SUR LES TRACES DES DRUIDES
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lieux surprenants à découvrir en France
Bernard Riolieux surprenants à découvrir en France
Bernard RioLugdunum – Musée et théâtres romains 17, rue Cléberg 69005 Lyon
Tél. : 04 72 38 49 30
Mail : contact.lugdunum@ grandlyon.com
https://lugdunum.grandlyon.com/fr
Le musée et les théâtres occupent les pentes de la colline de Fourvière, sur les lieux mêmes de la fondation de la ville romaine de Lugdunum en 43 av. J.-C.
Le musée se fond dans le paysage d’un site archéologique unique, composé de deux monuments majeurs de la cité de Lugdunum : un théâtre et un odéon, tous deux intégrés au périmètre classé Patrimoine mondial de l’Unesco.
Lugdunum possède une des plus riches collections archéologiques de France, qui s’expose sur une surface de 4 000 m².
En novembre 1897, Alphonse Roux ne se doutait pas qu’en exhumant des débris métalliques de son champ de Verpoix à Coligny, dans l’Ain, il allait révolutionner l’épigraphie gauloise. Heureusement, il eut la présence d’esprit d’informer la mairie de Coligny de sa trouvaille : dans ce qui semblait être un reliquat de hotte, enfoui à une trentaine de centimètres sous terre, on a retrouvé 550 fragments de bronze. C’est ainsi que Paul Dissard, conservateur des musées de Lyon, récupéra les morceaux du calendrier gaulois de Coligny ainsi que les débris d’une statue en bronze d’une taille de 1,74 mètre, tous deux aujourd’hui exposés au musée Lugdunum, à Fourvière. La mairie de Coligny conserve des copies de ces deux découvertes majeures de l’archéologie gauloise.
Paul Dissard effectua le minutieux travail d’assemblage des 400 morceaux de la statue, datée du début du iie siècle ap. J.-C., et représentant un jeune dieu nu, glabre et chevelu, levant la main droite. Sur le sommet du crâne, une bande lisse permettait de fixer un casque (disparu). Le dieu fut d’abord identifié à Mars, avant d’être considéré comme une représentation du dieu gaulois Lug. Il devait tenir dans sa main droite une lance, aujourd’hui disparue, ce qui corrobore la qualification de Lug au long bras, et explique la localisation de l’exhumation, voisine de l’antique route menant à Lugdunum, l’ancien nom de Lyon.
Le calendrier, recomposé aux deux tiers grâce aux 149 fragments en bronze retrouvés, a la forme d’une plaque rectangulaire de 1,48 mètre sur 0,80 mètre.
Concrètement, le calendrier est organisé en seize colonnes. Chacune contient quatre mois, sauf la première et la neuvième qui n’en contiennent que trois à cause des mois intercalaires occupant plus de place. À chaque jour correspond un trou, où l’on plaçait certainement une goupille pour indiquer la date.
Le mot sonnocingos, qui indique la course du soleil, introduit chacun des mois intercalaires. La division par mois, elle, concorde avec les phases de lunaison. Le calendrier gaulois concilie l’année civile religieuse et la course du soleil, en utilisant le lustre comme le cycle supérieur de l’année.
Ce calendrier luni-solaire confirme le texte de Pline, qui écrivait au sujet des Gaulois dans son Histoire naturelle : C’est par la lune qu’ils règlent le début de leurs mois et de leurs années, et aussi celui de leurs siècles au bout de trente ans.
César de son côté écrit dans la Guerre des Gaules : Les Gaulois comptent le temps non par le nombre des jours mais par celui des nuits. Ils placent les anniversaires, les commencements des mois et des années de telle façon que le jour fait suite à la nuit.
Les mois intercalaires figurant dans le calendrier de Coligny permettent ainsi de rétablir la concordance avec la marche du soleil. Les mois sont composés de trente jours (avec les mentions mat : faste, et anmat : néfaste) ou bien de vingt-neuf ou vingt-huit jours, selon les années. L’année est partagée en deux grandes saisons, l’été et l’hiver, avec des subdivisions, le printemps et l’automne. Les deux semestres sont articulés autour des dates du 1er novembre et du 1er mai, avec les dates médianes du 1er février et du 1er août.
Riche d’environ 600 mots, le calendrier de Coligny représente la plus longue inscription archéologique utilisant l’alphabet latin pour retranscrire une langue gauloise. C’est donc une source de connaissance inestimable. Parmi les termes inscrits, on relève des mentions relatives à des fêtes et des rites, comme le terme gaulois samonios, que l’on peut rapprocher du Samain irlandais. Le calendrier confirme donc une même manière de mesurer le temps, ainsi que la connaissance des Celtes en astronomie, ce que Pomponius Mela attestait au ier siècle :
Les druides prétendent connaître la grandeur et la forme de la terre et du monde, les mouvements du ciel et des astres.
Dans un ouvrage intitulé De fluviis, dont l’auteur ou les auteurs sont difficilement identifiables avec certitude, on lit le paragraphe suivant, évoquant la fondation de la ville qui est aujourd’hui Lyon : Près de l’Arar se trouve le mont Lugdunus, qui changea de nom pour la raison que voici : Momoros et Atepomaros, chassés par Seroneus, vinrent sur cette colline, suivant l’ordre d’un oracle pour y bâtir une ville. On creusait des fossés pour les fondations quand tout à coup apparurent des corbeaux qui, volant çà et là, couvrirent les arbres des alentours. Momoros, qui était habile dans la science des augures, appela la ville nouvelle Lugdunum. Car dans leur langue, le corbeau se nomme lougos, et un lieu élevé, dounon, ainsi que nous l’apprend Clitophon au livre treizième des fondations.
Le commentateur s’est fourvoyé car Lugdunum doit son nom au dieu Lug et non aux corbeaux. La cité lyonnaise partage cette étymologie et ce patronage avec Laon dans l’Aisne, ou Loudun dans la Vienne. La fondation de Lyon, où se réunissait le Conseil des Gaules, est préromaine et
fait référence au dieu solaire gaulois Lugus, équivalent de l’irlandais Lugh et du gallois Lleu, dieu polytechnicien, inventeur, praticien de tous les arts, et dont la fête, Lugnasad, était célébrée au 1 er août. Devenue galloromaine, la cité lyonnaise substitua le culte d’Auguste à celui de son fondateur. La légende n’en demeure pas moins intéressante car d’une part on y cite le nom d’Atepomaros, littéralement « très grand cavalier », qui est un surnom de Lug, et d’autre part les corbeaux interviennent dans le rituel comme des animaux oraculaires. Tite-Live, dans son Histoire romaine, met en scène des corbeaux lors d’un épisode de la guerre du Latium :
Un Gaulois, s’avança, remarquable de taille et par son armure. De sa lance, il heurte son bouclier, impose silence, et provoque, par interprète, un des Romains à combattre avec lui. Il y avait là un tribun militaire, un jeune homme, Marcus Valerius, qui s’estima non moins digne de cet honneur que Manlius. Il demande et prend les ordres du consul, et s’avance hors des rangs avec ses armes. L’intervention des dieux dans cette lutte fit perdre
à l’homme une part de sa gloire. Déjà en effet le Romain était aux prises, quand soudain un corbeau se percha sur son casque, faisant face à l’ennemi, ce qui parut d’abord un augure envoyé du ciel ; le tribun l’accepte avec joie, puis il prie, le dieu ou la déesse qui lui envoie cet heureux message, de lui être favorable et propice. Chose merveilleuse, non seulement l’oiseau demeure au lieu qu’il a choisi, mais, chaque fois que la lutte recommence, se soulevant de ses ailes, il attaque du bec et des ongles le visage et les yeux de l’ennemi, qui, tremblant enfin à la vue d’un tel prodige, les yeux et l’esprit troublés tout ensemble, tombe égorgé par Valerius : le corbeau disparaît alors, emporté vers l’Orient.
Ce combat mythique pourrait être rapproché d’un autre duel, rapporté par la mythologie irlandaise cette fois, celui du guerrier Cuchulainn et de la déesse Morrigan. Le corbeau ou la corneille est une des formes allégoriques de la déesse, qui prophétise et annonce la destinée. Que ce soit dans la fondation de Lugdunum ou dans le duel entre le Gaulois et le Romain, l’oiseau lougos, noir et brillant, annonce ce qui doit être et qui sera. L’observation des corbeaux et leur intervention sont souvent liées à la mort en raison des habitudes nécrophages des oiseaux sur le champ de bataille, mais l’oiseau possède aussi son pendant dans les
rituels de guérison, ainsi est-il représenté sur un bas-relief du sanctuaire de Mavilly, associé à un rituel de guérison d’un homme aveugle ! L’oraculaire et l’oculaire vont ici de pair.
Une légende de la mythologie celtique gauloise rapporte que deux frères, un druide nommé Momoros et un roi nommé Atepomaros, seraient les fondateurs de la ville de Lyon. Alors qu’ils entreprenaient la construction de la ville, à flanc de colline, leur zone de travail fut envahie par des corbeaux. Momoros, y voyant un présage, aurait donné à la ville le nom de Lugdunum, qui est effectivement l’ancien nom de Lyon, et que l’on pourrait traduire par « montagne aux corbeaux ».
Hôtel Cabu, musée d’Histoire et d’Archéologie
Hôtel Cabu
1, square Abbé-Desnoyers 45000 Orléans
Tél. : 02 38 79 25 60
Le trésor de Neuvy-en-Sullias est un ensemble d’objets en bronze de l’époque gallo-romaine, datés grosso modo entre le ier siècle av. J.-C. et le ier siècle ap. J.-C. Il est remarquable à la fois par la quantité et par la qualité des objets. Sur la trentaine d’objets aujourd’hui connus, on trouve des statuettes d’animaux, des figures humaines et des représentations de divinités. Les « stars » du trésor sont un grand cheval et une danseuse longiligne. Les pièces sont conservées au musée de l’hôtel Cabu, à Orléans.
C’est le 27 mai 1861 que fut découvert l’un des plus étonnants trésors archéologiques, à Neuvy-en-Sulias, dans le Loiret. Des terrassiers mirent à jour un lot de statuettes en bronze, cachées derrière un mur de briques et pierres sèches dans une carrière au lieu-dit Mothois, situé à l’ouest du bourg. Cette collection de bronzes déposés dans leur cachette au iiie siècle ap. J.-C. représentait des statuettes d’inspiration à la fois gauloise et gallo-romaine. C’est ainsi que Bacchus figurait à côté d’une danseuse et d’un danseur gaulois reconnaissable à ses braies et à la saie, que le dieu gaulois Rudiobus, assimilé à Mars, était représenté par un cheval processionnel fixé sur un brancard, tandis qu’un cerf en majesté et un sanglier à l’échine hérissée s’imposaient comme les plus belles pièces d’un bestiaire exceptionnel aujourd’hui conservé et exposé au musée d’Orléans.
La cachette avait probablement été réalisée à la hâte par un bronzier, dénommé Scuto, dont la signature figure sur une statuette. Une autre hypothèse serait que ce mobilier provienne des offrandes du temple des Carnutes, qui se situait sur l’ancienne voie menant d’Orléans à Sancerre. La date de l’inhumation du trésor a été estimée à la fin du iiie siècle, période de troubles dus aux invasions germaniques. Fernand Benoît a écrit que ces œuvres « d’un style évolué révèlent la même libération des formes conventionnelles et une recherche de réalisme qui appartient au génie gaulois1 ».
L’Historia Brittonum est un ouvrage qui traite de l’histoire de l’île de Bretagne, et notamment celle du pays de Galles. On estime difficilement les dates des textes qui le composent, qui vont du ixe siècle au xi e siècle. Il mélange des sources historiques et légendaires. Le moine Nennius est l’un des contributeurs.
Aneurin était un poète de l’île de Bretagne, qui fut certainement barde dans la cour de l’un des royaumes bretons du Nord. Il est l’auteur d’un recueil de poèmes daté du xiiie siècle, connu sous le nom de Llyfr Aneirin , ou Livre d’Aneurin .
D’abord rédigé dans une langue bretonne ancienne, le texte a été retranscrit en gallois moyen. Le manuscrit est conservé à la Bibliothèque nationale du pays de Galles, à Aberystwyth.
Dans la civilisation celtique, le sanglier est interprété non comme un symbole de la souveraineté et de la fonction guerrière qui s’y attache, mais comme un symbole sacerdotal et donc de la première fonction religieuse. Un texte gallois, le Mabinogi de Kulhwch et Olwen (voir page 25), met en scène la chasse d’un animal mythique, Twrch Trwyth, par le roi Arthur et ses chevaliers. Il s’agit en réalité de la quête de talismans magiques que porte ce sanglier. L’épreuve, qui dure neuf jours et neuf nuits, va conduire les chasseurs dans l’autre monde. Le sanglier incarnant la sagesse spirituelle est traqué par l’ours – animal totem du roi Arthur –symbolisant le pouvoir temporel. Il se retire dans la forêt où il se nourrit de glands, les fruits du chêne apparenté au dieu père.
Le sanglier mythique est également mentionné dans le livre de Nennius au ixe siècle et le livre d’Aneurin au vii e siècle. Cette chasse fantastique sous-entendrait la révolte des guerriers contre les prêtres, et l’établissement d’une société nouvelle qui finit elle aussi par disparaître avec la mort du roi Arthur.
Les représentations de sanglier, que ce soit à la période gauloise ou galloromaine, foisonnent sur les monnaies, dans la statuaire et sur les monuments.
• Au Musée d’archéologie nationale est conservée une statuette dite statuette d’Euffigneix, représentant certainement une divinité, dont le torse est entièrement occupé par l’image d’un sanglier.
• Le musée de Saint-Germainen-Laye dans les Yvelines conserve la statue d’Arduina/ Diane chevauchant un sanglier.
• À Orange dans le Vaucluse et à Narbonne dans l’Aude, l’animal figure sur les arcs de triomphe.
• Enfin le musée d’Arles dans les Bouches-du-Rhône conserve un bas-relief représentant une chasse au sanglier du IIe siècle ap. J.-C.
ZOOM SUR
Le musée Bargoin, la ville de Chamalières et les volcans d’Auvergne
Les pièces exposées au musée Bargoin, sont extraites du site archéologique du lieu-dit La-Source-des-Roches, dans la commune de Chamalières, qui a livré 10 000 fragments en bois, ce qui représenteraient environ 3 500 ex-voto entiers. Une découverte fondamentale !
Ce sanctuaire mis à jour et fouillé lors de deux campagnes entre la fin des années 1960 et le début des années 1970 est probablement le plus ancien connu dans le bassin de Clermont. Il était selon toute probabilité dédié à une divinité guérisseuse gauloise : le dieu Maponos. Il s’agissait d’un sanctuaire en plein air, sans construction autour.
Chamalières est une commune chargée d’histoire : occupée depuis l’Antiquité, sa zone est traversée par la Tirelaine. Un quartier dit « thermal » témoigne de l’ancienne présence romaine. Sur les hauteurs de la ville, la forêt du Colombier, avec son sentier de découvertes, est traversée par l’ancienne voie romaine d’Agrippa. La ville est aussi située au cœur du parc national des volcans d’Auvergne. Elle est pratiquement au pied du magnifique volcan du Puy de Dôme, qui porte en son sommet un temple gallo-romain du iie siècle, le temple de Mercure.
Musée Bargoin
Musée Bargoin
45 rue Ballainvilliers
63000 Clermont-Ferrand
Tél. : 04 43 76 25 50
Mail : accueil.museebargoin@ clermontmetropole.eu
À quelques minutes en voiture de Chamalières, on accède au volcan du Puy de Dôme, qui offre de magnifiques randonnées. ▼
Dans ce guide, nous vous proposons de partir sur les traces de la civilisation celtique en Gaule, et notamment de la religion des druides.
Partout en France, de la Provence aux Ardennes, de la Bretagne à l’Alsace, l’« ancienne religion », loin d’avoir été éradiquée par la colonisation romaine puis par le christianisme, a laissé son empreinte dans le paysage et dans l’architecture. Les druides ont aussi initié et inspiré des récits mythologiques et légendaires, des croyances et des traditions populaires.
En visitant des sites archéologiques, des espaces naturels, des monuments, des musées, voire en participant à des fêtes enracinées dans un folklore millénaire, vous découvrirez qui étaient vraiment les druides de l’Antiquité, à la fois philosophes, médecins, juristes... et tant d’autres choses encore !