Rout Lëns 2021 - Bookazine

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ROUT LËNS

N° 1

La chronique d’un ​quartier D’Chronik vun engem Quartier



VIRWUERT

« NOUS N’HÉRITONS PAS DE LA TERRE DE NOS PARENTS, NOUS L’EMPRUNTONS À NOS ENFANTS. » ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY

Cette citation d’Antoine de Saint-Exupéry résonne particulièrement en moi. Nos projets dessinent les paysages pour plusieurs générations, notre responsabilité est donc énorme. Je n’en ressens pas le poids, je perçois plutôt cette responsabilité comme une opportunité de faire bouger les lignes. ERIC LUX Managing Director

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© Philippe Roguet

Le Portique (2020)


VIRWUERT

RENAISSANCE NEIUFANK

F R   Garder une trace de ce qui a existé et documenter la transformation de l’ancienne friche industrielle Rout Lëns en un quartier durable, innovant et exemplaire : telle est la raison d’être de ce « bookazine ».

L U   Eng Spuer vun deem ze behale wat existéiert huet an d’Ëmwandlung vun der eemoleger Industriebrooch Rout Lëns an en nohaltegen, innovativen a virbildleche Quartier ze dokumentéieren – dat ass de Sënn vun dësem Bookazine.

Ce premier numéro explore les singularités de ce quartier en devenir, trait d’union entre l’histoire, le présent et le futur. Un quartier dont l’ADN porte la culture industrielle mais dans un environnement verdoyant et résilient. Les futurs habitants profiteront d’une biodiversité adaptée à l’avenir et aux changements climatiques. Ils pourront être maîtres de leur consommation et y composer un nouveau mode de vie. C’est l’une des valeurs essentielles d’IKO Real Estate : mettre l’humain au cœur de projets qui soient à la fois durables et innovants pour répondre aux défis de la transition énergétique. Or pour poser un regard juste sur demain, il faut aussi pouvoir regarder par-­dessus son épaule avec la même justesse. « Regarde, c’est à cela que ressemblait Rout Lëns, avant. » Dans dix ans, une grand-mère pourra dérouler le fil rouge de l’histoire de la Lentille Terres-Rouges à sa petite fille grâce à ce « bookazine » annuel, la mémoire de son présent.

Dës éischt Ausgab beschäftegt sech mat de Besonneschkeete vun dësem entstoende Quartier, deen d’Geschicht, d’Géigewaart an d’Zukunft matenee verbënnt. E Quartier, deem seng DNA déi industriell Kultur droe wäert, awer an enger grénger, widderstandsfäeger Ëmgéigend. Déi zukünfteg Bewunner wäerte vun der Biodiversitéit profitéieren, déi un d’Zukunft an un de Klimawandel ugepasst ass. Si kënnen esou hire Konsum kontrolléieren an en neie Liewens­ stil entwéckelen. Dat ass ee vun de wichtegste Wäerter vun der IKO Real Estate: de Mënsch an de Mëttelpunkt vun nohaltegen an innovative Projete stellen, fir den Erausfuerderunge vun der Energietransitioun entgéintzekommen. Mee fir e korrekte Bléck an d’Zukunft ze geheien, muss ee mat der selwechter Korrektheet iwwer seng Schëller kucke kënnen. „Kuck, sou huet Rout Lëns fréier ausgesinn.“ An zéng Joer kann eng Groussmamm, dank dësem alljärleche Bookazine, hirer Enkelin d’Geschicht vum Site Rout Lëns, d’Erënnerung un hir Géigewaart, erzielen.

NATHALIE TIPS Responsable du marketing et de la communication du projet Rout Lëns

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SOMMAIRE INHALT

08 ÉVÈNEMENTS

© [s.n.] / HISABC000044V01, Fonds Vue aériennes (collection du CNA), avec l’aimable autorisation d’ArcelorMittal Luxembourg

Les principaux évènements de l’année 2021

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28 ËMDENKEN

10 NODENKEN Une vision d’avenir selon IKO Real Estate 11 « Ce projet est une chance pour nous », Georges Mischo, bourgmestre d’Esch-sur-Alzette 16 Patrimoine, nature et vie sociale, Bernard Reichen, architecte et urbaniste 18 La conception durable comme fil rouge 24

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Préserver l’environnement autour du site 29 Une ferme urbaine au cœur du futur quartier ? 33 Phytolab : faire rejaillir la nature 36


SOMMAIRE

38 MATDENKEN Un quartier pensé pour les besoins de demain 39 Micro-trottoir 42

46 AUSDENKEN Une exposition immersive pour remonter le temps 47 Portfolio de Philippe Roguet 50 Le vernissage 68

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3-23/07 Exposition « Premier Regard » Philippe Roguet Un travail artistique à la chambre photographique : premier opus d’une série d’expositions sur la friche industrielle, présentée à la Konschthal d’Esch-sur-Alzette.

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23/07 Classement des bâtiments par Service des sites et monuments Cinq bâtiments ont bénéficié d’un classement au patrimoine industriel : la Halle des Soufflantes, la Halle des Turbines, le Magasin TT, le Poste d’Aiguillage et le mur d’enceinte.

15/01 – 26/02 Exposition de la maquette La maquette du futur quartier et des panneaux explicatifs sur le projet ont été présentés à l’Escher Infofabrik à Esch-sur-Alzette.

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ÉVÈNEMENTS


11 19/11 Lancement du bookazine annuel Un premier numéro qui retrace les coulisses et les réflexions autour du projet de reconversion de la friche en quartier durable, innovant et exemplaire.

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31/12 Transfert du site assaini d’ArcelorMittal à IKO Real Estate

Ouverture d’un nouvel accès au site

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5-19/11 Exposition « Rout Lëns - Notre Patrimoine : le Socle de Demain » Deuxième exposition photographique de Philippe Roguet qui laisse filtrer la poésie de la friche industrielle en reconversion, à la galerie Schlassgoart à Esch-sur-Alzette.

ÉVÈNEMENTS

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© [s.n.] / HISAAL000168V01, Fonds Vue aériennes (collection du CNA), avec l’aimable autorisation d’ArcelorMittal Luxembourg

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[n’o:dæŋk n] verbe intransitif réfléchir

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UNE VISION D’AVENIR SELON IKO REAL ESTATE Au siège de la société IKO Real Estate, situé au sein de la zone industrielle de Howald, l’urbanisme et l’habitat de demain se réinventent chaque jour. Eric Lux, Managing Director, y développe depuis 25 ans des projets singuliers, comme celui qui a débuté sur la friche industrielle Rout Lëns. Situé au sud-ouest d’Esch-surAlzette, le site s’apprête à accueillir un nouveau quartier résilient et innovant. Tour d’horizon de ce projet de reconversion hors du commun avec Eric Lux et Sandra Huber, Head of Urban Development and Concepts.

Eric Lux et Sandra Huber au vernissage de l’exposition Rout Lëns : Notre patrimoine le socle de demain à la galerie Schlassgoart le 4 novembre 2021

La construction du futur quartier Rout Lëns (Lentille Terres-Rouges) sur les vestiges de l’un des plus anciens sites sidérurgiques de la capitale du Minett constitue un projet ambitieux. Laissé à l’abandon depuis la fin des années 1970, celui-ci s’apprête à connaître une nouvelle épopée ambitieuse, quoique résolument écologique cette fois-ci. Ce sera un « lieu unique », qui dis-

pose d’un « emplacement stratégique, à proximité de la forêt et du quartier Hiehl » se réjouit Eric Lux. « C’est un trait d’union au niveau de la ville d’Esch-sur-Alzette, car nous sommes sur un site charnière qui se situe entre les quartiers historiques de la ville et des quartiers en devenir : d’un côté, Schifflange qui va aussi être réinvesti demain, et de l’autre côté, Belval où depuis vingt ans a commencé cette reconversion industrielle. » Initialement, un seul bâtiment devait être préservé, mais finalement cinq le seront : la Halle des Soufflantes, les portiques de la Möllerei, le Magasin TT, la Halle des Turbines et le Poste d’Aiguillage, tous reconnus pour leur intérêt et leur caractère proprement singulier au regard de l’histoire du patrimoine industriel. Véritable fil rouge de ce projet, chaque bâtiment de cette collection architecturale est relié par ce qu’on a appelé « l’allée de la Culture industrielle ». Une allée qui part du passé pour s’élancer vers l’avenir, autour de laquelle fleuriront des commerces, des services de proximité, des aires de sport ainsi que de nombreux espaces verts.

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© [s.n.] / HISABC000045V01, Fonds Vue aériennes (collection du CNA), avec l’aimable autorisation d’ArcelorMittal Luxembourg

Ce projet de reconversion urbaine, qui s’étend sur une dizaine d’années, est gigantesque. Une première phase de prospection a débuté dès le mois de mai 2017, au cours de laquelle ont été négociées les conditions d’acquisition du terrain et posé un certain nombre de concepts et d’intentions. Suite à cette étape préalable ont été mises en place des modalités de concertation des citoyens. Ce qui a permis de « bien comprendre les enjeux et de bénéficier de l’expertise d’usage des riverains qui sont présents depuis très longtemps sur le site et l’ont vu évoluer », souligne Sandra Huber. Sur la base d’ateliers collaboratifs avec la population eschoise, un programme a été établi, permettant d’engager une équipe de concepteurs de projet, tels l’urbaniste Bernard Reichen ou le bureau d’études Schroeder et Associés. Avec eux, IKO Real Estate a réalisé diverses études opérationnelles – étude des sols, de mobilité, du vent, du bruit, de l’ensoleillement, de la faune et de la flore... S’en-

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suivent en 2019 une phase d’analyse lors de laquelle il a fallu changer le P.A.G. (Plan d’Aménagement Général), qui garantit la constructibilité du site, pour le faire passer d’une zone industrielle à une zone d’habitation mixte, puis la mise en œuvre du chantier entamée l’année dernière avec l’assainissement des sols opéré par ArcelorMittal. Cette année-là a vu aussi la préparation du P.A.P. (Plan d’Aménagement Particulier) en concertation avec la commune d’Esch-sur-Alzette et les ministères concernés, qui est « l’acte fondateur du projet au plan administratif, permettant de poser les fondements du masterplan », ajoute Sandra Huber. Un masterplan (plan directeur d’urbanisme) qui a été présenté au public le 14 novembre 2020 au cours d’une retransmission en direct (consultable sur le site internet www.routlens.lu). Le projet Rout Lëns repose sur une philosophie dont les valeurs ont pris une couleur particulière depuis

la crise sanitaire. L’importance de la culture, le respect de la nature, le choix de matériaux adaptés à chaque usage spécifique, la neutralité en termes de CO2, en constituent les nouveaux standards. L’humain en occupe le centre : « Nous voulons un lieu de vie, de rencontres, d’échanges, précise Eric Lux, dans lequel la personne est au cœur du projet. Du gamin de 5 ans à l’étudiant, avec ou sans moyens, Luxembourgeois ou non, avec différentes formes de logement. Si dans 20 ans, ces personnes résident toujours dans le quartier parce qu’elles s’y sentent bien, alors nous aurons gagné ». Nulle source d’inspiration particulière ici, sinon le « monde dans lequel on vit, ajoute-t-il, et les problèmes urgents auxquels nous sommes confrontés : le réchauffement climatique, le manque de logement, mais aussi la raréfaction de l’eau que connaît le Luxembourg ». Un fait méconnu des Luxembourgeois euxmêmes. En réponse à ce problème de manque d’eau, « nous avons créé notre propre norme », poursuit poursuit l’entrepreneur, qui a grandi dans la région. « En captant l’eau à la source et en faisant en sorte qu’elle reste sur le site, avec des circuits de réutilisation des eaux pluviales, mais aussi des lieux où l’on pourra nettoyer l’eau et la réutiliser. ». Voilà quelques-unes des raisons faisant de Rout Lëns un quartier innovant, durable, participatif et exemplaire. En attendant de découvrir d’autres projets similaires, comme celui de Wooden à Leudelange, vaste immeuble de bureaux en bois qui verra le jour l’année prochaine. La guerre au béton est déclarée !

Vue aérienne de l’ancien site Rout Lëns (date inconnue)

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© Emile Hengen

La Halle des Soufflantes

Eng Visioun fir d’Zukunft laut der IKO Real Estate Um Haaptsëtz vun der Firma IKO Real Estate erfanne sech den Urbanismus an d’Wunne vu muer all Dag nei. Den Eric Lux, Managing Director, huet hei en ongewéinlechen Ëmbauprojet zesumme mam Sandra Huber, Head of Urban Development and Concepts, entwéckelt. Den neien, innovative Quartier Rout Lëns entsteet op der Industriebrooch vun engem vun den eelste Stolwierker vun der Minetter Haaptstad.

LU  Op dëse Projet freet den Eric Lux sech ganz besonneg. Et ass net just en Ëmbauprojet, et bleiwen

am ganze fënnef Gebaier vum ale Site erhalen: d’Halle des soufflantes, d’Saile vun der Möllerei, de Buttek TT, d’Turbinnen­ halen an d’Stellwierk – déi all duerch déi sougenannten „Allée de la Culture industrielle“ verbonne ginn. Am Mee 2017 huet déi éischt Prospektiounssphas ugefaangen, an där de Kafkontrakt vum Grondstéck ausgehandelt an eng Rei vu Konzepter an Usiichte formuléiert goufen. Duerno goufen d’Modalitéite fir d’Récksprooch mat de Bierger ausdiskutéiert. Eng Ekipp vu Projetsconcepteuren, wéi den Urbanist Bernard Reichen an de Bureau d’études Schroeder et Associés, hunn zesumme mat IKO Real Estate Studien iwwer Biedem, Mobili-

téit, Wand, Kaméidi, Sonn, Flora a Fauna duerchgefouert. 2019 huet de Plan d’Aménagement Général misse geännert ginn, dee garantéiert huet, datt de Site Rout Lëns vun engem Industriegebitt an e gemëschtent Wunngebitt ëmgewandelt ka ginn. ArcelorMittal huet de Chantier d’lescht Joer, 2020, mat der Sanéierung vun de Biedem ugefaangen. Dëst Joer gouf och de Plan d’Aménagement Particulier an Ofstëmmung mat der Gemeng Esch-Uelzecht an den zoustännege Ministèren ofgestëmmt. D’Kultur, de Respekt virun der Natur, d’Wiel vun de Materialer an d’CO2-Neutralitéit sinn déi nei Standarden, de Mënsch steet bei dësem Projet am Mëttelpunkt.

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Recyclerie Urban farming Salle polyvalente École Salle de sport Arrêt de bus Services & commerces

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« CE PROJET EST UNE CHANCE POUR NOUS » Georges Mischo, bourgmestre d’Esch-sur-Alzette, regarde résolument vers l’avenir avec le projet Rout Lëns, mené en collaboration avec IKO Real Estate. Car bien plus qu’un nouveau quartier, Rout Lëns est un engagement pour l’avenir, pour une ville plus durable dans laquelle il fera bon vivre. Entretien.

Voilà 40 ans que les friches d’ArcelorMittal étaient à l’abandon, malgré plusieurs projets inaboutis. Qu’est-ce qui vous a incité à franchir le cap ? Georges Mischo (GM) : Le projet Rout Lëns avait été décidé avec le collège échevinal précédent. L’année 2017 a été décisive, et nous avons pris les choses en main avec Eric Lux, Managing Director de IKO Real Estate. Le projet, tel qu’il a été conduit, nous a tout de suite convaincus, dans sa globalité, et notamment parce que l’écologie et la durabilité étaient les véritables pierres angulaires du projet. D’autre part nous savions que nous pouvions leur accorder notre confiance. Le projet a été, dans l’ensemble, très bien accueilli, comment expliquez-vous cet engouement ? GM : Les sites industriels font partie intégrante de la ville et du cœur des habitants. Je pense qu’il y a une certaine fierté de voir leur passé ainsi réhabilité et revalorisé. D’autre part, ce projet s’est fait avec les Eschois. À chacune des étapes, la concertation citoyenne et la communication ont été des atouts majeurs pour bâtir un quartier qui plaise à la fois à la commune, au promoteur et à ses futurs habitants. Même si, bien sûr, on sait pertinemment que l’on ne pourra pas satisfaire tout le monde.

GEORGES MISCHO Bourgmestre d’Esch-sur-Alzette depuis 2017

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La communication est donc la clé de voûte de de Rout Lëns ? GM : En effet. En tant que bourgmestre, c’est le tout premier grand projet que j’ai à mener. Et je suis très heureux qu’il soit conduit en toute transparence avec toutes les parties prenantes. On avait organisé notamment des workshops et un livestreaming où chacun a pu poser les questions qu’il souhaitait. La transparence est vrai-


INTERVIEW GEORGES MISCHO

ment une des clés – si ce n’est la plus grande – de la réussite de ce projet jusqu’à présent. Et ce d’autant plus lorsque l’on collabore avec un promoteur privé. Comment s’est construit le lien entre ce futur quartier et le reste de la ville ? GM : L’idée était non seulement d’optimiser le site, mais, bien plus, de l’englober dans la commune. Pour ce faire, nous avons travaillé en bonne intelligence avec les différents services de la commune (urbanisme, architecte, réseaux, circulation, etc.) et ceux du promoteur. Tout a été mis sur la table et rien n’a été laissé de côté. Je me réjouis vraiment de voir prochainement sortir de terre un tout nouveau quartier vraiment orienté vers le futur et qui sera très joli. Les goûts et les couleurs ça ne se discute pas, mais, à mon avis il s’intègrera vraiment bien dans le quartier Brill, qui l’entoure. En parlant de construction, la durabilité a été mise à l’œuvre dès les premières étapes du chantier, puisque les gravats vont être réutilisés dans le projet. Cela n’aurait pas pu se faire autrement, selon vous ? GM : Complètement. Soyons clair, plus aucun chantier au Luxembourg ou en Europe ne pourra se faire sans aborder les questions d’écologie et de durabilité. Avec tous les problèmes climatiques que nous devons affronter, il faut réfléchir à des projets qui nous aideront à préserver notre futur. Au niveau démographique, le projet est également assorti d’un gros enjeu… GM : Tout à fait. Même si nous sommes la deuxième ville du pays, nous ne disposons que d’une pe-

tite superficie (14 km2). Ce projet est une chance pour nous de pouvoir nous agrandir. Trois sites peuvent encore être développés : Rout Lëns, Esch-Schifflange (la réhabilitation d’une autre friche industrielle en marge de la ville) et le crassier Terres Rouges. Cela nous permettrait d’atteindre 55 000 habitants. Mais c’est là notre limite. Nous ne souhaitons nous agrandir que si nous sommes capables d’offrir une véritable qualité de vie à nos citoyens. Quelle population souhaitez-vous attirer dans ce nouveau quartier ? GM : Essentiellement des gens qui travaillent à Esch, qui aiment y passer leur temps libre, quel que soit leur profil. Notre volonté est vraiment de pouvoir proposer des logements aux personnes qui viennent à Esch tous les jours, afin qu’elles ne perdent plus de temps sur la route. La qualité de vie est l’une de nos préoccupations majeures. D’où le tiers du quartier consacré aux espaces verts… GM : Exactement. Esch-sur-Alzette ne comporte que quelques espaces verts, comme le Gaalgebierg. C’était important pour nous d’offrir à nos habitants davantage d’endroits dans lesquels ils pourront jouer, se relaxer, passer du bon temps. Avant la crise sanitaire, nous étions tous embarqués sur la voie de gauche de l’autoroute à 300 à l’heure. À présent, nous sommes nombreux à vouloir lever le nez, sortir de cette routine boulot-dodo pour prendre le temps de vivre. Nous voulons aider les gens à cela. Justement, les voitures et la mobilité étaient également des enjeux importants… GM : On doit absolument oublier cette idée de posséder une, deux,

trois véhicules par foyer. Ce qui est, hélas, très ancré dans la mentalité luxembourgeoise. Je dis souvent « le bébé préféré d’un Luxembourgeois, c’est sa voiture ! ». (rire) Sérieusement, si nous voulons que les habitants prennent moins souvent leur voiture, nous devons leur proposer des solutions efficaces. Si le temps de trajet en transports en commun ou à vélo est supérieur à celui en voiture, cela ne fonctionnera pas. Aussi, pour ce faire, nous avons pensé la mobilité de façon globale avec des lignes de transports en commun équipées d’abribus, des emplacements pour les vélos électriques, des bornes pour recharger les voitures, des places de covoiturage et, bien sûr, une piste cyclable. Nous n’avons pas non plus oublié les piétons. C’est aussi une forme de mobilité. Je me réjouis également que le promoteur n’ait prévu qu’entre 50 et 60 % de places de stationnement pour 3 200 habitants attendus. Cela va de pair avec notre souhait d’inciter la population à moins prendre sa voiture. C’est également dans cette optique que le quartier a été pensé, pour offrir toutes les commodités à ses habitants… GM : Exactement. Hors de question de valider la construction d’un hypermarché à la surface démesurée par exemple. Nous étions d’accord avec le promoteur sur ce point. Notre souhait est de créer une sorte de « vie de village » à l’intérieur du quartier, les habitants pourraient y vivre presque en autarcie. Ils disposeront de commerces essentiels, d’une école primaire. Encore une fois tout a été pensé pour le bien-être des futurs habitants de Rout Lëns.

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PATRIMOINE, NATURE ET VIE SOCIALE Quelles réflexions ont nourri le projet Rout Lëns ? Entretien avec l’archi­tecte et urbaniste Bernard Reichen, dont l’agence Reichen Robert & Associés est en charge du concept urbain et de la maîtrise d’œuvre urbaine des espaces publics pour ce nouveau quartier.

En quoi le quartier Rout Lëns est-il un projet si singulier ? Bernard Reichen (BR) : Ce territoire a une histoire et il est en mutation. Pour organiser cette mutation, c’est un peu comme la cuisine du marché, si vous me permettez l’expression : on s’adapte à ce que l’on trouve sur place. Notre volonté au départ, c’était de rechercher le génie de ce lieu et d’en faire la racine du projet. La solution n’apparaît pas tout de suite. Le but, c’est le chemin ! Hier, les bâtiments historiques étaient reliés par un process industriel et demain ils seront reliés par un process urbain : c’est ainsi que l’allée de la Culture industrielle, grande allée piétonne qui relie ces bâtiments, est devenue le fil conducteur du projet. Quels sont les principes fondateurs de ce quartier en devenir ? BR : Autour de cette allée, ses fondements sont le patrimoine, la nature et la vie sociale. La renaturation et la reconversion du patrimoine consti-

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tuent un seul projet. Ces territoires de l’industrie étaient, par définition, des territoires très minéraux, à part peutêtre un arbre près du bureau de la direction, mais c’est tout. On regarde aujourd’hui un tel endroit avec émotion, mais à l’époque lorsqu’il y avait la pollution, le bruit, le feu, c’était assez dantesque, ce n’étaient pas des territoires aimables. Les gens vivaient dans des conditions difficiles, même si ce qu’ils retiennent aujourd’hui c’est la solidarité, la convivialité, etc. Le paradoxe sur un site industriel abandonné, c’est qu’il s’anime à nouveau grâce à la nature qui y reprend ses droits. C’est une nature résurgente, spontanée. La nature repousse parce qu’on cesse de la mettre sous cloche. La question était donc de construire un paysage avec une nature dense, associée avec l’allée de la Culture industrielle. Ce n’est pas notre bureau qui s’occupera de cette renaturation, mais l’agence Phytolab. Nous souhaitons utiliser les espèces locales de cette nature résurgente pour créer des îlots de fraîcheur

adaptés au réchauffement climatique, tout en ayant une nature qui évoque le voyage, en référence aux jardins d’acclimatation des XIXe et XXe siècles, puisqu’à Esch, 110 nationalités cohabitent. Les bâtiments historiques seront des lieux de vie sociale avec des fonctions qui seront encore affinées : ce seront des lieux de rencontre, de pratique sportive qui devraient aussi inclure une microbrasserie pour cultiver le houblon sur place et y produire de la bière. La notion de terre nourricière est importante aussi. Sur l’extrémité du terrain qui est en territoire français, IKO étudie la possibilité de créer un vrai jardin nourricier qui rejoindrait la tradition locale des jardins ouvriers. Comment trouver le juste milieu entre reconversion et sauvegarde du patrimoine ? BR : La question se pose différemment selon que l’on est devant une architecture de pierre du XVIIIe siècle ou devant une halle industrielle. La


INTERVIEW BERNARD REICHEN

bernard reichen

Bernard Reichen a développé le concept de « villes territoires », en intégrant les logiques des nouvelles mobilités urbaines. Il a reçu, en 2005, le Grand Prix National de l’Urbanisme. Membre de l’Académie d’Architecture, il est officier des Arts et des Lettres et chevalier de l’Ordre national de la Légion d’honneur.

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© Patrick Garçon_Nantes Métropole

Diplômé de l’École Spéciale en 1965, Bernard Reichen crée en 1973, avec Philippe Robert, l’agence Reichen et Robert. Avec les transformations de la filature Le Blan à Lille et de la Grande Halle de la Villette à Paris, l’agence acquiert une réputation internationale dans les domaines de la reconversion des ensembles industriels. Depuis l’ancien siège de Nestlé installé dans la chocolaterie Menier jusqu’aux réalisations récentes de la cité du cinéma à Saint Denis ou les Grands Moulins de Pantin, cette dynamique du réemploi a été développée pour mieux intégrer les nouvelles hypothèses de développement durable : le « réemploi » des territoires, des bâtiments, des matériaux et des matières. À quelques kilomètres d’Esch-sur-Alzette, la revalorisation du haut-fourneau U4 à Uckange (France), en 2007, en un lieu de culture et de mémoire industrielles est aussi l’œuvre de l’agence, devenue Reichen et Robert & Associés en 2004.

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« CE QUE NOUS PRODUISONS, C’EST UNE VILLE À LA CARTE QUE CHACUN VA COMPOSER CHAQUE JOUR. » halle est du ressort de ce que j’appelle l’architecture répétitive. Elle se lit un peu comme une musique répétitive. Toutes deux fonctionnent sur les mêmes ressorts : des motifs, des principes de réitération, des rythmes et des déformations. Ce sont des espaces qui accueillent des fonctions. Ils sont le symbole de l’appropriation, de la création, des nouvelles technologies du coworking etc. Ce sont des bâtiments sans âge qui incarnent un imaginaire de liberté. Il suffit de se les approprier dans le respect de la charte de Venise : laisser lisible chaque période d’une histoire, dissocier les structures anciennes et nouvelles et pouvoir ainsi revenir à un état d’origine. Celui qui a le mieux exprimé cette idée c’est Antonioni, qui était architecte avant d’être réalisateur de cinéma. Il expliquait que l’histoire avait finalement une importance relative. Le film commençait quand il avait trouvé un ensemble de lieux évocateurs qu’il allait pouvoir relier les uns aux autres par l’histoire. Comment dessiner aujourd’hui les besoins de demain ? BR : Ça, c’est le grand problème aujourd’hui ! Ce n’est pas nous qui décidons des mutations, mais les mutations qui décident pour nous. La révolution environnementalo-nu-

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mérique est une mutation sans précédent. Nous rentrons dans un nouveau récit humain et urbain que nous devons accompagner avec humilité dans tous les domaines de la vie collective mais aussi du logement. Paul Ricoeur, qui est un philosophe des récits, citait saint Augustin « le présent du passé c’est la mémoire, le présent du présent c’est l’action, le présent du futur c’est l’attente ». L’action aujourd’hui se situe dans un système marchand alors que le projet se situe entre la mémoire et l’attente. Il faut en faire un seul objet, pour imaginer des espaces du futur conçus autour de valeurs universelles : la renaturation, le patrimoine ou la mobilité. Je constate aujourd’hui que les villes les plus attractives sont celles qui ont su allier le temps réel des nouvelles technologies, qui mettent les individus dans un tourbillon d’accélération, avec la vitesse lente de la ville symbolisée par les tramways et les BHNS. Toute la ville s’organise ainsi autour d’une vitesse pivot de 20 km/h. La question n’est plus la vitesse physique symbolisée par l’automobile mais la maîtrise du temps quotidien. Ces villes ont permis de resynchroniser l’espace et le temps. Rout Lëns avec le BHNS*, le tram rapide vers Luxembourg ville et le Vëlo Expresswëe sont au cœur d’un tel dispositif. Les habitants auront à leur


INTERVIEW BERNARD REICHEN

Perspective de la réhabilitation de la Halle des Turbines en tiers-lieu

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disposition une variété de modes de déplacement utilisables gratuitement à leur convenance. Ce que nous produisons, c’est une sorte de ville à la carte que chacun va composer chaque jour par son imaginaire, ses déplacements, ses besoins et ses pratiques. L’allée de la Culture industrielle, entièrement piétonne, sera un espace de transition entre la sphère privée et le territoire de la vie quotidienne. Nous avons pris conscience aujourd’hui que l’urbanisme ne se joue pas seulement dans une zone, de façon statique et localisée, mais dans le champ large d’un urbanisme d’interaction. Le sociologue et philosophe Hartmut Rosa a théorisé ces interactions dans le concept de résonance au monde, aux autres, ou transcendantales. C’est la recherche d’un chemin vers un état de bien-

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être et c’est un mode de pensée qui s’installe maintenant dans le champ de l’action urbaine. Pour revenir à la dimension physique du projet, vous évoquez une construction en strates : pouvez-vous expliquer en quoi cela consiste ? BR : À côté des systèmes fonctionnels qui comprennent des activités tertiaires et des commerces, nous avons envisagé la partie essentiellement résidentielle en strates horizontales, en commençant par une ville basse avec un bâtiment sur pilotis, assez aéré, comprenant trois étages et une toiture fortement végétalisée. Puis en seconde strate, un autre bâti­ment de trois à quatre étages et en troisième strate, deux tours, ou totems, de 70 mètres de hauteur. L’une sera, si

Vue 3D du futur quartier Rout Lëns, depuis les ateliers mécaniques

* Bus à Haut Niveau de Service, qui circule en site propre et assure un transport rapide et prioritaire.


INTERVIEW BERNARD REICHEN

Simulation 3D de la piste cyclable nationale traversant le quartier Rout Lëns

Redessiner le passé

possible en fonction de la réglementation, en partie en bois et l’autre sera construite en bordure des étangs, en écho aux hauts fourneaux de Belval et à la tour rouge construite par l’architecte Vasconi. L’aciérie montait elle aussi jusqu’à 70 mètres de hauteur. La Lentille avec son usine et ses cheminées évoquait la forme d’un bateau s’enfonçant vers la ville d’Esch et nous voulions établir une résonance avec cela. La vue sera toujours différente selon l’endroit d’où l’on regardera le quartier. Le projet est vu différemment de l’intérieur et de l’extérieur. Comment situer la place de l’architecture dans ce processus urbain ? BR : Elle est considérable ! Donner forme au cadre de la vie collective est un préalable qui ne dit pas encore le contenu de la sphère privée.

La ville stratifiée, telle que l’on vient de l’évoquer, est une première passerelle entre ce qui est vu, en l’occurrence la silhouette urbaine, et ce que l’on voit depuis les bâtiments, qui nous parle déjà des modes d’habiter. Cette réflexion va se décliner ensuite d’une autre façon dans l’habitabilité ou le type de logement. On parle aussi aujourd’hui de la pièce en plus où l’on pourrait pratiquer le télétravail, loger un enfant devenu grand ou une personne âgée. Les architectes qui vont intervenir dans le projet et gérer ces questions disposent de leur propre champ de création et d’action au plus près des habitants. C’est la diversité des fonctions, des formes, des imaginaires et des écritures architecturales qui va enrichir le projet. L’urbanisme n’est pas la ville, ce n’est qu’un chemin qui y conduit.

En tant que collaborateur au sein l’agence Reichen Robert & Associés, Lawrence Hutchison est en contact quotidien avec les équipes d’IKO Real Estate. Il intervient sur les diffé­ rents concepts urbanistiques, l’éla­ boration des futurs espaces publics, mais aussi la coordination des projets architecturaux de chacun des lots. Il aura notamment pour mission de redessiner l’architecture du Magasin TT pour le transformer en Maison du projet, en respectant son patrimoine classé. Formé à Paris Malaquais, l’urbaniste britannique intervient, depuis plus de 20 ans, sur divers projets en France, au RoyaumeUni, en Arabie Saoudite ou en Corée du Sud en tant qu’architecte. Son parcours international et sa passion pour l’urbanisme transversal se mettent aujourd’hui au service de Roüt Lens.

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LA CONCEPTION DURABLE COMME FIL ROUGE Le projet Rout Lëns s’inscrit dans une démarche novatrice à tous les niveaux : biodiversité, solutions énergétiques ou quotidien des habitants. Delphine Desgurse, Innovation Director, et Aline Picard, Senior Project Manager chez IKO Real Estate, expliquent les principaux aspects innovants du futur quartier eschois.

DELPHINE DESGURSE Innovation Director chez IKO Real Estate ALINE PICARD Senior Project Manager chez IKO Real Estate

Le projet Rout Lëns se démarque à tous points de vue de la plupart des autres projets. L’innovation est présente à tous les niveaux : dans sa conception bas carbone, tant dans la construction que dans l’efficience énergétique des bâtiments, dans la gestion des ressources (énergie, eau, déchets), mais aussi en termes de mobilité apaisée, ainsi que dans sa capacité à créer du lien social au cœur d’un nouveau quartier résidentiel. Enfin, innover c’est aussi re-

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tourner à l’essentiel : la nature tient une place prépondérante, vitale, à Rout Lëns, afin d’y préserver la biodiversité, essentielle à notre équilibre.

Bas carbone et économie circulaire Rout Lëns se veut exemplaire en matière d’économie d’énergie. Cette approche prend en considération plusieurs aspects : l’économie circulaire avec la réutilisation des matériaux inertes sur place comme

les bétons issus des anciennes fondations qui sont concassés et réutilisés en sous-couche routière ou bien comme granulats (qui servent entre autres à la confection du béton), au lieu d’en importer des tonnes par camions. « Nous réutilisons tout ce que nous pouvons. Le site s’étend sur 10,5 hectares, une superficie suffisamment vaste pour envisager un concept énergétique propre au quartier et avoir une approche d’économie circulaire »,


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Le quartier sera conçu pour être alimenté en énergies renouvelables. Le chauffage sera fourni en grande partie par la géothermie* qui assurera également le « rafraîchissement » – il ne s’agit pas de climatisation – pour les bâtiments comme la résidence seniors, les restaurants, les commerces, bureaux, etc. Le principe ? « En été, cela consiste à faire circuler l’air chaud dans le sol, qui a une température constante de 10 à 12°C. L’air est ensuite réinjecté dans le bâtiment, grâce à des pompes à chaleur installées en sous-sol, ce qui permet de réduire la température d’environ 3°C », détaille Aline Picard. Pour le chauffage, la création d’une centrale de combustion de biomasse (pellets) est aussi à l’étude afin de subvenir, aux pics de besoin du quartier en énergie, particulièrement en hiver. Pour la consommation d’électricité, des panneaux photovoltaïques fourniront environ 10 % des besoins.

Gestion de l’eau L’innovation est également présente dans la gestion de l’eau : celle des douches sera recyclée sur place, au sein des bâtiments, pour être réutilisée dans les toilettes, au lieu d’employer de l’eau potable. Là aussi, une économie d’énergie est envisagée : la chaleur résiduelle au niveau de l’évacuation de l’eau de la douche pourra être réutilisée dans le système de chauffage de l’eau. L’eau de pluie sera quant à elle collectée pour l’arrosage des espaces verts et via des noues d’infiltration, ce qui permet un retour progressif de cette eau à la nappe phréatique, prévenant les risques d’inondations.

© Henri Goergen

explique Aline Picard. Le bois et le béton bas carbone qui serviront à la construction seront autant que possible favorisés, afin de respecter cette démarche.

Gestion des déchets En toute logique, la gestion des déchets devra s’inscrire dans cette vision d’économie circulaire et réclamera donc l’adhésion des futurs habitants du quartier. « Rout Lëns porte en lui les défis de l’économie circulaire favorisant la réutilisation des déchets. Des points d’apports volontaires connectés permettront de collecter de façon sélective les déchets ménagers et une recyclerie de quartier permettra de récupérer sur place les déchets recyclables et de favoriser des actions de réutilisation », énumère Delphine Desgurse. « Un travail de sensibilisation à l’écoresponsabilité sera effectué auprès des habitants, des outils numériques les y aideront en appui avec les actions de la commune en ce sens. »

Mobilité Toujours dans la logique de transition écologique, la mobilité durable

ÉCONOMIE CIRCULAIRE Les bétons issus des anciennes fondations sont concassés et réutilisés en souscouche routière ou comme granulats.

* La géothermie est l’étude et l’utilisation de l’énergie accumulée dans le sol sous forme de chaleur. Cette énergie peut servir à chauffer des bâtiments, directement ou avec une pompe à chaleur.

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sera privilégiée dans le quartier, qui n’est pas structuré par la circulation automobile. « Nous avons pris en compte le fait que Rout Lëns se situe à moins de dix minutes à pied de la gare d’Esch-sur-Alzette et sera desservi par le futur BHNS (Bus à Haut Niveau de Service), qui assurera un

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passage toutes les quatre minutes et se rendra à Luxembourg-­Ville en quinze minutes. Des parkings seront aménagés en sous-sol, là où se trouvaient les poches de pollution les plus importantes, afin de limiter l’impact des travaux sur les espaces naturels », souligne Aline Picard. Les places dans

deux parkings seront mutualisées : occupées le jour par le véhicule d’un commerçant, par exemple, et la nuit par celui d’un habitant, afin de mieux optimiser l’espace. Un « hub d’écomobilité » sera créé, avec la possibilité d’utiliser des vélos et des véhicules en autopartage.


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Nohalteg Konzeptioun als roude Fuedem LU   De Projet Rout Lëns ass Deel vun enger innovativer Demarche op all Niveau: Biodiversitéit, Energieléisungen oder Alldag vun de Bewunner. D’Delphine Desgurse, Innovation Director, an d’Aline Picard, Senior Project Manager bei IKO Real Estate, erklären déi wichtegst Innovatiounsaspekter vum zukünftegen Escher Quartier.

Le site s’étend sur 10,5 hectares, une superficie suffi­ samment vaste pour envisager un concept énergétique propre (photo datant de septembre 2020).

Rout Lëns ass e Virbild fir d’Spuere vun Energie. Dës Approche berécksiichtegt d’Kreeslafwirtschaft, ausserdeem gëtt grousse Wäert op den Erhalt vun der Biodiversitéit geluegt. Holz a Bëton wäerten esou wäit et geet aus nohalteger Hierkonft stamen, fir déi kuelestoffaarm Demarche ze respektéieren. De Quartier gëtt fir erneierbar Energien ausgeluecht. Fotovoltaik-Module sollen ongeféier 10 % vum Stroumbedarf decken an zum gréissten Deel soll mat Äerd­ wäermt geheizt a gekillt ginn. Aplaz vum Drénkwaasser soll traitéiert Duschwaasser fir d’Toilette benotzt ginn. Fir Energie ze spueren, kann d’Rescht­ wäermt vum Duschwaasser an de Waarmwaassersystem zréckgefouert ginn. Fir d’Bewässerung vun Anlage gëtt Reewaasser gesammelt, wat e progessiivt Zréckféieren an d’Grondwaasser erméiglecht. D’Gestioun vum Offall erfuerdert d’Ënner­ stëtzung vun den zukünftege Bewunner. Et solle fräiwëlleg Sammelstelle mat Sortéier­anlagen ugeluecht ginn, souzesoe Recyling­anlagen um Site. Fir den Impakt vun der Mobilitéit op den natierleche Liewensraum ze begrenzen, ginn Déifgaragen ageriicht. Déi sollen daagsiwwer vun de Geschäftsleit an nuets vun den Awunner genotzt ginn. En „Hub d’écomobilité“ soll et erméiglechen, Vëloen oder Fuergemeinschaften ze notzen.

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© Emile Hengen

[ mdæŋk n] verbe intransitif changer sa façon de voir les choses

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PRÉSERVER L’ENVIRONNEMENT AUTOUR DU SITE

Luxplan est le bureau d’ingénieurs-­ conseils chargé de rédiger le rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement (EIE) pour le projet Rout Lëns. Ce document, obligatoire pour démarrer le projet de réhabilitation de la friche, a pour objectif d’identifier, de décrire et d’évaluer de manière transparente et objective, à un stade précoce de la planification, les effets environ­nementaux notables d’un tel projet sur l’homme, la faune et la flore, le sol, l’eau, l’air, le climat, le paysage, le patrimoine culturel ainsi que l’interaction de ces facteurs. Obligatoire depuis la loi du 15 mai 2018, l’EIE constitue une démarche d’évaluation harmonisée au niveau de l’Union européenne. Une fois rédigé, ce document est examiné par le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, puis mis à disposition du public pour information. La procédure d’instruction se finalise par la

© Philippe Roguet

Document indispensable à la réhabilitation du site Rout Lëns : le rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement (EIE). Un rapport rédigé par les équipes du bureau d’ingénieurs-conseils Luxplan S.A. de L.S.C. Engineer­ ing Group, ayant pour but d’étudier les effets environ­ nementaux d’un tel projet.

rédaction d’une conclusion motivée de la part de l’autorité compétente. Chez L.S.C. Engineering Group, Caterina Pittari et Joséphine Klein ont pris le dossier à bras le corps. « C’est une bible que nous avons dû rédiger, un énorme dossier qui représente un travail de longue haleine. Celui-ci a démarré en 2017, avec déjà une autre équipe et à la demande d’ArcelorMittal, ancien propriétaire des lieux, qui voulait un rapport d’analyse du sol. Nous, nous avons été missionnées par IKO Real Estate et nous nous sommes basées sur des études fournies par leurs soins pour établir notre argumentaire et analyser les différentes interactions », déclarent les deux ingénieures. À l’heure actuelle, la rédaction de l’EIE est terminée, le dossier final ayant été envoyé en décembre 2020 au ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable. « Il nous a été

RAPPORT EIE L’objectif est d'identifier les effets environnementaux notables du projet Rout Lëns.

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demandé des informations supplémentaires sur des points bien précis en avril, nous avons donc remis une copie approfondie mi-septembre et maintenant nous attendons la suite. Dès que la conclusion motivée sera rédigée par le ministère, notre mission s’arrêtera. Le projet pourra démarrer, mais attention, l’EIE ne dispense pas des autorisations futures, indispensables pour tout ce qui sera implanté sur le site », précisent-elles.

L’humain, le paysage et le patrimoine culturel Pour rédiger ce rapport, plusieurs thèmes très vastes ont été étudiés à la loupe par les deux expertes. « Dans un premier temps, nous avons analysé tout ce qui concerne l’humain et ses biens protégés : sa santé, son bienêtre, le bruit, le trafic engendré, mais aussi la qualité de l’air, la pollution, les loisirs, les vestiges potentiels de la guerre, tout comme la problématique

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du voisinage, puisqu’on est dans une zone transfrontalière. La mission était de récolter toutes les informations puis d’expliquer ce que le projet aurait comme impacts, aussi bien positifs que négatifs, sur l’existant », témoigne Caterina Pittari. Vient ensuite le volet paysager, où les questions d’eau potable, d’eaux pluviales et usées ont été traitées, au même titre que l’évacuation des eaux souterraines. « La question du sol, souvent pollué sur ce type de zones, est importante : que va-til devenir ? Quels sont les risques ? Comment l’assainir ? On analyse les données puis on propose des solutions à mettre en œuvre », énumère l’ingénieure diplômée en Génie de l’Environnement et spécialisée dans la gestion des risques professionnels, notamment dans le secteur de l’industrie. S’ensuit l’étude du volet climat et énergie, afin de voir si le projet est compatible avec les problématiques du réchauffement climatique et des

© Luxplan S.A.

© Luxplan S.A.

LE MAGASIN TT Construit au XXe siècle, le magasin fournissait tout type de matériel, à la fois pour l’exploitation et pour les employés. Le bâtiment accueillera la Maison du Projet en 2022.

ORCHIS PYRAMIDAL Une variété d’orchidée protégée


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© Luxplan S.A.

LÉZARD Plus de 900 reptiles ont été déplacés vers un nouvel habitat aménagé à 200 m du site.

énergies renouvelables, puis vient le volet patrimoine et culture, très important au niveau des friches industrielles. « Il y a à l’heure actuelle encore des bâtiments qui sont en cours de classement », informe Caterina Pittari.

Préserver la nature avant tout Sa collègue Joséphine Klein, diplômée en sciences environnementales et spécialisée dans la biodiversité et l’écologie, s’est quant à elle principalement penchée sur la question de la nature. « Avec le Bureau d’études Milvus, nous avons fait un état des lieux du site. On y a trouvé par exemple une espèce d’orchidées, l’Orchis pyramidal qui est une variété protégée, mais aussi beaucoup de chauves-souris qui dorment dans les bâtiments abandonnés, énormément d’ovipares, comme des serpents ou des lézards qui vivent là. On

ne peut pas détruire tout ça, il faut d’abord proposer entre autres des mesures compensatoires, des habitats alternatifs », explique la jeune femme qui démarre sa carrière avec ce projet d’EIE. En parallèle de la rédaction du rapport, cette dernière a également été active sur le terrain. « Nous avons commencé par faire une cartographie des biotopes et des habitats. Luxplan S.A. s’est déplacé entre trente et quarante fois sur le terrain l’an passé, entre mai et septembre, et environ cinquante fois cette année, afin de capturer pas moins de 900 reptiles pour les déplacer. Un nouvel habitat a été aménagé à 200 m du site ; on y a créé des installations optimales pour que ces animaux puissent y vivre. Nous avons également installé des nichoirs pour les chauves-souris et planté des vergers pour les oiseaux qui devront bientôt trouver de nouveaux abris ».

Ce premier EIE, réalisé pour une friche industrielle de cette ampleur au Luxembourg, constitue donc un travail titanesque. « C’est le deuxième projet du pays de cette envergure, après le quartier d’Hollerich, à avoir fait l’objet d’une telle étude », indiquent les ingénieures. « Les friches industrielles sont une réelle préoccupation à l’heure actuelle, dans la mesure où il y a beaucoup d’endroits, notamment dans le sud du Luxembourg et en France, où des industries sont parties, laissant derrière elles leurs vestiges. Ce sont généralement de grandes surfaces vacantes qui génèrent de la pollution. L’objectif n'est maintenant pas seulement de dépolluer, et de moins dénaturer l’environnement mais plutôt de réhabiliter ces friches pour les faire revivre, histoire aussi d’éviter d’empiéter sur les terres agricoles », constatent les deux expertes.

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Erhale vun der Ëmwelt ronderëm de Site

Dëst Dokument ass obligatoresch fir d’Aleede vu Broochflächesanéierungen an ass fir d’Caterina Pittari an d’Joséphine Klein vun der L.S.C. Engineering Group wéi eng Bibel. Et soll d’Ëmweltauswierkungen op de Mënsch, Flora a Fauna, Buedem, Waasser, Loft, Klima, Landschaft an de Patrimoine am Zesummespill mat dëse Facteuren ermëttelen a bewäerten. De Projet huet 2017 op Wonsch vum eemolege Besëtzer vum Site, ArcelorMittal, ugefaang. Déi zwou Frae goufe vun der IKO Real Estate engagéiert an hu sech op deenen hir Etude baséiert fir hir Analys ze erstellen. Si hu beim verfaasse vum Bericht eng Rei Theemen ënnert d’Lupp geholl. Fir d’éischt hu si alles analyséiert, wat mat de Liewensqualitéite vum Mënsch ze dinn huet: Gesondheet, Wuelbefannen, Kaméidi, Verkéier, Loftqualitéit, Ëmweltverschmotzung, Fräizäit, méiglech Krichsiwwerreschter an Noperschaftsproblematik, well et e Grenzgebitt ass. D’Missioun war, d’Auswierkungen, déi de Projet op dat Bestoend huet, ze erklären. Duerno am Beräich Landschaft gouf Drénk-, Reen- an Ofwaasser sou wéi d’Evakuatioun vum Grondwaasser behandelt. Eng Etude iwwer Klima an Energie soll versécheren, datt de Projet kompatibel mat der Thematik Klimaerwärmung an erneierbar Energien ass. De Volet Patrimoine ass fir d’Industriebrooch och vu grousser Bedeitung. Zesumme mam Bureau d’études Milvus, hunn déi zwou Fraen eng Bestandsopnam vum Site gemaach. Hei hu si z. B. eng geschützten Orchideeënzort a vill Déiere fonnt, fir déi si dunn no neie Liewensraim gesicht hunn. Luxplan S.A. war déi lescht zwee Jore ronn 50 Mol ënnerwee, fir 900 Reptilien ze deplacéieren. 200 Meter vum Site ewech gouf en neie Liewensraum fir vill Déiere geschaf. Deenen zwou Fraen hiert Zil besteet doran, d’Ëmwelt ze schounen, mee och d’Broochlandschafte rëm zum Liewen ze erwächen.

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© Merci Raymond

LU   Bericht iwwer d’Évaluation des incidences sur l’environnement (EIE), erstallt vum Ingenieursbüro Luxplan S.A. vun der L.S.C. Engineering Group, mam Zil d’Ëmweltauswierkunge vun esou engem Projet ze ënnersichen.


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UNE FERME URBAINE AU CŒUR DU FUTUR QUARTIER ? Un projet d’urban farming devrait voir le jour sur le site de Rout Lëns, grâce au collectif Merci Raymond qui entend y installer un potager permettant de nourrir une centaine de foyers.

En employant différentes actions permettant d’exploiter des terrains à l’abandon pour créer des potagers communautaires, l’urban farming permet l’intégration d’espaces comestibles et productifs en ville sous différentes formes : paysages comestibles, potagers communautaires, fermes urbaines… C’est aussi et surtout la spécialité de Merci Raymond, startup parisienne rassemblant jardiniers et créatifs déterminés à redonner place au végétal dans le milieu urbain. « Nous avons pris conscience des enjeux des villes de demain et nous avons développé comme réponse un écosystème fertile, dont la forme est modulable, histoire de mieux s’insérer dans les zones urbaines et périurbaines. Avec la construction d’un tel écosystème, notre volonté première est d’engager les communautés autour de la nature », confie Hugo Meunier, CEO et co-fondateur de Merci Raymond. L’idée pour

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© Microhumus

Échantillons de légumes poussant dans les prélèvements de terre du futur potager urbain du site Rout Lëns

la friche industrielle de Rout Lëns ? « Créer un espace de production à destination des habitants du quartier. Autrement dit, cultiver un terrain afin de nourrir une partie de la population. Cet endroit aura également une vocation pédagogique, puisqu’on pourra y organiser des ateliers et formations ».

Des fruits et légumes en permaculture Une parcelle de 6 000 m2 devrait ainsi être transformée en potager avec l’ambition de nourrir une centaine de foyers au sein du quartier. « Nous voulons nous adapter au climat et assurer une rotation au niveau des cultures de légumes et de fruits, afin qu’il y ait quelque chose à récolter tout au long de l’année, quelle que soit la saison. » Pour que ce projet maraîcher reste écologique et durable, le jardin respectera la technique de la permaculture. Celle-ci vise à créer des écosystèmes respectant la biodiversité, en s’inspi-

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rant directement de la nature et de son fonctionnement. « L’objectif est de mettre en place un écosystème productif résistant et autonome, en associant plu­­sieurs espèces vivantes spécifiques », poursuit Hugo Meunier. Si l’idée est d’abord de créer un vrai lieu de vie au sein du quartier et d’offrir aux habitants leur propre espace de production, ce projet d’urban farming devrait aussi permettre de valoriser Esch-sur-Alzette à travers des produits, comme du ketchup ou de la bière – grâce au houblon qui y sera implanté - made in Rout Lëns. Mais avant de démarrer le maraîchage, nous devons vérifier l’innocuité du sol. Grâce à l’expertise et au savoir-faire de l’entreprise Microhumus, une expérimentation a été menée quant à sa réhabilitation et son réemploi possible.

Microhumus : stabiliser la pollution du sol L’entreprise lorraine Microhumus, spécialisée dans l’ingénierie des sols

Récolte de radis cultivés dans la terre du futur quartier


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et le phytomanagement*, connaît bien la problématique des sites sidérurgiques et de la restauration agronomique des sols dégradés. « Notre objectif est de redonner de la valeur à la friche industrielle en stabilisant la pollution sur le site grâce à la phytotechnologie, autrement dit aux végétaux », explique Gaylord Machinet, son directeur technique. Après l’étude du site Rout Lëns, les experts ont constaté qu’en surface, une couche de deux mètres d’épaisseur de terre comprenait des matériaux sidérurgiques contaminés. « Pour savoir s’il était possible de maraîcher cette terre, nous avons fait un trou de plusieurs mètres de profondeur pour voir si le sol en dessous de cette couche de matériaux avait lui aussi été contaminé. Par chance, la pollution n’a pas impacté la terre inférieure ». Deux solutions permettraient alors d’assainir la terre pour la rendre cultivable. Soit enlever les 2 m de laitiers sidérurgiques**, soit les recouvrir avec suffisamment de terre pour que les racines des fruits et légumes qui y seront plantés n’atteignent pas les couches de laitiers. « La faisabilité économique jouera dans la balance. Quoi qu’il en soit, avec un ajout de 80 cm de terre, il sera tout à fait possible de créer un potager. Je déconseillerai juste les arbres fruitiers, dont les racines descendent plus profond dans le sol », poursuit le directeur technique. En attendant, Microhumus a prélevé plusieurs échantillons de terre sur le terrain destiné à l’urban farming pour en faire des essais de culture en serre. Des agronomes ont suivi leur croissance et analysé en laboratoire la qualité des récoltes, en étudiant notamment tous les paramètres de toxicité possibles. « Les

Excavations destinées à l'analyse de contamination du sol

produits cultivés se sont révélés sains et comestibles. La prochaine étape est l’essai terrain, sur deux parcelles pilotes de deux fois 100 m2 », annonce Gaylord Machinet. Si l’analyse des légumes est concluante et qu’il n’y a aucun signe de toxicité, Merci Raymond pourra donner vie à son projet d’urban farming.

* Ensemble de techniques utilisant les végétaux et visant la protection et la restauration des écosystèmes. ** Les laitiers sidérurgiques sont des matières minérales artificielles produites par l’industrie du fer et de l’acier. Ils constituent un matériau alternatif, utilisé principalement comme granulats ou en sous-couche routière dans les travaux publics.

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PHYTOLAB : FAIRE REJAILLIR LA NATURE Phytolab est en charge du volet paysager du projet de réhabilitation de Rout Lëns. Ambitions ? Intégrer le lieu dans la nature qui l’entoure tout en tenant compte de son cadre géographique et culturel, mais aussi du réchauffement climatique.

Le bureau nantais Phytolab travaille sur de nombreux projets de renaturation d’espaces naturels et de réhabilitation de sites à reconvertir, notamment de friches, mais aussi d’aménagements plus classiques où la dimension du vivant est prédominante. « Nous avons commencé à étudier le site Rout Lëns il y a un an et demi. L’idée était de donner une résurgence au vivant sur ce sol mutilé et dès le début, nous avons décelé une réelle et forte volonté de mettre l’accent sur l’écologie et l’environnement. Je dois dire que le site s’y prête vraiment », estime Matthieu Théaudin, paysagiste concepteur et designer associé chez Phytolab.

Tisser un lien entre le lieu et le paysage Rout Lëns a effectivement un caractère assez exceptionnel, non seulement pour son histoire et son patrimoine architectural, mais également pour son patrimoine vivant. « On s’est attaché à travailler sur ce projet qui s’inscrit dans son territoire : il y a donc une vraie réflexion pour tisser un lien entre

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le lieu et le paysage, les qualités du site et son environnement. Ici, nous avons la proximité avec la forêt d’Ellergronn, les étangs qui servaient de bassins de refroidissement et qui demain seront la base d’un projet de parc. L’objectif est d’inscrire cette trame paysagère dans un contexte urbain et naturel », poursuit Matthieu Théaudin. Pour ce faire, Phytolab prend soin de faire vivre, à travers le site, tout le cadre géographique et culturel qui l’entoure. « On travaille sur différentes composantes : la forêt qui est proche, la verdurisation* du sol avec l’ajout de plantes et de végétaux, les toitures végétalisées avec la mise en place de pelouses calcaires sans oublier le couple patrimoine/nature qui vise à mettre en valeur le patrimoine architectural au sein d’un écrin végétal », indique le paysagiste concepteur.

Anticiper le réchauffement climatique En parcourant le lieu, il sera donc possible de retrouver les caractéristiques des écosystèmes locaux à travers des dispositifs de pelouse,

de prairie sèche ou de boisement, mais aussi grâce à une végétation du voyage qui fait un clin d’œil aux multiples nationalités d’Esch-surAlzette. Niveau végétation, en plus de privilégier la forêt, l’ombre et la fraîcheur qu’elle procure, les architectes paysagistes de Phytolab ont également tenu à adopter une vision sur le long terme. « Nous avons tenu compte de l’évolution de la palette végétale en raison des évolutions du climat. Nous mettons donc en valeur des milieux existants dans l’environnement immédiat du


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Une nouvelle skyline se dessine depuis les étangs.

Image de synthèse des espaces publics autour de la Halle des Soufflantes et notamment le bassin de rétention central

site, mais nous introduisons aussi des végétaux qui vont à terme arriver naturellement à s’acclimater sur le territoire. On sait par exemple qu’avec le réchauffement climatique, il y aura moins de hêtres dans les années à venir, mais davantage de chênes verts. On a donc voulu préparer et en quelque sorte anticiper l’avenir », affirme Matthieu Théaudin.

* Fait d’ajouter de la verdure, des plantations

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[m’atdæŋk n] verbe intransitif participer à la réflexion

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UN QUARTIER PENSÉ POUR LES BESOINS DE DEMAIN Afin de construire des logements en adéquation avec les besoins futurs des habitants qui vivront au sein du quartier Rout Lëns, IKO Real Estate a misé sur le bien-être et la convivialité, mais aussi sur l’environnement.

SANDRA HUBER Head of Urban Development & Residential Concepts chez IKO Real Estate CÉCILE LEYVAL Commercial & Client Experience Director chez IKO Real Estate

Pour bâtir les lieux de vie de demain, IKO Real Estate place le bien-être et le respect de l’environnement au cœur de ses préoccupations. « Notre vision globale s’appuie à la fois sur les besoins humains mais aussi sur l’espace dans lequel les habitants évolueront. La qualité de l’air ou les nuisances sonores sont par exemple des paramètres auxquels nous faisons attention pour élaborer notre offre de logements. Notre démarche est également orientée carbone neutre ; nous calculons l’empreinte carbone de chaque construction en essayant de la minimiser au maximum avant

de compenser ensuite les émissions restantes. Une philosophie qui a orienté notre démarche pour le quartier Rout Lëns, qui sera certifié WELL Community Standard* », indique Sandra Huber, Head of Urban Development & Residential Concepts chez IKO Real Estate. Pour imaginer les habitations à implanter au sein du quartier, Sandra Huber et sa collaboratrice Cécile Leyval, Commercial & Client Experience Director, ont analysé les résultats de sondages portant sur les attentes du grand public vis-à-vis du logement. « On a constaté qu’il

y avait un besoin d’espaces verts et de parcs, d’un quartier avec une identité propre respectueuse du patrimoine architectural, mais aussi une demande d’accessibilité à la mobilité douce et à des services de proximité, comme des petits commerces ou des professionnels de la santé », notent les deux femmes. Des constats qui ont orienté leurs réflexions et que la COVID-19 est

*Label de l'International WELL Building Institute (IWBI) visant à favoriser la santé et le bien-être dans tous les aspects et domaines de la vie communautaire (www.wellcertified.com).

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Les logements auront une typologie variée : appartements, rez-de-­ chaussée avec jardin ou duplex avec accès à des terrasses.

ensuite venu renforcer. « On avait déjà pensé à des logements modulables avant la pandémie, mais le virus et le confinement ont créé de nouveaux types de comportements. Les gens ont pris soin de leur maison, beaucoup ont entrepris des travaux et l’émergence du télétravail a changé la donne au niveau de l’aménagement intérieur », indique Cécile Leyval. « On a remarqué qu’il y avait un réel besoin d’appropriation de son chez-soi. On est donc allés encore plus loin dans nos réflexions en imaginant une offre de logements collectifs, mais qui permet aussi de créer de l’individuel. Comme les gens seront sans doute amenés à travailler davantage à domicile, nous avons créé des intérieurs avec des espaces modulables permettant l’intégration d’un espace de travail, voire des pièces dédiées », poursuit Sandra Huber. La domotique sera égale-

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ment intégrée aux logements. Cette dernière permettra notamment aux habitants de gérer à distance des objets connectés et de contrôler leur consommation d’énergie. La domotique permettra ainsi d’améliorer le quotidien des usagers mais aussi et surtout de contribuer à la transition énergétique.

Un juste équilibre entre le lien social et l’espace intime Appartements, duplex en rez-dechaussée avec jardin et entrée individualisée ou duplex réversibles avec accès à des terrasses ou des espaces sur les toits mais aussi deux grandes tours d’appartements (70 m de hauteur) aux vues imprenables sur la nature environnante ou encore maisons individuelles vis-à-vis de la rue Barbourg : tout a été pensé pour offrir des logements de conceptions variées, fonctionnels mais surtout

personnalisables et agréables à vivre avec une réflexion forte sur le traitement des espaces extérieurs privatifs. En d’autres termes, un quartier où il fait bon vivre. Pour favoriser le lien social et les échanges, les différentes résidences comporteront également chacune des espaces de vie communs, comme une salle qui pourra aussi être réservée pour des évènements privés, ou même un gîte extérieur – installé dans l’ancien poste d’aiguillage – destiné à accueillir les amis ou la famille des résidents. Au-delà des habitations, cette volonté de créer un véritable espace de vie déborde sur tout le quartier. Voulu comme intergénérationnel, mixte et convivial, ce dernier s’inscrit pleinement dans son environnement. « Il y aura des commerces au pied des immeubles, des espaces de coliving et de coworking


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Les différentes résidences comporteront également chacune des espaces de vie communs pour favoriser le lien social et les échanges.

ouverts aux habitants, des services de proximité, une maison médicale, mais aussi des petits restaurants et même une brasserie locale. L’idée est vraiment d’amener de la vie au quartier Rout Lëns et donner envie d’y habiter. » Parmi les équipements publics, le complexe scolaire ouvrira ses portes au grand public en dehors des heures de classe afin de faire bénéficier de son gymnase, de ses aires de jeux et de sa bibliothèque aux habitants du quartier. Un gros travail a ainsi été fait sur le domaine public, pour que chacun puisse se l’approprier et en profiter dans un esprit de groupe mais aussi de manière individuelle. « Tout l’enjeu était de parvenir à un bon mix entre le lien social et l’ouverture sur les autres, et l’espace intime indispensable à chacun », soulignent Cécile Leyval et Sandra Huber.

Ee Quartier fir d’Bedierfnisser vu muer LU   Fir datt d’Wunnenge vum entstoende Quartier Rout Lëns de Bedierfnisser vun den zukünftegen Awunner entspriechen, stinn d’Theeme Wuel­ befannen, Diversitéit a sozialen Zesummenhalt fir IKO Real Estate am Mëttelpunkt. D’Cécile Leyval, Commercial & Client Experience Director an d’Sandra Huber, Head of Urban Development & Residential Concepts, hu festgestallt, datt d’Bedierfnis no enger grénger Ëmgéigend, souwuel wéi Zougang zu lokale Geschäfter an zu Gesondheetsservicer ge-

wuess ass. Dës Feststellung gouf duerch d’COVID-19 Pandemie verstäerkt an huet dozou gefouert, Wunnenge mat villfältegen Typologien unzebidden, déi net nëmme funktionell sinn, mee déi sech och de perséinleche Virléifte vun den Awunner upasse kënnen. Fir sozial Kontakter an den Austausch ze begënschtegen, goufe kollektiv Liewensraim virgesinn, wéi z. B. ee Festsall dee spéider fir privat Veranstaltunge reservéiert ka ginn. D’Haaptiddi vun dësem Projet besteet doran e gutt Gläichgewiicht tëscht sozialem Zesummenhalt an Intimitéit ze erreechen.

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« Nous sommes des habitués du restaurant Carpini, alors nous venons souvent déjeuner dans le quartier. Nous espérons surtout qu’il y aura beaucoup d’espaces verts avec des arbres pour égayer ces nouveaux logements et conférer une ambiance nature au lieu. » JOSEPH ET HENRI DEUX FRÈRES D’AUDUN-LE-TICHE

« Nous sommes venus faire du shopping à Esch aujourd’hui. Je trouve vraiment super, pour le patrimoine, que le quartier garde quelques beaux bâtiments historiques industriels de l’époque Arbed pour y exposer de l’art ou y installer une épicerie locale. C’est une belle reconversion. » SANDRA DES VOSGES

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« Je travaille depuis deux ans juste en face, chez Yasmine Beauty, une boutique de cosmétiques. Ça va faire revivre le coin et relancer les commerces. De plus, c’est une chouette nouvelle, car je cherche justement à acheter un appartement à côté de mon job. Quelle aubaine pour moi ! » L AURA DE YASMINE BEAUTY

« Je suis arrivé dans les années 90 pour travailler dans ce kébab. J’ai entendu que ce quartier allait booster un peu le coin. » MUSTAFA SERVEUR AU SNACK EURO KEBAB

« J’habite ici depuis 15 ans. Petit, je résidais juste à côté de ce nouveau quartier qui va s’appeler Rout Lëns, rue Jean-Pierre Bausch. J’ai plein de merveilleux souvenirs avec mes copains. On jouait tous ensemble du matin au soir, quelle rigolade quand j’y repense ! » BRUNO D’ESCH-SUR-ALZET TE

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« À mon avis, ce nouvel endroit va redynamiser toute la commune d’Esch et pas seulement notre quartier. Ce sera une ville encore plus jolie, on peut d’ailleurs remercier le bourgmestre Georges Mischo qui met tout en œuvre pour améliorer l’agglomération ! Je travaille chez Cycles Rasqui depuis 35 ans, rue de l’Alzette, alors j’en ai vu des transformations durant toutes ces années. » GEORGES DE CYCLES RASQUI

« Je suis artiste, surtout sur des textiles avec des broderies. J’ai un atelier au Hariko à Esch. J’ai beaucoup entendu parler de Rout Lëns, notamment sur Facebook. J’ai vu des plans assez prometteurs. Il parait qu’il va y avoir de superbes jardins sur les toits et une serre au milieu des habitations. J’adore ça ! J’aimerais bien y habiter. » REINY ARTISTE D’ESCH-SUR-ALZET TE

« Mon frère travaillait à l’Arbed comme ouvrier serrurier dans les années 50, exactement où ils construisent le Rout Lëns, le nouveau quartier d’Esch-sur-Alzette. Oh là là, ça me rappelle tellement de bons souvenirs. J’ai entendu dire qu’ils allaient y installer un nouveau petit restaurant, c’est vrai ? » MARIE-PAULE DE ESCH-SUR-ALZET TE

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« J’aime le concept d’une zone d’habitation sans voiture, c’est-à-dire avec des parkings souterrains. Les piétons seront libres de faire ce que bon leur semble, pareil pour les enfants, ils pourront jouer en toute sécurité. On pourra s’y balader relax et profiter de la tranquillité. » VANIA VENDEUSE CHEZ CHAUSSURES HAAS

« Tout le monde à Esch parle de ce nouveau quartier, juste à côté des stations-services, près de la frontière française. Quand j’étais gamin, mes parents avaient un potager à côté d’ArcelorMittal et pendant qu’ils jardinaient, je jouais au foot avec les copains. » DAVID DE L’OFFICE DU TOURISME

« J’ai 27 ans, j’habite à Esch, je travaille à l’office de tourisme d’Esch et je joue au club de foot Jeunesse d’Esch. J’adore le sport et j’ai entendu dire qu’il va y avoir une salle d’escalade au beau milieu du nouveau quartier Rout Lëns. J’ai hâte de voir ça ! » ANDREA DU CLUB DE JEUNESSE D’ESCH

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© Henri Goergen

[’æ: sdæŋk n] verbe transitif imaginer

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ROUT LËNS : NOTRE PATRIMOINE LE SOCLE DE DEMAIN

UNE EXPOSITION IMMERSIVE POUR REMONTER LE TEMPS Conserver la mémoire du site « Lentille Terres-Rouges » a toujours été l’une des principales volontés des équipes du projet Rout Lëns qui s’articule autour de l’allée de la Culture industrielle, véritable colonne vertébrale reliant l’ensemble des bâtiments historiques du site. L’exposition, qui s’est tenue du 5 au 19 novembre 2021 à la galerie Schlassgoart à Esch-sur-Alzette, a été pensée en deux dimensions : une dimension physique grâce au travail photographique de Philippe Roguet et une dimension virtuelle à l’aide de la réalité augmentée développée par Virtual Rangers.

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TROIS QUESTIONS À… Elle est un peu la « cheffe d’orchestre » de cette exposition photo. Hélène Pinot s’est occupée de coordonner l'ensemble des acteurs pour l’organisation : le photographe Philippe Roguet, l’agence Super Idée, Virtual Rangers et sa table immersive ainsi que la galerie Schlassgoart.

Hélène Pinot Communication and Event Manager chez IKO Real Estate

Que souhaite montrer IKO à travers cette exposition ? La reconversion du site Rout Lëns est emblématique de notre stratégie d'entreprise tournée vers la durabilité. De plus, ce projet va durer une dizaine d'années, il est très important pour nous. Notre premier objectif était de faire connaître le site dont l'activité sidérurgique a cessé voilà une quarantaine d’années. Au travers de cette exposition, il nous a semblé important de raconter aux futurs habitants l’histoire de ce site amené à devenir un lieu de vie, afin que chacun puisse se l’approprier. La sidérurgie appartient à l’histoire d’Esch-sur-Alzette, où de nombreux habitants ont sou-

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vent un membre de leur famille qui y a travaillé. Si IKO a souhaité organiser cette exposition, c’est parce que l’art est un vecteur essentiel de la participation citoyenne. Or, IKO fait justement appel à cette participation citoyenne, comme lors de la grande enquête publique sur le projet Rout Lëns, qui s’est déroulée il y a deux ans, et où chacun pouvait prendre la parole. Un rendez-vous qui se répétera tout au long du projet lors des étapes-clés. L’art nous permet de créer du lien entre le patrimoine, l’histoire de la ville et les habitants, pour écrire une histoire qui rassemble les Eschois d’aujourd’hui et les futurs habitants du quartier Rout Lëns.


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Est-ce chose courante pour IKO de documenter un site et un chantier à travers le regard d’un artiste photographe ? Oui et non ! Nous documentons toujours l’évolution de la construction de nos projets. Et nous réalisons toujours de belles photos des projets livrés. Pour Rout Lëns, c’est différent parce que le quartier est à l’état de projet. Or il représente à lui seul la vision IKO : placer l’humain au cœur des projets. Il nous a paru essentiel de raconter, de témoigner de l’histoire de ce site. Les bâtiments de Rout Lëns sont classés aux Monuments historiques ; ils avaient une fonction industrielle, demain, ils auront une fonction urbaine. Ces photos témoignent de l’histoire du site et c’est important car cela constitue le socle du futur quartier. Pourquoi avoir choisi de travailler avec Philippe Roguet ? Pour plusieurs raisons. La première, c’est qu’il a une formation de designer qui apporte un regard différent à la photo. Si on regarde bien ses clichés, on y observe une recherche de conception graphique. En outre, Philippe Roguet travaille à la chambre photographique, un processus beaucoup plus lent que le numérique qui impose de s’approprier davantage le lieu. Avec un appareil numérique, l’aperçu est immédiat : on réalise plein de photos pour ensuite choisir la meilleure. Avec une chambre photographique, la photo n’apparaît que lors du développement. C’est un travail de patience et de construction des images, avec un niveau de détails assez incroyable. Les contrastes et jeux de lumière créent une ambiance cinématographique. Enfin, c’est intéressant d’avoir le regard sensible de Philippe Roguet sur la question patrimoniale et l’évolution des bâtiments au fur et à mesure des travaux. Cela contribue à l’âme du lieu.

SUPER IDÉE Un regard artistique sur un grand projet urbanistique

Le binôme Nicolas Tochet et Nicolas D’Ascenzio de l’agence évènementielle Super Idée ont été contactés au printemps dernier par Sandra Huber et Hélène Pinot de IKO Real Estate, pour monter l’exposition à la Galerie Schlassgoart et participer à la sélection des photos de Philippe Roguet. Ils ont aussitôt été séduits par l’originalité de la démarche : « Une réflexion artistique a tout de suite été menée par IKO sur le projet Rout Lëns, comme par exemple la volonté d’y insérer un tiers-lieu, le fait de documenter le site en archives, mais aussi de poser un point de vue artistique sur ce grand projet urbanistique. C’est quelque chose qui forcément nous interpelle, Nicolas et moi, en raison de nos expériences passées. Car on est convaincus que le fait d’intégrer la dimension culturelle et artistique dès la conception d’un quartier est la bonne manière d’aborder la ville. Je ne crois pas que l’on puisse en dire autant de tous les promoteurs immobiliers... », remarque Nicolas Tochet. C’est également Super Idée qui a choisi de faire appel à Soner et au collectif noc.turn pour le vernissage, parce que ce sont des « artistes qui savent s’adapter à un contexte précis », précise Nicolas Tochet. Soit une belle façon de raconter visuellement et musicalement cette transition menant au projet Rout Lëns.

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TÉMOIGNER DE L’HISTOIRE D’UN LIEU IKO Real Estate a confié au photographe lyonnais Philippe Roguet la mission de documenter à la fois la mémoire et la mutation urbaine de l’environnement industriel du site Rout Lëns. Son travail a fait l’objet d’une exposition à la galerie Schlassgoart à Esch.

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Quelles ont été vos premières impressions lorsque vous avez découvert le site Rout Lëns ? Philippe Roguet (PR) : J’ai pris une claque ! J’ai été frappé par ce côté monumental, par la diversité des bâtiments, comme la Halle des Soufflantes, un bâtiment imposant. C’était en juillet, il faisait gris, le temps était à l’orage, cela créait une atmosphère particulière, un côté un peu dramatique. Nous avons exploré le site pendant au moins deux heures. Je suis venu en tout quatre fois à Rout Lëns, dont une fois l’hiver dernier ; il faisait -15°C, j’avais les doigts gelés parce que je ne peux pas travailler avec des gants, c’était un peu compliqué.

la Tourette, situé près de Lyon ; j’ai fait une retraite de trois jours pour y travailler. Je voulais m’immerger dans une atmosphère particulière. J’ai eu la chance qu’il neige, ce qui a donné un aspect quasi monochromatique à mes photos. Dans mon travail de photos d’architecture, j’ai été confronté à des bâtiments qui sont soit réhabilités, soit détruits. J’ai trouvé intéressant de proposer une approche de ce type pour Rout Lëns, dans un esprit de conservation du patrimoine. J’ai eu la chance qu’IKO ait cette volonté de travailler sur un témoignage, une sorte de catalogue iconographique du patrimoine. Il est nécessaire de garder des traces de tout cela.

Qu’est-ce qui vous a amené à travailler sur cette friche industrielle ? PR : C’est à l’occasion de l’une de mes expositions que nous avons pris contact, via une connaissance commune. J’exposais des photos d’architecture du couvent de

Combien de temps avez-vous passé sur le site pour préparer cette exposition ? PR : J’y suis resté une semaine. Le terrain d’exploration est assez fabuleux. À la différence de l’Urbex (de l’anglais urban exploration : explo-

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ration urbaine de lieux interdits ou difficiles d’accès), qui est une exploration transgressive, là il s’agissait d’explorer un bâtiment avec la mission d’obtenir un rendu fidèle, pour montrer ce à quoi ça ressemble. Ma démarche est artistique, mais c’est aussi un travail de documentation, d’iconographie, pour laisser des traces de ce qu’a été ce site, par une approche photographique du patrimoine architectural industriel. Je fais aussi le suivi du chantier, de la déconstruction à la naissance du futur quartier. Qu’est-ce qui a guidé vos choix d’angles de vue ? PR : J’ai souvent des points de vue assez directs, où je casse un peu les perspectives. La construction frontale, que je choisis pour mes photos, leur donne ce côté pictural. J’ai une formation de designer, cela m’influence forcément. Les photos de la Halle des Soufflantes, avec moins de lignes de fuite, donnent une vue


INTERVIEW PHILIPPE ROGUET

Ses travaux photographiques centrés sur le paysage urbain expérimentent une photographie d’architecture en quête de l’atmosphère du lieu. Son choix de travailler à la chambre photographique engage un processus plus lent, plus économe d’images.

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immédiate du bâtiment, sans se laisser distraire par la perspective. C’est comme le Portique : si on le dessine, on ne va pas le faire en perspective, mais de façon verticale. L’idée, c’est de trouver une logique dans un chaos total. Pourquoi avoir choisi de travailler à la chambre photographique sur ce projet ? PR : J’ai utilisé la chambre moyen format : tout est manuel. On mesure la lumière, la distance, etc. Chaque prise de vue nécessite environ un quart d’heure de réglages. C’est différent du matériel que j’utilise pour des reportages. L’optique de la chambre photographique, en captant la lumière différemment, restitue mieux la lumière et les détails et donne un résultat complètement différent pour les couleurs, avec un aspect très immersif, très pictural sur le piqué, autrement dit la revue de détails. Combien de photos avez-vous réalisées ? PR : En une semaine, j’ai dû faire environ 200 photos et en conserver une quarantaine, peut-être moins. Parfois, je repensais à certaines vues durant la nuit et le lendemain je revenais au même endroit pour refaire la photo en me plaçant juste à 20 cm d’écart par rapport à la veille. En fait, j’ai dans la tête précisément la photo que je veux faire et mon problème est de parvenir à sortir exactement cela. C’est pour ça qu’il faut que je sois tout seul pour bosser. C’est de l’immersion, presque de l’auto-hypnose. Comment avez-vous imaginé cette exposition ? PR : L’exposition est élaborée comme une déambulation. Elle commence avec des photos monumentales des

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bâtiments, d’environ deux mètres. Puis ce sont des formats moyens, d’un mètre vingt ou un mètre trente. Ensuite on rentre plus dans les détails. J’ai pris quelques photos en noir et blanc en juillet, très sombres. Dans la Halle des Turbines, j’ai fait une série sur les compteurs électriques ; chacun est différent, on a l’impression que tout change et rien ne change. Cela devient quelque chose d’abstrait une fois que c’est photographié, comme au cinéma. Ce sont des matières, des matériaux, je travaille sur des atmosphères. On est vraiment dans une notion de témoignage. Je viens, je prends des photos et ensuite les bâtiments n’existent plus de la même façon.

Interview mam Philippe Roguet L U   Zäitgeschichtlechen Temoi­gnage vun engem Site D’IKO Real Estate huet dem franséische Fotograf Philippe Roguet d’Aufgab uvertraut, souwuel d’Erënnerung wéi och den urbane Wandel vum industriellen Ëmfeld vum Site Rout Lëns ze dokumentéieren. Duerch déi besonnesch Atmosphär vum Site Rout Lëns a seng Erfarung als Architektur­ fotograf, war et dem Philippe Roguet een Uleies, de Patrimoine vun dësem Site op kënschtleresch Aart a Weis ze dokumentéieren, als Zort ikonografesche Katalog. Hien huet eng Frontalusiicht vun de Gebaier mat wéinege

« LE TERRAIN D’EXPLORATION EST FABULEUX. » PHILIPPE ROGUET

Fluchtlinne gewielt, wat de Fotoen eppes bildhaftes gëtt a Logik an de Chaos bréngt. Dësen Effekt konnt hie just mat enger Mëttelformatkamera erreechen. D’Luucht an d’Detailer ginn dobäi anescht agefaangen, sou datt d’Faarwen anescht duergestallt ginn. 40 vun den insgesamt 200 Fotoen, déi hie wärend enger Woch gemaach huet, wäerten an der Ausstellung an der Galerie Schlassgoart zu Esch wéi bei engem Spadséiergang opgebaut ginn: se fänkt u mat monumentale Fotoe vun 2 Meter vun de Gebaier, da komme mëttelgrouss Formater vun 1,5 Meter fir da méi a méi op den Detail anzegoen. An zum Schluss existéieren d’Gebaier net méi sou, wéi se fotograféiert goufen.


PORTFOLIO PHILIPPE ROGUET

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PHOTO 1 el maionser vfgdfdsfsdfit iumquam quia nobis num nonsend aeperum accuptatem fugiti tem rehendam quidessit Vessa pra res pes hocci is ne caecture alerta, vis halica me abus? Tam acia noculic.

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1 HALLE ROUGE ~ PERSPECTIVE 90 X 120 CM

2 PORTIQUE ~ 6AM 185 X 110 CM

3 SILOS 01 ~ PESANTEUR 90 X 120 CM

4 SILOS 02 ~ CANOPÉE 90 X 120 CM

5 HALLE DES SOUFFLANTES ~ EXO-STRUCTURE 1 140 X 105 CM

6 HALLE DES TURBINES ~ L’ÉCHELLE 90 X 120 CM

7 HALLE DES SOUFFLANTES ~ MUR BLANC ET CENDRES 90 X 120 CM ÉD. 1/5 + 2AP

8 HALLE DES TURBINES ~ CATHÉDRALE 112 X 120 CM

9 HALLE DES TURBINES ~ L’ESCALIER BLEU 90 X 120 CM

10 HALLE DES TURBINES ~ DISTORSION 90 X 120 CM

11 HALLE ROUGE ~ LES ÉCHELLES 90 X 120 CM DE LA SÉRIE « ROUT LËNS 2020-2021 » ESCH-SUR-ALZETTE – LUXEMBOURG TIRAGE PIGMENTAIRE SUR ALUMINIUM

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« LA POÉTIQUE DES RUINES DU XVIIIE SIÈCLE » La directrice de la Galerie Schlassgoart, Nathalie Becker a été touchée par le travail du photographe lyonnais, dans lequel elle perçoit, à travers sa vision de ces bâtiments à l’état d’abandon, une forme de poésie.

NATHALIE BECKER Directrice de la Galerie Schlassgoart

Ancien Pavillon du Centenaire, la Galerie Schlassgoart, construite en acier, bénéficie d’une architecture singulière, que l’on doit à l’architecte italienne Benedetta Tagliabue (Miralles Tagliabue EMBT). Commandé par l’Arbed en 1993, l’édifice a été cédé à la Ville lors de la célébration de son centenaire, en 2006. Son architecture audacieuse a été distin-

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Le quartier Lentille Terres-Rouges, Nathalie Becker l’a connu lorsqu’elle était enfant. Française, elle passait souvent dans les environs et côtoie aujourd’hui le site au quotidien. Contactée par IKO Real Estate pour ce projet d’exposition, elle a été séduite par l’idée avant d’être touchée par le travail de l’artiste. « Philippe Roguet joue sur l’esthétique du délabrement et redonne une certaine splendeur à ces bâtiments. Ses photos sont très lyriques. Elles évoquent la poétique des ruines du XVIIIe siècle, les peintures d’Hubert Robert ou les écrits de Victor

guée à deux reprises, en 2007, par le Prix luxembourgeois d’architecture et les European Steel Design Awards. Nathalie Becker dirige la Galerie Schlassgoart depuis 2019. Historienne de l’art et médiatrice culturelle, elle intervient comme consultante au Luxembourg, notamment pour le Musée National d’Histoire et d’Art (MNHA) et la Villa Vauban.

Hugo, cet attrait romantique pour la ruine et le délabrement. C’est aussi ce que l’on ressent face aux vestiges de la sidérurgie. Tout cela fait certainement écho à la prise de conscience de notre propre finitude. »

Des sites en résonance Présenter une exposition sur le patrimoine bâti de l’ancienne fonderie de Rout Lëns dans sa galerie est hautement symbolique pour Nathalie Becker, puisque les deux lieux ont une origine commune : l’Arbed (groupe sidérurgique luxem­ bourgeois intégré à ce qui est aujourd’hui ArcelorMittal, ndlr). « Quand j’ai découvert les photos de Philippe Roguet, j’ai aimé la texture, les couleurs, l’ambiance qui s’en dégage. Et l’architecture du bâtiment de la Galerie Schlassgoart fait écho à tout cela », observe-telle. « Cette exposition traduit la mémoire de la prospérité sidérurgique, c’est un témoignage sur le patrimoine industriel et le public aime cette mémoire, surtout ici, à Esch. » L’exposition propose un regard à la fois artistique et documentaire sur le passé sidérurgique d’Esch.


EXPOSITION

UNE EXPOSITION DE MÉMOIRE VIRTUELLE

© Marie De Decker

Cette exposition a également donné lieu à une rencontre entre IKO Real Estate et Virtual Rangers, société luxembourgeoise de création d’expériences virtuelles et immersives.

MATTHIEU BRACCHETTI Fondateur de Virtual Rangers

Fondé en 2017 par Matthieu Bracchetti, Virtual Rangers est la première start-up à s’être spécialisée dans la réalité augmentée (AR) au Grand-Duché. Ce studio de création 100 % made in Luxembourg n’a pas attendu le confinement pour investir des secteurs aussi différents que le tourisme, l’aviation, l’éducation ou le divertissement... « Bien avant le corona-

Pouvoir remonter le temps est l’un des avantages de la réalité augmentée (AR). « Grâce à la réalité augmentée, on peut disposer d’une maquette avec des explications, de la pédagogie, qui permet de reconstituer des scènes historiques ou de revoir des machines en fonctionnement. Ce que l’on ne pourrait pas obtenir avec une maquette physique ordinaire », explique Matthieu Bracchetti, fondateur de Virtual Rangers. Un aspect que l’on a pu apprécier tout au long de l’exposition qui s’est tenue à la Galerie Schlassgoart. Il suffisait en effet de télécharger l’application IKO AR à partir de son smartphone pour

virus, on a senti tout le potentiel de cette technologie et que le marché allait se débloquer », confie le jeune entrepreneur franco-­ luxembourgeois de 35 ans. Les faits lui donnent aujourd’hui raison. Tout comme la liste de ses partenaires qui ne cesse de s’allonger. Car rien n’échappe à l’empire des nouvelles technologies développées par Virtual Rangers. Après avoir

voir apparaître les cinq bâtiments industriels en voie de reconversion. En mode audio, un narrateur présentait, en voix off, l’histoire du site, la fonction passée du bâtiment puis sa nouvelle fonction au sein du futur quartier Rout Lëns. Pour cette première collaboration autour de la culture patrimoniale, IKO et Virtual Rangers ont consulté de nombreux documents d’archives sur la mémoire des lieux. Une équipe d’historiens luxembourgeois a été sollicitée pour la scénarisation et garantir la validité scientifique de son contenu. Et parce qu’elles mettent parfaitement en valeur les matériaux, les photographies de Philippe Roguet ont servi de références à la modélisation tridimensionnelle des bâtiments. Soit une façon ludique et intelligente de concilier l’art, la pédagogie, la technologie et l’urbanisme de demain.

débuté dans l’évènementiel, les activités de Virtual Rangers se sont en effet considérablement élargies. Dans le domaine de la construction, la réalisation de maquettes immersives facilite la projection au sein d’un environnement. Dans les domaines hospitalier et industriel, des applications ont permis aux salariés de se former sans courir le moindre risque pour leur santé.

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UN VERNISSAGE EN MODE BLOCK PARTY ! L’évènement s’est déroulé le jeudi 4 novembre à la galerie Schlassgoart, en présence des médias et de nombreux invités qui ont pu assister à une performance du graffeur Soner accompagné aux platines par le collectif noc.turn. Les participants ont également pu découvrir les propositions culinaires du traiteur Monsieur Laurent.

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Philippe Roguet en pleine discussion

Georges Mischo, bourgmestre d’Esch-sur-Alzette

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Olivier Vandenhove, Sophie de Brouwer, Alain Rousseau et Valérie Alter

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EXPOSITION

SONER

Quentin Vercauteren-Drubbel et Nathalie Tips

C’est ainsi qu’il se fait appeler dans le milieu du graff’. Une signature tranchante, avec ses lignes parallèles et ses diagonales ciselées, manifestement sous influence de la calligraphie arabe. C’est un ami, aujourd’hui disparu, qui l’avait surnommé ainsi à l’époque où la culture hip-hop n’en était qu’à ses balbutiements. Internet n’existait pas, et le breakdance, les tags et le rap transportaient une partie de la jeunesse. Né en 1974, David Henrion (de son vrai nom) compte parmi les pionniers du graffiti dans la Grande Région. Au début des années 90, l’ado s’ennuie sur les bancs de l’école et troque ses stylos pour des bombes d’aérosol. C’est le déclic dans la tête du jeune lycéen, qui reçoit alors ses premières commandes dans les quartiers périphériques de Metz. Il y noue de sincères amitiés, se forge une solide réputation, contribue à la promotion d’un art jusque-là inédit. Ses idoles se nomment Mode 2, Bando, ou encore Colt, qui façonnera l’identité de groupes comme NTM et Assassins, dont il découvre le travail dans de rares revues. Il n’est pas un mur ni une enseigne qui ne porte aujourd’hui sa marque. Au Luxembourg, où il réside et travaille, Soner revêt une double casquette de street artist et de graphic designer. Fort de sa longue expérience dans le domaine du corporate identity, il fonde en 2015 deux sociétés : Caligrafizm, un studio spécialisé dans la typographie et l’illustration, et Pschhh, axé sur l’art urbain (murals, live painting, team building) et des ateliers de sensibilisation auprès d’un public scolaire. Récemment, Soner s’est illustré aux côtés d’IKO Real Estate en réalisant trois fresques pour le centre commercial Opkorn (Differdange). C’est donc tout naturellement qu’il a rejoint l’exposition de Philippe Roguet pour une collaboration marquée, cette foisci, d’une performance sur vinyles au sein de la galerie Schlassgoart. Aux côtés des musiciens du collectif noc. turn, Soner a célébré la transition vers le futur en s’inspirant des block parties des années 80 !

David Henrion, alias Soner

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NOC.TURN (noc, pour Nobody Owns Culture) Constitués initialement en assemblée étudiante, les jeunes Eschois ont fini par investir professionnellement le monde de la nuit et des institutions culturelles. Composé de cinq personnes au moment de sa création en 2017, noc.turn peut s’enorgueillir de compter aujourd’hui une cinquantaine de membres, dont « une quinzaine sont vraiment actifs » se réjouit Jewels Laifa, son chargé de comm’ à peine âgé de la vingtaine. Fondé sur un principe d’interdisciplinarité, le collectif a en effet mûri, diversifié ses activités (événementiel, communication, production), pris en envergure grâce à de prestigieuses collaborations, comme avec le MUDAM dernièrement et la Konschthal Esch, où l’association est désormais hébergée tout au long de l’année. C’est lors de la Schaufenster 3 organisée cet été par le nouvel Espace d’art contemporain que les fêtards ont rencontré l’équipe d’IKO Real Estate, qui y dévoilait un premier échantillon des photos de Philippe Roguet. Pour le vernissage de l’exposition à la Galerie Schlassgoart, deux DJs de noc.turn étaient aux platines : Rice Crispy a apporté une touche old school avec des sonorités hip-hop, là où Jean-Philippe Saquet a rassemblé ses vinyles pour assurer une ambiance électro.

Aux platines : le collectif noc.turn

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ROUT LËNS 2021

Quentin Vercauteren-Drubbel et Claude Marx, directeur général CSSF


EXPOSITION

2021 ROUT LËNS

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Valérie Peiffer et Brigitte Laschet

Hélène Pinot et Pierre Zydek, son époux

Julie Wattiaux, Julie Sacré et Martine Gerber-Lemaire

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ROUT LËNS 2021

Éditeur : IKO Real Estate, 1 rue Peternelchen, L-2370 Howald, T. (+352) 26 18 87-1 Crédits photographiques : © IKO Real Estate, sauf indication contraire, © Blitz Photo Agency (pp. 49, 66, 68-72) Conception, rédaction et réalisation : binsfeld - Novembre 2021

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Découvrez le projet ROUTLËNS en réalité augmentée, en téléchargeant l'application IKO AR et en scannant l'image ci-dessus. Découvrez le projet ROUT LËNS en réalité augmentée, Découvrez le projet ROUTLËNS en réalité augmentée, en en téléchargeant l'application IKO AR et en scannant l'image ci-dessus. Entdecken Sie das Projekt Reality, indem Sie téléchargeant l'applicationROUTLËNS IKO AR et in enAugmented scannant l'image ci-dessus. Entdecken Sie das Projekt ROUT LËNS und in Augmented Reality, Bild scannen. die IKO AR-Anwendung herunterladen das obige indem Sie die IKO AR-Anwendung herunterladen und das obige Bild scannen.

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