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2e trimestre 2020
AUTOPORTRAITS
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J’ATTENDS LE
NUMÉRO 58 PHOTO DE COUVERTURE Sarah Poli
J’ATTENDS LE NUMÉRO 1 2011 • 2020 Création Isabelle Souchet & Ivan Leprêtre Design Ivan Leprêtre Contact lepretre.ivan@wanadoo.fr
SOMMAIRE 04
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ALAIN DIOT > Maître de conférence en arts plastiques • alaindiot2@orange.fr
BERTRAND BOULANGER > Poète gelamboo@wanadoo.fr
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09 SARAH POLI > Vidéaste - PARIS VEGANE • sowolf.poli@gmail.com • Site : sarahpoli.com
18 CLAIRE DRAPIER > Graphic Designer • clairedrapier@orange.fr • Site : clairedrapier.com
KARINE SAUTEL > Ellipse formation • karine@ellipseformationcom • Site : ellipseformation.com
42 GÉRARD MARTY > Artiste - Illustrateur • martygetc@free.fr • gerardmarty.blogspot.com
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22 IVAN LEPRÊTRE > Directeur de création • lepretre.ivan@wanadoo.fr • Site : ivanlepretre.com
OLIVIER ISSAURAT > Enseignant • oissaurat@ac-creteil.fr • Site : olivier.issaurat.free.fr
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C=/CHRYSTEL EGAL > Artiste, écrivain • chrystel.egal@me.com • Site : c-egal.com
FRÉDÉRIC ADAM > Poète • frederic_adam@hotmail.fr
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30 STÉPHANE ISSAURAT > D. A. et webdesigner stephane@i-stef.com • Site : i-stef.com
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JEAN-MARC COUVÉ > Écrivain, critique et illustrateur • jeanmarc.couve@gmail.com
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ELODIE LACHAUD > Photographe, réalisatrice, plasticienne • elodielachaud@gmail.com • Site : elodielachaud.fr
THIERRY FAGGIANELLI > Poète du quotidien • thierry.faggianelli@sfr.fr
J’attends le numéro 58
AUTOPORTRAITS
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LE FIT IT QU’ICEL LE PORTRA
ÉDITO ALAIN DIOT
Il est vrai qu’aujourd’hui, les ami.e.s, qui ne s’est laissé aller au selfie ? Est-ce que tout le monde en fit fi ! Certes non ! Et qui s’en méfie ? C’est ainsi et çà n’est pas fini, je vous le dis ! Que ce soit celui que la pucelle fit ou celui que le vieux porc traite, on ne sait jamais ce qu’il peut en advenir, même si celle ou celui qui le fit en fit un souvenir bien surfait, fièr.e de tous les effets que sa petite touche de sel fit.
Dans les rues, même perdues, dans les avenues, même mal reconnues, sur les marchés, même mal démarchés, dans les fourrés, même bien bourrés, voire rembourrés, dans les forêts, dès potron-minet, dans les halliers, en fin de soirée, dans les musées, même mésusés, dans les petits restaux, même trop tôt pour prendre l’apéro, dans les plumards peinards, même trop tard pour prendre son panard, sur les vélos, même à vaul’eau, dans les autos, dans les bateaux, sur leurs bécanes, dans leurs cabanes, dans leurs salons, avec leurs chères dondons, avec leurs vieux fripons, même avec leurs nistons, dans leurs tanières ou leurs volières, en costume, comme les grosses légumes, ou en guêpière, sans la jouer trop altière, par devant, sans paravent, par derrière, sans paratonnerre, tout nus ou en pardes-
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sus, à pied à cheval ou en voiture, les doigts dans la confiture ou les yeux en face des ouvertures, avec trucmuche ou avec machin chose, à Pantruche ou à Mykonos, à Pantin ou à Romorantin, en Italie ou en Patagonie, à Tokyo ou à Oslo, tout les humains se prennent en photo. Ah ! Comme c’est beau ! Et le cliché, çà n’est pas du chiqué, c’est de l’instantané où parfois, c’est promis, c’est sacré, l’icône rit, Fifi ! Ah ! Les blaireaux, mes agneaux ! C’est qu’aujourd’hui l’outil béni qu’on a tous dans les mains, même celles et ceux qui y ont un poil souverain, c’est un sacré machin ! S’il ne fait pas encore l’expresso – mais c’est sûrement pour bientôt ! – ni la pizza – mais çà ne tardera pas ! - il vous fait toutes les photos du Monde et de l’Univers réunis, à midi ou à minuit, celle de votre minois joli ou même celle de votre zizi chéri, en long en large et en travers, en noir, en blanc, en rouge, en vert, en micro, en macro, en pano, en histoire pour la gloire, en géo pour les bobos, sans oublier les vidéos, même les coquines ou les pornos, y’a qu’à demander à Griveaux ! Bref, le narcissisme banal se démocratise pas mal et même le prolo, qu’il soit maigre ou qu’il soit gros, s’échine à prendre sa trombine en photo surprise pour se faire reluire la cerise, quand çà lui chante, quand çà le grise, quand çà l’enchante, quand çà le divinise. Qu’il ait l’humeur souriante ou l’aigreur un peu méchante, il s’en donne à cœur joie
© Stocklib / Roman Samborsky
quand çà le tente, le bras tendu et l’œil pointu, tout content, tout frétillant, un peu débile, un peu tremblant, à sourire comme un vizir devant son émir avant de le trahir, comme un vampire qui vous aspire le meilleur dans sa tirelire, comme une hétaïre du Zaïre qui danse à vous faire frémir, comme un vieux sbire du Cachemire qui conspire à vous pourrir la laine sur le dos qui transpire, comme un satyre qui soupire en s’astiquant le saphir. C’est dire si çà délire et si on peut en rire, messires ! Et puis surtout, il faut qu’on s’affiche sous nos meilleurs atours, sous notre meilleur jour, dans la soie ou le velours, avec des stars, pas avec des toquards, avec des vedettes, pas avec des lavettes, devant les grands monuments ou les beaux paysages, pas devant de pauvres bâtiments ou de minables voisinages, même si parfois, sans foi ni loi, on se laisse aller à portraiturer la famille ou les
ami.e.s, et çà n’est pas toujours joli joli. Et puis, bien sûr, on choisira à qui on le montrera, le résultat, des fois qu’on ne soit pas toujours à notre avantage et que notre plumage ne se rapporte pas à notre ramage. Ce serait dommage ! Et puis aussi, et puis surtout, on peut faire les gros matous sur les réseaux asociaux et s’inventer une autre vie, pas celle qu’on vit, et jouer les gros bras qui sont toujours au bon endroit. Bien sûr, tout çà c’est du vent, de la poudre de perlimpinpin qu’on vous vend, et ceux qui vous manipulent ricanent à vous voir aussi ridicule. C’est le fidèle ami qui vous le dit : « Ne vous tirez pas tout le temps le portrait, çà va finir par vous distendre les traits, çà va finir par vous rendre laid ! » Alain (qu’on crut !) DIOT. Avril 2020.
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ET PAN ! D ÉMIS !
FOCUS ALAIN DIOT
On était plein de joie, on ne l’avait pas ! Matois, on l’avait laissé aux chinois ! Parce que nous, les gaulois, on n’est pas du genre à bretelles à se farcir des pipistrelles ! Parce que nous, les marioles, on ne se met pas n’importe quelle bestiole dans la fiole ! Là, on rigole ! Parce que nous, sur les marchés, nos bouchers font pas dans la chauve-souris sauf, bien sûr, s’ils sont chauves et qu’ils sourient ! (Oui d’accord, c’est facile et un peu lourdingue, et en plus, y’en a d’autres aussi débiles dans la seringue, du genre qui dézingue : « A Wuhan, les chauves sourient jaune ! », c’est dingue !)
Mais çà y est, cette fois on l’a, le corona, qu’on soit des mecs où des nanas, des tout fins ou des tout gras. Et il nous la rabat, la joie, l’enfoiré qui vient nous infecter alors qu’on n’avait rien demandé. Il est quand même un peu gonflé, un peu pourri, à parcourir des milliers de lis pour nous obliger à se foutre au lit, à midi comme à minuit, et pas pour les parties de zigouigoui, le malpoli, lui qui n’a même pas prévenu quand il est parti de tout là-bas pour s’en venir jusque ici-bas ! Question fébrile vit russe, on avait le viril Poutine qui, le super subtil, nous assassinait facile avec ses bibines chagrines de cosaque maniaque, mais voilà que Xi Jiping, rien dans le
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string, tout dans le lifting, tel le cyclone exciting, nous fait son marketing et nous empoisonne les hormones des autochtones comme personne, et le tout sans vergogne. Çà ne vous met pas en rogne ? Et quand les fils malsains du mandarin viennent vous serrez la main, y’a intérêt à la jouer malin, les copains, voire à la jouer fine, les copines, pour ne pas avoir de pépins si c’est ceux de la mandarine. Et maintenant, évidemment, les cons testés nous ordonnent de nous confiner, tout seul ou avec bobonne, avant de nous paraffiner comme des vieux pots de confiture, de peur qu’on transporte de la moisissure, même si çà n’est pas si sûr. Tout juste s’ils ne ressortent pas le bromure des fois qu’on ait des aventures avec nos promises, même pas compromises, et qu’on leur refile cette saleté qui fait tousser, qui nous aura tout fait jusqu’à nous étouffer et qui vous fout le boxon jusque dans le tréfonds des poumons. Bon, mais on a été bien élevé alors on va même carrément tout calfeutrer et plus laisser la moindre puce entrer. C’est le blocus, bande de gugusses ! Quant à ceux qui prétendent à jouer les cons finement, ces pauvres cons damnés, ceux qui veulent tricher et se cacher pour se déconfiner et s’en aller se bagnauder comme des cons tractés, que le Grand Con Dément leur escagasse la carcasse, à ses cons volés ! Par les temps qui courent, eux qui sont à la bourre, faudrait pas qu’ils se considèrent comme les seuls
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cons pétants prospères, les pépères, et qu’ils ne nous fassent pas la misère s’ils veulent protéger leurs arrières ! Et le premier qui tousse, on le pousse à se faire tester, de la tête aux pieds, sans barguigner. Il n’a pas intérêt à regimber, le fieffé, surtout s’il a la goutte au nez, les traits tirés et la gorge enrouée, non mais ! Et des fois qu’en plus il soit fiévreux, le morveux, il en devient calamiteux, le malchanceux. Et on ne vous raconte pas les yeux hargneux qui se posent sur son visage anxieux et comment nos chers compatriotes jouent les Don Quichotte en serrant les fesses en délicatesse dans leur petite culotte de chochotte ! Tout juste s’ils ne lui mettraient pas une calotte dans la bouillotte ! C’est qu’il ne faudrait pas croire l’intérieur de la noix de coco vide, disent neuf sur dix des médicastres qui se penchent sur le désastre ! Pas plus que la peau du pangolin pourtant si câlin, ou que la main exploratoire de ma sœur péremptoire dans le caleçon hallucinatoire du biffin jubilatoire ! Y’a des petites bêbêtes partout, et qui nous embêtent partout parce qu’elles nous suivent partout et qu’elles nous contaminent partout. Et quand on voit la tronche du contaminé, on peut bien lui dire : « hé, ducon, t’es miné !», çà n’est pas çà qui va lui soigner les bronches ni lui déminer le chantier. Et puis au lieu de le boire comme des bonnes poires, l’alcool incantatoire, celui qu’on gardait pour la soif sous la coiffe, et pour la gaudriole
dans sa fiole - bien sûr pas pour la bagnole, que le Bon Dieu nous patafiole ! - maintenant on vous le colle, et pas en vain, dans des flacons incertains pour nous laver les mains, et rester sain, du soir au matin ! Quant aux masques, manquerait plus de faire des frasques ou de jouer les fantasques si on ne veut pas qu’on casque et être pris dans la bourrasque comme ces malheureux bergamasques ! Et dans les EHPAD, pas question de bravade à se faire une petite balade, voire une escapade, voire même encore une cavalcade de malade en passant par-dessus la rambarde de la balustrade, cher.e.s camarades ! D’abord c’est plus vraiment de votre âge, à se mettre comme çà en nage si vous voulez éviter le carnage. Et faut pas pousser la braillarde pour gagner la cocarde parce qu’il n’y aura pas de sauvegarde. Ouais, d’accord, c’est hard, mais méfiez-vous, les doudous, elle n’est pas bavarde, la camarde, mais quand elle canarde, la bâtarde, çà bombarde ! Et nos vieux copains italiens, nos mitoyens transalpins qu’on aime bien pour faire ensemble les latins malins, mamma mia, ils se sont pris la corona bien fort dans la pastasciutta, pendant que nos vieux guignols d’espagnols, les Gogols qu’on aime tout autant quand ensemble on rigole, se le sont pris bien en travers dans les guiboles ! Et dans les pays au soleil si chaud, y’a pas de cadeaux dans les hostos et la grande hécatombe risque bien de remplir en trombe les
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FOCUS ALAIN DIOT tombes. On n’a peut-être pas l’air, et même si on ne sait pas quoi faire, on est quand même solidaire ! C’est vrai aussi que pour les britishs, ce n’est pas qu’on s’en fiche, mais on est quand même un peu plus chiche et c’est vrai aussi que quand le Boris, qui attend les bénéfices de ses caprices, dévisse au bord du précipice, dans la coulisse, bien sûr sans malice, on n’y voit peut-être quelque malice de la justice, même si on ne lui souhaite pas de boire le calice jusqu’à la lie ni que tout çà finisse en hallali ! Et même les ricains, eux pourtant si malins qu’ils ont quand même réussi, c’est inouï, à se payer déjà un coronatrumpus chéri pour pas un radis, celui qui déblatère sans manquer d’air sur Twiter - et çà fallait quand même le faire ! -, ils n’ont pas été assez futés pour se l’éviter, la couronne à virus, et le pensionnaire atrabilaire de la Maison Blanche a beau tortiller des hanches – « Même pas peur ! » frime-t-il, le tricheur- ce pauvre olibrius aux laïus fourré aux lapsus, qui se verrait bien en péplum comme à Rome, va bien les leur remplir, leurs funérariums ! Et puis reste l’Inde où çà va leur coûter une blinde pour essayer de se protéger de cette dinde excitée et l’Afrique où cette pseudo tique toxique et tyrannique risque de la jouer volcanique sous les tropiques. Bien sûr, il y a tous les autres endroits que l’on ne connaît même pas mais où il y a aussi des p’tits gars et des jolies
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divas qu’on ne voudrait pas, quoiqu’il en soit, laisser au corona. Et sur la Terre entière, faut craindre que poussière que nous sommes, nous ne retournions poussière sans pouvoir faire machine arrière. C’est pourquoi, attention : « Quand tu te mets minable, t’es d’autant plus contaminable ! ». Faisons donc tous bien gaffe à ne pas se prendre la grosse baffe pour qu’aucun biographe, serait-il hagiographe, ne vienne prononcer devant un bel aréopage, quelque épitaphe, serait-elle à notre avantage, sur notre cénotaphe. Finalement, quand on y pense, on se sent un peu ridicule devant ce virus tout minus, tout minuscule, qui nous accule à nous claquemurer et qui bouscule notre santé bien aimée, de la tête aux pieds, sans nous laisser respirer le bon air, même pollué, et qui fout le Monde et l’Univers tout entier à l’envers, jusqu’à nous faire crever, le pervers ! Y’a des fois où, quoiqu’on en dise, on en reste pantois, quand on perd ainsi la maîtrise de la Vie et de la Joie et qu’on se retrouve dans la mouise en espérant que ce Covid avide fasse le plus tôt possible le plus énorme des bides ! Bon, ben, finé comme on est, on va quand même essayer de rigoler, mais ce n’est pas gagné ! Et même s’il va y avoir de quoi broyer du noir, gardons espoir. Ce n’est quand même pas ce vibrion qui va nous foutre le bourdon ! Alain (patient !) DIOT. Avril 2020.
HARAS ILOP
• Tropicalia •
SARAH POLI
• Tropicalia •
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SARAH POLI
• Tropicalia •
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HARAS ILOP
• Tropicalia •
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• Selfies •
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• MoonCup •
SARAH POLI
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SARAH POLI
• MoonCup •
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SARAH POLI
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• Shocked • 15
SARAH POLI
• Shocked •
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www.youtube.com/user/SarahPoli1
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EXPOSITION M
ULTIPLE
CLAIRE DRAPIER
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Fascinée par la lumière de la Manche, je me mets en scène dans des décors qui m’inspirent et capture les mouvements. Je remporte le 1er prix du concours photo La petite robe noire associant le magazine Fisheye et l’illustre parfumeur Guerlain, pour un de mes clichés évoquant la liberté. Je dévoile aujourd’hui l’ensemble de mes photos de ma série intitulée Exposition multiple. Mes images sont à la fois douces et surprenantes. Le mouvement corporel capté n’est jamais figé, il est lumineux et envoûtant de
légèreté.
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AUTOPORTRAITS
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CLAIRE DRAPIER
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www.clairedrapier.com
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IVAN LEPRÊTRE
J’aime bien berlougoyer, surtout avec une bande de scrameuches dans l’grougniaffr, même si parfois ça m’fait tartifflouper, provocant chez moi une gorgolation sans retour... Par la suite, je dégologoise mais tout en restant dans la limite de la melzyglution. Ça m’déniffle dans l’burnuflux c’te pandigofel. Je n’aime pas me faire choubitouffler le pardafin en revanche.
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J’ai donné rendez-vous, derrière l’église à la plus belle fille de la classe. C’est Élise Je sais qu’elle adore grave les CarenSac j’en ai plein mon cartable tout en vrac Après le pelotage et un peu de baratin comme d’hab, on s’roulera des patins On est bien trop jeune pour se marier mais j’lui ai offert un méga beau collier Fait en nouilles et en coquilles de moules et j’lui dis que j’l’aime, ça la chamboule... Ivan : 10 ans et demi
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IVAN LEPRÊTRE
À bord de mon bateau interstellaire Je partirai souper avec la belle Séléné Insensible au scintillement de la lune Je pointerai plutôt vers l’étoile polaire En passant, nous goûterons l’eau oxygénée D’une averse millénaire tombée de Neptune
FABLE EXPRESS Monsieur l’curé de Roscoff Livre d’la bibine aux sous-off De l’eau d’vie et du saké Aux grenouilles de bénitier Moralité : Il vend le prêtre !
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J’AIME J’aime chuchoter à l’oreille des sourds J’aime admirer mon reflet dans le noir Observer les nuages, nu dans la cour J’aime les artichauts avec des boudoirs J’aime l’intolérance de ces troubadours J’aime mon snobisme, quitte à décevoir
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IVAN LEPRÊTRE
Je songe sérieusement à me recycler, je voudrais maintenant écrire dans les lignes de la main, il faut bien donner un peu de lecture aux chiromanciennes. Dans la ligne de cœur, j’écrirai des lettres d’amour tapageuses et révolutionnaires. Dans la ligne de vie, je tracerai des épopées, des poèmes homériques et des drames shakespeariens. Dans la ligne de l’immobilier, je passerai des annonces pour investir dans la pierre. Dans la ligne magazine people, je lancerai des fausses rumeurs sur des stars de ciné, des articles putassiers et dévastateurs à propos de chanteurs de variétés et sur la ligne 14, je m’adonnerai à l’écriture automatique.
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Moi : Depuis que je mets du sel dans mon café, je le trouve vraiment dégueulasse ! Moi : Certains ont le pied marin, d’autres ont le pied-de-poule. Moi, j’ai le piédestal ! Elle : La vie sans toi n’aurait pas la même saveur mon chéri, tu débites tellement de conneries à longueur de journée que j’aurais vraiment de la peine à te remplacer. Moi : ...
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FRÉDERIC ADAM
Au miroir de l’âme Faire les yeux doux Attendre qu’il m’acclame Ou tendre l’autre joue Donné-je son pesant de pensée Assez pour en amadouer le reflet ?
Ce que je fixe D’une pensée flash Et que j’offre prolixe Au regard que je m’attache N’est qu’un collier Dont la laisse me sied
Fixer le regard D’une pensée pour pouvoir En conjuguer les déclinaisons En favoriser la floraison Est notre façon de nous taire De jouer au solitaire
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Rendre le trait plus fin La pensée plus profonde Ou peut-être du moins En élever la faconde Voilà le fil que l’on tient Ou au mieux que l’on retient
Comme une parole que nous reprenons Mais que nous laissons en l’air en trait d’union Dans l’entre-deux des ressemblances Avec ce que nous gardons à distance Le calque d’une pensée de soi File l’étrange coton de nos pavois
Je force le trait Je farde mes pensées J’y mets tout le blanc D’Espagne ou ce qui est ressemblant Puis je fixe dans les nuées Et envoie tout balader
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JE SUIS PAS L À POUR FAIRE LE BEA U GOSSE !
STÉPHANE ISSAURAT
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ICI NON PLU S! 32
STÉPHANE ISSAURAT
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ÉLODIE LACHAUD
VIVEMENT DIMANCHE
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BETWEEN SP ACES
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« Between spaces » pourrait être le titre général de toutes mes séries. Ces espaces entre deux, ces lieux
de passages, de jonction, de transition, de transfor-
mation, d’énergie et de mouvement, où l’on n’a pas
d’autres choix que d’être libre… L’unique trajectoire…
Un espace/temps, imprévisible, où tout peut arriver…
Ces marges où l’on s’échappe.
A la naissance de ma fille, l’atelier s’est transformé… J’ai rangé les pigments, acheté une machine à laver… La voiture, le taxi, deviennent mon nouveau lieu de création, ma chambre à moi… Se mettre en mouvement pour approcher un nouvel état de conscience … Protégée derrière l’écran/pare-brise et traversant la ville, je m’abandonne, animée d’images, entre émotions et reflexions qui ne demandent qu’à s’exprimer là. L’habitacle modifie l’espace que je parcours, j’y cale mon rythme … Dans ce monde en vitesse excessive, un temps parallèle se déroule à mon insu … Une seule issue possible me rend claustrophobe … Alors je mets en place un dispositif fictionnel mouvant … J’avance, je scrute l’horizon, je m’évade, je me sens libre, je me place … Dans cet intervalle, s’ouvre un espace (laps) intime, pour poser un regard sur le réel. Un regard troublé par des occurrences (flashs) visuelles et sonores où présent passé futur se superposent dans l’instant. Tant d’histoires se racontent dans un voyage parallèle, et ce compteur qui défile seul témoin du temps qui passe … Garder toujours en mémoire la mesure temporelle kilométrique parcourue.
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BOUT-DE-FICELLE SEL-FIE-DE-B OUT
BERTRAND BOULANGER
MA RECHERCHE DU TEMPS PERDU ? J’ai compté tout les poils du balai, Il y en a bien plus que 365 et quart... Je vous le mets quand même ?
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PERDRE AMBULANT JET
AUTROPORTRAIT
AUTOPORTRAITS
Image permettant de se découvrir tel qu’on n’est pas encore...
Sur mon journal de bord qui veille à mon chevet Dans un demi-soleil, couchant sur le papier Parti à la dérive, arrimé au lointain Mon crayon télescope me tiendra par la main. Cherchant à me surprendre ou à m’emmitoufler à tâtons pulpe d’encre sans perdre ambulant jet...
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KARINE SAUTEL
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PSYCHEDELI C SELFIES J’attends le numéro 58
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KARINE SAUTEL
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PSYCHEDELI C SELFIES J’attends le numéro 58
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DOUBLE-SEL FIES
GÉRARD MARTY
OHLALA !!! DOUBLE SELFIE DESSINÉ !!!
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DOUBLE-SEL FIES
GÉRARD MARTY
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NIGHT FLY
GÉRARD MARTY
...DANS LA MOITEUR DE LA NIQUE, j’entends des râleurs, j’entends des crics tu as envie de mordre, sois pas chien, prends moi dans le désordre, c’est ça ou rien... Du Bashung dans les oreilles, je me selfie la gueule, tout seul dans le noir...
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AUTOPORTRAITS
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AUTOPRTR AIT 01
OLIVIER ISSAURAT
C’est un homme, avec des yeux, une grande bouche,
Un nez tout rond et des cheveux.
Il pète à tout va quand s’en vient le soir.
Dans la journée, ses narines sont des cavernes
Qui regorgent de trésors,
Aussi passe-t-il son temps à les trifouiller,
Pour y découvrir un beau présent. Le dessous de ses pieds est noir, dur et tout cornu. Avec la corne, il déchire les tissus soyeux. C’est un ami de longue date. De peur de le froisser, je n’ose le critiquer, car il est coléreux. Parfois, il pousse d’immenses cris et jette les bras en l’air. On dirait un sémaphore qui aurait perdu le sens des mots. Il boude aussi, car il est susceptible. Lorsque vous le croiserez, Saluez-le poliment de ma part, Et passez votre chemin. Lui parler ne sert à rien, Il n’écoute que lui-même. Ce bougre vit aux tréfonds de ma citrouille. Depuis des lustres, j’essaye vainement de l’en déloger. Sachez, passants débonnaires, Que ce malotru est un radin qui ne paye pas son loyer !
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AUTROPORTRAIT 03 [dit trans-portrait]
AUTROPORTRAIT 02 [dit à l’œil crevé]
AUTOPORTRAITS
Je vois depuis Un demi-visage Une moitié de bedaine Je ne vais plus que sur un pied Ne salue donc que d’une main Et n’enlace guère que d’un bras Heureusement, Mon nombril et mon nez Mais la bouche aussi Me restituent mon unicité Autre chose encore Permettez cependant, De ne point l’évoquer !
Mes longs cheveux soyeux Enluminent ma poitrine délicate Qu’une longue robe éveille à la vie Mes jolis souliers Ont un reflet moiré Mais lorsque je devine l’aube Sur mon visage émacié Une larme d’amour Délicate et sensuelle Me force au souvenir De l’absence magnifiée
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TRANSPAR ENCE
CHRYSTEL ÉGAL
Aujourd’hui, on passe de l’effacement des différences à la transparence.
Je déteste ce mot.
Quand les vitres sont transparentes, on ne les voit pas.
On peut passer au travers.
Moi, j’aime bien les vitres un peu sales.
Au moins, on voit où ça s’arrête. J’aime bien que les gens aient leur part d’ombre. Je ne veux pas être transparente. C’est cette difficulté à vivre avec la différence qui encombre les liens. Ça complique la vie. C.=/Chrystel
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+ 1 ? IN DESSEIN INS, OU SA
jean-marc couvé « Certaines gens voient comme si leurs yeux étaient au bout d’une perche, très loin de leur cerveau. » Jules Renard Premier « autoportrait », ado (1974)
I
CINQ DESS
Oui, pas de doute, même si cela semble étrange : je fus celui-ci-dessus… ou peu s’en fallait, René ! D’ailleurs, à cette époque, non content de rencontrer Aragon en son hôtel particulier, rue de Varennes, je lisais « Comment fais-tu l’amour, Cerise ? » de Fallet, l’ami de Brassens, autre figure incontournable alors, pour moi – comme pour beaucoup d’autres – de la création artistique sous VGE ! Souvenirs mitigés, à la fois d’éveil (au mystère du sexe… dit « opposé » !) et de naïveté. Pensez : je me rêvais poète, aux côtés d’un Louis, d’un René, d’un Georges…
Plus de 45 années se sont écoulées, pas toujours de façon aussi linéaire que la géométrie pure aurait pu me le laisser espérer. Pourtant, même si, à me regarder fugitivement dans la glace, assez fasciné par le pas sage et irréparable outre-âge, comment nier (sans rien renier) qu’il y a encore un peu du jeune homme que je fus dans mes rêves actuels, des rêves qui n’ont pas pris une ride ? Ainsi, la création thématique, initiée par En attendant le numéro, me permet de persister encore, ce jour, et toujours de signer : si je (ne) ressemble (plus) à
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Rimbaud [dixit Aragon, lors de notre première entrevue !], ni ne me rêve plus l’égal de qui que ce soit (car j’ai assez de soucis avec ma pomme et ses pépins), je suis resté obstinément fidèle à mon idéal adolescent. La poésie vibre toujours autant, entre humour noir et soûl-âge, face au peu que nous savons, et malgré tout ce que nous ignorons, moi compris. Car, à l’opposé d’un selfie le plus réussi fut-il, la poésie avec ses muscles et sa tripaille [Guy Chambelland] ne se soucie guère d’apparences plus que d’appâts rances ! Elle effleure un sentiment, une prescience, excelle à courtiser l’indicible, étant de l’humain la part la plus fière autant que la plus humble. Raison pour laquelle on n’est pas près de trouver un/e poète affichant sa bobine XXL en tête de gondole… Et il faut nous en réjouir ! II Le second « auto-porc, très », vieux d’une quinzaine d’années, montre assez bien, il me sem-ble, en quelle basse estime je tenais cet exercice, bien avant la mode nombriliste du
Auto port’ raie, sans date
selfie ou de la-photo-de-mon-assiette-auresto… Est-ce que l’auto (une R5) se déporte, emportée par l’arrêt alité, comme qui dirait « dans son élan » ? Est-ce, là, raie se coinçant queue dans la porte – hier, bien moins que deux mains, mon cousin ? Coq qui – nain – porte… quoi ? Coquine, Otto ! L’homo tomobilicus se com-porte comme, n’étant qu’homme, un enfant qui s’accroche à ses joujoux. Un Narcisse qui prend son panard à mirer sa saucisse. Ou sas au 6. Être puéril, donc. Et ce ne sont pas nos outils dits Maux d’Herne, et dont têtes repoussent à l’infini, qui vont éclairer, sinon éclaircir l’avenir de l’allumé plus que de la dé-branchée… qui la sauce hisse ! III Dans cet autre portrait (au top, hors traits !), l’auteur de ses lignes, comme de cette image, est déjà plus sage ; nostalgique de quel pucelage ? Il ose bouder la caméra-stylo de son exécutant, puisqu’on remarquera que l’auteur, ici, se substitue à l’auto, tandis qu’un bouquet de cosmos – fleur au nom si évocateur – prend l’exacte place de la raie (au milieu). L’image « à poils » se dévoile, sans fausse pudeur. Elle témoigne de la canicule qui s’abattit sur l’Europe, en 2 000 et des… Séjournant à l’époque à Forcalquier, je dus écourter cette vacance, au grand dam des logeurs, et perdis du même coup… le coût de
Autoportrait barbu, Forcalquier, 2006
ma location. En effet, le baromètre affichait 45°, le jour, et il m’était impossible de sortir de derrière mes « cosmos » sans risquer l’insolation ! Je rentrais fissa en Normandie, où les températures avoisinaient les 30° tout en restant parmi les moins insupportables de l’Hexagone… C’est donc un « portrait » dû à des contingences extérieures (à ma volonté). Ce dessin fut esquissé, je m’en souviens parfaitement, faute d’un modèle plus palpitant qui se serait offert à moi, en pleine nature. Sacré croquis. Sorte d’offrande à Narcisse, oui. Anar sis à la campagne. Par pur désœuvrement !
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jean-marc couvé Autoportrait moustachu, Venise, 2008
ébahis le résultat de cette quête à plume, puisque je l’écris, et à poils, puisque la chair dénudée m’a toujours interloqué ! Voire plus, si affinités… V
IV Interrogation sur tel être… étaie lettre – et inversement. Pourquoi diable Venise, se demandent les plus curieux ? « – Émonde yeux », calembourent les plus facétieux. » Toujours fut-il, voire futile, qu’en cette autre location chez l’habitant, au dernier étage de la maison, se trouvait une pièce munie d’une seule fenêtre aux dimensions modestes, mais qui, si l’on se donnait la peine de l’ouvrir, offrait une vue imprenable sur la ville et ses toits : tous plus ouvragés et garnis de balustrades, de terrasses ou de lions sculptés les uns que les autres ! En cette pièce, nul miroir. Pourtant, s’il vous venait l’idée de vous glisser entre les deux battants ouverts en grand de la fenêtre, assisté par la généreuse lumière vénitienne de cet été 2008, alors, votre reflet vous apparaissait – comme dédoublé. Jeu de miroir, oui. « Je » de mire : où - art, partout ? Autoportrait nu le pare… Fort de cette troublante trouvaille (que vaille ?), et saisissant un siège, je me mis en de-voir de… voir. Et vous avez sous vos yeux
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Jeux de glaces, de miroirs, ou simples reflets ? Trompe-l’œil, ombre-portée, galerie ou cabinet des horreurs… que sais-je ? Un café. Une table de bistrot. Rue Daguerre, si ma mémoire est bonne. En attente de quelque passé, à portée d’impasse ? Rien n’est certain. C’est l’hiver, pour le moins : l’homme, au centre de ce dessin, n’a ôté ni manteau ni chapeau. Je n’en garde nul souvenir, ni bon ni mauvais. À un angle de rue, derrière ce sue jet (qui fait davantage penser à une nature morte !), un scooter attend son cavalier. Adossé au commerce. Le café va refroidir. En effet, il est mal aisé de dessiner et de siroter de façon simultanée. Essayez, vous verrez… Mais revenons à l’objet de notre étude : les poches du manteau de cuir noir sont lourdes. Les poches sous les yeux du héros sont fatiguées, comme un selfie qui se serait mordu la perche, ou comme une canne télescopique qui se tordrait dans la douleur à force de tendre à celui/celle qui la brandit le miroir à peine déformant de sa propre rigidité cadavérique. Beaucoup d’ombre au tableau, donc. Ce qui sied bien au dessin en noir comme en blanc, non ? L’âge aidant, on se prend à regretter l’époque où les téléphones avaient un fil torsadé, et où, par ailleurs, il n’y avait pas le téléphone chez grand monde. Une époque où les photos, onéreuses, étaient prises par un professionnel, et, pour l’essentiel, lors d’un mariage ou après une naissance. Aujourd’hui, la couleur pho-
Autoportrait au chapeau, Paris, 2014
tochopée et les clichés d’une banalité interchangeable (clichés rarement développés et que la plupart des milliards de photographes amateurs ne regarde jamais plus d’une fois), tout cela tousse, et sel - fi ! encombre nos mémoires essentiellement artificielles. VI On commence par une auto, symbole (s’il en fut) de notre modernité mortifère. Et le tout finit en queue de poisson, avec telle ombre due, no top, port’ raie sur une masse de cheveux qui, de l’âge de 17 à celui de 57 (soit 40 ans), s’est littéralement évaporée ! De tes cheveux, mon vieux, même « perdus » dans l’ombre, on n’en voit plus des masses ! Et, à part ça, qu’ajouter sur le goût de soi-même, si répandu à l’ère hyper-individualiste, qui pousse la plupart de mes congénères à se mettre en scène, en avant, en lumière, sous les feux de la rampe ou des projecteurs ? Vous dites : je coupe les cheveux en quatre ? Il semble que rien ne soit fait pour chercher, avec une minutie toute scientifique, les raisons d’un tel narcissisme. Sommes-nous si beaux, Tintin, échappés de quel beau teint - mond’ dingue ? Aimant nous complaire, comme aimant plaire, à 8 milliards d’exemplaires, nous n’avons de cesse
L’ombre de moi-même (Florence, 2015)
de nous reproduire, quasiment à l’infini, avec ou sans GPA. Auto-satisfaits (à peu de frais), il nous faudrait plutôt nous imprégner de la sagesse d’un Jules Renard, mort longtemps avant que quiconque envisage seulement la possibilité (non pas d’une île - qui secrète aile, mais) d’un téléphone hyperconnecté qui vous fait du café/vous gratte dans le dos/ vous initie au rodez haut sur les réseaux sotssi-hauts/vous permet d’envoyer à la Terre entière, via d’innombrables satellites, quantité astronomique d’autoportraits et autres selfies. Afin de bien marquer - au fer rouge - notre passage sur cette même terre de notre empreinte carbone catastrophique. Sans parler des jeunes enfants, qui triment dans les mines de terres dites rares (sic) pour approvisionner une i-économie désunie, qui se fout des droits de l’enfant comme de l’Unesco ! Ce sera tout, pour ma part, côté contribution à ce thème si difficile du portrait, cher hôte au bord de la crise de nerf. Sans attendre, ni en attendant, je laisse la parole à notre camarade i-éditeur, étant entendu que seul Leprêtre saura guider le troupeau égaré (où je moutonne, itou), afin de le mener dans un i-monde meilleur ! Jean-Marc Couvé (2-6 mars 2020)
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oportrait
VAGUE-À-L ’ H OMME histoire d’u n aut
THIERRY FAGGIANELLI
Je m’appartiens. Je me suis donné un nom et sculpté un visage dans le miroir. Je me suis dépouillé de mes vieilles habitudes, de ces manies qui constellent la vie des réservés, des indécis, des obsessionnels. Je me suis donné un but et pour l’atteindre, j’en ai changé mille fois.
Je me suis réservé le droit d’échouer même sur une plage de papier abandonné. Je me suis fourvoyé en croyant rentrer chez moi alors que je n’en avais pas. Ma maison n’ayant jamais été ma maison, il manquait en son centre quelque chose qu’on appelait mère, matrice, accueil, amour. Je ne vais pas me plaindre. Je ne vais pas m’endurcir non plus. Je vais agir. Micro agir pour micro entreprendre. Semer les petits cailloux d’une détermination polie, prudente. Douce surtout, érodée par la patience infinie de ceux qui n’ont rien à perdre. Il y a un moment où la violence que l’on s’inflige pour avoir du succès trouve sa propre limite. Un triomphe tardif nous mettrait dans l’embarras. Le temps est venu des cerises et des concessions à la fois à la modernité et au passé. Je ne suis plus pressé d’emporter l’adhésion à tout prix. Je suis devenu un homme d’écoute, de concessions et d’arrangements. Je compose avec ce qui se présente - même par le siège -.
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La difficulté ne me rebute pas plus que l’aisance. Sans mérite, on ne peut s’enorgueillir de rien, on ne ramène point de trophée. On rentre les mains vides et le cœur amer de victoires trop aisément acquises. La facilité est ce Judas qui toujours vous trahit. Ce qu’il vous offre à vous, pour trente deniers, il l’accorde au monde entier pour un centime de plus. Il ne concède jamais une exclusivité Car ici réside le point sensible. La facilité n’offre de résistance à personne. Même les velléitaires ont les moyens de se l’offrir, sans se donner le moindre mal, sans se retirer les mains des poches, les doigts du …. D’ailleurs ceux qui s’ennuient la prennent en passant, au cas où l’envie les reprenne d’en avoir envie. Ainsi vont les choses : avec cette fausse allure qu’on appelle « vitesse » dans un statu quo qui se prétend « mouvement ». Je dirais ébranlement. Celui du train où vont les choses, celui où les silences s’étirent pour côtoyer l’infini et danser avec lui sur un air de vague espoir, d’amour sage, de revenez-y mais tout doucement. Alors oui je m’appartiens mais je partage. Je n’ai plus d’impérieuse nécessité si ce n’est celle de me mettre en retrait des grandes illusions qui me persuadaient que je devais avoir pour être, posséder pour ne pas me faire avoir, conquérir pour que l’on me laisse enfin tranquille. J’opte pour la facilité déconcertante, l’évidence que je ne suis que de passage et que mon tour viendra, que j’essaie d’influencer le
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hasard en tronquant les chiures de mouche qui couvrent les six faces des dés contre des diamants.
© Stocklib / lightfieldstudios
Aujourd’hui est un jour de chance. La bonne nouvelle chasse les nuées et fait reculer les nuages noirs au bord des précipices. J’exulte avec parcimonie. Je « nano » profite. Je ne cherche pas à réveiller le courroux du Dieu des Oubliés et des Modestes que le succès d’un insignifiant comme ma pomme risquerait de froisser. Je m’accroche au sentiment de sécurité que procure l’invisibilité ordinaire, celle de ceux qui n’ont que le panache blanc de leurs réflexions pour se guider dans les ténèbres du monde.
Alors oui, je suis content. Je prends le risque de voir mon cœur pulser, ma joie s’amplifier. Par prudence, je m’emballe dans le papier de soie d’une discrétion millimétrée. Je savoure cet instant de reconnaissance sans trop me griser dans l’illusion, bien au cœur de la bulle céleste qui n’attend qu’un signe pour éclater et me relâcher dans les nuées de l’ordinaire. Je suis prêt pour un bonheur d’une journée, d’une heure, d’une minute. Si vous n’avez rien d’autre, j’accepte même les nanosecondes. Je garde juste le frein à cœur à portée de main. Au cas où je m’emballe, où je succombe à mon tour à une frénésie de poisson juste sorti de l’eau, au cas peu probable où une vague ola m’emporte.
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TE AUTOPORT RAIT SUR R OU
THIERRY FAGGIANELLI
C’est l’histoire d’un homme seul qui fonçait dans la vie. Il roulait vite. Il ne respectait pas les priorités. Il voulait tout, tout de suite, tout le temps. Un jour, il était si pressé qu’il a embrassé un pylône d’Engie avec sa berline allemande, sans l’aide de personne. Il a disjoncté. Il est resté dans le coma plusieurs mois. Heureusement, une infirmière veillait sur son lit médicalisé et un écran de contrôle. Elle avait pris l’habitude de parler avec lui pendant son « sommeil ».
C’était surtout elle qui lui racontait des trucs sur sa vie, ce qu’elle aurait aimé être ou faire si elle avait été une autre personne. Et puis, faute d’événements intéressants, elle s’est mise à raconter des histoires. À force, cela lui a éclairci l’esprit et comme ces monologues lui faisaient du bien et elle a décidé de lâcher les compresses et devenir conteuse. Elle a brûlé sa blouse et pourtant elle n’avait rien en dessous. Malgré l’attachement qu’elle avait pour lui, elle l’a laissé seul avec son respirateur. Deux jours plus tard, elle était engagée dans un festival moyenâgeux pour une tournée des châteaux cathares.
Lui, a fini par sortir de son sommeil profond. On l’a mis sur une chaise, roulante certes, mais moins puissante que sa BMW. Et après une longue rééducation, il a fini par se redres-
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ser, comme l’homme de Darwin. Contre toute attente, il a remarché. Il a pris le temps de regarder les paysages et les gens qui grouillaient à l’intérieur. Petit à petit, en observant de sa fenêtre le jardin, il a enrichi son nuancier de sensations fines, d’émotions, de parfums qui le traversaient sans même qu’il essaie de les arrêter ou les capter. Il s’est aussi intéressé aux insectes, à la danse bourdonnante des abeilles tachées de pollen qui bourdonnaient au-dessus des orangers du Mexique. Avec la lenteur, il a découvert le goût du partage. D’ailleurs, il s’était mis à échanger avec sa voisine de chambre, une étudiante en ergonomie du désir qui avait fait une chute de tension suite à une rupture amoureuse avec un ours brun, un carabin assez poilu. Au début, ils gardaient de la distance entre eux. Ils échangeaient des revues, des banalités sur les soignants, des tuyaux sur la qualité des sédatifs, des hypothèses sur l’avenir. Puis gentiment, ils ont échangé des bribes de regards, des petits morceaux de sentiments. Puis des silences très profonds et excitants. En sortant de l’établissement hospitalier, comme elle aimait beaucoup son dos, - elle aimait se coller à lui nue quand il dormait-, ils se sont mis ensemble et au tandem. On dit qu’après quelques critériums d’introspection, ils adoptèrent le « véloportrait » pour apprendre à s’observer, à sonder leurs abysses et à mieux se connaître. Victime d’un opiniâtre bonheur, ils ne crevèrent pratiquement jamais.
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NUMÉRO 58
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