HISTOIRE DE LA RECHERCHE AGRICOLE EN AFRIQUE TROPICALE FRANCOPHONE par René Tourte, agronome tropica

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triple par rapport aux rendements traditionnels. Des résultats comparables sont obtenus sur les tubercules, notamment sur manioc grâce aux variétés résistantes aux maladies et aux apports fertilisants. S’agissant des cultures oléagineuses, arachide et palmier à huile, elles connaissent une forte progression : la première grâce aux variétés sélectionnées, à l’engrais, à la mécanisation attelée, à une commercialisation organisée (des quasi-records de production sont obtenus en fin de période) ; le second par la sélection, la fertilisation, l’organisation des traitements artisanal et industriel des récoltes. Ces résultats préludent à l’essor des après-indépendances. En culture cotonnière les remarquables travaux d’amélioration génétique, de protection phytosanitaire, de conduite agronomique, s’ils permettent déjà un triplement de la production au cours de la période 1945–1960 dans l’ensemble franco-africain, préparent surtout l’extraordinaire envolée de la production cotonnière que connaîtront, en fin de XXème siècle, la plupart des pays de savanes subsahariennes. L’élément le plus déterminant d’un tel bouleversement économique est sans doute la très forte priorité donnée, dès les années 1950, par la recherche et les sociétés de développement associées, au cotonnier pluvial, et au pari très confiant fait alors par ses promoteurs sur les grandes capacités de l’exploitation familiale à relever de tels défis, face auxquels de grands projets hydro-agricoles sont, dans les mêmes temps, amenés à renoncer. Dans le domaine fruitier les travaux de la recherche, le dynamisme des planteurs, d’abord expatriés puis de plus en plus nationaux (rapidement majoritaires), permettent à la banane-dessert de différentes provenances variétales (Canaries, Guadeloupe, Malaisie) de consolider sa présence sur le continent, puis d’occuper une place économique de premier plan en Guinée, Côte d’Ivoire, Cameroun, prélude à des expansions de grande ampleur après les indépendances. • La caféiculture connaît un essor assez comparable à celui du bananier. Des plantations européennes relancées, des exploitations familiales multipliées, les variétés Robusta assurent l’essentiel de cette progression en Guinée, Côte d’Ivoire et Madagascar, l’Arabica n’intervenant guère, mais remarquablement, qu’au Cameroun. Les travaux de la recherche permettent d’écarter assez rapidement, par lutte phytosanitaire ou substitution variétale, les graves menaces liées aux champignons pathogènes de la rouille et de la trachéomycose, et la production caféière est doublée, voire quadruplée au cours de cette période 1945–1960. Quant à la cacaoculture engagée dans les pays du golfe de Guinée dès le début du XXème siècle, elle poursuit dans les mêmes temps son essor de fort prometteuse façon, surtout en Côte d’Ivoire, au Cameroun et à Madagascar. Amélioration génétique des variétés cultivées, protection phytosanitaire efficace, apportées par la recherche et les services techniques d’appui, permettent en effet un fort accroissement d’une production essentiellement assurée par des planteurs autochtones dans leurs exploitations familiales. Leur dynamisme fera d’ailleurs qu’en 1975 la Côte d’Ivoire deviendra le premier exportateur de cacao d’Afrique, avant d’être le premier producteur mondial. • Dans le domaine de l’élevage, secteur vital des économies des pays sahélosoudaniens, la période 1945–1960 voit s’accroître considérablement l’efficacité de la lutte contre les grandes épizooties, grâce à la mise au point par la recherche des méthodes de prophylaxie ou d’éradication et à des campagnes de détection et vaccination par des services et équipes d’intervention bien organisés. Une avancée subséquente, mais néanmoins décisive, est une incontestable « réhabilitation » aux yeux de l’Administration de l’élevage nomade dont les effectifs et mouvements n’entrent que difficilement dans ses registres et schémas de contrôle et gestion. Le résultat global de cette évolution technique et sociopolitique, auxquels s’ajoutent des avancées zootechniques en matière d’alimentation et d’utilisation des animaux, est une très importante progression des cheptels, de 50 à 100%, chez les principales espèces domestiques, en 19


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