Keith n°8 television

Page 20

cinéma/actu

“POUR CEUX QUI NE VOIENT LE HIP HOP QU'AVEC DES SAMPLES DE POP” LES LASCARS LES STOPPENT A BASE DE POPOPOPOP !

Millimages

Street culture + TV + autodérision + grafs + hip hop + golritude = Vincent Cassel, Diane Kruger, Omar et Fred, Diam's, Gilles Lelouche & Co... dans la peau des inénarrables Lascars. Pas de vacances pour les vrais gars est le titre du premier long métrage adapté de la série devenue culte au fil des années, et dont les répliques sortaient de nos bouches bien avant les vannes crasseuses de Franck Dubosc. Une comédie irrévérencieuse à l'humour vitriolé, défilant sur des décors uniques d'une qualité exceptionnelle, le tout servi par les très hip hop Albert Pereira Lazaro et Emmanuel Klotz, réalisateurs hors pair. Sortis tout droit des Gobelins, les deux réals s'imposent en artistes dans ce film d'animation on ne peut plus fidèle à la série. Rencontre.

Keith : Ce film est l'allégorie parfaite du comique de situation. C'est votre vécu ? Manu : Avant tout il y a les auteurs qui ont apporté leur univers, ensuite on a laissé transparaître nos expériences, on a animé les personnages qu'on connaissait dans des situations vécues. Keith : Quel public le film vise-t-il ? Albert : On se dit que le film est pour les gens comme nous, de notre âge quoi ! Plus généralement, pour tous ceux qui sont capables de comprendre le second degré ! Manu : Tous ceux qui veulent ! Tous ceux qui ont l'ouverture d'esprit de se dire que ça peut leur parler et les faire rire, au delà de leurs à priori. Pas mal de gens de 50 / 60 ans ont vu le film et se sont tapé des barres de rire ! Ensuite, tous ne rigolent pas aux mêmes gags, mais il y a un sentiment commun, c'est le principal. Keith : Vous pensez que l'utilisation du second degré peut adoucir la vision de certains quant à ces Lascars ? Albert : Moi je pense que les gens qui ont un à priori négatif, qui les empêche de sourire, ne verront rien ! Ce film, à part son titre qui peut faire peur (haha), est une “comédie sociale urbaine hip-hop d'animation !”. C'est fait pour se marrer ! Après, on espère que les comédiens, les Vincent Cassel, les Diane Kruger, les Omar et Fred ... vont susciter de la curiosité chez les gens qui verront l'affiche, genre “ah mais ouais faut que je le voie !” Manu : Lascars est fait pour les gens qui veulent rire, qui trippent sur l'autodérision, et qui pensent que ça ne court pas les salles. Tu vois, le film n'est pas fait pour une minorité qui a besoin de changer d'opinion ! Evidemment, il a une portée sociale, mais il est avant tout centré sur les personnages, sur le comique de situation, c'est pas un film sur la banlieue ! Nuance...

Keith : Vincent Cassel est un Lascar type depuis La Haine ?! Albert : Vincent a le double mérite d'être à la fois une tête d'affiche et crédible dans ce délire. On l'associe peut être aux vidéos youtube “wanabe rappeur adolescent” aux côtés de Joey Starr... Mais Cassel c'est avant tout le frère de Rockin' Squat d'Assassin, c'est quelqu'un qui aime et qui connait le sujet, il baigne dans cette vibe streetwear et hip hop depuis qu'il est ado. A ce niveau, personne ne peut le taxer de jouer à ce qu'il n'est pas, c'est quelqu'un qui est connu, respecté, et qui respecte le projet Lascars. Dans le film, Vincent s'éclate : il rappe, il fait du beatbox, c'est un rôle sur mesure pour lui! Il fait partie de ces comédiens qui disparaissent derrière leurs personnages. Une prestation d'exception ! Keith : Il y a une réelle évolution par rapport à la série. Quelles techniques de graphisme ont été utilisées ? Albert : Le film est un composite de techniques visuelles. Tout part d'une interprétation des volumes, ce qui donne ce côté dégingandé et à la fois très réaliste grâce au travail des lumières. Il y a une approche picturale similaire au travail des impressionnistes, le tout combiné au fait de récupérer des photos, des matières, des grattages... Il y a aussi les tags, les grafs, qu'on superpose afin que le rendu soit un dérivé à notre sauce du street art. C'est ce qui fait la touch Lascars, qui ne ressemble a rien de préexistant. C'est pas du Disney, pas du Pixar, pas du manga et encore moins du Burton... c'est du Lascars ! Keith : Vos expressions préférées dans le film ? Manu : Claque du bouuule ! Albert : Bande de p'tits boloss ! K?-20

Keith : La B.O. est incroyable ! Qui en est à l'origine ? Albert : On doit cette B.O. à Lucien Papalu, notre directeur musical, et - cela va de soi- figure emblématique du Hip Hop. Faisant partie de Native Tongs, il nous a apporté tout son talent (Say la vee, avec De La Soul, titre phare du film). Il a composé la partie Score Orchestra avec Nicolas Marlet, pour un mélange musical hybride et bien dans le ton de Lascars, beat percutant, jazzy pour l'humeur détente et ultra New York. Fallait illustrer la bonne vibe du film! On espère qu'elle aura une longue vie cette B.O., on est d'ailleurs en discussion pour en sortir un disque. Keith : D'où vient ce délire barré, style Bip Bip le psychopathe et Coyote l'épileptique ? Manu : C'est pas un délire ! Fallait faire un film d'une heure et demie qui parte de sketches d'une minute, donc garder le rythme était vital. Je pense que le mouvement reste dans le sujet, ça ne part pas vraiment en délire absolu... enfin si, par moment, mais si tu fumes avant c'est sûr, c'est dangereux! C'est vrai que dans le traitement c'est speed, mais c'est une belle manière d'offrir de la créativité, du rythme, et surtout de la golritude ! Albert : Voilà, tu l'as ton expression ! Keith : Un souvenir marquant pendant ces trois ans de real ? Albert : Un jour, j'étais à Kiev avec Thomas Digard, le directeur d'animation, on était dans un resto français et un mec nous accoste, français lui aussi. Pompier à Marseille, sorti de nulle part, il nous demande ce qu'on fait et on lui raconte le projet... Le mec devient ouf quand on lui dit “Lascars” ! Il était fan. C'est hyper gratifiant de se retrouver à Kiev en face d'un mec comme ça! Aujourd'hui, voilà, la machine est lancée, on espère que ça va marcher... en attendant Cannes ! Propos recueillis par Charles de Boisseguin.


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.