Expresso 06

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Expresso

16 01 2019

quotidien du master de journalisme de l’ institut français de presse - promo 2020

L’essentiel FRANCE

Difficile rentrée du Parlement

P.2

n Les députés font leur rentrée dans le contexte perturbé du grand débat. Le flou du gouvernement sur le sujet fait le jeu de l’opposition.

INTERNATIONAL

P.5

# 06

Vote crucial du Parlement britannique sur le Brexit

Un saut dans l’inconnu

Nouvel acquittement à la CPI

n L’ancien président de

Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, a été acquité. Il était jugé par l’instance pour « crime contre l’humanité » mais les juges ont manqué de preuves pour le déclarer coupable.

eco/conso

La face cachée des trottinettes

P.7

n A la nuit tombée, les « juicers » prennent leur service. Ils écument les rues de la capitale pour recharger les engins.

CULTURE

P.8

Redécouvrir Foujita à Paris

n Une rétrospective de

l’oeuvre du peintre va clôturer le cycle « Japonisme 2018 ».

Sports

La diplomatie du ballon rond

P.9

n Certains pays pro-

fitent de la Coupe d’Asie pour oublier la guerre. Pour d’autres, elle cristallise les tensions.

Le texte négocié par Theresa May risque de ne pas être adopté par la Chambre des communes. (AFP)

n Les députés de la chambre des la Première ministre britannique ne

Communes se prononcent dans la nuit de mardi sur l’accord négocié par Theresa May sur le Brexit. Aucun doute ne plane sur l’issue du vote. Critiquée de toutes parts,

devrait pas recevoir l’approbation de Westminster. Cette prévisible défaite plonge Londres et l’Union européenne dans une incertitude qui devrait durer longtemps. Page 4


FRANCE POLITIQUE L’Assemblée nationale à l’heure du grand débat

Une rentrée parlementaire sous le signe de l’incertitude n Après trois semaines passées dans leurs circonscriptions, les députés sont revenus à l’Assemblée sans savoir exactement à quoi ils vont servir.

P

as facile d’être député par les temps qui courent. De retour de vacances, les élus de la République n’ont en effet qu’une question aux lèvres : à quoi vont-ils servir pendant que les Français sont censés participer au débat ? Dans l’hémicycle, l’opposition enchaîne les critiques à l’égard de la stratégie d’Emmanuel Macron et s’accorde à dénoncer l’opacité des modalités de la consultation. Certains députés, comme Virginie Duby-Muller (LR), mettent en cause la neutralité des organisateurs du débat, piloté pour l’instant par Sébastien Lecornu et Emmanuelle Wargon, « deux ministres macronistes ». Lorsque l’élue évoque le « mépris » dont le président a fait preuve depuis le début de son mandat envers les maires, aujourd’hui sollicités pour organiser la consultation, des applaudissements s’élèvent des bancs de l’opposition. Entre deux questions-réponses, Richard Ferrand, du haut de son perchoir, rappelle qu’à l’ordre du jour de la prochaine conférence

600 maires étaient réunis autour du président à Bourgtheroulde (DR)

des présidents de groupes apparaîtra « la réflexion sur la façon dont le débat peut être organisé à l’Assemblée ». Philippe Vigier (« Libertés et territoires ») rétorque en demandant à savoir si les conclusions du débat seront effectivement restituées. « Pouvons-nous compter sur vous pour prendre en compte les propositions faites à l’Assemblée nationale ? », lance-t-il sans ambages, semblant demander avec ironie au gouvernement si les députés seront autorisés à débattre dans leur propre hémicycle.

D’autres sujets, comme la déclaration du ministre de l’Intérieur Christophe Castaner sur les violences policières inexistantes envers les gilets jaunes, ou la possible fin de la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes nationales, augmentent de quelques décibels le chahut sur les bancs. « Vous avez pris des forces pendant les vacances », lance Edouard Philippe à un Christian Jacob (LR) particulièrement bruyant. Reste à savoir si le gouvernement a fait de même. o Sarah Lapied

Coup d’envoi du grand débat Emmanuel Macron a lancé hier le grand débat devant 600 maires et élus normands à Grand Bourgtheroulde, dans l’Eure. Dans un court discours initial, le chef d’Etat a rappelé que la France faisait face à « une fracture sociale, économique et démocratique », et a demandé que les élus s’expriment « de la manière la plus directe ». Emmanuel Macron a également dit vouloir « responsabiliser » les gens en « difficulté » car « il y en a qui font bien et il y en a qui déconnent ».

POLITIQUE Un Français sur sept conteste sa légitimité

Le grand débat national peine à convaincre n Le grand débat national, prévu par Emmanuel Macron, n’a pas réussi à prouver sa légitimité alors même qu’il a débuté.

70% des Français jugent « inutile » le grand débat national, d’après un sondage Odoxa. Ce manque de confiance peut se traduire par la difficulté du gouvernement à convaincre. D’autant que le nom du coordinateur n’a toujours pas été trouvé. Mardi 8 janvier, Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public (CNDP), renonçait à conduire le grand débat 02 - EXpresso - mercredi 16 janvier

national. Son salaire élevé (14 709 euros brut par mois) avait créé un climat de polémique au moment de la crise des « gilets jaunes », qu’elle n’avait pas voulu assumer. Cafouillages en série

Pour piloter le grand débat après le retrait de Chantal Jouanno, Emmanuel Macron et Edouard Philippe ont notamment pensé à Jean-Paul Delevoye. Bien que l’actuel haut-commissaire à la réforme des retraites assure ne pas avoir été contacté ni avoir été candidat, son nom a tout de même circulé pour tenter de colmater les brèches. En vain. Résultat : le gouvernement

se retrouve sans coordinateur à la tête de son grand débat. Le Premier ministre a donc demandé à ce que cinq garants « de l’impartialité et de la transparence » soient nommés mais leurs noms ne sont toujours pas connus. Deux de ces cinq personnes seront désignées par le gouvernement. Les trois autres par le président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand, celui du Sénat Gérard Larcher et celui du Conseil économique, social et environnemental Patrick Bernasconi. Un débat peu légitime, du déjà-vu

Le grand débat va-t-il manquer

de crédibilité ? Nicolas Sarkozy en avait fait les frais en 2009. Son débat sur la question de l’immigration et de l’identité nationale avait été qualifié d’« échec » par le conseiller spécial du président Henri Guaino. Alors que le débat était présenté comme « utile et nécessaire » par le ministre de l’Identité nationale Eric Besson, il est finalement apparu comme caricatural, faible en contenu, stratégique et peu sincère. Si Emmanuel Macron ne veut pas reproduire le même schéma, il va devoir non seulement écouter mais bien restituer les revendications des Français. o Eline Wisnicki


FRANCE INTERVIEW Déborah Meier-Mimran, une avocate en colère

« Une justice déshumanisée nous attend » n Mardi, une troisième journée de grève a réuni avocats, magistrats et fonctionnaires de justice pour dénoncer la loi réformant la justice, portée par Nicole Belloubet. Déborah Meier-Mimran, avocate au Barreau de l’Essonne y a participé. De nouveau, vous vous mobilisez contre la loi de programmation pour la justice, quelle est votre principal grief ? Déborah Meier-Mimran : Ce qui me peine, c’est la fusion programmée des tribunaux d’instance et de grande instance. Parce qu’à Paris, se déplacer ne pose pas de problème. En revanche, dans l’Essonne, il y a environ 60 à 70 km qui séparent le tribunal d’instance et celui de grande instance. On pourrait faire l’analogie avec les hôpitaux : certains départements sont des déserts judiciaires. On ne peut pas réfléchir comme à Paris, sinon on fait disparaître la justice de proximité. Cette loi cherche à simplifier les procédures, en introduisant le numérique pour gérer les litiges du quotidien, en quoi est-ce problématique ? D.M-M : Si l’on souhaite modifier une pension alimentaire, plutôt que de faire appel à un magistrat qui rend une décision de justice, le personnel de la CAF, qui n’est ni formé, ni compétent pour prendre ce genre de décision déterminera le montant de

L’avocate, qui s’oppose à la réforme de la justice, participe à la websérie Commises d’office (DR)

la pension grâce à un algorithme. On ne prend plus en compte la situation personnelle des personnes concernées. Mais le gouvernement assure qu’on pourra porter plainte en ligne, est-ce une bonne nouvelle ? D.M-M : Il considère que tout le monde a accès à Internet. Ce n’est pas le cas. Des gens vivent dans la précarité, qu’elle soit matérielle ou intellectuelle. Les personnes âgées n’ont pas le réflexe Internet, elles seront privées de justice. Si vous souhaitez déposer plainte, il faut d’abord avoir déposé une pré-plainte depuis un site. Le gouvernement et la ma-

jorité semble assez hermétiques à la dimension quotidienne de la justice. Seuls les députés de la France Insoumise s’y intéressent. Si la réforme est votée, quel sera le rôle de l’avocat demain ? D.M-M : Son rôle sera avant tout administratif. On étudiera les dossiers de loin, sans véritablement plaider. Or, on ne peut juger sans entendre ce qu’a à dire l’avocat. L’oralité, qui est au cœur de notre métier, se perdra et les gens perdront l’accès au juge. Une justice déshumanisée nous attend. o Léa Taïeb

POPULATION L’Insee publie son rapport 2018

Le nombre de décès augmente et la natalité est en berne n La France entre dans sa quatrième année consécutive de recul des naissances avec un solde naturel qui n’a jamais été aussi bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Jamais deux sans trois, dit-on : la quatrième n’a pas tardé à suivre. Le bilan démographique 2018 de l’Institut national de la statistique (Insee) est tombé hier matin. Avec près de 67

millions d’habitants recensés au 1er janvier, l’hexagone connaît une natalité en berne et une mortalité record. En 2018, 758 000 bébés sont nés, soit 12 000 de moins qu’en 2017, tandis que le nombre de décès augmente et s’établit à 614 000. Perte de confiance

Le solde naturel de 0,3 % reste positif, mais n’a jamais été aussi bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Selon l’Insee, cette diminution corrélée à la baisse de la fécondité, fait suite à un changement de mentalité chez les jeunes générations face à la crise écologique. Avec 1,87 enfant par femme, l’Union nationale des associations familiales voit en ce recul le reflet d’une perte de confiance en l’avenir chez les familles, conjuguée aux politiques publiques défavorables. o Anouchka Crocqfer

en bref Des mesures contre la peste porcine

n Des sangliers vont être abattus à la frontière francobelge pour limiter la propagation de la peste porcine africaine, a annoncé le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume. Une « zone blanche » va être créée, après la confirmation de deux nouveaux cas en Belgique la semaine dernière. Si la maladie se déclare en France, les producteurs français ne pourront plus exporter de porcs, ce qui menace les 14 000 élevages porcins français, déjà en difficulté.

L'attaque de Strasbourg était préméditée n L’attentat de Strasbourg du 11 décembre 2018, perpétré par Chérif Chekatt, 29 ans, aurait été prémédité, selon les derniers éléments de l’enquête. Le terroriste avait acheté des armes, retrouvées par les gendarmes qui avaient perquisitionné son domicile, et confié à sa mère son « intention de mourir ». L’attentat avait fait cinq morts et onze blessés.

Rapport publié sur la loi de bioéthique n La mission parlementaire sur la loi de bioéthique a publié mardi un rapport favorable sur l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes les femmes, une mesure qui figurait dans le programme de campagne d’Emmanuel Macron. Le projet de loi sera présenté en Conseil des ministres, puis examiné au Parlement avant l’été.

Deuxième jour du procès du quai des Orfèvres n Emily Spanton, une touriste

canadienne qui a accusé deux policiers d’élite de viol en réunion, était présente au palais de justice de Paris lors du procès. Nicolas R. et Antoine Q. avaient plaidé non coupables et espéraient « pouvoir démontrer (leur) innocence ». La scène s’était produite en 2014, dans le local de la police judiciaire parisienne.

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INTERNATIONAL BREXIT Londres est déjà à la recherche d’un plan B

Vers un probable no-deal

U

n vote, une multitude d’inconnus. Ce mardi 15 janvier, les 650 députés de la chambre des Communes britannique doivent se prononcer sur l’accord sur le Brexit négocié par leur première ministre, Theresa May, et l’Union européenne. Au vue des derniers pointages, il faudrait un miracle pour que l’accord, que Mme May considère comme étant le meilleur pour le Royaume-Uni soit approuvé par une majorité de députés. Ce serait pourtant le scénario le plus simple : la période de transition négociée entre les deux parties s’enclencherait alors, le 29 mars, et le Royaume-Uni quitterait l’Union Européenne, sans trop de drame, à la fin de l’année 2020. Plusieurs scénarios sont possibles en cas de refus du texte par les parlementaires britanniques. Le plus probable est celui d’un Brexit sans accord, un « no deal ». « Plus le temps passe, plus l’hypothèse d’un no deal gagne en crédibilité » estime Daniel Desesquelle, présentateur de l’émission « Carrefour de l’Europe » sur RFI. Dans ce cas, les relations économiques entre le RoyaumeUni et l’UE, seraient régies par les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Les contrôles douaniers et réglementaires, seraient rétablis faute d’accord de libre-échange signé. L’accord négocié avec Bruxelles volerait en éclats et le Royaume-Uni n’aurait plus à rembourser les 39 milliards de livres qu’il doit à l’UE.

Une manifestante pro-brexit brulant un drapeau de l’UE (Isabel Infantes) Le poids de la probable défaite de Theresa May aura aussi un réel impact sur la suite des événements. En cas de courte défaite (environ 100 voix) la locataire du 10, Downing Street gardera une faible marge de manoeuvre. Au lendemain du vote, elle aura trois jours de sessions parlementaires pour travailler et proposer un nouveau projet d’accord à Westminster. A l’inverse, si les députés font subir à leur première ministre une large défaite, une crise politique pourrait s’installer Outre-Manche. Theresa May pourrait tirer les conclusions de son camouflet et démissionner. De nouvelles élections seraient alors convoquées et la question du Brexit resterait en suspens.

Un report du Brexit mais rien d’autre Cette incertitude ne fait pas les affaires de l’Union Européenne. Toutefois, hors de question pour ses dirigeants de lâcher du leste de nouveau. « Nous avons déjà donné tout ce que nous pouvions donner », estime la ministre française des Affaires Européennes Nathalie Loiseau. Pour éviter un Brexit dur, un report semble envisageable. Une centaine d’eurodéputés se sont déjà engagés à soutenir une demande de report de Londres. Selon une source diplomatique interrogée par l’AFP « une prolongation après le 29 mars est possible mais pas au-delà du 30 juin

car le nouveau Parlement européen sera constitué ». En effet, repousser le Brexit au-delà du mois de juillet 2019 entrainerait un réel problème juridique compte tenu des élections européennes de mai prochain. Le RoyaumeUni, encore membre de l’UE devrait, selon le règlement, présenter des candidats pour le Parlement européen : une situation impossible sachant qu’il ne resterait que quelques mois au sein des 28. Bruxelles n’entend donc pas bousculer son calendrier pour le Royaume-Uni, qui est, aujourd’hui, seul maitre de son destin. o Sacha Nelken et François Willmann

ALLEMAGNE L’AFD évoque pour la première fois une sortie de l’Europe

Le boom de l’euroscepticisme allemand n Porté par l’émergence de l’AfD, l’euroscepticisme a le vent en poupe outre-Rhin. A l’extrême droite et au centre droit, des voix s’élèvent contre la politique et le fonctionnement de l’Union Européenne, au point d’envisager une sortie. Depuis 2013, un vent eurosceptique souffle sur le paysage politique allemand. Cette année-là, l’Alternative fur Deutschland se lance. Depuis, le parti d’extrême droite a fait du rejet de l’Union Européenne l’un de ses fers de lance. Lundi, lors de son minicongrès en Saxe, il a franchi un 04 - EXPRESSO - MERCREDI 16 JANVIER

nouveau palier en évoquant pour la première fois le « Dexit », une sortie de l’Union sur le modèle du Brexit. L’idée fait son bout de chemin chez les leaders de la droite radicale, même s’ils sont restés mesurés. Le programme électoral d’Alternative fur Deutschland est clair : le « Dexit » ne sera prôné « qu’en dernier recours », si l’Europe ne se réforme pas « dans un délai raisonnable ». « Nous ne devons pas abolir l’Union, mais lui redonner tout son sens », a clamé l’un de ses fondateurs Alexander Gauland. L’Europe, selon lui, devrait se résumer à l’Allemagne

et aux grandes puissances européennes, sans la plupart des pays du sud, trop faibles économiquement. Une position trop modérée pour l’aile nationaliste du parti. Refroidi, l’ancien visage de l’AfD en Saxe André Poggenburg a annoncé qu’il quittait la formation populiste pour fonder son propre parti. Les libéraux s’y mettent aussi Plus symptomatique encore, l’euroscepticisme progresse aussi dans les rangs libéraux. Sous l’impulsion de Christian Lindner, l’homme qui est arrivé à la tête du Parti libéral-démocrate (FDP)

en 2013, ils ont radicalement changé de ligne. Faisant fi de son passé historiquement europhile, il a transformé le parti en force d’opposition à l’Union. Ce partisan de la sortie de la Grèce de la zone euro a déjà annoncé son hostilité à toute tentative de budget commun tel que l’imaginait le président français Emmanuel Macron. Il considère que l’idéal de libre échange des libéraux allemands ne passe plus par une coopération européenne accrue. Une attitude symptomatique du regain de l’euroscepticisme en Allemagne. o Aurélien Robert


INTERNATIONAL CPI Il était poursuivi pour « crimes contre l’humanité »

Laurent Gbagbo acquitté n 8 ans après leur arrestation et 3 ans après le début du procès, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ont été reconnus non-coupables par la Cour pénale internationale, dans l’incapacité de prouver l’inverse.

explosion ont eu lieu dans un complexe hôtelier à Nairobi, la capitale du Kenya. Les islamistes radicaux somaliens shebab, affiliés à Al-Qaïda, ont revendiqué l’attaque. Ils ont perpétré les deux derniers attentats les plus meurtriers au Kenya, celui d’un centre commercial et d’une université.

Nicolás Maduro quadruple le salaire minimum Laurent Gbagbo, durant son procès devant la Cour Pénale Internationale, le 28 janvier 2016. (ICC-CPI) en 2002, ont toutes rencontré président kenyan, Uhuru Kenyatdes obstacles. Depuis ses pre- ta, pour crimes contre l’humanimières enquêtes en 2004, elle a té. Selon le bureau du procureur, condamné trois miliciens, a pro- il était indirectement responsable noncé deux acquittements et de de la mort de 1 300 civils après nombreux non lieux. les élections de 2007, mais il n’a pas pu rassembler suffisamment Plusieurs affaires emblématiques d’éléments de preuves pour le Il y a à peine quelques mois, en prouver. juin 2018, la peine contre Jean- La Cour a, une nouvelle fois, Pierre Bemba, ancien vice-pré- échoué à rendre un jugement sident de la République démo- qui était pourtant attendu par les cratique du Congo, a été annulée. victimes de Laurent Gbagbo. Condamné pour crime de guerres Ce dernier a prévu de revenir en et crime contre l’humanité, Côte-d’Ivoire, et n’exclut pas de l’appel a décidé que, faute de se représenter aux prochaines preuves, il ne pouvait finalement élections de 2020. L’accusation pas être tenu comme respon- a demandé une suspension d’ausable. dience pour décider si elle entend Autre affaire emblématique : en faire appel de la décision. 2016, la Cour a renoncé à juger le o Esther Serrajordia

NIGERIA Au Nord, le groupe terroriste gagne du terrain

L’Etat islamique revient en force n L’État islamique est tenu en

échec territorialement en Syrie et au Levant, mais tente de retrouver de la puissance au Nigéria. Une base militaire du pays a été attaqué lundi 14 janvier, faisant au moins sept morts (trois soldats et quatre civils). L’assaut a eu lieu dans la ville de Rann, situé à environ 175 km au nord de Maiduguri, la capitale du Borno, un état au Nord-Est du Nigéria. L’attaque a été perpétrée par le groupe Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), la faction de Boko Haram affiliée à l’EI. Une faction qui a mis l’armée en déroute à de nombreuses reprises ces derniers mois. Les hommes de l’Iswap ont par ailleurs mis le feu à des camps de déplacés et fait fuir la population, selon des sources militaires et humanitaires. La situation se dégrade dans le pays depuis plusieurs semaines. Le 27 décembre 2018, la prise temporaire de la ville de Baga

Kenya : Des islamistes somaliens revendiquent l’attaque d’un hôtel n Des coups de feu et une

«L

a chambre fait droit aux demandes d’acquittement présentées par Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé concernant l’ensemble des charges retenues contre eux et ordonne la mise en liberté immédiate des deux accusés », a annoncé mardi 15 janvier le juge président Cuno Tarfusseur. Après 200 jours de réunion, 82 témoignages recueillis et des milliers de documents réunis, la Cour pénale internationale a décidé de relâcher l’ancien président de la Côte-d’Ivoire et son ministre de la jeunesse. Agés de 73 et 47 ans, les deux sont poursuivis depuis 2011 pour des « crimes contre l’humanité » qui auraient été commis à la suite de l’élection présidentielle de 2010. Selon l’ONU, plus de 3 000 victimes sont à déplorer. Après trois ans de procès, les juges ont « échoué à montrer la preuve » de la culpabilité des deux accusés. Un nouveau camouflet pour la CPI. Les précédentes affaires de la cour, créée

EN BREF

Des soldats nigérians lors d’un assaut contre Boko-Haram (RFI)

avait déjà constitué une première démonstration de force. En quelques heures, les assaillants avaient mis en déroute 600 soldats d’une force multinationale, composée d’unités du Nigéria, du Niger, du Tchad et du Cameroun. L’Iswap développe en sousmain des tactiques stratégiques de reconquêtes des territoires. A chaque attaque, le groupe terroriste est « mieux équipé que les soldats de l’armée », a affirmé à l’AFP un milicien engagé aux

côtés des troupes nationales nigérianes. De nombreux spécialistes alertent également sur les méthodes de recrutement de ces islamistes. « L’Etat islamique en Afrique de l’Ouest mène depuis six mois une intense campagne de recrutement de combattants au Nigéria », alerte Yann St-Pierre, consultant sur les questions du terrorisme. Des terroristes expérimentés, prêts à imposer un véritable contrôle dans le pays. o Julien Gal

n Au Venezuela, le salaire

minimum va passer de 4 500 à 18 000 bolivars, soit à peine 20 euros au taux actuel, a annoncé le président. Mais cette mesure ne sera pas suffisante pour compenser une inflation estimée à 10 000 000 % par le FMI cette année. D’autant que le salaire minimum a déjà été réévalué cinq fois à la hausse en 2018.

Ali Bongo de retour au Gabon n Dans la nuit du 14 au 15 jan-

vier, Ali Bongo est arrivé au Gabon, une semaine après la tentative de coup d’Etat. Il venait assister à la cérémonie de prestation de serment du nouveau gouvernement. Absent du pays depuis le 24 octobre dernier suite à un accident vasculaire cérébral (AVC), le chef de l’Etat a interrompu sa convalescence à Rabat, au Maroc.

Manifestations contre la hausse du prix de l’essence au Zimbabwe n Des manifestations ont

éclaté, lundi 14 janvier, dans les deux principales villes du Zimbabwe, Harare (la capitale) et Bulawayo (sud). Une grève générale de trois jours a été décrétée pour protester contre la hausse des prix du pétrole décidée par le gouvernement. Le président Mnangagwa tente d’enrayer la plus grave pénurie qu’a connu le pays depuis dix ans.

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ECO/CONSO ALIMENTATION Les alternatives parisiennes aux bonbons chimiques

Moins d’additifs, plus de plaisir n Chaque année, de nouvelles études démontrent que les produits chimiques présents dans les bonbons industriels sont un véritable risque pour notre santé. Pourquoi ne pas passer aux bonbons naturels ? Découverte, avec deux adresses, de cette alternative plus saine.

colorants naturels. » De quoi concurrencer le bio.

L

es bonbons, on le sait, c’est mauvais pour la santé. Mais le sont-ils seulement pour leur forte concentration en sucre ? Colorants, conservateurs ou encore édulcorants, les confiseries sont d’abord malsaines car elles regorgent de produits chimiques. Fin décembre, des associations avaient même demandé à Bercy de suspendre l’additif alimentaire E171, présent dans de nombreux bonbons, suite à une étude de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Cette étude a montré que ce colorant, conçu à base de dioxyde de titane, avait engendré des lésions pré-cancéreuses chez le rat. Malgré cela, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a affirmé le 8 janvier dernier sur France 5 que « l’évaluation de l’Union européenne […] ne partage pas l’analyse de l’INRA ». L’E171 ne sera donc pas éradiqué des sachets Haribo tout de suite. Pas de panique, il est toujours possible de se faire plaisir sans risquer de tomber malade. D’abord en consommant bio. Terry, vendeur dans la supé-

Les bonbons bio ou naturels sont une alternative. (Sucre et Fruit)

rette « Bio c’bon » rue Vavin, dans le 6ème arrondissement de Paris, vante les mérites des confiseries de son magasin. « Ils s’inspirent des bonbons industriels avec des colorants et arômes naturels mais il y a aussi des bonbons originaux bio, au gingembre par exemple, qui sont très bons ». Dirigeant son doigt vers un silo distributeur de confiseries de plusieurs litres, le jeune homme prouve que les bonbons bio plaisent aux clients. « Il se retrouve vide toutes les deux semaines et demie environ ». Par ailleurs, les bonbons bio s’avèrent bien plus intéressants en matière diététique lorsqu’ils contiennent des sucres lents, en substitution aux sucres rapides.

Des bonbons au naturel Quelques mètres plus loin, rue Bréa, une confiserie d’antan pourrait répondre à vos envies de bonbons non chimiques. Chez « Les Bonbons », les caramels, calissons et sucres d’orge nous transportent au siècle dernier. Si dans cette boutique les confiseries n’ont pas l’appellation « certifié agriculture biologique », elles restent en majorité naturelles. Derrière son comptoir, Cécilia le confirme : les étiquettes de ses produits témoignent de compositions 100% naturelle, artisanale et sourcée. « Les bonbons que je vends sont faits en France avec des produits locaux comme du beurre de Bretagne et utilisent aussi des

Une conservation plus compliquée « La cuisine est la servante de la médecine » disait Térence. Mais hormis les chaînes de magasin bio et les confiseries artisanales, les bonbons naturels restent compliqués à trouver. Selon Mauricette, vendeuse dans un bureau de tabac rue Vavin, la demande n’est pas là. « Les enfants veulent les marques qu’ils connaissent. » Par ailleurs, les bonbons naturels pénalisent les commerçants : « ils sont moins faciles à conserver ». Le marché du bonbon industriel a encore de beaux jours devant lui. o Juliette Lenrouilly

Les traces de produits chimiques très contrôlés Dans un rapport rendu public hier, la Cour des comptes européenne souligne que le système de contrôle de la présence de produits chimiques dans les aliments au sein de l’Union n’est pas complet. Selon elle, ce système est « solide », mais « débordé ». Le rapport montre que les Etats membres ont tendance à concentrer leurs contrôles sur les résidus de pesticides, les médicaments vétérinaires et les contaminants, à défaut de le faire pour certains ingrédients réglementés, comme les arômes alimentaires présents dans les bonbons.

INTERNATIONAL Les travailleurs manuels sollicités par le Canada

Les entrepreneurs québécois recrutent des « bras » français n Deux jours pour partir faire

carrière à l’autre bout du monde : c’est le défi que lance ce week-end le Salon du travail et de la mobilité professionnelle aux chercheurs d’emploi français en quête d’une nouvelle vie. Au menu de cette rencontre, la visite de six représentants de villes québécoises cherchant à embaucher outre-atlantique. Loin de rechercher une compétence française, les entrepreneurs québécois tentent essentiellement de combler une pénurie de main-d’oeuvre de plus en plus problématique à mesure que la 06 - EXpresso - mercredi 16 janvier

population de leur pays vieillit. La proximité linguistique fait effectivement des travailleurs français de parfaits candidats. Parmi les régions les plus touchées par ce phénomène de postes vacants, les zones rurales québécoises caracolent en tête. Durant le salon, hors de question de mettre à l’honneur des villes déjà attractives, à l’image de Montréal. Jérôme Landry sera par exemple du voyage pour présenter Matane, ville de 14 000 habitants dont il est le maire, et qui souffre depuis plusieurs années d’un manque de travailleurs.

Changement d’ère Si le Canada reste toujours le sixième pays des expatriés français, le mythe de la « fuite des cerveaux » laisse de plus en plus place à un besoin de main-d’oeuvre dans le secteur secondaire. Les chiffres sont clairs : aujourd’hui, seulement 11,7% des emplois non-occupés au Québec nécessitent un bagage universitaire. Simon Durand, jeune normand de 26 ans expatrié depuis quatre ans dans l’est de la province, confirme la priorité donnée aux travailleurs manuels : « je suis resté vivre au Québec et y

ai toujours trouvé un emploi parce que j’ai la chance de travailler dans le secteur de la construction. Pour moi, tout a toujours été facile, alors que j’ai beaucoup d’amis français venus après leurs études qui ont été déçus par les conditions professionnelles et qui ont quitté le Canada après seulement quelques mois ici ». Les entrepreneurs locaux s’appuient donc désormais davantage sur les « jobs de bras » que sur la fuite des cerveaux pour redynamiser l’immense territoire québécois. o Salomé Dionisi


ECO/CONSO PARIS L’électrique fait émerger un nouveau métier

Les « juicers », la patrouille nocturne des trottinettes n Depuis quelques mois, un nouveau moyen de locomotion envahit les rues de Paris. La trottinette électrique, chérie par les Français, est rechargée dans la nuit, par des personnes travaillant sous le statut d’autoentrepreneur.

Gagner de l’argent en rechargeant des trottinettes électriques ? Aujourd’hui, certains en font leur métier. Le secteur de la micromobilité est en plein boom depuis l’arrivée des opérateurs sur le marché parisien. Vantée pour sa simplicité d’usage et érigée comme substitut idéal de la voiture, la trottinette électrique fait un tabac auprès des jeunes parisiens. Mais ces véhicules ont aussi donné naissance à un autre phénomène : les chargeurs de trottinettes, connus sous le nom de « juicers ». À la tombée de la nuit, ces forçats du bitume rechargent les trottinettes pour les replacer ensuite à des endroits où la demande est forte. Si l’échéance horaire de 7h n’est pas respectée, une pénalité est appliquée sur la somme et les juicers risquent parfois même de perdre leur statut. Charger, un métier Pour devenir juicer, la procédure est simple. Il suffit de télécharger l’application d’un opérateur de trottinettes en libre-service,

en bref

France Télévisions va supprimer 1000 postes en 4 ans n Le projet de plan de départs annoncé le mois dernier par France Télévisions se précise : la direction veut supprimer un millier de postes d’ici 2022, sur la base du volontariat. Le groupe, qui comptait environ 9 600 salariés fin 2018, poursuit une politique de réduction de ses effectifs en œuvre depuis plusieurs années. Moins 1 000 postes équivalents temps plein depuis 2012. Ce plan de recomposition fait face à d’importantes hostilités en interne. Dès l’annonce de son principe mi-décembre, les syndicats CGT, CFDT, FO et SNJ s’y étaient dits opposés. Les négociations ouvertes lundi s’annoncent difficiles.

L’avenir de Renault se prépare déjà sans Carlos Ghosn Les trottinettes sont rechargées au domicile du juicer. (Limebike)

remplir un formulaire et fournir un numéro SIRET, qui permet d’identifier une entreprise ou un autoentrepreneur. Alors que certaines entreprises de transports en libre-service préfèrent embaucher, les deux opérateurs les plus connus du marché de trottinettes électriques, Lime et Bird, s’appuient sur des autoentrepreneurs. Arrive le moment de la chasse, où les juicers doivent trouver des trottinettes à charger. En novembre dernier, Renaud racontait au HuffPost : « L’idée c’est d’aller le plus vite

possible : le premier qui scanne est le premier servi ». Un exercice qui s’avère compliqué dans la mesure où beaucoup de gens dissimulent des trottinettes pour pouvoir les réutiliser le lendemain, comme le dévoilait déjà Numerama en août dernier. Si ce métier permet de gagner jusqu’à 600 € net par mois, ce nouveau cas d’ubérisation présente de nombreuses similitudes avec les chauffeurs VTC. La précarité y est garantie ! o Nioucha Zakavati

n Carlos Ghosn, mis en examen notamment pour abus de confiance, a vu sa demande de libération sous caution de nouveau rejetée mardi. Il va être contraint d’abandonner la direction de Renault dont il est toujours officiellement PDG. « Ils sont en train de recruter le remplaçant de Ghosn », confie un ancien cadre dirigeant du groupe. Le prétendant naturel serait a priori Thierry Bolloré, nommé il y a un an adjoint de Carlos Ghosn et dauphin officieux pour lui succéder à la direction générale du constructeur français.

FISCALITE Bercy s’intéresse à l’économie collaborative

Airbnb sous surveillance du fisc n Les revenus perçus par les usagers d’Airbnb sont désormais systématiquement communiqués à Bercy.

Près de 500 000 logements en France mis en location par quelques 400 000 hôtes sur Airbnb. Une pratique de plus en plus fréquente et surveillée de près par le fisc. Désormais, Airbnb, la plus célèbre des plateformes de location de logements entre particuliers, transmettra tous les ans à l’administration fiscale française le nombre et le montant des transactions réalisées par ses usagers. Par exemple, les sommes touchées par un parti-

culier louant son appartement via Airbnb en son absence pendant l’été seront automatiquement déclarées au fisc par la plateforme, et reportées, avec les références de son compte, sur des déclarations de revenus pré-remplies. Une obligation qui s’applique à toutes les transactions réalisées via Airbnb depuis le 31 décembre 2018. Réécrite il y a quelques mois, la « déclaration automatisée des revenus issus des plateformes » prévue par la loi contre la fraude fiscale présentée par le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, a pour objectif d’encadrer les sites «

d’économie collaborative », et de rétablir de l’équité entre les acteurs traditionnels de l’hébergement et les nouveaux venus numériques. Le coût de la mise en oeuvre de la loi est de 220 000 euros pour cette année. Airbnb est aussi dans le viseur de l’Union européenne, qui s’interroge sur son statut : peutil être considéré comme une activité de service ou comme un agent immobilier ? La question a été débattue lundi à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Selon une source judiciaire contactée par l’AFP, le verdict devrait tomber dans le courant de l’été. o Pauline Petit

Record de ventes mondiales pour PSA n Les chiffres annuels du groupe PSA sont tombés, et ils sont bons ! Le géant de l’automobile a vendu 3,88 millions de véhicules en 2018, soit 6,8% de plus que l’année précédente. Un nouveau record réalisé principalement grâce à l’augmentation des ventes européennes. MERCREDI 16 janvier- EXpresso - 07


culture EXPOSITION Tsuguharu Foujita à la Maison de la Culture du Japon

Aux confins du blanc n C’est une première rétrospective parisienne et une ambition qui se serait accomplie pour l’artiste japonais naturalisé français en 1955. Tsuguharu (Léonard) Foujita est exposé à la Maison de la Culture du Japon de Paris, du 16 janvier au 16 mars 2019.

O

mniprésent, le blanc. Un blanc aux nuances insoupçonnées, déclinées sur toutes les toiles de Foujita. Un blanc brumeux lorsqu’il arrive à Paris pour la première fois et s’éprend des extrémités de la ville. Un blanc laiteux pour son âge d’or dans les années 1920 où il saisit nues les muses

Foujita, Autoportrait, 1929, The National Museum of Modern Art, Tokyo. (Fondation Foujita / Adagp, Paris)

de Montparnasse. Un blanc contrastant avec le rouge et le vert dépaysants de son voyage en Amérique du Sud. Puis le blanc se salit, comme la neige brunâtre des montagnes japonaises assaillies par les soldats entre 1939 et 1945. Et quand l’artiste revient en France, c’est un blanc pur, biblique, qu’il s’emploie à peindre, un blanc qui se révèle par rapport à une autre nuance de blanc, mêlé de cyan ou de gris. Qui aurait cru qu’une couleur avait autant de nuances ? Le blanc est le noyau de la peinture de Foujita, parsemée de réminiscences picturales asiatiques, de la Renaissance européenne et de la peinture gothique.

Cinq actes d’huile sur pinceau fin La rétrospective retrace les cinq parties de sa vie. A vingtsept ans, tout juste débarqué de Tokyo, il rencontre le peintre chilien Manuel Ortiz de Zarate qui l’introduit auprès de Pablo Picasso et de toute la clique artistique de l’Ecole de Paris. Il vit la révolution cubiste avec eux, peint attablé dans les cafés parisiens. Une horloge, une pipe, une toile de Jouy au-dessus du lit, un nœud papillon. Tout exsude l’attirance que ressentait le peintre pour ce pays. Foujita sait que pour réussir, la célébrité est une bonne alliée. Il goûte aux

L’exposition est à retrouver à la maison de la culture du Japon, du 16 janvier au 16 mars, à Paris. (Marion Bellal/IFP) fêtes des Années folles parisiennes et s’y complaît. Puis les déboires économiques et amoureux l’assaillent, il s’envole vers d’autres contrées et croque des corps aux nuances brunes, s’attache à de nouveaux détails culturels symboliques. La Seconde guerre mondiale débute alors qu’il est au Japon, il est réquisitionné comme peintre par l’armée. Peindre pour le régime ou vivre sans peindre ? Foujita choisit son art et les œuvres de cette période sont pour la pre-

mière fois exposées en France. Peut-être se sentait-il comme Delacroix, enfin peintre accompli parmi les artistes français et non plus peintre étranger aux traditions lointaines. A la fin de l’exposition, grésille le film de son baptême en 1959. Des curieux s’accrochaient aux grilles de la cathédrale pour apercevoir l’artiste à la fine moustache, la peau de parchemin et les yeux en amande, devenu une référence artistique française. o Marion Bellal

MUSIQUE L’émission met sur le devant de la scène des problématiques sociales

L’Eurovision, reflet de l’air du temps

On aurait tort de ranger l’Eurovision parmi les télé-crochets de seconde zone. Si la débauche d’effets de son et lumière, les costumes outranciers à paillettes étincelantes et les mélodies pop se taillent la part du lion à l’écran, la plus ancienne compétition musicale permet aussi de mettre en avant des problématiques sociales telles que la question du genre dans des pays où l’idée est encore taboue. L’émission suscite donc son lot de polémiques, telles que les appels au boycott visant l’édition 2019, qui se déroulera en Israël, pour protester contre le traitement que le pays fait subir aux Palestiniens. La Turquie s’est quant à elle retirée, refusant de « diffuser à 21 heures 08 - EXpresso - Mercredi 16 janvier

Bilal Hassani, 19 ans, favori pour représenter la France à l’Eurovision. (O.C./LP)

- alors que les enfants sont encore debout - un Autrichien barbu qui porte une robe [et] qui ne croit pas aux genres ».

Changement de mentalité Le jeune Bilal Hassani, pressenti pour représenter la France à Tel-Aviv en mai, a attiré l’attention des médias en raison de son homosexualité revendiquée ainsi que de son goût pour le maquillage et les tenues bariolées. La chanteuse israélienne Dana, transexuelle, avait remporté la compétition en 1998, ouvrant la voie à de nombreux autres artistes LGBT+, si bien que certains journalistes britanniques ont qualifié la compétition de « coupe du monde de l’homosexualité ». Selon Paul Jordan, auteur d’une thèse sur l’Eurovision, « la compétition n’entérine peutêtre pas un changement dans les mentalités, mais elle introduit le débat dans l’espace pu-

blic. Or le débat est la première étape vers un changement ». Par ailleurs, Paul Jordan réfute la théorie d’un « vote de bloc », selon lequel les voix (issues pour moitié d’un jury de professionnels du milieu de la musique, et pour moitié du public de chaque pays) seraient guidées par des impératifs diplomatiques bien plus que par les performances des candidats. « L’Europe qu’on voit représentée à l’Eurovision est une version idéalisée. Mais elle permet de fédérer », assure-t-il. Comme beaucoup, une image le fait rêver : celle d’une nuit où des millions de spectateurs (186 l’an passé, dont 5 millions de Français) communient devant le même spectacle. o Nicolas Celnik


Sport FOOTBALL Les équipes iranienne et irakienne doivent s’affronter ce soir

Une Coupe d’Asie des nations très diplomatique n La compétition a débuté

samedi dernier aux Emirats arabes Unis. Très peu suivie par les Français, elle revêt pourtant d’importants enjeux géopolitiques. Le sport fait parfois des miracles. C’est ce que rappelle le huitième de finale de la Coupe d’Asie des nations de football qui opposera ce soir à 17h l’Iran à l’Irak. Après une guerre meurtrière de 1980 à 1988, le chef de la diplomatie iranienne s’était rendu pour la première fois chez son voisin depuis la fin du conflit à l’occasion de cette compétition en 2000. À cette époque, les équipes participantes étaient au nombre de 16. Mais cette 17ème édition de la coupe a choisi de faire jouer 24 sélections asiatiques, ouverture qui permet au Kirghizistan, aux Philippines mais aussi au Yémen d’y concourir pour la première fois. En proie à une guerre civile depuis 2014, ce dernier n’a vu aucun match de sa sélection se jouer à l’intérieur de ses

L’équipe du Yémen a été battue 5-0 par l’équipe de l’Iran lundi 07 janvier dernier. (eremnews) frontières. Le peuple suit cependant avec attention le parcours de leur équipe nationale, constituée de joueurs issus de différents camps du conflit. Si l’équipe est déjà éliminée de la compétition après ses défaites contre l’Iran et l’Irak, sa participation a constitué une brève échappatoire pour la population yéménite.

HANDBALL Match France-Allemagne

L’Allemagne, l’autre pays du hand

E

ncore invaincus, les Français ont rencontré l’Allemagne hier soir à Berlin, pays organisateur de la Coupe du monde de handball. Il s’agissait de leur quatrième match dans la compétition après trois succès dont un contre la Corée la veille (31-23). Alors que la France domine le monde du handball (quatre victoires en championnat du monde depuis 2009), les Allemands étaient les outsiders de ce match selon les pronostiques des bookmakers, avec une dernière victoire au niveau mondial en 2007. Avec 830 000 licenciés en 2001, le handball reste encore une discipline majeure en Allemagne. C’est pourtant bien la France qui règne sans partage aujourd’hui avec seulement 549 295 licenciés en 2017. Si les Allemands le considèrent comme leurs sports favoris et que La Bundesliga est

L’équipe de France vise un nouveau titre de champion du monde (T.A./AFP)

considérée comme la ligue la plus compétitive des ligues professionnelles dans le monde, le handball en France est le deuxième sport collectif du pays derrière le football. C’est d’ailleurs aussi le sport collectif pour lequel la France est la plus titrée et la seule activité sportive française où la France est championne du monde chez les hommes comme chez les femmes. o Eloi Thiboud

Une compétition sous haute-tension Faute de pouvoir s’entraîner dans leur propre pays, les joueurs avaient dû se rendre au Qatar pour effectuer un stage de préparation. Un voyage empêché par l’Arabie Saoudite, qui accuse depuis 2017 son voisin qatari de financer des mouvements ter-

en bref

roristes et d’être trop proche de l’Iran. En conséquence, ses frontières et celles de ses pays alliés lui sont fermées, y compris celle des Émirats arabes unis. Un comble pour le pays qui accueille tous les matchs de cette compétition asiatique. À ce sujet, le président de la Fifa Gianna Infantino s’était montré plutôt optimiste en déclarant que « le football est peut-être un moyen de construire des ponts et faire des miracles ». Pourtant, la tension reste intense. Le pays organisateur aurait en effet empêché à Saoud al-Mahannadi, le vice-président de la Fédération qatarienne de football, d’entrer sur son territoire pour le début de la compétition. Toutes deux qualifiées pour les huitième de finale, les sélections saoudiennes et qataris devront cependant se rencontrer dans un match sous haute tension le 17 janvier prochain. Les spectateurs risquent donc de retenir leur souffle jusqu’au coup de sifflet final. o Julie Radix

Une nouvelle école de pilotage

Petr Cech à la retraite en fin de saison

L’ancien champion du monde canadien de F1 Jacques Villeneuve vient de lancer une école « Feed Racing ». La structure vise à aider les jeunes espoirs, de 14 à 20 ans à émerger. « Cela me tracassait de voir tant de talents sans ne pas pouvoir venir dans le sport auto par manque de financement », explique-t-il.

n Après 20 années en tant que joueur professionnel, le gardien international tchèque Petr Cech, 36 ans, a annoncé son départ à la retraite. « J’ai l’impression d’avoir atteint tous mes objectifs », a déclaré le gardien d’Arsenal, reconnaissable au casque noir qu’il porte depuis une fracture du crâne en 2006.

n

La SuperCoupe d’Italie agitée par les polémiques n L’événement devait être

une rencontre d’anthologie, organisée en Arabie Saoudite, opposant la Juventus de Cristiano Ronaldo et l’AC Milan de Gonzalo Higuain. Le spectacle risque d’être gâché : les restrictions imposées aux femmes et les tensions politiques liées à d’assassinat de Jamal Khashoggi ont déjà entraîné plusieurs appels au boycott.

Mercredi 16 janvier- Expresso - 09


Expresso

16 01 2019

# 06

portrait Laurent Berger, patron de la CFDT et débatteur convaincu

En croisade contre le populisme n C’est lui qui a soufflé au

par les manifestants, le syndicaliste récuse toute violence. Son visage se ferme. « La violence fracture et je la condamne », assène-t-il, tranchant. Le cédétiste se dit inquiet pour la démocratie. Il dénonce les forces extrémistes, dont le Rassemblement national qui gravite autour du mouvement des gilets jaunes et se saisit du mal-être social comme faire valoir.

président l’idée du grand débat national. Inquiet pour la démocratie, le patron de la CFDT, éconduit au début du quinquennat, défend la voie du dialogue.

L

e lieu de l’entrevue est stratégique. Le café Varenne, dans le 7e arrondissement de Paris, à la croisée de tous les ministères. Parce que l’emploi du temps du numéro un de la CFDT est quadrillé. Avant notre rencontre [lundi 14 janvier], Laurent Berger assistait, à quelques pas de là, aux vœux de la ministre du Travail. Plus tôt, il était l’invité de la matinale de CNEWS. Ce soir, il sera sur Public Sénat après avoir vu les députés LREM à l’Assemblée. Pressé donc, il court à droite à gauche, en costume parfois cravate, sans cesse à la recherche du dialogue. Le dialogue comme antidote au blocage. Justice sociale S’il y en a pourtant un qu’il peine à interpeller, c’est bien le chef de l’Etat. Habitué à être un interlocuteur privilégié sous le quinquennat Hollande, le leader de la CFDT est, avec la présidence Macron, relégué sur le banc de touche. Une « gestion du pouvoir verticale » qu’il critique vertement. « Le président de la République a fauté en essayant d’instaurer un rapport direct au peuple et se retrouve aujourd’hui face à sa colère et à du ressenti-

Laurent Berger, prône la négociation plutôt que l’opposition. (Boris Allin/Hans Lucas) ment à l’égard de sa personne », déplore-t-il sans élever la voix. Un autre aurait baissé les bras, pas lui. Le grand débat national, c’est son idée. Il l’a soufflé à Emmanuel Macron pour

tenter de sortir de l’impasse dans laquelle se trouve le pays depuis que le mouvement des « gilets jaunes » a pris racine en novembre dernier. S’il comprend le besoin de justice sociale clamé

« Grenelle du pouvoir de vivre » A l’heure où le pays flirte avec le populisme, Laurent Berger souhaite incarner la raison. La période ne s’y prête guère. Les syndicats sont contestés comme tous les corps intermédiaires. Il veut néanmoins y croire et invoque « le mouvement de transformation » qu’il tente d’insuffler depuis qu’il est aux commandes de la CFDT en 2012. Rodé, il use des mêmes éléments de langage pour répondre aux mêmes questions des journalistes. Son leitmotiv du moment : « la mise en place d’un Grenelle du pouvoir de vivre » à l’issue du grand débat national. Il réunirait les partenaires sociaux et les élus locaux « pour construire ensemble le compromis qui permettrait de sortir de la situation ». C’est sur cette ligne réformiste qu’il a été réélu pour la troisième fois l’an dernier à la tête de la CFDT, devenue le premier syndicat de France. Une victoire sur laquelle il s’appuie pour défendre envers et contre tout la vertu de la négociation. o Valentin Cebron

expresso insolite Le mousseux des abysses

Make the burger great again

Le retour des aristochats

n C’est une cuvée qui ne manque pas

n Le shutdown ayant mis au chômage technique les cuisiniers de la maison Blanche, Donald Trump a commandé plus de 300 burgers ainsi que des pizzas à plusieurs marques de fast food lors de la venue des champions nationaux universitaires de football américain, les Clemson University Tigers. Et en prime, c’est lui qui a tenu à payer ce repas, précise un communiqué.

n Les prix de l’immobilier explosent à

de piquant. Piero Lugano, fondateur de la maison Bisson, a une méthode particulière pour faire prendre de l’âge à ses bouteilles : il les plonge dans les profondeurs marines. Chaque année, il engage des plongeurs qui remontent ses bouteilles à la surface, depuis sa cave à vin cachée dans la mer sur la côte italienne en Ligurie.

10 - Expresso - Vendredi 12 janvier

San José, il est de plus en plus difficile de trouver un logement salubre pour les familles les plus modestes. Or pour 1.500 dollars, Tina et Louise ont trouvé un studio de 37 m2 avec salle de bain, canapé et télévision. Jusqu’ici rien d’étrange. C’était avant que l’on apprenne qu’il s’agit de deux chats, heureux amis d’un propriétaire fortunée.


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