Aperçu du numéro 2016-1 de la REE (janvier 2016)

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L'ARTICLE INVITÉ

Figure 1 : Détermination du taux de taxation optimal en fonction de l’approche coût-bénéfice. approche aux avantages obtenus du fait de la réduction des émissions, indépendamment des coûts supportés

par unité de polluant déversé ; il a intérêt à payer la taxe si le coût unitaire de dépollution lui est supérieur.

mais il est souvent difficile de donner une valeur moné-

4. L’approche en termes de « prix notionnel » ou « prix

taire à ces avantages. Quelle est la valeur d’un site non

tutélaire » : c’est une valeur fixée « politiquement » par

INONDÏ OU D UNE RESSOURCE NATURELLE PROTÏGÏE /N RECOURT

la collectivité. Cela correspond à une vision téléologique

alors parfois à la méthode des « prix hédonistes » : on

ou normative des choix. Le décideur public peut fixer un

compare par exemple le prix d’un logement avec vue sur

prix arbitraire pour la tonne de carbone émise. Ce « prix

une forêt à celui d’un logement sans vue pour déterminer

fictif » (“shadow price” dans la littérature anglo-saxonne)

la valeur de cette forêt.

sert à orienter les choix d’investissement. Ce n’est pas un

2. L’approche en termes de « coût d’abattement » : c’est

prix réellement payé donc cela ne génère pas de rentrées

le coût supporté pour réduire les émissions de CO2 mais

fiscales pour la collectivité, mais cela sert à pénaliser les

il convient alors de distinguer le coût total, le coût moyen

investissements émetteurs de CO2. Beaucoup d’opéra-

et le coût marginal de cet abattement. C’est le coût mar-

teurs énergétiques recourent aujourd’hui à cette approche

ginal qui guide les comportements. Au-delà d’un certain

(cas du pétrolier Total par exemple). Le rapport Nicholas

seuil de réduction, le coût marginal d’abattement s’accroît

Stern (2007) avait proposé une valeur tutélaire de 150

très rapidement. C’est une approche de type coût-effica-

à 200 USD /t de CO2 et le rapport Quinet (2009) une

cité puisque l’on se donne un objectif de réduction des

valeur de 100 F/t de CO2. On est loin des chiffres obser-

émissions considéré ne varietur et que l’on calcule le coût

vés sur le marché européen du CO2 (7 à 8 F/t de CO2).

marginal et par ricochet le coût moyen et le coût total des

Cette valeur tutélaire peut se transformer en taxe carbone

efforts entrepris pour atteindre l’objectif (Keller 2009).

si la puissance publique décide de l’imposer aux divers

3. L’approche en termes de « valeur sociale du carbone » :

opérateurs ; le recouvrement de la taxe fournira alors des

on procède à une analyse coûts-avantages en déterminant

recettes publiques qui pourront être affectées au finan-

le point d’intersection entre la courbe de coût marginal

cement de certaines actions environnementales. Mais si

d’abattement et la courbe de bénéfice marginal lié aux

l’Etat demeure maître du prix, il ignore au départ l’impact

émissions évitées. Cela revient à utiliser simultanément

que cette taxe aura sur la quantité des émissions puisqu’il

les deux approches précédentes. On a intérêt à réduire les

existe en général une incertitude sur l’allure de la courbe

émissions de CO2 jusqu’au point où le bénéfice marginal

de coût marginal de réduction des émissions.

de la réduction est égal au coût marginal de cette réduc-

5. L’approche en termes de « prix du marché » : c’est le

tion. En pratique il existe une asymétrie car la courbe du

cas lorsque la valeur du carbone est fixée par le marché

bénéfice marginal est plus difficile à tracer que celle du

du CO2. La collectivité publique fixe un volume d’émis-

coût marginal. Cette approche coût-bénéfice est illustrée

sions de CO2 à ne pas dépasser et autorise les émetteurs

dans le schéma donné figure 1. Elle fournit le taux optimal

à échanger leurs quotas via des certificats. On déterminera

de taxation : un pollueur a intérêt à dépolluer tant que le

ainsi ex post le niveau du prix d’équilibre de la tonne de

coût unitaire de dépollution est inférieur à la taxe payée

CO2. Cela concerne par exemple les électriciens et certains

REE N°1/2016 Z 31


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