Rando Sri Lanka (1/2)

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Bienvenue au Paradis ! L’île souriante, l’île resplendissante, la "larme de Bouddha", l’île des planteurs, Sri Lanka, c’est tout cela à la fois. Ce superbe voyage de deux semaines nous conduit à découvrir à pied les immenses plantations de thé des Horton Plains, à grimper le Sri Pada vénéré par les Sri Lankais ou à randonner dans les rizières en terrasses et la jungle des Knuckles Range. Le tout au milieu de réserves naturelles regorgeant de plantes médicinales, au plus près de cette nature luxuriante et de ses habitants. Mais le côté culturel n’est pas abandonné, avec la visite à pied ou à vélo des anciennes cités du Triangle culturel : la forteresse de Sigiriya, l’ancienne capitale Polonnaruwa envahie de singes langurs ou encore Kandy et le Temple de la Dent de Bouddha. J’espère que ce livre photo, complété de textes originaux, vous permettra de mieux comprendre et d’aimer cette magnifique île encore trop peu connue des européens. Fabrice Durand


en haut à gauche : le trajet du voyage (SRI52). La zone marron indique la région montagneuse (plantations de thé). ci-dessus : Kamal, notre guide accompagnateur. Les autres photos montrent les principaux moyens de locomotion de l’île, et en particulier les tukstuks (en haut à droite), dont il existe trois millions d’exemplaire en circulation au Sri Lanka)


Jour 2 : Negombo - Belihul Oya Dimanche 22 janvier. Il est 3h du matin heure locale lorsque nous atterrissons à Colombo, la capitale du Sri Lanka, après 11h de vol et une escale à Doha, au Qatar. Nous faisons connaissance avec notre guide, Kamal, qui nous accompagnera pendant ces deux semaines. Un minibus nous conduit jusqu’à Negombo, une petite station balnéaire face à l’Océan Indien, où nous finissons notre nuit. Le reste du groupe, onze personnes, arrive vers 10h. Nous partons immédiatement en bus, car cinq bonnes heures de trajet nous attendent pour aller dans la partie montagneuse au sud du pays. La distance n’est pas énorme (170 km environ), mais ici on roule à gauche et la circulation routière est très chaotique, aussi bien à cause des petites routes sinueuses que des villages embouteillés. Sans parler des dépassements des nombreux bus et camions locaux souvent très "limites". Kamal profite de ce long trajet pour nous présenter l’île, ses habitants, ses coutumes. Chacun sommeille ou admire les rizières, champs et forêts luxuriantes. Vers 17h, nous arrivons enfin au Belihul Oya Rest House, reconnaissable à son acacia géant de 30m de haut et avec un tronc de 8m de diamètre, planté au milieu de la cour principale. Nous déposons nos bagages et marchons à pied le long de la route. Nous rencontrons plusieurs jeunes filles qui n’hésitent pas à engager la conversation en anglais, des vendeurs de bananes, des paysans, et une douzaine de singes malicieux jouant avec nos objectifs photos. Nous redescendons tranquillement vers l’hôtel, non sans avoir fait le plein d’eau (120 roupies pour deux bouteilles d’1,5l, soit 90 centimes d’euros). Kamal fait son briefing général à 19h, et nous passons à table vers 20h30, avec le traditionnel curry. Le groupe, fatigué par le voyage et le décalage horaire (5h avec Paris), va se coucher vers 21h30. Dehors, on entend le bruit du ruisseau et des oiseaux tropicaux.


jour 3 : grande ballade dans les rizières Lever à 7h30. Après une première vraie douche et un bon petit-déjeuner, nous prenons tranquillement le bus pour aller 2 km plus loin. C’est là que nous faisons connaissance avec Mohidin, un guide de Bandarawela, qui va nous faire découvrir sa région pendant les cinq prochains jours, et en particulier la richesse de la flore et de la faune de l’île. Nous quittons donc la route et nous enfonçons dans la forêt primaire, qui recouvre plus de 60% du territoire sri lankais. Elle regorge de canneliers, de poivriers ainsi que d’une multitude de variétés de fleurs multicolores. Mohidin connaît par cœur leur nom, y compris en français pour certaines. Surtout, il n’a pas son pareil pour repérer dans les feuillages caméléons et autres insectes que nous n’aurions jamais vus sans son aide. A deux ou trois reprises, la forêt laisse place à de magnifiques rizières, que nous longeons ou traversons en file indienne, le plus souvent en équilibre à cause des talus de terre étroits qui les séparent. Les paysages sont toujours aussi magnifiques, surtout lorsque certaines fois on croise des dagobas blancs, où des abris de fortune en bois qui ressemblent à autant de sculptures contemporaines. Cette grande ballade est aussi l’occasion de rencontrer les villageois, dont les maisons sont disséminées dans cette forêt luxuriante. A commencer par cette femme qui nous montre comment elle fait sécher le piment rouge, base de la cuisine locale. Et le midi, nous mangeons notre cassecroûte dans le jardin d’une famille, à qui nous achetons aussi quelques mangues et bananes (amba et keselkan en cinghalais). A chaque rencontre, de magnifiques sourires et un accueil chaleureux, avec à la clé aussi de magnifiques portraits comme ceux de droite. La ballade s’achève vers 16h15 sous un soleil de plomb et une chaleur humide, au milieu des poivriers et des canneliers. Heureusement, il ne faut que quinze minutes en bus pour rejoindre notre hôtel à Haldumulla avec douche dans la chambre et piscine extérieure. Le soir, traditionnel repas de currys arrosé d’une bonne bière locale, la Lion, brassée à Nuwara Eliya.





jour 4 : Haldumulla - Udaveria Nous partons en bus vers 9h pour un court transfert de 8 km. Le trek démarre une heure plus tard. Il nous faut à peine 30 min pour rejoindre le pied de la cascade de Bambarakanda, la plus grande de l’île, et 1h de plus pour atteindre les Lanka Ella Falls, en passant par la forêt puis de hautes herbes. Après la pause, nous faisons chemin inverse, avant de bifurquer et de remonter une forte pente à travers les hautes herbes. Vers 12h30, nous retrouvons un chemin pavé, puis des marches, qui arrivent au pied d’une école, puis d’une grande place bordée de maisons jumelées aux murs multicolores mais défraîchis. Nous dérangeons à peine les quelques villageois réunis là. Leur teint est sombre : ce sont les fameux Tamouls indiens. Ils ont été déplacés en masse au début du XIXe siècle par les colons britanniques. Certains d’entre eux ont été rapatriés dans leurs pays et d’autres naturalisés suivant les termes d’un accord signé en 1964 avec l’Inde, au moment de l’indépendance. Ils représentent aujourd’hui 5% de la population de l’île, et sont concentrés dans les plantations de thé des Hautes Terres. Nous marchons désormais sur des chemins et au milieu des champs de thé. Ceux-ci font partie d’un domaine de 2 000 hectares que nous allons traverser pendant ces deux jours. A mesure que nous montons jusqu’au col et le dépassons, le brouillard monte et est de plus en plus épais, ce qui donne à notre randonnée une atmosphère magique, surtout lorsque l’on voit des cueilleuses sortir de nulle part. Nous en croisons certaines avec des sacs de thé de 15 kg sur la tête, qu’elles monnaient à 500 roupies, soit 3 €, au centre de collecte situé en contrebas. Nous arrivons enfin au col vers 15h, que nous redescendons dans une brume à couper au couteau. A 15h30, nous atteignons enfin Udaveria, à 1736m, où sont concentrés les points névralgiques de la plantation, dont une maison coloniale de plain pied où nous nous dormirons cette nuit. Le décor est suranné (salle à manger rose, parquet ciré à l’excès, fauteuils d’un autre âge, baignoire en fonte sur pieds), mais l’ambiance de la soirée sera excellente grâce aux parties de tarot en cravates et à l'arack, la liqueur de palme locale.


ci-dessus : Kerstie, Fabrice et Jean au pied des Lanka Ella Falls. à droite : nous remontons parmi les hautes herbes, avant d’atteindre les premiers champs de thÊ et les villages tamouls.


Au Sri Lanka, la plupart des cueilleurs (en général des cueilleuses) gagnent en moyenne 3$ par jour, soit deux tiers du salaire minimum d’un fonctionnaire. Ils récoltent en général une vingtaine de kilos par jour.


Les ballades à travers les champs de thé nous permettent de découvrir les employés, essentiellement d’origine tamoule, qui vivent dans de petits hameaux perdus au milieu des plantations. Ils restent toujours souriants malgré des conditions de vie spartiates.




jour 5 : de Udaveria... Après une bonne nuit de sommeil et un bon petit-déjeuner, nous reprenons notre trek à travers les plantations de thé. Nous passons devant une fabrique de thé désaffectée, des maisons de cueilleurs et une école. Après 1h45 de marche, nous arrivons à un petit col, où le brouillard commence à se lever. Désormais, nous redescendons entre les hautes herbes et les forêts de sapins et d’eucalyptus, dont les branches se dessinent mystérieusement dans la brume. Vers midi, nous arrivons à la petite gare d’Idalgashinna, perdu au milieu de la campagne environnante. La pluie commençant à tomber, nous décidons de manger ici et allons prendre le prochain train pour arriver plus rapidement à Haputale. En attendant, nous visitons l’intérieur de la gare, qui se résume à un simple couloir, mais avec un charme certain qui tient surtout à son décor d’un autre âge (photos page suivante). Le réseau ferré sri lankais, qui compte 1500 km de voies ferrées et qui a commencé à fonctionner en 1864, comporte neuf lignes partant de Colombo, dont la plus belle dessert les collines, traversant Kandy et Nuwara Eliya avant de finir à Badulla – et que nous allons prendre aujourd’hui sur un tronçon de 7 km jusqu’à Haputale. Ce voyage offre des vues spectaculaires des régions montagnardes au milieu des plantations de thé que ponctuent les chutes d’eau. A 14h, le train fait son apparition à l’horaire prévu (un miracle ici semble-til). Le tortillard s’ébranle doucement avec à son bord locaux et touristes. Certains s’assoient sur les sièges en cuir ratatinés, mais Trinh et moi préférons rester debout entre les wagons puis sur le marche pied. A cause de la brume, impossible de voir les magnifiques paysages en contrebas. Peu importe puisque le spectacle est aussi à l'intérieur du train où passent sans cesse les marchands ambulants de nourriture. On se croirait dans un documentaire « des trains pas comme les autres ». Nous arrivons à destination à 14h30 et finissons les 400 derniers mètres sur la voie. Nous nous installons au Sri Lak View Inn, un hôtel pour routards où nous avons la chance d’assister à un mariage traditionnel.




Le réseau ferroviaire compte près de 1500 km de voies. Les temps de voyage sont souvent longs et les retards fréquents, mais c’est un excellent moyen d’admirer le paysage. A gauche : la gare d’Idalgashinna.


...à Haputale A 15h, l’ensemble du groupe se reforme pour aller faire un tour en ville. Celui-ci se révèle assez rapide, car le centre-ville se résume à une longue rue en courbe poussiéreuse et encombrées, mais malgré tout bordée de petits commerces La visite du petit marché est en revanche beaucoup plus longue et intéressante, avec de larges étals des fameux « English vegetables », ces légumes apportés par les britanniques au XIXe siècle : carottes, choux, aubergines, etc. Nous profitons aussi de cette virée pour nous arrêter dans les petites cahutes et goûter les snacks locaux (mais très épicés). Nous faisons aussi le plein de gâteaux apéritifs et de noix de coco pour l’apéro que nous prendrons tous ensemble ce soir.



La petite virée en ville nous permet de de déguster les snacks locaux (toujours très épicés), et de faire de belles rencontres.



Jour 6 : de Haputale... Comme les jours précédents, nous nous levons vers 7h, et chargeons les sacs dans le minibus avant d’aller prendre le petit-déjeuner. Nous quittons Haputale vers 9h15 en passant par une petite route goudronnée tracée au milieu des plantations de thé. Au bout d’un quart d’heure nous tombons devant un joli petit temple hindou, le Kurunchi Ski Muthumari Amman Temple. Là, un prêtre et deux personnes âgées accueillent les fidèles qui viennent faire leur offrande journalière. Nous laissons aussi notre obole en échange de quelques jolies photos. Nous poursuivons notre route pendant environ une heure le long de la route puis de chemins qui serpentent le long des plantations accrochées aux collines. Au terme d’une petite montée facile nous tombons sur un groupe d’une vingtaine de femmes qui démarre la cueillette. Trinh, Barbara et moi en profitons pour les mitrailler de longues minutes. Cela les fait sourire, car elles n’ont pas l’habitude qu’on s’intéresse autant à elles. Kamal en profite également pour nous expliquer les différents processus de transformation du thé, et son histoire. Après la pause, le chemin se rétrécit et monte jusqu’à un petit col. Puis nous empruntons un sentier recouvert de pierres et de pieds de thé laissés à l’abandon avant de rejoindre une nouvelle plantation en altitude qui domine la vallée. Vers 12h45, nous nous installons sous un acacia géant qui sert aussi d’autel hindouiste. Comme hier, la lunch box est remplie de sandwiches, de petits gâteaux et d’une tranche d’ananas.


page actuelle : marche dans les chemins au milieu des champs de thé, le Kurunchi Ski Muthumari Amman Temple. pages suivantes : cueilleuses au travail. On ne cueille en général que les feuilles les plus jeunes d’une tige.






le thé à Ceylan (1/2) Aujourd’hui, le Sri Lanka est synonyme de thé. En réalité, cet arbuste ne fut introduit sur l’île qu’à la fin du XIXe siècle, lorsque les grandes plantations de café furent décimées par une maladie. Le premier thé fut cultivé en 1867 dans le domaine de Loolecondera, au sud-est de Kandy avant de s’étendre dans toute la région montagneuse du sud de l’île. Celle-ci combine en effet un climat chaud, l’altitude et des terrains en pente, trois éléments parfaits pour la culture du thé. Il existe cinq grandes régions productrices : Dimbula, Kandy, Ratnapura, Galle et surtout Nuwara Eliya, la plus haute, et donc là où le thé est le meilleur (et le plus cher). Le thé est un petit arbre qui, s'il n'était pas récolté, pourrait atteindre plusieurs mètres de haut. Mais la récolte et la taille le maintiennent à hauteur d'homme (un mètre environ) pour faciliter la cueillette. On ne cueille que les trois feuilles les plus jeunes de chaque tige. En général, on peut effectuer jusqu’à 50 récoltes par an sur un pied, et la cueillette est réalisée par les femmes de l'ethnie Tamoule, originaire du sud de l'Inde. Le salaire des cueilleurs tamouls reste très bas (environ 3 $ par jour, soit deux tiers du salaire minimum des fonctionnaires), et les cueilleurs (en général des femmes) travaillent dur pour récolter au moins 20 kg de feuilles par jour. Les cotisations de retraite obligatoires et les frais d’enterrement viennent encore grever ce maigre revenu. De sorte que nombre de familles tamoules vivent dans des logements indécents comme nous avons pu le voir lors de nos randonnées.



la culture du thé (2/2) Après la cueillette, les feuilles de thé sont « flétris » (séchés par un courant d’air dont la température est contrôlée), soit dans les anciennes fabriques à plusieurs étages (comme ici chez Mackwoods Labookellie vers nuwara eliya) où les feuilles sont étalées sur des nattes en toile de jute, soit à l’aide de machines modernes. Les feuilles, à moitié sèches, sont ensuite écrasées, ce qui déclenche le processus de fermentation. Dans la fabrication du thé, tout l’art est de déterminer le moment précis où il faut arrêter la fermentation, en chauffant le thé pour produire la feuille finale, marron-noir. Dans toute la région montagneuse, les fabriques proposent des visites guidées pour expliquer les processus de fabrication, habituellement effectués avec des machines et une technologie inchangées depuis le XIXe siècle. Les nombreuses variétés de thé sont répertoriées en fonction de la taille (du dust au leaf en passant par les fannings et les broken) et de la qualité (flowery, pekoe ou souchong). Lorsque l’on achète du thé, il suffit ainsi de regarder les initiales inscrites sur le paquet. En achetant du BPOF, on prend ainsi un mélange de Broken Pekoe Orange Fannings. Ils sont de plus en plus classés selon l’altitude : low-grown, mid-grown, high-grown. Les thé low-grown (au-dessous de 600 m) poussent rapidement, mais leur goût est médiocre. Les thés high-grown (plus de 1200 m) poussent plus lentement et sont renommés pour leur parfum subtil. Enfin, le thé mid-grown se situe entre les deux. Les thés ordinaires du commerce sont en général des mélanges. Le thé sri lankais (plus couramment appelé thé de Ceylan) jouit d’une position importante dans le négoce mondial et ses prix de ventes aux enchères dépassent de plus de 50% ceux de son principal rival et leader du marché, le thé indien. En 2008, le Sri Lanka a dépassé le Kenya pour devenir le deuxième producteur mondial de thé, avec une production annuelle de 330 millions de kilos.





... à Bandarawela Nous redécollons à 13h15, en marchant toujours au milieu des champs de thé, et dans la brume. Nous franchissons de nouveau un col pour rejoindre d’autres plantations. Mais cette fois, nous restons en hauteur et admirons ce qui ressemble à un tapitouf géant, ce tapis des années 1980 où l’on disposait des touffes de laines colorées sur un canevas – remplacées ici par des plants de thé. Nous poursuivons notre descente à pieds jusqu’au bus, qui nous conduira à Bandarawela en une vingtaine de minutes. Au total, nous avons marché 3h30 ce matin et 2h30 environ cet après-midi. Vers 16h, nous arrivons enfin au Bandarawela Hotel, un bel hôtel vénérable au charme colonial avec fauteuils confortables, chambres spacieuses et hautes de plafond, et bar cosy. Nous nous en échappons rapidement pour aller nous balader dans cette petite ville animée, perchée à 1230 mètres d’altitude. Au programme : séances photo dans les épiceries et chez le coiffeur, en passant par le temple bouddhiste et le supermarché. Sans oublier le passage amusé par la poste, où l’on affranchit encore le courrier avec un pinceau et de la colle ! Au retour, petite douche méritée dans une baignoire hors d’âge, avant de nous retrouver tous pour notre traditionnel apéro, puis le dîner (buffet) dans la grande salle coloniale, où se pressent les huiles locales. Nous finissons cette longue journée par une petite partie de billard sous le portrait de la reine Elizabeth II.



jour 7 : Bandarawella, Nuwara Eliya et Sri Pada A 8h30, nous quittons le Bandarawella Hotel et son amical portier, avec casque colonial, short large et chaussettes, pour aller nous balader au fond d’une petite vallée. Objectif : voir les petits maraîchers qui cultivent les English vegetables, légumes importés par les Anglais au XIXe siècle : carottes, choux, etc. Après avoir longé le cours d’eau puis remonté le fond de la vallée, nous arrivons devant une jolie maison à flanc de colline. C’est là qu’habite Mohidin, le guide qui nous accompagne depuis cinq jours. Autre surprise : c’est sa famille qui a préparé le déjeuner. Au menu : riz épicé au safran, aubergines, haricots verts et pommes de terre. Pas de chapati, mais des papadam, ces galettes craquantes bien huileuses. Et au dessert, des tranches d’ananas et du kiribath, un riz cuit dans du lait de coco. 13h30 : nous quittons Mohidin et prenons le bus qui nous emmène à travers les routes sinueuses jusqu’à Nuwara Eliya, charmante station d'altitude où les riches Sri Lankais aiment à venir passer le week-end dans les anciennes demeures coloniales anglaises. La ville, perchée à 1889m d’altitude, est surtout célèbre pour son thé, le meilleur de l’île. Nous en profitons donc pour faire un crochet de 10 km pour aller visiter la fabrique de thé Mackwoods Labookellie, avec dégustation gratuite du breuvage (mais visite obligatoire du magasin...). 16h45 : dernier trajet en bus de 70 km sur une petite route qui serpente au milieu d’immenses plantations de thé. Nous arrivons 3h plus tard à Nallataniya, d’où nous partirons tôt demain pour gravir l’Adam’s Peak.


la plupart des maraîchers cultivent les English vegetables, des légumes importés par les Anglais au XIXe siècle, à savoir carottes, choux, radis, etc.


Nallataniya Ce village n'est en fait que le point de départ du pèlerinage qu'effectuent de très nombreux Sri Lankais vers le sommet. Il ne compte que quelques hôtels et un poste de police, mais une multitude d’échoppes. On y trouve des marchands de sucreries (nougat, pâtes de fruits), des vendeurs de vêtements chauds (gants, bonnets), des boutiques dignes de nos fêtes foraines qui proposent des peluches multicolores et des jouets, sans oublier les marchands de fleurs artificielles aux couleurs fluo. A la tombée du jour, les derniers pèlerins affluent en bus ou en 4x4, tandis que d’autres entament déjà l’ascension. Il fait maintenant noir et, depuis la terrasse de notre hôtel, nous pouvons voir le chemin qui monte au sommet, entièrement éclairé au néon. Mais, nous devons nous coucher tôt, car la nuit sera très courte…



jour 8 : à l’assaut du Sri Pada L’Adam’s Peak (en cinghalais Sri Pada) est le troisième plus haut sommet du Sri Lanka. Conique et haut de 2 243 m, il est considéré comme un lieu saint depuis plus d'un millénaire pour les quatre grandes religions de l'île. Au sommet de la montagne, on trouve, creusée dans la roche, une cavité de presque deux mètres, censée être une empreinte de pas. Les hindouistes y voient la trace du passage de Vishnu ou de Çiva. Les musulmans pensaient que c'était la trace du pied d'Adam, lorsqu'il dût se tenir sur un pied par pénitence (Sri Pada signifie « pied sacré » en cinghalais). Enfin, les Portugais l'attribuèrent à Saint Thomas, qui avait été le premier à répandre le christianisme sur l'île. Sri Pada est également appelé Samanalakande, « la montagne aux papillons », car, à une certaine période de l'année, toujours la même et sans faillir, des millions de papillons s'envolent vers son sommet pour y mourir. Et ce, sans aucune raison scientifique avérée. La montée est entièrement aménagée avec plus de 5 300 marches, soit 1 000 mètres de dénivelé et 4h de montée. Nous nous levons donc très tôt (2h) pour faire l’ascension du pic, le but étant d'arriver au sommet pour le lever du soleil. Nous démarrons doucement au milieu des échoppes multicolores toujours ouvertes malgré l’heure matinale. Une demi-heure plus tard, nous arrivons au temple bouddhiste où des bonzes nous remettent un bracelet de laine qui nous portera chance pour la montée… en échange de quelques roupies. Après avoir fait sonner la cloche, nous voici véritablement partis pour ce pèlerinage. L’ascension commence doucement, la pente est très douce. Elle s'élève progressivement et les escaliers deviennent très raides. Nous croisons de nombreux pèlerins qui en sont déjà à la descente. Ceux qui tombent de fatigue dorment la tête sur les genoux ou dans les refuges aménagés tout au long du parcours. Nous croisons et dépassons des personnes de tous âge, dont certaines très âgées qui peinent vraiment. En tout cas, il y a beaucoup de monde, ce qui s’explique par le fait que le pèlerinage n’a lieu qu’en décembre à partir de la pleine lune et jusqu'en avril avant les premières pluies de la mousson.


C’est aux alentours de 6h, au moment du lever du soleil, que la foule qui monte devient la plus importante. Il faudra à la plupart de ces pèlerins plus d’une demi-heure pour atteindre le sommet, qui n’est pourtant distant que d’une cinquantaine de marches.


Au deux tiers du parcours, les marches sont de plus en plus raides et la foule de plus en plus dense, ce qui ralentit le pas. Le guide nous rassemble donc et nous fait passer par un chemin caché derrière les buissons. En une demi-heure, nous avons ainsi fait un demi-tour sur la montagne pour rejoindre le second itinéraire qui monte au sommet, mais cette fois-ci quasi désert. Grâce aux dernières rambardes, nous tenons notre pari et arrivons au sommet du Sri Pada pile pour 6h, après 3h30 de montée. Nous nous faufilons à travers le dédale de bâtiments et la foule énorme, enjambons les détritus, puis longeons les fondations du refuge pour assister au lever de soleil dans de bonnes conditions. En effet, juste en dessous de nous, le premier escalier que nous aurions dû suivre est complètement embouteillé par une foule énorme qui cherche à monter pendant que d’autres veulent redescendre. Il leur faudra ainsi plus d’une demi-heure pour faire les cinquante dernières marches. On comprend ainsi mieux pourquoi le guide nous a fait prendre un autre itinéraire ! Nous nous dirigeons ensuite vers un petit autel où l’on peut voir la fameuse ombre portée du pic Adam sur la campagne avoisinante. Puis nous remontons sur la grande plate-forme où est situé le temple (mais que l’on ne peut visiter après le lever du soleil). Il y a ici près de deux cent personnes. Après avoir profité de ces instants magnifiques, il est temps de redescendre par le même chemin qu’à l’aller. Au fur et à mesure de la descente, les pieds font de plus en plus mal et il devient difficile de se frayer un chemin parmi tous ces pèlerins qui redescendent du sommet dans un esprit bon enfant. Surtout, le soleil tape de plus en plus et il fait lourd. A 10h, après trois heures d’une descente éprouvante pour les genoux, nous voici revenus au niveau des échoppes multicolores. Sur la place centrale, le haut-parleur de Radio Sri Pada a repris son flot de paroles en continu, tandis que les pèlerins exténués remontent dormir dans les bus en attendant le départ. De notre côté, nous rentrons à l’hôtel prendre le petit-déjeuner et une bonne douche.





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