces de la recherche action Ayant particulièrement prospéré en Amérique Latine, notamment par le très fameux Paolo Freire, le principe de la recherche-action s’est particulièrement développé dans nos sociétés occidentales durant les dernières décennies. Pour définir ce terme valise, je me base sur les travaux de Claude Martin qui en dresse les principales caractéristiques. Ainsi, la recherche action se caractérise notamment par une intervention dans les champs institutionnels ou sociaux, mais aussi par une place importante pour la participation avec une notion de démocratisation du savoir au plan de sa diffusion mais surtout de sa production. C’est bien dans ce cadre que mon projet de stage a été réalisé. En effet, mon projet consistait bien à intervenir auprès d’une institution scolaire en collaboration avec des élèves de sixième SEGPA, dans le but de créer un outil utile à tous, ayant pour objectif d’autonomiser les individus au sein du collège. Concrètement, je le rappelle, les élèves ont participé activement à la création des questionnaires, au tournage du film, au déroulement des entretiens en se mettant dans la posture du journaliste. Ils ont également participé à la création de scènes théâtrales d’introduction. Enfin, notons également que la recherche action à souvent une dimension politique, dans notre cas, je souhaitais en réalisant ce film démystifier l’utilisation de la vidéo à l’école qui devrait être considérée comme un outil pertinent en terme de visées pédagogiques. Nous venons de définir le cadre théorique dans lequel s’inscrit le projet, voyons maintenant en quoi mon stage s’intègre à mon cursus en Master professionnel spécialisé dans les technologies de l’éducation et de la formation.

B) Adéquation avec ma formation Master TEF

La question des formats de présentation La question des formats de présentation est particulièrement étudiée en Master TEF.

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Si le format qui domine dans nos institutions scolaires est celui de l’écrit, son monopole est t’il légitime ? C’est d’une certaine manière l’une des questions que je souhaitais soulever durant mon stage. Dans ce domaine, l’enseignement dispensé durant l’année universitaire m’aura été d’une aide précieuse, et je pense notamment aux études menées par Eric Jamet, Olivier le Bohec et Cédric Hidrio13 dont nous reparlerons plus tard. C’est bien l’un des objectifs proposer par le Master TEF d’amener les étudiants à imaginer de nouveaux outils d’apprentissage basés sur l’utilisation des nouveaux moyens technologiques. De plus, s’il y a encore quelques années, l’idée de concevoir dans un laps de temps très court un film sur support DVD, avec des élèves à l’aide de moyens limités pouvait sembler trop ambitieuse, aujourd’hui elle est plus envisageable. En effet, les moyens informatiques et ceux liés à la capture de l’image se sont démocratisés, c’est pourquoi il me semble essentiel que notre formation nous apportent tous les éléments, techniques et réflexifs, pour mener à terme un projet de ce type. C’est sur ces questions que certains d’entre nous aurons plus tard dans leur vie professionnelle leurs compétences à exploiter, et particulièrement, j’en suis convaincu, sur la question des formats de présentation à laquelle je me suis attelé durant mon stage.

La question de l’image L’un des autres enseignements qui nous a été dispensé et qui me fut lui aussi d’une aide précieuse fut l’approche psychanalytique de l’image. J’évoquerai particulièrement les travaux de Serge Tisseron14, cet auteur m’a permis de mûrir ma réflexion sur l’importance des images dans notre société et son utilisation dans l’enseignement. L’auteur aborde le rôle de symbolisation des images qui aide l’individu à se construire, il exprime également ses convictions sur la nécessité absolue d’apprendre aux individus et particulièrement aux jeunes à contextualiser l’image afin de limiter l’impact émotionnel de cette dernière et les dangers liés à leur utilisation. Ici encore, les informations que m’ont apportées ces études furent pertinentes et surtout transférables à mon stage. En effet, j’ai profité de l’opportunité de faire un film pour aborder avec eux la question chère à Serge Tisseron, à savoir : la contextualisation. 13 14

Comment présenter l’information dans les documents numériques éducatifs ? Article, 2003 Y a-t-il un pilote dans l’image ? , 1998 / Enfant sous influence, 2000

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En effet, c’est au terme de mon stage, après la diffusion du film auprès des élèves acteurs que j’ai abordé la question de la manipulation des images par les réalisateurs. De fait, les élèves on pu mesurer la différence entre tout ce que j’avais filmé dans la réalité et ce qui constitue après montage le film. Ils se sont ainsi rendus compte qu’il est possible d’effacer des défauts et d’éliminer des erreurs aussi facilement que sur un document écrit. Ils ont également souligné les possibilités de jouer sur la vitesse du film et sur la qualité des images. Ces constats, ils ont pu l’exporter à ce qu’ils voient à la télévision, j’ai en quelque sorte élaboré avec eux un atelier de réflexion sur l’image tel que Serge Tisseron le préconise.

La question technique Faire un film nécessite, comme nous l’avons vu, quelques moyens matériels, mais surtout, des connaissances personnelles en ce qui concerne la manière de filmer, le matériel à utiliser, les programmes informatiques nécessaires à la création d’un DVD. Sur ce point, avant d’entrer en Master TEF, mes connaissances étaient, somme toute, limitées. C’est grâce aux cours optionnels dispensés durant la formation que j’ai appris à maîtriser ou du moins à améliorer mes compétences dans le domaine. Je remercie d’ailleurs particulièrement Jean jacques Guémard dont les conseils m’ont été particulièrement utiles. Concernant les connaissances techniques, j’estime pour ma part que même si notre formation n’a pas pour objectif de former des techniciens, nous nous devons dans un tel cursus de maîtriser les outils principaux de traitement de l’image et du son. Pour la création de ce film, je me suis ainsi servi des programmes suivants : -

Adobe Photoshop version 6 (traitement des images fixes)

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Adobe Première Pro 1.5 (montage vidéo)

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Adobe Audition (traitement du son)

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Encore DVD 1.5 (création de l’interface DVD)

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Nous venons de le voir, mon stage au collège Montbarrot aura été pour moi le moyen de mettre en application les connaissances et compétences développées au cours de la formation Master TEF. Les deux situations se sont donc parfaitement articulées et se sont avérées complémentaires. D’ailleurs, concernant l’acquisition des connaissances, il n’y a rien de plus utile pour les maîtriser définitivement que de les appliquer concrètement. De plus, professionnellement parlant, je m’intéresse beaucoup à la conception des documents pédagogiques et dans ce domaine, des opportunités d’emploi sont à saisir auprès du CRDP15 et du conseil général. C’est pourquoi, plus qu’un simple stage, la création du DVD peut m’aider à vendre mes services auprès d’employeurs potentiels.

II. Un projet, un choix, des convictions

A) la visée politique Comme nous l’avons vu précédemment dans la caractérisation du projet en recherche action, derrière de tel projet, mettant l’accent sur la participation des apprenants à leurs apprentissages, se pose la question politique. Pour ma part, comme je l’ai précisé, j’ai souhaité par mon projet remettre en cause le monopole de l’écrit dans nos institutions scolaires. En effet, dans un monde ou se côtoient l’image et l’écrit, pourquoi ces institutions restent t’elles hermétiques à l’un, et idéalisent l’autre ? D’ailleurs comme le constate Nicolas Albrand16, responsable de la rédaction M6 Nancy, il est même difficile d’accéder aux établissements pour réaliser des reportages : « les raisons sont moins institutionnelles que corporatistes : Il s’agit d’un problème de confiance du monde enseignant qui craint encore le regard porté par les médias sur l’école. » Pour ma part c’est un phénomène que je trouve consternant. D’ailleurs, concernant mon stage, j’ai toutes les raisons de penser que si je n’avais pas travaillé dans l’enceinte de l’établissement je n’aurais pas eu la possibilité de réaliser mon 15 16

Centre régional de documentation pédagogique Ecole et média : regard croisés, J.Y Bey et J.M Gérard, 2001

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projet avec les élèves. En effet, j’ai eu au départ quelques réticences de la part de la direction sous couvert d’une législation draconienne…Cependant, aillant bien préciser mes objectifs et le sérieux de mon travail, j’ai quand même obtenu l’aval de mes supérieurs. Sur la question il y a beaucoup à dire mais je ne l’approfondirai pas ici davantage. Mais c’est en partie pour apporter ma modeste contribution à l’amélioration de la perception des images par les institutions scolaires que j’ai développé ce projet.

B) Les constatations de terrain Une autre raison pour laquelle j’ai choisi de créer un DVD à caractère pédagogique concerne plus le contenu même de l’outil ainsi que ses objectifs en terme d’apprentissage. En effet, force est de constater, lorsque l’on travaille en tant qu’assistant d’éducation, que les connaissances des élèves en terme d’organisation du collège sont parfois très limitées. Certains même, peinent à mettre un visage au directeur ou à l’assistant social…De plus, il faut sans cesse leur rappeler les démarches à faire pour payer la cantine, acheter un carnet de correspondance etc.… C’est pourquoi l’idée de créer un outil simple de compréhension qui s’adresserait à tous les élèves et en particulier aux sixièmes, car ils sont nouveaux au collège, a fait son chemin et a abouti à mon projet de stage. D’ailleurs, c’est ici encore une des tendances clef de la recherche action, qui caractérise bien mon projet, que de s’inspirer du terrain pour établir un diagnostique.

C) Une démarche personnelle Ma démarche de stage a été également motivée par des intérêts personnels concernant l’utilisation de l’outil informatique et la création de montage vidéo. En effet, c’est un aspect qu’il ne faut pas nier et qu’il est important de préciser. D’un autre côté, il est évident que si le domaine de la vidéo ne m’intéressait pas, je ne me serait pas aventuré dans un tel projet. L’important étant bien sûre d’allier l’intérêt à l’utile. C’est ce à quoi je me suis appliqué.

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III. Le dénouement du projet

Au terme de 4 mois de stage j’ai donc terminé mon projet dans les temps, à savoir les trois phases : -

La préparation : comprenant l’élaboration des questionnaires, la conception des scènes d’introduction et les prises de rendez vous.

-

La phase de tournage et de montage : comprenant la mise en application de toute la phase de préparation par le biais du tournage et la création du DVD.

-

La phase d’évaluation : comprenant une enquête auprès des classes de sixième du collège Montbarrot portant sur les effets cognitifs de la vidéo sur l’apprentissage17. Cette phase concerne aussi les sixièmes SEGPA qui, après avoir visionner le film, on formulé leurs impressions et ont participer à un travail réflexif sur l’image. Pour terminer, j’ai également interrogé une professeur SEGPA qui a regardé le film avec nous et connaît bien les élèves.

Abordons maintenant les aspects positifs du stage et dégageons également certaines limites.

A) Les points forts par rapport au travail avec les sixièmes SEGPA

La motivation des élèves En premiers lieux, ce qui m’a enthousiasmé pour mener ce projet fut la motivation des élèves et leur engagement volontaire, du moins pour la plus grande majorité d’entre eux. En effet, lorsque j’ai présenté mes objectifs, ils se sont tous portés volontaires à mon plus grand soulagement. Le fait que cette participation était basée sur le volontariat constituait pour moi une condition essentielle car elle témoignait d’un engagement personnel important de la part de l’élève. Dans notre système scolaire dans lequel les enfants sont perpétuellement évalués par des notes cette participation volontaire désintéressée est hélas quelque chose de rare.

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Voir l’analyse de la problématique

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Le travail collaboratif Dans le film les élèves se sont pleinement impliqués à hauteur de leurs possibilités de manière collaborative. En effet, ce sont eux qui, avec mon aide, devaient formuler par écrit les questions et prévoir des scènes d’introduction. Il s’agissait donc bien d’un travail collectif au sens où chacun à participer à sa manière à la création du film.

a) Les points fort par rapport aux conditions du stage

Une bonne autonomie Si j’ai du quelque peu insister par avoir l’autorisation de la direction pour faire le film, mais une fois le projet commencer, j’ai pu m’organiser comme je l’entendais et disposer de salle pour travailler. De plus, le professeur tuteur m’a fait confiance dès le début et n’a pas exercé de contrôle sur mon stage. Ce qui était pour moi l’idéal pour un tel projet. En revanche il m’a beaucoup aidé concernant le recadrage des élèves en leur faisant bien comprendre, lorsque cela était nécessaire, que c’était un travail sérieux. Cependant, j’ai rarement eu à me plaindre de l’attitude de ces derniers.

Un bon accueil du projet par le personnel Il faut également souligner l’attitude très volontaire du personnel qui à l’unanimité a accepté de jouer le jeu devant parfois faire plusieurs prises lorsque cela s’est avéré nécessaire.

Des conditions d’évaluation favorables Enfin, mon lieu de stage était particulièrement adapté pour l’évaluation des effets de la vidéo puisque j’ai pu demander aux 3 classes de sixièmes générales de participer à des expériences. Si cependant ce panel n’est pas suffisant pour établir avec exactitude des résultats scientifiques, dans le cadre de mon travail il fut amplement suffisant.

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d) Les limites du stage Le regret le plus important que je formulerai et l’impossibilité d’avoir pu animer avec les élèves un atelier montage afin de leur permettre de monter eux même le film. Cependant, durant ce stage, comme je l’avais précisé de vive voie à mon enseignant/tuteur, j’ai décidé de mettre l’accent sur la qualité de l’outil réalisé au détriment parfois de la participation des élèves à certains stades du projet. Le temps de plus m’était compté et les grèves sur ce point n’ont pas joué en ma faveur car les professeurs ont parfois étaient absents donc les élèves aussi. Il m’a également parfois été difficile d’avoir certains rendez vous pour cause d’incompatibilité d’agenda entre la disponibilité des élèves et celle des employés. C’est pourquoi, dans le film quelques interviews ont été effectuées sans la présence des élèves.

Conclusion du Stage Malgré les limites précédemment évoquées, je considère mon stage comme une réussite, d’une part puisque l’outil prévu a été mené à terme, et d’autre part puisque mon travail avec les élèves fut très enrichissant, autant pour les participants que pour moi. Enfin, c’est sa complémentarité avec le Master TEF qui a été particulièrement formatrice puisque j’ai pu exporter les compétences acquises pendant mes cours et de fait mieux les assimiler. Enfin en terme de retour, les résultats sont très positifs et valorisant pour mon travail. En effet, un nouveau site du collège étant en élaboration, il m’a été demander la permission de mettre certaines séquences de la vidéo en ligne, celle-ci se grefferont à une sorte de visite guidée interactive du collège.

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Les effets cognitifs de la vidéo sur l’apprentissage Expérience liée à la création d’une vidéo dans un collège de Rennes

Problématique : En quoi la vidéo peut être un support plus pertinent que l’écrit pour l’apprentissage ?

Introduction L’image fixe a parcouru tous les cycles de l’humanité, l’image animée s’installe dans l’aire industrielle et cela depuis un siècle. Cependant, si aujourd’hui l’éducation n’a pas encore construit de véritables chaînes de télévisions éducatives, l’image éducative a gagné des domaines de plus en plus large et en particulier dans le circuit professionnel. Même si elle peine encore à trouver un écho dans nos écoles, il semble que la pédagogie basée sur l’image et notamment la vidéo se pratique par de nombreux enseignants. Malgré tout, l’image fait souvent office de parent pauvre par rapport au livre, si les jeunes enfants sont introduit à la culture de l’écrit en revanche il y a très peu de place pour l’image. A l’heure actuelle, s’il parait important d’utiliser l’image mais surtout la vidéo dans la pédagogie est ce que l’utilisation de ce nouvel outil a un impact positif sur l’apprentissage ? L’utilisation de l’image animée peut elle remettre en cause le monopole de l’écrit ? En d’autres termes : en quoi la vidéo peut elle être un support plus pertinent que l’écrit pour l’apprentissage ? Pour répondre à ces questions, il est intéressant au préalable de dresser un historique de l’utilisation de la vidéo dans l’éducation puis dans une seconde partie de faire un rapide inventaire quant à son utilisation actuelle dans les institutions scolaires. Une fois ce travail préliminaire accompli, nous introduirons le lecteur à la notion de format puis nous aborderons certaines recherches concernant le rôle des émotions dans l’apprentissage empruntées à la psychologie, en nous basant, en autre, sur les travaux d’Eric Jamet, Mayer, ou encore de Denis Legros.

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Dans un second temps, nous étudierons les recherches personnelles que j’ai effectuées au collège Montbarrot, selon une méthodologie quantitative et qualitative, avant de répondre à notre problématique de départ. Je distinguerai donc les deux parties de ce dossier, à savoir : -

Les recherches théoriques

-

Les recherches de terrain

En guise de contextualisation, je rappellerai au lecteur que j’ai effectué mes recherches dans un collège suite à réalisation durant mon stage d’une vidéo en collaboration avec des élèves de sixième SEGPA. Cette vidéo portant sur le fonctionnement du collège et a pour but d’autonomiser les élèves.

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Les recherches théoriques A) Introspection Dans cette première partie nous dresserons l’historique de l’utilisation de la vidéo dans l’éducation puis nous verrons dans quel cadre elle est utilisée dans ce domaine à l’heure actuelle.

Historique de l’utilisation de la vidéo dans l’éducation Avant l’invention de la vidéo l’utilisation de l’image dans l’enseignement existait depuis très longtemps, elle date de l’antiquité. En effet, la « lanterne magique », ancêtre de notre rétro projecteur, qui consistait en un appareil de projection dont la source était la lumière d’une bougie combinée avec des plaques. En quelque sorte c’était l’ancêtre de la vidéo !…. En 1839, l’Abbé Moigno met au point une pédagogie écrite de projection lumineuse et souhaite convaincre le ministère d’ouvrir des écoles spécialisées. Ses arguments principaux étant que l’image est facilement compréhensible de tous car elle ne nécessite pas l’apprentissage du code complexe qu’est l’écrit et qu’elle a le pouvoir de maintenir l’attention. Par la suite, au début, le cinéma à défaut d’être scolaire était scientifique, à l’instar de l’œuvre de Jean Painlevé (1902-1989) consacrée en particulier au monde des animaux marins. Cependant, ce n’est qu’en 1945 qu’est créé le centre audiovisuel destiné à la formation des enseignants. Plus tard Henry Dieuzeide (…- 1993), qui a consacré sa vie aux nouvelles technologies dans l’éducation, crée la télévision scolaire. Aujourd’hui, cette dernière n’existe plus en France, cependant certaines chaînes proposent des émissions hebdomadaires sur des thèmes variés et techniques, avec d’abondantes démonstrations comme Arte. Concernant l’utilisation de la vidéo par et pour l’élève, il faut se tourner vers les écoles Freinet qui sont traditionnellement novatrices en matière d’utilisation des nouvelles technologies dans l’éducation.

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Mais à l’heure actuelle, avec la démocratisation de l’informatique et des outils de capture d’images, les freins techniques sont moins importants et on voit se multiplier l’utilisation et la création de vidéos dans beaucoup d’écoles. Notons également que malgré certaines réticences concernant l’image, des premiers manuels scientifiques à la grande encyclopédie, on note une foi permanente aux vertus pédagogiques de cette dernière. L’ethnographie nous démontre que chaque génération a œuvré selon son éthique pour traduire les découvertes de cette manière. Avec plus de recul, dans quelques années on constatera qu’il en est de même pour l’image animée.

Utilisation actuelle de l’image et de la vidéo dans un but pédagogique Le monde de l’éducation a cette particularité et cette richesse d’accueillir en son sein nombre d’individus ayant des avis divers et parfois opposés. L’utilisation de la vidéo dans l’enseignement n’échappe pas à nombre de débats sur sa légitimé et son intérêt pour nos chers apprenants. Il y a d’une part ceux qui pensent qu’en dehors de l’écrit il n’y a point de salut et ceux qui ne jurent que par les technologies de l’informatique. Les uns et les autres oublient souvent que le multimédia peut être un bon compromis puisqu’il manipule son, texte et image. Concernant particulièrement la vidéo, les craintes relevant de son utilisation trouvent leurs racines dans la culture traditionnelle occidentale dans laquelle l’image inquiète parce qu’elle fait plus appel à l’émotion et aux sentiments qu à la raison. Cette dernière est accusée de produire chez le spectateur des effets incontrôlables comme nous le rappelle Rolande Kodsi. C’est en partie pour cette raison que l’image a toujours eu une place extrêmement balisée. De plus concernant la télévision, un clivage important existe entre les programmes du petit écran et ceux de l’institution scolaire qui pourraient presque être mis en opposition. Maguy Chailley résume ainsi la chose : « on apprend à l’école des choses qui ne servent qu’à l’école et à la télé des choses qu’on ne nous encourage pas à utiliser à l’école »18. Cependant les réfractaires semblent de moins en moins présents et même s’il reste fort à faire, l’image et la vidéo s’insèrent lentement mais sûrement dans nos institutions scolaires.

18

Rolande Kodsi Apprendre avec l’écran ; 2003

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Au départ, c’est surtout dans les cours ayant attrait aux sciences que l’image, par le biais notamment de la vidéo, est utilisée comme outil pédagogique par les enseignants. Si traditionnellement c’est dans les sciences naturelles que la vidéo est particulièrement utilisée, aujourd’hui on la retrouve également beaucoup dans les cours d’histoire, de langues vivantes, mais également de plus en plus en Français. C’est également en dehors des cours généraux qu’on la retrouve et notamment dans des ateliers de création audiovisuelle scolaire. Les exemples se multiplient dans le domaine, à l’instar de la réalisation d’un journal télévisé par des élèves de 4ème et de 3ème d’une durée de 30 minutes chaque trimestre19.Ce type de travail confronte l’élève à la conception, ce qui lui donne un regard critique par rapport aux journaux télévisés. Ainsi, ils comprennent qu’il y a construction et montage. De plus, dans ces situations, les jeunes ne sont plus en situation passive mais deviennent acteurs de leurs apprentissages. Notons enfin en terme d’utilisation que beaucoup d’enseignants utilisent les programmes d’ARTE qui autorise leurs diffusions dans le cadre scolaire. D’ailleurs, les émissions de cette chaîne sont également consultables et téléchargeables à la carte via Internet20.

Pour conclure sur ce point, il semble que même si la vidéo commence à intégrer progressivement l’école, il y a un vide politique quant à l’introduction de cette technologie dans la pédagogie et c’est souvent à l’initiative de pionnier que l’image animée prend toute sa place dans l’enseignement.

B) Recherches en psychologie et introduction à la psychologie cognitive Nous allons pouvoir maintenant entrer dans le vif du sujet concernant les effets cognitifs de la vidéo sur l’apprentissage. Précisons que mes recherches concernent également l’image qui est inextricablement liée à la vidéo.

19 20

; J.Y Bey et J.M Gérard Ecole et média : regard croisés ; 2001 lesite.tv

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Le sujet de notre problématique concerne en fait l’efficacité des formats de présentation. Ces derniers regroupent les différentes modalités de présentation de l’information, comme l’écrit, le son, l’image animé ou non, les graphiques …et cette liste n’est pas exhaustive. Après avoir défini le domaine des sciences cognitives et témoigné des premières recherches relatives à l’image dans l’enseignement, j’aborderai le rôle joué par les émotions dans les mécanismes d’apprentissage puis les mutations cognitives dont certains chercheurs comme B. Cathelas font la découverte. J’introduirai ensuite la notion d’ergonomie et de charge cognitive qu’il est nécessaire que le lecteur apprivoise pour bien comprendre ce qui suivra.

Définition et introduction aux sciences cognitives Au préalable, il convient de définir brièvement cette science qui compare le cerveau à un ordinateur, le développement du cognitivisme « informationnel » se nourrit de la diffusion fulgurante et parallèle de l’informatique dans l’ensemble de la société et de l’espoir qu’elle fait naître. Les sciences cognitives sont nées de la cybernétique (et notamment des travaux de John Von Neumann et Norbert Wiener) et de la théorie de l'information développée dans les années 1950-1960. Leur acte fondateur est peut-être les travaux d'Alan Turing, sur la mécanisation du calcul et le parallèle qu'ils opèrent entre les opérations de l'esprit et les opérations de la machine. L’objectif principal des chercheurs en neuroscience cognitive est d’objectiver, par des méthodes d’imagerie cérébrale fonctionnelle, les changements survenus dans le cerveau lorsque nous pensons. Selon Jean Delacour, spécialiste de la neurobiologie de l'apprentissage et de la mémoire, les neurosciences cognitives mettent l’accent sur le fait que l’émotion, la motivation et la passion sont les premières représentations de l’esprit. Cet auteur présente également une schéma fonctionnel concernant la mémoire selon lequel l’information pénètre d’abord dans un magasin sensoriel, spécifique d’un sens auditif et ou visuel d’où elle peut être transférée, sous l’effet de la répétition, dans un magasin à long terme. En fait, il apparaîtrait que l’oubli trouve sa cause dans une défaillance du rappel.

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L’une des découvertes majeure en neuroscience et qui nous intéresse ici en premier lieu concerne l’attention. Celle-ci est assurée par des réseaux distincts. Il semble que le traitement actif d’une forme visuelle augmente le flux sanguin dans ces réseaux. Ainsi nous pouvons déduire par rapport à cette découverte que les images animées augmentent bien l’attention des individus, thèse qui comme nous allons le voir est largement défendue.

Les premières recherches Au 18ème siècle, le comte de Peroy arrive à convaincre Marie Antoinette que l’utilisation d’images projetées est bénéfique à l’apprentissage. Les principes défendus sont : -

Ce qui frappe vivement les idées d’un enfant s’inculque dans sa mémoire au point qu’il ne l’oubli jamais.

-

La curiosité inspire leur imagination

Pour preuve, il constate que le spectacle est parfois si captivant que l’enfant veut expliquer à son voisin ce qu’il ressent21. Lorsque plus tard l’Abbé Moigno, comme nous l’avons vu, souhaite convaincre le ministère d’ouvrir des écoles spécialisées, les mêmes arguments vantant l’efficacité de l’image sont utilisés, de plus il aborde le fait que grâce à l’image il n’y a plus de code complexe tel que l’écrit à maîtriser. Mais concernant l’utilisation de l’image, c’est surtout son pouvoir d’éveiller et de tenir l’attention qui est mis en avant. En l’état, nous pouvons donc supposer que la vidéo à la faculté de faciliter la concentration par rapport à l’écrit.

Le rôle de l’émotion Nous venons ainsi d’établir un lien entre la vidéo et l’attention, en fait ce qu’il faut en particulier mettre en avant c’est le rôle joué par les émotions. En effet, on constate aisément que les films de fiction par exemple constituent à l’instar de « la guerre du feu »22, qui s’est caractérisé par sa popularité auprès des enseignants, sont des supports très captivant pour les élèves.

21 22

Béatrice Hébuterne-Poinsac, L’image éducatrice, 2000 Jean Jacques Annaud ; 1981

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Parmi les cognitivistes beaucoup à l’instar de Jean Delacour mettent l’accent sur le fait que l’émotion, la motivation et la passion sont les premières représentations de l’esprit avant même d’aborder toutes les questions relatives aux formats d’apprentissage. C’est d’ailleurs l’émotion qui, selon Rolande Kodsi, dans « apprendre avec l’écran », distingue l’homme et la machine. L’auteur affirme ainsi que la mémoire humaine et une connexion entre les savoirs, les sensations (les peurs et les joies…) et l’expérience spécifique à chaque individu et qu’elle se construit à chaque instant de sa vie. En terme de rapport à l’émotion on ne peut cependant pas affirmer qu’il y a une différence d’intensité entre la vidéo et le livre. Par contre on peut constater que les deux formats présentent en la matière quelques distinctions. En effet, si en prenant l’exemple de la télévision, cette dernière entraîne un plaisir immédiat lié aux émotions qui naissent à la vue des images, c’est un plaisir intense mais de courte durée. Contrairement au plaisir de la lecture qui demande le temps de se fabriquer ses propres images. Le livre, on le prend, on le laisse, on le reprend. De plus, concernant le format écrit et en prenant toujours l’exemple du livre, ce dernier est irremplaçable pour développer l’imaginaire d’un enfant et les images animées ne peuvent pas remplacer cette image mentale que nous pouvons considérer comme meilleur, tout simplement parce qu’elle est unique. L’émotion est dans ce cas d’autant plus intense pour le lecteur. D’ailleurs, force est de constater que, comme nous le fait remarquer Claude Delafosse, concepteur de cd room, « souvent on est déçu par l’adaptation d’un livre. Elle n’est jamais à la hauteur de l’évocation qu’on se fait soi, de quelque chose ». Il ajoute : « l’humain a la chance d’être équipé d’un super ordinateur ». Malgré tout, lorsqu’on parle des émotions, on a tendance à penser à la vidéo, ce que l’on doit certainement au cinéma fiction dont l’objectif est de réveiller les sensations et de nourrir les émotions. D’ailleurs, à ces émotions et donc au format vidéo en général, les individus associent l’amusement ou la récompense. De fait, l’enseignant ou l’animateur qui l’utilise doit souvent recadrer les choses et montrer à l’élève que ses émotions peuvent aussi servir ses apprentissages.

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Enfin concernant les émotions véhiculées par l’image et la vidéo, comme nous l’avons déjà fait remarquer précédemment, si l’émotion semble un instrument adéquat pour stimuler l’apprentissage, beaucoup craignent ses effets notamment sur les plus jeunes. C’est dans ce cas, vers Serge Tisseron, spécialiste de la question de l’image qu’il faut se tourner. Au travers de deux de ses ouvrages, Y a-t-il un pilote dans l’image ? (1998) et Enfant sous influence (2000). Il nous fait prendre conscience que le meilleur moyen de limiter l’impact émotionnel et de parvenir au processus de symbolisation. Pour ce faire, il faut prendre des mesures pédagogiques et politiques visant notamment à contextualiser les images, et à comprendre la manière dont elles sont fabriquées. En fait, nous pouvons supposer que, pour tirer bénéfice des émotions de part l’utilisation de vidéo dans l’enseignement, il s’agit de trouver un juste milieu entre le contenu qui parfois risquerait de paraître austère et l’émotion suscitée par l’empathie des visages et des images.

La vidéo au service d’une mutation cognitive

Il est intéressant d’aborder de manière succincte les travaux de B. Cathelat dont l’ouvrage : Ecole et média : regard croisés. Cet auteur de nombreux ouvrages liés à la psychologie cognitive et à la sociologie, nous fait part d’une théorie selon laquelle nous serions à l’aube d’une mutation cognitive. En effet, les esprits nouveaux ont été formés à la gestion double des informations, notamment par l’informatique et le multi fenêtrage, mais aussi par la télévision. Ce style de traitement de l’information est désigné par les sociologues sous le terme de « sceenagers » qui consiste à effectuer des opérations sans liens nécessaires les unes avec les autres et souvent de nature complètement différente. Les jeunes entre 15 et 18 ans y seraient élevés et développeraient une capacité à gérer la gymnastique mentale qui permet de passer de l’un à l’autre. Il faut donc s’attendre dans l’avenir à des mutations cognitives de la part des enfants élevés dans la simultanéité, la vitesse et la gestion complexe de données contradictoires. Si cette théorie ne s’intéresse pas directement à notre problématique, nous pouvons cependant supposer que d’une certaine manière les enfants arriveront de mieux en mieux à synthétiser et

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traiter des informations provenant de vidéo pédagogiques puisqu’ils sont amenés à effectuer ces opérations mentales dans la sphère privée.

Les graphiques, la notion d’ergonomie et de charge cognitive Il est important que j’introduise chez le lecteur quelques notions de psychologie cognitive de base même si ce dossier n’a pas la prétention d’être une référence dans le domaine. J’aborderai donc notamment la notion d’ergonomie et de charge cognitive. Concernant l’utilisation des graphiques qui est finalement assez récente, le Français Jacques Bertin avait une longueur d’avance sur ses compatriotes puisqu’il a écrit des prophéties qui se sont réalisées. Il affirmait que chacun serait capable d’utiliser les deux dimensions de la feuille de papier (soit le graphique). Par ironie du sort, en France ses recherches sont presque passées inaperçues alors qu’il fut mondialement connu et réédité en Angleterre. J’aborde cet auteur puisqu’il est l’un des premiers à utiliser la notion de coût mental, appelé aujourd’hui plus communément la charge cognitive. On dit qu’il y a surcharge cognitive lorsque le cerveau n’est plus capable d’analyser ou de comprendre une masse d’information importante ou de nature complexe. Sur cette question il rentre quasiment dans un domaine nouveau à l’époque : l’ergonomie, lorsqu’il affirme que les croquis malhabiles mais correctement construits s’avèrent bien souvent plus efficaces que des très beaux dessins ne communiquant qu’une information dérisoire et inutile. Aujourd’hui d’ailleurs nous pouvons constater que le graphique n’a pas fini de féconder l’image.

C) Recherches approfondies sur la question des formats et leurs effets sur l’apprentissage Nous allons aborder maintenant la partie que je considère la plus technique de notre travail. En effet, nous allons ici nous appuyer sur les recherches le plus avancées en matière de psychologie cognitive se rapportant à l’apprentissage par le biais des différents formats. Le lecteur ayant été au préalable initié aux notions essentielles, comme par exemple celle de la surcharge cognitive, devrait consulter ce travail sans appréhension puisque je m’appliquerai

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à ne pas trop rentrer dans les détails et à résumer l’ensemble des recherches le plus simplement possible. Nous ferons donc appel à des auteurs français tels qu’Eric Jamet, mais aussi à des auteurs d’outre Manche tel que Mayer et bien d’autres.

Les études d’Eric Jamet, Olivier le Bohec et Cédric Hidrio Dans un premier temps je vais résumer les principales découvertes en la matière réalisées par le laboratoire de psychologie expérimentale de l’université Rennes 2 par trois chercheurs Eric, Jamet, Olivier le Bohec et Cédric Hidrio. Dans un premier temps, le document étudié fait le lien entre la pertinence des formats de présentation et la qualité de l’apprentissage. Cependant, on le constate souvent, l’amélioration des performances n’est pas toujours significative, les auteurs introduisent alors une notion considérée comme l’un des principaux facteurs d’échec : la surcharge cognitive. Ils distinguent ensuite les deux différentes formes de mémoire de travail que sont : -

La mémoire à court terme : il s’agit du premier traitement réalisé dans la mémoire sensorielle qui sont dépendants des modalités d’entrée auditives ou visuelles.

-

La mémoire à long terme : elle permet de compenser les limitations de la première et sa capacité semble illimitée.

La mémoire à court terme est également appelée mémoire de travail, et il faut préciser que cette mémoire a des capacités limitées. Pour les adeptes de l’informatique elle est comparable à la mémoire vive (en RAM) de l’ordinateur, alors que la mémoire à long terme peut se comparer au disque dure de l’ordinateur dont la capacité est beaucoup plus importante. Le but pour traiter l’information est de transformer ou des formater (pour continuer la métaphore) l’information en ce que les auteurs appellent « schémas » pour les stocker dans la mémoire à long terme afin de libérer de l’espace dans la mémoire de travail. Cependant, c’est bien le rôle de la mémoire de travail de transcoder l’information pour qu’elle s’intègre à la mémoire à long terme. Pour éclairer un peu le lecteur, ce transcodage, ou formatage de l’information, consiste en fait à intégrer des données aux informations déjà présentent dans la mémoire à long terme ou d’effectuer en quelque sorte des mises à jour.

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La conséquence que l’on peut déjà établir de ses premières informations est que si la mémoire de travail est limitée, l’information ne peut pas intégrer la mémoire à long terme et dans le cas de l’apprentissage, les savoirs ne sont pas intégrés. C’est pourquoi, il est très important et crucial pour l’apprentissage de trouver des moyens pour que cette mémoire de travail soit efficace, d’où les recherches concernant les formats qui sont censés faciliter l’intégration de nouvelles connaissances. Différents testes effectués sur des individus en phase d’apprentissage ont donc était menés afin d’établir quels sont les formats les plus adaptés. S’agit il du son, de l’écrit, de l’animation, des graphiques ou de plusieurs de ces éléments combinés ? Les expériences font apparaître plusieurs constats : D’une part elles mettent en évidence la notion de surcharge cognitive dont l’individu peut être sujet lorsqu’il y a redondance d’information. Par exemple, lorsque la même information est présentée sous deux modalités différentes. Pour illustrer cela, il est proscrit de présenter un schéma avec l’utilisation du format vocal et écrit en même temps contrairement aux idées reçues. En effet, les performances des apprenants sont meilleures lorsque le schéma n’est complété que par le format vocal. D’autre part, et nous en venons là à quelque chose de très intéressant pour notre problématique, il semblerait que les modalités auditives soit préférables aux modalités visuelles telles que les textes. Cependant, le bénéfice n’est réel que si les deux types d’informations comportent des liaisons réciproques et complémentaires. Le lecteur comprendra pourquoi je m’empresse de faire un aparté pour aborder la portée de ces informations sur notre travail qui consiste, je le rappelle, à comparer les effets cognitifs de la vidéo à ceux de l’écrit. Ainsi, si je ne me permet pas d’affirmer en l’espèce que la vidéo est plus efficace en terme d’apprentissage, cependant je précise que la vidéo comporte bien les deux modalités, visuelles (images en mouvement) et auditives, et que ces modalités dans le cas de mon film réalisé durant mon stage sont complémentaires, puisqu’il s’agit en grande partie d’interview ! Je pourrais facilement déduire que mes interviews ont plus d’effet sur la qualité de

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l’apprentissage lorsqu’elles sont filmées que lorsque qu’elles sont présentées à l’élève sous forme écrite. Mais n’allons pas trop vite en besogne et continuons nos recherches afin de disposer d’un maximum d’éléments pour répondre à notre problématique. Ainsi, nous abordons un nouveau constat qui celui-ci concerne la pertinence des formats par rapport aux connaissances préalables du sujet étudié par les apprenants. De fait, nos trois auteurs constatent que les formats sont surtout cruciaux concernant l’apprentissage des personnes novices, car pour les initiés, un simple schéma sera beaucoup plus adapté, et plus léger en terme de charge cognitive qu’une animation complexe doublée d’une bande son. Pour nous, les choses se compliquent, car il semble dors et déjà exclu d’effectuer des généralités dans la mesure ou le traitement d’information pour les novices est différent de celui des initiés. D’ailleurs concernant les effets du film, on peut de fait supposer que les tests sur des élèves de sixièmes déjà « initiés » depuis le début de l’année scolaire à l’établissement, pourraient être moins performants que ceux mesurés par le support écrit… Enfin, sur les travaux de ces chercheurs, j’ajouterai quelques mots concernant l’écrit. Reprécisons que notre travail s’intéresse à l’écrit sous sa forme papier, hors les auteurs l’abordent dans sa dimension de composante multimédia. Ainsi ils constatent que l’utilisation de ce format est particulièrement efficace et notamment par le biais des « pop-up » qui sont des informations intempestives ayant l’avantage d’éviter toutes surcharges cognitives. Cependant, nous regrettons qu’ils n’abordent pas les effets cognitifs du format écrit sur support papier car si l’on se réfère à J. Nielsen23 il semble que la lecture sur écran soit plus fatigante que sur papier et réclame 25% de temps en plus. Même si sur le plan ergonomique, on reconnaît que l’écran élimine 50% du texte par rapport au support écrit traditionnel.

Les études de Mayer Richard E. Mayer est professeur de psychologie dans l’université de Santa Barbara en Californie, c’est une référence en matière de psychologie cognitive. Ses travaux sont suivis de

23

Béatrice Hébuterne-Poinssac ; l’image éducatrice

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près en France, notamment par Denis Legros qui en résume certains aspects dans un livre édité par les CEMEA24 : Apprendre avec le multimédia, où en est t’on ? Comme l’affirme l’auteur, il est difficile de trouver des recherches pertinentes dans le domaine qui nous intéresse, à savoir l’apprentissage visuel. En revanche ces dernières abondent sur l’apprentissage verbal. Cependant, tout comme l’ont démontré précédemment les chercheurs du laboratoire de Rennes 2, de nombreuses données confirment le pouvoir des aides visuelles mais seulement selon le principe de contiguïté et complémentarité des informations. Jusque là, rien de vraiment nouveau par rapport à nos constats précédents, cependant, les adeptes de la fléchette dirons qu’avec cet ouvrage nous visons dans le mille car Mayer compare directement les effets de l’image (fixe ou animée) au format écrit ! C’est en utilisant la notion de charge cognitive qu’il élabore une comparaison entre les deux formats. Il semblerait ainsi que l’utilisation de formats tels que la vidéo évite la surcharge cognitive. En effet, lorsqu’un individu lit un texte, il doit construire une connexion représentationnelle et référentielle et cette dernière représente une lourde charge cognitive alors que par le biais de l’image elle est remplacée par la connexion représentationnelle visuelle, au traitement moins coûteux. Enfin, nous sommes sur une piste, cependant, et c’est Mayer qui l’affirme : « It is not possible to determine whether differences in what students learn from text-based versus computerbased presentations are caused by the medium or by the content and study conditions, which are inseparable from the medium25”. Ainsi il introduit de nouveaux critères qui sont le contenu de l’apprentissage et les conditions d’apprentissage. Concernant le contenu de l’apprentissage, mes recherches se sont portées vers Allistair B.Fraser qui dans un texte en anglais intitulé : Colleges Should Tap the Pedagogical Potential of the Web, aborde le problème de la mauvaise utilisation du multimédia comme des vidéos par exemple, dont les auteurs n’exploitent pas toujours le potentiel. Elle introduit ainsi la notion de « réchauffé » qu’elle oppose au « recherché » qui se caractérise lui par une utilisation pertinente des nouveaux outils. Sur cette question d’ailleurs, je peux à titre personnel regretter la mauvaise utilisation de l’outil power point dont certains conférenciers

24 25

Centre d’entraînement aux méthodes d’éducation actives Multimédia paradoxe ; présentation magazine ; 2004

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ne prennent pas conscience. C’est d’ailleurs entre autre pour éviter ces travers que l’analyse des formats de présentation par les cognitivistes est cruciale.

Pour conclure cette partie sur les recherches effectuées par les plus célèbres chercheurs dans le domaine cognitif, nous pouvons constater que répondre à notre problématique de manière catégorique serait hasardeux tant la recherche sur les formats n’en est qu’à ses prémices. Cependant, aux vues des documents précédents nous sommes en droit d’affirmer certaines quasi-certitudes : -

La qualité des formats est surtout pertinente concernant les novices, ce qui signifie que le format vidéo trouve certainement tout son intérêt auprès d’un public qui découvre le domaine étudié contrairement à l’écrit.

-

Que la vidéo est plus facilement exploitable par tous car elle est moins lourde pour la mémoire de travail.

-

Que l’écrit et la vidéo sont souvent deux formats complémentaires.

Restons encore un peu dans le domaine du cognitivisme ou du moins de la psychologie toujours dans le but de comparer les apports de la vidéo et de l’écrit en terme d’apprentissage et étudions une théorie qui est particulièrement intéressante, celle des intelligences multiples….

D) Les formats au service des intelligences multiples Dans ce paragraphe j’emprunterai à Howard Gardner sa théorie sur les intelligences multiples26 qui remet en cause tout notre système d’enseignement qui n’est basé, en particulier, que sur l’intelligence logico-mathématique. L’auteur distingue sept autres intelligences, qui comme l’intelligence mathématique, sont plus ou moins développées selon les individus. Il distingue de plus l’emplacement de ces intelligences dans le cerveau dont les deux lobes (gauche et droit) n’ont pas la même fonction. Dans le lobe droit plus communément appelé le cerveau des émotions on trouve :

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Les formes de l'intelligence ; 1983

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-

L’intelligence spatiale

-

L’intelligence musicale

-

L’intelligence intrapersonnelle (concernant l’estime de soi)

-

L’intelligence extrapersonnelle (concernant notre rapport aux autres)

Dans le lobe gauche, plus communément appelé le cerveau mathématique on trouve : -

L’intelligence verbo linguistique

-

L’intelligence kinesthésique

-

L’intelligence naturaliste

-

Et notre fameuse intelligence logico mathématique

Gardner estime qu’un bon enseignement est un enseignement qui prend en compte un maximum d’intelligences dans la mesure où il est compréhensible par un maximum de personnes. Il s’insurge, de fait, contre ceux qui estiment qu’il n’y qu’une manière d’inculquer les connaissances, et souvent comme nous venons de le dire de la manière logico mathématique. De la même manière l’évaluation des résultats est souvent injuste. L’auteur pense aussi que dans nos écoles on enseigne beaucoup trop de matières que l’élève a du mal à appréhender dans leur globalité (surcharge cognitive…). Il pense qu’il serait beaucoup plus pertinent de mettre l’accent sur quelques enseignements fondamentaux en laissant le libre choix à l’élève de se spécialiser plus tard dans tel ou tel domaine. C’est également un fervent défenseur de l’apprentissage basé sur l’activité de l’élève ou ce dernier est au centre de son apprentissage. Le lien entre les travaux de Gardner et les formats d’apprentissage se fait dans la mesure où l’on peut supposer que l’utilisation de produits multimédia présentant l’information de différentes manières (écrit, oral, animation….) stimule plusieurs formes d’intelligences et s’assimile ainsi, d’une certaine manière, à la pédagogie différenciée qui permet à un maximum d’élèves d’appréhender un domaine de connaissance. Ainsi, pour formuler une hypothèse quant à notre problématique, nous pouvons supposer que la vidéo, selon la théorie des intelligences multiples de Gardner, permet à un panel plus important d’élèves d’accéder à des savoirs, ce qui constitue à première vue un important gain au niveau cognitif.

37


Conclusion de nos recherches théoriques Le lecteur l’aura sans toute compris, comparer le format vidéo et le format écrit dans leurs effets sur l’apprentissage n’est pas une mince affaire. D’une part, les recherches dans le domaine en sont à leurs prémices et d’autre part, il est difficile de mettre au point des méthodes d’évaluations quant aux effets cognitifs de ces formats. Comme l’affirme Mayer, qui est la référence sur cette question, d’autres critères comme les conditions d’apprentissage et le contenu sont à prendre en compte et imposent au chercheur de rester sur sa réserve. Cependant, nous pouvons déjà affirmer certaines hypothèses de départ tel que la facilité en terme d’accès à la connaissance, puisque la vidéo ne nécessite même pas l’apprentissage du code lexical écrit, ainsi qu’une aptitude à maintenir l’apprenant en éveil par le biais des émotions. Les cognitivistes nous apprennent également que la vidéo évite dans une certaine mesure la surcharge cognitive puisqu’elle est plus légère pour la mémoire de travail. Enfin, nos recherches en rapport aux travaux de Gardner sur les intelligences multiples nous permettent du supposer que la vidéo peut être un outil privilégié en terme de pédagogie différenciée. Cependant comme le pense Geneviève Jacquinot il ne faut pas oublier l’importance du talent dans la création de formats d’apprentissage car « savoir programmer ne donne pas plus de capacités à créer un logiciel que savoir écrire à la machine ne donne de talents pour écrire une poésie » 27. C’est sans doute la qualité intrinsèque de la vidéo qui en fera ou non un outil pertinent pour l’apprentissage. Nos recherches théoriques se concluent donc sur ces constations, et si elles ne sacralisent pas l’utilisation de la vidéo dans l’éducation, elles en déterminent certaines qualités qui laissent supposer que ce format de présentation présente un intérêt sérieux en matière pédagogique. Cependant il n’est pas clairement établi que son l’utilisation soit plus pertinente que l’écrit concernant l’apprentissage. Il semble en effet que ces deux formats soient complémentaires. Voyons, dans une seconde partie si mon enquête de terrain peut nous apporter de nouvelles réponses.

27

Apprendre avec le multimédia, où en est t’on ? p.163

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Les recherches de terrain Comme j’en ai brièvement parlé dans mon rapport de stage, j’ai eu l’opportunité suite à la réalisation du film de tester ce dernier sur des classes de sixième. Afin d’étudier l’effet de la vidéo sur l’apprentissage et de les comparer à ceux de l’écrit, j’ai travaillé sur trois classes différentes en respectant le cahier des charges de la méthode quantitative. Dans un second temps j’ai pensé qu’il serait très pertinent d’évaluer mon travail auprès des élèves participant au film selon la méthode qualitative. J’ai donc procédé à une observation de leur comportement durant le visionnage de la vidéo puis j’ai mis en place une discussion de groupe pour échanger les impressions. Enfin, je me suis entretenu avec leur professeur en aparté. C’est donc les résultats de cette expérimentation qui je vais exposer ici en ne manquant pas d’y ajouter mes remarques et les explications nécessaires à la bonne exploitation de ces recherches. Je précise que toutes les données chiffrées auxquelles je fais référence sont rigoureusement exactes et ont fait l’objet d’un travail et d’une organisation sérieuse. Même si j’ai bien conscience qu’une expérience menée à si petite échelle ne peut avoir qu’une valeur bien modeste.

Le choix des méthodes Au départ, j’avais choisi d’effectuer mon enquête uniquement selon la méthode quantitative, en effet, j’étais d’accord avec le fait que cette méthode permet d’accéder à un statut scientifique et représentatif comme l’affirment ses adeptes dont je fais partie. Cependant mon enseignant tuteur m’a conseillé de procéder également à la méthode qualitative comme cela est souvent les cas en science sociale. Les méthodes quantitatives et qualitatives sont en effet très complémentaires. Nous allons donc maintenant définir chacune de ces deux méthodes en abordant la description de mes travaux.

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la méthode quantitative La méthode quantitative est une méthode de recherche quantifiable et se distingue de la méthode qualitative que nous définirons par la suite. Elle est particulièrement utilisée dans le domaine social. Si ses partisans la considèrent pertinente car rigoureuse et scientifique, ses détracteurs soutiennent au contraire qu’elle tend à voiler la réalité du phénomène social étudié. Nous retiendrons surtout que cette méthode tant à interpréter les nombres fournis et permet d'exprimer avec précision et de rendre vérifiables les idées qualitatives. Le cas d’espèce Pour évaluer les effets de la vidéo sur l’apprentissage par rapport à l’écrit selon la méthode quantitative, j’ai préparé un questionnaire que j’ai soumis aux trois classes de sixième générale, suite soit à la présentation d’un document écrit contenant la retranscription des entretien, soit suite au visionnage du film et enfin, sans aucunes sources d’informations pour le groupe « contrôle ». C’est en me basant sur la méthodologie de Gisèle Tessier28 que j’aborde maintenant l’élaboration du questionnaire en distinguant : -

la définition du thème

-

la préparation du planning

-

le choix de la population qui répondra au questionnaire

-

l’essai du questionnaire

-

la deuxième mise en page du questionnaire

-

la passation

1) Préparation et déroulement de la phase d’évaluation Il convient avant tout de préciser qu’il s’agit d’un questionnaire à questions fermées avec en général deux ou trois choix parmi les réponses. Cependant j’ai également utilisé une question ouverte, l’élève ayant dans ce cas la consigne de formuler une réponse écrite.

28

GISELE TESSIER ; pratique de recherche en science de l’éducation ; 1993

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a) La définition du thème Le thème du questionnaire correspond au sujet du film, c'est-à-dire, l’organisation du collège en dehors de l’équipe éducative. Pour ce faire je me suis appuyé des interviews et des propos même des personnes interrogées, en posant une, voir deux questions, en rapport avec chacun d’entre eux.29 J’ai également abordé le thème de l’orientation au sens géographique du terme car c’est un aspect qui est mis en avant dans la vidéo.

b) La préparation du planning Afin de faire participer le maximum d’élèves de chaque classe aux expériences, il m’a fallu m’organiser soit avec certains professeurs soit avec les élèves sur leurs heures de permanence. Concernant la classe que j’appelle « groupe écrit », j’ai consulté leur emploi du temps et ils ont participés aux tests durant une heure de permanence. L’avantage étant que cette heure de permanence se situait en milieu de matinée, ce qui m’a permis d’avoir beaucoup d’élèves y compris des externes. J’avais au préalable sollicité leur participation pendant un cours en classe entière, empruntant deux minutes à leur professeur. L’inconvénient de la démarche étant que j’ai eu plus de mal à canaliser ce groupe, puisque les élèves étaient censés être sur un temps de permanence donc plus détendus qu’en cours. Cependant, je suis quand même parvenu à obtenir d’eux, en leur expliquant qu’il ne s’agissait pas d’un jeu mais d’un travail sérieux, toute leur attention. Concernant le groupe « vidéo » à qui j’ai passé le film avant de les soumettre au questionnaire, la question de leur disponibilité été plus difficile. Ainsi, j’ai demandé à leur professeur de mathématique avec qui j’ai de bon contact, si je pouvais lui emprunter une heure de cours et, de fait, mener l’expérience en sa présence. Cette méthode s’est avéré très avantageuse puisque je disposais de la classe entière et que les élèves étaient tout à fait disposés à travailler. J’ai eu de plus l’occasion de répondre à leurs questions et de solliciter leurs impressions durant environ ¼ d’heure. 29

Voir questionnaire en annexe

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Enfin concernant le groupe « témoin » qui je le rappelle n’avait aucun document pour répondre aux questionnaires, les choses ont été relativement simples. J’ai emprunté 10 minutes de cours à un autre professeur, dont il faut souligner aussi l’amabilité, pour les soumettre à l’expérience.

c) Le choix de la population qui a répondu au questionnaire Rappelons qu’un des buts de mon stage, était de créer un nouvel outil d’apprentissage destiné avant tout aux élèves nouvellement inscrits l’objet étant de faire découvrir le collège, son organisation et leur présenter le personnel en dehors de l’équipe éducative. C’est pourquoi, les élèves de sixième se sont avérés être le meilleurs public puisqu’ils découvrent encore en partie le collège. L’idéal aurait été de mener l’expérience en début d’année, mais comme cela n’était pas possible cette solution m’a parut la meilleure. Force est de constater, de plus, en oeuvrant sur le terrain en tant qu’assistant d’éducation, que même parmi les troisièmes on peut être surpris du manque de connaissances relatives à certains points au collège….

d) L’essai du questionnaire Les élèves de sixième SEGPA avaient au préalable répondu aux questionnaires, ce qui m’a permis pour mon expérience sur les 6ème générale de tester la pertinence de ce dernier. En terme de compréhension, le questionnaire n’a pas pausé de problème même si j’ai préféré lire une par une les questions avec ces élèves, qui je le rappelle connaissent de grosses difficultés scolaires. Cependant, cet essai m’a permis de mettre à jour l’inadaptation d’une question ouverte concernant l’utilisation de l’informatique au CDI30 qui était trop vague.

e) La deuxième mise en page du questionnaire Sur ce point je n’ai finalement pas eu de modification à faire, si ce n’est la suppression de la question n°12 pour la suite de mes expériences. 30

Voir questionnaire en annexe ; question n°12

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Le reste du questionnaire était semble t’il parfaitement adapté.

f) La passation des consignes Lors de l’évaluation à proprement parler, j’ai bien précisé à l’oral et sur le questionnaire qu’il ne fallait coucher qu’une seule réponse. Les élèves, mis à part quelques exceptions, ont bien compris les consignes. Le point qu’il est cependant important de souligner concernant la passation des consignes, est que le travail devait ce faire dans le silence total et individuellement, afin de ne pas biaiser les résultats. En terme de biais, je préciserai également que selon les études réalisées en docimologie, qui est la science de l’évaluation en pédagogie31, il semble d’ailleurs que le mode d’évaluation par questions fermées soit le plus juste. Il faut cependant faire attention car il y a risque de ne pas évaluer les bons thèmes en terme de ciblage.

2) Analyse et évaluation des résultats

Maintenant que le cadre et le déroulement de l’expérience ont été décrits, nous allons pouvoir passer à une étape particulièrement intéressante puisqu’il s’agit de l’analyse et de l’évaluation des résultats. Nous allons donc pouvoir mesurer l’efficacité de notre vidéo par rapport à l’écrit selon je le rappelle la méthode quantitative. Pour ce faire, j’utiliserai un tableau de contingence comme Gisèle Tessier en définie l’élaboration. En suivant les conseils de cette auteur je présenterai également les résultats sous forme de diagrammes en secteur (ou camemberts) qui semblent les plus aisés pour la lecture et la compréhension.

31

Encyclopédie wikipédia sur Internet

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a) Présentation des résultats sous la forme d’un tableau de contingence

Groupe « contrôle » Nombre

Groupe «écrit »

Groupe « film »

d’élèves

participants

22

13

16

5,6

6,53

7,96

Moyenne sur 10 de bonnes réponses au test

Tableau de présentation des résultats aux questionnaires

Rappel Le groupe « contrôle » : il n’a eu à sa disposition aucun document Le groupe « écrit » : il a consulté au préalable un document retranscrivant par écrit les interviews. Le groupe « film » : il a visionné au préalable le film

b) Présentation des résultats sous forme de diagramme Voir en page suivante…

c) Analyse des résultats Comme nous pouvons le constater, les résultats paressent confirmer l’hypothèse selon laquelle notre vidéo aurait de meilleurs effets sur l’apprentissage.

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En effet, si le groupe « écrit » à des résultats supérieurs au groupe « contrôle » suite à la lecture des documents sur papier, les résultats explosent littéralement quant au groupe « film » avec 7.96 de moyenne de bonne réponses sur 10. C’est plus d’un point de mieux que le groupe livre et deux points de mieux que le groupe « contrôle ». Les diagrammes par secteurs nous permettent d’apprécier avec clarté cette progression. Evidemment le lecteur est en droit de se poser des questions sur la véracité des résultats qui, il faut l’avouer, paraissent « trop logiques » et sont, il est vrai, positifs pour le réalisateur du film…Cependant, comme je l’ai précisé ultérieurement, les expériences ont été réalisé avec un maximum de rigueur. Cependant si le document écrit est moins efficace que le film, il est vrai que sa qualité est austère, de plus il est peut être un peu long pour des élèves de sixième32. L’une des raisons qui pourrait également expliquer le succès de la vidéo est que les élèves du groupe «écrit » n’ont peut être pas fait le travail demandé avec autant de sérieux que ceux du groupe « film » qui étaient en heure de cours et non en permanence. Il est vrai de plus que le travail du groupe « écrit » était plus important car je leur ai demandé de lire un recto/verso. Cependant, c’est bien là l’un des avantages de la vidéo, comme nous l’avons vu dans la partie théorique, que d’alléger la charge cognitive et de maintenir l’attention. Pour ma part, je me plais à penser que la vidéo est peut être bien adapté à ce type d’apprentissage, car, encore un fois comme nous l’avons vu précédemment, les formats sont avantageux pour les novices, et il apparaît selon les faibles résultats du groupe « contrôle » que les élèves de sixième sont en quelque sorte « novices » dans la connaissance de l’établissement.

La méthode qualitative La méthode qualitative est une méthode de recherche qui laisse délibérément de côté l'aspect quantitatif pour gagner en profondeur dans l'analyse de l'objet d'étude.33 32

Voire annexe

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Raymond Quivy et Luc Van Campenhoudt34 la distinguent par la mise en forme de processus fondamentaux et de communication humaine. Ces processus permettent aux chercheurs de retirer des informations de réflexions riches et nuancées. Toujours selon ces deux auteurs, il s’instaure par ce biais un véritable échange au cours duquel l’interlocuteur exprime ses perceptions. Les avantages d’une telle méthode sont notamment le degré de profondeur des éléments d’analyse recueillis et le respect du cadre de référence du ou des interlocuteurs.

Le cas d’espèce Lorsque j’ai passé le film aux élèves acteurs, j’en ai profité pour observer leur comportement qu’il est intéressant d’analyser en premier lieux. Ensuite, j’ai proposé aux élèves de participer à une discussion enregistrée pour échanger sur leurs impressions et savoir ce que le film leurs avait apporté. Enfin, j’ai également interrogé en aparté leur professeur qui a l’avantage de bien connaître les élèves et d’avoir un avis éclairé sur l’utilisation du format de présentation vidéo. Cet entretien ayant été enregistré puis retranscrit.35 Le lecteur constatera que cette partie de l’évaluation ne concerne pas directement l’écrit mais comme nous pourrons le constater, il apporte des réponses supplémentaires à notre problématique.

a) La phase d’observation Selon Marcel Postic et Jean Marie de Ketele, l’observation désigne souvent une méthode clinique. Elle se définie alors par l’étude complète de la valeur fonctionnelle, du comportement et des conduite d’un être humain. 33

Définition de wikipédia sur Internet RAYMONT QUIVY et LUC VAN CAMPPENHOUDT ; Manuel de recherche en science sociale ; 1995 35 Voir annexe : retranscription de l’entretien 34

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Une notion intéressante de laquelle l’auteur nous fait part et celle de : self concept. Ce concept défini l’image qu’un individu a de lui et la représentation qu’il a du contexte et des autres. Nous verrons qu’elle nous intéresse particulièrement.

Description de la phase d’observation Durant cette séance je me suis assis « au premier rang », presque dos au tableau sur lequel était projeté le film. De cette façon, j’ai pu observer le comportement et les manifestations corporelles des élèves sans toutefois donner l’impression à ces derniers d’être scrutés. Les premières minutes du visionnage se sont déroulées dans le silence, tous étaient immobiles, les yeux grands ouverts et canalisés par la vidéo qu’ils avaient co-produite. Chacun était à sa table, ce qui ne facilitait bien évidemment pas les commentaires entre voisins. Le silence était entrecoupé des rires qui sont apparus dès les premières images lorsqu’ils se sont vus, ou quand ils ont vu un de leur copain, jouer le rôle d’ « acteur ». Après environ 4 minutes, deux garçons ont commencé à décrocher leur regard du film pour échanger leurs commentaires, ces moments d’inattention correspondaient aux passages des interviews. A la deuxième interview, un autre garçon s’amuse avec son crayon, il le fait tourner entre ses doigts. Comme à chaque saynète qui sert de transition entre les interviews, les rires fusent et les petits commentaires vont bon train. Cette réaction se répétera tout au long du film. Les interviews deviennent de plus en plus le moment de s’échanger quelques mots et se disperser du sujet du film cependant cela ne concerne qu’une minorité d’élèves. Au troisième interview, le film était commencé depuis 8 minutes, je surprend une jeune fille regarder l’heure sur sa montre. Un peu moins de deux minutes après, pendant la présentation du directeur, elle regarde ce qu’il y a d’affiché sur le mur. Les transitions cependant amusent toujours autant. C’est à la fin du film, dans les deux dernières interviews, que j’ai observé d’autres attitudes. J’ai senti trois élèves sortir un peu du film, deux la tête légèrement baissée regardant le sol, et un baillant à deux reprises. Ce qui m’a le plus frappé c’est leur réaction à tous au moment où le directeur de la SEGPA parlait de leur situation d’élève. Personne n’a dit un mot, tous les visages se sont un peu refermés, plusieurs ne regardaient pas.

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Il faut préciser que ce dernier abordé le publique SEPGA et mettait l’accent sur leurs graves difficultés scolaires et l’impossibilité pour eux d’intégrer un cursus général. Ainsi, concernant cette interview finale n’y a-t-il pas eu un certain malaise en vertu de l’image qui était renvoyé d’eux même, concernant la notion de self concept ? Je laisse au lecteur toute sa subjectivité sur la question.

Réflexions inhérentes à l’observation Le style un peu direct avec lequel j’ai résumé l’observation décrit objectivement ce qu’il m’a été permis d’observer. Force est de constater que l’attention n’a pas été à son maximum pendant tout le film, pour certain élève du moins. Cependant, il ne faut pas oublier que le public concerné à justement beaucoup de difficultés à se concentrer. La question que nous devons nous poser en rapport avec notre problématique est : qu’est ce qu’il aurait été possible d’observer si à la place du film les élèves auraient eu entre les mains un long document papier à lire ? Je laisse encore ici le lecteur à ses réflexions…

b) La phase de discussion

Les premiers commentaires Les chaises disposées en cercle, j’ai invité les enfants à nous faire partager leurs premières impressions sur le film. L’importance de leur image arrive en premier, « j’ai bien aimé mais je regrette c’est parce j’ai les cheveux trop long et j’étais pas bien habillé », « et que moi j’ai pas la même voix dans le truc». Il semble que toujours en rapport avec la notion de « self concept » l’acceptation de soi est un gros travail personnel à cet âge, on est confronté à son reflet dans le miroir, aux différentes images de soi et au reflet que le regard des autres nous renvoie. Dans un autre propos « moi c’est quand on a joué au foot », les images ont un effet de remémoration, c’est l’expérience vécue sur le moment, animée de plaisir, qui a marqué l’élève acteur. C’est le pouvoir de l’émotion en quelque sorte.

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Les commentaires « sur les cadres », un concept décrit par Serge Tisseron36, montrent qu’au delà des réactions centrées sur soi et sur l’action, le spectateur peut se distancier en ne commentant non plus le contenu mais le contenant, la conception, le montage, la musique… « J’ai bien aimé au début quand ça s’arrête à moitié, quand il ouvre la porte », « les voix ont les entend mal quand c’était dehors ». De manière générale, les jeunes paraissent avoir conscience que les images ne reflètent pas la réalité, « bah, oui les films sont modifiés ». Ils reconnaissent que les médias manipulent les images. Sans le vouloir, le projet a été une manière d’entrer dans l’éducation à l’image, et à sa propre image.

Dans le cadre de l’apprentissage Les effets sur la connaissance des ressources humaines du collège ont été atteints, ils disent avoir appris quelque chose, « moi c’est la dame Carel (la conseillère d’orientation), je l’ai pas encore vu ». Le fait d’avoir fait les interviews, d’avoir mis en scène les rencontres, leur donne un point de repère pour se rappeler quelle est la bonne personne à qui il faut s’adresser pour tel ou tel problème…

Réflexions inhérentes à la discussion Si les élèves semblent avoir appris quelque chose, c’est surtout la notion de plaisir que nous retiendrons ici. La question de l’image de soi est encore au centre de la discutions mais cela parait plutôt commun pour des élèves de cet âge. Je pense pour ma part qu’il faut surtout retenir pour notre étude que la notion de plaisir est souvent associée au support vidéo, à la différence du support écrit auquel les élèves semblent plus souvent rapprocher la notion de travail et de contrainte. c) L’aparté avec le professeur Le professeur interrogé a surtout mis l’accent sur les résultats informels de la création de la vidéo avec les élèves, en terme d’apports personnels « ça mobilise des compétences qui sont pas toujours mobilisées de la même façon, heu, en classe : se montrer, travailler 36

Serge Tisseron, Enfants sous influence, les écrans rendent-ils les jeunes violents ? Paris, Armand Colin, 2000

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ensemble… ». Il aborde également le fait que les élèves semblent satisfaits d’avoir contribué à la création d’un outil qui sera réutilisé. De plus il estime que cela leur permet de développer une meilleure estime de soi, dans un système où ils sont mis un peu de côté, « c’est quand même très valorisant de toute façon pour des élèves (hésitation //) d’être sur un outil qui va être diffusé ». Le professeur constate également qu’être confronté à l’image de soi ne peut qu’être positif, « C’est toujours intéressant de les familiariser avec leur image parce que ça pose quand même problème… ». Outre la confrontation à sa propre image, à ce que l’on peut dégager, ce projet les a sensibilisé sur le fait qu’il ne faut pas toujours croire à ce qu’on nous montre à la télévision ou dans les médias. Il y a des règles à respecter quand on film, mais le rendu peut être totalement différent et modifié par les effets du montage. L’effet du projet qui, a l’avis du professeur, a été le plus pertinent pour les jeunes est la mobilisation d’une compétence qui leur fait souvent défaut : la maîtrise de la langue, « C’est quand même des enfants […] qui ont des problèmes d’élocution souvent, et je suis assez surprise […] ils ont un articulé qui est bon et une voix qui est bien portée je trouve. ». Cet étonnement montre que leur compétence dans la prononciation des mots et dans la formulation de phrases a été le fruit d’un travail personnel qui ne se cantonnera certainement pas à cette seule situation. Un effet sur le long terme est à espérer.

Réflexion inhérente à l’aparté avec le professeur Il semble au dire du professeur que l’expérience est positive autant au niveau des apports personnels que des apports intellectuels. Ce qui est particulièrement intéressant est lorsque le travail sur la prononciation est abordé, car si l’on s’en remet à notre problématique, l’écrit aussi permet d’améliorer la prononciation. C’est d’ailleurs, je le précise par écrit que les élèves ont formulé les questions. L’idée de cette réflexion est donc que l’écrit et la vidéo ont été complémentaires car il y a eu formulation écrite et formulation orale. Conclusion générale Ainsi comme nous venons de le voir, la recherche quantitative et la recherche qualitative s’accordent toutes deux à souligner l’intérêt de la vidéo dans l’apprentissage et sa complémentarité avec l’écrit.

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Les hypothèses que nous avions formulé pendant nos recherches théoriques se sont avérées exactes dans le mesure ou il semble que le format vidéo retienne d’avantage l’attention et qu’il permet à l’élève d’apprendre tout en allégeant la charge cognitive qu’il aurait du supporter avec plus d’intensité avec un support écrit. De plus en terme d’accès au savoir c’est une aubaine pour les plus jeunes ou les élèves qui ont du mal à appréhender l’écrit même si ces deux formats comme nous l’avons vu sont souvent complémentaires. Enfin, il est incontestable que la vidéo est particulièrement adaptée à la pratique d’une pédagogie différenciée. Je dirai que si mon travail ne remet pas en cause la légitimité de l’écrit dans l’apprentissage, il tend à démontrer que d’autres outils, telles que les images animées, sont tout aussi pertinents. Mais il faut du temps pour faire évoluer les pratiques surtout dans le domaine de l’enseignement. Nos institutions scolaires, en effet ont tendance a n’intégrer que timidement les pratiques issues des nouvelles technologie dans l’éducation. En guise de conclusion, je citerai volontiers Béatrice Hébuterne-Poinssac qui résume bien nos propos lorsqu’elle écrit : « Ce que l’écriture a fait depuis de millénaires, la caméra a tenté de le faire depuis seulement un siècle. Mais ceux qui ont créé les images n’ont pas volontiers laissé leurs secrets. Ainsi l’objet n’a pas été défini et la méthode reste à construire »37. Et justement, en tenant compte des travaux d’Alain Lieury38 sur la motivation, la méthode concernant la vidéo ne serait t’elle pas, à l’instar de notre travail avec les élèves de SEGPA, de faire participer les élèves à leur apprentissage ?

37 38

BEATRICE HEBUTERNE - POINSSAC L’image éducatrice ; 2000 ALAIN LIEURY ; Motivation et réussite scolaire ; 1997

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Bibliographie ALAIN LIEURY – Motivation et réussite scolaire, 1997 J.Y BEY et J.M GERARD ; Ecole et média : regard croisés ; 2001 CHRISTIAN DERRIEN ; Les réseaux télématiques Freinet ; 1998 ERIC JAMET ; lecture et réussite scolaire ; 1997 PAULO FREIRE ; Pédagogie des opprimés ; 1969 ROLANDE KODSI ; Apprendre avec l’écran ; 2003 GISELE TESSIER ; Pratique de recherche en science de l’éducation ; 1993 DENIS LEGROS ; Psychologie des apprentissages et multimédia ; 2002 PONT-LAJUS / RICHE-MAGNIER, A l’heure d’Internet, 1998 MARCEL POSTIC et JEAN MARIE DE KETELE ; Observer les situations éducatives ; 1988 SERGE TISSERON ; Y a-t-il un pilote dans l’image ? 1998 SERGE TISSERON ; Enfant sous influence ; 2000 J.Y BEY et J.M GERARD ; Ecole et média : regard croisés ; 2001 HOWARD GARDNER ; Les formes de l'intelligence ; 1983 CEMEA ; Apprendre avec le multimédia où en est t’on ? 1995 RAYMONT QUIVY et LUC VAN CAMPPENHOUDT ; Manuel de recherche en science sociale ; 1995

Articles : TAD SIMON ; Multimédia paradoxe ; présentation magazine ; 2004 ERIC JAMET, CEDRIC HIDRIO et OLIVIER LE BOHEC ; Comment présenter l’information dans les documents numériques éducatifs ? 2003 ALLISTAIR B.FRASER ; Colleges Should Tap the Pedagogical Potential of the Web ; 1999

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