FIOR di BARBA. La barbe dans l'Art du XVIe au XXIe siècle, entre Sacré et Profane.

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La barbe de l’entrepreneur, politique et socialiste, Gregorio Aghini, se présente en miroir d’un rôle social précis et de ses conventions dans le buste en bronze de Arrigo Minerbi (Ferrare, 1881 – Padoue, 1960) daté de 1927 (fig.29)146 . Chez le peintre futuriste Emilio Notte (fig.38)147, la barbe inculte et très longue148 devient un indicateur de vie consacrée à la spiritualité et à l’Art, tout comme chez le sculpteur Vincenzo Gemito (fig.36)149 photographié nu, vêtu de sa longue barbe aux accents d’ascète médiéval150. Arrivés au seuil du XXe siècle, les vicissitudes de la barbe se compliquent ultérieurement, peut-être à cause de l’accélération des changements historiques et sociaux. Sans aucune prétention d’élaborer ici des analyses exhaustives sociales et ethnographiques, dont nous regrettons par ailleurs l’absence, nous souhaiterions tout de même indiquer quelques suggestions finales sur les changements auxquels l’honneur du menton a dû se heurter jusqu’à nos jours. L’arrivée de la photographie et du cinéma ont bien entendu marqué de façon significative les changements de forme de la barbe. Les acteurs et les personnages célèbres dictent, aujourd’hui encore, les règles de la mode, jouant ainsi le rôle qui était autrefois incarné par les souverains. Voltaire en son temps signalait déjà ce fait dans son encyclopédie151. Les moustaches de Clark Gable ou Charlie Chaplin152 et, d’une manière plus générale, les visages rasés des stars de cinéma des années

Arrigo Minerbi, Buste de Grégoire Aghini (Finale Emilia (Mo), 1856 – Rome, 1945), bronze, 53 x 44 cm; daté et signé: AMinerbi 1927 .

146

Mimmo Jodice, Emilio Notte (Ceglie Messapica, 1891 – Naples, 1982), 1980, photographie, 29,8 X 20,2 cm.

147

Cfr. P. Zanker, La maschera di Socrate: l’immagine dell’intellettuale nell’arte antica, Torino 1997.

148

Mimmo Jodice, Vincenzo Gemito, 1983, Cliché sur verre de Ferdinando Lembo, 1929, 24 X 18 cm.

149

Cfr. G. Bormolini, La barba di Aronne. I capelli lunghi e la barba nella vita religiosa, Firenze 2011, pp. 88-94.

150

« Les Occidentaux ont presque toujours changé d’habit, et, si on l’ose, dire de menton. On porta des moustaches sous Louis XIV jusques vers l’année 1672. Sous Louis XIII c’était une petite barbe en pointe. Henri IV la portait quarrée. Charles-Quint, Jules II, François I remirent en honneur à leurs cours la large barbe, qui était depuis longtems passée de mode. Les gens de robe alors ; par gravité, et par respect pour les usages de leurs pères, se fesaient raser, tandis que les courtisans, en pourpoint et en petit manteau, portaient la barbe la plus longue qu’ils pouvaient. Les Rois alors, quand ils voulaient envoyer un homme de robe en ambassade, priaient ses confrères de souffrir qu’il laissat croitre sa barbe, sans qu’on se moquait de lui dans la chambre des comptes ou des enquêtes » M. de Voltaire, Dictionnaire philosophique, Amsterdam 1789, II, pp. 295-296.

151

L. Kybalovà, O Herbenovà, M. Labarovà, Enciclopedia illustrata della moda, ed. it. par G. Malossi, Milano 2002, pp. 391.

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