Les versets angeliques

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LES BEATITUDES

LES BEATITUDES

Le bonheur qui est proclamé est au présent, dans l'aujourd'hui de Dieu mais il concerne aussi les événements à venir, l'heure du jugement et la vie éternelle. Le Royaume est au milieu de nous en même temps qu'il vient et que sa plénitude nous attend dans les Cieux.

Heureux les affligés peut être légitimement traduit par heureux ceux qui pleurent ou qui se lamentent. Ils pleurent parce qu'ils savent qu'ils sont en exil comme les filles de Sion au bord des fleuves de Babylone, comme des enfants d'Eve dans la vallée de larmes de ce monde. Ils pleurent et ne veulent d'autre consolation que celle de l'Esprit. Ils gémissent dans le désir du Règne de Dieu et l'Esprit lui-même intercède avec eux en gémissements inexprimables pour que le Règne vienne et que la volonté de Dieu soit faite sur la terre comme au Ciel.

La première Béatitude heureux les pauvres dans l'Esprit les résume toutes : heureux les anawim, pauvres, doux, affligés, humbles, la bonne nouvelle du Royaume leur a été annoncée, ils sont semblables aux tout-petits enfants qui prennent possession du Royaume comme un bébé prend possession des bras de sa mère et reçoit d'elle et la nourriture et l'amour. Heureux les doux : la douceur est d'abord l'opposé de la violence et de la force humaine toujours entachée de violence. La douceur c'est aussi le contraire de l'amertume. “Voyez comme il est doux et agréable pour des frères de demeurer ensemble.” (Ps 132,1) Le fruit du Bien-aimé est doux au palais de l'Epouse. La terre qu'ils posséderont c'est la terre promise qui là encore est synonyme du Royaume, ils en héritent de plein droit. Seul celui qui est doux peut exercer l'autorité. En grec praus est parfois traduit par débonnaire bien que ce mot soit vieilli en français, nous pourrions aussi traduire par gentillesse. Cette attitude est tournée vers Dieu comme vers les persécuteurs. L'anaw ne conteste pas avec Dieu, tel Job il accepte ses décisions sans se rebeller, il accueille les épreuves de l'existence sans amertume. Il ne répond pas à la dureté de ses ennemis par la dureté, il ne résiste pas à celui qui lui fait du mal, il est désarmé parce qu'il s'en remet à Dieu seul. Ils posséderont la terre : la terre c'est eretz Israël, la terre promise et par extension le Royaume messianique.

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Heureux ceux qui ont faim et soif de justice : être affamé ou assoiffé c'est être en manque, or le manque vient d'une expérience bienheureuse, le manque crée le désir. C'est un malheur que d'être déjà rassasié car on ne désire plus, on ne recherche plus la tsedaqua qui est la sainteté de Dieu. Celui qui désire la justice en a déjà fait l'expérience dans son cœur, il sait qu'ellemême désire le bonheur de l'homme. Ils seront rassasiés : fait référence à un événement eschatologique. Nous disons souvent que la justice n'est pas de ce monde, c'est vrai en même temps que les anawim peuvent la promouvoir dans ce monde tout en hâtant la venue du Royaume par leur désir. Heureux les miséricordieux : nous serons mesurés lors du jugement avec la mesure qui nous aura servi à mesurer les autres, or l'anaw sait qu'il ne peut tenir devant la justice de Dieu, que sa dette est immense, qu'il ne peut compter que sur une mesure infinie de sa clémence. La miséricorde est un amour irrationnel, l'amour de la mère qui se jette dans le feu pour sauver son enfant qui se trouve dans une maison en flammes, elle ne calcule pas qu'elle a d'autres enfants comme le berger qu'il a d'autres brebis. La perfection est dans cet amour des entrailles. Aimer les autres avec “ses tripes” et non par devoir et par calcul. 47


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